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MERCURE
GALAN T.
SEPTEMBRO DA
LYON
www
MV
UNI
NCV
אNIN
A PARIS ,
M. DCCXI
Avec Privilege du Roy.
MERCURE
GALAN T.
Par le Sicur Du F ***
Mois
de
Septembre.
1711.
Le prix eft 30. fols relié en veau , &
25.fols, brochez
A PARIS ,
Chez DANIEL JOLLET , au Livre
Royal, au bout du Pont S.Michel
du côté du Palais.
PIERRE RIBOU , à l'Image S. Louis,
fur le Quay des Auguftins.
GILLES LAMESLE , à l'entrée de la rue
du Foin , du côté de la ruë
Saint Jacques.
MERCURE
GALANT
BE
LA
VILLE
LYON
I. PARTIE
*/893 *
Septembre 711
LITTERATURE.
E
N annonçant dans
le Mercure dernier
un Livre nouveau , j'ay
promis d'en parler ce
A ij
MERCURE
mois - cy , c'eſt un Livre
tres- varié , rempli d'érudition
, & capable de vous
Kremettre
dans l'idée les
regles de la compoſition
& du bon gouft.
D'abord on y voit une .
Traduction en vers de l'Art
poëtique d'Horace c'eſt ce
qui fert de titre au Livre ,
il y a enfuite quantité de
Notes curieufes , les unes
de l'Autheur , & les autres
citées de plufieurs Grecs
& Latins, dont voicy quel-
"ques-unes, pri
L'Art poëtique d'HOI.
PARTIE.
RACE eft une Lettre
qu'il écrit aux PISONS.
Čes PISONS eftoient le
frere & les neveux de Calpurnie
Epouſe de Jules Cefar
, & fille de Lucius Pi
fon.
La premiere regle de
l'éloquence , c'eft d'eftre
clair ; & la feconde , de
n'eftre pas diffus.
MARTIAL dit que
les ouvrages où il n'y a
rien à retrancher , ne font
jamais trop longs.
La lime,dit QUINTILIEN,
doit polir & non
A iij
I
6 MERCURE
pas affoiblir , & ufer , pour
ainfi dire , un ouvrage.
J'ay veu dans un Autheur
François , travaillez
voftre ouvrage jufqu'à ce
qu'il foit au point qu'on
ne s'appercoive pas qu'il
vous a coufté beaucoup
de travail.
PROPER CE compare
l'Autheur dont le ftile
n'eft ny trop enflé ny
trop fimple , à un Marinier
qui rafe le rivage avec
un de fes avirons , & qui
fend les flots avec l'autre.
LONGIN donne pour
I. PARTIE . 7
exemple de l'enfleure ces
pensées - cy : Faire du vent
Borée fon joueur de flute ...
Et cet autre : Jupiter crache
des neiges contreles Alpes.
Exemples du vray fublime
: HOMERE peint
la Difcorde la tefte dans les
Cieux , & les pieds fur la
terre. Et quand il parle de
Neptune il dir:
Que Neptune marchant dans
les vaftes campagnes
,
Faittremblerfousfes pieds &
forefts & montagnes.
Il fait dire à AJAX qui
voit l'Armée des Grecs
I. A iiij
8 MERCURE
couverte tout à coup d'épaiffes
tenebres.
Grand Dieu chaffes la nuit
qui nous couvre les yeux,
Et combats contre nous à la
clarté des Cieux.
Caracteres differents de
poëfie traduits d'Ovide
par l'Autheur ,
Vous qui que vous soyez
Cenfeur trop fevere ,
Jugez de nos travauxfelon leur
caractere ,
C'est au Vers Heroïque à chan
ter les combats :
Quelle placey tiendroient Venus
& les appasi
La grandeur , le couroux font du
I. PARTIE.
Aile tragique:>
Mais les fujets communs regardent
le comique ,
L'Iambe libre eft propre à lancer.
fon venin ,
Soit qu'il coure tousjours, ou qu'il
boite à la fin.
Les Amour's , leurs carquois ,
l'inconftante Silvie ,
Sont les dignes fujets de la tendre
Elegie
Pour celebrer Cidippe , Homere
ny fes Vers ,
N'y doivent point paroiftre aux
yeux de l'univers.
Achile convient mal au ton de
Callimaque >
Et Thais ne doit pas imiter
Andromaque.
L'autheur dit à propos
10 MERCURE
de la force du
pathetique ,
que nous pleurons
en voyant
pleurer , que nous
rions en voyant rire , & cela
par une raiſon phifique
à
peu pres femblable
à celle
qui fait remuer les cordes
de plufieurs
inftruments
qui font dans une mefme
chambre , avec un autre
dont on touchera
fortement
les cordes montées
au mefme ton que celles
de ces autres
inftruments
quirefonneront
fans qu'on
les touche , & c. Il y a ainfà
peu prés dans tous les a
I. PARTIE. II
hommes des nerfs montez
, pour ainsi dire , au
mefme ton & c'est ce
qu'on appelle fimpathie ,
&c.
Comme nous nous fentons
capables des meſmes
maux, & des meſmes biens
que nous voyons reffentir
aux autres , nous fommes .
remuez par les mefmes
fentiments à la veuë du
bien ou du mal qui leur
arrive. 6.6
L'autheur fait plufieurs
remarques fensées fur diferents
Poëmes , anciens
& modernes.
12 MERCURE
Puifque les Poëmes font
des imitations
, dit- il , ils
doivent fans doute imiter :
mais ils ne doivent pas
imiter une action juſqu'à
violer les regles de la poëfie.
4
Corneille a tellement
imité le combat de fon
Horace , que fa piece s'eft
trouvée finie au troifiéme
Acte. Le voila fort à l'eftroit
, comment fe tirerat'il
de ce pas- là ? Il ne l'a
peu fans violer l'unité de
l'action , il eft obligé d'adjoufter
le meurtre de Ca1.
PARTIE. 13
mille
pour donner une juſte
eſtenduë à ſa Tragedie
, dans le Cid & ailleurs
il ne fort de pareils embarras
qu'en violant l'unité
du temps , ou celle du
lieu , & c.
A propos , de la maniere
dont on doit commencer
un poëme , JULES SCALIGER
donne pour exemple
d'un Exorde regulier
celuy de Lucain
, qui
dans fon poëme fur la
guerre civile , place tout
d'un coup Cefar au paffage
du Rubicon, d'où eftant
14 MERCURE
declaré ennemy de la patrie
par le Senat , il eſt forcé
d'entreprendre cette
guerre.
Un Poëte François a dir
que le vin eftoit le grand chevaldes
Poëtes. Une peau de
bouc pleine de vin eftoit
autrefois un prix que rem.
portoit le Poëte qui avoit
le mieux reüffi dans la Tragedies
en voicy la raiſon :
cette forte de poëme n'eftoit
au commencement
que des chanfons en l'honneur
de Bacchus , auquel
on facrifioit un bouc.comI.
PARTIE.
15
me animal contraire à la
vigne , on rempliffoit de
vin la peau du bouc , & on
la donnoit au Poëte.
Aprés les Notes fur
l'Art Poëtique , il y a plufieurs
petites traductions
de differentes pieces d'Ho..
race, d'Ovide , de Petrone,
& avec des Notes dont
voicy quelques-unes.
Lucille eftoit un Poëte
latin que Juvenal appelle
illuftre nourriffon d'Auronce.
Ce Poëte avoit
composé trente Satyres.
Horacedit dans fa premie16
MERCURE
re Satyre du fecond Livre;
que Lucille confioit fes
fecrets à fes Livres , qu'il
n'alloit point ailleurs décharger
fon coeur , ce qui
a fait qu'on a trouvé la vie
de ce vieillard peinte dans
fes ouvrages comme dans
un tableau.
On croiroit que les expreffions
de avoir bon nez ,
avoir le nez fin ,
nez fin , feroient
baffes &
impropres pour
exprimer
avoir l'efprit bon ,
l'efpritfubtil: mais Horace,
Perfe , & Martial l'ont annobli
en l'employant dans
ce fens. La
I. PARTIE. 17
La Comedie a pour but
de réjouir & d'inftruire ;
les mimes eftoient des
poëmes qui n'avoient pour
but que de faire rire , c'eftoit
les farces de ce tempslà.
TRT 291
Quintilien employe un
long Chapitre à traiter du
Ris , il effeftonné que paroiffant
chofe fi peu importante
, il ait quelque
fois des effets fieftonnants.
Un Ris excité à propos
peut changer l'eftat des
affaires les plus importan
res , il empefche quelque-
Septemb. 1711.1 B
18 MERCURE
fois les fuites fafcheufes de
la haine , de la colere , &c.
& fait fucceder la douceur
, la benignité , la clemence.
Par exemple , deux jeunes
Tarentis furent amenez
devant le Roy Pyrrus ,
parce que dans un repas
ils avoient eu l'infolence
de parler mal de ce Prin
ce ; voyant qu'ils ne pouvoient
nier le fait , ny fe
deffendre raifonnablement
, ils reſpondirent ,
Sire , fi la bouteille ne nous
avoitpas manqué , vous eftiez
I.
PARTIE. 19
mort , c'eftoit fait de vous. Ce
bon mot calma la colere
de leur Juge en le faiſant
rire.
Les vins de Falerne fe
gardoient fi long- temps ,
que Petrone parle de bouteilles
de ce vin bouchées
avec foin , dont les étique
tes marquoient que ce vin
avoit efté fumé fous le
Conful Opimus , cent ans
avant.
Diogenes , à propos des
fuperftitions fur les fonges,
eftoit indigné que les hom
mes fe tourmentaffent au
Bij
20 MERCURE
fujet des fonges , & donnafſent
fi peu d'attention
aux actions qu'ils faifoient
eftant éveillez .
Augufte avoit dedié
dans fon palais un Temple
, & une magnifique
Bibliotheque
à Apollon ,
où cinq Juges , du nombre
defquels eftoit Tarpa , décidoient
du merite des ouvrages
, que les Autheurs
venoient lire.
Ennius , dic Quintilien ,
eft femblable à ces bois
que leur antiquité a confacrez
, & dont les vieux
I. PARTIE. 21
arbres font plus venerables
qu'ils ne font beaux.
Les Anciens écrivoient
fur des tablettes couvertes
de cire , & ils fe fervoient
d'éguilles pointues par un
bour , & plates par l'autre ;
avec la pointe ils formoient
les caracteres , &
avec l'autre bout ils effaçoient
ce qu'ils avoient
écrit.
1 B iij
22 MERCURE
Traduction d'un Fragment
d'Ovide
.
Je le dis malgré moy , trahiffant
mes talents ,
Retenez avec foin ces avis excellents
;
Voulez - vous fuir l'amour ? que
voftre ame difcrette
Evite les accents de tout tendre
Poëte :
Callimaque aifement peut vous
rendre amoureux ›
Filetas eft pour vous un Autheur
dangereux :
Safo plus fortement m'attache à
ma maiſtreſſe ,
Le vieux Anacreon augmente
ma tendreffe.
I. PARTIE. 23
Eft- on froid, à Cinthie , en lifant
ton Amant }
Ou quelqu'un a-t- il leu Tibule
impunément ?
Des doux fons de Gallus quel
coeur peut fe deffendre ?
Et les miens n'ont-ils pas je ne
Sçay quoy de tendre ?
Martial Poëte Latin ,
eftoit né à Bilbilis , ville
de la Celtiberie en Efpagne.
Il fut intime ami de
Stella , de Silius Italicus ,
& de Pline le Jeune , qui
luy donna quelques fecours
pour regagner la patrie
, aprés avoir demeuré
trente ans à Rome , peu
24 MERGURE
eftimé apparemment pendant
la vie , il addreffe
cette Epigramme à Regule.
LA REPUTATION
des Poëtes.
Le Lecteur rarement aime un
Autheur en vie ,
A fon gré des vivants prefqu'-
aucun ne dit bien :
Qui caufe cet abus ? Regule, c'eft
l'envie stoĐỊN
Qui toujours au moderne a préferé
l'ancien.
D
213
De
I. top
25
PARTIE.
De Pompée on recherche ainf
le vieux portique ,
Ton vil Temple , Catule , eft
loué des vieillards ,
A Virgile vivant, Quintus morð
fit la nique ,
Et pour Homere en vie on ear
trop peu d'égards.
Rarement le theatre applaudit
à Menandre
Pour fa feule Corine , Ovide
eut des appas ,
Cachez- vous donc mon Livre , il
faut encore attendre
Si la gloire ne vient qu'aprés
noftre trépas.
-0.
Septemb. 1711. 1 C
26 MERCURE
Aprés toutes ces traductions
l'Autheur fait une
differtation fur les Autheurs
anciens & moder
ness , dont je donneray
quelques traits , & quelques
petits fragments de
Vers qui font tousjours
plaifir à voir raſſemblez ,
quoy qu'on les ait veus
ailleurs feparément.
a
Comme ces morceaux
détachez ne demandent
nulle liaiſon , je les garderay
pour le mois prochain
; car je n'ay plus de
I. PARTIE. 27
place dans cette partie
que pour la fuite de l'abregé
de l'Iliade qui a
efté receu avec tant de
plaifir , que j'ay prić mon
amy de donner quelques
heures à la continuation
de cet
ouvrage.
Cij
28 MERCURE
!
ABREGÉ
SUITE DE L'ABREGE
de l'Iliade,
ARGUMENT
du quatrieme Livre.
AVERTISSEMENT.
On a mis dans la fuite de
cet Extrait des cedilles ainfi
marquées
CC
ور
Elles
fignifient
dans les endroits où elles fe
trouvent , que le Poëte y fait
parler fes Heros
LEs Dieux eftant à Table
tiennent confeil fur les
I. PARTIE. 29
affaires de Troyes , vers
1. 4.
Jupiter raille Junon &
Minerve , de ce que de
grandes Déeffes comme
elles fe tiennent
à l'écart
loin des combats , pendant
que Venus qui n'aime que
les jeux & les plaiſirs , accompagne
fon favori dans
tous les perils . I met en
deliberation s'il faut rallumer
la guerre entre les
Troyens & les Grecs , ou
le's reconcilier par l'execution
du traité qu'ils ont
13
fait,,,
vers s. 19.
C iij
30 MERCURE
Cette propofition cauſe
un violent dépit aux deux
Déeffes qui préparoient les
plus grands malheurs aux
Troyens. Minerve diffimule
par prudence. Junon
éclatte , & a declaré, quelque
refolution que l'on
prenne , qu'elle ne confentira
point à la paix. ,,
vers 20. 29 .
Jupiter a reproché à
Junon la cruauté avec laquelle
elle pourſuit les
Troyens. Il fe plaint de la
violence qu'elle luy fait en
*
le forçant de luy abandon1.
PARTIE .
ner une Ville qu'il a ho
norée fur toutes les autres,
Il l'avertit qu'en revanche
, fi jamais dans fa fureur
il veut détruire quel-
•que Ville qu'elle ait prife
fous fa protection , c'est
inutilement qu'elle voudra
s'y oppoſer ,, vers 30.49.
Junon luy dit qu'il
peut , quand il voudra , difpofer
d'Argos , de Myce ,
nes , & de Sparte ; mais
qu'il n'eft pas jufte qu'elle
perde le fruit de toutes fes
peines. Que tout puiffant
qu'il eft , il doit avoir
"
I C iiij
pour
32 MERGURE
elle des égards & de la
complaifance , puifqu'elle
eft fa femme & fa foeur.
Enfin elle luy demande
qu'il ordonne à Minerve
de defcendre dans l'armée
des Troyens pour les exciter
à enfraindre le traité ;
& à infulter les Grecs .
vers 50. 67.
Jupiter " donne cet or
'dre à Minerve. ,, La Déeffe
defcend , & dans fa courfe
rapide elle paroift fous la
forme d'une exhalaiſon
qui s'allume dans l'air , &
qui fe
partage en mille
I. PARTIE. 33
feux. Ce figne qui eft veu
dans les deux armées « eft
interpreté comme un préfage
ou de la fin ou de la
continuation de la guerre.
vers 68. 85.
Minerve prend la ref
femblance de Laodocus
fils d'Antenor. Vatrouver
Pandarus fils de Lycaon.
Luy propofe « de tirer une
fleche à Menelas . L'encourage
par la gloire qu'il
aura d'avoir abbattu un fi
ર
la
grand guerrier , & par
recompenfe qu'il doit attendre
de Pâris. Elle luy
34 MERCURE
confeille de s'addreffer au
paravant à Apollon Lycien
pour le prier de diri
ger le trait. vers 86. 103 .
L'infensé Pandarus fe
laiffe perfuader. Peinture
naïve de l'action de Pandarus
, & des mesures qu'il
prend pour frapper juſte
à fon but . Son arc eftoit
(
fait des cornes d'une che
vre fauvage qu'il avoit tuée
à l'affuft ; chaque corne
avoit ſeize paumes , c'eſtà-
dire cinq pieds & quatre
pouces . ) Il promet une
Hecatombe à Apollon . Il
1.
PARTIE. 35
tire. Le trait part avec impetuofité
, perce le baudrier
, la cuiraffe & la lame
de Menelas ; entre dans la
chair fans penetrer bien
avant , ( car Minerve avoit
pris foin d'affoiblir le coup,
femblable à une mere qui
voyant dormir fon enfant ,
détourne une mouche opiniaftre
qui voudroit le piquer.
) Le fang qui coule
le long des jambes de Menelas
, comparé
à la pourpre
dont une femme de
Meonie a peint l'yvoire le
plus blanc , pour en faire
36 MERCURE
les boffetes d'un mords qui
fait l'admiration & le defir
des plus braves Cavaliers ,
mais qui eft deſtiné pour
un Roy.
vers 104. 119.
Agamemnon
eft effraié
auffi bien que Menelas.
Menelas
reprend courage
.
Agamemnon
« éclate contre
la perfidie des Troyens
.
Dit que Jupiter ne la laiffera
pas impunie . Prédit
la ruine de Troye . Il s'attendrit
, & ne peut cacher
à fon frere la crainte qu'il
a de le perdre
vers 120.
»
182 .
I. PARTIE.
37
Menelas le raffure & le
prie de ne point allarmer
les Grecs. » Agamemnon
luy dit qu'il faut appeller
s
un Medecin. " Donne or
dre à Talthybius de faire
venir Machaon fils d'Ef
culape . Le Herault obeït .
Trouve Machaon & « luy
parle . » Machaon vient .
Vifite la playe , & fucce
le fang , & y met un appareil
que le Centaure Chiron
avoit autrefois enfeigné
à Efculape, vers 183 .
219.
1. Cependant les Troyens
J
38 MERCURE
s'avancent en bataille. Les
Grecs reprennent leurs armes
, & ne refpirent plus
le
Y
que le combat . Agamemnon
laiffe fon char à Eurymedon
, avec ordre de ne
pas tenir trop éloigné.
Il parcourt à pied toute
l'armée. « Anime par fes
difcours ceux qu'il trouve
diſpoſez à bien faire ».
Reprimande les autres ,
les compare à des faons de
biche ». Arrive prés de la
Gendarmerie Cretoife , la
trouve en bon eſtat , Idomenée
à la teſte , Merion
CC
I. PARTIE.
39
à la queue, « Il loue Idomenée
, le fait reffouvenir
que dans toutes les occafions
; à la guerre , dans les
feftins , il l'a tousjours traité
avec diftinction ». Idomenée
refpond « qu'il luy
fera tousjours fidelle ».
Agamemnon continuë fon
chemin. Il trouve les deux
Ajax deja armez au milieu
de leurs bataillons
; ( ces
bataillons comparez
à des
troupeaux affemblez fous
leur pafteur , qui leur cherche
un afile contre l'orage
qu'il prévoit. Agamem-
*
40 MERCURE
ge
non «loue ces deux chefs ,
& leur dit qu'il n'a pas befoin
de les exhorter » . Il
paffe au quartier du vieux
Neftor . Le trouve qui ranfes
troupes en bataille ,
& qui encourage leurs
chefs . Noms de ces chefs.
De quelle maniere Neftor
difpofoit fa cavalerie & fon
infanterie. « Quels confeils
il donnoit à fes cava-
Sage vieillard ,
liers ".
dit Agamemnon tranfpor
té de joye , pluft aux Dieux
que vos forces refpondif
fent à voſtre grand courage
,
1. PARTIE . 41
ge, &c. » Neftor reſpond
" qu'il n'eft plus au temps
où il tua de fa main le vail.
lant Ereuthalion ; mais que
tout vieux qu'il eft on le
verra à la tefte de fes Ef
cadrons , & qu'il fera utile
au moins par fes ordres &
par fes confeils , que c'eſt
là le partage des vieillards
» . Agamemnon avance.
Trouve Peteus fils de
Meneſthée & Ulyffe qui
ne faifoient aucun mouvement
, parce que le bruit
de ce qui eftoit arrivé dans
les deux armées n'eftoit pas
Septemb. 1711 .
I DD
42 MERCURE
encore venu jufqu'à eux.
Il leur fait de fanglants
reproches de leur inaction
». « Ulyffe refpond
avec fierté
». Le Roy qui
le voit irrité , change de
ton , & « luy parle obligeamment
». Il pourſuic
fon chemin . Voit Diomede
fur fon char avec Sthelenus
fils de Capancé . Diomede
ne donnoit aucun
ordre pour le combat. Agamemnon
« luy reproche
d'avoir degeneré de la
vertu de fon pere Tydée ,
luy rappelle une occafion
cr
I.
PARTIE: 43
cr
d'éclat , où Tydée fignala
fon courage contre les
Thebains ». Diomede par
reſpect pour le Roy ne ref
pond rien.Schelenus prend
la parole & dit qu'ils ne
meritent ny l'un ny l'autre
le reproche qu'on leur fait,
fe piquent tous deux avec
raifon d'eftre plus braves
encore que leur pere .
Diomede repreſente à
Sthelenus que le Roy qui a
le principal intereft à tour
ce qui fe paffe , eft en droit
de leur parler comme il
fait. ,, Diomede en mef-
1 D ij
44 MERCURÈ
me temps faute de deffus
fon char. vers 421. 419.
On voit marcher au
combat les nombreuſes
Phalanges
des Grecs , femblables
à des flots amoncelez
par les vents. Elles
fuivent leurs chefs dans un
profond filence , pour entendre
leurs ordres . Il femble
, dit le Poëte , que cette
multitude innombrable de peuples
n'ait point de voix . Les
Troyens au contraire
comme des brebis qui bê
lent dans un grand paturage
, font un bruit confus
I
I. PARTIE.
45
qui refulte du mélange de
leurs voix & de la diverfité
des langues de toute forte
de peuples qui forment
leur armée, vers 422.438 .
Les Troyens font animez
par le Dieu Mars , &
les Grecs par la Déeffe Minerve.
Ces deux Divinitez
font fuivies de la Terreur ,
de la Fuite & de l'infatiable
Diſcorde. Image poëtique
de la Difcorde . Son
progrez. Ses effets. vers
439. 445.
Les deux armées ſe joignent,
& en viennent aux
I D iij
a
46 MERCURE
mains. Deſcription de leur
choc . Le bruit des guer
riers comparé à celuy que
font d'impetueux torrens
groffis par les pluyes. vers
446. 456.
Antiloque le premier tuë
Echepolus un des plus bra
ves Troyens. Elephenor
General des Abantes, voulant
le dépouiller de fes
armes , eft tué par Agenor.
Il fe fait en cet endroit
une cruelle boucherie des
Grecs & des Troyens qui
fe jettent les uns fur les autres
comme des loups affaI.
PARTIE.
47
mez. Simoïfius (ainſi nom,
mé parce que fa mere accoucha
de luy fur les rives
du Simoïs ) eft tué à la fleur
de fon âge par Ajax fils
de Telamon. Il tombe fur
la pouffiere comme unjeune
peuplier abbattu par le
fer d'une coignée. Antiphus
un des fils de Priam ,
veut venger la mort de Simoïfius
. Illance fon javelot
contré Ajax ; mais il
rencontre au lieu de luy
Leucus compagnon d'Ulyffe.
Leucus tombe fur le
corps de Simoïfius qu'il en48
MERCURE
Les
traifnoit . Ulyffe affligé de
cette perte , s'approche des
Troyens d'un air terrible.
Regarde autour de luy
pour chercher la victime.
il lance fon dard .
Troyens effrayez le retirent
en defordre . Le javelot
va frapper Democoon
fils naturel de Priam , &
le renverſe mort . Les Troyens
reculent. Hector luymefme
eft épouventé. Les
Grecs enflez de ces avan
tages vont chercher les
corps morts jufqu'au milieu
de la meflée pour les
entraifner.
1. PARTIE. 49
entráifner. Apollon irrité
de leur audace fe fait entendre
aux Troyens du
hautde la fortereffe d'Ilion ,
"les exhorte & les encou
rage ; leur reprefente fur
tour qu'Achille ne combat
point , Minerve de fon
cofté anime les Grecs. Piroüs
General des Thraces
tuë Diorés chefdes Epéens
aprés l'avoir bleffé d'un
coup de pierre. Thoas Ge
neral des Etoliens lance.
fon javelot contre Piroüs ,
& l'acheve de fon épée. Ils
vont le dépouiller de fes
Septemb. 1711 1
1 E.
19 MERCURE
armes , mais il en eft empefché
par les Thraces qui
tombent fur luy à coups
de piques , & l'obligent de
Tereurer. vers 457. 539.
Homere parle des exploits
de cette journée
Gomme d'un grand fujet
d'admiration pour un homme
que Minerve auroir
conduit par la main , & à
qui elle auroit fait parcou
rir fans danger tous les endroits
de la bataille. Il auroit
veu les Troyens & les
Grecs eftendus les uns prés
des autres à la mefme pla1.
PARTIE.
ce où ils avoient combattu.
·vers $39. 544•
ARGUMENT
du cinquiéme Livre. V
Sid of and
no Lasjour de cette action
Minerve augmente le cou
rage de Diomede. De fon
cafque & de fon bouclier
fortoit continuellement
un
feu femblable à celuy dé
l'estoille qui paroiſt à la fin
de l'Efté. La Déeffe pouffe
ce guerrier au milieu de la
mellée.ng
ob vers 1. 8.
Idée & Phegée tous deux
I E ij
S2 MERCURE
fils de Darés Sacrificateur
de Vulcain , pouffent leur
char contre Diomede qui
eftoit à pied. Phègée le
premier lance fon dard
contre luy fans le bleffer.
Diomede le perce de fon
javeloty & l'eftend mort
fur la place. Idée n'ayant
pas le courage de ſauver
lecorps de fon frere, prend
La frites Vulcain le couvre
d'un nuageute derobe
aux pourfuités de Diome
de, pour épargner à Darés
le chagrin de perdre fes
deux filsen un jour. Dio1.
PARTIE. 53
mede fait emmener leurs
chevaux. Les Troyens
commencent à plier. Mi
nerve pour augmenter leur
defordre,dit à Mars “ qu'il
faut laiffer combattre les
Troyens & les Grecs &
ne plus refifter aux ordres
de Jupiter. ,, Elle le retire
du combat , & le fait repo
fer fur les rives du 'Scaman¹
dre. Les Grecs.enfoncent
vers 9. 3.7. les Troyens.
Odius chef des Alizoniens
eft tué par Agamemnon.
Pheftus par Idomes
née. Scamandrius par Me.
I E iij
14 MERCURE
nelas. ( Ce Scamandrius
eftoit fort entendu dans
tout ce qui concerne la
chaffe , & avoit efté inftruit
par Minerve . ) Phes
reclus eft tué par Merion.
( Phereclus fils d'un habile
charpentier , avoit bâti les
vaiffeaux que Pâris mena
en Grece. ) Pedée fils na →
turel d'Antenor , eft tué
par Mégés. Eurypile bleffe
Hypfenor. ( Hypfenor ef
toit fils de Dolophion
qui
eftoit Sacrificateur du Scamandre.
) Vers 37.83 .
Idomenée femblable à
I. PARTI E.
St
un fleuve , qui dans fon débordement
emporte tout
ce qui s'oppofe à fon paf
fage , renverfe les batail
lons des Troyens , rien ne
luy refifte. vers 85. 94.
Pandarus , pour arrefter
fon audace , luy tire une
fléche qui luy traverſe l'épaule
droite , & croyant
l'avoir bleffé mortellement
" il s'en glorifie. ,, Schelenus
, ( " à la priere de Diol
mede ,, ) luy ofte cette flé
che. Diomede prie Pallas
" de luy prefter fon fez
cours pour fe venger de
E iiij I
36 MERCURE
Pandarus , & le punir de
fon orgueil ,, Pallas l'exauce.
Luy redonne toutes
fes forces & toute/fa
legereté. Elle luy dit ,
qu'il peut aller hardiment
contre les Troyens ; qu'elle
a diffipé le nuage qui
l'auroit , empefché de difcerner
les Dieux d'avec les
hommes qu'il fe garde
bien de combattre contre
les Immortels , fi ce n'eft
contre Venus fur qui elle
luy permet de tirer.
vers 95. 132 .
Minerve fe retire . DioI.
PARTIE.
57
"
mede qui fe fent trois fois
plus fort qu'à l'ordinaire
,
fe jette au milieu des ennemis
. Eft comparé à un
lion qu'un berger a bleſſé ,
& qui devenu plus furieux,
fe lance fur les brebis effrayées
qui fe tapiffent les
unes fous les autres pendant
que le berger fe cache.
Diomede tue d'abord
Aftynoüs
& Hypenor .
Enfuite Abas & Poluïde ,
tous deux fils du vieux Eurydamas
qui eftoir Interprete
des fonges . Il marche
vers Thoon & Xanthe
$ 8 MERCURE
enfans de Phenops , prive
ce pere malheureux de fes
deux fils à la fois , & luy
laiffe la douleur de voir que
fa fucceffion doit paffer à
des collateraux efloignez .
Diomede , comme un lion
qui fe jette fur un troupeau
de boeufs , tombe encore
fur Echemon & Chromius
enfans dc Priam , les pré
cipite de leur char , les dépoüille
de leurs armes , & .
prend leurs chevaux . versi
133. 165.
Enée qui voit tous ces
ravages , cherche PandaI.
PARTIE.
59
rus à travers les picques &
les javelots. Il le joint &
l'exhorte " à fe fervir encore
de fon arc & de fes
traits contre un homme
qui caufe tant de defordres
, ( fi ce n'eft que ce
guerrier dangereux foit
quelqu'un des Immortels
irrité contre les Grecs ) ,,
Pandarus refpond: “ qu'il
croit reconnoiftre Diome
de à fa taille & à fes armes.
Que fi ce guerrier n'eft pas
une Dieu , au moins Diomede
ne peut faire tant de
prodiges fans le fecours
¢
60 MERCURE
d'une Divinité toute puiffante.
Se repent d'avoir
laiffé chez luy , contre l'avis
de fon pere , onze chars
inutiles par la
crainte que
fes chevaux ne fouffriffent
trop dans une ville affiegée.
Se plaint d'avoir desja
bleffé deux des plus vaillans
hommes , fans autre
effet que de les avoir ren
dus plus furieux. Jure que
s'il revoit fá patrie , il com
mencera par bruler cet
arc & ces fléches qui l'ont
fi mal fervi . ,, Enée luy
dit " de monter fur fon
1. PARTIE . 61
tre
char qui eft tiré par d'excellens
chevaux , & luy
laiffe le choix ou de tenir
les refnes , ou de combatcontre
Diomede. 1
Pandarus " confeille à Fnée
de conduire luy - méf
me fes chevaux qui connoiffent
fa voix & ſa main ;
que pour lay it recevra
Diomede avec fa lance.
Ils montent tous deux fur
le char , & vont à toute
bride contre Diomede
(qui eft à pied.) Sthelenus
qui les voit venir , en averzuDiomede
, & luy con
«Ε
62 MERCURE
feille de les éviter. ,, Dió.
mede " reſpond qu'il n'eft
pas capable de fuir , & que
ces deux ennemis fi redou
tables ne
retourneront
point à Troye ; luy recom !
mande feulement o d'em
mener les chevaux d'Enée
auflitoft qu'il fera vaincur
( les chevaux d'Enées ef
toient de la race de ceuk
done Jupiter fic prefent !
Tras . E,, nov vêrs¸1661273.
Pandarus & Enée font
en prefence de Diomede
Pandarus le premier dit à
Diomede qu'il n'a peule
I. PARTIE.
63
vaincre avec fa fléche ,
mais qu'il fera peut - eftre
plus heureux avec ſon javelot.
,, En mefme temps
il lance fon dard qui perce
le bouclier jufqu'à la cuiraffe.
Pandarús " s'écrie ,,
glorieux de ce fuccez . Diomede
luy dit qu'iba manqué
fon coup, Le frappe
de fon javelot que-Minerve
conduifoit , & qui traverſe
depuis l'oeil juſqu'à
la gorge. Pandarus tombe
de fon char. Enée fe met
en/devoir de deffendre le
corps de fon amy. Diome64
MERCURE
de prend une groffe pierre,
telle que deux hommes à
peine l'auroient peu lever.
Il l'a jette contre Enée , &
luy brife la cuiffe . Enée
tombe fur ces genoux &
s'affoiblit. Venus le prend
entre fes bras , le couvre
de ſa robe , & l'emporte.
Sthelenus, qui fe fouvient
des ordres de Diomede ,
prend les chevaux d'Enée ,
les emmeine , les remet à
fon amy Deiphilus , & vá
rejoindre Diomede . Diomede
, qui a reconnu Venus
, la pourfuit avec un
dard
L. PARTIE 651
dard , & la bleffe à la main.
Lefang immortel coule de
fa playe . Le fang des Dieux
different de celuy des hommes
, &pourquoy. Venus
laiffe tomber Enée , Apollon
le releve , le couvre
d'un nuage & l'emporte.
Diomede parle en termes
picquans à Venus qui fe
retire tres-affligée . Iris l'a
fouftient. Elles trouvent
Mars. Venus " le conjure
de luy prefter fes chevaux
pour s'en retourner dans
l'Olympe . ,, Mars luy donna
fon char. Iris le con
Septemb. 1711. 1 F
66 MERCURE
duit. Elles arrivent en un
moment. Iris dételle les
chevaux , & en prend foin.
Venus fe laiffe tomber fur
les genoux de Dioné fa
mere. Dipné luy deman
de " qui luy a fait cette
bleffeure. ,, Venus refpond
“ que Diomede a eu cette
audace, & que ce n'eft plus
icy une guerre des Grecs
contre les Troyens , mais
desGrecs contre les Dieux .
Dioné la confole , luy dit
ཡ་ que ce n'eft pas la
premiere
fois que les Dieux
ont efté infultez par les
I
I. PARTIE . 67
hommes. ( Exemples de
Mars , de Junon , & de Pluton
; ) Que Diomede doit
craindre de porter quel
que jour la peine de fa te
merité. ,, Dioné effuye le
fang qui coule de la blef.
feure de fa fille . Venus eft
guerie en un moment. vers
275. 417 .
Junon & Minerve entretiennent
Jupiter de ce qui
vient d'arriver à Venus.
" Plaifanterie de Minerve
à ce fujet. ,, Jupiter foufrit ;
appelle Venus & " luy re
commande de ne plus s'ex
I
Fij
68 MERCURE
pofer.,, vers 418. 430.
Diomede par trois fois
fe jette fur Enée , quoy
qu'Apollon l'ait pris fous
fa protection . A la quatriéme
fois ce Dieu irrité
" luy parle
d'un ton
menaçant
. ,, Diomede
fe
retire
. Apollon
porte Enée
dans fon Temple
fur la Citadelle
de Pergame
. Latone
& Diane
ont foin ellesmefmés
de le panſer
. vers
432. 448.
Apollon voyant que le
combat s'echauffe autour
d'un phantofme qu'il avoit
I. PARTIE.
69
*
formé reffemblant à Enée
pour tromper les Grecs ,
demande à Mars , « s'il n'y
a pas moyen d'arrefter ce
Diomede qui porte fa fureur
jufqu'à pourfuivre les
Dieux . Enfuite il fe retire
fur la Citadelle . Mars
prend la reffemblance d'Acamas
General des Thraces
. Va de rang en rang .
" Se fait entendre aux Troyens
& les anime. » Sarpedon
picque le courage de
Hector par le reproche
qu'il luy fait de fon inaction
, & de la lafcheté de
Fiij .
70 MERCURE
fes freres qui tremblent
comme des chiens timides
en preſence d'un lion . »
Hector , fans repliquer
faute de fon char , un javelot
à la main , exhorte les
Troupes. Les Troyens fe
rallient. Les Efcadrons des
Grecs viennent fondre fur
eux. La pouffiere qu'ils élevent
, & dont ils font tout
blanchis , comparée à celle
qui couvre ces monceaux
de paille que des vanneurs
ont feparée d'avec le grain .
Le combat recommence .
Enée , qu'Apollón a retiré
I. PARTIE.
71
du Temple où il l'avoit
mis , reparoift à la tefte de
fes troupes avec toute fa
vigueur. Les foldats tranfportez
de joye font furpris
en mefme temps de le revoir
firoft ; mais l'ardeur.
du combat ne leur permet
pas de l'interroger fur une
fi prompte guerifoni vers
449. 518.
Les Grecs animez par
les deux Ajax , par Ulyffe ,
& par Diomede, attendent
les Troyens de pied ferme
, femblables à des nuages
affemblez , qui n'at
72 MERCURE
tendent que le reveil des
vents endormis pour eftre
mis en mouvement. vers
$19. $ 27.
Agamemnon donne fes
Exhorte fes fol ordres cc
dats » Enfuite il lance fon
javelot & tuë Deicoon le
plus cher compagnon d'Enée.
Enée de fon cofté tué
Crethon & Orfiloque enfans
de Dioclés , qui avoit
pour ayeul le fleuve Alphée.
Crethon & Orbilo
que comparez à deux jeunes
lions , qui aprés avoir
laiffé par tout des marques
de
1. PARTIE.
73
de leur furie , fuccombent
enfin fous l'effort des pafteurs.
Ces deux jeunes
guerriers tombent fous les
coups d'Enée comme les
plus hauts fapins abbattus
par les vents. Menelas ,
pour les venger , s'avance
au milieu des combattans ,
pouffé par le Dieu Mars ,
qui ne cherche qu'à le faire
perir de la main d'Enée.
Antiloque voyant le peril
où Menelas s'expofe, court
fe joindre à luy. Enée qui
voit ces deux guerriers
unis , fe retire . Ils enlevent
Septemb. 1711. 1 G
74 MERCURE
les corps de Crethon &
d'Orfiloque ; enfuite ils retournent
dans la meflée .
Menelas tuë Pylemenés
qui commandoit
les Paphlagoniens.
Antiloque
bleffe Mydon d'un coup
de pierre , l'acheve de fon
épée , & emmene fes chevaux.
vers 528.589
>
Hector ayant
apperceu
Menelas &
Antiloque ,
marche à eux avec impetuofité.
Les
Troyens le
fuivent. Mars & Bellone
font à leur tefte. Mars accompagne
par tout Hec-
3
I. " 75 PARTIE.
tor. Diomede voyant ce
Dieu terrible , eft faifi de
frayeur. Son eftonnement
comparé à celuy d'un voyageur
qui , aprés avoir
traversé de vaftes campagnes
, voit tout d'un coup
un grand fleuve , & retourne
fur fes pas. Diomede
fe retire en difant aux
Grecs , qu'il faut ceder
"
לכ
aux Dieux. vers590.606.
Les Troyens fondent fur
les Grecs. Hector tuë de
fa main Menoſthés & Anchiale.
Ajax fils de Telamon
s'avance pour les
I Gij
76 MERCURE
vanger , & tuë Amphius de fon
javelot. Il accourt enfuite pour
le dépoüiller ; mais les Troyens
font pleuvoir fur luy unegrefle
de traits , & l'obligent de fe
retirer.
vers 607.626.
Sarpedon fils de Jupiter, &
General des Lyciens , & Tkpoleme
fils d'Hercule fe rencontrent.
« Ils fe parlent quelque
temps au fujet du parjure
de Laomedon que Tlepoleme
reproche à Sarpedon. » Ces
deux guerriers aprés « s'eſtre
menacez fierement » lancent
leurs dards lun contre l'autre.
Les traits partent enſemble.
Sarpedon eft bleffé à la cuiffe
Le dard y demeure attaché.
Tlepoleme tombe fans vie.
On emporte Sarpedón . Les
I. PARTIE. 77
Grecs enlevent le corps de
Tlepoleme. Ulyffe ,
Ulyffe , pour le
و ر
venger , tourne fes armes contre
les Lyciens & en tuë un
grand nombre. Noms des Lyciens
tuez par Ulyffe. Hector
s'avance contre luy pour arre
fter ſes defordres. Serpedon
voyant Hector le prie de ne le
pas laiffer en proye à fes ennemis.
Hector paffe rapidement
pour aller charger les
Grecs. Les amis de Sarpedon
le mettent fous un grand chefne.
Pelagon luy tire le javelot
de fa playe. Sarpedon s'évanoüit.
Borée le rafraifchit
de fon fouffle , & le ranime.
Les Grecs qui ne peuvent fou
ftenir le choc du Dieu Mars
& d'Hector , fe battent en re
I
Giij
78 MERCURE
traite fans prendre la fuite .
Noms de plufieurs braves Capitaines
tuez à cette attaque .
vers 628. 710.
Junon voyant ce qui fe paffe,
dit à Minerve " qu'il eft temps
d'arrefter les ravages de Mars,
& de fecourir les Grecs . ,, Junon
prepare elle - mefme fes
chevaux. La Déeſſe Hebé luy
apprefte un char fuperbe. Defcription
de ce char. Minerve
quitte fes habits pour s'armer.
Quelles font fes armes. Son
Egide. Son cafque . Sa pique.
Les deux Déeffes montées fur
leur char éclatant , vont à toute
bride au palais de Jupiter .
Les portes de l'Olympe , qui
font gardées par les Heures ,
s'ouvrent d'elles- meſmes avec
I.
PARTIE . 79
un grand bruit. Junon parle à
Jupiter & luy demande " s'il
veut permettre de reprimer les
fureurs de Mars , & de bleffer
cet infensé qui ne reconnoiſt
d'autre droit que la force.
Jupiter luy dit " de donner ce
foin à Minerve qui eſt accouftumée
à le vaincre. ,, vers 711.
766.
Junon accompagnée de Minerve
pouffe fes chevaux qui
courent avec impetuofité entre
le Ciel & la terre. ( Les
chevaux des Dieux franchiſ→
fent d'un ſeul fault autant d'efpace
qu'un homme affis fur un
cap eflevé au bord de la mer
en peut découvrir fur cette vafte
étendue. ) Les Déeffes arrivent
prés de Troye. Junon
80 MERCURE
•
dételle fes chevaux. Les envi
ronne d'un nuage. Le Simoïs
fait naiftre l'ambrofie fur fes
rives pour leur pature. Les
Déeffes marchent enſemble
comme deux colombes , & vont
fecourir les Grecs. vers 767.
779.
Elles trouvent Diomede entouré
des plus braves guerriers
femblables aux plus fiers lions
& aux fangliers les plus terribles.
Junon s'arrefte . Prend
la reffemblance de Stentor ,
dont la voix d'airain eftoit plus
forte que celle de cinquante
hommes enfemble . Elle parle
aux Grecs , & les anime.
Minerve de fon cofté s'approche
de Diomede qui s'eftoit reà
l'écart pour ratiré
un
peu
I. PARTIE. 81
fraifchir la playe que Pandarus
luy avoit faite. Elle luy
reproche " de s'affoiblir quand
il faut agir, & de ne reffembler
gueres à fon pere Tydée qu'-
elle protegeoit auffi bien que
luy , & dont elle ne pouvoit
retenir le courage Elle luy rappelle
l'aventure de Tydée avec
les Defcendants de Cadmus.
Diomede refpond « qu'il ne
manque ny de force ny de refolution
, mais qu'il fe fouvient
des deffenfes qu'elle luy a faites
de combattre contre les
Dieux : Que Mars eſt maintenant
à la teſte des Troyens.
Minerve luy dit « de ne point
craindre Mars , & de le frapper
hardiment s'il vient à fa
rencontre ; qu'auſſi bien c'eſt
&
2
82 MERCURE
un perfide qui prend le party
des Troyens contre la promef
fe qu'il luy avoit faite & à Junon
, de favorifer les Grecs. »
Elle fait defcendre Sthelenus
& monte à fa place auprés de
Diomede fur fon char. Elle.
prend le cafque de Pluton pour
n'eftre point veuë. Pouffe les
chevaux contre Mars . Mars ,
qui vient de tuer Periphas
voyant Diomede , s'avance , &:
luy veut porter un coup de fa
pique. Minerve détourne le
coup , conduit celle de Diomede
contre Mars , & la luy fait
entrer bien avant dans les coftes
. Mars la retire , & jette
un cry femblable à celuy d'une
armée de neuf ou dix mille
homines . Les Troyens & lest
1. PARTIE 83
Grecs en font épouvantez.
Mars retourne dans l'Olympe.
Diomede le voir s'élever comme
un nuage obfcur. vers 780.
867.
<<
Mars montrant à Jupiter le
fang qui coule de fa playe , luy
dit qu'il a engendré une fille
pernicieufe qui fe croit tout
permis , parce qu'il ne la corrige
pas pendant qu'il traite
avec feverité les autres Dieux.
Que c'eft Minerve qui a infpiré
à Diomede l'audace de bleffer
Venus & luy enſuite. » Jupiter
rejette fa plainte , & luy
dit « qu'il eft luy - mefme un
inconſtant & un furieux qui
n'aime que les querelles , & que
s'il n'eftoit pas fon fils il y a
long-temps qu'il l'auroit préci84
MERCURE
guepité
dans les abyfmes avec les
Titans. » Jupiter cependant
donne ordre à Pæon de le
rir. Pæon obeït & le guerit fur
le champ avec un baume exquis
qui fait fur la playe le meſme
effet & auffi promptement
que la prefure fur le lait. Hebé
aprés avoir preparé un bain
pour Mars , luy donne des habits
magnifiques. Mars fe place
auprés de Jupiter. Junon &
Minerve ne font pas longtemps
fans remonter au Ciel.
