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MERCURE
GALAN LYON
JUILLET , 17
UN
NC
NIN
A PARIS ,
M. DCCXI.
Avec Privilege du Roy.
MERGURE
GALANT.
Par le Sieur Du F *
Mois
de Fuillet
1711.
Le prix eft 30. fols relié en veau , &
25. fols , brochez
A PARIS ,
Chez DANIEL JOLLET , au Livre
Royal, au bout du Pont S. Michel
du côté du Palais .
PIERRE RIBOU , à l'Image S. Louis,
fur le Quay des Auguſtins.
GILLES LAMESLE, à l'entrée de la rue.
du Foin , du côté de la rue
Saint Jacques.
Infotot to
ณ
MERCURE
GALAN TAIL
I.
PARTIE.
LITTERATURE.
ACADEMIES .
LYON
7893
Le Feudy 25. Jnin 1711. M.
l'Abbé
d'ESTRE'ES, ayant
efté élû par
Meffieurs de
Academie
Françoile , à
la place de feu
Monfieur
Boileau Sieur des
Preaux,
y vint prendre feance.
LE
Difcours
que
I A ij
4
MERCURE ,
prononça Monfieur L.
d'Eſtrées
, & la Répon
fe qu'y fit M. de Valincour
, font de ces pieces
d'éloquence
dont il
eft dangereux de faire
des extraits
; comment
abbreger avec fuccés
un précis déja réduit
aux plus juftes bornes
que l'excellence de l'art
lui puiffe donner? comment
retrancher d'une
compoſition
ſi bien ordonnée
, fans la décomI.
PARTIE .
S
pofer , pour ainfi dire ?
& quel choix peut- on
faire entre des pensées
également folides , ou
brillantes , fans eftie blâmé
par ceux qui regretteront
, avec raifon , les
beautez qu'on aura obmifes
?
Ces difficultez m'ont
déterminé à une nouvelle
maniere de faire
des extraits : c'eft de
compoſer , par exemple
, des propres mate-
1 A iij
6 MERCURE ,
riaux d'un difcours , un
petit extrait ſuivi , qui
contienne à peu prés en
racourci l'idée de l'original
.
Par ce moyen je ne
ferai pas moins de tort
à l'ouvrage : mais l'Auteur
pourra fe difculper
en jettant la faute
fur le Compilateur , &
je me difculperai moimême
d'avoir obmis ,
peut - être , les plus
beaux endroits , par
I.PARTIE . 7
la neceffité de préferer
les plus convenables ,
& les plus propres à
la liaifon d'un extrait
fuivi.
Pour conferver le
plus que je pourrai l'ef
prit de l'ouvrage & les
droits de l'Auteur , je
ne mettrai du mien que
quelques mots pour
cette liaiſon que je me
propofe; & je diftinguerai
même par la difference
des caracteres de
1 A iiij
8 MERCURE ,
l'impreffion , les morceaux
dont je n'aurai
rien retranché , d'avec
ceux dont j'aurai retranché
ou changé le
moindre mot .
Mon but principal ,
en effayant de cette nouvelle
methode , a eſté
d'épargner au Public
les
tranfitions ennuyeufes
, qui font inféparables
des meilleurs extraits
; on eft contraint
d'y repeter fans ceſſe :
I. PARTIE. 9
Icy Monfieur
un tel découvre
avec une vive
penetration
les caufes de
tels & tels effets... Là
des
l'Auteur prouvepar
raifonnemens
folides ,
par une érudition
` profonde
que... En cet endroit
Monfieur *** dépeint
avec les traits les
plus vifs de l'Eloquence
la plus parfaite , &c.
Par ces explications ,
on ne fait , pour ainfi
dire , que raconter un
10 MERCURE ,
ouvrage , & mettre en
récit , ce qui doit eſtre
en action 3 car , comme
on fçait , toute piece
d'Eloquence
a fon action
, & l'on ralentit
cette action en y mêlant
des digreffions
,
où l'on ne voit fouvent
que les loüanges de
l'ouvrage , & les décifions
de celui qui en fait
l'extrait ; le public eſt
un juge jaloux , on l'irrite
en prévenant fes
I. " PARTIE . 11
jugemens ; il ne veut
pas qu'on lui défigne ,
qu'on lui montre au
doigt les endroits qu'il
doit admirer ; faites lui
•
fentir les beautez de
l'ouvrage par l'ouvrage
méme , il fera content :
Et voila l'Eloge de
l'Auteur fait.
Toutes ces reflexions
me font conclure, qu'il
vaut peut- eftre encore
mieux alterer , & méme
défigurer un ouvra12
MERCURE ,
ge en l'abbregeant, que
d'en ôter la force par
des digreffions
.
Quoiqu'il en foit effayons
de cette forte de
compilation abbregée ,
fimple & fuivie ; fi elle
ne réuffit pas , nous en reviendrons
bien aux extraits
ordinaires , où je
me ferai toûjours honneur
d'imiter ceux qui
font excellens en ce
genre.
1. PARTIE. 13
EXTRAIT
Du Difcours de M. l'Abbé
d'Eftrées .
MESSIEURS ,
Rien ne m'ajamaisflatté da
vantage , que l'honneur d'avoir
étéadmis dans vôtre¦illuftreCorps,
je connois le prix
de ce bienfait , j'en ay la plus
vive reconnoiẞance , & je
me trouve heureux de ce
qu'un de mes premiers devoirs
, en qualité d'Academicien
, eft de la rendre pu
14 MERCURE ,
bl
que..... mais trouvez
bon que fans rien diminuer
de l'obligation
que
je vous ai je croye auffi
devoir vos fuffrages à l'eftime
dont vous honnorez
celui de qui je porte
le
nom : ce nom fe trouve à la
tefte de tous les vôtres par le
droit d'ancienneté dans les
Regiftres de l'Academie ,
ily eft avec des qualitez qui:
rendent à celle d'Academicien
le luftre qu'elles en reçoivent
elles-mêmes.
Je fuccede à un homme qui
ne pouvoit estre remplacé ,
I. PARTIE
c'est un de ceux qui
a donné le plus de droit à
nôtre fiecle de s'égaler à ce
beau fiecle fi fameux par la
polueffe , par le goût &…… ..
Il a fait fur cela des le
çons, les a faires en les
réduisant en pratique , c'est
par lui qu'on a vû renaître
dans la compofition ce goût
exquis , qui s'étoit prefque
perdu , il faloit inftruire ,
détromper , détruire les
jugez , rectifier les idées fur
le style , fur l'Eloquence ,
fur la Poëfie , donner des
précautions contre la contapre-
८
16 MERCURE ,
gion du faux bel efprit.....
faire goûter les beautez
du caractere naturel, T...
C'est le principal but que
Monfieur Defpreaux fepropola
, & ily reuſfit : il ôta
Le voile de dessus les yeux du
Public , qui commença à ſe
fçavoir mauvais gré d'avoir
fi Jouvent prodigué mal à
propos fes applaudiſſemens
de s'eftre laiffé ebloüir par
defauffes lueurs , & d'avoir
admiré l'esprit deftitué de
bon fens.
C'eſt ainfi , Meffieurs ,
que cet homme rare contribuoit
I. PARTIE .
17
tribuoit à l'execution de
vos deffeins , dont le fuccez
fait vôtre éloge.
Ecrire poliment , folidement
, avec netteté , & avec
precifion , ce n'est presque
plus une louange en France ;
cè talent émané de vous ,
`eft
& c'est devenu
commun
Meffieurs
, une diftinction
que vous avez
perdue
, à
force d'en faire
connoître
le
prix , C ...
Je ne fçai fi le grand
Cardinal , qui parmi tant
d'admirables projets , forma
celui de vôtre Acade-
1 B
18 MERCURE ,
mie ; eût jamais ofé s'en
promettre de fi grands
luccés : mais .