MERCURE,
11 PARTIE.
AMUSEMENS.
ke#e #tete * # # # ***
SUITE ET FIN
de l'Hiftoire Espagnole.
LE
E Prince de Murcie
reprit enfin ſes
efprits , & pour lors le folitaire
lui dit : Seigneur ,
ſi j'avois pû prévoir la fu
Sept. 1711.
2 A
2 MERCURE
,
nefte impreffion qu'a fait
fur vous la nouvelle que
je vous ai appriſe , croyez
que loin d'irriter voltre
douleur , je n'aurois penfé
qu'à la foulager ; l'experience
que j'ai faite des
revers de la fortune m'apprend
à plaindre ceux qu'-
elle rend malheureux. Ah
pourquoi ne fçavois -je pas
l'interêt que vous prenez
à Leonore je ne me redu
moins
procherois pas
les tourmens que vous
fouffrez.... Je ne vous les
reproche point , Seigneur,
II. PARTIE.
répondit le Prince , non
plus qu'à Leonore , fi elle
a épouſé Dom Juan elle a
dû l'époufer , & fi elle m'a
rendu le plus malheureux
des hommes , il faut que
je l'aye merités Non - le
plus affreux defefpoir ne
me forcera jamais à la
traitter d'infidelle , mais
je n'en mourrai pas moins
malheureux nc ob mem
Ah : Seigneur , reprit le
folitaire , fi Leonore n'eft
point infidelle , il eft des
amans plus malheureux
que vous' ; j'ai perdu com-
2 A ij
4 MERCURE
,
me vous l'efperance de
poffeder jamais celle que
j'aime je ne puis douter de
fon inconftance , & Tjen
reçois les plus fortes preu
ves au moment même qui
devoit affurer mon bonheur
, quel defefpoir eft
égal au mien ? amant d'une
Princeffe , notre mariage
étoit conclu du confentement
de fon frere , & l'ine
fidelle fe fait enlever ce
our -là même par mon
rival , fans ce trait dela
plus noire infidelité je fes
rois encore à Grenade , ra
A
LL PARTI É.
& vous ue m'auriez point
trouvé dans cette folitu
de où nos communs mal
heurs nous ont conduit.
Le Prince comprit aifément
que cette Princeffe,
que le folitaire avoit aimée
, n'étoit autre qu'Elvire
, il en avoit fouvent
oui parler à Dom Pedre
fon frere , & comme il
fçavoir la violence que
Dom Garcie avoit faite à
Elvire , il crut devoir ré
parer le tort que le folis
taire lui faifoit par fes foupçons
, il me femble , Sei-
2 A iij
MERCURE ,
gneur , lui dit-il , que vous
condamnez trop aisément
la Princeffe que vous aimez
, pourquoi rapporter
à fon inconftance un éloignement
dont elle gémit
peut- être autant que vous ?
fi vôtre rival l'a enlevée ,
le tort que vous lui faites
eft irreparable, mais quoiqu'il
en foit , ce n'eſt point
ainfi qu'il faut juger de ce
qu'on aime . Ah ! je ne
ferois pas fi malheureux
fi je pouvois foupçonner
Leonore d'inconftance. Si
je condamne la Princeffe
A.
II. PARTIE .
7
Elvire , reprit le folitaire ,
c'eſt que je ne puis douter
qu'elle ne me foit in
fidelle ; aprés cet enlevement
je la cherchai dans
tout le Duché de Grenade
; & dans quelques lieux
que mon rival fait conduite
, je l'aurois fans doute
découverte, fi elle n'eût
été d'accord avec lui pour
rendre mes recherches
inutiles. Ah ! je l'ay trop
aimée pour ne pas me
plamdre de fon change
ment , & je vois bien que
nos malheurs font diffe-
2 A iiij
MERCURE ,
rens , quoiqu'ils partent
du même principe. C'eft
ainfi que le folitaire difputoit
au Prince la trifte
gloire d'être le plus malheureux
de tous les hommes
; fi c'eft un dédom
magement pour ceux qui
fouffrent
, ils pouvoient
tous deux y prétendre ,
l'un étoit réduit à accufer
fa maîtreffe , qui lui étoit
pourtant fidelle , & l'autre
à s'accufer lui -même , lui
qui n'avoit jamais eu d'autre
regle de fes actions
que fa gloire & fon amour.
II. PARTIE
Cependant Elvire paf
foit la vie dans de mortelles
inquietudes auffibien
que Leonore, la converfation
que ces deux
Princeffes avoient eûë
leur étoit également funefte
, & fi Leonore avoit
lieu de foupçonner un
Prince , qu'Elvire avoit
nommé fon amant , Elvire
foupçonnoit avec raifon
un amant dont le nom
avoit produit un fi violent
effet fur Leonore , elles avoient
un égal interêt de ſe
retrouver pour éclaircir
10
MERCURE ,
un doute fi cruel , mais il
ne fut pas permis à Leonore
d'aller feule dans le
jardin, & Elvire n'y voyant
plus que la curieuſe tante,
fut contrainte de choisir ,
pour le lieu de fa promenade
, la Foreft de Gades ;
c'est là que ces deux Princeffes
fe retrouverent dans
le temps qu'elles ne l'efperoient
plus. Le Duc d'Andaloufie
, content de l'obéiffance
de fa fille , l'avoit
enfin délivrée des
importunitez de fa vieille
four , elle alloit fouvent
H. PARTIE. M
fe promener dans cette
Foreft , là elle pouvoit
jouir de la folitude , & fe
livrer à toute fa douleur.
Le hazard la conduifit un
jour dans l'endroit où El
vire avoit coûtume d'aller
fe plaindre de fes malheurs
, auffi tôt elle court
vers elle avec empreffement
, & lui dit : il y a
long- temps que je vous
cherche , Madame , pour
vous apprendre une nou
velle qui doit vous intereffer
: Le Prince de Murcic
eft Duc de Grenade
12 MERCURE,
par les foins de Dom Pe
dre vôtre frere & fon ami.
Madame , répondit Leonore
, vous fçavez la part
que j'y dois prendre, mais
je devine auffi celle que
vous y prenez , ce n'eſt
point moi qui dois reffentir
la joye de cette nouvelle.
Ah ! qui doit donc
la reffentir reprit Leo
nore , le Prince de Murcie
vous aime , & n'a fait
une fi grande démarche
que pour vous meriter.
Ah Madame , répondit,
Elvire , pourquoi infultezII.
PARTIE
IS
vous à mon malheur ? Je
fçai que je ne fuis point
aimée , c'eft en vain que
je voudrois vous diſputer
le coeur du Prince de
Murcie . Ces deux Prin
ceffes entroient inſenſiblement
au point d'un éclairciffement
qui leur étoit fi
neceffaire , lors que Dom
Juan & Dom Garcie vin
rent troubler leur entre.
tien : fi- tôt qu'Elvire eut
reconnu fon perfecuteur ,
qui n'étoit pas fort loin
d'elle , elle prit la faire , &
Leonore , que la preſence
14 MERCURE,
de Dom Juan auroit embarraffée
dans une pareille
circonftance , prit une
autre allée dans le deffein
de l'éviter , Dom Garcie
avoit cru reconnoître Elvire
& l'avoit fuivie des
yeux , l'occafion lui parut
trop belle pour la negli
ger : Seigneur , dit- il à D.
Juanjo vous voulez fans
doute aborder Leonore ?
je vous laiffe feul de peur
de troubler un entretien
fi doux pour Fun & pour
l'autre , je ferai toûjours à
portée de vous rejoindre,
II. PARTIE S
en même temps il fuit la
route qu'il avoit vû prendre
à Elvire , & aprés
l'avoir affez long- temps
cherchée , il la découvrit
dans le lieu le plus écarté
de la foreft. Quelle fut la
furprife & la crainte de
cette Princeffe : elle con
noiffoit le perfide Dom
Garcie , irrité de ſes refus
& de fes mépris , il étoit
capable de fe porter aux
plus violentes extremitez :
Elvire dans un fi grand
péril n'eut d'autre reffours
ce que celle de faire en16
MERCURE,
tendre des cris horribles
qui puffent lui attirer du
fecours , & fes cris en effet
la fauverent. Le folitaire,
quife promenoit affez prés
de là , les entendit ; auffitot
il court vers le lieu où
les cris d'Elvire le conduifoient
, & tout d'un
coup il voit celle qu'il
croyoit infidelle à Grenade
, qui fe jette dans ſes
bras , en lui difant : Seigneur
, ſauvez- moi des fureurs
d'un fcelerat, & dans
le moment Dom Garcie
parut. Je n'entreprendrai
point
II. PARTIE. 17
point d'exprimer les di
vers mouvemens de furprife
d'amour & de colere
dont le folitaire fut faifi
Dom Garcie voulut profiter
du moment pour fe
1
défaire de fon rival avant
qu'il fût en défenſe , mais
lefcelerat meritoit la
mort , le folitaire L'étendit
à fes pieds , aprés le peu
de refiftance qu'on doit
attendre d'un lâche & d'un
traître , enſuite s abandonnant
à d'autres tranſports,
il s'approcha d'Elvire :
quel bonheur , lui dit - il ,
Sept. 1711.
2.B
18 MERCURE ,
Madame la fortune vous
rend à mon amour, & li
vre mon rival à ma ven
geance ; que le perfide
nous a caufé de maux !
que n'ai-je point fouffert
pendant vôtre abſence !
Je n'oublierai jamais ,
Prince , répondit Elvire
le fervice que vôtre pitié
vient de me rendre , mais
je ferois plus heureuſe fi
je le dévois à vôtre amour.
Ah ! Ciel, s'écria le folitai
re , comment expliquer
ces cruels reproches je
fuis donc un amant infip
83 ITI
II. PARTIE. 19
dele.... Prince , je voudrois
pouvoir en douter ,
rien ne troubleroit la joye
que j'ai de vous revoir :
Ah ! je ferois trop heureu
fe... Grand Dieu , s'écriat'il
encore une fois , il eft
donc vrai que vous m'accufez
d'inconftance ? Ah !
Madame , quel démon envieux
de nôtre bonheur ,
vous donne ces injuftes
foupçons ; quoi je vous
revois le plaifir que je
fens me perfuade que tous
mes maux font finis , & je
retrouve au même inftant
3 B ij
20 MERCURE,
des malheurs plus grands
encore que ceux que j'ai
fouffers ; ma chere Elvire
voyez cette trifte retrai
te , cette affreufe folitude !
font-ce là des preuves de
mon inconftance : Oui ,
Prince , c'eft le choix de
cette folitude qui confir
me mes triſtes foupçons.
Ah ! Seigneur , eft- ce dans
la foreft de Gades que
vôtre conftance devoit
éclater Le folitaire , qui
ne pouvoit rien comprendre
au difcours d'Elvire ,.
ne fçavoit comment cal
2
IL PARTIE. 27
mer fes foupçons , ma
Princeffe , lui difoit -il, dai
gnez me dire le fujet de
vos reproches , je fuis fûr
de me juftifier , je ne fuis
pas furpris que vous me
foupçonniez , le moindre
accident peut allarmer
une amante fenfible , j'ai
moi- même éprouvé com
bien il eft aifé de craindre
le changement de ce qu'-
on aime , je vous ai crû
moi-même moins fidelle
que je ne vous retrouve ,
mais fi l'heureuſe avanture
qui nous réunit ne m'avoit
22 MERCURE,
détrompé , loin de vous en
faire un myftere , je me
ferois plaint à vous , je
vous aurois découvert le
fujer de mes douleurs , &
je n'aurois rien tant ſouhaitté
que de vous voir
bien juftifiée , pourquoy
n'en ufez- vous pas ainfi ,
ma Princeffe ? l'amour
peut- il prendre un autre
parti? Que me fervira-t-il ,
reprit Elvire, de vous convaincre
d'inconftance ? je
ne vous en aimerai pas
moins , & vous n'en aimerez
pas moins Leonore.
II.
PARTIE 23
L
Quoi ! j'aime Leonore, re
prit vivement le folitaire ?
Ah! je vois maintenant le
fujet de vos foupçons ,
vous avez crû que , char
mé de cette Princeffe , jet
n'habite cette folitude
que pour lui prouver mon
amour , mais non , ma
chere Elvire , rendez- moi
mon innocence , rendezmoi
tout votre amour : jet
n'ai jamais vu Leonore ;
je fuis dans un lieu tout
plein de fa beauté & de
les vertus & je n'ai jamais
penté qu'à vous, c'est pour
24 MERCURE ,
Vous feule que je fuis réduit
dans l'état où vous
me voyez. Ah ! Prince , dit
Elvire , que ne vous puis- je
croire ; mais non , vous
me trompez ; voyez vousmême
ſi je dois être convaincue
je racontois à
Leonore nos communs
malheurs , elle me demanda
vôtre nom , je lui nommai
le Prince de Murcie ,
& foudain elle tomba évanoüie
dans mes bras
joüiffez , Prince , de vôtre
gloire , aprés ce coup rien.
ne peut m'ôter ma dou
leur.
II PARTIE
25
leur. Elvire voulut s'éloi
gner du folitaire pour lui
cacher fes larmes , arrêtez
ma Princeffe , s'écria-t-il ,
non je n'ai jamais vu Leonore
, il eft un autre Prince
de Murcie , vous le devez
fçavoir : Ah pouvezvous
me foupçonner ? mais
machere Elvire , venez me
voir tout-à- fait juftifié , j'ai
laiffé dans ma cabane un
inconnu qui aime Leono
re , Férat où la nouvelle
de fon mariage avec Dom
Juan l'a réduit , m'a découvert
fon fecret ; il eſt
Sept. 1711.
2 C
26 MERCURE,
fans doute ce Prince de
Murcie amant de Leono,
re, venez, je lui demande.
rai fon nom , il ne pourra
me refufer cet éclairciffe :
ment , qui importe tant à
vôtre bonheur & au mien.
Ils n'eurent pas grand che
min à faire pour arriver à
la petite cabane , le cours
de leur converfation les
avoit infenfiblement canduits
, ils y entrent , mais
quel fpectacle s'offrit tout
d'un coup à leurs yeuxil's
virent deux hommes éten
dus dans la cabane , qui
y
II. PARTIE. 27
#
periffoient dans leurfang.
Ah Ciel s'écria Elvire ,
faifie d'horreur & de furprife...
Qui font ces malheureux?
Que je plains le
fort de l'un d'eux , répondit
le folitaire ; c'eſt cet
étranger qui étoit venu
chercher ici un azile , nous
f
déplorions enſemble nos
communs malheurs , il alloit
finir les miens . Elvire
revenue de fa premiere
terreur s'approcha & reconnut
Dom Juan. Le
Prince aprés s'être feparé
de D. Garcie avoit long-
2 Cij
1
28 MERCURE ,
temps erré dans la forêt¸
occupé des triftes idées qui
les avoient conduits : malgré
ce que la fortune faifait
pour lui , il ne laiffoit
pas d'avoir fes chagrins ;
il avoit apperçu la cabane
du folitaire , & y étoit entré
attiré par la fimple curiofité
les foupirs de cet
inconnu l'avoit redoublée
en excitant fa compaffion
. Mais quelle furprife!
à peine ces deux hommes
fe furent envifagez , qu'un
premier mouvement de
rage & de vengeance leur
II.
PARTIE. 29
quer :
stant tout loifir de s'expli-
: Ah te voila , traître,
secria l'un , perfide , tu
mourras , s'ecria l'autre :
& à l'inftant ils fe lancent
furieux l'un fur l'autre, &
fe battent avec tant de
haine & tant d'acharnement
, que fans recevoir
aucun coup mortel ils fe
percerent en plufieurs endroits
, ils tomberent l'un
& l'autre affoiblis par la
de leur fang , & par
la longueur du combat.Ce
fut dans cet état que les
trouverent Elvire & fon
2 Ciij.
perte
30 MERCURE ,
amant , ils leur donnerent
tous les fecours poffibles, &
fe retirerent à l'écart dans
l'efperance
de tirer quelque
éclairciffement
de ce
que fe diroient ces deux
rivaux. Ils reprirent peu
de temps aprés leurs forces
& leurs reffentimens
& le Prince de Murcie
tournant vers Dom Juan
des yeux pleins d'indignation
: Quoy tu yis encore ?
le Ciel ne peut donc confentir
à la mort du digne
époux de Leonore , ni la
force,nil'amour, nila haine
II. PARTIE . 31
ne peuvent rien fur de fi
beauxjours Le Ciel,répon
dit Dom Juan , veut que
j'admire encor cet illuftre
:
conquerant
, qui vient de
joindre
à tant de hauts titres
celuy de Duc de Grenade
Quel regret
pour
moy de mourir
fans voir
regner un Prince ſi gene
reux ? Peux -tu le voir fans
rougir , perfide , reprit le
Prince ? Non , dit Dom
Juan , je rougis de t'avoir
fi mal connu . Les traîtres ,
repliqua le Prince, ne rougiffent
du crime qu'aprés
2 C iiij
32 MERCURE ,
}
qu'ils l'ont commis . Il eft
vray, répondit D. Juan ,
s'ils n'en rougiſſoient
pas
fi tard , je ferois Duc de
Grenade & vous ne feriez
encore que le Prince de
Murcie. Pourfuis , indigne
amy , reprit le Prince ,
cherche un pretexte à ton
horrible perfidie ; tu n'es
donc l'époux de Leonore
que parce que je fuis un
Tyran ? Non , traître , ré
pondit Dom Juan , puif
qu'il faut enfin éclatter , je
ne t'ai point trahi ,je me fuis
vengé de l'ennemi comII
PARTIE.
33
mun de toute l'Eſpagne ;
d'un ufurpateur qui eſt en
abomination dans toute
l'Europe : Renonce à Leonore
, qui te detefte autant
qu'elle ta autrefois aimé.
Grand Dieu , s'ecria - t- il, où
fuis -je ? non, Leonore n'aurra
pas pû le croire ; tes
derniers mots te convainquentd'impofture,
tu peux.
m'avoir pris pour un uſurpateur
, mais non pas cette
genereufe Princeffe. Il eſt
vray , répondit D. Juan
tu lavois feduite par ta
fauffe vertu: mais qu'avoit
34 MERCURE ,
elle à repondre à D. Gar
cie , dont la fidélité rend
ta perfidie certaine ? Le
Prince vit dés ce moment
la trahifon de D. Garcie ,
& parla ainfi à ſon rival:
Dom Juan, je fuis forcé de
vous rendre vôtre innocence
, Dom Garcie vous
a trahis tous deux
d'ufurper vos Etats , je les
ay fouftraits à la tyrannie,
dans le feul deffein de vous
les rendre En abordant
l'Ifle de Gades je trouvay
Dom Pedre qui vous cherchoit
par tout , je m'offris
loin
IL PARTIE . 35
à prendre vôtre place , &
je fis pour vous ce que je
n'aurois pas fait pour moymême
, je me privay du
plaifir de revoir Leonore
pour vous remettre dans
vos Eftats ; j'en ai chaffé
Dom Garcie qui les ufurpoit
: pour prix de mon fecours
& de mon amitié
vous époufez ce que j'ai
me , fans que j'en puiffe.
accufer que la fortune ,
vous n'êtes point coupable
: mais cependant Leonore
eft à vous , & je la.
perds pour jamais.
36
MERCURE ,
Le Prince de Murcie
parloit d'un air fi touchant
que Dom Juan lui-même
commençoit à s'attendrir.
On peut juger de la fituation
des deux fpectateurs ;
Elvire étoit fûre du coeur
de fon amant, & cet amant
voyoit dans les yeux d'Elvire
, & la juftice qu'elle
rendoit à fon amour , & la
joye avec laquelle elle la
lui rendoit , il ne manquoit
plus au Prince qu'une
occafion de confirmer
ces difcours qui faifoient
déja tant d'impreffion ; le
II. PARTIE.
37
A h
hazard la fit naître prefqu'au
même inftant. Un
des domestiques de Dom
Juan , qui avoitfuivi Dom
Garcie , entra dans la ca
bane , attiré par le bruit
qu'il avoit entendu. Approchez
, lui dit D. Juan ,
pourquoy
m'avez - vous
trahi ? pourquoi êtes-vous
entré dans le complot du
traître Dom Garcie? Ferc'étoit
le nom nandez
du domeftique ) interdit
d'une question à laquelle
il ne s'attendoit pas , &
déja furpris de la réunion
38 MERCURE ,
des deux Princes , prit le
parti de fe jetter aux
pieds de fon Maître , &
de lui découvrir tout le
myftere d'une fi noire trahifon.
Ah ! quel fecret venez-
vous de me reveler ,
s'écria Dom Juan , ſaiſi
d'une jufte horreur , confus
de fa credulité , deſeſpéré
d'avoir fuivi les mouvemens
de fa haine contre
celui à qui il devoit tout ?
Ah ! Seigneur , s'écria-t- il ,
fe tournant vers le Prince
de Murcie , que puis- je
vous dire ? je ne fuis point
II.
PARTIE. 39
l'époux de Leonore. Vous
n'êtes point fon époux ,
répondit le Prince Ah!
Dom Juan pourquoi voulez
- vous me flatter ? cro
yez-vous par là conferver
ma vie Non , je meurs
mal-heureux amant de
Leonore & fidele ami de
D. Juan . C'est moi qui dois
mourir , reprit Dom Juan,
je ne fuis plus digne de
la vie , vivez , vivez , Prince
pour poffeder Leonore ;
j'ai affez d'autres crimes
à me reprocher fans me
charger encore de celui
40 MERCURE,
d'être fon époux ; non ,
je ne le fuis point , & l'unique
confolation qui me
refte , aprés tous les maux
queje vous ai caufez , c'eſt
d'être encor plus malheureux
que je ne fuis coupable.
En même temps il lui
apprit comment ce ma
riage avoit été retardéé pár
une violente maladie de
Leonore , que fes chagrins
avoient apparem
ment caufée. Dom Juan
ne borna pas là les foins
qu'il devoit au Prince , il
lui promit de flechir le
Duc
II. PARTIE. 4I
Duc d'Andaloufie , & fit
renaître dans fon coeur
l'efperance que tant de
malheurs en avoient ôtée.
Quel changement de fituation
pour le Prince de
Murcie , à peine croyoitil
tout ce qu'il entendoit ,
partagé entre la joye de
fçavoir Leonore fidelle ,
& l'impatience de la revoir
telle que l'amour la
lui confervoit , à peine
pouvoit-il fuffire à reffentir
tout fon bonheur. Elvire
& le folitaire de leur
côté joüiffoient du bon
Sept. 1711.
2 D
Q
42 MERCURE
,
heur de fe trouver fideles ,
exempts des foins & de l'in
quietude qui troubloient
depuis fi long- temps leur
amour ;- le fpectacle dont
ils étoient témoins aug
mentoit encore leur tendreffe.
Aprés qu'ils fe furent
dit tout ce qu'un bonheur
mutuel peut infpirer,
ils s'aprocherent des deux
Princes . Dés que le Prince
de Murcie eut apperçû le
folitaire , il luy dit : Vous
me trouvez, Seigneur,dans .
une fituation bien diffe
rente de celle où vous
II.
PARTIE. 43
m'aviez laiſſé , vous voyez
qu'il ne faut qu'un moment
pour terminer les
plus grands malheurs , j'ef
pere que celuy qui doit
finir les vôtres n'eft pas
bien éloigné , & pour lors
ma joye fera parfaite . Seigneur
répondit le folitaire
, le Ciel nous a réunis
pour nous rendre tous heureux
, vous allez revoir
Leonore , je retrouve Elvire
fidelle , cette avanture
finit tous les malheuts
qui femblojent attachez
au nom que nous portons
2 Dij
44 MERCURE
,
Fun & l'autre. Il lui apprit
en même temps qu'il étoit
un cadet de fa marfon
dont la branche féparée
depuis longtemps eftoit
prefque
inconnue
en Efpagne
il luy raconta
les
foupçons
d'Elvire , à l'oc
cafion de la conformité
'de leur nom , les momens
,
furent employez
à des détails
capables
d'intereffer
du moins des amans mais
Forfqu'Elvire
huy tendit
compte à fon tour de fon
entrevûe
avec Leonbre, &
de tout ce qui Pavol¤¹ fth...
IL
PARTIE. 45
II
vie Ah , secria le Prince ,
que la fortune eft cruelle
quand elle nous pourfuit ::
c'étoit l'unique moyen de
rendre ma fidelité fufpecte
à Leonore : mais non , cet
te Princeffe connoît bien
mon coeur , elle n'aura
point fait cette injuftice à
mon amour. Cependant
Fernandez qui avoit été
témoin de l'éclairciffement
entre le Prince de
Murcie & fon maiftre ,
plein de tout ce qu'il avon
entendu , courut le publier
dans le Palais du Duc, i
46 MERCURE ,
trouva Leonore qui quittoit
la forêt pour retourner
à fon appartement , &
elle en fut inftruite la premiere.
Son recit étoit affez
30
intereffant pour que
Leonore
voulût le juftifier
elle fe fit incontinent
conduire
à la cabane ; dés
qu'elle parut fa préfence
produifit un profond filence
, le Prince étoit celuy
qui avoit le plus de
chofes à dire , il fut auffi
celuy qui eut moins la
force de parler mais fa
joye n'en éclattoit que 2
:..
IL
PARTIE .
47
mieux dans fes regards , &
Leonore qui l'y voyoit
toute entiere, ne marquoit
pas moins vivement le
plaifir qu'elle reffentoit..
Elvire enfin prit la parole ,
&montrant le folitaire, elle
luy apprit fon nom , & lui
donna un éclairciffement
qui manquoit encore à fon
repos.:
Dom Juan marquoit le
plus vif repentir , il cedoit
tous fes droits au Prince
de Murcie ces amans
fe voyoient délivrez d'un
dangereux perfecuteur; que
48 MERCURE ,
ne fe dirent- ils point dans
de pareils tranfports ? Ah ,
Madame,s'écria le Prince,
vous m'aimez encore les
noms d'ufurpateur & d'infidele
qu'on m'a tant donnez
n'ont point changé
vôtre coeur ? à ce trait je
reconnois Leonore. Ouy ,
Seigneur ,répondit la Princeffe
, je vous ay toûjours
aimé , & je fuis toûjours
cette Leonore , dont vous
connoiffez fi bien les fentimens
, les raifons qui fembloient
perfuader voftre
inconftance , n'ont pû prévaloir
IL PARTIE. ·49
valoir fur le fouvenir de
vos vertus : Prince , j'ay
fouffert de vôtre abſence ,
& de la cruauté avec laquelle
on a voulu flétrir
vôtre nom : mais je ne vous
ay jamais condamné , &
ne pouvant être à vous ,
j'allois me donner la mort,
fi la fortune ne nous eût
enfin réunis. Je n'entreprendrai
point de rapporter
ici le cours de leur entretien
; pour peu qu'on
connoiffe l'amour , on en
imaginera plus que je n'en
pourrois dire ; mais enfin
2 E
Sept. 1711.
ro MERCURE ,
a
il n'eft point de réunion
plus touchante que celle
de deux amans qui ont eu
tant d'obſtacles à furmonter
qu'ils fe proteftent
qu'ils ne ſe ſont jamais crus
infidelles , parmi tant de
raifons qui fembloient
marquer leur infidelité ;
la haute idée qu'ils avoient
l'un de l'autre avoit toûjours
éloigné la jalouſie infeparablede
l'amour moins
heroïque, & s'ils n'avoient
pas eu les chagrins de cette
efpecè , ceux de l'abſence
en étoient plus violens
;
II.
PARTIE. si
pour eux.
Les
fentimens que tant
de difgraces
n'avoient pû
chaffer de leur coeur firent
leur gloire & leur felicité
; leur conſtance attendrit
enfin le Duc d'Andaloufie
, que tant de
nouvelles raifons forçoient
d'eftimer le Prince
de Murcie : Ces illuftres
Amans furent bientoft
unis pour toûjours ; cet
heureux mariage fut fuivy
de celuy du folitaire
avec Elvire , & comme
la fortune les avoit tous
2 Eij
52 MERCURE ,
affociez dans les malheurs
qu'elle leur avoit fufcitez ,
ils jurerent de ne fe feparer
jamais.
FIN.
II.
PARTIE. S
孟南宋孟孟*****
ARTICLE BURLESQUE.
SUITE DU PARALLELE
d'Homere & de Rabelais .
J'Ay cru que rien ne
rendroit ce Parallele
plus amufant que d'y
mêler de petits contes ,
dont le fond eft de Rabelais
; mais que j'ai accommodez
de maniere
à pouvoir être lûs des
Dames , & à moins ennuyer
ceux qui ne font
3 E iij
54 MERCURE ,
point aßez erudits &
affectionnez
, Pentagrueliftes
, pour favourer ,
macher remacherjuf
qu'aux moindres rogatons
, & avaler à longs
traitsfadesfuavite Ra
belaifiennes en faveur de
quelques grains de gros
fel , femez par ci par là ,
ez falmigondis & pots
pouris de Maître Fran
çois.
Pour affortir , ou plûtôt
pour oppofer à ces
II. PARTIE . ss
contes , j'en trouverai
bien encor quelqu'un
dans Homere , mais je
respecte trop fon grand
nom , pour ofer rien
mettre du mien dan's
fes ouvrages ; à peine
ai-je ofé retrancher une
bonne moitié du conte
du Cyclope , afin de
rendre l'autre moins
ennuyeufe.
Pour opofer au grand
& au fublime du Poëte
grec , on trouvera
2 E iiij
56 MERCURE,
peut- être dans Maître
François
quelques
endroits
affez folides pour
faire avouer
que Rabe
lais eût mieux
réuffi
dans le férieux , qu'Ho
mere n'a réuffi dans le
comique , & de là je
prendrai occafion d'avancer
quelques propofitions
qui feroient
hardies , temeraires , ridicules
même fi on les
avançoit férieuſement,
& dont je n'ofe prouII.
3 PARTIE. 57
ver la verité qu'en plaifantant
; je les propo
feray donc d'abord
comme des Paradoxes
badins ; le badinage a
h
cela de bon qu'il peut
éclaircir
certaines
veritez
qu'une diſpute fe+
rieuſe ne feroit qu'obſcurcir;
le badinage a encore
cet avantage fur la
difpute , qu'au lieu d'attirer
la colere des dif
puteurs graves , il n'en
attire qu'un filence.dé
18 MERCURE,
daigneux , & c'eſt en
être quitte à bon marché
, car la force des raifonnemens
ne fait que
les irriter au lieu de les
convaincre .
La prévention s'irrite
par la refiftance , ceft un
animal feroce qu'Homere
eut comparé à un
Taureau furieux ,
parcourant les vaftes
campagnes de la Lybie ,
n'a d'autre but dans fa
fureur que de heurter têqui
II.
PARTIE. 59
te baiffée , & de renver
fer les plus forts ani
maux qui oferont l'attaquer
de front.
C'est ainsi que dans
les vaftes
ambiguitez.
de la difpute , les plus
fortes raifons ne tiennent
point contre la
prévention.
Comparons à prefent
le badinage à l'Abeille
legere , qui voltige en
folâtrant autour de ce
Taureau furieux ; elle
60 MERCURE ,
3
badine en fûreté entre
fes cornes , le pique le
gerement , il ne fait que
fecoüer l'oreille , autre
coup d'aiguillon qu'il
méprife, il ne voit point
d'ennemy , cependant
la mouche le pique , fes
piquûres font legeres :
mais elles font réïterées,
la mouche ſe porte avec
agilité par tous les endroits
fenfibles , les piqueures
redoublent , il
commence à s'irriter ,
II. PARTIE . 61
& ne voyant à qui s'en
prendre , il tourne fa
colere contre lui - même,
il s'agite , il fe mord , il
fe tourmente , & enfin
il s'épuife , s'affoiblit &
tombe . Procumbit bumi
Bos.
1
Nôtre comparaifon
nous a fort éloignez de
noſtre ſujet: tant mieux ,
elle n'en eft que plus
Homerienne , s'il y a
quelque chofe de faux
dans l'application , tant
62 MERCURE,
mieux encore. Homere
:
eft un modele qu'il faut
imiter fes comparaifon's
font longues , fauffes
& femblables les
unes aux autres , il n'importe
; c'eft toûjours le
fecond & le parfait
Homere.co
Les comparaifons de
Rabelais font plus variées
plus juftes , mais
elles ne font pas
moins allongées , & la
plupart font fi baſſes ,
II.
PARTIE. 63
bien
qu'à cet égard il faut
pour l'honneur du
goût donner la préference
au Prince des
Poëtes.
Avantcette digreffion
jay promis , a propos
d'Homere
& de Rabelais
,
d'avancer pour rire
quelques
propofitions
étonnantes , le
premier de ces Paradoxes
c'eft !
Qu'il faut plus d'étendue
d'efprit
peût64
MERCURE ,
être plus d'élevation pour
exceller dans le beau comique
, qu'il n'en faut
pour réuffer dans le férieux
.
Cette propofition va
révolter d'abord ceuxqui
prévenus par refpect
pour tout ce qui
a l'air férieux :
Admirent en baillant
un ennuyeux tragique ,
Et riant d'une Agnés , ~
méprisent le comique.
Le
II. PARTIE. 65
Le fecond Paradoxe ,
c'eft...Que les plus ex+
cellentes pieces ferieufes
font mêlées d'excellent
comique , & par confequent
qu'un Autheur ne
peut exceller dans le férieux
, s'il n'a du talent
pour le comique.
On trouveroit dans
tous les ficcles , & même
dans le nôtre , que
les plus grands genies
ont mêlé du comique
dans leurs ouvrages &
Sept. 1711.
2.F
66 MERCURE ,
dans leurs difcours , &
les genies mediocres
dérogent même quelquefois
aux prérogatives
de leur gravité ,
pour hazarder
d'être
7
plaiſans ; j'en ai vû s'arrêter
tout court , par
vanité ,
s'appercevant
qu'ils plaifantoient de
mauvaiſe grace , & ſe
déchaîner le moment
d'aprés contre le meilleur
genre de plaifanterie
.
II. PARTIE. 67
Toi qui debite
ment
grave-
Ta fade médifance,
Caustique par temperamment
Serieux par prudence ,
Tu méprifes d'un bon
plaifant
La comique élegance,
Comme un gouteux foible
& pefant
Mépriferois la danse.
Les Vers ci-deffus peuvent fe
chanter fur l'Air de Joconde.
2 Fij
68 MERCURE ,
Avant que d'avancer
mon troifiéme Paradoxe
, il faudroit avoir
bien défini le mot de
comique , & celui de fèblime;
& aprés cela
même
il feroit peut- être
encor ridicule
de
dire : Que non -feulement
le fublime n'eft pas incompatible
avec le comique
, mais qu'il peut y
avoir dans certain comique
des traits fuperieurs
aufublimeférieux. VoiII.
PARTIE . 69
la une propofition étonnante
, par rapport à l'idée
qu'on a du fublime
, que je définirois
volontiers , la perfection
dans le grand: mais on
peut en donner encor
d'autres définitions , &
c'est ce qui nous meneroit
trop loin , il fau
droit trop de temps
pourdonner à ces trois
Paradoxes toutes les explications
& modifications
qui pourroient .
70 MERCURE ,
les rendre férieuſement
vrayes ; c'eſt ce que
j'entreprendrai peut être
quelque jour , fi j'ai
le loifir de mettre en
euvre les reflexions
que j'ai faites ſur les
fauffes idées qu'on a du
fublime , du férieux &
du comique ; contentons-
nous ici debadiner
fur notre dernier Paradoxe
, qui nous donnera
occafion de comparer
quelques morI
PARTIE . 7
ceaux des deux Autheurs
, dont je continue
le Parallele .
Pour parler ſelon les
idées communes , difons
que le comique
n'eft point fublime par
lui - meſme , mais qu'il
peut renfermer des fens
& des veritez fublimes,
& c'est pour fçavoir
renfermer
ces grandes
veritez dans le comique
, qu'il faut un genic
tres étendu .
C
72 MERCURE ,
Il en faut moins, par
exemple , pour foûtenir
une morale ſublime
par des expreffions
fortes & nobles , qui lui
font propres , que pour
la traitter comiquement
,, fans l'affoiblir ,
& . fans la dégrader.
Il eft vray que le genre
ferieux eft plus grand
par luy -même que le
genre comique , il tient
fans doute le premier
rang , mais il n'y a point
"
au
II. PARTIE.
73
au
Parnaffe de
ceremonial
qui donne le pas
à un Autheur
férieux
fur un comique . Il eſt
plus grand par exemple
, de traitter la guer
re de Troye , caufée
par l'enlevement
d'une
Princeffe , que la guerre
caufée par
l'enlevement
d'un Séau , La
fequi à rapita , mais cette
grandeur
eft dans le
fujet , & non dans l'Autheur
qui le traitte , &
Sept. 1711 .
a
2 G
74 MERCURE ,
celui qui dans le Poε-
me de l'enlevement d'un
Sean , feroit entrer les
idées les plus heroiques
, feroit fans doute
un plus grand genie ,
que celui à qui la grandeur
du fujer fournit
naturellement de grandes
idées.
On ne peut pas foûtenir
qu'il y ait quanti
té de hautes idées renfermées
dans le comique
de Rabelais , mais
D &
11. PARTIE . 73
on prouveroit peut- être
qu'Homere doit une
bonne partie de ſon ſublime
à la grandeur de
fon fujet.
La baffeffe des fujets.
que Rabelais à traitez
auroit fait tomber fon
ouvrage , s'il n'avoit pas
été fouftenu par des
parties excellentes .
L'élevation & l'importance
du fujet de
Ï'Illiade l'eût fouftenuë
quand même il y auroit
2 Gij
76 MERCURE ,
eu moins de beautez
qu'on n'y en trouve .
Nous voyons clairement
par la connoiffance
du fiecle où Rabelais
a vefcu , que la
plupart de fes expreffios
fortes & naïves lui font
propres
à lui feul.
Mais
les fçavans
fans
prévention
avoüent
qu'on ne connoift pas
affez le fiecle d'Homere
pour fçavoir en quoi
il eft original : ceux qui
II.
PARTIE . 77
connoiffent le genie
oriental croiront pluſ
toft que les expreffions
nobles & figurées , que
fes comparaiſons magnifiques
, & mefme la
plufpart de fes ideés
Poëtiques , pouvoient
eftre auffi
communes
aux Grecs de fon temps
que les proverbes fenfez
le font à Paris parmi
le peuple.
A l'égard du fublime
de Rabelais , il faut con-
2 G iij
78 MERCURE
,
venir qu'il eft bien malaifé
de l'appercevoir
à
travers le bas comique ,
dont il eft offufqué , il
dit en parlant de la
Loy commentée & embrouillée
par nos Jurif
Confultes "
que
c'eft
une belle robe à fond d'or
brodée de crote : j'en dirois
autant de fon fublime
, qu'on me paffe
ce mot en attendant
la definition : Mais appellez
comme il vous
II.
PARTIE . 79
plaira f'idée qu'il donne
de la vraye & naturelle
Eloquence , par la dé
cifion de Pentagruel
fur le verbiage du li
centié , il paroit qu'elle
eft excellente : en voici
l'idée en abbregé.otod
2 G iiij
80 MERCURE,
ZZIIIIIIIII;
LAVRATE ELOQUENCE .
UN jour Pentagruef
rencontra certainLicentié,
non autrement fçavant és
fciences de fon métier de
Docteur : mais en recompenſe
ſçachant tres- foncicierement
danſer & joüer
à la paume , lequel donc
rencontré par Pentagruel ,
fut interrogé d'où il venoit
, & luy répondit , je
viens de l'urbecité celebriffime
que vulgairement on voż
11. PARTIE. 81
cite Lutece.Qu'eft- ce à dire,
dit Pentagruel , à fon truchement
ordinaire ? je fuis
tout ebahi de tel jargon.
C'eft , répond le truchement
, qu'il vient de Paris.
Hé, reprit Pentagruel,
à quoy paffez - vous le
temps à Paris vous autres
licentiez ? Nous, répondit le
Licentié , en nos occupations
épurons defpumons la verbocination
latine , en nos
recreations captons la bene
volence de lomnifeduifant ;"
omni mouvant , fexe fe
minin. A quoy Pentagruel
82 MERCURE ,
dit : Quel diable de langa
ge eft- cecy Ce n'eft que
Latin écorché , dit le Truchement
, & luy femble
qu'il eft éloquent Orateur
, pource qu'il dédaigne
l'ufance commune de
parler or le Licentie
croyant que l'étonnement
& ébahiffement de Pentagruel
venoit pour admirer.
la haute beauté de cette
élocution , fe reguinda encore
plus haut & plus obfcur,
fi que par longueur
de periodes,pouffa patien
ce à bout. Parbleu , dit à
II. PARTIE. 83
part-foi Pentagruel,je t'apprendrai
quelle eft vraie &
naturelle éloquence ; puis
demāda au Licēcié de quel
pais il étoit, à quoy répond
ainfi le Licencié. L'illuſtre
honoriferantepropagation.
de mes aves & ataves , tire
fon origine primordiale des
Regions Limofiniennes.Jentens
bien , dit Pentagruel ,
tu n'es qu'un Limolin de
Limoge , & tu veux faire
le Demofthenes de Grece :
Or viens- cà que je te donne
un tour de peigne , lors
le prit à la gorge , diſant :
84 MERCURE,
tu écorches le Latin , moy
j'écorcheray
le latiniſeur ,
fi fort lui ferroit la gorge
que le pauvre Limofin
*
commence à crier en Limofin
, vée Dicon Gentillatre
: Ho faint Marfau !
fecoùrami,bau,bau , laiẞas à
qu'ou au nom de Dious , &
ne me tou cas grou . Ah , dit
Pentagruel en le laiſſant ,
voila comment je te voulois
remettre en droit che .
min de vraye éloquence ;
car à cette heure viens -tu
de parler comme nature ,
& grand bien te faffe icel
(
II. PARTIE
. 85
le correction.
Quoique je trouve
dans cette idée une efpece
de fublime , je ne
le comparerai pas fans
doute , à ce fublime
d'Homere , dans fon
vingtiéme Livre , où il
fait parler ainfi Jupiter
à Neptune dans l'Af
femblée des Dieux .
Je vais donc m'affeoir
fur le fommet de l'Olimpe,
& regarder le combat :
mais pourvous autres vous
86 MERCURE ,
pouvez deſcendre, & pren
dre ouvertement
le party
de ceux que vous favori
fez , car fi Achille attaque
feul les Troyens , ils ne le
foûtiendront pas un moment
: comment le foutiendroient-
ils aujourd'hui
qu'il eſt armé , & que fa
valeur eft encore aiguilée
par la douleur qu'il a de
la mort de fon amy , qu
hier le voyant même fans
armes , ils furent remplis
de terreur , & ...
dona si
¿ Enfuite Homere fait
IL PARTIE. 87
defcendre les Dieux de
l'Olimpe , qui animant
les troupes des deux partis
, engagent la bataille,
&fe mêlent eux- mêmes
dans le combat.
En cet endroit je
quitte le badinage par
refpect , non pour la reputation
feule d'Homere,
mais pour la grandeur
, la majeſté & l'élevation
de fa Poëfie ;
quel genie & avec
quel art intereffe- t - il
?!
88 MERCURE ,
ici le Ciel , la terre &
toute la nature au grad
fpectacle qu'il va nous
donner ? il nous force à
nous y intereffer nousmêmes
; & voila l'effet
du fublime.
Pedant ce combat, continue
Homere , le Souve
rain maître des Dieux
tonne du haut du Ciel ,
& Neptune élevant fes
flots ébranle la terre ,
des cimes du Mont Ida
tremblent jufques dans
leurs
II. PARTIE . 89
leursfondemens , Troye ,
le champ de bataille &
les vaiffeaux font agitez
par des fecoufles
violentes , le Roy des
Enfers , épouvanté au
fond de fon Palais , s'élance
de fon Trône, &
s'écrie de toute fa force
dans la frayeur où il
eft , que Neptune , d'un
coup de fon Trident ,
n'entr'ouvre la Terre
qui couvre les ombres,
& que cet affreux fé-
Sept. 1711.
2 H
90 MERCURE,
jour , demeure éternelle
des tenebres & de la
mort, abhorré des hommes
& craint même des
Dieux , ne reçoive pour
la premiere fois la lumiere
, & ne paroiffe à
découvert
, fi grand eft
le bruit que font ces
Dieux , qui marchent
les uns contre les autres.
Apollon armé de tous
fes traits , attaque
. Neptune
; Minerve s'op
II PARTIEM
91
pofe à Mars , Diane
marche contre Junon ,
& utmais Achille n'en
veut qu'à Hector , il le
cherche dans la mêlée ,
impatient de verfer le
fang de ce Heros , fous
les yeux même du Dieu
Mars qui le protege.
Voila du beaudu
grand , il le fait fentir
par luy- même , ilan'a
pas befoin de Comentaire
, comme mille autres
endroits deswah-
2 Hij
92 MERCUREJ
ciens Autheurs , qui ne
font beaux qu'à proportion
de la credulité
de ceux qui veulent
bien ſe preſter aux décifions
des Commenta
teurs.pri oo ob qui
Comparons à prefent
deux tableaux de nos
deux Autheurs fur le
même fujet , ils veulent
l'un & l'autre reprefenter
une tempefte.
Tout
tableaufe
compare
H PARTIE
23
en peinture , en mu
fique,
En profe comme en vers
férieux on comique ,
Tempefte de Rubens ,
tempefte de Rablais ,
Même du grand Poëte
tragique,
L'on pourroit comparer
la tempefte heroique,
A la tempefte de Marais.
Ces vers le peuvent chanter far
Pair de Joconde .
cron alustamatono-i
94 MERCURE ,
TEMPESTE
DE
RABELAIS ..
EN nôtre nauf étions
avec Pentagruel le bon ,
joyeuſement tranquiles , &
étoit la mer tranquillement
trifte ; car Neptune
en fon naturel eft melancolique
& fonge-creux
pource qu'il eft plus flegmatique
que fanguin.
Bonaffe traîtreufe nous
**
IL PARTIE.
invitoit à molle oifiveté
& oifiveté nous invitoit à
boire , or à boiffon vineufe
mêlions fauciffes , bou
targue & jambons outrement
falez , pour plus vo
luptueufement faire ſentir
, & contrafter fuavité
nectarine , douce , non
comme,mais plus que lait.
O que feriez mieux , nous
cria le pilote , au lieu d'i
celles falines manger vian
des douces , pource qu'in
continent ne boirez peutêtre
que trop falé ; ce que
difoit le pilote par prono
96 MERCURE,
ftication ; car pilotes ainfi
que chats en goutieres,
fleurent par inftinc pluyes.
&
orages.
Et de fait le beau &
clair jour qui luifoit perdant
peu à peu fa tranfparence
lumineuſe , devint
d'abord comme entre
chien & loup , puis brun,
obfcur , puis preſque noir ,
puis fi noir , fi noir que
fumes faifis de mal peur ;
car autre lumiere n'éclaira
plus nos faces blêmes
& effrayées , que lueurs
d'éclairs
fulminants par
cre
II.
PARTIE. 97
crevements de flambantes
nuées , avec millions
de tonnerres tonigrondants
fur tous les tons
&
intonations des orgues
de Jupin , les pedales
pou , dou , dou , dou
icy cromornes
, Ton, ron,
ron , ron & cla , cla ,
cla , cla , cla , mifericorde
, crioit Panurge ; detournez
l'orage , fonnez
les cloches , mais cloches
ne fonnerent , car en
pleine mer cloches n'y
Septemb. 1711. 2 I
58 MERCURE
avoit pour lors : voilà
tout en feu , voilà tout en
eau, bourafques de vents,
fiflemens horrifiques , cela
fait trois élements
dont de chacun trop avions
, n'y avoit que terre
qui nous manquoit , fi
non pourtant que fondrieres
marines furent fi
ab
profondes , qu'en fin fond
d'abîmes ouverts eût- on
pu voir, harangs fur fable
& morues engravées
, or
du fond d'iceux abyſmes
II.
PARTIE. 99
vagues montoient
aux
nuës , & d'icelles nûës
ſe precipitoient comme
torrents > montagnes
d'eau , foy difant vagues
, defquelles aucunes
tombant fur la nauf, Panurge
, qui de frayeur
extravaguoit
, diſoit ho
ho ho , quelle pluye eſtce
cy ; vit - on jamais
pleuvoir vagues toutes
brandies : helas , helas
be be be be, je nage , bou
bou bou bou , ha
mau-
2
I ij
100 MERCURE
>
dit cordonnier , mes fouliers
prennent l'eau par
le colet de mon pourpoint.
Ha que cette boiffon
eft amere ! hola
hola , je n'ay plus foif.
Te tairas - cu crioit
Frere Jean & viens
pluftoft nous aider à
manouvrer où font
nos boulingues , noftre
trinquet eft avau l'eau ,
amis à ces rambades
Enfans , n'abandonnons
le tirados, à moy, à moy.
>
,
II. PARTIE. ΙΟΙ
Par icy , par là haut
par là bas.
Viens donc ,
Panurge ;
viens , ventre de folles
ju viens donc. He ! ne
rons point , difoit piteu
fement Panurge , ne jurons
aujourd'huy , mais
demain tant que tu voudras
, il eft maintenant
heure de faire voeux , &
promettre
pelerinages
ha ha , ha ha , ho ho
ho ho , je nage , boubi ,
bou bous , fommes-nous
I iij 2
io MERCURE
au fond Ah je me
meurs ! mais viens donc
icy nous aider , crioit
Frere Jean , au lieu de
moribonder, met la main
à l'eſtaranfol › gare la
pane , hau amure , amure
bas pefte foit du
pleurard qui nous eſt
nuifible au lieu de nous
aider. Ha ! oüy ouy ouy,
reprenoit Panurge , vous
fuis nuifible , mettezmoy
donc à terre afin
que puiffiez à l'aife ma-
,
II.
PARTIE . 103
nouvrer tout voſtre ſoul,
Or icelle tempefte
ou tourmente , ou tourmentante
, comme voudrez
,
commença à prendre
fin à force de durer
comme toutes chofes
mondaines : terre , terre
cria le Pilote , & jugez
bien quelle jubilation
s'enfuivit , à quoy prit
la plus forte part le
craintif Panurge , qui
defcendant le premier
fur l'arene , difoit, ô trois
104 MERCURE
& quatre fois heureux
Jardinier qui plante
choux , car au moins a- til
un pied fur terre , &
l'autre n'en eft efloigné
que d'un fer de befche.
Or remettons tempef
te d'Homere
à la prochaine
mercuriale ainfi
que plufieurs autres bribes
des deux Autheurs
que nous paralelliferons
par maniere de paffetemps
: Rabelaiſien , &
non dogmatiquement
,
II. PARTIE . ios
chofe que trop
repeter
ne puis ; car pires ſourds
n'y a que ceux qui ne
veulent
point entendre
.
Le mot de la derniere Enigme
c'eft LA CHANTERELLE .
>
On m'a envoyé quantité de
jolis morceaux qu'on a été contraint
d'obmettre auffi bien
que le refte des amuſements
parce que Meffieurs les Imprimeurs
font allez en vendanges.
Tout fe fent un peu des
Vacances ; mais à la faint
Martin on reveillera le Mercure
par plufieurs nouveautez.
Voicy feulement quelques
LOG MERCURE
noms de ceux qui ont deviné
l'Enigme .
Madame Pincette,de la Foffe
de Nantes. Altemidore & Feliciane.
La chanterelle eft caffée
, je ne danferay plus. Roffignolette.
Le beau chevelu
& c.
ENIGM E.
JE te prenspar le nez
incorrigibleyorogne,
>
Et par mainte tentation.
Je fuis prochaine occafion
D'un peché qui rougit ta
trogne ;
II. PARTIE. 107
Tu ne me connois bien qu'-
en jouiffant de moy ,
Je fuis une Enigme pour
toy.
Pour le Lecteur auſſi je
crains qu'il ne devine
Que je fuis la liqueur
divine :
Je fuis comme le vinfouvent
pernicieux
Pour eftre trop delicieux.
Dans un Palais de verre
ainsi que luy j'habite ,
Par ma couleur vermeille
ainsi que luy j'invites
108 MERCURE
Mais n'eftant pas une
liqueur ,
Et n'ayant pas en moy
cette vive chaleur
Qui ranime fouvent les
ardeurs d'un coeur
tendre :
Je nefuis pas le vin , l'on
ne peut s'y méprendre.
THOR DE
BIBLIO
LYON
*
LA
* 1893 *
HI
THERE
LA
DE
1710
LYON
VILLE#
MERCUREA
ad enig ang
HI.
PARTIES
PIECES FUGITIVES.
***************
EPIGRAMME
Sur une Dame qui s'occupoit à
filer.
CE ne font plus les trois
foeurs de la Fable ,
Qui de nos jours font
tourner le fufeau ,
Une Déeffe , aux mortels
3 A
Sept. 1711 .
MERCURE ,
Leur
plus
affable
,
a ravi le fatal écheveau
,
Mais vôtre fort n'en fera
pas plus beau
D'être filé par les mains
fortunées.
L'Amour , helas armé de
fon cifeau
Mieux qu'Atropos tranchera
vos années.
enlaulq and on 30
medlet al romvos-
Ohr zus diilota So
III PARTIE. 3
XXXXXIIIIII!
PLAINTES
Au Meffager du Man's fur fa
Lenteur & furfa pareffe.
CE n'eft point l'intereſt
ni l'amour de la gloire ,
Qui me fait en cejour importuner
les Cieux ,
Je n'ai rien à prétendre au
Temple de memoire ,
Le vif éclat de l'or n'e
bloüit point mes yeux ,
De ces foibles honteux
mon ame préfervée
Ne nourrit point dans
3 A ij
4 MERCURE ,
moi de fi bas fentimens
,
Tout ce que je demande
eft la prompte arrivée
Du Meflager du Mans.
Déja vingt fois & plus le
Le Soleil & la Lune
Ont regné tour-à-tour
Depuis que je languis dans
ma trifte infortune;
Déja la lumiere du jour
A vingt fois pour le moins
fait place à la chandelle
Sans que durant un filong
temps
III. PARTIE.
S
On air vû dans ces lieux .
la noble haridelle
Du Meffager du Mans .
Cependant je gemis , &
ma douleur profonde
Me fait perdre le jugement
:
Qu'avez-vous ? me dit tout
le monde
,
Vous êtes depuis peu tout
je ne fçai comment.
Helas fi on fçavoit la
!
caufe
De ces maux cruels& pref
fans
,
Si l'on fçavoit... & quoy ?
3.A iij.
6 MERCURE ,
non je ne puis , je n'oſe ,
Et je ne le dirai qu'au
Meffager du Mans.
Quel démon cruel & barbare
Si long- temps l'arrête en
chemin
,
Quel ennemi fecret , quel
ennuyeux deftin
Tous deux fi long- temps
nous fépare ?
Non , je ne puis fouffrir
tous ces retardemens ,
Je veux moi - même aller
le chercher & le
fuivre, elé
III. PARTIE.
Car cien eft trop , & je ne
puis plus vivre
Si je ne vois le Meffager
du Mans.
Quoy tout le jour à ma
penſée
Son image viendra s'offrir,
Et ma douleur prefente &
ma douleur paffée
Me feront doublement
Louffrir
,
Encore fi la nuit dans un
repos tranquile
Contre tous mes chagrins
je trouvois un azyle ,
Mais non , quand le fom-
3 A iiij
8 MERCURE ,
meil
peut affoupir
wwmes fens
Si je rêve , je rêve au Mef
fager du Mans .
Si pour calmier un peu ma
triſte inquiétude
Je prens quelque Livre à
la main
,
D'abord
t
I L
fon" > ſouvenir-
Borvient troubler mon
étude
Et me fait perdre mon
latin.
Oui , j'ai beau tout tenter,
rien ne peut m'en dif
traire ,
III. PARTIE.
Et je paffe fouvent tout le
jour , à quoy faire ?
Le dirai -je ? à compter les
heures , les momens
Que retarde en chemin le
Mellager du Mans.
Si quelqu'un vient à ma
rencontre
Je vais le prendre au dése
pourvû¸di
Et lui difant : Ne l'avezvous
point vû ?
Bongré , malgré , je veux
qu'il me le montre ,
S'il me demande , & qui ?
je demeure en fufpens
10 MERCURE ,
to!
Et j'admire fon ignoran
ce ,
Croyant que comme moy
tout le monde ici
penſe
Au Meffager du Mans.
Si quelqu'autre plus favorable
Entre dans ce qui fait ma
peine & mon fouci
Et me dit d'un air agréa
ble ,
Je le vis l'autre jour quoiqu'un
peu loin d'ici ,
J'admire fon bonheur , &
je lui porte envie ,
III. PARTIE.
Je le montre à tous les
paffans
Et renforçant ma voix devant
tous je m'écrie :
L'heureux homme il a vû
le Meffager du Mans.
Si quelque voyageur vers
le Mans prend la route ,
Je l'arrête , quoy qu'il en
coûte ,
Il a beau me crier : Monhieur
je fuis preffé ,
On m'attend , laiffez-moi,
s'il vous plaiſt , le
paffage ,
Je le recharge encor de
12 MERCURE ,
mille complimens
Pour l'heureux Meffager
ob /du Mans.
Je fais le guet planté tout
le jour fur ma porte ,
Tantôt affis , tantôt debout
,
7
Et quoy qu'il entre , ou
quoy qu'il forte ,
Je vols, & j'examine tout.
L'efprit tout occupé de
cette unique affaire ,
Alerte au moindre bruit
fi par hazard j'entens
Quelque Cheval hennir ,
ou bien quelque Afne
IL PARTIE 13
braire ,
Je crois toûjours que c'eſt
le Meffager du Mans.
Entendray je bientôt
gringotterles fonnettes?
Le verrai- je bientôt entrer
fuperbement?
Claquant fon foüet & piquantfes
mazettes ?
Quand viendra - til ce
Meffager charmant
Les forêts , les rochers &
le creux des fontaines
Retentiffent par tout de
mes gemiffemens ,
Seras-tu donc lefeul infen14
MERCURE ,
fible à mes peines ,
Barbare
Meſſager
du
Mans ?
Helas quand dans Roüen,
tu me faifois tant
d'offres ,
Si tu voulois fi tard m'apporter
mes deux coffres
,
Falloit-il ten charger,
Boureau de Meffager ?
Je m'enfouviens encor, tu
ne peux t'en défendre ,
Dansfix jours au plus tard
tu devois me les rendre ,
Tu me l'avois juré , fontIII.
PARTIES
ce là tes fermens ,
Traiftre de Meſſager du
Mans ?
Que diras-tu pour ton excufe?
Si rien pourtant peut t'excufer
:
Cherche quelque détour ,
invente quelque rufe , 1
Ingrat , je t'aiderai moyi
même à m'abufer ,
Pour toy je fens encor un
refte de tendreffent
Malgré tous mesrelſentipoormens.
or
O Ciel peut-on avoir tant
16 MERCURE
de foibleffe2
Pour un maraut de Mef
fager du Mans ?
Parle enfin, dis- moy quel
que chofe ,
Qui t'a fi long- temps retenu
?
De ces delays viens
m'apprendre la cauſe ,
Dis , ne devrois - tu pas
être déja venu ?!
Quoy tes roffes n'ont pu
faire un filong voyage ?
Des brigands t'ont volé
tout mon pauvre équipage
?
On
IIK PARTIE. 17
On t'a roüé de coups ? Plût
à Dieu : mais tu mens ,
Fripon de Meffager du
Mans.
Dis plûtôt qu'à trinquer
bornant ta diligence ,
T'arrêtant à chaque bouchon
,
Par tout où tu trouvois le
cydre ou le vin bon ,
Tu ne fongeois , coquin ,
qu'à te garnir la panſe ;
Ne diffimule point , dis
qu'à force de boire
Avecque tes pareils , tous
mauvais garnemens ,.
Sept. 1711.
3
B
18 MERCURE ,
De mes coffres reçûs tu
perdis la memoire , !
Yvrogne Meffager du
Mans.
Tu ne peux deformais appaiſer
ma colere ,
Tu periras , ingrat , l'Arreft
en eft porté ,
Non , je n'écoute plus ni
foupirs ni prieres ,
Tu n'as que trop longtemps
outragé ma
bonté ;
Je veux que fans miferi
corde
On t'attache au bout
III.
PARTIE. 19
d'une corde ,
Pour être un bel exemple
aux
Meffagers trop
lents ,
Pendart de Meffager du
Mans.
Venez implacables furies ,
Tifiphone , Megere , &
vous trifte Alecton ,
Sortez du manoir de Pluton
Pour exercer ici toutes vos
barbaries ,
Inventez , s'il fe peut,quelques
nouveaux tour-
-mens ,
3 Bij
20 MERCURE ,
Vous puniffez là -bas de
u peines éternelles .
Des Ombres bien moins
criminelles
Que n'eft le Meffager du
Mans.
Mais que dis-je,où m'emporte
une juſte vengeance
?
Calmons - nous pour un
temps , foyons plus retenus
Ayons pour lui quelque
indulgence
Du moins jufqu'à ce que
mes coffres foient venus
HI PARTIE. 21
La prudence le veut , la
raifon le demande ,
Laiffons aprés cela travailler
les Sergens ,,
Qu'on brûle fi l'on veut ,
qu'on affomme ou
qu'on pende
Le Meſſager du Mans.
Cependant j'en tiens pour
mon compte:
Mais fi jamais jy fuis repris
,
Si Meffager du Mans aprés
cela m'affronte ,
Je veux étre étrillé de la
Fleche à Paris,
22 MERCURE ,
Je veux aller le trot d'icy
juſques en Boheme ;
Je veux avoir procés avec
des bas Normans ,
Et pour dire encor plus
je veux paffer moi-
Con même
Pour Meflager du Mans.
EPIGRAMME.
CEphale un foir devoit
" s'entretenir
Avec l'Aurore au retour
de la chaffe ,
Il vous rencontre , & de
fon fouvenir
En vous voyant le rendezvous
s'efface ;
III PARTIE. 23
Qui n'eût pas fait même
chofe en fa place !
J'euffe failli comme lui fur
ce point :
Mais le pauvret,mal tient
qui trop embraffe ,
Perdit l'Aurore & ne vous
gagna point.
A MESDAMES DE P.
& S. qui demandoient des
nouvelles de Paris étant à la
campagne.
VEnus ne voyant plus
fon fils ,
D'un cruel chagrin devo
rée sales
24 MERCURE,
Le cherchoit partout dans
Paris ;
Quelqu'un la voyant éplōrée
Luy dit : Charmante Cy-
So therée ,
Pour revoir ce fils fi cheri
Ici tomfoin eft inutile ,
Avec l'aimable ***
Pl * a quitté cette Ville
Tourne tes amoureux oyſeaux
,
Vole vers ces riches coteaux
D'où l'on voit ferpenter lå
Seine ;
Et par mille & mille dé-
Sur tours ,
III. PARTIE 25
Sur l'émail d'une vafte
plaine ,
Se plaît à repandre fon
cours
Dans le fond de quelques
vallées
Où Flore étalle fes attraits ,
Et dans les routes reculées
Des plus tenebreuſes Forêts
,
Prés de ces charmantès
Cmortelles
on
Ton fils fe plaît à s'arrêter:
Ha dit Venus , puis -je en
douter
Souvent il me quitte pour
10 elles
Sept. 1711. 3 C
26 MERCURE,
J'en reffens un jaloux tranf
port ;
Cependant il faut me contraindre
,
Chacun me
fourient
que
Jay tort
Si quelquefois j'ofe m'en
allon
plaindre
, DOI
REPONSE
290
Aune lettre en vers &
profe de M. Du.
Maître Vincent le grand
faifeur de lettres
Si, bien que vous n'eût
fçû profaifer
,
0
III. PARTIE. 27
Maître Clement le grand
forgeur de metres
Si doucement n'eût fçû
poëtifer ,
Phoebus à donc va fe défabufer
De fon amour pour la docte
Fontaine ,
Et
connoîtra que pour
bons vers puifer ,
Vin Champenois vaut
mieux qu'eau d'Hypocrêne.
EPIGRAM ME.
CErtain yvrogne aprés
maint bons repas
Tomba malade , un doc-
3 Cij
28 MERCURE ,
teur Galinique
Fut appellé : Je trouve icy
deux cas ,
Fievre brûlante & foifplus
que cinique :
Or Hypocars tient pour
methode unique
Qu'il faut guerir la foif
premierement ;
Lors le fievreux répond :
Maiftre Clement ,
A premier point n'eſt le
plus neceffaire ,
Guériffez moy ma fievre
feulement ,
Et pour ma foif ce fera
mon affaire..
III.
PARTIE . 29
EPIGRAM ME.
Certain Huiffier étant à
l'Audiance
Crioit toûjours , paix là ,
Meffieuss , paix là ,
Tant qu'à la fin tombant
en défaillance ,
Son teint pâlit & fa gorge
bera s'enfla ,
On court à lui , qu'eft- cecy
, qu'eft cela ,
Maiſtre Perin ? du fecours,
il expire ,
Bref, on le faigne , il revient
, il foûpire ,
Puis ouvrant l'oeil , clair
comme un bafilic :
3 C iij
30 MERCURE
,
Voila , Meffieurs , fe pritil
à leur dire ,
Ce que l'on gagne à parler
en public .
Sur an Bonnet donné.
Venus tenoit un Bonnet
dans fa main,
Je t'en fais don , me dit
cette immortelle ,
Scache qu'il n'eft Roy, ny
Conful Romain.
Qui n'enviât une faveur fi
belle
Malheur plûtôt , dif-je , à
toute cervelle ,
Si vous coëffez , le defor
IH. PARTIE .
30
dre s'y met
Va , ya , j'en coëffe affez.
d'autres , dit- elle ,
Sans leur donner , ni Tocque
, ni Bonnet,
BOUQUET NOUVEAU
& Mademoiselle V ... Par
Monfieur R......
Corinne, Laure, Aſtrée,
Objets de vers immortels,
Noms qu'Appollon &
Cytherée
Ont. confacrez fur leurs:
Autels ,
32 MERCURE
,
Depuis qu'aux bords du
Stix le fort vous fit
defcendre
,
Tous vos amans vous font
entendre
Qu'avec vous a fini l'empire
de l'amour ,
Et je l'aurois comme eux
penfe jufqu'à ce jour
Aumoins c'eût été grande
affaire
De vouloir prouver le
contraire .
Me ferois - je chargé de
trouver des amans
Soupirans fur le ton des
voftres ?
III. PARTIE.
33
De nos belles auffi les plaifirs
font tous autres
Que celuy des beaux fentimens.
Enfin grace à l'amour il
eft une mortelle
Digne de vôtre fiecle , elle
eft docte , elle est belle ,
De la delicateffe elle connoît
le prix ;
Elle a fur vos tombeaux
recüeilly vos efprits ,
Loin d'elle Eloges inſipides
,
Qu'aux rives du Parnaffe
elle porte
fes
pas
,
34 MERCURE ,
Les Petrarques & les Ovides
Ne lui
manqueront pas ,
Vous en recevez la nouvelle
Sans aucuns fentimens jatoux
!
Il eft ici plus d'une belle
Bien moins genereuſe que
vous.
Pour la gloire du ſexe aimeriez
- vous tant
Lyle ?
Au Parnaffe aujourd'huy
l'on celebre fon nom ;
Sur un Trône de fleurs
vous l'y verrez affſiſe ,
111. PARTIE
35.
Venez , & qu'Aftrée y
conduife
Des bergers tels que ceux
que connut le Lignon :
Pour Lyfe tous bergers fe-
Front conftans &
tendres
Pas un Hilas , parmi tant
de Silvandres ;
Je vis auffi les grands Au
teurs I!
Suiyre Corinne & Laure
oren habit heroïque¸3ɔ !
Poëtes couronnez , dont
Arefprit ne s'applique.
Qu'à celebrer des Rois &
des Vainqueurs
,
#f. A
36 MERCURE ,
Lyfe connoît fa Cour , le
fublime pour Lyfe
Ne fera jamais étranger ,
Lyfe aime auffi les bois
fa douceur l'humanife
Avec l'hommage d'un
berger.
D'une voix , mal affurée ,
Te chanterois -je à mon
tour ?
Ah ! Lyfe , fi Phebus m'exauce
chaque jourybe
Je t'écrirai des vers , d'une
plume tirée d
Des ailes mêmes de l'A-
2elo
THEQUE
mourliɔ5) 640
prisy zab
DE
LA
VILLE
LYON
*1893*
MERCURE
DE
LA
PILLE,
GALANT
LYON
*1893 *
IV. PARTIE.
1
1
MAINININININI
NOUVELLES
Lettre de Bafle du 2 221
Aouft. roule1.1
9110
Thomas Mafner , qui
avoit eu la temerité d'arref
ter Monfieur le Grand
Prieur de France dans un
Septembre 1711. 4. A
E MERCURE
Etat fibre & neutre , & de
le livrer aux Officiers de la
Maifon d'Autriche , a efté
condamné le 17. Aouſt à
Ilants , où eft le Tribunal
des trois Ligues Grifes
comme criminel de leze
Majefté , & c. voicy la copic
de fon Arreft.
SENTENCE FINALE
rendue contre Thomas
Mafner , Facteur & Bourgeois
de Coire.
Aprés avoir oui l'accufation,
la lecture & l'Examen des
?
A .
IV. PARTIE.
témoignages documents , &
differentes Lettres écrites de
lapropre main de l'accusé, ¿
tout ce qui a efté raporté en
justice , par Meffieurs les Fif
caux , il a efté aprés avoir invoqué
l'affiftance de Dieu
prononcé fentencie unanimement
que l'accufe Thomas
Mafner qui eft encore fugitif,
doit estre depofe de tous les
honneurs, charges ,
émolumens , banny des trois
Ligues Grifes , &fa teſte mife
à prix de cing cent ducats , en
forte que celui qui le tuëroit ,
on apporteroit fa tefte , recevra
簾
4 A ij
4 MERCURE
·lesdits cinq cens ducats de la
caiffe commune des troisLigues;
mais celui qui le livreroit en
vie entre les mains de laJustice
des trois Ligues , aura pour
recompenfe mil ducats auffs à
prendre dans la Caiffe des Ligues
, avec la liberté , s'il eftsit
un banny , de plus l'accusé archifcelerat
Thomas Mafner
comme offenfeur de la Majefté
Divine & de fon Prince
territorial , traiftre de lapatrie ,
rebelle voleur de grands
chemins , Faux - monoyenr ,
convaincu de tous les crimes,
forfaus , dont il a efté
IV. PARTIE.
accufé , fera mis en quatre
quartiers par le Bourreau ; &
ainfi executé à mort, & les
quatre quartiers & fon corps
feront exposés publiquement ,
fur les grands chemins ; Mais
comme lui Thomas Maſner,
s'eft fouftrait prefentement de
la Fustice , l'execution ſe fera
dans fon effigie, & elle fera
en mefme temps brûlée par le
Bourreau ici dans la place des
executions conjointement avec
fes écrits rebelles & diffama.
toires publics contre l'Etat &
contre les Reprefentants , fa
maiſon Jera demolie juſqu'aux
4. Aiij
7 MERCURE
fondements , l'on dreffera
en la place deux colonnes d'infamie
, avec l'infcription de
tous fes crimes ; tous fes biens
effets dedans le pays , &
dehors , comme auffi toutes les
Charges émolumens, feront
des à prefent échues au Fifc des
trois Lignes, & comme celui ou·
ceux qui ci- aprés parleront de
la liberation de lui Mafner,
ou qui la demanderont , qui
auront avec lui directement ou
indirectement une correfpondance
de bouche , ou par efcrit
dedans ou dehors le pays , ¿ª
qui lui donneront retraite on
IV PARTIE
7
domicile , tomberont da la difgrace
des trois Ligues &payeront
mil écus d'amande , l'on
impofepareillementparferment
à chaquefuperiorite & commune
dupays de fefaifir de lai toutes
les fois en tel lieu qu'on
pourra l'attraper , fous peine
de l'exclufion des trois Ligues ,
& la referve d'un plus grand
chaftiment d'accomplir cette
fentence en la perfonne de lui
Thomas Mafner, fans autre
forme de procés ; mais fi fuivant
les menaces qui ont efte
faites les capitaux , & les
effets que nos Compatriotes ont
A' iiij
•8
MERCURE
dans les
pays étrangersfuffent
attaquez tous, ou en partie par
luy Thomas Mafner ou a fon
inftigation & qu'il fuffent mis
en arrest , nous accordons dés
àprefent le droit lepouvoir à
nofdits Compatriottes , ainfi endomagezde
s'enprendre aux enfans
heritiers de Mafner,¿
defe faire payer de tousfraise
dommages ; c'eft ainfi que nous
decretons ,
prononçons & fententions
au nom de Dieu le
juge, & parJustice . Faite
publiée à Ilants le 17. Aouſt
1711.
Exprato Cello Jo : UldaIV.
PARTIE.
ricus
Deblacmental : Supis
Gris Fred : Concillarius &
Actuarius.
Sur l'inftante interceffion de
Dame Urima Mafner née
Stampa , femme du malhewreux
Thomas Mafner qui a
efté condamné , faite par fon
frere , & fon cousin , Maître
Jean Bannier, Charles
Stampa, & par d'autres parens,
l'on a en leur confideration , &
particulierement des enfans ,
petits enfans , & de leurs
predeceffeurs parents
modere la Sentence publiée .
fçavoir que pour les épargner,
to MERCURE
ladite Sentence n'aura point
de lieu à l'égardde la demolition'
de la maifon , & de l'erection
des colonnes d'infamie; mais que
tous les autrespoints portez par
la Sentence demeureront en
leurs forces & feront executez.
Faite & publiée comme deffus. "
Signé , De Bluctmental.
FESTE
Extrait d'une Lettre de Berlin
du 14. Juillet.
Le 12. Juillet Monfei
gneur le P. R. donna unc
IV. PARTIE 10
grande fefte pour celebrer le
jour de la naiffance du Roy.
Ce jour fut d'abord celebré
par un Te Deum , chanté
au bruit d'une triple décharge
du Canon des Ramparts.
Sa Majefté alla à ſix
heures chez Madame la P.
R. où il y avoit un grand
nombre de Dames, & l'on
fe mit au jeu comme à l'ordinaire
vers les huit heures ,
on tira au fort par billets
pour l'ordre de la Table. La
Reine qui ne tira point non
plus que Madame la P. R.
eur pour Mary Mr le Mar
12 MERCURE
grave Philippe , & Madame
la P. R. Mr le Veld- Maréchal
. On commença
la
marche chacun avec fa Dame
felon le numero qu'ils
avoient & on fe mit à table
de cette maniere , la place
de la Reine , & celle de Madame
la P. R. marquées
.
La Table eftoit faite en double
équerre , & décorée auffi
bien que la Salle de la manicre
la plus charmante du
monde ; c'eſt celle ou les
Comteffes mangent ordinairement
. Les murailles ef
soient tapiffées de feuillages
IV. PARTIE. 13
& de fleurs naturelles entrelaffées
avec un art infini.
Il y avoit plus de vingt
grands Miroirs de fept
huit pieds de hauteur & de
beaucoup d'autres ornemens.
Les deux longs bouts
de la Table faifoient en dedans
une espece d'allée de
beaux & grands Orangers ,
deforte que fansqu'on vit les
Caiffes , les Arbres fortoient
du bord de la table d'une
plate bande de fleurs qui
regnoient tout à l'entour
& devant laquelle les Con
fitures & les Plats eftoient
54 MERCURE
rangez. Cela faifoit un effet
fort agreable ; mais ce
qu'il y avoit de plus beau ,
eftoit une grande Caſcade
placée dans un enfoncement
de verdure , avec une Gerbe
d'eau qui tomboit dans un
grand baffin dont les bords
ainfi que tous les bafins
d'où tomboient
les napes , étoient
de cristal, en forte que
ces grands compartiments
de criftaux , & napes d'eau
éclairées derriere & devant
d'une infinité de bougies
reffembloient
à ces Fontaines
dont les Defcriptions
Le
IV. PARTIE. E
trouvent dans les Livres des
Fées. Mr. Eofander en a esté
l'Architecte. Au deffus de
la Cafcade , il y avoit un
grand Choeur de Mufique
qui dura pendant le repas
, & enfuite pendant que
Ton dança. La Reine & Madame
la P. R. eftoient aflifes
vis -à- vis de cette Cafcade
& le P. R. n'eftoit point à
Table ; il alloit & venoit
par tout , & donnoit fes
ordres de la maniere du
monde la plus gracieuſe &
la plus charmante . Madame
la P. R. commença le Bal
16 MERCURE
par un menuer , & aprés qu'
on cut danfé affez long tems
à la Françoife , on danſa à la
Polonoife . Le Prince fe dif
tingua , par fa danfe & par
fon enjoûment , il avoit pris
pour
fa femme M'de Rocolle.
La Reine refta pre-
Lente & fpectatrice jufques
à une heure aprés minuit;
alors chacun fe retira .
Je difois à moy- même ,
pourquoy Madame l'Elec
trice n'eft elle pasicy ? quelle
joye ne feroit - ce pas pour elle
de voir le Prince & la Prin
ceffe fes petits enfants briller
IV. PARTIE. 17
dans cette fefte & s'attirer
l'amour & la veneration de
tout le monde.
Enfin , Madame , vous
voyez que fi depuis longtemps
je n'ay pas eu l'honneur
de vous écrire , je ne
manque pas dans les occafions
de m'acquitter de mon
devoir. Je fuis &c.
ACADEMIES.
Le 2 s. Aoult M" de l'Aca
demie Françoiſe celebrerent
la Fefte de Sain Louis Roy
de France , felon leur cou
tume. On dit la Meffe dans
Septembre 1711. 4. B
18 MERCURE
la Chapelle du Louvre , pen
dant laquelle on chanta un
Motet en Mufique qui avoit
efté composé par Mr du
Bouffet . Le Panegyrique du
Saint fut prononcé par Mr
l'Abbé Germain.
M' de l'Academie Royale
des Sciences , & de celle des
Medailles & Infcriptions celebrerent
la même Fêre dans
l'Eglife des Prestres de l'Oratoire
; & le Pere Quinquet
Theating prononça le Panc
gyrique.
L'après dînée , M" de
Academic Françoiſe tin
IV. PARTIE. 19
rent leur Affemblée pour
delivrer le Prix d Eloquence
qui fut donné à M' Roy ,
Conſeiller au Chatteler ; celuy
de Poëfie fut remis à
l'Année prochaine.
Fefte donnée à foigny le
Jour de Saint Louis
par M de la Brulerie
, ancien Officier
des Troupes du Roy,
& Chevalier de l'Or
dre Royal & Militaire
de S. Louis .
Le 25. Aóuft , Fefte de
40 Bij
20 MERCURE
Le 25. Aoult , Feſte de
Saint Louis , M' de la Brulerie
, l'un des principaux
Officiers de la Ville de Joigny,
donna un diné magnifique
où fetrouverent M le
Marquis de Guerchy , pere
du Lieutenant General , M
le Marquis de Montperous ,
Lieutenant General & Meftre
de Camp General de la
Cavalerie de France ; M' le
Marquis d'Hautefeuille
Maréchal de Camp ; M' de
la Tafte auffi Maréchal de
Camp , & tous Chevaliers
de S. Louis ; Mr de Cham
IV. PARTIE. 21
Mr
Jay Grand- Croix de cet Ordre
; Mr Joly ancien Brigadier
des Armées du Roy ,
Chevalier de Saint Louis ;
Mr le Baron de Bontain
Maître des Ceremonies &
Prevoft de l'Ordre ;
d'Iverni auffi Brigadier &
Chevalier de Saint Louis
Mr de Brumpt ancien Colo
nel Ecoffois , qui amena la
Nobleffe d'Ecoffe & qui l'a
commandée pour le ſervice
du Roy jufqu'en 16.9 2.
Mr d'Arbonne , Capitaine
-audit Regiment de Pardaillan
Cavalerie , Mr le Cheva
22 MERGURE
lier de Verneüller , fils du
Prefident à Mortier de Rou
en , Menin de Monfieur le
Duc du Maine , tous Che
rs
valier de S. Louis M Bèrthelot,
de Pleneuf, de Charmoy
, & dé Senan , ancien
Colonel de Cavalerie , s'y
trouverent auffi , avec plufeurs
autres perfonnes de
confideration .
On paffa l'aprés dînée
en Jeux & en réjoù flances ,
& de foir Mr de la Brulerie
donna auffr un grand fou
pé aux Dames , au Gouver
neur , au President & à tous
IV PARTIE 25
les Confeillers de la Ville.
Aprés le foupé on tira un
beau feu d'Artifice , qui
fur fuivi d'un Bal qui durătoute
la nuit .
MORTS.
Louis François de Boufffers
, Pair & Maréchal de
France , Chevalier Ordres
du Roy & de la Toiſon
d'Or , Capitaine des Gardes
du Corps , cy devant Colonel
du Regiment des Gardes
Françoifes , Grand Bailly &
Gouverneur hereditaire de
24 MERCURE
la Ville de Beauvais & du
Beauvoifis , Gouverneur &
Lieutenant General des Provinces
de Flandres & de
Haynault , Gouverneur particulier
& Souverain Bailly
des Villes, Citadelle & Châ
tellenic de Lille de General
des Armées du Roy , mourut
à Fontainebleau le 22.
Aouft , âgé de 67. ans Lept
mois. Son Corps a elté
apporté à Saint Paul où il a
efté inhumé. Il eftoit né le
dix Janvier 1644. & il commença
à porter les Armes en
qualité de Cadet , dans l
Regiment
IVPARTIE. 25
f
Regiment des Gardes en
1662. En 1663. & 1664 .
il fe trouva aux expeditions
de Marfal & de Gigery. En
1666.il fut fait Sous Lieutenant
dans le même Regiment
, & il fe diftingua l'an
née fuivante au Sieges de
Tournay , de Douay , de
Lille , & de plufieurs autres
Places. En 1668 , il fervit
d'Aide Major au Regiment
des Gardes ; en 1669 il fue
fait Colonel du Regiment
Royal de Dragons , & l'année
fuivante il fervit à la
tefte de ce Regiment à la
Septembre 1711. 4. C
26 MERCURE
Conquefte de la Lorraine
fous Mr le Maréchal de
Crequy. A la mort de Mr
le Comte de Boufflers fon
frere ainé , il eut la Charge
de Lieutenant General de la
Province de l'Ile de France ,
& celle de grand Bailly de
Beauvais dont ce Comte é
toit pourvû. Il fervit dans la
guerre de Hollande fous Mr
de Turenne & fous Mr le
Maréchal
de Luxembourg
,
s'y diftingua en plufieurs
occafions , & entr'autres au
Combat de Woerden où il
fut bleffe,& paffa en AllemaIV
. PARTIE.
27
gne fur la fin de l'année
1673. il fut bleffé ´en 1674 .
à la Bataille d'Ensheim . En
1675 il fut fait Brigadier
de Dragons , & foutint les
efforts des Ennemis à la tefte
de l'arriere Garde de l'Armée
lors qu'elle fe retira
aprés la mort de Mr de
Turenne. En 1676. il fervit
en Allemagne fous Mr le
Maréchal de Luxembourg
.
En 1677. il fut fait Maréchal
de Camp & fervit fous
Mr le Maréchal de Crequy .
En 1678. il fe trouva aux
Combats de Rhinsfeld , de
4. Cij
18 MERCURE
Seckingen , & d Offembourg
, & fut pourvû la
même année de la Charge
de Colonel general de Dragons.
Il alla l'année fuivante
en Dauphiné avec un corps
d'armée , & en 1681. il prit
poffeffion de Cafal , & la
même année il fut fait Lieutenant
general . En 1682 ,
il marcha avec un corps
d'armée vers les Pyrenées
pour obliger la Ville de Fontarabic
de faire au Roy fatisfaction
que Sa Majesté luy
demandoit . En 1683. i repaffa
en Flandre où il fervir
IV . PARTIE 2
fous Mr le Maréchal d'Humieres
. En 1684. aprés la
reduction de Luxembourg
il campa fur l'Escaut avec un
corps de troupes juſques à
la conclufion de la Trêve.
En 1685. il paffa à Bayonne,
& de - là dans la Guyenne
pour y commander en
Chef En . 1686. il eut le
Gouvernement de la Ville
& Province de Luxembourg
& du Comté de Chini. En
1687. il fut pourvûde celuy
de Lorraine & de la Provin
ce de la Sarre & du Commandement
en Chef des
30 MERCURE
trois Evêchez & de Sedan.
En 1688. il Commanda
l'Armée d'Allemagne en
Chef , prit Keiferloutre
Krütznac , Worms , Oppeinheim
, reduifit tout le
>
Palatinat à l'obeiffance du
Roy , & fit entrer des Troupes
dans Mayence. Certe
même année Sa Majesté
l'honora du Collier de fes
Ordres . Il fit plufieurs autres
expeditions les deux
années fuivantes , & Commanda
l'Armée de la Mofelle
. En 1699. il eut le commandement
en Chef du
IV PARTIE.
31
•
Pays d'entre Sambre & la
Mer. En1691 il fut bleffe
au Siege de Mons , bombarda
la Ville de Liége , & fut.
fait Colonel des Gardes.
Françoifes. En 1692. il
inveftit la Ville de Namur ,
s'oppofa au Prince d'Oran
ge qui voulut fecourir cette
place fe diftingua à la
Baille de Steinkerke , bombarda
Charleroy & reprit
Furnes que les Ennemis
avoient fortifié . Au commencement
du mois de Mars
1693. le Roy, l'honora du
Baſton de Maréchal de Fran-
4. Ciiij
32 MERCURE
ce , & de l'Ordre de Saint
Louis au mois d'Avril fuivant.
Il fervit cette même
année en Allemagne fous
Monfeigneur le Dauphin ,
& en Flandres l'année fuivante
où il fut fait Gouverneur
& Lieutenant generat
de cette Province & du
Pays conquis. En 1695. il
deffendit la Ville de Namur
pendant plus de deux mois
afficgée par le Prince d'Orange
, qui le fit conduire
à Maftrick , ou il reſta 15 .
jours . A fon retour le Roy
érigea fa terre de Cagny en
IV PARTIE. 33
* Duché fous le nom de Bouf.
Aèrs en 1695 Il Comman
da l'Armée du Roy entre
· Sambre & Meufe en 1696.
& en 1697. Le 4. Septembre
1701. il fit élever dans fon
Chafteau de Boufflers en
Beauvoifis , la Statue équeltre
du Roy , la même année
il cut ordre de fe rendre à
Bruxelles pour commander
dans tous les Pays Bas
Espagnols conjointement
avec Mr le Marquis de
Bedmar. En 1702. il fervit
fous Monfeigneur le Duc
de Bourgogne . En 1703. il
34 MERGURE
commanda l'Armée du Roy
en Flandre conjointement
avec Mr le Maréchal de
Villeroy , & deffit les Hollandois
avec Mr le Marquis
de Bedmar au combat
d'Eckeren ; ce fut pour le
recompenfer de cette action
que le Roy d'Espagne luy
envoya l'Ordre de la Toifon
d'or. Cette même année
le Roy le fit Capitaine
des Gardes du Corps , & il
fe démit de celle de Colonel
des Gardes Françoifes. En
1708 , il deffendit la Ville ,
IV. PARTIE .
35
& la Citadelle de Lille d'une
maniere qui luy fit beaucoup
d'honneur , & ce qui
que
luy fit meriter la dignité de
Pair de France le Roy
luy donna par Lettres Patentes
regiftrées le 19.
Mars 1709. S. M. luy accorda
auffi les grandes entrées
de premier Gentil'homme
de la Chambre , & la furvivance
du Gouvernement
de Flandre pour Mr le
Comte de Boufflers fon fils
aîné. La derniere action où
feu Mr le Maréchal de
36 MERCURE
Boufflers s'eft diftingué à
efté la Bataille de Malplaquet
, où il commandoir
Faile droite ; il y renver fa
tout ce qui s'oppofa à luy
mais Mr le Maréchal de
Villars qui commandoit
Faile gauche ayant efte
bieffe dangereufement , &
ayant eu plufieurs de fes Of
ficiers generaux tuez , Mr
le Maréchal de Boufflers
foutint encore long temps
les efforts des ennemis
nonobftant leur grande fuperiorité
, jufqu'à ce qu'il
jugeaft à propos de faire fa
IV. PARTIE. 37
1
T
S
retraite qu'il fit en fi bon
ordre que les ennemis n'ofe
rent le fuivre.
La Maifon de Boufflers
eft des plus anciennes de la
Province de Picardie. Elle
a pris fon nom de la Terre
de Boufflers qui eft dans le
Ponthieu , & qui a été poffedée
fans interruption depuis
12.00 ans jufqu'à ce jour par
ceux de cette Maiſon.
Jean Baptifte le Févre de
la Barre, Commandeur, Prevoft
& Maitre des Ceremonies
de l'Ordre Royal , Militaire
& Hôpitalier de Nô38
MERCURE
tre-Dame du Mont Carmel
& de S. Lazare de Jerufalem,
mourut le 17. Aouft âgé de
71. ans. Antoine le Févre ,
Seigneur de la Barre Confeiller
au Parlement , fon pere
avoit efté Prevoft des Mar
chands.
Marie de Ligny , qui avoit
épousé le 13 Janvier 1677.
Antoine Egon , Prince de
Furftemberg mourut à Paris
le 18. Aouft âgé de 55.ans.
Elle laiffa N.. de Furftemberg
qui époufa le 1 3. Mars
1704. N .. Comte de Lannoy
, & Marie Loüife MauIV.
PARTIE. 39
rice , qui époufa le 10. Janvier
1708. Jean - Baptifte
Colbert , Marquis de Seignelay
.
Jean Guillemin , Seigneur
de Courchamp , Maiſtre
des Requeftes , mourut le
18. Aouft. Il avoit épousé
Marthe -Clemence de Bailleul
fille & foeeur de Prefidents
au Parlement.
Jean Phelypeaux , Confeiller
d'Erat Ordinaire , cidevant
Intendant de Paris ,
mourut le 19. Aouft âgé de
65. ans . Il étoit frere de M
le Chancellier.
40 MERCURE
+
Le P. Chatics de Rocheblanche
, Cordelier , Doctenr
de Sorbonne , Lecteur
en Theologie & ancien Gardien
des Cordeliers de Paris
y mourut le 17. Août en fa
6 année & en fa do
7 so.
Religion en reputatiton
d'une grane vertu.
Anne - Elifabeth - David
de Vaux , époule de François
Jofeph de Sevré , Confeiller
au Parlement , mourut le 21 ,
Aoult âgée de 35. ans.
Marie-Anne Charlote da
Bourbon , Dimoiſelle d'Eftouteville
, fille de feu Louis
IV . PARTIE.
41
Henry legitimé deBourbon,
Prince de Neufchaftel en
Suiffe , & d'Angelique Cunegonde
de Montmorency-
Luxembourg , qui étoit née
le 26. Septembre 170 1 .
mourut le 23. Aouft. Elle
laiffe pour heritiere fa four
unique , épouse de Mr le
Duc de Luines.
Jean Aubery , Marquis de
Vatan Baron de Serrieres
& c. Lieutenant de Roy au
Gouvernement d'Orleanois
& Blaifois , mourut le 28 .