Il ne pouvoit gueres imaginer
un moyen plus propre
pour immortalifer fa memoi
re : les merveilles du regne
fous lequel nous vivons ont
prefque éface le fouvenir , ou
du moins l'éclat des grandes
chofes qu'il fit pendant Jon
miniftere: mais l'Academie
eft un monument fubſiſtant ,
qui s'embelit par lafuite des
années , dont le luftre a
toûjours cru depuis qu'il l'a
érigée.
I. PARTIE. 19
Le vafte genie de ce
grand Miniftre , & la profonde
capacité du Magif
teat illuftre qui luy fucceda
, feront également celebrez
dans les fiecles fuivans
.
Le nom du Chancelier Seguier
s'éternifera avec celuy
du Cardinal de Richelieu ;
ils vous en feront redevables
parla fidelitè que vous aurez
apayer le tribut qui leur eft
dû, comme aux reftaurateurs
aux protecteurs des Lettres
, ...
JeJuis aujourd'huy , Mef-
I
1 Bij
20 MERCURE ,
fieurs , l'organe de vôtre reconnoiẞance
: mais comment
que
exprimer
cetle
nous
devons
à un Prince. qui
a bien
voulu joindre au titre de
Roy, & au titre de Grand ,
que toute l'Europe luy donne
, celuy de Protecteur de
l'Academie Françoiſe ?
Quelle gloire pour vous : mais
quel embaras pour moy !
Ses vertus Royales font
un fond inépuisable d'éloges :
mais mon Zele eft refferré par
des bornes qui me defendent
de les developer..
fons donc tous ces prodiges de
...
Laif
I. PARTIE 2E
valeur, de magnanimité, de
Sageffe, &
Contentons-
nous d'envifager pour
un moment dans l'évenepar
le
ment funefte pour lequel
nous pleurons encore : D’une
part ,fa tendreffe paternelle
qui l'atache a un fils , dont il
ne peut eftre arraché
plus extrême danger de Sa
Perfonne; de l'autre, ceite
fermeté avec laquelle il foûtient
un fiterrible coup. Mefurons
celle cy par l'autre ,
reconnoiffons- en l'heroïfme.
•
Arrétons-nous icy , Mef22
MERCURE,
feurs. La douleur 世l'admiration
doivent nous tenir
dans le filence. Souhaitons
Jeulement au grand Monarque
une longue fuite d'années....
Attendons qu'une
heureuſe paix vienne nous
fournir une nouvelle matiere
pourfon éloge. 7 apprendrai
parmy vous à exprimer dignement
fur un fi noble fu
jet les fentimens de mon
coeur , & ceux des perfonnes
de ma famille , qu'il a comblez
de bienfaits d'honneurs
.
I. PARTIE. 23
EXTRAIT
De la Réponse que fit à
ce Dilcours Monfieur
4.
de Valincour , Secretaire
General de la Marine
, alors Chancelier
de l'Academie .
ONSIEUR ,
fait
Le confentement unanime
de vos fuffrages vous a
affez voir combien vous ef
tiez defire , & avec quel
plaifir l'Academie Françoiſe
va pour lafeconde fou écrire
24 MERCURE ,
dans fes fuftes , un nom dont
elle s'honore depuis tant d'années.
Quelles terres , quelles
mers , quelles guerres , quèlles
negociations ; & pour
parler de ce qui nous convientparticulierement
, quelles
Academies peut- on citer
aujourd'huy où l'on ne trouve
des traces de la gloire de
ce nom illuftre ? Quel amour
pour les Lettres dans tous ceux
qui le portent , & qu'ils ont
-çu joindre à tant d'actions
éclatantes , & à tant de fervices
onlus à l'Etat ?
QuelI.
PARTIE.
25
la
Quel exemple plus propre
à confondre également
groffierete barbare qui méprife
l'amour des Lettres ,
comme indigne des Grands
Hommes , la delicateße
oifive , qui n'y cherche qu'un
amufement frivole , où une
vaine reputation .
N'a-t on pas vû vôtre
illuftre pere donner encore
à la lecture des bons livres
, les plus doux momens
defon loifir , dans une vieil
leße echapée à tant de combats
qu'il avoit rendus funeſtes à
nos ennemis.... Fay vû ce
I C
26 MERCURE ,
#
Frere , qui vous est fi cher
adoucir les ennuis d'une longue
navigation , tantôt avec
ce Poëte qui fut l'amy de Scipion
, tantos avec celuy qui
fit les delices d' Augufte ...
à la veille d'un grand
combat étudier tranquillement
dans les Heros des tems .
paẞez des actions de conduide
valeur dont il al- te
loit lui-même donner de nou
veaux exemples.
Et quel honneur n'a point
fait aux Lettres ce grand
Cardinal, Doyen de l'Acas
demie , lorſque joignant à la
I. PARTIE .
27.
force d'un genie fuperieur ,
toutes les graces & toutes
les lumieres qu'on trouve
dans le commerce des Mufes,
il regnoit par la parole dans
toutes les Cours de l'Europe,
Maitre dans l'art de perſuader,
dont il pouvoit donner
des preceptes comme Ariftote
, des exemples comme
Demoftenes , il raffuroit nos
Alliez incertains , diffipoit :
les ligues de nos ennemis ,
faifoit ceder aux feules
forces de la raifon , ceux qui
étoient en état de réfifter i
aux plus puißantes armées.
1 C ij
28 MERCURE ,
ن م
Qui de nous en Le
voyant
aujourd'hui dans ce noble repos
aquis par tant de travaux
celebres , ne croit voir ce
Neftor d'Homere
, qui par
les charmes de fon éloquence,
par lafageffe de fes confeils
, avoit moderé fi longtemps
les paffions des Princes
des Republiques , & qui
avoit efté l'amy & le compagnon
fidele des Heros de
trois âges ?
âges, & dans quels fiecles
cet illustre Cardinal ne padans
quels
roift-ilpoint avoir vécu? ..
Puifque nous fommes pri…..
I. PARTIE. 29
vez du plaifir de le voir à
nos exercices , c'est à vous ,
Monfieur, d'en remplir la
place, auffi bien que celle de
T'excellent homme à qui vous
Juccedez; faites - nous part
de ces richeſſes qui vous font
naturelles , de celles que
vous avez acquifes par vos
-grands emplois dans les Pais
étrangers ; montrez- nous en
quoy la Langue Françoife
peut eftre comparable , ou
même préférée à tant d'autres
Langues qui vous font
fi familieres.
Que l'Academie , en
I C iij
30 MERCURE ,
vous voyant , croye voir
fon illuftre Doyen , & l'illuftre
confrere qu'elle a
perdu.
Je ne crains point , Meſfieurs
, que l'amitié me
rende fufpect fur le fujet
de MonfieurDES PREAUX ..
quel éloge en puis -je faire
que vous n'ayiez déja prévenu
? J'ofe attefter , Meffieurs
, le jugement que
tant de fois vous en avez
porté vous - mêmes , j'attefte
celui de tous les Peuples
de l'Europe.... L'approbation
univerſelle
I. PARTIE.
31
eft le plus grand éloge
les hommes puiffent
donner à un écrivain , &
en.même temps la marque
que la plus certaine de la
perfection des ouvrages ,
par quel heureux fecret
peut-on acquerir cette
approbation.... Monfieur
Defpreaux nous l'a appris
lui -même , c'eſt par l'amour
du vray.
En effet , ce n'eft que dans
le vrayfeulement que tous les
hommesfe réuniffent , differens
d'ailleurs dans leurs
moeurs , dans leurs préjugeZ,
i Ciiij
32 MERCURE ,
dans leur maniere de penser ,
d'écrire , dejuger de ceux
qui écrivent ; dés que le vray
paroît clairement àleursyeux,
il enleve toûjours leur confentement
leur admiration.