Aouft âgé dess . ans . Il laiffe
des enfans de N. de Bailleul,
Septembre 1711. 4. D.
42 MERCURE
foeur de M de Courchamp
dont on vient de parler.
Elifabeth Sophie Cheron ,
de l'Academie Royale de
Peinture & Sculpture , & de
celle des Ricovrati de Padoue
, époufe de Mr le Gay ,
Ingenieur ordin aire du Roy ,
mourut le 4. Septembre.
Marie Madelaine du
Moncel de Martinraft , veuve
de Georges de Scudery.
Gouverneur de N. Dame de
la Garde , mourut le 6. Septembre
, âgé de 9o. ans .
Jerofme de Sainte Beuve ,
Prieur de S Jean de Monto-
"
-
1 I I 3
IV .
PARTIE . 43
ل
riolo , mourut auffi le 6.
Septembre. Il étoit frere de
feu Mr de S. Beuve , Docteur
de Sorbonne , & fort
connu de tous les Sçavans .
Marie du Clos , mourut
à Falaife fur la fin du
mois d'Aouft dans fa centneuvième
année.
›
Henry Colbert de Maulevrier
, Chevalier de Malthe
, Lieutenant General des
Armées du Roy , mourut à
Cambray le 25. Aouſt âgé
de 34 ans. Il y avoit 17 ans
qu'il fervoit avec cette franche
valeur fi naturelle au
4. Dij
44 MERCURE
fang des Colberts. Il fut
bleffe dangereufement
en
1695. au fiege de Namur
où Mr le Marquis de Mauleviier
fon frere aîné fuc
tué. Le Roy luy donna fon
Regiment , qui fut envoyé
en Italie en 1701. où il s'eft
fignalé tant que la guerre y
a duré. Il paffa enfuite en
Efpagne où il fervit fous
Monfieur le Duc d'Orleans ;
il fe diftingua particulierement
au fiege de Lerida . I
a exercé la Charge d'Infpecteur
general d'Infanterie
pendant fix années avec tou
IV.
PARTIE. 45
S
Y
te l'exactitude & la probité
que demande cet employ
Auffi M' le Chevalier dé
Maulevrier poffedont il tou
tes les qualitez du plus excellent
Officier general & celles
du plus parfait honneftehomme
Ileft generalement
regretté des gens de guetre
& de tous ceux qui le connoiffoient.
Il eftoit fils de
feu Mr le Comte de Mau
levrier , Lieutenant general
des Armées du Roy , Chelier
de fes Ordres , Gouver
neur de Tournay , frere de
feu Mr Colbert.
.
46 MERGURË
Guillaume de Bautru
Comte de Serrant , ci - devant
Chancelier de feue Son
A. R. Monfieur , Frere unique
du Roy , eft mort à Ser-
Fant en Anjou , âgé de 93 .
ans. Il eftoit fils de Guillaume
Bautru , Introducteur
des Ambaffadeurs , Envoyé
du Roy en diverfes Cours ,
& de l'Academie Françoife.
Mylord Jean Caryll , Baron
de Dunford en Angleterre
, Miniftre & Secretaire
d'Etat du Roy de la grande
Bretagne , & Secretaire des
Commandemens de la Rei
IV .
PARTIE. 47
3-
CTC
de
Ra
ne , eft mort à S. Germain
en Laye âgé de 94. ans. Il
s'eftoit toujours diftingué
par fa pieté , par la capacité,
par fon attachement à fon
legitime Souverain , & par
fa charité envers les Pau--
vres..
Anne Genevieve Martineau
épouse de François
Ferrand , Seigneur de Villemilan
, Maiftre des Requêtes
& Intendant en Bretagne
,mourut le 15. Septembre
âgée de 45. ans , laiffant
une fille unique.
Marie Reine de Mont48
MERGURE
chal , veuve de Charles- Ho
noré Barentin , Seigneur
d'Hardivillers , &c. Maiftre
des Requeftes , mourut le
16. Septembre âgée de 27.
ans , laiffant pofterité.
MARIAGES.
Le 14. Septembre Mr de
Lamoignon de Blanc- meſnil
Avocat general du Parlement
, épousa Mademoi
felle Daligre , fille d'Eftienne
Daligre , Prefident au
Parlement , & de Madelaine
le Pelletier, fa premiere fem
mc.. Ec
IV. PARTIE 49
f
Et le 17. du même mois
le Prefident Daligré épouſa
#
en troifiéme nôces Mademoiſelle
de Bonnetot , fille
de Mr de Vaurouy , Mar
quis de Bonnetor , premier
Prefident de la Chambre
des Comptes de Rouen.
BENEFICES.
Le 15. Aouft le Roy nomà
l'Evefché de Rennes
vaccant par la mort de Jean-
Baptifte de Beaumanoir ,
Chriftophe - Louis - Turpin
de Criffay Sanzay , Docteur
Septembre 1711. 4. E
fo MERCURE
de Sorbonne, & Doyen de
Saint Martin de Tours ..
Artemius eftoit Evefque
de Rennes fous le Pape
Leon VII. & Menalius aprés
Ş. Amand fous le grand
Clovis. S. Moran remplif
foit ce Siege vers l'an 703 .
& fit fa démiffion vers l'an
717.2 pour allar refider à
Berzetto en Italie , dont il
fut fait Abbé uc A .; 1 nă
Le Diocefe de Renhésſrenfernte
26:3 . Paroiffes com
prifes fous fix Doyennez
Ruraux , defquels il y en a
trois qui dépendent de l'Ar
3
IV PARIE.
1
20
CZ
01
A
chidiaconé de Rennes & les
trois autres de celuy du Deferc
.
+
Il y a dans la Ville de Ren
nes proche la Porte de Morlaix
un Puits fait en 1698. dans
lequel un Maçon qui travail-
Loit au haut laiſſa tomber fon
marteau. Un homme de jour,
née y eftant defcendu pour le
chercher , fut étouffé en approchant
de l'eau. Ily en defcendit
un fecondpour tirer le corps
mort , qui eut la même deſtinée
ainsi qu'un troifiéme . On y en
defcendit un quatrième à demi
gore e bien lié à qui on re-
4. Eij
32 MERGURE
commanda de crier quand il
fentiroit quelque chofe qui l'incommoderoit.
Il cria dés qu'il
futprés de l'eau , & on le retira
promptement ; mais il mourut
trois jours aprés. Il dit qu'il
avoitfenti une chaleur qui luy
brûloit les entrailles . On y def
cendit un chien qui cria au même
endroit , qui mourut peu
de temps aprés qu'il cut efté retiré.
Quand onjettoit de l'eau fur
ce chien mourant il revenoit de
mêmeque ceuxqui ont étéjettés
dans la fameufegrottedu Chien
présde Naples. On retira enfui
te lescadavres avec des crocs ; on
2
IV. PARTIE, $ 3
les ouvrit , on ne put reconnoistre
aucune cause de leur
mort. Ce qu'il y a de plus furprenant
c'est que ce nee fontpoint
des terres nouvellement remuées
qui caufent ces accidens ,
& que l'on boit tous les jours
de l'eau de ce Puits fans aucu
ne incommodité.
Sa Majefté donna l'Abbaye
de S. Florent lez Saumur
, vacante par la mort
de Mr l'Abbé de Bourlai
mont , à François de Berton
de Crillon Evefque de Vent
ce. Cette Abbaye eft de
l'Ordre de S. Benoit , &
4. Eiij.
$ 4 MERCURE
dans le Diocefe d'Angers ,
quoy qu'elle ne fe dife d'aucun
Diocefe. On l'appelle
Saint Florent , lez Saumur
parce qu'elle eft fituée proche
de la Ville de Saumur ,
& pour la diftinguer d'une
autre Abbaye du même
nom qui eft dans la Ville ,
& qu'on nomme Saint Florentle
Vieux. &
* Saint Florent , natif de
Poitou , eftoit Preftre , Difciple
de S. Martin . Aprés
la mort de fon Maiftre il
fe retira dans un caverne de
la montagne de Glonne ou
TV. PARTIE. Js
Glan fur la rive de la Loire ,
dans le Dioceſe d'Angers
du cofté de celuy de Nan
tes , & ily finit fes jours . On
fit de fon Hermitage vers la
fin du feptiéme ficcle une
Abbaye qui fubfifte encore
auffi fous le nom de Saint
Florent le Vieux . Cette Ab
baye ayant efté pillée & brûlée
par les Nornians . , Thibault
Comte de Blois en fit
rebaftit une autre dans le
Chaftcau de Saumur , où
J'on dépofa les Reliques de
S. Florent , ce qui donna
encore le nom à cette Ab-
4 Eiiij
36 MERCURE
baye , qui fut détruite avec
le Chafteau l'an 102 f . Qua
tre où cinq ans aprés on en
baftit une nouvelle prés de
la Ville vers le Couchant ,
fur la petite riviere de
Thoué qui va fe décharger
de là dans la Loire , & c'eft
*
celle
que l'on
nomme
Saint
Florent
lez
Saumur.taband
Celle
de
la
Creftera
efté
donnée
à
Antoine
Charpin
de
Gennetines
, Evêque
de
Limoges
; elle
vacquoit
aufh
par
la
mort
de
Mr
l'Abbé
de
Bourlaimont
, Cette
Abbaye
eft
de
l'Ordre
de
Cif
IV. PARTIE. 57
reaux , au Dioceſe de Langres
, & fituée dans le Bourg
de la Crefte fur lariviere de
Regnon dans le Baffigny en
Champagne à trois lieues
de Chaumont du cofté de
l'Orient. Elle fut fondée le
30. Juin 1 121. & elle eft fille
de Morimond . Saint Bernard
en parle dans la Lettre
3346. s otom. A
Celle de Montiers Ramey
, ou de Montieramey
vacante par la mort de Mr
de Beaumanoir Evefque de
Rennes , à Pierre de Pardail
lan de Gondrin , Chanoine
58 MERCURE
4
de l'Eglife de Paris , & fils
de Mr le Duc d'Antin . Elle
eft de l'Ordre de S. Benoit ,
au Diocefe de Troyes en
Champagne , & fituée à
quatre lieues de la Ville de
ce nom , fur le ruiffeau de
-Barfe. Cette Abbaye fut
fondée Fan 837. fous Louis
le Debonnaire par le Preftre
Adremar ou Arremar , dont
elle porta le nom pendant
quelque temps , comme on
le voit par ces mots latins
Monaſterium Arremarenfe ou
Monafterium Adremari. Le
Corps de Saint Victor , dit
IV. PARTIE. 59
Saint Victre d'Arcis , fur Aube
en Champagne , fut enterré
dans fa Cellule de Saturniac
, à trois petites lieuës
de cette Ville . Il fut tranf
porté depuis dans le Monaftere
du Manoir de Carbon
appellé Montier Ramey , &
ce fut ce qui donna occafion
de choisir ce Saint pour
Patron du lieu . 14 box on
Celle de Tulley , vacante
par la mort d'Estienne de
Rollée de Pallieres , à Mr.
l'Abbé Trudaine . Elle eft
de l'Ordre de Cifteaux , &
dans le Diocefe de Langres.
60 MERCURE
Celie de Laumofſne , où
du Petit - Cifteaux , vacante
par la mort de Mr l'Abbé
du Pré , à Mr l'Abbé Martineau
de Princé. Elle eft de
1'Ordre de Cifteaux , & dans
de Diocefé de Chartres.
i
}
Celle de
Bonnevaux
vacante par la démiffion
d'Henri Auguftin le Pilleur,
nommé à l'Evêché de Sain
res , à Mr l'Abbé Carpinel.
Elle eft de 1 Ordre de Cif
reaux , dans le Dioceſe de
Vienne ; & elle fut fondée
par le Pape Calixte II.
Celle de la Vernuce , vaIV
. PARTIE 61
1
>
cante par la mort de Mr
l'Abbé Boifard , à Mr
l'Abbé Berjavel . Elle eft
de l'Ordre de Saint Auguf,
tin , & dans le Dioceſe de
Bourges.
Celle de S. Loup , qui eft
la Prefentation de Monfieur
le Duc d'Orléans , à Me de
Chaftillon. Elle eft de l'Or.
dre Cifteaux , & dans le Diocefe
d'Orleans , à un quart
de lieuë de la Ville de ce
nom . Cette Abbaye eſtoir
vaccante par la mort de
Louife Charlotte de Chaf
tillon, ShoD CORE.
62 MERCURE
Le Roy a fait Confeiller
d'Etat , Semestre , M' Trudaine
Intendant
de Bourgogne
, & M' Bignon Prevoft
des Marchands est monté
>
au rang des Confeillers
d'Etat Ordinaires
par la
mort de M' Phelyppeaux
. !
Le 19. Aouft M : le
Prevolt des Marchands , &
les Echevins allerent porter
le Scrutin au Roy à Fon,
tainebleau , pour l'Election
de deux nouveaux Echevins.
Il fut prefenté
à Sa
Majefté par Mr Langlois
de la Fortelle Confeiller au
IV. PARTIE. 63
Parlement . Les nouveaux
Echevins qui font Mr.
Tardif Confeiller de Ville
& Mr Prefti Bourgeois
prêterént ferment de fidelité
entre les mains du Roy ; ils
furent conduits par Mr des
Granges Maistre des Caremonies.
Le Corps de Ville
eut enfuite l'honneur de
faluer Monfeigneur le Dauphin,
Madame la Dauphine ,
Monfeigneur le Duc do
Berry, Madamela Ducheſſe
de Berry , & Madame.
Le 4. Septembre Miles
Dépurez des Etats de Lant
?
24 MERCURE
guedoc allerent à Verfailles
complimenter Monfeigneur
le Duc de Bretagne ,
& Monfeigneur le Duc
d'Anjou. Ils furent prefentez
par Mr des Granges
Mailtre des Ceremonies.
Le Roy a donné la Charge
de Capitaine des Gardes
du Corps vacante par la
mort de Mr le Maréchal de
Boufflers à Mr le Duc de
Chatoft Lieutenant Gene
ral des Armées de Sa
Majefté. Cette Charge avoit
autre fois efté poffedée par
Louis de Bethune Duc de
IV. PARTIE 65
Charoft fon ayeul .
Le premier jour de Septembre
la Princeffe , veuve
du feu Prince de Naffaw'
Stadhouder hereditaire de
Frife & de Groningue , accoucha
d'un Prince , ce qui
fera differer la déciſion du
Procés qu'il y avoit entre le
pere de ce jeune Prince
l'Electeur de Brandebourg,
& les autres pretendants à
la fucceffion du feu Prince
d'Orange.org
h. 1WhenÑÁ
20
Septembre 1711. 4.
ى ل م
* MERCURE
-NOUVELLES
d Efpagne.
withVol
-
Extrait d'une Lettre de Saragoffe
du 16. Aouſt . `
00
Le Chasteau d'Arens fe
rendit le 1ª de ce mois , & le
General Showel qui s'y étoit
retiréa eftéfait prisonnier avec
prés de tent Allemans quelques
autres Troupes , & M³ le
Marquis
d' Arpajou , qui commandoir
à ce fiege eft allé faire
celuy du Chateau
de Venaf
que , afin de referrer les EnneIV.
PARTIE. 67
mis du cofté de la Met ; &
ouvrir une communication
avec la Guyenne. Ily a cú
un grand tumulte à Barcelone
, à l'occafion de l'embara
quement de l'Archiduc , la
populace s'étant mutinée pour
sy oppofer , y ayant eſté exdeux
Regiments de citée
par
la nation : mais ce tumulte n'a
fai
point eû de fuite. Cependant
l'on prit des mesures pour en
empécher de nouveaux en
fant embarquer ces deux Regiments
pour les transporter
ailleurs , en faifant répan
dre le bruit que l'Archiduc ne
4. Fij
68 MERCURE
devoit
s'embarquer que pour
paßer à Tarragone & fe mettre
à la tefte de fon Armée.
D'autres Lettres portent
que le General Staremberg
s'eftoit effectivement mis en
campagne , qu'il avoit partagé
les troupes en trois
corps dont les deux plus
confiderables
avoient efté
poftez entre Igualada &
Montblanc pour couper le
chemin de Barcelonne , &
couvrir la Plaine de Tarragone
; que fon Quartier
general eftoit à Santa Colomas
que l'autre corps , con.
IV PARTIE 69
C
fiftant en trois mille hom
mes avoir efté envoyé à
Oftalric pour obſerver un
Camp volant de troupes
Françoifes qui eftoit du
cofté de Gironne , & que ce
General attendoit un renfort
de neuf bataillons An--
glois qui devoient venir de
Portugal.
Que l'Armée d'Eſpagne´
qui cftoit composée de cin
quante quatre Bataillons &
de loixante & dix fept Elcádrons
eftoit tres belle &
abondamment pourvûë de
toutes les chofes neceffaires
70 MERCURE
que celle des ennemis , manquoit
de vivres & même
d'eau ; & que l'Archiduc ne
s'eftoit point encore em
barqué , mais qu'il devoit
partir inceffamment avec
une Flote de trente deux
Vaiffeaux qui s'eftoient alfemblez
à Barcelonne.
Les Lettres de Cadix du
1.17 Aouft difent que le 8.
il y eftoit arrivé quatre Baftimens
Portugais de la
Flote du Brefil pris par plufieurs
Armateurs François ,
qui aprés les avoir amarinez,
avoient continué de pourIV:
PARTIE . 71
fuivre le reste de la Flote ;
que cette nouvelle avoit
fort déconcerté les Negotians
de Liſbonne d'où l'on
avoit fait partir plufieurs
Navires pour aller chercher
des bleds en Affrique ;
mais qui y eftoient revenus
fur l'avis qu'ils avoient eu
que quelques Vaiffeaux de
guerre François croiſoient
Tur leur route , ce qui avoit
encore fait augmenter le
prix des grains qui eftoit
déja fort haut. Ces mêmes
Lettres confirment la gran
de déſertion des troupes de
014
MERCURE
la Garnifon de Gibraltar fau
te de payement , & qu'outre
les deux cens hommes qui
en eftoient fortis fous pretexte
d'aller en party & qui
eftoient venus fe rendre
avec leurs Officiers , il en
arrivoit fouvent d'autres .
Celles de Madrid du 24,
du même mois portene
qu'on a eu des avis d'Eftremadure
qui confirment que
Jes troupes Angloifes qui
font en Portugal marchoient
à Liſbonne ou elles
devoient s'embarquer pour
paffer en Catalogne , & que
les
IV. PARTIE. 73
les Portugais en paroiffoient
fort mécontens .
NOUVELLES
de Flandre.
Lettre du Camp de Paillancour
, dduu 1. Septembre.
Mr le Maréchal de Vil
lars , ayant réfolu d'inquieter
les Ennemis , commanda hier
apre's midyfix mille foldats ou
grenadiers . Il fit faire deux
Ponts à gauche de Thun - l'Evefque
, entre ce Village &
Etran qui furent conftruits
Septembre 1711. 4. G
74 MERCURE
avec tant de diligence de
fecret que les Ennemis qui n'en
"étoient qu'à une portée de moufquet
ne s'en apperçurent point.
Les Troupesy pafferent ; le plus
grand détachement, commandé
par Mr de Chasteaumorand
alla du cofté de Hordain prés
de Bouchain ; le fecond , aux
ordres de Mr de Colandre
marcha à Fwy où les Ennemis
ont fix Bataillons couverts
d'un bon retranchement bien
paliffade le troifiéme , fous le
commandement de Mr le Che
valier de Livry , refta en deçà
l'Efcant vis - à - vis de ce
de
IV . PARTIE. 75
Pont, Mrde Colandre attaqua ›
le pofte d'Fwy pour attirer les
Ennemis de ce cofté là. Mr de
Chasteaumorand
attaqua celuis
de Hourdin où il y avoitquatre-
Bataillons, dont on fit un grand
carnage ; toutes les Tentes , &
les Maifons de Hordain où il
y avoit un grand nombre
d'Officiers furent pillées , en
forte que la plus part des Sol- ·
dats y firent un gros butin. On
prit un Maréchal de Camp
qui commandoit à ce pofte , un
Colonel , trois Capitaines , un
Enfeigne, deux Ingenieurs g
foixante Soldats , le reste ayant›
4. Gij
76- MERCURE
efté tué , ou ayant pris lafuite,
cent Chevaux. Dans le
temps que Mr de Chasteaumorand
attaquoit Hourdin ,›
Mr & Aubigny ,prenoit le pofte
d'Etrun à revers , où il fit.
foixante hommes prifonniers ,
le refte s'étant fauvé à la faveur
de la nuit : Mr d'Aubigny
fit enfuite travailler à
achever le Pont avec Mr le
Chevalier de Livry , qui étoit
refté de l'autre côté, & on y fit
paffer les Troupes qui ne furent
point poursuivies par les Ennemis
, dont toute l'Armée refta
en Bataille jufques à deux
IV. PARTIE 77
heures du matin ; Mr de Fenelon
, Colonel de Bigorre , &
le Lieutenant Colonel de Pi-
I
cardie , ont efté bleffez.
Nous aprenons en ce moment
, que Mr de Coignies , a
deffait prés du Quefnoy , Sept
Efcadrons de Cavalerie & de
·Dragons , qui fervoient d'ef
corte aux Fourageurs ; qu'il a
pris un grand nombre de Chevaux
, de Soldats , & d'Officiers
; entr'autres le Lieutenant
General & le Major
General qui commandoient l'efcorte
; mais
que
Mr de
Broffia
ya efté tué.
4 Giij
78 MERCURE
Les Ennemis ont invelli
Bouchain le 10. Aouft . Depuis
ce jour - là jufqu'au 2 3 .
ils ont travaillé à faire des
paffages dans le Marais
à force de fafcines , & à
faire des retranchements
pour couvrir la Cavalerie
qui devoit foutenir les
Travailleurs .
La nuit du 2 3. au 24. ils
Quvrirent la tranchée à trois
attaques. La Garniſon eſt
fortie de la Place le 14. Septombre
, fous une Capitulation
honorable ; mais qui
n'a pas efté executée par la
IV. PARTIE
79/
mauvaiſe foy des Ennemis.
On donnera le mois prochain
un détail circonftan
cié de ce fiege .
NOUVELLES
de Dauphiné.
Extrait d'une Lettre de Gre-
'noble , du 11. Septembre
I
L'Armée de Monfieur
le Duc de Savoye fe mit
avant hier en marche pour
repaffer en Piemont. Mr le
Maréchal Berwick décampa
en même temps pour
4 .
G
iiij
lá
80 MERCURE
fuivre. Il a d'abord marché
à faint Jean de Maurienne ,
& a enfuite remonté le
Galibier. Mr le Comte de
Silly a quitté fon camp des
Echelles pour venir occuper
celuy de Barreaux , & en
partant il a congedié toutes
les Milices . Toute fa Cavalerie
a campé aujourd'huy
autour de cette Ville & doit
retourner en Savoye . Tous
les François qui estoient
fortis de Chambery ont eu
ordre d'y retourner, Mr
Maréchal de Berwick a
donné les ordres pour faire
A
IV . PARTIE . 818T
7
remonter vers Briançon
l'Artillerie du Camp de
Barreaux , & deux cens paires
de boeufs ont efté allemblées
pour cet effer .
NOUVELLES
d'Allemagne & du Nord.
L'Electeur Palatin s'eft
enfin déterminé à fe rendre
à Francfort pour affifter aux
Conferences qui s'y tiennent
pour regler la Capitulation
perpetuelle que l'on
doit faire jurer au futur Empereur.
82 MERCURE
Les Ennemis ont fait
rentrer dans leurs Lignes
lés Troupes qu'ils avoient le
long du Rhin.
L'Armée Danoiſe arriva
le
25 . Aouft prés du paffage
de Damgarten , & le Roy
de Dannemarck ayant fait
faire les difpofitions pour
attaquer le Retranchement
des Suedois , le 28. l'Artillefie
commença à tirer , & la
nuit on jetta une grande
quantité de faſcines dans le
Marais , ce qui obligea les
Suedois qui apprehendoient
d'eftre coupez , de fe retirer
IV. PARTIE 83
el
à Stralzund avec leur Artillerie
. Le 30. les Danois ,
aprés avoir reparé le Pont
que les Suedois avoient
rompu s'avancerent juſqu'à
deux lieues de Stralzund ,
où ils s'arrefterent en attendant
leur groffe Artillerie
pour attaquer les Retranchements
qui font devant
la Place.
Le Roy Augufte eftoit
entré en Pomeranie avec un
Corps de Saxons & de Mofcovites
, & marchoit à grandes
journées pour joindre le
Roy de Dannemarck, Il
84 MERCURE
s'eft emparé de Demmin ,
d'Anklam , & de Treplow ,
fans aucune reſiſtance confiderable
de la part des Suedois
, dont la principale attention
n'eft qu'à conferver
Stralzund , Stetin , &
Wilmar.
Lettre de Conftantinople du
7. Aoust.
Le 3. de ce mois le Grand
Seigneur reçur plufieurs
Courriers du Grand Vifir ,
avec la nouvelle que l'Armée
Mofcovite forte de
IV. PARTIE 85
foixante mille hommes
commandée par le Czar en
perfonne avoit efté prefqu'entierement
deffaite, Le
combat commença le 19.7
Juillet aprés midy prés de
Falczin fur le Prut. Il y eut
plus de trente mille Mofco .
vites tuez par les Turcs &
par les Tartares , & fans la
nuit qui furvint le nombre
auroit efté plus grand. Le
refte de leur Armée n'ayant
pûfe retirer parce que les
Turcs & les Tartares l'environnoient
de tous coftez,
les uns & les autres pafferent
86 MERCURE
la nuit fous les Armes . Le
lendemain matin les Mofcovites
fe rallierent & fe
couvrirent avec des che .
vaux de frife ; mais le grand
Vifir fit auffi toft tirer le
canon fur ce retranche-
&
ment. Alors le Czar luy
envoya un Officier pour luy
propofer une Capitulation
avec le grand Seigneur &
avec le Roy de Suede
voyant que les Turcs continuoient
leur canonnade
il envoya quatre Officiers
pour réiterer cette propofi
tion , & pour prier le grand
IV. PARTIE 87
Vifir de faire ceffer le canon
ce qui luy fut accordé. Mr
Czafirow Vice Chancellier ,
& le fils da General Szere
metown
furent envoyez
au grand Vifit avec lequel
ils convinrent
que la Ville
d'Afaf
feroit rendue
au
grand
Seigneur
que les
Forteffes de Kaminka , de
Sagara & de Samara feroient
démolies ; que l'Ukraine
feroit remife dans fon any
cienne liberté ; que le Czar
ne fe mêleroit plus des Affai
res de Pologne , qu'il livre,
Foit le Prince , Demetrius
88 MERCURE
Cantemir , & le rebelle Kebaliaba
, & qu'on reme
troit au grand Seigneur
l'Artillerie & les Munitions
de l'Armée Mofcovite . Ces
fix Articles preliminaires
devoient cftre fuivis d'un
traité de Paix qui feroit fait
à Bender où Ms Czafirow ,
& Szeremetow
droient en qualité de Plenipotentiaires
& pour fervir
d'Otages de ce qui avoit
efté conclu fans que le grand
Vifit en euft donné aucun .
On a permisau refte del Armée
Mofcovite de fe retirer
feren
IV. PARTIE. 99
à Kiowie ; mais comme les
Soldats eftoient accablez de
fatigue & de faim , même
avant la Bataille , & qu'il
étoient pourſuivis par les
Tartares à caufe que le Kan
n'avoit point cû de part à
ce qui avoit efté conclu avec
le Czar , on croyoit qu'il en
réchaperoit un fort petit
nombre cependant le
grand Vifir les faifoit accompagner
par dix Ou
douze mille hommes fous
pretexte de leur fervir d'efcorte
contre les Tartares ;
mais en effet pour les faire
Septembre 1711. 4. H
匪
20 MERCURE
de
remarcher
à petites journées ,
afin d'avoir le temps
cevoir les ordres du grand
Seigneur. Mr Funck Envoyé
du Roy de Suede prefenta
le 4. au Grand Seigneur
, & au Kaimakan , un
Memoire concernant
les
interefts du Roy fon Maitre.
Tous les Vifits , & le
Mufti l'affurerent que ce
Prince auroit lieu d'eftre
content avant que les Mofcovites
fortiffent des Etats
du Grand Seigneur , &
que le Kapigilar Kiaïaski
devoit partir inceffament
IV. PARTIE. 91
S.
-
pour procurer à Sa Majeſté
Sucdoife toute forte fatisfaction
. Le s . Mr Funck fut
appellé pour aller chez le
Kaimakan où il trouva le
Mufti & le Selictar Pacha ,
gendre du grand Seigneur ,
afin de conferer fur fon Me.
moire par lequel il demandoit
que le Roy de Suede
fut compris dans le traité
de Bender , & qu'il fuft ftipulé
qu'il feroit conduit
dans fes Etats avec autant
de troupes qu'il fouhaiteroit.
Ofman Pacha Kiaïa ou
Lieutenant
Vifir du grand
Hij
98 MERCURE
qu'il avoir envoyé pour
apporter la nouvelle de
cette Victoire , a efté difgracié
au lieu d'eftre recompenfe
; ce qui marque que
le Gra
Seigneur eft mécontent
de la precipitation
avec laquelle le grand Vifir
a conclu la Capitulation
pouvant fe rendre maiſtre
du Czar & du reſte de fon
Armée ; cependant on n'a
pas laiffe de faite plufieurs
décharges d'Artillerie aprés
l'arrivée de cette nouvelle, &
toute la Ville en a témoigné
une grande joye. On remarIV.
PARTIE. 93
que que la deffaite du Czar
eft arrivée le même mois
que celle du Roy de Suede
à Pultowa , & que le même
malheur de ces deux
Princes leur eſt arrivé pour
s'eftre engagé trop avant
fans Magafins
, en pays ennemi.
LYON
APPROBATION.
J'A
'Ay lû par ordre de Monfei
gneur le Chancelier le Mercure
Galant du prefent mois
de Septembre . A Paris ce 27 .
Septembre 1711 .
CAPON.
TABLE.
I. PARTIE.
Litterature , 3
Traduction d'un Fragment d'ovide
,
22
24
La réputation des Poëtes ,
Suite de l'Abregé de l'Illiade , 28
Argument du 5 Livre ,
e
II. PARTIE .
SI
Suite & fin de l'Hiſtoirè Eſpa◄
gnole ,
Article Burlefque , fuite du Paralelle
d'Homere & de Ra
blais ,
La vraye Eloquence ,
Tempefte de Rablais ,
Enigme
III. PARTIE.
53
1 80
94
107
Piecesfugitives, Epigramme,
Plaintes >
Epigramme ,
3
22
TABLE.
A Mefdames de P.
Réponse à une Lettre,
Epigramme ,
Autre ,
Bouquet nouveau ,
IV . PARTIE .
Nouvelles , Lettre de Bafle ,
Fefte donnée à Berlin ,
Academies ,
Feste donnée àJoigny ,
2
26
2.7
29
31
I
ΙΟ
17
19
Morts > 23
Mariages , 48
Benefices , 49
Nominations , &c. 62
Nouvelles d'Espagne ,
66
Nouvelles de Flandre
73
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Le Texte de la Regle de S. Benoît , trad.in 12.11 .
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in, 12. 4 vol .
7 liv . 4 f.
Reglemens generaux de l'Abbaye de la Trappe,
in 12. 2 vol.
3 liv. 12 f. Lelation de la mort de Dom Abraham BeuS
gnier , in 12. brochure , 8 f.
Relation de quelques circonftances de la mort
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8 f.
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I liv . 16 f.
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de la Trappe.
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vol. 7 liv . 12 f.
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De l'Affemblée de 1693. & 16 95. fol. 10
De l'Affemblée de 1701. & 1702. fol . 6. I.
Relation des Affemblées de MM . les Prelats ,
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de Cambray , in 4 ° , 4 liv.
Recueil
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l'établiffement
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Se
minaires
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le Dioceſe
de Reims
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Du R. P. DUBOIS , de l'Oratoire,
Hiftoria Ecclefia Parifienfis , fol . 2 vol . 30 liv.
Le Tome fecond feparement , Is liv.
Du
R. P. A MELOTTE
, de l'Oratoire
.
Le Nouveau Teftament traduit fur la Vulgate
, ave des Notes , & des Cartes de la Terre
Sainte , in 4ª , 2 vol .
Le même in 18.
12 liv.
I liv.
Du R. P. HARDOUIN , de la Compagnie
de Jesus.
Antirrheticus de nummus antiquis Coloniarum &
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Municipiorum ad Joannem Vaillant , in 4º , 3. I.
Sancti Joannis Chryfoftomi Epiftola ad Cafarium
Monachum , Gr. & Lat. cum Joannis Harduini
Notis ,
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De differens Auteurs .
4
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diofa earum tractatio , in 12 .
I liv.
Coeur affectif de faint François de Sales , tiré
de ce qu'il y a de plus touchant dans fes
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de la Congregation de N. D. in 16. i liv .
Maniere de bien entendre la Meſſe de Paroiffe,
par Meffire François de Harlay , Archevêque
de Rouen , imprimée par l'ordre de feu
M. l'Archevêque de Paris , in 12. 1 liv .
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édition
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Monaftique , contre l'intemperance de la langue
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des Parloirs des Religieufes , par M.
Hermant , in 12 . I liv. 16 f.
Traité du Cancer , & des moyens de le guerir ,
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Traité des Ecoles Epifcopales , par feu M. Joly ,
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L'Efprit de l'Ecriture Sainte, in 12. 2
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Païs , la Religion , les Loix & les Coûtumes
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habitant de ce Païs- là , în 12. enrichie de figure
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les devoirs du Maître d'Hôtel & du
Sommelier , la maniere de faire les Confitures
feches & liquides , les Liqueurs , les
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édition , corrigée & augmentée des pâtes , des
Liqueurs nouvelles , & des nouveaux Ragoûts
qu'on fert aujourd'hui : Avec des modeles
pour dreffer les Services de Table , in
12. 53 am 2 liv, s f.
Abregé de la Sainte Bible , en forme de Queftions
& Réponses familieres , tirées de differens
Auteurs ; divifé en deux parties , l'ancien
& le nouveau Teftament , par le R. P.
Guerard , de la Congregation de faint Maur ,
feconde édition , in 12. 2.liv.
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exacte du Païs , des principales Villes ,
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tres-grandnombre de figures en taille douce ,
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Traité des Jardinages , par M. de la Quintinie,
in 4 , 2 vol.
Le Prince Grec , in 12 .
12 liv.
2 liv.
1.10 £
10 liv.
2 liv . 10 f.
Hiftoire de D. Quixotte , in 12. 5 vol. 12
Les Fables de la Fontaine , in 12.5 yol.
La Princeffe de Cleves , in 12.
L'Arithmetique de Legendre , in 12. 2 liv . 10 f.
La Vie de Cromvvel , de Gregorio Leti , in 12 .
2 vol. s liv.
Les Ocuvres de S. Evremond , in 12.5 vol . 10 1.
Juvenal , de la traduction du P. Tarteron , in
12.
Zayde , in 12. 2 vol .
2 liv , 10 f.
4. liv,
B
16
Style du Confeil , par M. Gauret , in 4´s liv.
Code de la Marine , in 4 , -3 liv.
Traité hiftorique des Monnoyes de France , par
M. le Blanc . in 24 ° .
2 liv.
9 liv .
Dialogues
entre le Diable Boiteux
& le Diable Borgne
, par M. le Noble , in 12 . Traité
de la Parole
in 12 : brochure
,
Lucien d'Ablancourt
, nouvelle
édition
, aug-
I
8 L.
mentée de Notes ; in 12. 3 vol.2016 liv.
Numifmata 'ared Imperatorum Auguftorum & Cafarum
in Colonies , Municipiis & Urbibus Fure
Latio donatis , ex omni modulo percußa , autore
Joanne Foy- Vaillant , in fol . 2 vol . " 36 liv.
L'Hiftoire reduite à fes principes , dediée à
Monfeigneur le Duc de Bourgogne , în 12 ,
pomadeT mazliv. 10 f.
Contes des Fées ; on les Chevaliers Errans , &
le Genie Familier, par M. D... in'12. 11. 15 f.
D. Guzman d'Alfarache , in iz . 3 vol. 71. ro f.
Traduction en vers François des Epigrammes
d'Ovven', in 12. Muller liv . 10 f.
2 volu
Les Amours de Pfiché , în 12 .
La Mufe Moufquetaire , in 12.
Virgile , de Martignac , in 12. 3. vol.
C
2 liv.
2 liv .
6 liv.
Lucrece , de la nature des chofes , avec des remarques
fur les endroits les plus difficiles ,
Vitrâduction nouvelle , in 12. 2 Vol. 4 1. 10 f.
L'Ambigué d'Auteuil , ou varietez hiftoriques ,
compofées du Joueur , du Nouvelifte , du Fi
nancier , du Critique , de l'Inconnu , du Sincere
, du Subtil ; de l'Hypocrite , & de plufieurs
autres perfonnages de differens carac-
1 liv . J. f.
Les Avantures d'Appollonius de Tyr livre rempli
d'évenemens , & écrit dans le même ftyle
que Telemaque , par M. le B... in 12. 2 liv.
Le Prince Eraftus , fils de l'Empereur Diocle
teres , in 12.
tian , in 12. 2 liv. s. f.
Abregé de Geographie , & de tout ce qu'il y
a de plus remarquable dans chacune des quatre
grandes parties de la Terie , particulierement
dans l'Europe & dans le Royaume de
France : le tout mis en ordre pour pouvoir
être appris & retenu facilement par coeur
avec les routes des Poftes de France & d'Elpagne
, dedié à S. A. S. Monfeigneur le Prince
de Dombes , par MM. Poncein , in 12. 1 liv. f.
Hiftoire fecrete de Bourgogne , in 12. 2 vol . 3 1 .
Vafconiana , ou Recueil des bons mots ,
des penfées
les plus plaifantes , & des rencontres les
plus vives des Gafcons , feconde édition , augmentée
, in 12 . 2 liv . s f.
Les Metamorphofes d'Ovide , traduites par M.
Durier , derniere édition , in 12. 3 vol. 6 liv .
Les mêmes en Rondeaux , avec figures , de
Bencerade, imprimées à Bruxelles , in 8 , 4 1.
Les Metamorphofes , ou l'Aine d'or d'Apulée ,
Philofophe Platonicien avec le Demon de
Socrate , traduction en François , avec des
Remarques , in 12. 2 vol. sliv.
Les Fables d'Efope Phrygien , avec celles de
Philielphe , traduction nouvelle , enrichie de
Difcours moraux & hiftoriques , & de Quatrains
à la fin de chaque difcours , avec figures.
On a ajouté à cette nouvelle tradution
les Contes d'Efope , les Fables diverfes
d'Abrias & d'Avienus , in 12. 2 vol . 4 1. 10 f.
Les Memoires de la Vie du Comte D ... avant fa
retraite , contenant diverfes avantures qui
peuvent fervir d'inftruction à ceux qui ont
vivre dans le grand monde ; redigez par M. de
S. Evremont , in 12. 2 vol. 4 liv . 10 f.
Les Memoire de Meffire Roger Rabutin , Comte
de Buffy ,in 12. 3 vol .
L
A
7 liv, 10 f.
Bij
I 2
Idem , Ses Lettres , nouv . édit . in 12. 4 vol . 8 Į.
Les Oeuvres d'Homere , traduites en François
par M. D... enrichies de figures en taille
douce , divifées en 4 vol . in 12 . rol.
Quinte- Curce , de la traduct . de M. de Vaugelas ,
avec le Latin à côté , 2 vol . în 12 , 4 1. 10 f
Oeuvres d'Horace en Latin & en François , avec
des Remarques critiques & hiftoriques , de M.
Dacier , troifiéme édition , revûë , corrigée
& augmentée confiderablement par l'Auteur ,
in 12. 10 vol . 20 liv!
Hiftoire de France, P. Marcelle , in 12. 4 vol.8 1. Lexicon Buxtorfi , in 8ª , 4 liv . 10 f.
Idem Lexicon Paforis , Greco- Lat. in 8º, 4 1. 10 f.
Corpus Juris Canonici , à Petro Pithoxo , cum appendiceJuris
Canonici, continens Librumfeptimum
Decretalium, & Jo. Pauli Lancelotti inftitutiones
Juris Canonici , in fol. 2 vol. 20 liv.
Les Oeuvres de Maître Guy Coquille , Sieur de
Romaney , 1703. 2 vol . 13 liv. Recueil de bons mots des Anciens & des Modernes
, in 12.
1
2 liv.
THEATRE DE MESSIEURS
Corneille , in 12. Io vol . 20 liv .
36 liv.
Racine , 2 vol.
Campiftrón , nouv. éd . augmentée d'une Tragedie
& d'une Comedie , & ornée de figures , 4 1.
De la Foffe , avec fes Poëfies , 2 vol .
Legrand ;
Crébillon ,
Pradon ,
De la Grange ,
S. liv..
2 liv. 10 f.
3 liv . 10 f.
3 liv .
2 liv . 10 f.
Moliere , 8 vol . nouvelle édition , augmentée
de fa Vie , avec de nouvelles Remarques , 1ƒ . 1 .
Dancourt , 7 vol. nouvelle édition , augmentée
de plufieurs Pieces qui n'avoient point été
imprimées dans les éditions precedentes, avce
!
fgures & Mafique ,"
Regnard , 2 vol.
Poiffon , 2 vol.
De Hauteroche ,
liva
liv.
3 liv .
liv . 10 f
Palaprat , 2. éd. augmentée de plufieurs Comedies
qui n'ont pas encore efté imprimées , &
d'un Recueil de Pieces en Vers, 2 vol . 4 1. 10 f.
Baron ,
De Riviere ,
De la Thuillerie ,
Boindin ,
De Champ- mêlé ,
De Montfleury , 2 vol .
Bourfault", 2 vol.
De Mademoiſelle Barbier ,
Quinaut
Theatre François , 6 vol.
Idomenée ,
Aftrée ,
3 liv
liv. 1o f
2 liva
2. liv.
2 liv
liva
sliv.
liv. To f
2 liv. 1o f
Is livi
*
Electre ,
Rhadamifthe & Zenobie ,
Lés Tyndarydes
Cyrus ,
Saül ,
Herode ,
Polydore ,
La Mort d'Ulyffe ,
Muftapha ,
Agrippa , ou le faux Tiberinus .
Le Curieux Impertinent ,
Les Agioteurs ,
L'Amour Charlatan ,
Le Naufrage,
Danaé ,
Turcaret ,
Crifpin Rival
Le Jaloux défabule
L
Tragedie
}
Comcdicn
Let Airs notez des Comedics Françoifes , par
7 liv.
M. Gillier , in 4º,
Cantates & Arietes de M. le B. fol. 7 liv. 1o f.
Le quatrième Livre des Motets de M. Campras
Le Mercure Galant
Et broché ,
.. liv.
11. ro f.
al. sf.
Recueil de Pieces en Vers , adreffées à S. A.S.
Monfeigneur le Duc de Vendôme , & plufieurs
Effais de Poëfies diverfes , par Monfieur de
Palaprat , 1. vol . in 12. 11. 10 f.
Et toutes les autres Pieces de Theatre , tant
anciennes que nouvelles.
GALAN T.
SEPTEMBRO DA
LYON
www
MV
UNI
NCV
אNIN
A PARIS ,
M. DCCXI
Avec Privilege du Roy.
MERCURE
GALAN T.
Par le Sicur Du F ***
Mois
de
Septembre.
1711.
Le prix eft 30. fols relié en veau , &
25.fols, brochez
A PARIS ,
Chez DANIEL JOLLET , au Livre
Royal, au bout du Pont S.Michel
du côté du Palais.
PIERRE RIBOU , à l'Image S. Louis,
fur le Quay des Auguftins.
GILLES LAMESLE , à l'entrée de la rue
du Foin , du côté de la ruë
Saint Jacques.
MERCURE
GALANT
BE
LA
VILLE
LYON
I. PARTIE
*/893 *
Septembre 711
LITTERATURE.
E
N annonçant dans
le Mercure dernier
un Livre nouveau , j'ay
promis d'en parler ce
A ij
MERCURE
mois - cy , c'eſt un Livre
tres- varié , rempli d'érudition
, & capable de vous
Kremettre
dans l'idée les
regles de la compoſition
& du bon gouft.
D'abord on y voit une .
Traduction en vers de l'Art
poëtique d'Horace c'eſt ce
qui fert de titre au Livre ,
il y a enfuite quantité de
Notes curieufes , les unes
de l'Autheur , & les autres
citées de plufieurs Grecs
& Latins, dont voicy quel-
"ques-unes, pri
L'Art poëtique d'HOI.
PARTIE.
RACE eft une Lettre
qu'il écrit aux PISONS.
Čes PISONS eftoient le
frere & les neveux de Calpurnie
Epouſe de Jules Cefar
, & fille de Lucius Pi
fon.
La premiere regle de
l'éloquence , c'eft d'eftre
clair ; & la feconde , de
n'eftre pas diffus.
MARTIAL dit que
les ouvrages où il n'y a
rien à retrancher , ne font
jamais trop longs.
La lime,dit QUINTILIEN,
doit polir & non
A iij
I
6 MERCURE
pas affoiblir , & ufer , pour
ainfi dire , un ouvrage.
J'ay veu dans un Autheur
François , travaillez
voftre ouvrage jufqu'à ce
qu'il foit au point qu'on
ne s'appercoive pas qu'il
vous a coufté beaucoup
de travail.
PROPER CE compare
l'Autheur dont le ftile
n'eft ny trop enflé ny
trop fimple , à un Marinier
qui rafe le rivage avec
un de fes avirons , & qui
fend les flots avec l'autre.
LONGIN donne pour
I. PARTIE . 7
exemple de l'enfleure ces
pensées - cy : Faire du vent
Borée fon joueur de flute ...
Et cet autre : Jupiter crache
des neiges contreles Alpes.
Exemples du vray fublime
: HOMERE peint
la Difcorde la tefte dans les
Cieux , & les pieds fur la
terre. Et quand il parle de
Neptune il dir:
Que Neptune marchant dans
les vaftes campagnes
,
Faittremblerfousfes pieds &
forefts & montagnes.
Il fait dire à AJAX qui
voit l'Armée des Grecs
I. A iiij
8 MERCURE
couverte tout à coup d'épaiffes
tenebres.
Grand Dieu chaffes la nuit
qui nous couvre les yeux,
Et combats contre nous à la
clarté des Cieux.
Caracteres differents de
poëfie traduits d'Ovide
par l'Autheur ,
Vous qui que vous soyez
Cenfeur trop fevere ,
Jugez de nos travauxfelon leur
caractere ,
C'est au Vers Heroïque à chan
ter les combats :
Quelle placey tiendroient Venus
& les appasi
La grandeur , le couroux font du
I. PARTIE.
Aile tragique:>
Mais les fujets communs regardent
le comique ,
L'Iambe libre eft propre à lancer.
fon venin ,
Soit qu'il coure tousjours, ou qu'il
boite à la fin.
Les Amour's , leurs carquois ,
l'inconftante Silvie ,
Sont les dignes fujets de la tendre
Elegie
Pour celebrer Cidippe , Homere
ny fes Vers ,
N'y doivent point paroiftre aux
yeux de l'univers.
Achile convient mal au ton de
Callimaque >
Et Thais ne doit pas imiter
Andromaque.
L'autheur dit à propos
10 MERCURE
de la force du
pathetique ,
que nous pleurons
en voyant
pleurer , que nous
rions en voyant rire , & cela
par une raiſon phifique
à
peu pres femblable
à celle
qui fait remuer les cordes
de plufieurs
inftruments
qui font dans une mefme
chambre , avec un autre
dont on touchera
fortement
les cordes montées
au mefme ton que celles
de ces autres
inftruments
quirefonneront
fans qu'on
les touche , & c. Il y a ainfà
peu prés dans tous les a
I. PARTIE. II
hommes des nerfs montez
, pour ainsi dire , au
mefme ton & c'est ce
qu'on appelle fimpathie ,
&c.
Comme nous nous fentons
capables des meſmes
maux, & des meſmes biens
que nous voyons reffentir
aux autres , nous fommes .
remuez par les mefmes
fentiments à la veuë du
bien ou du mal qui leur
arrive. 6.6
L'autheur fait plufieurs
remarques fensées fur diferents
Poëmes , anciens
& modernes.
12 MERCURE
Puifque les Poëmes font
des imitations
, dit- il , ils
doivent fans doute imiter :
mais ils ne doivent pas
imiter une action juſqu'à
violer les regles de la poëfie.
4
Corneille a tellement
imité le combat de fon
Horace , que fa piece s'eft
trouvée finie au troifiéme
Acte. Le voila fort à l'eftroit
, comment fe tirerat'il
de ce pas- là ? Il ne l'a
peu fans violer l'unité de
l'action , il eft obligé d'adjoufter
le meurtre de Ca1.
PARTIE. 13
mille
pour donner une juſte
eſtenduë à ſa Tragedie
, dans le Cid & ailleurs
il ne fort de pareils embarras
qu'en violant l'unité
du temps , ou celle du
lieu , & c.
A propos , de la maniere
dont on doit commencer
un poëme , JULES SCALIGER
donne pour exemple
d'un Exorde regulier
celuy de Lucain
, qui
dans fon poëme fur la
guerre civile , place tout
d'un coup Cefar au paffage
du Rubicon, d'où eftant
14 MERCURE
declaré ennemy de la patrie
par le Senat , il eſt forcé
d'entreprendre cette
guerre.
Un Poëte François a dir
que le vin eftoit le grand chevaldes
Poëtes. Une peau de
bouc pleine de vin eftoit
autrefois un prix que rem.
portoit le Poëte qui avoit
le mieux reüffi dans la Tragedies
en voicy la raiſon :
cette forte de poëme n'eftoit
au commencement
que des chanfons en l'honneur
de Bacchus , auquel
on facrifioit un bouc.comI.
PARTIE.
15
me animal contraire à la
vigne , on rempliffoit de
vin la peau du bouc , & on
la donnoit au Poëte.
Aprés les Notes fur
l'Art Poëtique , il y a plufieurs
petites traductions
de differentes pieces d'Ho..
race, d'Ovide , de Petrone,
& avec des Notes dont
voicy quelques-unes.
Lucille eftoit un Poëte
latin que Juvenal appelle
illuftre nourriffon d'Auronce.
Ce Poëte avoit
composé trente Satyres.
Horacedit dans fa premie16
MERCURE
re Satyre du fecond Livre;
que Lucille confioit fes
fecrets à fes Livres , qu'il
n'alloit point ailleurs décharger
fon coeur , ce qui
a fait qu'on a trouvé la vie
de ce vieillard peinte dans
fes ouvrages comme dans
un tableau.
On croiroit que les expreffions
de avoir bon nez ,
avoir le nez fin ,
nez fin , feroient
baffes &
impropres pour
exprimer
avoir l'efprit bon ,
l'efpritfubtil: mais Horace,
Perfe , & Martial l'ont annobli
en l'employant dans
ce fens. La
I. PARTIE. 17
La Comedie a pour but
de réjouir & d'inftruire ;
les mimes eftoient des
poëmes qui n'avoient pour
but que de faire rire , c'eftoit
les farces de ce tempslà.
TRT 291
Quintilien employe un
long Chapitre à traiter du
Ris , il effeftonné que paroiffant
chofe fi peu importante
, il ait quelque
fois des effets fieftonnants.
Un Ris excité à propos
peut changer l'eftat des
affaires les plus importan
res , il empefche quelque-
Septemb. 1711.1 B
18 MERCURE
fois les fuites fafcheufes de
la haine , de la colere , &c.
& fait fucceder la douceur
, la benignité , la clemence.
Par exemple , deux jeunes
Tarentis furent amenez
devant le Roy Pyrrus ,
parce que dans un repas
ils avoient eu l'infolence
de parler mal de ce Prin
ce ; voyant qu'ils ne pouvoient
nier le fait , ny fe
deffendre raifonnablement
, ils reſpondirent ,
Sire , fi la bouteille ne nous
avoitpas manqué , vous eftiez
I.
PARTIE. 19
mort , c'eftoit fait de vous. Ce
bon mot calma la colere
de leur Juge en le faiſant
rire.
Les vins de Falerne fe
gardoient fi long- temps ,
que Petrone parle de bouteilles
de ce vin bouchées
avec foin , dont les étique
tes marquoient que ce vin
avoit efté fumé fous le
Conful Opimus , cent ans
avant.
Diogenes , à propos des
fuperftitions fur les fonges,
eftoit indigné que les hom
mes fe tourmentaffent au
Bij
20 MERCURE
fujet des fonges , & donnafſent
fi peu d'attention
aux actions qu'ils faifoient
eftant éveillez .
Augufte avoit dedié
dans fon palais un Temple
, & une magnifique
Bibliotheque
à Apollon ,
où cinq Juges , du nombre
defquels eftoit Tarpa , décidoient
du merite des ouvrages
, que les Autheurs
venoient lire.
Ennius , dic Quintilien ,
eft femblable à ces bois
que leur antiquité a confacrez
, & dont les vieux
I. PARTIE. 21
arbres font plus venerables
qu'ils ne font beaux.
Les Anciens écrivoient
fur des tablettes couvertes
de cire , & ils fe fervoient
d'éguilles pointues par un
bour , & plates par l'autre ;
avec la pointe ils formoient
les caracteres , &
avec l'autre bout ils effaçoient
ce qu'ils avoient
écrit.
1 B iij
22 MERCURE
Traduction d'un Fragment
d'Ovide
.
Je le dis malgré moy , trahiffant
mes talents ,
Retenez avec foin ces avis excellents
;
Voulez - vous fuir l'amour ? que
voftre ame difcrette
Evite les accents de tout tendre
Poëte :
Callimaque aifement peut vous
rendre amoureux ›
Filetas eft pour vous un Autheur
dangereux :
Safo plus fortement m'attache à
ma maiſtreſſe ,
Le vieux Anacreon augmente
ma tendreffe.
I. PARTIE. 23
Eft- on froid, à Cinthie , en lifant
ton Amant }
Ou quelqu'un a-t- il leu Tibule
impunément ?
Des doux fons de Gallus quel
coeur peut fe deffendre ?
Et les miens n'ont-ils pas je ne
Sçay quoy de tendre ?
Martial Poëte Latin ,
eftoit né à Bilbilis , ville
de la Celtiberie en Efpagne.
Il fut intime ami de
Stella , de Silius Italicus ,
& de Pline le Jeune , qui
luy donna quelques fecours
pour regagner la patrie
, aprés avoir demeuré
trente ans à Rome , peu
24 MERGURE
eftimé apparemment pendant
la vie , il addreffe
cette Epigramme à Regule.
LA REPUTATION
des Poëtes.
Le Lecteur rarement aime un
Autheur en vie ,
A fon gré des vivants prefqu'-
aucun ne dit bien :
Qui caufe cet abus ? Regule, c'eft
l'envie stoĐỊN
Qui toujours au moderne a préferé
l'ancien.
D
213
De
I. top
25
PARTIE.
De Pompée on recherche ainf
le vieux portique ,
Ton vil Temple , Catule , eft
loué des vieillards ,
A Virgile vivant, Quintus morð
fit la nique ,
Et pour Homere en vie on ear
trop peu d'égards.
Rarement le theatre applaudit
à Menandre
Pour fa feule Corine , Ovide
eut des appas ,
Cachez- vous donc mon Livre , il
faut encore attendre
Si la gloire ne vient qu'aprés
noftre trépas.
-0.
Septemb. 1711. 1 C
26 MERCURE
Aprés toutes ces traductions
l'Autheur fait une
differtation fur les Autheurs
anciens & moder
ness , dont je donneray
quelques traits , & quelques
petits fragments de
Vers qui font tousjours
plaifir à voir raſſemblez ,
quoy qu'on les ait veus
ailleurs feparément.
a
Comme ces morceaux
détachez ne demandent
nulle liaiſon , je les garderay
pour le mois prochain
; car je n'ay plus de
I. PARTIE. 27
place dans cette partie
que pour la fuite de l'abregé
de l'Iliade qui a
efté receu avec tant de
plaifir , que j'ay prić mon
amy de donner quelques
heures à la continuation
de cet
ouvrage.
Cij
28 MERCURE
!
ABREGÉ
SUITE DE L'ABREGE
de l'Iliade,
ARGUMENT
du quatrieme Livre.
AVERTISSEMENT.
On a mis dans la fuite de
cet Extrait des cedilles ainfi
marquées
CC
ور
Elles
fignifient
dans les endroits où elles fe
trouvent , que le Poëte y fait
parler fes Heros
LEs Dieux eftant à Table
tiennent confeil fur les
I. PARTIE. 29
affaires de Troyes , vers
1. 4.
Jupiter raille Junon &
Minerve , de ce que de
grandes Déeffes comme
elles fe tiennent
à l'écart
loin des combats , pendant
que Venus qui n'aime que
les jeux & les plaiſirs , accompagne
fon favori dans
tous les perils . I met en
deliberation s'il faut rallumer
la guerre entre les
Troyens & les Grecs , ou
le's reconcilier par l'execution
du traité qu'ils ont
13
fait,,,
vers s. 19.
C iij
30 MERCURE
Cette propofition cauſe
un violent dépit aux deux
Déeffes qui préparoient les
plus grands malheurs aux
Troyens. Minerve diffimule
par prudence. Junon
éclatte , & a declaré, quelque
refolution que l'on
prenne , qu'elle ne confentira
point à la paix. ,,
vers 20. 29 .
Jupiter a reproché à
Junon la cruauté avec laquelle
elle pourſuit les
Troyens. Il fe plaint de la
violence qu'elle luy fait en
*
le forçant de luy abandon1.
PARTIE .
ner une Ville qu'il a ho
norée fur toutes les autres,
Il l'avertit qu'en revanche
, fi jamais dans fa fureur
il veut détruire quel-
•que Ville qu'elle ait prife
fous fa protection , c'est
inutilement qu'elle voudra
s'y oppoſer ,, vers 30.49.
Junon luy dit qu'il
peut , quand il voudra , difpofer
d'Argos , de Myce ,
nes , & de Sparte ; mais
qu'il n'eft pas jufte qu'elle
perde le fruit de toutes fes
peines. Que tout puiffant
qu'il eft , il doit avoir
"
I C iiij
pour
32 MERGURE
elle des égards & de la
complaifance , puifqu'elle
eft fa femme & fa foeur.
Enfin elle luy demande
qu'il ordonne à Minerve
de defcendre dans l'armée
des Troyens pour les exciter
à enfraindre le traité ;
& à infulter les Grecs .
vers 50. 67.
Jupiter " donne cet or
'dre à Minerve. ,, La Déeffe
defcend , & dans fa courfe
rapide elle paroift fous la
forme d'une exhalaiſon
qui s'allume dans l'air , &
qui fe
partage en mille
I. PARTIE. 33
feux. Ce figne qui eft veu
dans les deux armées « eft
interpreté comme un préfage
ou de la fin ou de la
continuation de la guerre.
vers 68. 85.
Minerve prend la ref
femblance de Laodocus
fils d'Antenor. Vatrouver
Pandarus fils de Lycaon.
Luy propofe « de tirer une
fleche à Menelas . L'encourage
par la gloire qu'il
aura d'avoir abbattu un fi
ર
la
grand guerrier , & par
recompenfe qu'il doit attendre
de Pâris. Elle luy
34 MERCURE
confeille de s'addreffer au
paravant à Apollon Lycien
pour le prier de diri
ger le trait. vers 86. 103 .
L'infensé Pandarus fe
laiffe perfuader. Peinture
naïve de l'action de Pandarus
, & des mesures qu'il
prend pour frapper juſte
à fon but . Son arc eftoit
(
fait des cornes d'une che
vre fauvage qu'il avoit tuée
à l'affuft ; chaque corne
avoit ſeize paumes , c'eſtà-
dire cinq pieds & quatre
pouces . ) Il promet une
Hecatombe à Apollon . Il
1.
PARTIE. 35
tire. Le trait part avec impetuofité
, perce le baudrier
, la cuiraffe & la lame
de Menelas ; entre dans la
chair fans penetrer bien
avant , ( car Minerve avoit
pris foin d'affoiblir le coup,
femblable à une mere qui
voyant dormir fon enfant ,
détourne une mouche opiniaftre
qui voudroit le piquer.
) Le fang qui coule
le long des jambes de Menelas
, comparé
à la pourpre
dont une femme de
Meonie a peint l'yvoire le
plus blanc , pour en faire
36 MERCURE
les boffetes d'un mords qui
fait l'admiration & le defir
des plus braves Cavaliers ,
mais qui eft deſtiné pour
un Roy.
vers 104. 119.
Agamemnon
eft effraié
auffi bien que Menelas.
Menelas
reprend courage
.
Agamemnon
« éclate contre
la perfidie des Troyens
.
Dit que Jupiter ne la laiffera
pas impunie . Prédit
la ruine de Troye . Il s'attendrit
, & ne peut cacher
à fon frere la crainte qu'il
a de le perdre
vers 120.
»
182 .
I. PARTIE.
37
Menelas le raffure & le
prie de ne point allarmer
les Grecs. » Agamemnon
luy dit qu'il faut appeller
s
un Medecin. " Donne or
dre à Talthybius de faire
venir Machaon fils d'Ef
culape . Le Herault obeït .
Trouve Machaon & « luy
parle . » Machaon vient .
Vifite la playe , & fucce
le fang , & y met un appareil
que le Centaure Chiron
avoit autrefois enfeigné
à Efculape, vers 183 .
219.
1. Cependant les Troyens
J
38 MERCURE
s'avancent en bataille. Les
Grecs reprennent leurs armes
, & ne refpirent plus
le
Y
que le combat . Agamemnon
laiffe fon char à Eurymedon
, avec ordre de ne
pas tenir trop éloigné.
Il parcourt à pied toute
l'armée. « Anime par fes
difcours ceux qu'il trouve
diſpoſez à bien faire ».
Reprimande les autres ,
les compare à des faons de
biche ». Arrive prés de la
Gendarmerie Cretoife , la
trouve en bon eſtat , Idomenée
à la teſte , Merion
CC
I. PARTIE.
39
à la queue, « Il loue Idomenée
, le fait reffouvenir
que dans toutes les occafions
; à la guerre , dans les
feftins , il l'a tousjours traité
avec diftinction ». Idomenée
refpond « qu'il luy
fera tousjours fidelle ».
Agamemnon continuë fon
chemin. Il trouve les deux
Ajax deja armez au milieu
de leurs bataillons
; ( ces
bataillons comparez
à des
troupeaux affemblez fous
leur pafteur , qui leur cherche
un afile contre l'orage
qu'il prévoit. Agamem-
*
40 MERCURE
ge
non «loue ces deux chefs ,
& leur dit qu'il n'a pas befoin
de les exhorter » . Il
paffe au quartier du vieux
Neftor . Le trouve qui ranfes
troupes en bataille ,
& qui encourage leurs
chefs . Noms de ces chefs.
De quelle maniere Neftor
difpofoit fa cavalerie & fon
infanterie. « Quels confeils
il donnoit à fes cava-
Sage vieillard ,
liers ".
dit Agamemnon tranfpor
té de joye , pluft aux Dieux
que vos forces refpondif
fent à voſtre grand courage
,
1. PARTIE . 41
ge, &c. » Neftor reſpond
" qu'il n'eft plus au temps
où il tua de fa main le vail.
lant Ereuthalion ; mais que
tout vieux qu'il eft on le
verra à la tefte de fes Ef
cadrons , & qu'il fera utile
au moins par fes ordres &
par fes confeils , que c'eſt
là le partage des vieillards
» . Agamemnon avance.
Trouve Peteus fils de
Meneſthée & Ulyffe qui
ne faifoient aucun mouvement
, parce que le bruit
de ce qui eftoit arrivé dans
les deux armées n'eftoit pas
Septemb. 1711 .
I DD
42 MERCURE
encore venu jufqu'à eux.
Il leur fait de fanglants
reproches de leur inaction
». « Ulyffe refpond
avec fierté
». Le Roy qui
le voit irrité , change de
ton , & « luy parle obligeamment
». Il pourſuic
fon chemin . Voit Diomede
fur fon char avec Sthelenus
fils de Capancé . Diomede
ne donnoit aucun
ordre pour le combat. Agamemnon
« luy reproche
d'avoir degeneré de la
vertu de fon pere Tydée ,
luy rappelle une occafion
cr
I.
PARTIE: 43
cr
d'éclat , où Tydée fignala
fon courage contre les
Thebains ». Diomede par
reſpect pour le Roy ne ref
pond rien.Schelenus prend
la parole & dit qu'ils ne
meritent ny l'un ny l'autre
le reproche qu'on leur fait,
fe piquent tous deux avec
raifon d'eftre plus braves
encore que leur pere .
Diomede repreſente à
Sthelenus que le Roy qui a
le principal intereft à tour
ce qui fe paffe , eft en droit
de leur parler comme il
fait. ,, Diomede en mef-
1 D ij
44 MERCURÈ
me temps faute de deffus
fon char. vers 421. 419.
On voit marcher au
combat les nombreuſes
Phalanges
des Grecs , femblables
à des flots amoncelez
par les vents. Elles
fuivent leurs chefs dans un
profond filence , pour entendre
leurs ordres . Il femble
, dit le Poëte , que cette
multitude innombrable de peuples
n'ait point de voix . Les
Troyens au contraire
comme des brebis qui bê
lent dans un grand paturage
, font un bruit confus
I
I. PARTIE.
45
qui refulte du mélange de
leurs voix & de la diverfité
des langues de toute forte
de peuples qui forment
leur armée, vers 422.438 .
Les Troyens font animez
par le Dieu Mars , &
les Grecs par la Déeffe Minerve.
Ces deux Divinitez
font fuivies de la Terreur ,
de la Fuite & de l'infatiable
Diſcorde. Image poëtique
de la Difcorde . Son
progrez. Ses effets. vers
439. 445.
Les deux armées ſe joignent,
& en viennent aux
I D iij
a
46 MERCURE
mains. Deſcription de leur
choc . Le bruit des guer
riers comparé à celuy que
font d'impetueux torrens
groffis par les pluyes. vers
446. 456.
Antiloque le premier tuë
Echepolus un des plus bra
ves Troyens. Elephenor
General des Abantes, voulant
le dépouiller de fes
armes , eft tué par Agenor.
Il fe fait en cet endroit
une cruelle boucherie des
Grecs & des Troyens qui
fe jettent les uns fur les autres
comme des loups affaI.
PARTIE.
47
mez. Simoïfius (ainſi nom,
mé parce que fa mere accoucha
de luy fur les rives
du Simoïs ) eft tué à la fleur
de fon âge par Ajax fils
de Telamon. Il tombe fur
la pouffiere comme unjeune
peuplier abbattu par le
fer d'une coignée. Antiphus
un des fils de Priam ,
veut venger la mort de Simoïfius
. Illance fon javelot
contré Ajax ; mais il
rencontre au lieu de luy
Leucus compagnon d'Ulyffe.
Leucus tombe fur le
corps de Simoïfius qu'il en48
MERCURE
Les
traifnoit . Ulyffe affligé de
cette perte , s'approche des
Troyens d'un air terrible.
Regarde autour de luy
pour chercher la victime.
il lance fon dard .
Troyens effrayez le retirent
en defordre . Le javelot
va frapper Democoon
fils naturel de Priam , &
le renverſe mort . Les Troyens
reculent. Hector luymefme
eft épouventé. Les
Grecs enflez de ces avan
tages vont chercher les
corps morts jufqu'au milieu
de la meflée pour les
entraifner.
1. PARTIE. 49
entráifner. Apollon irrité
de leur audace fe fait entendre
aux Troyens du
hautde la fortereffe d'Ilion ,
"les exhorte & les encou
rage ; leur reprefente fur
tour qu'Achille ne combat
point , Minerve de fon
cofté anime les Grecs. Piroüs
General des Thraces
tuë Diorés chefdes Epéens
aprés l'avoir bleffé d'un
coup de pierre. Thoas Ge
neral des Etoliens lance.
fon javelot contre Piroüs ,
& l'acheve de fon épée. Ils
vont le dépouiller de fes
Septemb. 1711 1
1 E.
19 MERCURE
armes , mais il en eft empefché
par les Thraces qui
tombent fur luy à coups
de piques , & l'obligent de
Tereurer. vers 457. 539.
Homere parle des exploits
de cette journée
Gomme d'un grand fujet
d'admiration pour un homme
que Minerve auroir
conduit par la main , & à
qui elle auroit fait parcou
rir fans danger tous les endroits
de la bataille. Il auroit
veu les Troyens & les
Grecs eftendus les uns prés
des autres à la mefme pla1.
PARTIE.
ce où ils avoient combattu.
·vers $39. 544•
ARGUMENT
du cinquiéme Livre. V
Sid of and
no Lasjour de cette action
Minerve augmente le cou
rage de Diomede. De fon
cafque & de fon bouclier
fortoit continuellement
un
feu femblable à celuy dé
l'estoille qui paroiſt à la fin
de l'Efté. La Déeffe pouffe
ce guerrier au milieu de la
mellée.ng
ob vers 1. 8.
Idée & Phegée tous deux
I E ij
S2 MERCURE
fils de Darés Sacrificateur
de Vulcain , pouffent leur
char contre Diomede qui
eftoit à pied. Phègée le
premier lance fon dard
contre luy fans le bleffer.
Diomede le perce de fon
javeloty & l'eftend mort
fur la place. Idée n'ayant
pas le courage de ſauver
lecorps de fon frere, prend
La frites Vulcain le couvre
d'un nuageute derobe
aux pourfuités de Diome
de, pour épargner à Darés
le chagrin de perdre fes
deux filsen un jour. Dio1.
PARTIE. 53
mede fait emmener leurs
chevaux. Les Troyens
commencent à plier. Mi
nerve pour augmenter leur
defordre,dit à Mars “ qu'il
faut laiffer combattre les
Troyens & les Grecs &
ne plus refifter aux ordres
de Jupiter. ,, Elle le retire
du combat , & le fait repo
fer fur les rives du 'Scaman¹
dre. Les Grecs.enfoncent
vers 9. 3.7. les Troyens.
Odius chef des Alizoniens
eft tué par Agamemnon.
Pheftus par Idomes
née. Scamandrius par Me.
I E iij
14 MERCURE
nelas. ( Ce Scamandrius
eftoit fort entendu dans
tout ce qui concerne la
chaffe , & avoit efté inftruit
par Minerve . ) Phes
reclus eft tué par Merion.
( Phereclus fils d'un habile
charpentier , avoit bâti les
vaiffeaux que Pâris mena
en Grece. ) Pedée fils na →
turel d'Antenor , eft tué
par Mégés. Eurypile bleffe
Hypfenor. ( Hypfenor ef
toit fils de Dolophion
qui
eftoit Sacrificateur du Scamandre.
) Vers 37.83 .
Idomenée femblable à
I. PARTI E.
St
un fleuve , qui dans fon débordement
emporte tout
ce qui s'oppofe à fon paf
fage , renverfe les batail
lons des Troyens , rien ne
luy refifte. vers 85. 94.
Pandarus , pour arrefter
fon audace , luy tire une
fléche qui luy traverſe l'épaule
droite , & croyant
l'avoir bleffé mortellement
" il s'en glorifie. ,, Schelenus
, ( " à la priere de Diol
mede ,, ) luy ofte cette flé
che. Diomede prie Pallas
" de luy prefter fon fez
cours pour fe venger de
E iiij I
36 MERCURE
Pandarus , & le punir de
fon orgueil ,, Pallas l'exauce.
Luy redonne toutes
fes forces & toute/fa
legereté. Elle luy dit ,
qu'il peut aller hardiment
contre les Troyens ; qu'elle
a diffipé le nuage qui
l'auroit , empefché de difcerner
les Dieux d'avec les
hommes qu'il fe garde
bien de combattre contre
les Immortels , fi ce n'eft
contre Venus fur qui elle
luy permet de tirer.
vers 95. 132 .
Minerve fe retire . DioI.
PARTIE.
57
"
mede qui fe fent trois fois
plus fort qu'à l'ordinaire
,
fe jette au milieu des ennemis
. Eft comparé à un
lion qu'un berger a bleſſé ,
& qui devenu plus furieux,
fe lance fur les brebis effrayées
qui fe tapiffent les
unes fous les autres pendant
que le berger fe cache.
Diomede tue d'abord
Aftynoüs
& Hypenor .
Enfuite Abas & Poluïde ,
tous deux fils du vieux Eurydamas
qui eftoir Interprete
des fonges . Il marche
vers Thoon & Xanthe
$ 8 MERCURE
enfans de Phenops , prive
ce pere malheureux de fes
deux fils à la fois , & luy
laiffe la douleur de voir que
fa fucceffion doit paffer à
des collateraux efloignez .
Diomede , comme un lion
qui fe jette fur un troupeau
de boeufs , tombe encore
fur Echemon & Chromius
enfans dc Priam , les pré
cipite de leur char , les dépoüille
de leurs armes , & .
prend leurs chevaux . versi
133. 165.
Enée qui voit tous ces
ravages , cherche PandaI.
PARTIE.
59
rus à travers les picques &
les javelots. Il le joint &
l'exhorte " à fe fervir encore
de fon arc & de fes
traits contre un homme
qui caufe tant de defordres
, ( fi ce n'eft que ce
guerrier dangereux foit
quelqu'un des Immortels
irrité contre les Grecs ) ,,
Pandarus refpond: “ qu'il
croit reconnoiftre Diome
de à fa taille & à fes armes.
Que fi ce guerrier n'eft pas
une Dieu , au moins Diomede
ne peut faire tant de
prodiges fans le fecours
¢
60 MERCURE
d'une Divinité toute puiffante.
Se repent d'avoir
laiffé chez luy , contre l'avis
de fon pere , onze chars
inutiles par la
crainte que
fes chevaux ne fouffriffent
trop dans une ville affiegée.
Se plaint d'avoir desja
bleffé deux des plus vaillans
hommes , fans autre
effet que de les avoir ren
dus plus furieux. Jure que
s'il revoit fá patrie , il com
mencera par bruler cet
arc & ces fléches qui l'ont
fi mal fervi . ,, Enée luy
dit " de monter fur fon
1. PARTIE . 61
tre
char qui eft tiré par d'excellens
chevaux , & luy
laiffe le choix ou de tenir
les refnes , ou de combatcontre
Diomede. 1
Pandarus " confeille à Fnée
de conduire luy - méf
me fes chevaux qui connoiffent
fa voix & ſa main ;
que pour lay it recevra
Diomede avec fa lance.
Ils montent tous deux fur
le char , & vont à toute
bride contre Diomede
(qui eft à pied.) Sthelenus
qui les voit venir , en averzuDiomede
, & luy con
«Ε
62 MERCURE
feille de les éviter. ,, Dió.
mede " reſpond qu'il n'eft
pas capable de fuir , & que
ces deux ennemis fi redou
tables ne
retourneront
point à Troye ; luy recom !
mande feulement o d'em
mener les chevaux d'Enée
auflitoft qu'il fera vaincur
( les chevaux d'Enées ef
toient de la race de ceuk
done Jupiter fic prefent !
Tras . E,, nov vêrs¸1661273.
Pandarus & Enée font
en prefence de Diomede
Pandarus le premier dit à
Diomede qu'il n'a peule
I. PARTIE.
63
vaincre avec fa fléche ,
mais qu'il fera peut - eftre
plus heureux avec ſon javelot.
,, En mefme temps
il lance fon dard qui perce
le bouclier jufqu'à la cuiraffe.
Pandarús " s'écrie ,,
glorieux de ce fuccez . Diomede
luy dit qu'iba manqué
fon coup, Le frappe
de fon javelot que-Minerve
conduifoit , & qui traverſe
depuis l'oeil juſqu'à
la gorge. Pandarus tombe
de fon char. Enée fe met
en/devoir de deffendre le
corps de fon amy. Diome64
MERCURE
de prend une groffe pierre,
telle que deux hommes à
peine l'auroient peu lever.
Il l'a jette contre Enée , &
luy brife la cuiffe . Enée
tombe fur ces genoux &
s'affoiblit. Venus le prend
entre fes bras , le couvre
de ſa robe , & l'emporte.
Sthelenus, qui fe fouvient
des ordres de Diomede ,
prend les chevaux d'Enée ,
les emmeine , les remet à
fon amy Deiphilus , & vá
rejoindre Diomede . Diomede
, qui a reconnu Venus
, la pourfuit avec un
dard
L. PARTIE 651
dard , & la bleffe à la main.
Lefang immortel coule de
fa playe . Le fang des Dieux
different de celuy des hommes
, &pourquoy. Venus
laiffe tomber Enée , Apollon
le releve , le couvre
d'un nuage & l'emporte.
Diomede parle en termes
picquans à Venus qui fe
retire tres-affligée . Iris l'a
fouftient. Elles trouvent
Mars. Venus " le conjure
de luy prefter fes chevaux
pour s'en retourner dans
l'Olympe . ,, Mars luy donna
fon char. Iris le con
Septemb. 1711. 1 F
66 MERCURE
duit. Elles arrivent en un
moment. Iris dételle les
chevaux , & en prend foin.
Venus fe laiffe tomber fur
les genoux de Dioné fa
mere. Dipné luy deman
de " qui luy a fait cette
bleffeure. ,, Venus refpond
“ que Diomede a eu cette
audace, & que ce n'eft plus
icy une guerre des Grecs
contre les Troyens , mais
desGrecs contre les Dieux .
Dioné la confole , luy dit
ཡ་ que ce n'eft pas la
premiere
fois que les Dieux
ont efté infultez par les
I
I. PARTIE . 67
hommes. ( Exemples de
Mars , de Junon , & de Pluton
; ) Que Diomede doit
craindre de porter quel
que jour la peine de fa te
merité. ,, Dioné effuye le
fang qui coule de la blef.
feure de fa fille . Venus eft
guerie en un moment. vers
275. 417 .
Junon & Minerve entretiennent
Jupiter de ce qui
vient d'arriver à Venus.
" Plaifanterie de Minerve
à ce fujet. ,, Jupiter foufrit ;
appelle Venus & " luy re
commande de ne plus s'ex
I
Fij
68 MERCURE
pofer.,, vers 418. 430.
Diomede par trois fois
fe jette fur Enée , quoy
qu'Apollon l'ait pris fous
fa protection . A la quatriéme
fois ce Dieu irrité
" luy parle
d'un ton
menaçant
. ,, Diomede
fe
retire
. Apollon
porte Enée
dans fon Temple
fur la Citadelle
de Pergame
. Latone
& Diane
ont foin ellesmefmés
de le panſer
. vers
432. 448.
Apollon voyant que le
combat s'echauffe autour
d'un phantofme qu'il avoit
I. PARTIE.
69
*
formé reffemblant à Enée
pour tromper les Grecs ,
demande à Mars , « s'il n'y
a pas moyen d'arrefter ce
Diomede qui porte fa fureur
jufqu'à pourfuivre les
Dieux . Enfuite il fe retire
fur la Citadelle . Mars
prend la reffemblance d'Acamas
General des Thraces
. Va de rang en rang .
" Se fait entendre aux Troyens
& les anime. » Sarpedon
picque le courage de
Hector par le reproche
qu'il luy fait de fon inaction
, & de la lafcheté de
Fiij .
70 MERCURE
fes freres qui tremblent
comme des chiens timides
en preſence d'un lion . »
Hector , fans repliquer
faute de fon char , un javelot
à la main , exhorte les
Troupes. Les Troyens fe
rallient. Les Efcadrons des
Grecs viennent fondre fur
eux. La pouffiere qu'ils élevent
, & dont ils font tout
blanchis , comparée à celle
qui couvre ces monceaux
de paille que des vanneurs
ont feparée d'avec le grain .
Le combat recommence .
Enée , qu'Apollón a retiré
I. PARTIE.
71
du Temple où il l'avoit
mis , reparoift à la tefte de
fes troupes avec toute fa
vigueur. Les foldats tranfportez
de joye font furpris
en mefme temps de le revoir
firoft ; mais l'ardeur.
du combat ne leur permet
pas de l'interroger fur une
fi prompte guerifoni vers
449. 518.
Les Grecs animez par
les deux Ajax , par Ulyffe ,
& par Diomede, attendent
les Troyens de pied ferme
, femblables à des nuages
affemblez , qui n'at
72 MERCURE
tendent que le reveil des
vents endormis pour eftre
mis en mouvement. vers
$19. $ 27.
Agamemnon donne fes
Exhorte fes fol ordres cc
dats » Enfuite il lance fon
javelot & tuë Deicoon le
plus cher compagnon d'Enée.
Enée de fon cofté tué
Crethon & Orfiloque enfans
de Dioclés , qui avoit
pour ayeul le fleuve Alphée.
Crethon & Orbilo
que comparez à deux jeunes
lions , qui aprés avoir
laiffé par tout des marques
de
1. PARTIE.
73
de leur furie , fuccombent
enfin fous l'effort des pafteurs.
Ces deux jeunes
guerriers tombent fous les
coups d'Enée comme les
plus hauts fapins abbattus
par les vents. Menelas ,
pour les venger , s'avance
au milieu des combattans ,
pouffé par le Dieu Mars ,
qui ne cherche qu'à le faire
perir de la main d'Enée.
Antiloque voyant le peril
où Menelas s'expofe, court
fe joindre à luy. Enée qui
voit ces deux guerriers
unis , fe retire . Ils enlevent
Septemb. 1711. 1 G
74 MERCURE
les corps de Crethon &
d'Orfiloque ; enfuite ils retournent
dans la meflée .
Menelas tuë Pylemenés
qui commandoit
les Paphlagoniens.
Antiloque
bleffe Mydon d'un coup
de pierre , l'acheve de fon
épée , & emmene fes chevaux.
vers 528.589
>
Hector ayant
apperceu
Menelas &
Antiloque ,
marche à eux avec impetuofité.
Les
Troyens le
fuivent. Mars & Bellone
font à leur tefte. Mars accompagne
par tout Hec-
3
I. " 75 PARTIE.
tor. Diomede voyant ce
Dieu terrible , eft faifi de
frayeur. Son eftonnement
comparé à celuy d'un voyageur
qui , aprés avoir
traversé de vaftes campagnes
, voit tout d'un coup
un grand fleuve , & retourne
fur fes pas. Diomede
fe retire en difant aux
Grecs , qu'il faut ceder
"
לכ
aux Dieux. vers590.606.
Les Troyens fondent fur
les Grecs. Hector tuë de
fa main Menoſthés & Anchiale.
Ajax fils de Telamon
s'avance pour les
I Gij
76 MERCURE
vanger , & tuë Amphius de fon
javelot. Il accourt enfuite pour
le dépoüiller ; mais les Troyens
font pleuvoir fur luy unegrefle
de traits , & l'obligent de fe
retirer.
vers 607.626.
Sarpedon fils de Jupiter, &
General des Lyciens , & Tkpoleme
fils d'Hercule fe rencontrent.
« Ils fe parlent quelque
temps au fujet du parjure
de Laomedon que Tlepoleme
reproche à Sarpedon. » Ces
deux guerriers aprés « s'eſtre
menacez fierement » lancent
leurs dards lun contre l'autre.
Les traits partent enſemble.
Sarpedon eft bleffé à la cuiffe
Le dard y demeure attaché.
Tlepoleme tombe fans vie.
On emporte Sarpedón . Les
I. PARTIE. 77
Grecs enlevent le corps de
Tlepoleme. Ulyffe ,
Ulyffe , pour le
و ر
venger , tourne fes armes contre
les Lyciens & en tuë un
grand nombre. Noms des Lyciens
tuez par Ulyffe. Hector
s'avance contre luy pour arre
fter ſes defordres. Serpedon
voyant Hector le prie de ne le
pas laiffer en proye à fes ennemis.
Hector paffe rapidement
pour aller charger les
Grecs. Les amis de Sarpedon
le mettent fous un grand chefne.
Pelagon luy tire le javelot
de fa playe. Sarpedon s'évanoüit.
Borée le rafraifchit
de fon fouffle , & le ranime.
Les Grecs qui ne peuvent fou
ftenir le choc du Dieu Mars
& d'Hector , fe battent en re
I
Giij
78 MERCURE
traite fans prendre la fuite .
Noms de plufieurs braves Capitaines
tuez à cette attaque .
vers 628. 710.
Junon voyant ce qui fe paffe,
dit à Minerve " qu'il eft temps
d'arrefter les ravages de Mars,
& de fecourir les Grecs . ,, Junon
prepare elle - mefme fes
chevaux. La Déeſſe Hebé luy
apprefte un char fuperbe. Defcription
de ce char. Minerve
quitte fes habits pour s'armer.
Quelles font fes armes. Son
Egide. Son cafque . Sa pique.
Les deux Déeffes montées fur
leur char éclatant , vont à toute
bride au palais de Jupiter .
Les portes de l'Olympe , qui
font gardées par les Heures ,
s'ouvrent d'elles- meſmes avec
I.
PARTIE . 79
un grand bruit. Junon parle à
Jupiter & luy demande " s'il
veut permettre de reprimer les
fureurs de Mars , & de bleffer
cet infensé qui ne reconnoiſt
d'autre droit que la force.
Jupiter luy dit " de donner ce
foin à Minerve qui eſt accouftumée
à le vaincre. ,, vers 711.
766.
Junon accompagnée de Minerve
pouffe fes chevaux qui
courent avec impetuofité entre
le Ciel & la terre. ( Les
chevaux des Dieux franchiſ→
fent d'un ſeul fault autant d'efpace
qu'un homme affis fur un
cap eflevé au bord de la mer
en peut découvrir fur cette vafte
étendue. ) Les Déeffes arrivent
prés de Troye. Junon
80 MERCURE
•
dételle fes chevaux. Les envi
ronne d'un nuage. Le Simoïs
fait naiftre l'ambrofie fur fes
rives pour leur pature. Les
Déeffes marchent enſemble
comme deux colombes , & vont
fecourir les Grecs. vers 767.
779.
Elles trouvent Diomede entouré
des plus braves guerriers
femblables aux plus fiers lions
& aux fangliers les plus terribles.
Junon s'arrefte . Prend
la reffemblance de Stentor ,
dont la voix d'airain eftoit plus
forte que celle de cinquante
hommes enfemble . Elle parle
aux Grecs , & les anime.
Minerve de fon cofté s'approche
de Diomede qui s'eftoit reà
l'écart pour ratiré
un
peu
I. PARTIE. 81
fraifchir la playe que Pandarus
luy avoit faite. Elle luy
reproche " de s'affoiblir quand
il faut agir, & de ne reffembler
gueres à fon pere Tydée qu'-
elle protegeoit auffi bien que
luy , & dont elle ne pouvoit
retenir le courage Elle luy rappelle
l'aventure de Tydée avec
les Defcendants de Cadmus.
Diomede refpond « qu'il ne
manque ny de force ny de refolution
, mais qu'il fe fouvient
des deffenfes qu'elle luy a faites
de combattre contre les
Dieux : Que Mars eſt maintenant
à la teſte des Troyens.
Minerve luy dit « de ne point
craindre Mars , & de le frapper
hardiment s'il vient à fa
rencontre ; qu'auſſi bien c'eſt
&
2
82 MERCURE
un perfide qui prend le party
des Troyens contre la promef
fe qu'il luy avoit faite & à Junon
, de favorifer les Grecs. »
Elle fait defcendre Sthelenus
& monte à fa place auprés de
Diomede fur fon char. Elle.
prend le cafque de Pluton pour
n'eftre point veuë. Pouffe les
chevaux contre Mars . Mars ,
qui vient de tuer Periphas
voyant Diomede , s'avance , &:
luy veut porter un coup de fa
pique. Minerve détourne le
coup , conduit celle de Diomede
contre Mars , & la luy fait
entrer bien avant dans les coftes
. Mars la retire , & jette
un cry femblable à celuy d'une
armée de neuf ou dix mille
homines . Les Troyens & lest
1. PARTIE 83
Grecs en font épouvantez.
Mars retourne dans l'Olympe.
Diomede le voir s'élever comme
un nuage obfcur. vers 780.
867.
<<
Mars montrant à Jupiter le
fang qui coule de fa playe , luy
dit qu'il a engendré une fille
pernicieufe qui fe croit tout
permis , parce qu'il ne la corrige
pas pendant qu'il traite
avec feverité les autres Dieux.
Que c'eft Minerve qui a infpiré
à Diomede l'audace de bleffer
Venus & luy enſuite. » Jupiter
rejette fa plainte , & luy
dit « qu'il eft luy - mefme un
inconſtant & un furieux qui
n'aime que les querelles , & que
s'il n'eftoit pas fon fils il y a
long-temps qu'il l'auroit préci84
MERCURE
guepité
dans les abyfmes avec les
Titans. » Jupiter cependant
donne ordre à Pæon de le
rir. Pæon obeït & le guerit fur
le champ avec un baume exquis
qui fait fur la playe le meſme
effet & auffi promptement
que la prefure fur le lait. Hebé
aprés avoir preparé un bain
pour Mars , luy donne des habits
magnifiques. Mars fe place
auprés de Jupiter. Junon &
Minerve ne font pas longtemps
fans remonter au Ciel.
MERCURE,
11 PARTIE.
AMUSEMENS.
ke#e #tete * # # # ***
SUITE ET FIN
de l'Hiftoire Espagnole.
LE
E Prince de Murcie
reprit enfin ſes
efprits , & pour lors le folitaire
lui dit : Seigneur ,
ſi j'avois pû prévoir la fu
Sept. 1711.
2 A
2 MERCURE
,
nefte impreffion qu'a fait
fur vous la nouvelle que
je vous ai appriſe , croyez
que loin d'irriter voltre
douleur , je n'aurois penfé
qu'à la foulager ; l'experience
que j'ai faite des
revers de la fortune m'apprend
à plaindre ceux qu'-
elle rend malheureux. Ah
pourquoi ne fçavois -je pas
l'interêt que vous prenez
à Leonore je ne me redu
moins
procherois pas
les tourmens que vous
fouffrez.... Je ne vous les
reproche point , Seigneur,
II. PARTIE.
répondit le Prince , non
plus qu'à Leonore , fi elle
a épouſé Dom Juan elle a
dû l'époufer , & fi elle m'a
rendu le plus malheureux
des hommes , il faut que
je l'aye merités Non - le
plus affreux defefpoir ne
me forcera jamais à la
traitter d'infidelle , mais
je n'en mourrai pas moins
malheureux nc ob mem
Ah : Seigneur , reprit le
folitaire , fi Leonore n'eft
point infidelle , il eft des
amans plus malheureux
que vous' ; j'ai perdu com-
2 A ij
4 MERCURE
,
me vous l'efperance de
poffeder jamais celle que
j'aime je ne puis douter de
fon inconftance , & Tjen
reçois les plus fortes preu
ves au moment même qui
devoit affurer mon bonheur
, quel defefpoir eft
égal au mien ? amant d'une
Princeffe , notre mariage
étoit conclu du confentement
de fon frere , & l'ine
fidelle fe fait enlever ce
our -là même par mon
rival , fans ce trait dela
plus noire infidelité je fes
rois encore à Grenade , ra
A
LL PARTI É.
& vous ue m'auriez point
trouvé dans cette folitu
de où nos communs mal
heurs nous ont conduit.