Monfieur Defpreaux
avoit puiſé dans la nature
même , ce Vray qu'on ne
peut voir qu'en elle , mais
qu'elle ne laiffe voir qu'à
fes favoris .
Mais c'eft en vain qu'un
auteur choifit le vray pour
modele , il eft toûjours fujet
à s'égarer , s'il ne prend
aufli la raifon pour guide :
I.
PARTIE. 33
elle apprit à Monfieur
Defpréaux à éviter les excez
de Juvenal & d'Horace
même, qui avoient attaqué
les vices de leur temps
avec des armes qui faifoient
rougir la vertu. Il
ofa le premier faire voir
aux hommes une fatyre
fage & modefte , & rendit
fa vie auffi pure que fes
écrits .
Incapable de déguisement
dans fes moeurs , comme d'affectation
dans fes ouvrages ,
il s'eft toûjours montré tel
qu'il eftoit , aimant mieux ,
34 MERCURE ,
difoit- il , laiffer voir de veritables
deffauts que de les
couvrir par de fauffes vertus.
*
Tout ce qui choquoit la
raiſon ou la verité , excitoit
I en luy - même un chagrin ,
dont il n'étoit pas le maistre,
& auquel peut eftre fommes
nous redevables de fes plus
ingenieufes compofitions : mais
en attaquant ce deffaut des
Ecrivains, il a toûjours épargné
leurs perfonnes.
Il croyoit permis à tout
homme qui fait parler au
écrire de cenfurer publiqueI.
PARTIE. 35
ment de mauvais livres :mais
il ne regardoit qu'avec borreur
ces dangereux ennemis
du genre humain , qui fans
refpectpour l'amitié, pour la
verité même, déchirent indifferemment
tout ce qui s'of
fre à leur imagination ,
qui du fonds des tenebres qui
les dérobent à la rigueur des
Loix,fe font un jeu cruel de
publier les fautes les plus ca
chées,&denoircir les actions
les plus innocentes.
M. Defpreaux s'animoit
fur tout contre ces genres
de poëfies , où la Religion
36 MERCURE ,
luy paroiffoit offenſée &...
Heureux d'avoir pu d'une
même main imprimer un
oprobre éternel à des ouvrages
fi contraires aux bonnes
maurs, & donner à la vertu,
en la perfonne de nôtre Augufte
Monarque , des louanges
qui neperirontjamais.
Souvenons nous que
"nôtre fiecle fera regardé
un jour du même point
d'éloignement
d'où nous
regardons maintenant celuy
d'Augufte...
*´¨On ne voit que foiblement
fa gloire dans les
I. PARTIE
37
arcs de triomphes , médail-
:.
les & autres monumens
que ce temps a détruits
ou alterez mais quand
on le contemple dans les
vers de Virgile & d'Hora
ce foûtenant luy ſeul tout
le poids des affaires du
monde , vainqueur de fes
ennemis , & toûjours pere
de fes fujets , baniffant le
vice par fes Loix , ſes Loix , enſeignant
la vertu par fes
exemples , &...
Alors les coeurs & les
efpritsſe réünißent pourfor
mer un nouveau concert de
38 MERCURE ,
louanges. On benit le Ciel
d'avoir donné aux hommes
unfi bon Maistre , & l'on
Jouhaite que tous ceux qui
viendront aprés luy puiffent
luy reßembler.
N'en doutons point, Monfieur,
tel & plus grand encore
la pofterité verra l'Augufte
Louis dans les ouvra
ges de M. Defpreaux , &
dans ceux de cette. illuftre
Compagnie.
Puiffe - t- il encore durant
nn grand nombre d'années
préparer aux fiecles à venir
de nouveaux sujets d'admira1.
PARTIE. 39
tion; puiße une longue &
heureuſe paix le mettre bientoft
en eftat de procurer à ſes
peuples un bonheur qui fait
le plus cher objet de fes defirs
qui fera la consommation
de fa gloire.
40 MERCURE ,
t
1
Il paroift depuis peu un Li¸ ‹
vre qui a pour titre , less
Regles de la Prononcia-
+ tion pour la Langue Françoife
, par M. B.
СЕ
E Livre eft tres
bon dans fon genre
& tres utiles on fçait
bien , dit l'Aureur , que
ce n'eft pas un grand
honneur ni un grand
merite de fçavoir bien
fa langue , & d'en prononI.
PARTIE. 41
noncer regulierement
tous les mots : mais
c'eſt un grand blâme
& une honte à un
honnéte homme de ne
le fçavoir pas ... Un mot
mal prononcé luy fait
quelquefois plus de tort
qu'un faux raiſonnement
, parce que tout
le monde eft choqué
d'une mauvaiſe prononciation
, & que peu de
gens ont l'efprit aſſez
jufte pour s'appercevoir
I D
42 MERCURE ,
de la fauffeté de certains
raifonnemens , &...
Ceux qui aiment à
voir un livre commencer
fimplement feront
contens du début de celuy-
cy: voicy comme il
commence. Il y a vingtquatre
lettres à l'Alphabet
. A bcdefg , & c.
Le début des Elemens
d'Euclides eft auffi fimple
que celuy-là , un &
un font deux , le tout
eft plus grand que flaa
I. PARTIE. 43
partie : C'eft pourtant
fur ces fondemens fi
fimples qu'on éleve
des fyftemes jufqu'aux
cieux pour meſurer le
cours des aftres, prédire
les éclipfes , & rendre
raiſon des phenomenes
les plus étonnans.
EXTRAIT
des proteftations des Electeurs
de Baviere & de Cologne.
L
'Electeur de Cologne
expoſe que
fon inten-
1 Dij
44 MERCURE ,
tion eftoit de demeurer
neutre durant la guerre
qu'il voyoit prefte à s'allumer
entre les Maiſons de
France &
d'Autriche pour
la
fucceffion d'Espagne. Il
devoit cette neutralité à
fon peuple , attendu la ſituation
de les états , qui les
expofoit aux premiers defordres
de la guerre fi le
Prince avoit pris un parti.
S. A. E. fit donc toutes les
démarches neceffaires durant
l'automne de 1701. à
Vienne & à la Haye , pour
obtenir cette neutralité , &
L. PARTIE.
45
Il les fit avec
d'autant plus
d'inftance , que la guerre
eftoit
deformais
certaine.
Dés le 7. du mois de Septembre
1701.
l'Empereur
Leopold , le Roy Guillaume
, & les Etats Generaux
avoient figné le traité fi
connu fous le nom de la
grande Alliance.Le traité ef
toit une ligue offenfive
contre les couronnes de
France &
d'Efpagne , par
laquelle
les Puiffances
contractantes
s'engagerent à
leur faire
conjointement
la
guerre
, fi dans fix mois el
46 MERCURE ,
les ne donnoient à ces Al
liez des fatisfactions & des
füretez telles que des Princes
qui ont les armes à la
main ne les donnent qu'aprés
pluſieurs campagnes
malheureuſes . Suivant tou-
-
tes les conftitutions de
l'Empire l'Electeur de Cologne
eftoit loüable de
prendre le parti de la neutralité.
Jufques au 27. Septembre
1702. la guerre que
l'Empereur a faite aux couronnes
n'a point eſté une
guerre de l'Empire. Ce ne
fut que le 27. Septembre
1. PARTIE.
1702. datte remarquable ,
que l'Empire declara par
un refultat des trois Colleges
qui compofent la
Diette , qu'il époufoit la
querelle de la Maiſon
d'Autriche, & qu'il entroit
en fon nom dans la guerre
qu'elle faifoit aux couronnes.
Neanmoins la neutralité
fut refufée à l'Electeur
de Cologne à Vienne dés
le mois d'Octobre 1701. &
la réponſe qu'on luy fit à la
Haye valoit un refus. Les
Hollandois dés le mois
d'Octobre 1701. commen48
MERCURE ;
cerent même à agir hoftis
lement fur le territoire de
Liege , dont il eſt Evêque
& Prince , en y élevant des
fortifications fans fon confentement.
Cet Electeur
qui n'avoit pas affez de
troupes pour maintenir ſa
neutralité contre de fi puiffans
voifins , & contre l'Electeur
Palatin , & d'autres
Princes leurs Alliez , appella
& reçut dans fes places
au mois de Novembre
1701. les troupes du cercle
de Bourgogne , aprés leur
avoir fait prêter ferment
de
I. PARTIE. 49
de ne rien attenter contre
l'Empire, & de fortir de fes
places dés qu'il lerequereroit.
Suivant les conftitu
tions de l'Empire , il eſt
permis aux états de l'Empire
d'appeller à leur fecours
les troupes des autres
états de l'Empire. Depuis
Charles-Quint le cercle
de Bourgogne eſt un
des états de l'Empire , &
les Empereurs de la Maifon
d'Auftriche ont appellé
à leur fecours , &
introduit fouvent dans
l'Empire les troupes de ce
+
I E
so MERCURE ,
cercle. L'Empereur publia
plufieurs mandemens contre
l'Electeur de Cologne
qui écrivit le 19. Mars 1702.
à l'Empereur une lettre
auffi forte que refpectueufe
défendre fa conpour
duite,dans laquelle on voit
que S. A. E. étoit prête d'écouter
la Diette , qui feule
étoit fon juge competant ,
avec toute forte de déference.
Neanmoins dés le
mois de May 1702. les Hollandois
& d'autres Princes
alliez de l'Empereur attaquerent
Kaifervvert , &
I. PARTIE.
SI
l'Electeur de Cologne eftoit
prefque dépouillé de
tous les états , pour n'avoir
pas voulu faire la
guerre conjointement a
vec l'Empereur , quand
l'Empire declara le 27.
Septembre 1702. que fes
Membres devoient prendre
part à cette guerre.
Les chofes en refterent
蒙
là durant la vie de l'Empereur
Leopold. L'Empereur
Joſeph , dans la pre.
miere année de fon regne
, publia une procla
mation dattée du 25. Avril
I1 Eij
$2
MERCURE
,
1706. par laquelle il mit
Son Alteffe Electorale au
ban de l'Empire , autant
qu'un Ecclefiaftique y
peut eftre mis. La protef
tation fait voir pleinement
l'iniquité & la nullité
de cette Sentence ,
rendue contre un Prince
qui n'eftoit pas coupable,
par un Tribunal incompetant
, puifque , fuivant
les conftitutions de l'Empire
, la Diete feule peut
connoiftre des caufes capitales
des Electeurs, Princes,
& autres états de l'EmI.
PARTIE.
53
.
pire. Son Alteffe Electorale
finit , en proteftant
de nullité contre l'élection
future d'un Empereur
, à laquelle on ne l'auroit
pas invitée , pour la
confervation de fes droits ,
& pour celle des droits de
fon Eglife.
fon
La proteftation de l'Electeur
de Baviere dattée
de Namur le 7. Juillet eft
beaucoup plus courte. Cet
Electeur expofe que
honneur & fes interêts ne
lui permettoient pas d'entrer
en guerre contre les
1 E iij
54 MERCURE ,
་
couronnes
, lorſque l'Empereur
commença
de fon
autorité privée en 1701. la
guerre qui dure encore ,
qu'il prit des mefures pour
demeurer
neutre
, & que
plufieurs eftats de l'Empire.
fe trouverent
dans les mêmes
fentimens
que lui . Il
concerta avec eux pour
empêcher que la Cour de
Vienne n'arrachât d'eux
une declaration forcée :
Mais cette Cour gagna la
plupart des états qui s'étoient
joints , ou qui devoient
fe joindre avec S. A.
I.
PARTIE
55
E. pour empêcher que
l'Empire ne fût oblige à
rentrer en guerre, &à rompre
la paix de Rifvvik fans
fujet en effet dés le mois
d'Avril 1702. il fe fit plufieurs
violences dans l'Empire
par les Alliez de l'Empereur,
qui forçoient ceux
qui témoignoient vouloir
demeurer neutres , à ſe défaire
de leurs troupes. Dés
le mois de Juillet l'Empereur,
à qui les conftitutions
de l'Empire défendent étroitement
d'attaquer jamais
directement ni indi56
MERCURE ,
rectement la couronne de
France fans le confente
ment des trois Colleges ,
commença lefiege deLandau
, de fa feule autorité.
L'Electeur de Baviere ne
pouvoit plus douter aprés
ce qui s'étoit paffé , qu'il ne
dût être attaqué inceffamment,
& le 8.Septemb.1702.
il jetta des troupes dans
Ulm & dans Meminguen
,
qui ouvrent l'entrée de fes
états , pour fe couvrir de
ces places durant le danger
, avec promeffe de les
évacuer dés qu'il feroit
I. PARTIE
57
paffé . La Diette ne declara
qu'il falloit faire la guerre
à la France que le 27. Septembre
1702. L'Electeur
de Baviere voulut demeurer
neutre: mais au mois de
Mars 1703.le Comte Schlik
entra hoftilement dans fes
états , & le mit en droit de
pourvoir par toutes fortes
de voyes à la jufte défenſe.
Le 26. d'Avril 1706. l'Empereur
Jofeph le mit au
ban de l'Empire par une
Sentence émanée fur des
procedures du Confeil Aulique
, qui n'eſt pas Juge
*
18 MERCURE ,
competant
en pareil cas.
Le pretexte de cette Sentence
eft l'infraction
de la
conftitution
de la paix publique
commiſe
par l'Eleteur
quand il occupaUlm
.
On appelle en Allemagne
conftitution
de la paix publique
l'Ordonnance
qui
fut publiée dans laDiete tenue
à Vorms
en 1495. fous
l'Empereur
Maximilien
I.
par laquelle il eft défendu
aux états de l'Empire d'ufer
d'hoftilitez
les uns envers
les autres dans leurs querelles
particulieres
: L'Ele1.
PARTIE. 59
cteur n'occupa Ulm que
pour ſegarantir des infultes
qui avoient été faites à
d'autres Princes depuis peu
de mois , parce qu'ils étoient
dans le même cas
que lui , avec promeffe de
l'évacuer dés que la bouraſque
feroit paffée.Toute occupation
de place n'eft pas
une infraction de la paix
publique , & depuis quatre
mois il s'en eft fait dans l'interieur
de l'Empire , qui
font plus odieufes que celle
d'Ulm , & qui n'ont pas attiré
le moindre mande60
MERCURE ,
ment , ni fait écrire aucune's
lettres avocatoires à l'Empereur
Jofeph . La plupart
des autres griefs rapportez
dans la Sentence de Ban ne
regardent pas l'Empire ,
mais l'Empereur comme
Archiduc d'Autriche.
L'Electeur proteſte contre
ce Ban injufte dans le
fonds & dans les formes
& contre ce qui s'eft paffe
depuis ; ainfi que contre
l'election
d'un Empereur
,
à laquelle il n'auroit point
été appellé , déclarant que
d'autres que lui feront coupables
I. PARTIE. 61
pables des malheurs qu'u
ne pareille élection , faite
contre les Loix , pourroit
attirer fur l'Allemagne.
L'hiftoire qui fuit ,
tirée d'anciens memoires
Eſpagnols, eft écrite
dans le gout de Zaïde ,
& de la Princeffe de
Cleves , genre d'écrire
excellent ; mais qui paroift
allongé & languiffant
à ceux qui ne veulent
dans une avanture
amoureuſe ni converfa-
I F
62 MERCURE ,
tions, ni ſentimens ; défaut
de gout , fondé fur
le défaut des moeurs
.