Le Prince comprit aifément
que cette Princeffe,
que le folitaire avoit aimée
, n'étoit autre qu'Elvire
, il en avoit fouvent
oui parler à Dom Pedre
fon frere , & comme il
fçavoir la violence que
Dom Garcie avoit faite à
Elvire , il crut devoir ré
parer le tort que le folis
taire lui faifoit par fes foupçons
, il me femble , Sei-
2 A iij
MERCURE ,
gneur , lui dit-il , que vous
condamnez trop aisément
la Princeffe que vous aimez
, pourquoi rapporter
à fon inconftance un éloignement
dont elle gémit
peut- être autant que vous ?
fi vôtre rival l'a enlevée ,
le tort que vous lui faites
eft irreparable, mais quoiqu'il
en foit , ce n'eſt point
ainfi qu'il faut juger de ce
qu'on aime . Ah ! je ne
ferois pas fi malheureux
fi je pouvois foupçonner
Leonore d'inconftance. Si
je condamne la Princeffe
A.
II. PARTIE .
7
Elvire , reprit le folitaire ,
c'eſt que je ne puis douter
qu'elle ne me foit in
fidelle ; aprés cet enlevement
je la cherchai dans
tout le Duché de Grenade
; & dans quelques lieux
que mon rival fait conduite
, je l'aurois fans doute
découverte, fi elle n'eût
été d'accord avec lui pour
rendre mes recherches
inutiles. Ah ! je l'ay trop
aimée pour ne pas me
plamdre de fon change
ment , & je vois bien que
nos malheurs font diffe-
2 A iiij
MERCURE ,
rens , quoiqu'ils partent
du même principe. C'eft
ainfi que le folitaire difputoit
au Prince la trifte
gloire d'être le plus malheureux
de tous les hommes
; fi c'eft un dédom
magement pour ceux qui
fouffrent
, ils pouvoient
tous deux y prétendre ,
l'un étoit réduit à accufer
fa maîtreffe , qui lui étoit
pourtant fidelle , & l'autre
à s'accufer lui -même , lui
qui n'avoit jamais eu d'autre
regle de fes actions
que fa gloire & fon amour.
II. PARTIE
Cependant Elvire paf
foit la vie dans de mortelles
inquietudes auffibien
que Leonore, la converfation
que ces deux
Princeffes avoient eûë
leur étoit également funefte
, & fi Leonore avoit
lieu de foupçonner un
Prince , qu'Elvire avoit
nommé fon amant , Elvire
foupçonnoit avec raifon
un amant dont le nom
avoit produit un fi violent
effet fur Leonore , elles avoient
un égal interêt de ſe
retrouver pour éclaircir
10
MERCURE ,
un doute fi cruel , mais il
ne fut pas permis à Leonore
d'aller feule dans le
jardin, & Elvire n'y voyant
plus que la curieuſe tante,
fut contrainte de choisir ,
pour le lieu de fa promenade
, la Foreft de Gades ;
c'est là que ces deux Princeffes
fe retrouverent dans
le temps qu'elles ne l'efperoient
plus. Le Duc d'Andaloufie
, content de l'obéiffance
de fa fille , l'avoit
enfin délivrée des
importunitez de fa vieille
four , elle alloit fouvent
H. PARTIE. M
fe promener dans cette
Foreft , là elle pouvoit
jouir de la folitude , & fe
livrer à toute fa douleur.
Le hazard la conduifit un
jour dans l'endroit où El
vire avoit coûtume d'aller
fe plaindre de fes malheurs
, auffi tôt elle court
vers elle avec empreffement
, & lui dit : il y a
long- temps que je vous
cherche , Madame , pour
vous apprendre une nou
velle qui doit vous intereffer
: Le Prince de Murcic
eft Duc de Grenade
12 MERCURE,
par les foins de Dom Pe
dre vôtre frere & fon ami.
Madame , répondit Leonore
, vous fçavez la part
que j'y dois prendre, mais
je devine auffi celle que
vous y prenez , ce n'eſt
point moi qui dois reffentir
la joye de cette nouvelle.
Ah ! qui doit donc
la reffentir reprit Leo
nore , le Prince de Murcie
vous aime , & n'a fait
une fi grande démarche
que pour vous meriter.
Ah Madame , répondit,
Elvire , pourquoi infultezII.
PARTIE
IS
vous à mon malheur ? Je
fçai que je ne fuis point
aimée , c'eft en vain que
je voudrois vous diſputer
le coeur du Prince de
Murcie . Ces deux Prin
ceffes entroient inſenſiblement
au point d'un éclairciffement
qui leur étoit fi
neceffaire , lors que Dom
Juan & Dom Garcie vin
rent troubler leur entre.
tien : fi- tôt qu'Elvire eut
reconnu fon perfecuteur ,
qui n'étoit pas fort loin
d'elle , elle prit la faire , &
Leonore , que la preſence
14 MERCURE,
de Dom Juan auroit embarraffée
dans une pareille
circonftance , prit une
autre allée dans le deffein
de l'éviter , Dom Garcie
avoit cru reconnoître Elvire
& l'avoit fuivie des
yeux , l'occafion lui parut
trop belle pour la negli
ger : Seigneur , dit- il à D.
Juanjo vous voulez fans
doute aborder Leonore ?
je vous laiffe feul de peur
de troubler un entretien
fi doux pour Fun & pour
l'autre , je ferai toûjours à
portée de vous rejoindre,
II. PARTIE S
en même temps il fuit la
route qu'il avoit vû prendre
à Elvire , & aprés
l'avoir affez long- temps
cherchée , il la découvrit
dans le lieu le plus écarté
de la foreft. Quelle fut la
furprife & la crainte de
cette Princeffe : elle con
noiffoit le perfide Dom
Garcie , irrité de ſes refus
& de fes mépris , il étoit
capable de fe porter aux
plus violentes extremitez :
Elvire dans un fi grand
péril n'eut d'autre reffours
ce que celle de faire en16
MERCURE,
tendre des cris horribles
qui puffent lui attirer du
fecours , & fes cris en effet
la fauverent. Le folitaire,
quife promenoit affez prés
de là , les entendit ; auffitot
il court vers le lieu où
les cris d'Elvire le conduifoient
, & tout d'un
coup il voit celle qu'il
croyoit infidelle à Grenade
, qui fe jette dans ſes
bras , en lui difant : Seigneur
, ſauvez- moi des fureurs
d'un fcelerat, & dans
le moment Dom Garcie
parut. Je n'entreprendrai
point
II. PARTIE. 17
point d'exprimer les di
vers mouvemens de furprife
d'amour & de colere
dont le folitaire fut faifi
Dom Garcie voulut profiter
du moment pour fe
1
défaire de fon rival avant
qu'il fût en défenſe , mais
lefcelerat meritoit la
mort , le folitaire L'étendit
à fes pieds , aprés le peu
de refiftance qu'on doit
attendre d'un lâche & d'un
traître , enſuite s abandonnant
à d'autres tranſports,
il s'approcha d'Elvire :
quel bonheur , lui dit - il ,
Sept. 1711.
2.B
18 MERCURE ,
Madame la fortune vous
rend à mon amour, & li
vre mon rival à ma ven
geance ; que le perfide
nous a caufé de maux !
que n'ai-je point fouffert
pendant vôtre abſence !
Je n'oublierai jamais ,
Prince , répondit Elvire
le fervice que vôtre pitié
vient de me rendre , mais
je ferois plus heureuſe fi
je le dévois à vôtre amour.
Ah ! Ciel, s'écria le folitai
re , comment expliquer
ces cruels reproches je
fuis donc un amant infip
83 ITI
II. PARTIE. 19
dele.... Prince , je voudrois
pouvoir en douter ,
rien ne troubleroit la joye
que j'ai de vous revoir :
Ah ! je ferois trop heureu
fe... Grand Dieu , s'écriat'il
encore une fois , il eft
donc vrai que vous m'accufez
d'inconftance ? Ah !
Madame , quel démon envieux
de nôtre bonheur ,
vous donne ces injuftes
foupçons ; quoi je vous
revois le plaifir que je
fens me perfuade que tous
mes maux font finis , & je
retrouve au même inftant
3 B ij
20 MERCURE,
des malheurs plus grands
encore que ceux que j'ai
fouffers ; ma chere Elvire
voyez cette trifte retrai
te , cette affreufe folitude !
font-ce là des preuves de
mon inconftance : Oui ,
Prince , c'eft le choix de
cette folitude qui confir
me mes triſtes foupçons.
Ah ! Seigneur , eft- ce dans
la foreft de Gades que
vôtre conftance devoit
éclater Le folitaire , qui
ne pouvoit rien comprendre
au difcours d'Elvire ,.
ne fçavoit comment cal
2
IL PARTIE. 27
mer fes foupçons , ma
Princeffe , lui difoit -il, dai
gnez me dire le fujet de
vos reproches , je fuis fûr
de me juftifier , je ne fuis
pas furpris que vous me
foupçonniez , le moindre
accident peut allarmer
une amante fenfible , j'ai
moi- même éprouvé com
bien il eft aifé de craindre
le changement de ce qu'-
on aime , je vous ai crû
moi-même moins fidelle
que je ne vous retrouve ,
mais fi l'heureuſe avanture
qui nous réunit ne m'avoit
22 MERCURE,
détrompé , loin de vous en
faire un myftere , je me
ferois plaint à vous , je
vous aurois découvert le
fujer de mes douleurs , &
je n'aurois rien tant ſouhaitté
que de vous voir
bien juftifiée , pourquoy
n'en ufez- vous pas ainfi ,
ma Princeffe ? l'amour
peut- il prendre un autre
parti? Que me fervira-t-il ,
reprit Elvire, de vous convaincre
d'inconftance ? je
ne vous en aimerai pas
moins , & vous n'en aimerez
pas moins Leonore.
II.
PARTIE 23
L
Quoi ! j'aime Leonore, re
prit vivement le folitaire ?
Ah! je vois maintenant le
fujet de vos foupçons ,
vous avez crû que , char
mé de cette Princeffe , jet
n'habite cette folitude
que pour lui prouver mon
amour , mais non , ma
chere Elvire , rendez- moi
mon innocence , rendezmoi
tout votre amour : jet
n'ai jamais vu Leonore ;
je fuis dans un lieu tout
plein de fa beauté & de
les vertus & je n'ai jamais
penté qu'à vous, c'est pour
24 MERCURE ,
Vous feule que je fuis réduit
dans l'état où vous
me voyez. Ah ! Prince , dit
Elvire , que ne vous puis- je
croire ; mais non , vous
me trompez ; voyez vousmême
ſi je dois être convaincue
je racontois à
Leonore nos communs
malheurs , elle me demanda
vôtre nom , je lui nommai
le Prince de Murcie ,
& foudain elle tomba évanoüie
dans mes bras
joüiffez , Prince , de vôtre
gloire , aprés ce coup rien.
ne peut m'ôter ma dou
leur.
II PARTIE
25
leur. Elvire voulut s'éloi
gner du folitaire pour lui
cacher fes larmes , arrêtez
ma Princeffe , s'écria-t-il ,
non je n'ai jamais vu Leonore
, il eft un autre Prince
de Murcie , vous le devez
fçavoir : Ah pouvezvous
me foupçonner ? mais
machere Elvire , venez me
voir tout-à- fait juftifié , j'ai
laiffé dans ma cabane un
inconnu qui aime Leono
re , Férat où la nouvelle
de fon mariage avec Dom
Juan l'a réduit , m'a découvert
fon fecret ; il eſt
Sept. 1711.
2 C
26 MERCURE,
fans doute ce Prince de
Murcie amant de Leono,
re, venez, je lui demande.
rai fon nom , il ne pourra
me refufer cet éclairciffe :
ment , qui importe tant à
vôtre bonheur & au mien.
Ils n'eurent pas grand che
min à faire pour arriver à
la petite cabane , le cours
de leur converfation les
avoit infenfiblement canduits
, ils y entrent , mais
quel fpectacle s'offrit tout
d'un coup à leurs yeuxil's
virent deux hommes éten
dus dans la cabane , qui
y
II. PARTIE. 27
#
periffoient dans leurfang.
Ah Ciel s'écria Elvire ,
faifie d'horreur & de furprife...
Qui font ces malheureux?
Que je plains le
fort de l'un d'eux , répondit
le folitaire ; c'eſt cet
étranger qui étoit venu
chercher ici un azile , nous
f
déplorions enſemble nos
communs malheurs , il alloit
finir les miens . Elvire
revenue de fa premiere
terreur s'approcha & reconnut
Dom Juan. Le
Prince aprés s'être feparé
de D. Garcie avoit long-
2 Cij
1
28 MERCURE ,
temps erré dans la forêt¸
occupé des triftes idées qui
les avoient conduits : malgré
ce que la fortune faifait
pour lui , il ne laiffoit
pas d'avoir fes chagrins ;
il avoit apperçu la cabane
du folitaire , & y étoit entré
attiré par la fimple curiofité
les foupirs de cet
inconnu l'avoit redoublée
en excitant fa compaffion
. Mais quelle furprife!
à peine ces deux hommes
fe furent envifagez , qu'un
premier mouvement de
rage & de vengeance leur
II.
PARTIE. 29
quer :
stant tout loifir de s'expli-
: Ah te voila , traître,
secria l'un , perfide , tu
mourras , s'ecria l'autre :
& à l'inftant ils fe lancent
furieux l'un fur l'autre, &
fe battent avec tant de
haine & tant d'acharnement
, que fans recevoir
aucun coup mortel ils fe
percerent en plufieurs endroits
, ils tomberent l'un
& l'autre affoiblis par la
de leur fang , & par
la longueur du combat.Ce
fut dans cet état que les
trouverent Elvire & fon
2 Ciij.
perte
30 MERCURE ,
amant , ils leur donnerent
tous les fecours poffibles, &
fe retirerent à l'écart dans
l'efperance
de tirer quelque
éclairciffement
de ce
que fe diroient ces deux
rivaux. Ils reprirent peu
de temps aprés leurs forces
& leurs reffentimens
& le Prince de Murcie
tournant vers Dom Juan
des yeux pleins d'indignation
: Quoy tu yis encore ?
le Ciel ne peut donc confentir
à la mort du digne
époux de Leonore , ni la
force,nil'amour, nila haine
II. PARTIE . 31
ne peuvent rien fur de fi
beauxjours Le Ciel,répon
dit Dom Juan , veut que
j'admire encor cet illuftre
:
conquerant
, qui vient de
joindre
à tant de hauts titres
celuy de Duc de Grenade
Quel regret
pour
moy de mourir
fans voir
regner un Prince ſi gene
reux ? Peux -tu le voir fans
rougir , perfide , reprit le
Prince ? Non , dit Dom
Juan , je rougis de t'avoir
fi mal connu . Les traîtres ,
repliqua le Prince, ne rougiffent
du crime qu'aprés
2 C iiij
32 MERCURE ,
}
qu'ils l'ont commis . Il eft
vray, répondit D. Juan ,
s'ils n'en rougiſſoient
pas
fi tard , je ferois Duc de
Grenade & vous ne feriez
encore que le Prince de
Murcie. Pourfuis , indigne
amy , reprit le Prince ,
cherche un pretexte à ton
horrible perfidie ; tu n'es
donc l'époux de Leonore
que parce que je fuis un
Tyran ? Non , traître , ré
pondit Dom Juan , puif
qu'il faut enfin éclatter , je
ne t'ai point trahi ,je me fuis
vengé de l'ennemi comII
PARTIE.
33
mun de toute l'Eſpagne ;
d'un ufurpateur qui eſt en
abomination dans toute
l'Europe : Renonce à Leonore
, qui te detefte autant
qu'elle ta autrefois aimé.
Grand Dieu , s'ecria - t- il, où
fuis -je ? non, Leonore n'aurra
pas pû le croire ; tes
derniers mots te convainquentd'impofture,
tu peux.
m'avoir pris pour un uſurpateur
, mais non pas cette
genereufe Princeffe. Il eſt
vray , répondit D. Juan
tu lavois feduite par ta
fauffe vertu: mais qu'avoit
34 MERCURE ,
elle à repondre à D. Gar
cie , dont la fidélité rend
ta perfidie certaine ? Le
Prince vit dés ce moment
la trahifon de D. Garcie ,
& parla ainfi à ſon rival:
Dom Juan, je fuis forcé de
vous rendre vôtre innocence
, Dom Garcie vous
a trahis tous deux
d'ufurper vos Etats , je les
ay fouftraits à la tyrannie,
dans le feul deffein de vous
les rendre En abordant
l'Ifle de Gades je trouvay
Dom Pedre qui vous cherchoit
par tout , je m'offris
loin
IL PARTIE . 35
à prendre vôtre place , &
je fis pour vous ce que je
n'aurois pas fait pour moymême
, je me privay du
plaifir de revoir Leonore
pour vous remettre dans
vos Eftats ; j'en ai chaffé
Dom Garcie qui les ufurpoit
: pour prix de mon fecours
& de mon amitié
vous époufez ce que j'ai
me , fans que j'en puiffe.
accufer que la fortune ,
vous n'êtes point coupable
: mais cependant Leonore
eft à vous , & je la.
perds pour jamais.
36
MERCURE ,
Le Prince de Murcie
parloit d'un air fi touchant
que Dom Juan lui-même
commençoit à s'attendrir.
On peut juger de la fituation
des deux fpectateurs ;
Elvire étoit fûre du coeur
de fon amant, & cet amant
voyoit dans les yeux d'Elvire
, & la juftice qu'elle
rendoit à fon amour , & la
joye avec laquelle elle la
lui rendoit , il ne manquoit
plus au Prince qu'une
occafion de confirmer
ces difcours qui faifoient
déja tant d'impreffion ; le
II. PARTIE.
37
A h
hazard la fit naître prefqu'au
même inftant. Un
des domestiques de Dom
Juan , qui avoitfuivi Dom
Garcie , entra dans la ca
bane , attiré par le bruit
qu'il avoit entendu. Approchez
, lui dit D. Juan ,
pourquoy
m'avez - vous
trahi ? pourquoi êtes-vous
entré dans le complot du
traître Dom Garcie? Ferc'étoit
le nom nandez
du domeftique ) interdit
d'une question à laquelle
il ne s'attendoit pas , &
déja furpris de la réunion
38 MERCURE ,
des deux Princes , prit le
parti de fe jetter aux
pieds de fon Maître , &
de lui découvrir tout le
myftere d'une fi noire trahifon.
Ah ! quel fecret venez-
vous de me reveler ,
s'écria Dom Juan , ſaiſi
d'une jufte horreur , confus
de fa credulité , deſeſpéré
d'avoir fuivi les mouvemens
de fa haine contre
celui à qui il devoit tout ?
Ah ! Seigneur , s'écria-t- il ,
fe tournant vers le Prince
de Murcie , que puis- je
vous dire ? je ne fuis point
II.
PARTIE. 39
l'époux de Leonore. Vous
n'êtes point fon époux ,
répondit le Prince Ah!
Dom Juan pourquoi voulez
- vous me flatter ? cro
yez-vous par là conferver
ma vie Non , je meurs
mal-heureux amant de
Leonore & fidele ami de
D. Juan . C'est moi qui dois
mourir , reprit Dom Juan,
je ne fuis plus digne de
la vie , vivez , vivez , Prince
pour poffeder Leonore ;
j'ai affez d'autres crimes
à me reprocher fans me
charger encore de celui
40 MERCURE,
d'être fon époux ; non ,
je ne le fuis point , & l'unique
confolation qui me
refte , aprés tous les maux
queje vous ai caufez , c'eſt
d'être encor plus malheureux
que je ne fuis coupable.
En même temps il lui
apprit comment ce ma
riage avoit été retardéé pár
une violente maladie de
Leonore , que fes chagrins
avoient apparem
ment caufée. Dom Juan
ne borna pas là les foins
qu'il devoit au Prince , il
lui promit de flechir le
Duc
II. PARTIE. 4I
Duc d'Andaloufie , & fit
renaître dans fon coeur
l'efperance que tant de
malheurs en avoient ôtée.
Quel changement de fituation
pour le Prince de
Murcie , à peine croyoitil
tout ce qu'il entendoit ,
partagé entre la joye de
fçavoir Leonore fidelle ,
& l'impatience de la revoir
telle que l'amour la
lui confervoit , à peine
pouvoit-il fuffire à reffentir
tout fon bonheur. Elvire
& le folitaire de leur
côté joüiffoient du bon
Sept. 1711.
2 D
Q
42 MERCURE
,
heur de fe trouver fideles ,
exempts des foins & de l'in
quietude qui troubloient
depuis fi long- temps leur
amour ;- le fpectacle dont
ils étoient témoins aug
mentoit encore leur tendreffe.
Aprés qu'ils fe furent
dit tout ce qu'un bonheur
mutuel peut infpirer,
ils s'aprocherent des deux
Princes . Dés que le Prince
de Murcie eut apperçû le
folitaire , il luy dit : Vous
me trouvez, Seigneur,dans .
une fituation bien diffe
rente de celle où vous
II.
PARTIE. 43
m'aviez laiſſé , vous voyez
qu'il ne faut qu'un moment
pour terminer les
plus grands malheurs , j'ef
pere que celuy qui doit
finir les vôtres n'eft pas
bien éloigné , & pour lors
ma joye fera parfaite . Seigneur
répondit le folitaire
, le Ciel nous a réunis
pour nous rendre tous heureux
, vous allez revoir
Leonore , je retrouve Elvire
fidelle , cette avanture
finit tous les malheuts
qui femblojent attachez
au nom que nous portons
2 Dij
44 MERCURE
,
Fun & l'autre. Il lui apprit
en même temps qu'il étoit
un cadet de fa marfon
dont la branche féparée
depuis longtemps eftoit
prefque
inconnue
en Efpagne
il luy raconta
les
foupçons
d'Elvire , à l'oc
cafion de la conformité
'de leur nom , les momens
,
furent employez
à des détails
capables
d'intereffer
du moins des amans mais
Forfqu'Elvire
huy tendit
compte à fon tour de fon
entrevûe
avec Leonbre, &
de tout ce qui Pavol¤¹ fth...
IL
PARTIE. 45
II
vie Ah , secria le Prince ,
que la fortune eft cruelle
quand elle nous pourfuit ::
c'étoit l'unique moyen de
rendre ma fidelité fufpecte
à Leonore : mais non , cet
te Princeffe connoît bien
mon coeur , elle n'aura
point fait cette injuftice à
mon amour. Cependant
Fernandez qui avoit été
témoin de l'éclairciffement
entre le Prince de
Murcie & fon maiftre ,
plein de tout ce qu'il avon
entendu , courut le publier
dans le Palais du Duc, i
46 MERCURE ,
trouva Leonore qui quittoit
la forêt pour retourner
à fon appartement , &
elle en fut inftruite la premiere.
Son recit étoit affez
30
intereffant pour que
Leonore
voulût le juftifier
elle fe fit incontinent
conduire
à la cabane ; dés
qu'elle parut fa préfence
produifit un profond filence
, le Prince étoit celuy
qui avoit le plus de
chofes à dire , il fut auffi
celuy qui eut moins la
force de parler mais fa
joye n'en éclattoit que 2
:..
IL
PARTIE .
47
mieux dans fes regards , &
Leonore qui l'y voyoit
toute entiere, ne marquoit
pas moins vivement le
plaifir qu'elle reffentoit..
Elvire enfin prit la parole ,
&montrant le folitaire, elle
luy apprit fon nom , & lui
donna un éclairciffement
qui manquoit encore à fon
repos.:
Dom Juan marquoit le
plus vif repentir , il cedoit
tous fes droits au Prince
de Murcie ces amans
fe voyoient délivrez d'un
dangereux perfecuteur; que
48 MERCURE ,
ne fe dirent- ils point dans
de pareils tranfports ? Ah ,
Madame,s'écria le Prince,
vous m'aimez encore les
noms d'ufurpateur & d'infidele
qu'on m'a tant donnez
n'ont point changé
vôtre coeur ? à ce trait je
reconnois Leonore. Ouy ,
Seigneur ,répondit la Princeffe
, je vous ay toûjours
aimé , & je fuis toûjours
cette Leonore , dont vous
connoiffez fi bien les fentimens
, les raifons qui fembloient
perfuader voftre
inconftance , n'ont pû prévaloir
IL PARTIE. ·49
valoir fur le fouvenir de
vos vertus : Prince , j'ay
fouffert de vôtre abſence ,
& de la cruauté avec laquelle
on a voulu flétrir
vôtre nom : mais je ne vous
ay jamais condamné , &
ne pouvant être à vous ,
j'allois me donner la mort,
fi la fortune ne nous eût
enfin réunis. Je n'entreprendrai
point de rapporter
ici le cours de leur entretien
; pour peu qu'on
connoiffe l'amour , on en
imaginera plus que je n'en
pourrois dire ; mais enfin
2 E
Sept. 1711.
ro MERCURE ,
a
il n'eft point de réunion
plus touchante que celle
de deux amans qui ont eu
tant d'obſtacles à furmonter
qu'ils fe proteftent
qu'ils ne ſe ſont jamais crus
infidelles , parmi tant de
raifons qui fembloient
marquer leur infidelité ;
la haute idée qu'ils avoient
l'un de l'autre avoit toûjours
éloigné la jalouſie infeparablede
l'amour moins
heroïque, & s'ils n'avoient
pas eu les chagrins de cette
efpecè , ceux de l'abſence
en étoient plus violens
;
II.
PARTIE. si
pour eux.
Les
fentimens que tant
de difgraces
n'avoient pû
chaffer de leur coeur firent
leur gloire & leur felicité
; leur conſtance attendrit
enfin le Duc d'Andaloufie
, que tant de
nouvelles raifons forçoient
d'eftimer le Prince
de Murcie : Ces illuftres
Amans furent bientoft
unis pour toûjours ; cet
heureux mariage fut fuivy
de celuy du folitaire
avec Elvire , & comme
la fortune les avoit tous
2 Eij
52 MERCURE ,
affociez dans les malheurs
qu'elle leur avoit fufcitez ,
ils jurerent de ne fe feparer
jamais.
FIN.
II.
PARTIE. S
孟南宋孟孟*****
ARTICLE BURLESQUE.
SUITE DU PARALLELE
d'Homere & de Rabelais .
J'Ay cru que rien ne
rendroit ce Parallele
plus amufant que d'y
mêler de petits contes ,
dont le fond eft de Rabelais
; mais que j'ai accommodez
de maniere
à pouvoir être lûs des
Dames , & à moins ennuyer
ceux qui ne font
3 E iij
54 MERCURE ,
point aßez erudits &
affectionnez
, Pentagrueliftes
, pour favourer ,
macher remacherjuf
qu'aux moindres rogatons
, & avaler à longs
traitsfadesfuavite Ra
belaifiennes en faveur de
quelques grains de gros
fel , femez par ci par là ,
ez falmigondis & pots
pouris de Maître Fran
çois.
Pour affortir , ou plûtôt
pour oppofer à ces
II. PARTIE . ss
contes , j'en trouverai
bien encor quelqu'un
dans Homere , mais je
respecte trop fon grand
nom , pour ofer rien
mettre du mien dan's
fes ouvrages ; à peine
ai-je ofé retrancher une
bonne moitié du conte
du Cyclope , afin de
rendre l'autre moins
ennuyeufe.
Pour opofer au grand
& au fublime du Poëte
grec , on trouvera
2 E iiij
56 MERCURE,
peut- être dans Maître
François
quelques
endroits
affez folides pour
faire avouer
que Rabe
lais eût mieux
réuffi
dans le férieux , qu'Ho
mere n'a réuffi dans le
comique , & de là je
prendrai occafion d'avancer
quelques propofitions
qui feroient
hardies , temeraires , ridicules
même fi on les
avançoit férieuſement,
& dont je n'ofe prouII.
3 PARTIE. 57
ver la verité qu'en plaifantant
; je les propo
feray donc d'abord
comme des Paradoxes
badins ; le badinage a
h
cela de bon qu'il peut
éclaircir
certaines
veritez
qu'une diſpute fe+
rieuſe ne feroit qu'obſcurcir;
le badinage a encore
cet avantage fur la
difpute , qu'au lieu d'attirer
la colere des dif
puteurs graves , il n'en
attire qu'un filence.dé
18 MERCURE,
daigneux , & c'eſt en
être quitte à bon marché
, car la force des raifonnemens
ne fait que
les irriter au lieu de les
convaincre .
La prévention s'irrite
par la refiftance , ceft un
animal feroce qu'Homere
eut comparé à un
Taureau furieux ,
parcourant les vaftes
campagnes de la Lybie ,
n'a d'autre but dans fa
fureur que de heurter têqui
II.
PARTIE. 59
te baiffée , & de renver
fer les plus forts ani
maux qui oferont l'attaquer
de front.
C'est ainsi que dans
les vaftes
ambiguitez.
de la difpute , les plus
fortes raifons ne tiennent
point contre la
prévention.
Comparons à prefent
le badinage à l'Abeille
legere , qui voltige en
folâtrant autour de ce
Taureau furieux ; elle
60 MERCURE ,
3
badine en fûreté entre
fes cornes , le pique le
gerement , il ne fait que
fecoüer l'oreille , autre
coup d'aiguillon qu'il
méprife, il ne voit point
d'ennemy , cependant
la mouche le pique , fes
piquûres font legeres :
mais elles font réïterées,
la mouche ſe porte avec
agilité par tous les endroits
fenfibles , les piqueures
redoublent , il
commence à s'irriter ,
II. PARTIE . 61
& ne voyant à qui s'en
prendre , il tourne fa
colere contre lui - même,
il s'agite , il fe mord , il
fe tourmente , & enfin
il s'épuife , s'affoiblit &
tombe . Procumbit bumi
Bos.
1
Nôtre comparaifon
nous a fort éloignez de
noſtre ſujet: tant mieux ,
elle n'en eft que plus
Homerienne , s'il y a
quelque chofe de faux
dans l'application , tant
62 MERCURE,
mieux encore. Homere
:
eft un modele qu'il faut
imiter fes comparaifon's
font longues , fauffes
& femblables les
unes aux autres , il n'importe
; c'eft toûjours le
fecond & le parfait
Homere.co
Les comparaifons de
Rabelais font plus variées
plus juftes , mais
elles ne font pas
moins allongées , & la
plupart font fi baſſes ,
II.
PARTIE. 63
bien
qu'à cet égard il faut
pour l'honneur du
goût donner la préference
au Prince des
Poëtes.
Avantcette digreffion
jay promis , a propos
d'Homere
& de Rabelais
,
d'avancer pour rire
quelques
propofitions
étonnantes , le
premier de ces Paradoxes
c'eft !
Qu'il faut plus d'étendue
d'efprit
peût64
MERCURE ,
être plus d'élevation pour
exceller dans le beau comique
, qu'il n'en faut
pour réuffer dans le férieux
.
Cette propofition va
révolter d'abord ceuxqui
prévenus par refpect
pour tout ce qui
a l'air férieux :
Admirent en baillant
un ennuyeux tragique ,
Et riant d'une Agnés , ~
méprisent le comique.
Le
II. PARTIE. 65
Le fecond Paradoxe ,
c'eft...Que les plus ex+
cellentes pieces ferieufes
font mêlées d'excellent
comique , & par confequent
qu'un Autheur ne
peut exceller dans le férieux
, s'il n'a du talent
pour le comique.
On trouveroit dans
tous les ficcles , & même
dans le nôtre , que
les plus grands genies
ont mêlé du comique
dans leurs ouvrages &
Sept. 1711.
2.F
66 MERCURE ,
dans leurs difcours , &
les genies mediocres
dérogent même quelquefois
aux prérogatives
de leur gravité ,
pour hazarder
d'être
7
plaiſans ; j'en ai vû s'arrêter
tout court , par
vanité ,
s'appercevant
qu'ils plaifantoient de
mauvaiſe grace , & ſe
déchaîner le moment
d'aprés contre le meilleur
genre de plaifanterie
.
II. PARTIE. 67
Toi qui debite
ment
grave-
Ta fade médifance,
Caustique par temperamment
Serieux par prudence ,
Tu méprifes d'un bon
plaifant
La comique élegance,
Comme un gouteux foible
& pefant
Mépriferois la danse.
Les Vers ci-deffus peuvent fe
chanter fur l'Air de Joconde.
2 Fij
68 MERCURE ,
Avant que d'avancer
mon troifiéme Paradoxe
, il faudroit avoir
bien défini le mot de
comique , & celui de fèblime;
& aprés cela
même
il feroit peut- être
encor ridicule
de
dire : Que non -feulement
le fublime n'eft pas incompatible
avec le comique
, mais qu'il peut y
avoir dans certain comique
des traits fuperieurs
aufublimeférieux. VoiII.
PARTIE . 69
la une propofition étonnante
, par rapport à l'idée
qu'on a du fublime
, que je définirois
volontiers , la perfection
dans le grand: mais on
peut en donner encor
d'autres définitions , &
c'est ce qui nous meneroit
trop loin , il fau
droit trop de temps
pourdonner à ces trois
Paradoxes toutes les explications
& modifications
qui pourroient .
70 MERCURE ,
les rendre férieuſement
vrayes ; c'eſt ce que
j'entreprendrai peut être
quelque jour , fi j'ai
le loifir de mettre en
euvre les reflexions
que j'ai faites ſur les
fauffes idées qu'on a du
fublime , du férieux &
du comique ; contentons-
nous ici debadiner
fur notre dernier Paradoxe
, qui nous donnera
occafion de comparer
quelques morI
PARTIE . 7
ceaux des deux Autheurs
, dont je continue
le Parallele .
Pour parler ſelon les
idées communes , difons
que le comique
n'eft point fublime par
lui - meſme , mais qu'il
peut renfermer des fens
& des veritez fublimes,
& c'est pour fçavoir
renfermer
ces grandes
veritez dans le comique
, qu'il faut un genic
tres étendu .
C
72 MERCURE ,
Il en faut moins, par
exemple , pour foûtenir
une morale ſublime
par des expreffions
fortes & nobles , qui lui
font propres , que pour
la traitter comiquement
,, fans l'affoiblir ,
& . fans la dégrader.
Il eft vray que le genre
ferieux eft plus grand
par luy -même que le
genre comique , il tient
fans doute le premier
rang , mais il n'y a point
"
au
II. PARTIE.
73
au
Parnaffe de
ceremonial
qui donne le pas
à un Autheur
férieux
fur un comique . Il eſt
plus grand par exemple
, de traitter la guer
re de Troye , caufée
par l'enlevement
d'une
Princeffe , que la guerre
caufée par
l'enlevement
d'un Séau , La
fequi à rapita , mais cette
grandeur
eft dans le
fujet , & non dans l'Autheur
qui le traitte , &
Sept. 1711 .
a
2 G
74 MERCURE ,
celui qui dans le Poε-
me de l'enlevement d'un
Sean , feroit entrer les
idées les plus heroiques
, feroit fans doute
un plus grand genie ,
que celui à qui la grandeur
du fujer fournit
naturellement de grandes
idées.
On ne peut pas foûtenir
qu'il y ait quanti
té de hautes idées renfermées
dans le comique
de Rabelais , mais
D &
11. PARTIE . 73
on prouveroit peut- être
qu'Homere doit une
bonne partie de ſon ſublime
à la grandeur de
fon fujet.
La baffeffe des fujets.
que Rabelais à traitez
auroit fait tomber fon
ouvrage , s'il n'avoit pas
été fouftenu par des
parties excellentes .
L'élevation & l'importance
du fujet de
Ï'Illiade l'eût fouftenuë
quand même il y auroit
2 Gij
76 MERCURE ,
eu moins de beautez
qu'on n'y en trouve .
Nous voyons clairement
par la connoiffance
du fiecle où Rabelais
a vefcu , que la
plupart de fes expreffios
fortes & naïves lui font
propres
à lui feul.
Mais
les fçavans
fans
prévention
avoüent
qu'on ne connoift pas
affez le fiecle d'Homere
pour fçavoir en quoi
il eft original : ceux qui
II.
PARTIE . 77
connoiffent le genie
oriental croiront pluſ
toft que les expreffions
nobles & figurées , que
fes comparaiſons magnifiques
, & mefme la
plufpart de fes ideés
Poëtiques , pouvoient
eftre auffi
communes
aux Grecs de fon temps
que les proverbes fenfez
le font à Paris parmi
le peuple.
A l'égard du fublime
de Rabelais , il faut con-
2 G iij
78 MERCURE
,
venir qu'il eft bien malaifé
de l'appercevoir
à
travers le bas comique ,
dont il eft offufqué , il
dit en parlant de la
Loy commentée & embrouillée
par nos Jurif
Confultes "
que
c'eft
une belle robe à fond d'or
brodée de crote : j'en dirois
autant de fon fublime
, qu'on me paffe
ce mot en attendant
la definition : Mais appellez
comme il vous
II.
PARTIE . 79
plaira f'idée qu'il donne
de la vraye & naturelle
Eloquence , par la dé
cifion de Pentagruel
fur le verbiage du li
centié , il paroit qu'elle
eft excellente : en voici
l'idée en abbregé.otod
2 G iiij
80 MERCURE,
ZZIIIIIIIII;
LAVRATE ELOQUENCE .
UN jour Pentagruef
rencontra certainLicentié,
non autrement fçavant és
fciences de fon métier de
Docteur : mais en recompenſe
ſçachant tres- foncicierement
danſer & joüer
à la paume , lequel donc
rencontré par Pentagruel ,
fut interrogé d'où il venoit
, & luy répondit , je
viens de l'urbecité celebriffime
que vulgairement on voż
11. PARTIE. 81
cite Lutece.Qu'eft- ce à dire,
dit Pentagruel , à fon truchement
ordinaire ? je fuis
tout ebahi de tel jargon.
C'eft , répond le truchement
, qu'il vient de Paris.
Hé, reprit Pentagruel,
à quoy paffez - vous le
temps à Paris vous autres
licentiez ? Nous, répondit le
Licentié , en nos occupations
épurons defpumons la verbocination
latine , en nos
recreations captons la bene
volence de lomnifeduifant ;"
omni mouvant , fexe fe
minin. A quoy Pentagruel
82 MERCURE ,
dit : Quel diable de langa
ge eft- cecy Ce n'eft que
Latin écorché , dit le Truchement
, & luy femble
qu'il eft éloquent Orateur
, pource qu'il dédaigne
l'ufance commune de
parler or le Licentie
croyant que l'étonnement
& ébahiffement de Pentagruel
venoit pour admirer.
la haute beauté de cette
élocution , fe reguinda encore
plus haut & plus obfcur,
fi que par longueur
de periodes,pouffa patien
ce à bout. Parbleu , dit à
II. PARTIE. 83
part-foi Pentagruel,je t'apprendrai
quelle eft vraie &
naturelle éloquence ; puis
demāda au Licēcié de quel
pais il étoit, à quoy répond
ainfi le Licencié. L'illuſtre
honoriferantepropagation.
de mes aves & ataves , tire
fon origine primordiale des
Regions Limofiniennes.Jentens
bien , dit Pentagruel ,
tu n'es qu'un Limolin de
Limoge , & tu veux faire
le Demofthenes de Grece :
Or viens- cà que je te donne
un tour de peigne , lors
le prit à la gorge , diſant :
84 MERCURE,
tu écorches le Latin , moy
j'écorcheray
le latiniſeur ,
fi fort lui ferroit la gorge
que le pauvre Limofin
*
commence à crier en Limofin
, vée Dicon Gentillatre
: Ho faint Marfau !
fecoùrami,bau,bau , laiẞas à
qu'ou au nom de Dious , &
ne me tou cas grou . Ah , dit
Pentagruel en le laiſſant ,
voila comment je te voulois
remettre en droit che .
min de vraye éloquence ;
car à cette heure viens -tu
de parler comme nature ,
& grand bien te faffe icel
(
II. PARTIE
. 85
le correction.
Quoique je trouve
dans cette idée une efpece
de fublime , je ne
le comparerai pas fans
doute , à ce fublime
d'Homere , dans fon
vingtiéme Livre , où il
fait parler ainfi Jupiter
à Neptune dans l'Af
femblée des Dieux .
Je vais donc m'affeoir
fur le fommet de l'Olimpe,
& regarder le combat :
mais pourvous autres vous
86 MERCURE ,
pouvez deſcendre, & pren
dre ouvertement
le party
de ceux que vous favori
fez , car fi Achille attaque
feul les Troyens , ils ne le
foûtiendront pas un moment
: comment le foutiendroient-
ils aujourd'hui
qu'il eſt armé , & que fa
valeur eft encore aiguilée
par la douleur qu'il a de
la mort de fon amy , qu
hier le voyant même fans
armes , ils furent remplis
de terreur , & ...
dona si
¿ Enfuite Homere fait
IL PARTIE. 87
defcendre les Dieux de
l'Olimpe , qui animant
les troupes des deux partis
, engagent la bataille,
&fe mêlent eux- mêmes
dans le combat.
En cet endroit je
quitte le badinage par
refpect , non pour la reputation
feule d'Homere,
mais pour la grandeur
, la majeſté & l'élevation
de fa Poëfie ;
quel genie & avec
quel art intereffe- t - il
?!
88 MERCURE ,
ici le Ciel , la terre &
toute la nature au grad
fpectacle qu'il va nous
donner ? il nous force à
nous y intereffer nousmêmes
; & voila l'effet
du fublime.
Pedant ce combat, continue
Homere , le Souve
rain maître des Dieux
tonne du haut du Ciel ,
& Neptune élevant fes
flots ébranle la terre ,
des cimes du Mont Ida
tremblent jufques dans
leurs
II. PARTIE . 89
leursfondemens , Troye ,
le champ de bataille &
les vaiffeaux font agitez
par des fecoufles
violentes , le Roy des
Enfers , épouvanté au
fond de fon Palais , s'élance
de fon Trône, &
s'écrie de toute fa force
dans la frayeur où il
eft , que Neptune , d'un
coup de fon Trident ,
n'entr'ouvre la Terre
qui couvre les ombres,
& que cet affreux fé-
Sept. 1711.
2 H
90 MERCURE,
jour , demeure éternelle
des tenebres & de la
mort, abhorré des hommes
& craint même des
Dieux , ne reçoive pour
la premiere fois la lumiere
, & ne paroiffe à
découvert
, fi grand eft
le bruit que font ces
Dieux , qui marchent
les uns contre les autres.
Apollon armé de tous
fes traits , attaque
. Neptune
; Minerve s'op
II PARTIEM
91
pofe à Mars , Diane
marche contre Junon ,
& utmais Achille n'en
veut qu'à Hector , il le
cherche dans la mêlée ,
impatient de verfer le
fang de ce Heros , fous
les yeux même du Dieu
Mars qui le protege.
Voila du beaudu
grand , il le fait fentir
par luy- même , ilan'a
pas befoin de Comentaire
, comme mille autres
endroits deswah-
2 Hij
92 MERCUREJ
ciens Autheurs , qui ne
font beaux qu'à proportion
de la credulité
de ceux qui veulent
bien ſe preſter aux décifions
des Commenta
teurs.pri oo ob qui
Comparons à prefent
deux tableaux de nos
deux Autheurs fur le
même fujet , ils veulent
l'un & l'autre reprefenter
une tempefte.
Tout
tableaufe
compare
H PARTIE
23
en peinture , en mu
fique,
En profe comme en vers
férieux on comique ,
Tempefte de Rubens ,
tempefte de Rablais ,
Même du grand Poëte
tragique,
L'on pourroit comparer
la tempefte heroique,
A la tempefte de Marais.
Ces vers le peuvent chanter far
Pair de Joconde .
cron alustamatono-i
94 MERCURE ,
TEMPESTE
DE
RABELAIS ..
EN nôtre nauf étions
avec Pentagruel le bon ,
joyeuſement tranquiles , &
étoit la mer tranquillement
trifte ; car Neptune
en fon naturel eft melancolique
& fonge-creux
pource qu'il eft plus flegmatique
que fanguin.
Bonaffe traîtreufe nous
**
IL PARTIE.
invitoit à molle oifiveté
& oifiveté nous invitoit à
boire , or à boiffon vineufe
mêlions fauciffes , bou
targue & jambons outrement
falez , pour plus vo
luptueufement faire ſentir
, & contrafter fuavité
nectarine , douce , non
comme,mais plus que lait.
O que feriez mieux , nous
cria le pilote , au lieu d'i
celles falines manger vian
des douces , pource qu'in
continent ne boirez peutêtre
que trop falé ; ce que
difoit le pilote par prono
96 MERCURE,
ftication ; car pilotes ainfi
que chats en goutieres,
fleurent par inftinc pluyes.
&
orages.
Et de fait le beau &
clair jour qui luifoit perdant
peu à peu fa tranfparence
lumineuſe , devint
d'abord comme entre
chien & loup , puis brun,
obfcur , puis preſque noir ,
puis fi noir , fi noir que
fumes faifis de mal peur ;
car autre lumiere n'éclaira
plus nos faces blêmes
& effrayées , que lueurs
d'éclairs
fulminants par
cre
II.
PARTIE. 97
crevements de flambantes
nuées , avec millions
de tonnerres tonigrondants
fur tous les tons
&
intonations des orgues
de Jupin , les pedales
pou , dou , dou , dou
icy cromornes
, Ton, ron,
ron , ron & cla , cla ,
cla , cla , cla , mifericorde
, crioit Panurge ; detournez
l'orage , fonnez
les cloches , mais cloches
ne fonnerent , car en
pleine mer cloches n'y
Septemb. 1711. 2 I
58 MERCURE
avoit pour lors : voilà
tout en feu , voilà tout en
eau, bourafques de vents,
fiflemens horrifiques , cela
fait trois élements
dont de chacun trop avions
, n'y avoit que terre
qui nous manquoit , fi
non pourtant que fondrieres
marines furent fi
ab
profondes , qu'en fin fond
d'abîmes ouverts eût- on
pu voir, harangs fur fable
& morues engravées
, or
du fond d'iceux abyſmes
II.
PARTIE. 99
vagues montoient
aux
nuës , & d'icelles nûës
ſe precipitoient comme
torrents > montagnes
d'eau , foy difant vagues
, defquelles aucunes
tombant fur la nauf, Panurge
, qui de frayeur
extravaguoit
, diſoit ho
ho ho , quelle pluye eſtce
cy ; vit - on jamais
pleuvoir vagues toutes
brandies : helas , helas
be be be be, je nage , bou
bou bou bou , ha
mau-
2
I ij
100 MERCURE
>
dit cordonnier , mes fouliers
prennent l'eau par
le colet de mon pourpoint.
Ha que cette boiffon
eft amere ! hola
hola , je n'ay plus foif.
Te tairas - cu crioit
Frere Jean & viens
pluftoft nous aider à
manouvrer où font
nos boulingues , noftre
trinquet eft avau l'eau ,
amis à ces rambades
Enfans , n'abandonnons
le tirados, à moy, à moy.
>
,
II. PARTIE. ΙΟΙ
Par icy , par là haut
par là bas.
Viens donc ,
Panurge ;
viens , ventre de folles
ju viens donc. He ! ne
rons point , difoit piteu
fement Panurge , ne jurons
aujourd'huy , mais
demain tant que tu voudras
, il eft maintenant
heure de faire voeux , &
promettre
pelerinages
ha ha , ha ha , ho ho
ho ho , je nage , boubi ,
bou bous , fommes-nous
I iij 2
io MERCURE
au fond Ah je me
meurs ! mais viens donc
icy nous aider , crioit
Frere Jean , au lieu de
moribonder, met la main
à l'eſtaranfol › gare la
pane , hau amure , amure
bas pefte foit du
pleurard qui nous eſt
nuifible au lieu de nous
aider. Ha ! oüy ouy ouy,
reprenoit Panurge , vous
fuis nuifible , mettezmoy
donc à terre afin
que puiffiez à l'aife ma-
,
II.
PARTIE . 103
nouvrer tout voſtre ſoul,
Or icelle tempefte
ou tourmente , ou tourmentante
, comme voudrez
,
commença à prendre
fin à force de durer
comme toutes chofes
mondaines : terre , terre
cria le Pilote , & jugez
bien quelle jubilation
s'enfuivit , à quoy prit
la plus forte part le
craintif Panurge , qui
defcendant le premier
fur l'arene , difoit, ô trois
104 MERCURE
& quatre fois heureux
Jardinier qui plante
choux , car au moins a- til
un pied fur terre , &
l'autre n'en eft efloigné
que d'un fer de befche.
Or remettons tempef
te d'Homere
à la prochaine
mercuriale ainfi
que plufieurs autres bribes
des deux Autheurs
que nous paralelliferons
par maniere de paffetemps
: Rabelaiſien , &
non dogmatiquement
,
II. PARTIE . ios
chofe que trop
repeter
ne puis ; car pires ſourds
n'y a que ceux qui ne
veulent
point entendre
.
Le mot de la derniere Enigme
c'eft LA CHANTERELLE .
>
On m'a envoyé quantité de
jolis morceaux qu'on a été contraint
d'obmettre auffi bien
que le refte des amuſements
parce que Meffieurs les Imprimeurs
font allez en vendanges.
Tout fe fent un peu des
Vacances ; mais à la faint
Martin on reveillera le Mercure
par plufieurs nouveautez.
Voicy feulement quelques
LOG MERCURE
noms de ceux qui ont deviné
l'Enigme .
Madame Pincette,de la Foffe
de Nantes. Altemidore & Feliciane.
La chanterelle eft caffée
, je ne danferay plus. Roffignolette.
Le beau chevelu
& c.
ENIGM E.
JE te prenspar le nez
incorrigibleyorogne,
>
Et par mainte tentation.
Je fuis prochaine occafion
D'un peché qui rougit ta
trogne ;
II. PARTIE. 107
Tu ne me connois bien qu'-
en jouiffant de moy ,
Je fuis une Enigme pour
toy.
Pour le Lecteur auſſi je
crains qu'il ne devine
Que je fuis la liqueur
divine :
Je fuis comme le vinfouvent
pernicieux
Pour eftre trop delicieux.
Dans un Palais de verre
ainsi que luy j'habite ,
Par ma couleur vermeille
ainsi que luy j'invites
108 MERCURE
Mais n'eftant pas une
liqueur ,
Et n'ayant pas en moy
cette vive chaleur
Qui ranime fouvent les
ardeurs d'un coeur
tendre :
Je nefuis pas le vin , l'on
ne peut s'y méprendre.
THOR DE
BIBLIO
LYON
*
LA
* 1893 *
HI
THERE
LA
DE
1710
LYON
VILLE#
MERCUREA
ad enig ang
HI.
PARTIES
PIECES FUGITIVES.
***************
EPIGRAMME
Sur une Dame qui s'occupoit à
filer.
CE ne font plus les trois
foeurs de la Fable ,
Qui de nos jours font
tourner le fufeau ,
Une Déeffe , aux mortels
3 A
Sept. 1711 .
MERCURE ,
Leur
plus
affable
,
a ravi le fatal écheveau
,
Mais vôtre fort n'en fera
pas plus beau
D'être filé par les mains
fortunées.
L'Amour , helas armé de
fon cifeau
Mieux qu'Atropos tranchera
vos années.
enlaulq and on 30
medlet al romvos-
Ohr zus diilota So
III PARTIE. 3
XXXXXIIIIII!
PLAINTES
Au Meffager du Man's fur fa
Lenteur & furfa pareffe.
CE n'eft point l'intereſt
ni l'amour de la gloire ,
Qui me fait en cejour importuner
les Cieux ,
Je n'ai rien à prétendre au
Temple de memoire ,
Le vif éclat de l'or n'e
bloüit point mes yeux ,
De ces foibles honteux
mon ame préfervée
Ne nourrit point dans
3 A ij
4 MERCURE ,
moi de fi bas fentimens
,
Tout ce que je demande
eft la prompte arrivée
Du Meflager du Mans.
Déja vingt fois & plus le
Le Soleil & la Lune
Ont regné tour-à-tour
Depuis que je languis dans
ma trifte infortune;
Déja la lumiere du jour
A vingt fois pour le moins
fait place à la chandelle
Sans que durant un filong
temps
III. PARTIE.
S
On air vû dans ces lieux .
la noble haridelle
Du Meffager du Mans .
Cependant je gemis , &
ma douleur profonde
Me fait perdre le jugement
:
Qu'avez-vous ? me dit tout
le monde
,
Vous êtes depuis peu tout
je ne fçai comment.
Helas fi on fçavoit la
!
caufe
De ces maux cruels& pref
fans
,
Si l'on fçavoit... & quoy ?
3.A iij.
6 MERCURE ,
non je ne puis , je n'oſe ,
Et je ne le dirai qu'au
Meffager du Mans.
Quel démon cruel & barbare
Si long- temps l'arrête en
chemin
,
Quel ennemi fecret , quel
ennuyeux deftin
Tous deux fi long- temps
nous fépare ?
Non , je ne puis fouffrir
tous ces retardemens ,
Je veux moi - même aller
le chercher & le
fuivre, elé
III. PARTIE.
Car cien eft trop , & je ne
puis plus vivre
Si je ne vois le Meffager
du Mans.
Quoy tout le jour à ma
penſée
Son image viendra s'offrir,
Et ma douleur prefente &
ma douleur paffée
Me feront doublement
Louffrir
,
Encore fi la nuit dans un
repos tranquile
Contre tous mes chagrins
je trouvois un azyle ,
Mais non , quand le fom-
3 A iiij
8 MERCURE ,
meil
peut affoupir
wwmes fens
Si je rêve , je rêve au Mef
fager du Mans .
Si pour calmier un peu ma
triſte inquiétude
Je prens quelque Livre à
la main
,
D'abord
t
I L
fon" > ſouvenir-
Borvient troubler mon
étude
Et me fait perdre mon
latin.
Oui , j'ai beau tout tenter,
rien ne peut m'en dif
traire ,
III. PARTIE.
Et je paffe fouvent tout le
jour , à quoy faire ?
Le dirai -je ? à compter les
heures , les momens
Que retarde en chemin le
Mellager du Mans.
Si quelqu'un vient à ma
rencontre
Je vais le prendre au dése
pourvû¸di
Et lui difant : Ne l'avezvous
point vû ?
Bongré , malgré , je veux
qu'il me le montre ,
S'il me demande , & qui ?
je demeure en fufpens
10 MERCURE ,
to!
Et j'admire fon ignoran
ce ,
Croyant que comme moy
tout le monde ici
penſe
Au Meffager du Mans.
Si quelqu'autre plus favorable
Entre dans ce qui fait ma
peine & mon fouci
Et me dit d'un air agréa
ble ,
Je le vis l'autre jour quoiqu'un
peu loin d'ici ,
J'admire fon bonheur , &
je lui porte envie ,
III. PARTIE.
Je le montre à tous les
paffans
Et renforçant ma voix devant
tous je m'écrie :
L'heureux homme il a vû
le Meffager du Mans.
Si quelque voyageur vers
le Mans prend la route ,
Je l'arrête , quoy qu'il en
coûte ,
Il a beau me crier : Monhieur
je fuis preffé ,
On m'attend , laiffez-moi,
s'il vous plaiſt , le
paffage ,
Je le recharge encor de
12 MERCURE ,
mille complimens
Pour l'heureux Meffager
ob /du Mans.
Je fais le guet planté tout
le jour fur ma porte ,
Tantôt affis , tantôt debout
,
7
Et quoy qu'il entre , ou
quoy qu'il forte ,
Je vols, & j'examine tout.
L'efprit tout occupé de
cette unique affaire ,
Alerte au moindre bruit
fi par hazard j'entens
Quelque Cheval hennir ,
ou bien quelque Afne
IL PARTIE 13
braire ,
Je crois toûjours que c'eſt
le Meffager du Mans.
Entendray je bientôt
gringotterles fonnettes?
Le verrai- je bientôt entrer
fuperbement?
Claquant fon foüet & piquantfes
mazettes ?
Quand viendra - til ce
Meffager charmant
Les forêts , les rochers &
le creux des fontaines
Retentiffent par tout de
mes gemiffemens ,
Seras-tu donc lefeul infen14
MERCURE ,
fible à mes peines ,
Barbare
Meſſager
du
Mans ?
Helas quand dans Roüen,
tu me faifois tant
d'offres ,
Si tu voulois fi tard m'apporter
mes deux coffres
,
Falloit-il ten charger,
Boureau de Meffager ?
Je m'enfouviens encor, tu
ne peux t'en défendre ,
Dansfix jours au plus tard
tu devois me les rendre ,
Tu me l'avois juré , fontIII.
PARTIES
ce là tes fermens ,
Traiftre de Meſſager du
Mans ?
Que diras-tu pour ton excufe?
Si rien pourtant peut t'excufer
:
Cherche quelque détour ,
invente quelque rufe , 1
Ingrat , je t'aiderai moyi
même à m'abufer ,
Pour toy je fens encor un
refte de tendreffent
Malgré tous mesrelſentipoormens.
or
O Ciel peut-on avoir tant
16 MERCURE
de foibleffe2
Pour un maraut de Mef
fager du Mans ?
Parle enfin, dis- moy quel
que chofe ,
Qui t'a fi long- temps retenu
?
De ces delays viens
m'apprendre la cauſe ,
Dis , ne devrois - tu pas
être déja venu ?!
Quoy tes roffes n'ont pu
faire un filong voyage ?
Des brigands t'ont volé
tout mon pauvre équipage
?
On
IIK PARTIE. 17
On t'a roüé de coups ? Plût
à Dieu : mais tu mens ,
Fripon de Meffager du
Mans.
Dis plûtôt qu'à trinquer
bornant ta diligence ,
T'arrêtant à chaque bouchon
,
Par tout où tu trouvois le
cydre ou le vin bon ,
Tu ne fongeois , coquin ,
qu'à te garnir la panſe ;
Ne diffimule point , dis
qu'à force de boire
Avecque tes pareils , tous
mauvais garnemens ,.
Sept. 1711.
3
B
18 MERCURE ,
De mes coffres reçûs tu
perdis la memoire , !
Yvrogne Meffager du
Mans.
Tu ne peux deformais appaiſer
ma colere ,
Tu periras , ingrat , l'Arreft
en eft porté ,
Non , je n'écoute plus ni
foupirs ni prieres ,
Tu n'as que trop longtemps
outragé ma
bonté ;
Je veux que fans miferi
corde
On t'attache au bout
III.
PARTIE. 19
d'une corde ,
Pour être un bel exemple
aux
Meffagers trop
lents ,
Pendart de Meffager du
Mans.
Venez implacables furies ,
Tifiphone , Megere , &
vous trifte Alecton ,
Sortez du manoir de Pluton
Pour exercer ici toutes vos
barbaries ,
Inventez , s'il fe peut,quelques
nouveaux tour-
-mens ,
3 Bij
20 MERCURE ,
Vous puniffez là -bas de
u peines éternelles .
Des Ombres bien moins
criminelles
Que n'eft le Meffager du
Mans.
Mais que dis-je,où m'emporte
une juſte vengeance
?
Calmons - nous pour un
temps , foyons plus retenus
Ayons pour lui quelque
indulgence
Du moins jufqu'à ce que
mes coffres foient venus
HI PARTIE. 21
La prudence le veut , la
raifon le demande ,
Laiffons aprés cela travailler
les Sergens ,,
Qu'on brûle fi l'on veut ,
qu'on affomme ou
qu'on pende
Le Meſſager du Mans.
Cependant j'en tiens pour
mon compte:
Mais fi jamais jy fuis repris
,
Si Meffager du Mans aprés
cela m'affronte ,
Je veux étre étrillé de la
Fleche à Paris,
22 MERCURE ,
Je veux aller le trot d'icy
juſques en Boheme ;
Je veux avoir procés avec
des bas Normans ,
Et pour dire encor plus
je veux paffer moi-
Con même
Pour Meflager du Mans.
EPIGRAMME.
CEphale un foir devoit
" s'entretenir
Avec l'Aurore au retour
de la chaffe ,
Il vous rencontre , & de
fon fouvenir
En vous voyant le rendezvous
s'efface ;
III PARTIE. 23
Qui n'eût pas fait même
chofe en fa place !
J'euffe failli comme lui fur
ce point :
Mais le pauvret,mal tient
qui trop embraffe ,
Perdit l'Aurore & ne vous
gagna point.
A MESDAMES DE P.
& S. qui demandoient des
nouvelles de Paris étant à la
campagne.
VEnus ne voyant plus
fon fils ,
D'un cruel chagrin devo
rée sales
24 MERCURE,
Le cherchoit partout dans
Paris ;
Quelqu'un la voyant éplōrée
Luy dit : Charmante Cy-
So therée ,
Pour revoir ce fils fi cheri
Ici tomfoin eft inutile ,
Avec l'aimable ***
Pl * a quitté cette Ville
Tourne tes amoureux oyſeaux
,
Vole vers ces riches coteaux
D'où l'on voit ferpenter lå
Seine ;
Et par mille & mille dé-
Sur tours ,
III. PARTIE 25
Sur l'émail d'une vafte
plaine ,
Se plaît à repandre fon
cours
Dans le fond de quelques
vallées
Où Flore étalle fes attraits ,
Et dans les routes reculées
Des plus tenebreuſes Forêts
,
Prés de ces charmantès
Cmortelles
on
Ton fils fe plaît à s'arrêter:
Ha dit Venus , puis -je en
douter
Souvent il me quitte pour
10 elles
Sept. 1711. 3 C
26 MERCURE,
J'en reffens un jaloux tranf
port ;
Cependant il faut me contraindre
,
Chacun me
fourient
que
Jay tort
Si quelquefois j'ofe m'en
allon
plaindre
, DOI
REPONSE
290
Aune lettre en vers &
profe de M. Du.
Maître Vincent le grand
faifeur de lettres
Si, bien que vous n'eût
fçû profaifer
,
0
III. PARTIE. 27
Maître Clement le grand
forgeur de metres
Si doucement n'eût fçû
poëtifer ,
Phoebus à donc va fe défabufer
De fon amour pour la docte
Fontaine ,
Et
connoîtra que pour
bons vers puifer ,
Vin Champenois vaut
mieux qu'eau d'Hypocrêne.
EPIGRAM ME.
CErtain yvrogne aprés
maint bons repas
Tomba malade , un doc-
3 Cij
28 MERCURE ,
teur Galinique
Fut appellé : Je trouve icy
deux cas ,
Fievre brûlante & foifplus
que cinique :
Or Hypocars tient pour
methode unique
Qu'il faut guerir la foif
premierement ;
Lors le fievreux répond :
Maiftre Clement ,
A premier point n'eſt le
plus neceffaire ,
Guériffez moy ma fievre
feulement ,
Et pour ma foif ce fera
mon affaire..
III.
PARTIE . 29
EPIGRAM ME.
Certain Huiffier étant à
l'Audiance
Crioit toûjours , paix là ,
Meffieuss , paix là ,
Tant qu'à la fin tombant
en défaillance ,
Son teint pâlit & fa gorge
bera s'enfla ,
On court à lui , qu'eft- cecy
, qu'eft cela ,
Maiſtre Perin ? du fecours,
il expire ,
Bref, on le faigne , il revient
, il foûpire ,
Puis ouvrant l'oeil , clair
comme un bafilic :
3 C iij
30 MERCURE
,
Voila , Meffieurs , fe pritil
à leur dire ,
Ce que l'on gagne à parler
en public .
Sur an Bonnet donné.
Venus tenoit un Bonnet
dans fa main,
Je t'en fais don , me dit
cette immortelle ,
Scache qu'il n'eft Roy, ny
Conful Romain.
Qui n'enviât une faveur fi
belle
Malheur plûtôt , dif-je , à
toute cervelle ,
Si vous coëffez , le defor
IH. PARTIE .
30
dre s'y met
Va , ya , j'en coëffe affez.
d'autres , dit- elle ,
Sans leur donner , ni Tocque
, ni Bonnet,
BOUQUET NOUVEAU
& Mademoiselle V ... Par
Monfieur R......
Corinne, Laure, Aſtrée,
Objets de vers immortels,
Noms qu'Appollon &
Cytherée
Ont. confacrez fur leurs:
Autels ,
32 MERCURE
,
Depuis qu'aux bords du
Stix le fort vous fit
defcendre
,
Tous vos amans vous font
entendre
Qu'avec vous a fini l'empire
de l'amour ,
Et je l'aurois comme eux
penfe jufqu'à ce jour
Aumoins c'eût été grande
affaire
De vouloir prouver le
contraire .
Me ferois - je chargé de
trouver des amans
Soupirans fur le ton des
voftres ?
III. PARTIE.
33
De nos belles auffi les plaifirs
font tous autres
Que celuy des beaux fentimens.
Enfin grace à l'amour il
eft une mortelle
Digne de vôtre fiecle , elle
eft docte , elle est belle ,
De la delicateffe elle connoît
le prix ;
Elle a fur vos tombeaux
recüeilly vos efprits ,
Loin d'elle Eloges inſipides
,
Qu'aux rives du Parnaffe
elle porte
fes
pas
,
34 MERCURE ,
Les Petrarques & les Ovides
Ne lui
manqueront pas ,
Vous en recevez la nouvelle
Sans aucuns fentimens jatoux
!
Il eft ici plus d'une belle
Bien moins genereuſe que
vous.
Pour la gloire du ſexe aimeriez
- vous tant
Lyle ?
Au Parnaffe aujourd'huy
l'on celebre fon nom ;
Sur un Trône de fleurs
vous l'y verrez affſiſe ,
111. PARTIE
35.
Venez , & qu'Aftrée y
conduife
Des bergers tels que ceux
que connut le Lignon :
Pour Lyfe tous bergers fe-
Front conftans &
tendres
Pas un Hilas , parmi tant
de Silvandres ;
Je vis auffi les grands Au
teurs I!
Suiyre Corinne & Laure
oren habit heroïque¸3ɔ !
Poëtes couronnez , dont
Arefprit ne s'applique.
Qu'à celebrer des Rois &
des Vainqueurs
,
#f. A
36 MERCURE ,
Lyfe connoît fa Cour , le
fublime pour Lyfe
Ne fera jamais étranger ,
Lyfe aime auffi les bois
fa douceur l'humanife
Avec l'hommage d'un
berger.
D'une voix , mal affurée ,
Te chanterois -je à mon
tour ?
Ah ! Lyfe , fi Phebus m'exauce
chaque jourybe
Je t'écrirai des vers , d'une
plume tirée d
Des ailes mêmes de l'A-
2elo
THEQUE
mourliɔ5) 640
prisy zab
DE
LA
VILLE
LYON
*1893*
MERCURE
DE
LA
PILLE,
GALANT
LYON
*1893 *
IV. PARTIE.
1
1
MAINININININI
NOUVELLES
Lettre de Bafle du 2 221
Aouft. roule1.1
9110
Thomas Mafner , qui
avoit eu la temerité d'arref
ter Monfieur le Grand
Prieur de France dans un
Septembre 1711. 4. A
E MERCURE
Etat fibre & neutre , & de
le livrer aux Officiers de la
Maifon d'Autriche , a efté
condamné le 17. Aouſt à
Ilants , où eft le Tribunal
des trois Ligues Grifes
comme criminel de leze
Majefté , & c. voicy la copic
de fon Arreft.
SENTENCE FINALE
rendue contre Thomas
Mafner , Facteur & Bourgeois
de Coire.
Aprés avoir oui l'accufation,
la lecture & l'Examen des
?
A .
IV. PARTIE.
témoignages documents , &
differentes Lettres écrites de
lapropre main de l'accusé, ¿
tout ce qui a efté raporté en
justice , par Meffieurs les Fif
caux , il a efté aprés avoir invoqué
l'affiftance de Dieu
prononcé fentencie unanimement
que l'accufe Thomas
Mafner qui eft encore fugitif,
doit estre depofe de tous les
honneurs, charges ,
émolumens , banny des trois
Ligues Grifes , &fa teſte mife
à prix de cing cent ducats , en
forte que celui qui le tuëroit ,
on apporteroit fa tefte , recevra
簾
4 A ij
4 MERCURE
·lesdits cinq cens ducats de la
caiffe commune des troisLigues;
mais celui qui le livreroit en
vie entre les mains de laJustice
des trois Ligues , aura pour
recompenfe mil ducats auffs à
prendre dans la Caiffe des Ligues
, avec la liberté , s'il eftsit
un banny , de plus l'accusé archifcelerat
Thomas Mafner
comme offenfeur de la Majefté
Divine & de fon Prince
territorial , traiftre de lapatrie ,
rebelle voleur de grands
chemins , Faux - monoyenr ,
convaincu de tous les crimes,
forfaus , dont il a efté
IV. PARTIE.
accufé , fera mis en quatre
quartiers par le Bourreau ; &
ainfi executé à mort, & les
quatre quartiers & fon corps
feront exposés publiquement ,
fur les grands chemins ; Mais
comme lui Thomas Maſner,
s'eft fouftrait prefentement de
la Fustice , l'execution ſe fera
dans fon effigie, & elle fera
en mefme temps brûlée par le
Bourreau ici dans la place des
executions conjointement avec
fes écrits rebelles & diffama.
toires publics contre l'Etat &
contre les Reprefentants , fa
maiſon Jera demolie juſqu'aux
4. Aiij
7 MERCURE
fondements , l'on dreffera
en la place deux colonnes d'infamie
, avec l'infcription de
tous fes crimes ; tous fes biens
effets dedans le pays , &
dehors , comme auffi toutes les
Charges émolumens, feront
des à prefent échues au Fifc des
trois Lignes, & comme celui ou·
ceux qui ci- aprés parleront de
la liberation de lui Mafner,
ou qui la demanderont , qui
auront avec lui directement ou
indirectement une correfpondance
de bouche , ou par efcrit
dedans ou dehors le pays , ¿ª
qui lui donneront retraite on
IV PARTIE
7
domicile , tomberont da la difgrace
des trois Ligues &payeront
mil écus d'amande , l'on
impofepareillementparferment
à chaquefuperiorite & commune
dupays de fefaifir de lai toutes
les fois en tel lieu qu'on
pourra l'attraper , fous peine
de l'exclufion des trois Ligues ,
& la referve d'un plus grand
chaftiment d'accomplir cette
fentence en la perfonne de lui
Thomas Mafner, fans autre
forme de procés ; mais fi fuivant
les menaces qui ont efte
faites les capitaux , & les
effets que nos Compatriotes ont
A' iiij
•8
MERCURE
dans les
pays étrangersfuffent
attaquez tous, ou en partie par
luy Thomas Mafner ou a fon
inftigation & qu'il fuffent mis
en arrest , nous accordons dés
àprefent le droit lepouvoir à
nofdits Compatriottes , ainfi endomagezde
s'enprendre aux enfans
heritiers de Mafner,¿
defe faire payer de tousfraise
dommages ; c'eft ainfi que nous
decretons ,
prononçons & fententions
au nom de Dieu le
juge, & parJustice . Faite
publiée à Ilants le 17. Aouſt
1711.
Exprato Cello Jo : UldaIV.
PARTIE.
ricus
Deblacmental : Supis
Gris Fred : Concillarius &
Actuarius.
Sur l'inftante interceffion de
Dame Urima Mafner née
Stampa , femme du malhewreux
Thomas Mafner qui a
efté condamné , faite par fon
frere , & fon cousin , Maître
Jean Bannier, Charles
Stampa, & par d'autres parens,
l'on a en leur confideration , &
particulierement des enfans ,
petits enfans , & de leurs
predeceffeurs parents
modere la Sentence publiée .
fçavoir que pour les épargner,
to MERCURE
ladite Sentence n'aura point
de lieu à l'égardde la demolition'
de la maifon , & de l'erection
des colonnes d'infamie; mais que
tous les autrespoints portez par
la Sentence demeureront en
leurs forces & feront executez.
Faite & publiée comme deffus. "
Signé , De Bluctmental.
FESTE
Extrait d'une Lettre de Berlin
du 14. Juillet.
Le 12. Juillet Monfei
gneur le P. R. donna unc
IV. PARTIE 10
grande fefte pour celebrer le
jour de la naiffance du Roy.
Ce jour fut d'abord celebré
par un Te Deum , chanté
au bruit d'une triple décharge
du Canon des Ramparts.
Sa Majefté alla à ſix
heures chez Madame la P.
R. où il y avoit un grand
nombre de Dames, & l'on
fe mit au jeu comme à l'ordinaire
vers les huit heures ,
on tira au fort par billets
pour l'ordre de la Table. La
Reine qui ne tira point non
plus que Madame la P. R.
eur pour Mary Mr le Mar
12 MERCURE
grave Philippe , & Madame
la P. R. Mr le Veld- Maréchal
. On commença
la
marche chacun avec fa Dame
felon le numero qu'ils
avoient & on fe mit à table
de cette maniere , la place
de la Reine , & celle de Madame
la P. R. marquées
.
La Table eftoit faite en double
équerre , & décorée auffi
bien que la Salle de la manicre
la plus charmante du
monde ; c'eſt celle ou les
Comteffes mangent ordinairement
. Les murailles ef
soient tapiffées de feuillages
IV. PARTIE. 13
& de fleurs naturelles entrelaffées
avec un art infini.
Il y avoit plus de vingt
grands Miroirs de fept
huit pieds de hauteur & de
beaucoup d'autres ornemens.
Les deux longs bouts
de la Table faifoient en dedans
une espece d'allée de
beaux & grands Orangers ,
deforte que fansqu'on vit les
Caiffes , les Arbres fortoient
du bord de la table d'une
plate bande de fleurs qui
regnoient tout à l'entour
& devant laquelle les Con
fitures & les Plats eftoient
54 MERCURE
rangez. Cela faifoit un effet
fort agreable ; mais ce
qu'il y avoit de plus beau ,
eftoit une grande Caſcade
placée dans un enfoncement
de verdure , avec une Gerbe
d'eau qui tomboit dans un
grand baffin dont les bords
ainfi que tous les bafins
d'où tomboient
les napes , étoient
de cristal, en forte que
ces grands compartiments
de criftaux , & napes d'eau
éclairées derriere & devant
d'une infinité de bougies
reffembloient
à ces Fontaines
dont les Defcriptions
Le
IV. PARTIE. E
trouvent dans les Livres des
Fées. Mr. Eofander en a esté
l'Architecte. Au deffus de
la Cafcade , il y avoit un
grand Choeur de Mufique
qui dura pendant le repas
, & enfuite pendant que
Ton dança. La Reine & Madame
la P. R. eftoient aflifes
vis -à- vis de cette Cafcade
& le P. R. n'eftoit point à
Table ; il alloit & venoit
par tout , & donnoit fes
ordres de la maniere du
monde la plus gracieuſe &
la plus charmante . Madame
la P. R. commença le Bal
16 MERCURE
par un menuer , & aprés qu'
on cut danfé affez long tems
à la Françoife , on danſa à la
Polonoife . Le Prince fe dif
tingua , par fa danfe & par
fon enjoûment , il avoit pris
pour
fa femme M'de Rocolle.
La Reine refta pre-
Lente & fpectatrice jufques
à une heure aprés minuit;
alors chacun fe retira .
Je difois à moy- même ,
pourquoy Madame l'Elec
trice n'eft elle pasicy ? quelle
joye ne feroit - ce pas pour elle
de voir le Prince & la Prin
ceffe fes petits enfants briller
IV. PARTIE. 17
dans cette fefte & s'attirer
l'amour & la veneration de
tout le monde.
Enfin , Madame , vous
voyez que fi depuis longtemps
je n'ay pas eu l'honneur
de vous écrire , je ne
manque pas dans les occafions
de m'acquitter de mon
devoir. Je fuis &c.
ACADEMIES.
Le 2 s. Aoult M" de l'Aca
demie Françoiſe celebrerent
la Fefte de Sain Louis Roy
de France , felon leur cou
tume. On dit la Meffe dans
Septembre 1711. 4. B
18 MERCURE
la Chapelle du Louvre , pen
dant laquelle on chanta un
Motet en Mufique qui avoit
efté composé par Mr du
Bouffet . Le Panegyrique du
Saint fut prononcé par Mr
l'Abbé Germain.
M' de l'Academie Royale
des Sciences , & de celle des
Medailles & Infcriptions celebrerent
la même Fêre dans
l'Eglife des Prestres de l'Oratoire
; & le Pere Quinquet
Theating prononça le Panc
gyrique.
L'après dînée , M" de
Academic Françoiſe tin
IV. PARTIE. 19
rent leur Affemblée pour
delivrer le Prix d Eloquence
qui fut donné à M' Roy ,
Conſeiller au Chatteler ; celuy
de Poëfie fut remis à
l'Année prochaine.
Fefte donnée à foigny le
Jour de Saint Louis
par M de la Brulerie
, ancien Officier
des Troupes du Roy,
& Chevalier de l'Or
dre Royal & Militaire
de S. Louis .
Le 25. Aóuft , Fefte de
40 Bij
20 MERCURE
Le 25. Aoult , Feſte de
Saint Louis , M' de la Brulerie
, l'un des principaux
Officiers de la Ville de Joigny,
donna un diné magnifique
où fetrouverent M le
Marquis de Guerchy , pere
du Lieutenant General , M
le Marquis de Montperous ,
Lieutenant General & Meftre
de Camp General de la
Cavalerie de France ; M' le
Marquis d'Hautefeuille
Maréchal de Camp ; M' de
la Tafte auffi Maréchal de
Camp , & tous Chevaliers
de S. Louis ; Mr de Cham
IV. PARTIE. 21
Mr
Jay Grand- Croix de cet Ordre
; Mr Joly ancien Brigadier
des Armées du Roy ,
Chevalier de Saint Louis ;
Mr le Baron de Bontain
Maître des Ceremonies &
Prevoft de l'Ordre ;
d'Iverni auffi Brigadier &
Chevalier de Saint Louis
Mr de Brumpt ancien Colo
nel Ecoffois , qui amena la
Nobleffe d'Ecoffe & qui l'a
commandée pour le ſervice
du Roy jufqu'en 16.9 2.
Mr d'Arbonne , Capitaine
-audit Regiment de Pardaillan
Cavalerie , Mr le Cheva
22 MERGURE
lier de Verneüller , fils du
Prefident à Mortier de Rou
en , Menin de Monfieur le
Duc du Maine , tous Che
rs
valier de S. Louis M Bèrthelot,
de Pleneuf, de Charmoy
, & dé Senan , ancien
Colonel de Cavalerie , s'y
trouverent auffi , avec plufeurs
autres perfonnes de
confideration .
On paffa l'aprés dînée
en Jeux & en réjoù flances ,
& de foir Mr de la Brulerie
donna auffr un grand fou
pé aux Dames , au Gouver
neur , au President & à tous
IV PARTIE 25
les Confeillers de la Ville.
Aprés le foupé on tira un
beau feu d'Artifice , qui
fur fuivi d'un Bal qui durătoute
la nuit .
MORTS.
Louis François de Boufffers
, Pair & Maréchal de
France , Chevalier Ordres
du Roy & de la Toiſon
d'Or , Capitaine des Gardes
du Corps , cy devant Colonel
du Regiment des Gardes
Françoifes , Grand Bailly &
Gouverneur hereditaire de
24 MERCURE
la Ville de Beauvais & du
Beauvoifis , Gouverneur &
Lieutenant General des Provinces
de Flandres & de
Haynault , Gouverneur particulier
& Souverain Bailly
des Villes, Citadelle & Châ
tellenic de Lille de General
des Armées du Roy , mourut
à Fontainebleau le 22.
Aouft , âgé de 67. ans Lept
mois. Son Corps a elté
apporté à Saint Paul où il a
efté inhumé. Il eftoit né le
dix Janvier 1644. & il commença
à porter les Armes en
qualité de Cadet , dans l
Regiment
IVPARTIE. 25
f
Regiment des Gardes en
1662. En 1663. & 1664 .
il fe trouva aux expeditions
de Marfal & de Gigery. En
1666.il fut fait Sous Lieutenant
dans le même Regiment
, & il fe diftingua l'an
née fuivante au Sieges de
Tournay , de Douay , de
Lille , & de plufieurs autres
Places. En 1668 , il fervit
d'Aide Major au Regiment
des Gardes ; en 1669 il fue
fait Colonel du Regiment
Royal de Dragons , & l'année
fuivante il fervit à la
tefte de ce Regiment à la
Septembre 1711. 4. C
26 MERCURE
Conquefte de la Lorraine
fous Mr le Maréchal de
Crequy. A la mort de Mr
le Comte de Boufflers fon
frere ainé , il eut la Charge
de Lieutenant General de la
Province de l'Ile de France ,
& celle de grand Bailly de
Beauvais dont ce Comte é
toit pourvû. Il fervit dans la
guerre de Hollande fous Mr
de Turenne & fous Mr le
Maréchal
de Luxembourg
,
s'y diftingua en plufieurs
occafions , & entr'autres au
Combat de Woerden où il
fut bleffe,& paffa en AllemaIV
. PARTIE.
27
gne fur la fin de l'année
1673. il fut bleffé ´en 1674 .
à la Bataille d'Ensheim . En
1675 il fut fait Brigadier
de Dragons , & foutint les
efforts des Ennemis à la tefte
de l'arriere Garde de l'Armée
lors qu'elle fe retira
aprés la mort de Mr de
Turenne. En 1676. il fervit
en Allemagne fous Mr le
Maréchal de Luxembourg
.
En 1677. il fut fait Maréchal
de Camp & fervit fous
Mr le Maréchal de Crequy .
En 1678. il fe trouva aux
Combats de Rhinsfeld , de
4. Cij
18 MERCURE
Seckingen , & d Offembourg
, & fut pourvû la
même année de la Charge
de Colonel general de Dragons.
Il alla l'année fuivante
en Dauphiné avec un corps
d'armée , & en 1681. il prit
poffeffion de Cafal , & la
même année il fut fait Lieutenant
general . En 1682 ,
il marcha avec un corps
d'armée vers les Pyrenées
pour obliger la Ville de Fontarabic
de faire au Roy fatisfaction
que Sa Majesté luy
demandoit . En 1683. i repaffa
en Flandre où il fervir
IV . PARTIE 2
fous Mr le Maréchal d'Humieres
. En 1684. aprés la
reduction de Luxembourg
il campa fur l'Escaut avec un
corps de troupes juſques à
la conclufion de la Trêve.
En 1685. il paffa à Bayonne,
& de - là dans la Guyenne
pour y commander en
Chef En . 1686. il eut le
Gouvernement de la Ville
& Province de Luxembourg
& du Comté de Chini. En
1687. il fut pourvûde celuy
de Lorraine & de la Provin
ce de la Sarre & du Commandement
en Chef des
30 MERCURE
trois Evêchez & de Sedan.
En 1688. il Commanda
l'Armée d'Allemagne en
Chef , prit Keiferloutre
Krütznac , Worms , Oppeinheim
, reduifit tout le
>
Palatinat à l'obeiffance du
Roy , & fit entrer des Troupes
dans Mayence. Certe
même année Sa Majesté
l'honora du Collier de fes
Ordres . Il fit plufieurs autres
expeditions les deux
années fuivantes , & Commanda
l'Armée de la Mofelle
. En 1699. il eut le commandement
en Chef du
IV PARTIE.
31
•
Pays d'entre Sambre & la
Mer. En1691 il fut bleffe
au Siege de Mons , bombarda
la Ville de Liége , & fut.
fait Colonel des Gardes.
Françoifes. En 1692. il
inveftit la Ville de Namur ,
s'oppofa au Prince d'Oran
ge qui voulut fecourir cette
place fe diftingua à la
Baille de Steinkerke , bombarda
Charleroy & reprit
Furnes que les Ennemis
avoient fortifié . Au commencement
du mois de Mars
1693. le Roy, l'honora du
Baſton de Maréchal de Fran-
4. Ciiij
32 MERCURE
ce , & de l'Ordre de Saint
Louis au mois d'Avril fuivant.
Il fervit cette même
année en Allemagne fous
Monfeigneur le Dauphin ,
& en Flandres l'année fuivante
où il fut fait Gouverneur
& Lieutenant generat
de cette Province & du
Pays conquis. En 1695. il
deffendit la Ville de Namur
pendant plus de deux mois
afficgée par le Prince d'Orange
, qui le fit conduire
à Maftrick , ou il reſta 15 .
jours . A fon retour le Roy
érigea fa terre de Cagny en
IV PARTIE. 33
* Duché fous le nom de Bouf.
Aèrs en 1695 Il Comman
da l'Armée du Roy entre
· Sambre & Meufe en 1696.
& en 1697. Le 4. Septembre
1701. il fit élever dans fon
Chafteau de Boufflers en
Beauvoifis , la Statue équeltre
du Roy , la même année
il cut ordre de fe rendre à
Bruxelles pour commander
dans tous les Pays Bas
Espagnols conjointement
avec Mr le Marquis de
Bedmar. En 1702. il fervit
fous Monfeigneur le Duc
de Bourgogne . En 1703. il
34 MERGURE
commanda l'Armée du Roy
en Flandre conjointement
avec Mr le Maréchal de
Villeroy , & deffit les Hollandois
avec Mr le Marquis
de Bedmar au combat
d'Eckeren ; ce fut pour le
recompenfer de cette action
que le Roy d'Espagne luy
envoya l'Ordre de la Toifon
d'or. Cette même année
le Roy le fit Capitaine
des Gardes du Corps , & il
fe démit de celle de Colonel
des Gardes Françoifes. En
1708 , il deffendit la Ville ,
IV. PARTIE .
35
& la Citadelle de Lille d'une
maniere qui luy fit beaucoup
d'honneur , & ce qui
que
luy fit meriter la dignité de
Pair de France le Roy
luy donna par Lettres Patentes
regiftrées le 19.
Mars 1709. S. M. luy accorda
auffi les grandes entrées
de premier Gentil'homme
de la Chambre , & la furvivance
du Gouvernement
de Flandre pour Mr le
Comte de Boufflers fon fils
aîné. La derniere action où
feu Mr le Maréchal de
36 MERCURE
Boufflers s'eft diftingué à
efté la Bataille de Malplaquet
, où il commandoir
Faile droite ; il y renver fa
tout ce qui s'oppofa à luy
mais Mr le Maréchal de
Villars qui commandoit
Faile gauche ayant efte
bieffe dangereufement , &
ayant eu plufieurs de fes Of
ficiers generaux tuez , Mr
le Maréchal de Boufflers
foutint encore long temps
les efforts des ennemis
nonobftant leur grande fuperiorité
, jufqu'à ce qu'il
jugeaft à propos de faire fa
IV. PARTIE. 37
1
T
S
retraite qu'il fit en fi bon
ordre que les ennemis n'ofe
rent le fuivre.
La Maifon de Boufflers
eft des plus anciennes de la
Province de Picardie. Elle
a pris fon nom de la Terre
de Boufflers qui eft dans le
Ponthieu , & qui a été poffedée
fans interruption depuis
12.00 ans jufqu'à ce jour par
ceux de cette Maiſon.
Jean Baptifte le Févre de
la Barre, Commandeur, Prevoft
& Maitre des Ceremonies
de l'Ordre Royal , Militaire
& Hôpitalier de Nô38
MERCURE
tre-Dame du Mont Carmel
& de S. Lazare de Jerufalem,
mourut le 17. Aouft âgé de
71. ans. Antoine le Févre ,
Seigneur de la Barre Confeiller
au Parlement , fon pere
avoit efté Prevoft des Mar
chands.
Marie de Ligny , qui avoit
épousé le 13 Janvier 1677.
Antoine Egon , Prince de
Furftemberg mourut à Paris
le 18. Aouft âgé de 55.ans.
Elle laiffa N.. de Furftemberg
qui époufa le 1 3. Mars
1704. N .. Comte de Lannoy
, & Marie Loüife MauIV.
PARTIE. 39
rice , qui époufa le 10. Janvier
1708. Jean - Baptifte
Colbert , Marquis de Seignelay
.
Jean Guillemin , Seigneur
de Courchamp , Maiſtre
des Requeftes , mourut le
18. Aouft. Il avoit épousé
Marthe -Clemence de Bailleul
fille & foeeur de Prefidents
au Parlement.
Jean Phelypeaux , Confeiller
d'Erat Ordinaire , cidevant
Intendant de Paris ,
mourut le 19. Aouft âgé de
65. ans . Il étoit frere de M
le Chancellier.
40 MERCURE
+
Le P. Chatics de Rocheblanche
, Cordelier , Doctenr
de Sorbonne , Lecteur
en Theologie & ancien Gardien
des Cordeliers de Paris
y mourut le 17. Août en fa
6 année & en fa do
7 so.
Religion en reputatiton
d'une grane vertu.
Anne - Elifabeth - David
de Vaux , époule de François
Jofeph de Sevré , Confeiller
au Parlement , mourut le 21 ,
Aoult âgée de 35. ans.
Marie-Anne Charlote da
Bourbon , Dimoiſelle d'Eftouteville
, fille de feu Louis
IV . PARTIE.
41
Henry legitimé deBourbon,
Prince de Neufchaftel en
Suiffe , & d'Angelique Cunegonde
de Montmorency-
Luxembourg , qui étoit née
le 26. Septembre 170 1 .
mourut le 23. Aouft. Elle
laiffe pour heritiere fa four
unique , épouse de Mr le
Duc de Luines.
Jean Aubery , Marquis de
Vatan Baron de Serrieres
& c. Lieutenant de Roy au
Gouvernement d'Orleanois
& Blaifois , mourut le 28 .
Aouft âgé dess . ans . Il laiffe
des enfans de N. de Bailleul,
Septembre 1711. 4. D.
42 MERCURE
foeur de M de Courchamp
dont on vient de parler.
Elifabeth Sophie Cheron ,
de l'Academie Royale de
Peinture & Sculpture , & de
celle des Ricovrati de Padoue
, époufe de Mr le Gay ,
Ingenieur ordin aire du Roy ,
mourut le 4. Septembre.
Marie Madelaine du
Moncel de Martinraft , veuve
de Georges de Scudery.
Gouverneur de N. Dame de
la Garde , mourut le 6. Septembre
, âgé de 9o. ans .
Jerofme de Sainte Beuve ,
Prieur de S Jean de Monto-
"
-
1 I I 3
IV .
PARTIE . 43
ل
riolo , mourut auffi le 6.
Septembre. Il étoit frere de
feu Mr de S. Beuve , Docteur
de Sorbonne , & fort
connu de tous les Sçavans .
Marie du Clos , mourut
à Falaife fur la fin du
mois d'Aouft dans fa centneuvième
année.
›
Henry Colbert de Maulevrier
, Chevalier de Malthe
, Lieutenant General des
Armées du Roy , mourut à
Cambray le 25. Aouſt âgé
de 34 ans. Il y avoit 17 ans
qu'il fervoit avec cette franche
valeur fi naturelle au
4. Dij
44 MERCURE
fang des Colberts. Il fut
bleffe dangereufement
en
1695. au fiege de Namur
où Mr le Marquis de Mauleviier
fon frere aîné fuc
tué. Le Roy luy donna fon
Regiment , qui fut envoyé
en Italie en 1701. où il s'eft
fignalé tant que la guerre y
a duré. Il paffa enfuite en
Efpagne où il fervit fous
Monfieur le Duc d'Orleans ;
il fe diftingua particulierement
au fiege de Lerida . I
a exercé la Charge d'Infpecteur
general d'Infanterie
pendant fix années avec tou
IV.
PARTIE. 45
S
Y
te l'exactitude & la probité
que demande cet employ
Auffi M' le Chevalier dé
Maulevrier poffedont il tou
tes les qualitez du plus excellent
Officier general & celles
du plus parfait honneftehomme
Ileft generalement
regretté des gens de guetre
& de tous ceux qui le connoiffoient.
Il eftoit fils de
feu Mr le Comte de Mau
levrier , Lieutenant general
des Armées du Roy , Chelier
de fes Ordres , Gouver
neur de Tournay , frere de
feu Mr Colbert.
.