Nos jeunes gens feroient
ravis qu'on traitât
l'amour dans un livre
come ils le traitent
dans le monde ; ils voudroient
voir le dénouement
dés la feconde page
; ils ne veulent plus
que l'extrait d'une hiftoire
, parce qu'ils n'aiment
plus que l'extrait
d'une intrigue : tout ce
I. PARTIEM 63
qui doit intereffer les
ennuye , ils appellent!
romanefques , tous les
fentimens élevez & de
licats que produit la
belle nature ; extrémité
opofée à celle du temps
de Voiture , où l'on appelloit
beau naturel les
fpiritualitez quinteffenciées
d'Alcidalis & de
Zelide . L'hiſtoire fuivante
eftécrite auffi noblement
, mais plus naturellement
qu'on ne
64 MERCURE ;
l'eût écrite en ce temslà
, & j'ay crû faire
honneur, au noftre en
luy donnant une hiftoire
où l'amour eft traité
avec delicateffe . Puis
qu'on donnoit en ce
temps- là , pourra dire
quelqu'un dans cent
ans, un tel ouvrage dans
un Journal public , il
falloit donc qn'il y eût
encore un certain nombre
de gens à qui cette
maniere d'aimer fift
Plastif
LIO
¡ YON
VILLE
7293
SHO
THEAGE
LYON
TELA VILLE
IL PARTIE
D'U MERCURE. I
AMUSEMENTS,
Hiftoriette Espagnole.
Dans le
temps
que
l'Eſpagne
eftoit
divifce
en plufieurs
pays
dont
chacun
avoit
fonSouverain
, le Duc
d'Andalòùfie
eftoit
le plus
confide-
Juillet
1711 .
2 A
MERCURE
rable
d'entr'eux , foit par
l'eftenduë de fes Eftats ,
foit
par la fagefle avec
laquelle il les gouver
noit. Il eftoit l'arbitre
des autres Ducs fes voifins
, dans les differens
qui les defuniffoient
, &
ces raiſons luy attiroient
la veneration , & le refpect
de toute l'Eſpagne ;
le defir qu'avoient les
jeunes Princes de voir
un Souverain dont la reputation
faifoit tant de
IL 3 PARTIE.
bruit , & qu'on leur propofoit
fans ceffe comme
le plus excellent modelle
, les attiroit dans fa
Cour , mais les charmes
de Leonore fa fille les
retenoient : c'eftoit la
beauté la plus reguliere ,
& la plus touchante
qui euft jamais paru en
Efpagne , la beauté de
fon efprit , & l'excellen-
,
ce de fon coeur formoient
de concert avec
fes appas tout ce qu'on
Abij
4 MERCURE
peut imaginer de plus
parfait .
Les Princes qui ornoient
une Cour déja fi
brillante par l'esclat de
la Princeffe Leonore ,
joüiffoient d'un je ne
fcay quel charme ſecret,
que fa prefence faifoit
fentir , & que la renommée
n'avoit pas pû aſſez
publier : Ils l'aimoient ,
ils l'admiroient , mais le
refpect ne leur en permettoit
que les marII.
PARTI E.
ques qui efchapent neceffairement
à l'admiration
, & à l'amour . Le
feul Dom Juan fils du
Duc de Grenade ofa
bien toft reveler le ſecret
que tous les autres
cachoient avec tant de
foin. C'eftoit un Prince
trés - puiffant , & de
grands intereſts d'Eſtat
que le pere deLeonore &
le fien , avoient à demefler
, pouvoient faciliter
un mariage auquel fon
A iij 2
6 MERCURE
amour , & fa vanité le
faifoient aſpirer , enforte
que Dom Juan sûr de
l'approbation du Duc
d'Andaloufie , & contant
auffi fur fon merite declara
fon amour à Leonore
, avec une hardieffe
qui dominoit dans
fon caractere.
La Princeffe ne luy
refpondit point avec ces
vaines oftentations de
fierté ridicules fur tout
dans celles que l'amour
II. PARTIE.
n'a pas touchées ; mais
fon difcours portoit un
caractere de moderation
qui luy annonçoit une
longue indifference , il
ne reccut d'elle que
quelques marques de la
plus fimple eftime , fentiment
froid qui ne fait
qu'irriter les feux de l'amour
,Dom Juan euſt
mieuxaimé que Leonore
euft efclaté contre luy ,
l'indifference eft en effet
ce qui tourmente le
A iiij
8 MERCURE
plus un amant , elle luy
ofte le plaifir de l'efperance
auffi - bien que la
haine , & n'éteint pas
comme elle fa paffion .
Dom Juan parla fouvent
de fon amour à Leonore
, & il en receut toujoursles
mefmes refponfes
, rien ne put attendrir
pour, luy , ce coeur
dont l'amour refervoit
la conqueſte à un autre
, mais en perdant
Pefperance de toucher
II. PARTIE. ,
fon coeur , il ne renonça
pas à celle de la poffeder
, il agit auprés du
Duc plus vivement que
jamais , il efperoit que
Leonore aimeroit fon
époux par la mefme raifon
qu'il l'empefchoit
d'aimer fon amantil
preffa fi fort fon mariage
qu'en peu de temps
il fute conclu : quelle
fut la defolation de cette
Princeffe , elle n'eftoit
pas infenfible à l'amour,
10 MERCURE
le Prince deMurcie avoit
fceu lui plaire , mille
qualitez heroïques le
rendoient digne de fon
amour , elle l'aimoit
quel malheur d'eftre
deftinée à un autre . Cet
aimable Prince qui l'adocair,
n'avoit jamais o
fé luy parler de fon a
mour , & n'avoit auſſi
jamais reçu aucune marque
de celuy que Leo .
nore fentoit pour luy :
Il arrive à Seville où
II. PARTIE. 11
eftoit la Cour du Duc
d'Andaloufie. Le mariage
de Dom Juan fut la
premiere nouvelle qu'-
apprit l'amoureux Prince
de Murcie, il fut frappé
comme d'un coup de
foudre. Il crut avoir
tout perdu , ainfi il ne
menagea plus rien` , &
fans rendre
fes premiers
devoirs
au Duc , il
court chez Leonore dans
l'eftat le plus violent qu’-
un amant puiffe éprou12
MERCURE
ver : Il est donc vray ,
Madame, luy dit-il, que
vous épouse Dom Juan,
l'heureux DomJuan va
vous poffeder. Toute la
Cour qui retentit de fa
gloire & de fon konkeur,
il
m'annonce le feul malkeur
quiput m'accabler :
car enfin , Madame ,
n'eft plus temps de vous
cacher mes fentiments , il
faut maintenant qu'ils cclatent
, je vous aimay
dez que vous paruftes à
II. PARTIE. 13
l'amour ne
j
mes
yeux ,
peut plus fe taire quand
il eft reduit
au defefpoir
Dom
Juan
fera l'epoux
de Leonore
ceffe
Ah Prinquelle
reffource
pour moy dans un pareil
malheur , Eh ! quel
autreparty puis- je prendre
que celuy de mourir
: ce difcours du Prince
furprit Leonore : il
luy donna encore plus
de joye , le refpect du
Prince avoit jufques- là fi
14 MERCURE
bien caché fon amour
qu'elle n'avoit pas meſme
peu le foupçonner ,
quel charme pour elle
de fe voir fi tendrement
aimée dun Prince qu'-
elle aimoit.
Leonore dont le coeur
eftoit grand & incapable
des petiteſſes de la
feinte & du déguiſement
fe livra toute entiere au
premier mouvement de
fa generofité , Prince ,
dit elle , loin que voftre
11. PAR TIE. is
amour m'offense , je ne
fais point difficulté de
vour dire que j'y
refponds
par tout celuy dont je
Juis capables ouy, Prince,
je vous aime, & fi j epoufois
Dom Juan je Jerois
?
encore plus à plaindre
que vous maintenant
que je connois voftre amour
, & que vous fçavezle
mien nos malheurs
ne feront pas fi
grands , la poßeffion
de
voftre coeur va me faire
16 MERCURE
à un
Surmonter les plus rudes
difgraces , & l'aveu que
je vous fais de mon amour
vous refponds que
je ne feray point
autre que vous.
Cet aveu paroîtra fans
doute bien promt à ceux
qui croyent que l'amour
eft toujours une foibleffe
, il feroit condamnable
en effet dans une
amante ordinaire , mais
l'amour heroïque plus
independant
ſe preſcrit
à
II. PARTIE. 17
a
à luy mefme fes regles ,
fans violer jamais celles
de la vertu .
On peut juger combien
le Prince fut fenfible
à un aveu dont il
n'auroit jamais ofé ſe
a
flater , fa joye plus vive,
& plus forte que celle
que l'amour content
infpire d'ordinaire , ne ſe
monftra que par des
tranſports , il luy prouvoit
par le filence le plus
paffionné que fon bon-
Juillet 1711.
2 B
18 MERCURE
heur épuifoit toute fa
fenfibilité , tandis que la
Princeffe , oubliant le
danger d'eftre furpriſe ,
s'abandonnoit au plaifir
de le voir fi tendre . Il
reprit l'ufage de la parole
que fa joye extrémeluy
avoit ofté : Eſt-il
poffible , ma Princeffe !
que vous soyez fenfible
à mon amour , n'eftoitce
pas affez que la pitié
vous intereffaft dans mes
malheurs Je comptois
II. PARTIE 1
fur la gloire de vous admirer,
& de vous aimer
plus que tout le monde
enfemble , mais pouvoisje
me flater du bonheur
de vous plaire:Soyez sûr,
dit Leonore , de la fincerité
de més
fentiments :
la vertu n'a pas moins
de part à l'aveu que je
vous en fais que mon amour
: ouy , Prince , c'est
cette vertu fi fenfible à
la vostre qui vous afait
l'aveu que mon amour ,
Bij
20 MERCURE
tout violent qu'il eft , ne
m'auroitjamais contraint
à vous faire d'eft
cette vertu qui me fait
foubaitter defire plus dide
vous mais belas !
que le plaifir d'un entretien
fi tendre va nous
gne
coufter cher, noftre amour
eft trop violent pour ne
pas éclater , on le remarquera
, Prince, & l'on
va nousfeparerpour tousjours.
Aprés une converſaII.
PARTIE. 21
1
"
tion telle que fe l'a
peuvent
imaginer ceux qui
ont reffenti en mefme
temps l'amour , la joye
& la crainte. Le Prince
de Murcie fe fepara de
fa chere Leonore , de
peur de trahir par un
trop long entretien le miftere
fi neceffaire à leur
amour : iballa rendre fes
dévoirs au Duc d'Andaloufic
, qui luy confirma
le mariage de Leonore
avec Dom Juan'; fa vi22
MERCURE
fite fut courte, il n'aimoit
pas affez Dom Juan pour
s entretenir fi long- tems
de fon bonheur : la tefolution
du Duc L'allarmoit
extremement , il
prévoyoit des éclats que
fon amour pour Leonore
luy faifoit craindre
plus que la mort. Agité
de foins & d'inquietudes
il va chercher la folitude
pour y réver aux
moyens de détourner le
malheur qui le mena-
है
II. PARTIE.
23
çoit ; il y trouva juftement
Dom Juan qui fe
promenoit feul dans les
jardins du Palais : quelle
rencontre que celle
d'un Rival qui rendoit
malheureux l'objet de
fon amour. Si le Prince
euft fuivi les mouve
ments de fa colere , il au
roit fans doute terminé
fur le champ leur que
relle : mais il importoit
au Prince de diffimuler
plus que jamais ; il abor→
24 MERCURE
da Don Juan avec cet
air d'enjouement , & de
politeffe qui luy eſtoir
particulier , & luy parla
en ces termes : Je ne
m'attendois pas , Prince,
de vous trouver enfoveli
dans une profonde reverie
lorfque toute cette
Cour ne s'occupe , & ne
s'entretient que de voftre
bonheur , le Duc d' Andaloufie
vient de vous
rendre le Prince d'Efpagne
le plus heureux ,
vous
II. PARTIE.
25
vou's fuyez tout le monde
qui applaudit à fon
choix. Eft -ce ainfi que
vous recevez la plus
grandefaveur que puiffe
vous faire la fortune ?
Prince , refpondit Dom
Juan , loin d'eftre infenfible
au bonheur
·que
le
choix du Duc me procure
, c'est peut - eftre afin
de le mieux
goufter que
je cherche la folitude :
pour y estre auffifenfible
que je le dois , je n'ay be
Fuillet 1711. 2 C
26 MERCURE
foin que de mon propre
coeur , & je le poffede
mieux icy qu'au milieu
d'unefoule de courtisans,
dont quelques - uns peut-..
eftre donneroient des applaudiffements
force à
un Prince dont ils envient
le bonheur.
Quoy qu'il enfoit , reprit
le Prince , vofire
froideur m'eftonne : vous
eftes trop heureux pour
vous renfermer dans les
bornes d'une joye fi moII.
PARTIE. 27
derée. Eh! qui eutjamais
tant de fujets de joye ?
Vous allez poffeder Leonore
, & vous poffedeZ
apparemment fon coeur ,
car Dom Juan , delicat
5genereux comme je le
connois , ne voudroit point
faire fon bonheur aux dépens
de celle qu'il aime
'il n'auroit point accepté
Les offres du perefans eftre
feur du coeur dela fille.
Leonore, refpondit Dom
Juan , n'a point flatté
Cij
28 MERCURE '
mon amour, & fi j'etois
d'humeur
à
m'inquieter
,
je trouverois peut - eftre ,
qu'elle eft fans inclination
pour moy : mais enfin
je rapporte la froideur
dont elle a payé mesfeux,
à fon indifference naturelle:
l'amour mutuel ri'eft
pas neceffaire dans de
pareils mariages , les raifons
d'Eftat , & les interefts
de famille en déci
dent ordinairement ; &
lorfque j'accepte l'horII.
PARTIE. 29
neur que le Duc veut me
faire , fa vertu me refpond
qu'elle n'a point
d'antipathiepour l'époux
que fon pere luy deftine ,
ni
d'inclination
pour ceux
que le choix du Duc naw
thorife pas à luy marquer
de l'amour. Permettezmoy,
Seigneur , repliqua
le Prince , de douter de
la fincerité de vos difcours
pour estimer encore
vos fentimens , oui , puifque
vous voulez estre
G iij
30 MERCURE
Efpoux de Leonore ,
vous eftes feur de fon
coeur mais fans doute
vous voulezjouirfeul de
vosplaifirs. Je vous laiffe
en liberté.
Si le Prince quitta
brusquementDomJuan ,
c'eftoit moins pour luy
plaire , que parce qu'il
craignoit de ne pouvoir
pas affez retenir la colere.
Il eftoit en effet bien
dangereux qu'elle n'éclataft
à la veuë d'un
II. PARTIE . 31
Rival qui offenfoit également
fa delicateffe &
La paflion.
Le Prince courut rendre
compte à ſa chere
Princeffe de ce qui s'eftoit
paffé entreDomJuan
& luy mais bientoft
les inquietudes le réprirent
quand Leonore luy
dit
le Duc fon pere
que
vouloit
abfolument achever
ce fatal mariage,
qu'elle en auroit efperé
plus de condefcendan-
C iiij
32
MERCURE
1
ce , mais qu'il paroiffoit
inflexible & qu'elle
craignoit bien que rien
و
ne peut changer fa refolution..