46 MERGURË
Guillaume de Bautru
Comte de Serrant , ci - devant
Chancelier de feue Son
A. R. Monfieur , Frere unique
du Roy , eft mort à Ser-
Fant en Anjou , âgé de 93 .
ans. Il eftoit fils de Guillaume
Bautru , Introducteur
des Ambaffadeurs , Envoyé
du Roy en diverfes Cours ,
& de l'Academie Françoife.
Mylord Jean Caryll , Baron
de Dunford en Angleterre
, Miniftre & Secretaire
d'Etat du Roy de la grande
Bretagne , & Secretaire des
Commandemens de la Rei
IV .
PARTIE. 47
3-
CTC
de
Ra
ne , eft mort à S. Germain
en Laye âgé de 94. ans. Il
s'eftoit toujours diftingué
par fa pieté , par la capacité,
par fon attachement à fon
legitime Souverain , & par
fa charité envers les Pau--
vres..
Anne Genevieve Martineau
épouse de François
Ferrand , Seigneur de Villemilan
, Maiftre des Requêtes
& Intendant en Bretagne
,mourut le 15. Septembre
âgée de 45. ans , laiffant
une fille unique.
Marie Reine de Mont48
MERGURE
chal , veuve de Charles- Ho
noré Barentin , Seigneur
d'Hardivillers , &c. Maiftre
des Requeftes , mourut le
16. Septembre âgée de 27.
ans , laiffant pofterité.
MARIAGES.
Le 14. Septembre Mr de
Lamoignon de Blanc- meſnil
Avocat general du Parlement
, épousa Mademoi
felle Daligre , fille d'Eftienne
Daligre , Prefident au
Parlement , & de Madelaine
le Pelletier, fa premiere fem
mc.. Ec
IV. PARTIE 49
f
Et le 17. du même mois
le Prefident Daligré épouſa
#
en troifiéme nôces Mademoiſelle
de Bonnetot , fille
de Mr de Vaurouy , Mar
quis de Bonnetor , premier
Prefident de la Chambre
des Comptes de Rouen.
BENEFICES.
Le 15. Aouft le Roy nomà
l'Evefché de Rennes
vaccant par la mort de Jean-
Baptifte de Beaumanoir ,
Chriftophe - Louis - Turpin
de Criffay Sanzay , Docteur
Septembre 1711. 4. E
fo MERCURE
de Sorbonne, & Doyen de
Saint Martin de Tours ..
Artemius eftoit Evefque
de Rennes fous le Pape
Leon VII. & Menalius aprés
Ş. Amand fous le grand
Clovis. S. Moran remplif
foit ce Siege vers l'an 703 .
& fit fa démiffion vers l'an
717.2 pour allar refider à
Berzetto en Italie , dont il
fut fait Abbé uc A .; 1 nă
Le Diocefe de Renhésſrenfernte
26:3 . Paroiffes com
prifes fous fix Doyennez
Ruraux , defquels il y en a
trois qui dépendent de l'Ar
3
IV PARIE.
1
20
CZ
01
A
chidiaconé de Rennes & les
trois autres de celuy du Deferc
.
+
Il y a dans la Ville de Ren
nes proche la Porte de Morlaix
un Puits fait en 1698. dans
lequel un Maçon qui travail-
Loit au haut laiſſa tomber fon
marteau. Un homme de jour,
née y eftant defcendu pour le
chercher , fut étouffé en approchant
de l'eau. Ily en defcendit
un fecondpour tirer le corps
mort , qui eut la même deſtinée
ainsi qu'un troifiéme . On y en
defcendit un quatrième à demi
gore e bien lié à qui on re-
4. Eij
32 MERGURE
commanda de crier quand il
fentiroit quelque chofe qui l'incommoderoit.
Il cria dés qu'il
futprés de l'eau , & on le retira
promptement ; mais il mourut
trois jours aprés. Il dit qu'il
avoitfenti une chaleur qui luy
brûloit les entrailles . On y def
cendit un chien qui cria au même
endroit , qui mourut peu
de temps aprés qu'il cut efté retiré.
Quand onjettoit de l'eau fur
ce chien mourant il revenoit de
mêmeque ceuxqui ont étéjettés
dans la fameufegrottedu Chien
présde Naples. On retira enfui
te lescadavres avec des crocs ; on
2
IV. PARTIE, $ 3
les ouvrit , on ne put reconnoistre
aucune cause de leur
mort. Ce qu'il y a de plus furprenant
c'est que ce nee fontpoint
des terres nouvellement remuées
qui caufent ces accidens ,
& que l'on boit tous les jours
de l'eau de ce Puits fans aucu
ne incommodité.
Sa Majefté donna l'Abbaye
de S. Florent lez Saumur
, vacante par la mort
de Mr l'Abbé de Bourlai
mont , à François de Berton
de Crillon Evefque de Vent
ce. Cette Abbaye eft de
l'Ordre de S. Benoit , &
4. Eiij.
$ 4 MERCURE
dans le Diocefe d'Angers ,
quoy qu'elle ne fe dife d'aucun
Diocefe. On l'appelle
Saint Florent , lez Saumur
parce qu'elle eft fituée proche
de la Ville de Saumur ,
& pour la diftinguer d'une
autre Abbaye du même
nom qui eft dans la Ville ,
& qu'on nomme Saint Florentle
Vieux. &
* Saint Florent , natif de
Poitou , eftoit Preftre , Difciple
de S. Martin . Aprés
la mort de fon Maiftre il
fe retira dans un caverne de
la montagne de Glonne ou
TV. PARTIE. Js
Glan fur la rive de la Loire ,
dans le Dioceſe d'Angers
du cofté de celuy de Nan
tes , & ily finit fes jours . On
fit de fon Hermitage vers la
fin du feptiéme ficcle une
Abbaye qui fubfifte encore
auffi fous le nom de Saint
Florent le Vieux . Cette Ab
baye ayant efté pillée & brûlée
par les Nornians . , Thibault
Comte de Blois en fit
rebaftit une autre dans le
Chaftcau de Saumur , où
J'on dépofa les Reliques de
S. Florent , ce qui donna
encore le nom à cette Ab-
4 Eiiij
36 MERCURE
baye , qui fut détruite avec
le Chafteau l'an 102 f . Qua
tre où cinq ans aprés on en
baftit une nouvelle prés de
la Ville vers le Couchant ,
fur la petite riviere de
Thoué qui va fe décharger
de là dans la Loire , & c'eft
*
celle
que l'on
nomme
Saint
Florent
lez
Saumur.taband
Celle
de
la
Creftera
efté
donnée
à
Antoine
Charpin
de
Gennetines
, Evêque
de
Limoges
; elle
vacquoit
aufh
par
la
mort
de
Mr
l'Abbé
de
Bourlaimont
, Cette
Abbaye
eft
de
l'Ordre
de
Cif
IV. PARTIE. 57
reaux , au Dioceſe de Langres
, & fituée dans le Bourg
de la Crefte fur lariviere de
Regnon dans le Baffigny en
Champagne à trois lieues
de Chaumont du cofté de
l'Orient. Elle fut fondée le
30. Juin 1 121. & elle eft fille
de Morimond . Saint Bernard
en parle dans la Lettre
3346. s otom. A
Celle de Montiers Ramey
, ou de Montieramey
vacante par la mort de Mr
de Beaumanoir Evefque de
Rennes , à Pierre de Pardail
lan de Gondrin , Chanoine
58 MERCURE
4
de l'Eglife de Paris , & fils
de Mr le Duc d'Antin . Elle
eft de l'Ordre de S. Benoit ,
au Diocefe de Troyes en
Champagne , & fituée à
quatre lieues de la Ville de
ce nom , fur le ruiffeau de
-Barfe. Cette Abbaye fut
fondée Fan 837. fous Louis
le Debonnaire par le Preftre
Adremar ou Arremar , dont
elle porta le nom pendant
quelque temps , comme on
le voit par ces mots latins
Monaſterium Arremarenfe ou
Monafterium Adremari. Le
Corps de Saint Victor , dit
IV. PARTIE. 59
Saint Victre d'Arcis , fur Aube
en Champagne , fut enterré
dans fa Cellule de Saturniac
, à trois petites lieuës
de cette Ville . Il fut tranf
porté depuis dans le Monaftere
du Manoir de Carbon
appellé Montier Ramey , &
ce fut ce qui donna occafion
de choisir ce Saint pour
Patron du lieu . 14 box on
Celle de Tulley , vacante
par la mort d'Estienne de
Rollée de Pallieres , à Mr.
l'Abbé Trudaine . Elle eft
de l'Ordre de Cifteaux , &
dans le Diocefe de Langres.
60 MERCURE
Celie de Laumofſne , où
du Petit - Cifteaux , vacante
par la mort de Mr l'Abbé
du Pré , à Mr l'Abbé Martineau
de Princé. Elle eft de
1'Ordre de Cifteaux , & dans
de Diocefé de Chartres.
i
}
Celle de
Bonnevaux
vacante par la démiffion
d'Henri Auguftin le Pilleur,
nommé à l'Evêché de Sain
res , à Mr l'Abbé Carpinel.
Elle eft de 1 Ordre de Cif
reaux , dans le Dioceſe de
Vienne ; & elle fut fondée
par le Pape Calixte II.
Celle de la Vernuce , vaIV
. PARTIE 61
1
>
cante par la mort de Mr
l'Abbé Boifard , à Mr
l'Abbé Berjavel . Elle eft
de l'Ordre de Saint Auguf,
tin , & dans le Dioceſe de
Bourges.
Celle de S. Loup , qui eft
la Prefentation de Monfieur
le Duc d'Orléans , à Me de
Chaftillon. Elle eft de l'Or.
dre Cifteaux , & dans le Diocefe
d'Orleans , à un quart
de lieuë de la Ville de ce
nom . Cette Abbaye eſtoir
vaccante par la mort de
Louife Charlotte de Chaf
tillon, ShoD CORE.
62 MERCURE
Le Roy a fait Confeiller
d'Etat , Semestre , M' Trudaine
Intendant
de Bourgogne
, & M' Bignon Prevoft
des Marchands est monté
>
au rang des Confeillers
d'Etat Ordinaires
par la
mort de M' Phelyppeaux
. !
Le 19. Aouft M : le
Prevolt des Marchands , &
les Echevins allerent porter
le Scrutin au Roy à Fon,
tainebleau , pour l'Election
de deux nouveaux Echevins.
Il fut prefenté
à Sa
Majefté par Mr Langlois
de la Fortelle Confeiller au
IV. PARTIE. 63
Parlement . Les nouveaux
Echevins qui font Mr.
Tardif Confeiller de Ville
& Mr Prefti Bourgeois
prêterént ferment de fidelité
entre les mains du Roy ; ils
furent conduits par Mr des
Granges Maistre des Caremonies.
Le Corps de Ville
eut enfuite l'honneur de
faluer Monfeigneur le Dauphin,
Madame la Dauphine ,
Monfeigneur le Duc do
Berry, Madamela Ducheſſe
de Berry , & Madame.
Le 4. Septembre Miles
Dépurez des Etats de Lant
?
24 MERCURE
guedoc allerent à Verfailles
complimenter Monfeigneur
le Duc de Bretagne ,
& Monfeigneur le Duc
d'Anjou. Ils furent prefentez
par Mr des Granges
Mailtre des Ceremonies.
Le Roy a donné la Charge
de Capitaine des Gardes
du Corps vacante par la
mort de Mr le Maréchal de
Boufflers à Mr le Duc de
Chatoft Lieutenant Gene
ral des Armées de Sa
Majefté. Cette Charge avoit
autre fois efté poffedée par
Louis de Bethune Duc de
IV. PARTIE 65
Charoft fon ayeul .
Le premier jour de Septembre
la Princeffe , veuve
du feu Prince de Naffaw'
Stadhouder hereditaire de
Frife & de Groningue , accoucha
d'un Prince , ce qui
fera differer la déciſion du
Procés qu'il y avoit entre le
pere de ce jeune Prince
l'Electeur de Brandebourg,
& les autres pretendants à
la fucceffion du feu Prince
d'Orange.org
h. 1WhenÑÁ
20
Septembre 1711. 4.
ى ل م
* MERCURE
-NOUVELLES
d Efpagne.
withVol
-
Extrait d'une Lettre de Saragoffe
du 16. Aouſt . `
00
Le Chasteau d'Arens fe
rendit le 1ª de ce mois , & le
General Showel qui s'y étoit
retiréa eftéfait prisonnier avec
prés de tent Allemans quelques
autres Troupes , & M³ le
Marquis
d' Arpajou , qui commandoir
à ce fiege eft allé faire
celuy du Chateau
de Venaf
que , afin de referrer les EnneIV.
PARTIE. 67
mis du cofté de la Met ; &
ouvrir une communication
avec la Guyenne. Ily a cú
un grand tumulte à Barcelone
, à l'occafion de l'embara
quement de l'Archiduc , la
populace s'étant mutinée pour
sy oppofer , y ayant eſté exdeux
Regiments de citée
par
la nation : mais ce tumulte n'a
fai
point eû de fuite. Cependant
l'on prit des mesures pour en
empécher de nouveaux en
fant embarquer ces deux Regiments
pour les transporter
ailleurs , en faifant répan
dre le bruit que l'Archiduc ne
4. Fij
68 MERCURE
devoit
s'embarquer que pour
paßer à Tarragone & fe mettre
à la tefte de fon Armée.
D'autres Lettres portent
que le General Staremberg
s'eftoit effectivement mis en
campagne , qu'il avoit partagé
les troupes en trois
corps dont les deux plus
confiderables
avoient efté
poftez entre Igualada &
Montblanc pour couper le
chemin de Barcelonne , &
couvrir la Plaine de Tarragone
; que fon Quartier
general eftoit à Santa Colomas
que l'autre corps , con.
IV PARTIE 69
C
fiftant en trois mille hom
mes avoir efté envoyé à
Oftalric pour obſerver un
Camp volant de troupes
Françoifes qui eftoit du
cofté de Gironne , & que ce
General attendoit un renfort
de neuf bataillons An--
glois qui devoient venir de
Portugal.
Que l'Armée d'Eſpagne´
qui cftoit composée de cin
quante quatre Bataillons &
de loixante & dix fept Elcádrons
eftoit tres belle &
abondamment pourvûë de
toutes les chofes neceffaires
70 MERCURE
que celle des ennemis , manquoit
de vivres & même
d'eau ; & que l'Archiduc ne
s'eftoit point encore em
barqué , mais qu'il devoit
partir inceffamment avec
une Flote de trente deux
Vaiffeaux qui s'eftoient alfemblez
à Barcelonne.
Les Lettres de Cadix du
1.17 Aouft difent que le 8.
il y eftoit arrivé quatre Baftimens
Portugais de la
Flote du Brefil pris par plufieurs
Armateurs François ,
qui aprés les avoir amarinez,
avoient continué de pourIV:
PARTIE . 71
fuivre le reste de la Flote ;
que cette nouvelle avoit
fort déconcerté les Negotians
de Liſbonne d'où l'on
avoit fait partir plufieurs
Navires pour aller chercher
des bleds en Affrique ;
mais qui y eftoient revenus
fur l'avis qu'ils avoient eu
que quelques Vaiffeaux de
guerre François croiſoient
Tur leur route , ce qui avoit
encore fait augmenter le
prix des grains qui eftoit
déja fort haut. Ces mêmes
Lettres confirment la gran
de déſertion des troupes de
014
MERCURE
la Garnifon de Gibraltar fau
te de payement , & qu'outre
les deux cens hommes qui
en eftoient fortis fous pretexte
d'aller en party & qui
eftoient venus fe rendre
avec leurs Officiers , il en
arrivoit fouvent d'autres .
Celles de Madrid du 24,
du même mois portene
qu'on a eu des avis d'Eftremadure
qui confirment que
Jes troupes Angloifes qui
font en Portugal marchoient
à Liſbonne ou elles
devoient s'embarquer pour
paffer en Catalogne , & que
les
IV. PARTIE. 73
les Portugais en paroiffoient
fort mécontens .
NOUVELLES
de Flandre.
Lettre du Camp de Paillancour
, dduu 1. Septembre.
Mr le Maréchal de Vil
lars , ayant réfolu d'inquieter
les Ennemis , commanda hier
apre's midyfix mille foldats ou
grenadiers . Il fit faire deux
Ponts à gauche de Thun - l'Evefque
, entre ce Village &
Etran qui furent conftruits
Septembre 1711. 4. G
74 MERCURE
avec tant de diligence de
fecret que les Ennemis qui n'en
"étoient qu'à une portée de moufquet
ne s'en apperçurent point.
Les Troupesy pafferent ; le plus
grand détachement, commandé
par Mr de Chasteaumorand
alla du cofté de Hordain prés
de Bouchain ; le fecond , aux
ordres de Mr de Colandre
marcha à Fwy où les Ennemis
ont fix Bataillons couverts
d'un bon retranchement bien
paliffade le troifiéme , fous le
commandement de Mr le Che
valier de Livry , refta en deçà
l'Efcant vis - à - vis de ce
de
IV . PARTIE. 75
Pont, Mrde Colandre attaqua ›
le pofte d'Fwy pour attirer les
Ennemis de ce cofté là. Mr de
Chasteaumorand
attaqua celuis
de Hourdin où il y avoitquatre-
Bataillons, dont on fit un grand
carnage ; toutes les Tentes , &
les Maifons de Hordain où il
y avoit un grand nombre
d'Officiers furent pillées , en
forte que la plus part des Sol- ·
dats y firent un gros butin. On
prit un Maréchal de Camp
qui commandoit à ce pofte , un
Colonel , trois Capitaines , un
Enfeigne, deux Ingenieurs g
foixante Soldats , le reste ayant›
4. Gij
76- MERCURE
efté tué , ou ayant pris lafuite,
cent Chevaux. Dans le
temps que Mr de Chasteaumorand
attaquoit Hourdin ,›
Mr & Aubigny ,prenoit le pofte
d'Etrun à revers , où il fit.
foixante hommes prifonniers ,
le refte s'étant fauvé à la faveur
de la nuit : Mr d'Aubigny
fit enfuite travailler à
achever le Pont avec Mr le
Chevalier de Livry , qui étoit
refté de l'autre côté, & on y fit
paffer les Troupes qui ne furent
point poursuivies par les Ennemis
, dont toute l'Armée refta
en Bataille jufques à deux
IV. PARTIE 77
heures du matin ; Mr de Fenelon
, Colonel de Bigorre , &
le Lieutenant Colonel de Pi-
I
cardie , ont efté bleffez.
Nous aprenons en ce moment
, que Mr de Coignies , a
deffait prés du Quefnoy , Sept
Efcadrons de Cavalerie & de
·Dragons , qui fervoient d'ef
corte aux Fourageurs ; qu'il a
pris un grand nombre de Chevaux
, de Soldats , & d'Officiers
; entr'autres le Lieutenant
General & le Major
General qui commandoient l'efcorte
; mais
que
Mr de
Broffia
ya efté tué.
4 Giij
78 MERCURE
Les Ennemis ont invelli
Bouchain le 10. Aouft . Depuis
ce jour - là jufqu'au 2 3 .
ils ont travaillé à faire des
paffages dans le Marais
à force de fafcines , & à
faire des retranchements
pour couvrir la Cavalerie
qui devoit foutenir les
Travailleurs .
La nuit du 2 3. au 24. ils
Quvrirent la tranchée à trois
attaques. La Garniſon eſt
fortie de la Place le 14. Septombre
, fous une Capitulation
honorable ; mais qui
n'a pas efté executée par la
IV. PARTIE
79/
mauvaiſe foy des Ennemis.
On donnera le mois prochain
un détail circonftan
cié de ce fiege .
NOUVELLES
de Dauphiné.
Extrait d'une Lettre de Gre-
'noble , du 11. Septembre
I
L'Armée de Monfieur
le Duc de Savoye fe mit
avant hier en marche pour
repaffer en Piemont. Mr le
Maréchal Berwick décampa
en même temps pour
4 .
G
iiij
lá
80 MERCURE
fuivre. Il a d'abord marché
à faint Jean de Maurienne ,
& a enfuite remonté le
Galibier. Mr le Comte de
Silly a quitté fon camp des
Echelles pour venir occuper
celuy de Barreaux , & en
partant il a congedié toutes
les Milices . Toute fa Cavalerie
a campé aujourd'huy
autour de cette Ville & doit
retourner en Savoye . Tous
les François qui estoient
fortis de Chambery ont eu
ordre d'y retourner, Mr
Maréchal de Berwick a
donné les ordres pour faire
A
IV . PARTIE . 818T
7
remonter vers Briançon
l'Artillerie du Camp de
Barreaux , & deux cens paires
de boeufs ont efté allemblées
pour cet effer .
NOUVELLES
d'Allemagne & du Nord.
L'Electeur Palatin s'eft
enfin déterminé à fe rendre
à Francfort pour affifter aux
Conferences qui s'y tiennent
pour regler la Capitulation
perpetuelle que l'on
doit faire jurer au futur Empereur.
82 MERCURE
Les Ennemis ont fait
rentrer dans leurs Lignes
lés Troupes qu'ils avoient le
long du Rhin.
L'Armée Danoiſe arriva
le
25 . Aouft prés du paffage
de Damgarten , & le Roy
de Dannemarck ayant fait
faire les difpofitions pour
attaquer le Retranchement
des Suedois , le 28. l'Artillefie
commença à tirer , & la
nuit on jetta une grande
quantité de faſcines dans le
Marais , ce qui obligea les
Suedois qui apprehendoient
d'eftre coupez , de fe retirer
IV. PARTIE 83
el
à Stralzund avec leur Artillerie
. Le 30. les Danois ,
aprés avoir reparé le Pont
que les Suedois avoient
rompu s'avancerent juſqu'à
deux lieues de Stralzund ,
où ils s'arrefterent en attendant
leur groffe Artillerie
pour attaquer les Retranchements
qui font devant
la Place.
Le Roy Augufte eftoit
entré en Pomeranie avec un
Corps de Saxons & de Mofcovites
, & marchoit à grandes
journées pour joindre le
Roy de Dannemarck, Il
84 MERCURE
s'eft emparé de Demmin ,
d'Anklam , & de Treplow ,
fans aucune reſiſtance confiderable
de la part des Suedois
, dont la principale attention
n'eft qu'à conferver
Stralzund , Stetin , &
Wilmar.
Lettre de Conftantinople du
7. Aoust.
Le 3. de ce mois le Grand
Seigneur reçur plufieurs
Courriers du Grand Vifir ,
avec la nouvelle que l'Armée
Mofcovite forte de
IV. PARTIE 85
foixante mille hommes
commandée par le Czar en
perfonne avoit efté prefqu'entierement
deffaite, Le
combat commença le 19.7
Juillet aprés midy prés de
Falczin fur le Prut. Il y eut
plus de trente mille Mofco .
vites tuez par les Turcs &
par les Tartares , & fans la
nuit qui furvint le nombre
auroit efté plus grand. Le
refte de leur Armée n'ayant
pûfe retirer parce que les
Turcs & les Tartares l'environnoient
de tous coftez,
les uns & les autres pafferent
86 MERCURE
la nuit fous les Armes . Le
lendemain matin les Mofcovites
fe rallierent & fe
couvrirent avec des che .
vaux de frife ; mais le grand
Vifir fit auffi toft tirer le
canon fur ce retranche-
&
ment. Alors le Czar luy
envoya un Officier pour luy
propofer une Capitulation
avec le grand Seigneur &
avec le Roy de Suede
voyant que les Turcs continuoient
leur canonnade
il envoya quatre Officiers
pour réiterer cette propofi
tion , & pour prier le grand
IV. PARTIE 87
Vifir de faire ceffer le canon
ce qui luy fut accordé. Mr
Czafirow Vice Chancellier ,
& le fils da General Szere
metown
furent envoyez
au grand Vifit avec lequel
ils convinrent
que la Ville
d'Afaf
feroit rendue
au
grand
Seigneur
que les
Forteffes de Kaminka , de
Sagara & de Samara feroient
démolies ; que l'Ukraine
feroit remife dans fon any
cienne liberté ; que le Czar
ne fe mêleroit plus des Affai
res de Pologne , qu'il livre,
Foit le Prince , Demetrius
88 MERCURE
Cantemir , & le rebelle Kebaliaba
, & qu'on reme
troit au grand Seigneur
l'Artillerie & les Munitions
de l'Armée Mofcovite . Ces
fix Articles preliminaires
devoient cftre fuivis d'un
traité de Paix qui feroit fait
à Bender où Ms Czafirow ,
& Szeremetow
droient en qualité de Plenipotentiaires
& pour fervir
d'Otages de ce qui avoit
efté conclu fans que le grand
Vifit en euft donné aucun .
On a permisau refte del Armée
Mofcovite de fe retirer
feren
IV. PARTIE. 99
à Kiowie ; mais comme les
Soldats eftoient accablez de
fatigue & de faim , même
avant la Bataille , & qu'il
étoient pourſuivis par les
Tartares à caufe que le Kan
n'avoit point cû de part à
ce qui avoit efté conclu avec
le Czar , on croyoit qu'il en
réchaperoit un fort petit
nombre cependant le
grand Vifir les faifoit accompagner
par dix Ou
douze mille hommes fous
pretexte de leur fervir d'efcorte
contre les Tartares ;
mais en effet pour les faire
Septembre 1711. 4. H
匪
20 MERCURE
de
remarcher
à petites journées ,
afin d'avoir le temps
cevoir les ordres du grand
Seigneur. Mr Funck Envoyé
du Roy de Suede prefenta
le 4. au Grand Seigneur
, & au Kaimakan , un
Memoire concernant
les
interefts du Roy fon Maitre.
Tous les Vifits , & le
Mufti l'affurerent que ce
Prince auroit lieu d'eftre
content avant que les Mofcovites
fortiffent des Etats
du Grand Seigneur , &
que le Kapigilar Kiaïaski
devoit partir inceffament
IV. PARTIE. 91
S.
-
pour procurer à Sa Majeſté
Sucdoife toute forte fatisfaction
. Le s . Mr Funck fut
appellé pour aller chez le
Kaimakan où il trouva le
Mufti & le Selictar Pacha ,
gendre du grand Seigneur ,
afin de conferer fur fon Me.
moire par lequel il demandoit
que le Roy de Suede
fut compris dans le traité
de Bender , & qu'il fuft ftipulé
qu'il feroit conduit
dans fes Etats avec autant
de troupes qu'il fouhaiteroit.
Ofman Pacha Kiaïa ou
Lieutenant
Vifir du grand
Hij
98 MERCURE
qu'il avoir envoyé pour
apporter la nouvelle de
cette Victoire , a efté difgracié
au lieu d'eftre recompenfe
; ce qui marque que
le Gra
Seigneur eft mécontent
de la precipitation
avec laquelle le grand Vifir
a conclu la Capitulation
pouvant fe rendre maiſtre
du Czar & du reſte de fon
Armée ; cependant on n'a
pas laiffe de faite plufieurs
décharges d'Artillerie aprés
l'arrivée de cette nouvelle, &
toute la Ville en a témoigné
une grande joye. On remarIV.
PARTIE. 93
que que la deffaite du Czar
eft arrivée le même mois
que celle du Roy de Suede
à Pultowa , & que le même
malheur de ces deux
Princes leur eſt arrivé pour
s'eftre engagé trop avant
fans Magafins
, en pays ennemi.
LYON
APPROBATION.
J'A
'Ay lû par ordre de Monfei
gneur le Chancelier le Mercure
Galant du prefent mois
de Septembre . A Paris ce 27 .
Septembre 1711 .
CAPON.
TABLE.
I. PARTIE.
Litterature , 3
Traduction d'un Fragment d'ovide
,
22
24
La réputation des Poëtes ,
Suite de l'Abregé de l'Illiade , 28
Argument du 5 Livre ,
e
II. PARTIE .
SI
Suite & fin de l'Hiſtoirè Eſpa◄
gnole ,
Article Burlefque , fuite du Paralelle
d'Homere & de Ra
blais ,
La vraye Eloquence ,
Tempefte de Rablais ,
Enigme
III. PARTIE.
53
1 80
94
107
Piecesfugitives, Epigramme,
Plaintes >
Epigramme ,
3
22
TABLE.
A Mefdames de P.
Réponse à une Lettre,
Epigramme ,
Autre ,
Bouquet nouveau ,
IV . PARTIE .
Nouvelles , Lettre de Bafle ,
Fefte donnée à Berlin ,
Academies ,
Feste donnée àJoigny ,
2
26
2.7
29
31
I
ΙΟ
17
19
Morts > 23
Mariages , 48
Benefices , 49
Nominations , &c. 62
Nouvelles d'Espagne ,
66
Nouvelles de Flandre
73
Nouvelles de Dauphiné ,
79
Nouvelles d'Allemagne & du
: Nord ,
81
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Le Texte de la Regle de S. Benoît , trad.in 12.11 .
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Du R. P. Dom LE NAIN, Sous-Prieur de l'Abbaye
de la Trappe.
Homelies fur le Prophete Jeremie , in 8 ° , 2 .
vol. 7 liv . 12 f.
Hiftoire de l'Ordre de Câteaux , ou Vies des
Saints de cet Ordre , in 12. 9 vol. 16 liv . 4 f.
De Noffeigneurs du Clergé de France.
1.
Procés verbal de l'Affemblée de 1690. fol. 6 I.
De l'Affemblée de 1693. & 16 95. fol. 10
De l'Affemblée de 1701. & 1702. fol . 6. I.
Relation des Affemblées de MM . les Prelats ,
pour la condamnation du Livre de M. l'Archevêque
de Cambray , in 4 ° , 4 liv.
Recueil
concernant
l'établiffement
de deux
Se
minaires
dans
le Dioceſe
de Reims
, in 4º 2 61.
Du R. P. DUBOIS , de l'Oratoire,
Hiftoria Ecclefia Parifienfis , fol . 2 vol . 30 liv.
Le Tome fecond feparement , Is liv.
Du
R. P. A MELOTTE
, de l'Oratoire
.
Le Nouveau Teftament traduit fur la Vulgate
, ave des Notes , & des Cartes de la Terre
Sainte , in 4ª , 2 vol .
Le même in 18.
12 liv.
I liv.
Du R. P. HARDOUIN , de la Compagnie
de Jesus.
Antirrheticus de nummus antiquis Coloniarum &
6
Municipiorum ad Joannem Vaillant , in 4º , 3. I.
Sancti Joannis Chryfoftomi Epiftola ad Cafarium
Monachum , Gr. & Lat. cum Joannis Harduini
Notis ,
in 4 ,
Dißertatione de Sacramento Altaris ,
De differens Auteurs .
4
liv.
Compendium Inftitutionum Juftiniani , feu compen
diofa earum tractatio , in 12 .
I liv.
Coeur affectif de faint François de Sales , tiré
de ce qu'il y a de plus touchant dans fes
Ecrits , pour la confolation des ames devotes
, par M. Gambard , in 12. I liv. 12 f.
Diurnale Ciftercienfe , ad ufum Fulienfium , rubronigrum,
in 24. maroquin , 3 I.
Difcours de faint Bernard , compofez à la priere
de fa foeur la Religieufe , où font contenus
tous les principaux points du Chriſtianiſme
nouvelle traduction , in 16. I liv. 10 f.
Exercice Journalier , à l'ufage des Religieufes
de la Congregation de N. D. in 16. i liv .
Maniere de bien entendre la Meſſe de Paroiffe,
par Meffire François de Harlay , Archevêque
de Rouen , imprimée par l'ordre de feu
M. l'Archevêque de Paris , in 12. 1 liv .
Ordonnances du Roy pour le fait de la Guerre ,
in 12. 15 vol.
,
4f liv.
Les volumes
fe vendent
feparément
, 3 1,
Reglement
pour
le Regiment
des Gardes
, in 12 .
I liv. Prieres Chrétiennes
recueillies
par ordre de feu M. l'Archevêque
de Paris , en Latin & en François
; avec une Inftruction
pour la Con- feffion & Communion
, & une Conduite
pour
bien gagner le Jubilé , in 12. troifiéme
édition
,
I liv.
Tradition de l'Eglife fur le Silence Chrétien &
Monaftique , contre l'intemperance de la langue
, & les paroles inutiles en general , & en
particulier contre la trop grande frequentation
des Parloirs des Religieufes , par M.
Hermant , in 12 . I liv. 16 f.
Traité du Cancer , & des moyens de le guerir ,
par M. Alliot , in 12 . I liv.10 f.
Traité des Ecoles Epifcopales , par feu M. Joly ,
Chantre & Chanoine de l'Eglife de Paris
in 12 .
9
2 liv .
Vie de la Mere Eugenie de Fontaine , Religieufe
de la Vifitation, morte en 1694. in 12. 1 l. 10 f.
De l'ufage de celebrer le Service Divin , en langue
non vulgaire , par le R. P. Caponnel ,
Chanoine Regulier , in 12 . I liv. s f.
Imitation de Jefus- Chrift en vers , avec figures,
par M. de Corneille, Bruxelles. in 8 °, 4 1. Hiftoire du Concile de Trente , par Frapaolo ,
in 4 , 8 liv.
Les Loix Civiles dans leur ordre naturel , fol.
2 vol. 18 liv.
36 liv.
Les mêmes , in 4 , 6 vol..
L'art de Tourner ou de faire en perfection
toutes fortes d'ouvrages au Tour : ouvrage
tres-curieux & tres - neceffaire à ceux qui s'exercent
au Tour , fol. Latin & Fr. Is liv.
Traduction nouvelle des Odes d'Anacreon , par
M. de la Foffe , feconde édition , augmentée
de deux Odes , l'une de Pindare , & l'autre
d'Horace , in 12 . 2 liv . 10 f.
Nouvelle Grammaire Efpagnole, par M. Perger
, in iz.
Nouvelle Traduction de Juſtin ,
marques , in 12. 2 vol .
L. 2 liv.
avec des Re-
Conquête du Mexique , in 12. 2 vol.
3 liv. 10 f.
s liv.
Conquête du Perou , în 12. 2 vol. 4 liv. 10 f.
Voyage d'Alep à Jeruſalem , in 12 . 2 liv.
Nouvelle & parfaite Grammaire Françoise du
Pere Chifflet , in 12. avec un abregé d'Ortographe
,
1 liv . 10 f.
De la Connoiffance de Dieu , par M. Ferrand ,
in 12 .
Novum Teftamentum Gracum , in 18 .
L'Efprit de l'Ecriture Sainte, in 12. 2
Le Comte de Cardone , in 1Z.
2 liv . 10 f
1 liv . 16 f.
vol.3 1.10 f.
I liv . 16 f.
Les Avantures Galantes du Chevalier de Themicourt
, par Madame D... in 12. 1 1. 16 f.
Furteriana , ou les bons mots de M. Furetiere ,
in 12.
2. liv.
Avantures galantes de France & d'Espagne ,
in 12 . 2 liv .
Traduction nouvelle de Miguelles Cervantes ,
in 12. 2 liv.
6 liv . Biblia facra , in 4 " ,
Amufemens ferieux & comiques , par M. du
Freny , in 12 .
1 liv . 10 f.
Grammaire Allemande , de Perger , in 12. 1 1.
Effais de litterature pour la connoiffance des
bons Livres ; & fupplément des Effais , in 12 .
4 Vol. 8 liv .
Le Jeu de l'Hombre , augmenté des Decifions
Nouvelles , in 12 . I liv . 10 f.
Les Campagnes du Roy de Suede , in 12. 3
vol. 6 liv .
La Vie de M. de Moliere , in 12 . 2 liv .
Traité du Recitatif dans la Compofition , dans
la Declamation , la Lecture & l'Action publique
, in 12 . 1 liv . 10 f.
Hiftoire de la Virginie , contenant celle de fon
établiffement & de fon gouvernement jufqu'à
prefent , les productions naturelles du
Païs , la Religion , les Loix & les Coûtumes
des Indiens naturels , par un Auteur natif &
habitant de ce Païs- là , în 12. enrichie de figure
gures en taille-douce , 2 liv . s f
Ecole parfaite des Officiers de Bouche , qui enfeigne
les devoirs du Maître d'Hôtel & du
Sommelier , la maniere de faire les Confitures
feches & liquides , les Liqueurs , les
Eaux , les Parfums , la Cuifine , à découper
les viandes , & à faire la pâtifferie ; huitiéme
édition , corrigée & augmentée des pâtes , des
Liqueurs nouvelles , & des nouveaux Ragoûts
qu'on fert aujourd'hui : Avec des modeles
pour dreffer les Services de Table , in
12. 53 am 2 liv, s f.
Abregé de la Sainte Bible , en forme de Queftions
& Réponses familieres , tirées de differens
Auteurs ; divifé en deux parties , l'ancien
& le nouveau Teftament , par le R. P.
Guerard , de la Congregation de faint Maur ,
feconde édition , in 12. 2.liv.
Les Delices de l'Italie , contenant une defcription
exacte du Païs , des principales Villes ,
de toutes les Antiquitez , & de toutes les Raretez
qui s'y trouvent ; ouvrage enrichi d'un
tres-grandnombre de figures en taille douce ,
in 12. 4 vol. 12 liv..
Traité des Jardinages , par M. de la Quintinie,
in 4 , 2 vol.
Le Prince Grec , in 12 .
12 liv.
2 liv.
1.10 £
10 liv.
2 liv . 10 f.
Hiftoire de D. Quixotte , in 12. 5 vol. 12
Les Fables de la Fontaine , in 12.5 yol.
La Princeffe de Cleves , in 12.
L'Arithmetique de Legendre , in 12. 2 liv . 10 f.
La Vie de Cromvvel , de Gregorio Leti , in 12 .
2 vol. s liv.
Les Ocuvres de S. Evremond , in 12.5 vol . 10 1.
Juvenal , de la traduction du P. Tarteron , in
12.
Zayde , in 12. 2 vol .
2 liv , 10 f.
4. liv,
B
16
Style du Confeil , par M. Gauret , in 4´s liv.
Code de la Marine , in 4 , -3 liv.
Traité hiftorique des Monnoyes de France , par
M. le Blanc . in 24 ° .
2 liv.
9 liv .
Dialogues
entre le Diable Boiteux
& le Diable Borgne
, par M. le Noble , in 12 . Traité
de la Parole
in 12 : brochure
,
Lucien d'Ablancourt
, nouvelle
édition
, aug-
I
8 L.
mentée de Notes ; in 12. 3 vol.2016 liv.
Numifmata 'ared Imperatorum Auguftorum & Cafarum
in Colonies , Municipiis & Urbibus Fure
Latio donatis , ex omni modulo percußa , autore
Joanne Foy- Vaillant , in fol . 2 vol . " 36 liv.
L'Hiftoire reduite à fes principes , dediée à
Monfeigneur le Duc de Bourgogne , în 12 ,
pomadeT mazliv. 10 f.
Contes des Fées ; on les Chevaliers Errans , &
le Genie Familier, par M. D... in'12. 11. 15 f.
D. Guzman d'Alfarache , in iz . 3 vol. 71. ro f.
Traduction en vers François des Epigrammes
d'Ovven', in 12. Muller liv . 10 f.
2 volu
Les Amours de Pfiché , în 12 .
La Mufe Moufquetaire , in 12.
Virgile , de Martignac , in 12. 3. vol.
C
2 liv.
2 liv .
6 liv.
Lucrece , de la nature des chofes , avec des remarques
fur les endroits les plus difficiles ,
Vitrâduction nouvelle , in 12. 2 Vol. 4 1. 10 f.
L'Ambigué d'Auteuil , ou varietez hiftoriques ,
compofées du Joueur , du Nouvelifte , du Fi
nancier , du Critique , de l'Inconnu , du Sincere
, du Subtil ; de l'Hypocrite , & de plufieurs
autres perfonnages de differens carac-
1 liv . J. f.
Les Avantures d'Appollonius de Tyr livre rempli
d'évenemens , & écrit dans le même ftyle
que Telemaque , par M. le B... in 12. 2 liv.
Le Prince Eraftus , fils de l'Empereur Diocle
teres , in 12.
tian , in 12. 2 liv. s. f.
Abregé de Geographie , & de tout ce qu'il y
a de plus remarquable dans chacune des quatre
grandes parties de la Terie , particulierement
dans l'Europe & dans le Royaume de
France : le tout mis en ordre pour pouvoir
être appris & retenu facilement par coeur
avec les routes des Poftes de France & d'Elpagne
, dedié à S. A. S. Monfeigneur le Prince
de Dombes , par MM. Poncein , in 12. 1 liv. f.
Hiftoire fecrete de Bourgogne , in 12. 2 vol . 3 1 .
Vafconiana , ou Recueil des bons mots ,
des penfées
les plus plaifantes , & des rencontres les
plus vives des Gafcons , feconde édition , augmentée
, in 12 . 2 liv . s f.
Les Metamorphofes d'Ovide , traduites par M.
Durier , derniere édition , in 12. 3 vol. 6 liv .
Les mêmes en Rondeaux , avec figures , de
Bencerade, imprimées à Bruxelles , in 8 , 4 1.
Les Metamorphofes , ou l'Aine d'or d'Apulée ,
Philofophe Platonicien avec le Demon de
Socrate , traduction en François , avec des
Remarques , in 12. 2 vol. sliv.
Les Fables d'Efope Phrygien , avec celles de
Philielphe , traduction nouvelle , enrichie de
Difcours moraux & hiftoriques , & de Quatrains
à la fin de chaque difcours , avec figures.
On a ajouté à cette nouvelle tradution
les Contes d'Efope , les Fables diverfes
d'Abrias & d'Avienus , in 12. 2 vol . 4 1. 10 f.
Les Memoires de la Vie du Comte D ... avant fa
retraite , contenant diverfes avantures qui
peuvent fervir d'inftruction à ceux qui ont
vivre dans le grand monde ; redigez par M. de
S. Evremont , in 12. 2 vol. 4 liv . 10 f.
Les Memoire de Meffire Roger Rabutin , Comte
de Buffy ,in 12. 3 vol .
L
A
7 liv, 10 f.
Bij
I 2
Idem , Ses Lettres , nouv . édit . in 12. 4 vol . 8 Į.
Les Oeuvres d'Homere , traduites en François
par M. D... enrichies de figures en taille
douce , divifées en 4 vol . in 12 . rol.
Quinte- Curce , de la traduct . de M. de Vaugelas ,
avec le Latin à côté , 2 vol . în 12 , 4 1. 10 f
Oeuvres d'Horace en Latin & en François , avec
des Remarques critiques & hiftoriques , de M.
Dacier , troifiéme édition , revûë , corrigée
& augmentée confiderablement par l'Auteur ,
in 12. 10 vol . 20 liv!
Hiftoire de France, P. Marcelle , in 12. 4 vol.8 1. Lexicon Buxtorfi , in 8ª , 4 liv . 10 f.
Idem Lexicon Paforis , Greco- Lat. in 8º, 4 1. 10 f.
Corpus Juris Canonici , à Petro Pithoxo , cum appendiceJuris
Canonici, continens Librumfeptimum
Decretalium, & Jo. Pauli Lancelotti inftitutiones
Juris Canonici , in fol. 2 vol. 20 liv.
Les Oeuvres de Maître Guy Coquille , Sieur de
Romaney , 1703. 2 vol . 13 liv. Recueil de bons mots des Anciens & des Modernes
, in 12.
1
2 liv.
THEATRE DE MESSIEURS
Corneille , in 12. Io vol . 20 liv .
36 liv.
Racine , 2 vol.
Campiftrón , nouv. éd . augmentée d'une Tragedie
& d'une Comedie , & ornée de figures , 4 1.
De la Foffe , avec fes Poëfies , 2 vol .
Legrand ;
Crébillon ,
Pradon ,
De la Grange ,
S. liv..
2 liv. 10 f.
3 liv . 10 f.
3 liv .
2 liv . 10 f.
Moliere , 8 vol . nouvelle édition , augmentée
de fa Vie , avec de nouvelles Remarques , 1ƒ . 1 .
Dancourt , 7 vol. nouvelle édition , augmentée
de plufieurs Pieces qui n'avoient point été
imprimées dans les éditions precedentes, avce
!
fgures & Mafique ,"
Regnard , 2 vol.
Poiffon , 2 vol.
De Hauteroche ,
liva
liv.
3 liv .
liv . 10 f
Palaprat , 2. éd. augmentée de plufieurs Comedies
qui n'ont pas encore efté imprimées , &
d'un Recueil de Pieces en Vers, 2 vol . 4 1. 10 f.
Baron ,
De Riviere ,
De la Thuillerie ,
Boindin ,
De Champ- mêlé ,
De Montfleury , 2 vol .
Bourfault", 2 vol.
De Mademoiſelle Barbier ,
Quinaut
Theatre François , 6 vol.
Idomenée ,
Aftrée ,
3 liv
liv. 1o f
2 liva
2. liv.
2 liv
liva
sliv.
liv. To f
2 liv. 1o f
Is livi
*
Electre ,
Rhadamifthe & Zenobie ,
Lés Tyndarydes
Cyrus ,
Saül ,
Herode ,
Polydore ,
La Mort d'Ulyffe ,
Muftapha ,
Agrippa , ou le faux Tiberinus .
Le Curieux Impertinent ,
Les Agioteurs ,
L'Amour Charlatan ,
Le Naufrage,
Danaé ,
Turcaret ,
Crifpin Rival
Le Jaloux défabule
L
Tragedie
}
Comcdicn
Let Airs notez des Comedics Françoifes , par
7 liv.
M. Gillier , in 4º,
Cantates & Arietes de M. le B. fol. 7 liv. 1o f.
Le quatrième Livre des Motets de M. Campras
Le Mercure Galant
Et broché ,
.. liv.
11. ro f.
al. sf.
Recueil de Pieces en Vers , adreffées à S. A.S.
Monfeigneur le Duc de Vendôme , & plufieurs
Effais de Poëfies diverfes , par Monfieur de
Palaprat , 1. vol . in 12. 11. 10 f.
Et toutes les autres Pieces de Theatre , tant
anciennes que nouvelles.
Qualité de la reconnaissance optique de caractères