Fors que
Ce
fut
pour
le
Prince
fe
trouva
cruellement
agité
: Que
de
malheurs
, luy
dit-il ,
je
vais
vous
fufciter
!
quelles
violences
ne
va
point
vous
faire
le Duc
?
quelles
perfecutions
de la
part
de Dom
Juan
? mais
en
vain
cet
indigne
Ri
1
IL PARTIE. 33
val ventforcer vostre inclination,
appuyé duchoix
de voftre Pere , mön amour
mon courage ,
plus forts que leurs interefts
, & leurs refolutions
vaincroient des obftacles
mille fois encore plus
grands vous m'aimek
, je ne feray jamais
malheureux , Dom
Juan nefera jamais vo-
Are Epoux je cours le
punir. & vous venger.
Ah Prince ! dit Leono
34 MERCURE
t
le
re , qu'alleZ- vous faire ?
je ne crains point que
bruit d'un combat puiffe
ternir ma gloire , mais
que deviendrois - je s'il
vous eftoit funefte ? la
fortune n'eft pas tousjours
du party
Prince , au nom de cet
amour , n'expoſe point
une vie à laquelle s'atta
che la mienne : contentevous
du ferment que je
fais de n'eftre jamais
qu'à vous.
de Famour.
11. PARTIE . 35
Quel coeur ne feroit
pas fenfible à tant de tendreffe
mais qui pourroit
l'eftre autant que le
fut ce Prince le plus delicat
, & le plus tendre
de tous les amans : on
peut croire que ſes tranſports
éclatoient fur fon
viſage , & ce fut en effet
ce qui trahit le miſtere
de ces amans . Dom Juan
venoit vifiter Leonore ,
il entroit dans ſon appartement
, dans les mo
36 MERCURE
mens les plus vifs , &
les plus heureux où le
Prince fe fuft encore
trouvé ; il foupçonna
d'abord fon malheur, &
la Princeffe qui craignoit
de fe trahir elle- mefme ,
aprés quelques difcours
de civilité feignit une
affaire , & fe retira dans
fon cabinet. Pour lors
Dom Juan qui n'avoit
d'abord ofé produire ſes
foupçons , ne menagea
plus rien , ces deux Ri+
II. PARTIE.
vaux quitterent l'appartement
de la Princeffe ,
& fansfe donner rendezvous
que par des regards
, ils fe trouverent
enfin feuls dans une allée
extrememeut éloignée
du Palais , & Dom
Juan parla ainfi le premier
Si favois fcen
Prince , que vous estic
feul avec Leonore , je
Z
n'aurois eu garde de trou
bler voftre entretien , il
a
vous faifoit plaifir à l'un
38 MERCURE
à l'autre , où toutes les
marquesfur lesquelles on
enpeut jugerfont équivo
ques : je me fuis pour lors
fouvenu des maximes genereuses
que vous voulieZ
tantoft m'inspirer, j'en
ay reconnen la fageffe
auffi-toft que le principe.
Seigneur , refpondit le
Prince , quand on est né
genereux onn'ignorepoint
ces maximes , un amant
delicat fe croit indigne
d'épouser fa maiftreffe
II. PARTIE . 39
quand il ne s'enfait pas
aimer, l'époufer fans luy
plaire c'eft luy ofter la
liberté de concert avec
ceux qui ont droit de dif.
pofer d'elle , & pour
moy..
Pour
vous
repliqua Dom Juan
vous accepterie le choix
de fon Pere s'il eftoit
en voftre faveurs fans
craindre d'opprimer
fa
liberté , & vous feriez
un ufage plus agreable
de la delicateffe
de
40 MERCURE
י
vos fentiments : je n'en
produirois pas du moins ,
reprit le Prince avec émotion
, d'indignes &
delle & de moy. Feferay
bientoft voir, reprit fierement
Dom Juan , que
ce n'eft pas eftre indigne.
du bien auquel on afpire,
que de faire des envieux.
A ces mots le Prince fentit
redoubler fa colere :
Un amant , luy dit-il ,
qui ne trouve que de l'indifference
dans l'objet
qu'il
II. PARTIE. 41
He!
?
qu'u aime, fait d'ordinai
re peu d'envieux. Je fuis
furpris, reprit Dom Juan,
de l'audace avec laquel
le vous ofez m'infulter
.
que pretende - vous
fur Leonore pour en foutenirles
droits : je pretends
les luy conferver , dit le
Prince , & fçavoir fi
Dom Juan aura le cou
rage de les détruire. Aces
il tire fon épée , &
Dom Juan ſe met en devoir
de fe deffendre..
Fuillet 1711. 2 D
mots ',
1
42 MERCURE
A voir leur mutuelle
fureur on auroit deviné
fans peine l'importance
du fujet qui les animoit:
ces fiers Rivaux , qu'un
grand courage & de
puiffants motifs rendoient
prefqu'invincibles
, combattirent longtemps
à égal avantage :
mais enfin la force &
Fadreſſe du Prince prévalurent
; il defarma
Dom Juan , qui fans avoir
receu aucune blefII.
PARTIE.. 43
feure,fe trouva à la merci
de fon vainqueur .
Alors le Prince , loin d'abufer
de fa victoire , fentit
mourir toute fa haine,
il ne put s'empefcher de
plaindre le trifte eftat
d'un malheureux . Dom
Juan eftoit en effet digne
de fa pitié : il fe
monftroit à la verité peu
genereux en pourfuivant
des prétentions que
Finclination de Leonore
a'authorifoit pas , mais
2
Dij
44 MERCURE
r
il
dementoit fa
generofi
té pour la premiere
fois ,
& jufque là le Prince
l'avoit trouvé digne de
fon eftime. Il ne voulut.
point auffi luy donner la
mort : Dom Juan , luy
dit ce genereux
Rival
renonce
à lapoffeffion
de
Leonore, & vive . Non,
non , refpondit
Juan , termine
ma vie,
ou laiffeX-moy lefperance
depoffederle feulbien qui
me la fait aimer. Vous
Dom
IL PARTIE. 45
voulez donc mourir , re
prit le Prince ? Ouy , dit
Dom Juan , Eh ! quefcrois
- je d'une vie qui ne
feroit pas confacrée à Leonore
; ah ! je feray trop
heureux de luy donner
cette preuve de ma conf
tance,ouije veux mourir.
Non , dit le Prince , que:
ce difcours avoit attendri
, non vous ne mourrez
point , deuffai -je vivre.
tousjours malheureux , je
respecte dans coeur la
46 MERCURE
mour queLeonore y a fait
naifre : Vive Dom
Juan , vivek, & qu'on
ne puiffe jamais dire que
vous moure pour avoir
aimé cette divine Princeffe.
En mefme temps:
il luy rendit fon épée ,
preft à recommencer le
combat. Mais DomJuan
charmé de la generofité
du Prince , fentit tout à
coup changer fon coeur ,
il fut quelque temps incapable
de prendre une
IL PARTIE . 47
reſolution , & mefme de
prononcer une parole :
enfin plus vaincu par la
Comme
generofitédu Prince que
par fes armes
s'il fut tout à coup de
venu un autre homme
il parla ainſi à ſon Rival.
Au moment que vous me
rendeeZ la vie , je comprends
que je meritois la
mort E je vais vous:
donner la plus grande
ve de mareconnoif
marque
fance : vous aimezfans
48 MERCURE
doute Leonore , & vous
eftes trop aimable pour
n'en eftre pas aime , je
vous cede , Prince , tou
tes mes prétentions , puiffiez-
vous vivre tousjours
heureux amant de Leonore
: pour moy je vais la
fuirpourjamais, &5 mettre
toute magloire à éteindre
une paffion qui offenfe
les plus illuftres amans
du monde confervek
,
Prince , voftre amitié que
vous venez de me rendre
fi
II. PARTIE.
fepretieuse , & accomplir
tous nos fouhaits. On ne
peut exprimer la joye ,
& la ,furpriſe du Prince ,
A
il n'auroit pas cru que la
generofité cuft tant de
pouvoir für le coeur de
Dom Juan , & fa refolution
luy paroiffoit fi
grande , qu'à peine pouvoit-
il fuffire à l'admirer
; il le tint longtemps
entre fes bras , arrofant
fon vifage de fes larmes .
C'eftoit un fpectacle
Juillet 1711 .
2 E
50 MERCURE
bien touchant que ces
fiers rivaux devenus tour
d'un coup fi tendres. Ce
Prince déploroit la fatalité
des conjonctures qui
forçoient Dom Juan sà
luy faire un fi violent fa
crifice ,
pendant que
Dom Juan croyoit faire
encore trop peu pourfon
illuftre amy . Leur genereufe
amitié fit entre eux
un fecond combat, auſſi
charmant que le premier
avoit efté terrible.rund
II. PARTIE st
25 Ils fe jurerent une éternelle
amitié , & fe dirent
enfin Adieu. Dom
Juan ne voulut point re
tourner fitoft dans fes Etats,
craignant les efclairciffemens
que le Duc de
Grenade fon pere auroit
exigé fur fon retour imprevû.
Il refolut d'aller
voyager dans toute l'Ef
pagne. Il ne crut pouyoir
mieux accomplir fa
promeffe , que par des
courfes continuelles , où
E ij
32 MERCURE
la multiplicité des diffe
rens objets qui s'offrent
aux Voyageurs
, pouvoit
le diftrairen, & chaffer
fes premieres impreft
fiops Cependant le Prins
ce qui avoit tant de fu
jets d'eftre scontent de
Famour , & de la fortub
ne , prévoyant de terri
bles efclats qu'il croyois
devoir efpargners auda
vertu de Leonore, eftoit
accablé de douleur . Il fe
reprochoit d'avoir plus
II. PARTIE. $1
écouté les intereſts de
fon amour que peux de
fa Princeffe . Il craignoit
de s'eftre rendu tout- à
faitindigne delle. Aprés
avoural hefité berquelque
temps entre cette crainte
& le defir de luy appren
dre fa deftinée , ce dernier
fentiment l'empor
tag & là il confia à fon
Ecuyer unes Lettre qui
apprit bientoft à la Princelle
comment le Prince
L'avoit delivrée des im
a
E iij
34 MERCURE
portunes pourfuites
de
Dom Juan. Si elle reçut
avec plaifir la nouvelle
de la victoire du Prin
ce : elle fat encore plus
charmée de la delicateffe
de fes fentimens
. Quoy ,
difoit elle , le Prince eft
victorieux dans un combar
qui décide de fon bonheur
, cependant crap
gnant de s'eftre rendu in
digne de mon amour par
l'excez du fien. Il we
peut gonfler en liberté la
II. PARTIE
jaye la plus grande qu'il
fost capable de reffentir ;
non,
Princetropgenereux
,
ne crais point la colere
de Leonore : je n'enviſage
dans ce combat que le
peril où tu t'expofois pour
empeſcherqueje ne fuffe
a un autre qu'à toy.
C'eſt ainſi que cette
genereufe Princeffe infenfible
à des revers que
de Prince craignoit pour
elle , donnoit au fort de
fon Amant , une joye
E
iiij
36 MERCURI
laquelle il s'eftoit luy
mefme refuféstilomais
comme fi elle n'euft på
goufter fon bonheur
t fans l'y rendre fenfible,
elle voulut par une lettre
qu'elle luy écrivit luy
rendre toute fa tranqui
lité. L'affeurance d'eftre
aimé de Leonore eftoit
bien heceffaire au Prince
pour luy faire fupporter
fon abſence : ell alloit
eftre éloigné d'elle fans
fçavoir quand il la re
2:
TI. PARTIE W
verroit. Il s'éloigna pn
finirelifant mille fois la
lettre de Leonore & fe
retira à deux lieues de Seville,
dans un lieu qu'elle
avoit autrefois habité, où
il s'occupa uniquement
du plaifir d'eftre aimé
d'elle , & de la douleur
d'ens eftre féparé Leo
nore de fon coftén'avoit
gueres d'autre occupat
tion , les mefmes fentimens
leur donnoient les
meſmes peines , & des
8 MERCURE
mefmes plaifirs. 609
Un temps confidera
ble fe paffa , fans que ces
deux Amans puffent ny
s'entretenir , ny s'écrire :
& Leonore qui n'avoit
de plaifir qu'en penfant
au Prince, en eftoit pour
comble de malheurs diftraite
par les foupçon's
de fon pere qui croyoit
que les froideurs de få
fille avoient éloigné
Dom Juan. Enfin le tumulte
d'une Couroù
II. PAR TIE.
l'on ne s'entretenoit que
de Dom Juan, luy devint
tout- à -fait infuportable i
elle pria le Duc fon pere
de luy permettre de quit
ter Séville pour quelque
temps , fous prétexte de
rétablir
fafanté , que
Tabfence de fon cher
Amant avoit extrême
ment alterée : elle choifit
Saratra Maifon de plaifance
à deux lieues de
Seville où elle avoit paffé
une partie de fon en
60 MERCURE
fance, elle alloit tous les
foirs le promener dans
un bois épais , où ella
eftoit feure de trouver le
filence, & la liberté: Un
jour fans s'eftre cappers
çue de la longueur du urdu
chemin , elle fe trouva
plus loin qu'à l'ordinaire
du Chafteau de Saratrap
elle s'affit , & fit affeoir
auprés d'elle Ilabelle
l'une de fes Filles qu'elle
aimoit plus que les quel
trés, & qui ne la quittain
II. PARTIE.
prefque jamais ,elle tom
basdans une fi profonde
refverie qu'Ifabelle ne
put s'empefcher de luy
en demander le fujet, &
pour lors , foit que fon
arhours fortifié par un
trop dong filence ne puft
plus fer contenir foit
quilfabelle méritaft cet
te marquè de ſa confian³
ce , Leonore luy ouvrit
fon coeur , & par le recit
le plus touchant luy ap
prit tout le mystere qui
62 MERCURE
eftoit rentre elles, & lex
Prince.Tov veel ob
Ifabelle eftoit , fans
doute , attendrie à la
peinture d'un fi parfait
amour ; mais elle fe crut
obligée d'exhorter Lea
nore à bannir le Prince
de fon coeur : elle luy
reprefenta refpectueufe
ment tous les égards
qu'exige des perfonnes
de fon rang , le public à
qui elles doivent , pour
ainsi dire, rendre compte
IL PARTIE.
de leurs fentiments &
de leur vertu . Abima
chere Ifabelle, reprit Leonore,
des que je connus le
Prince, je perdis la liberté
de faire toutes ces refle
xions , ma raiſon qui en
fit beaucoup en fafaveur
n'enfit aucunes contre lui.
Je l'aime enfin , & je
crois , par mon amour,
eftre au-deffus de celles
quin'ont pas le coeur affez
vertueux pour l'aimer, ce
m'est point parce qu'il eft
છ
64 MERCURE
mieuxfait que les autres
hommes , niparce qu'il a
plus d'efprit. C'eft , ma
chere Ifabelle, le caractere
de fon coeur que j'eftime.
en lui , c'est fon amour
genereux , delicat , defin
tereffé , respectueux. J'ai
cruc cet amour inte-.
·
que
reffoit ma generofité à le
payer par tout celui dont
je fuis capable : plus attentif
a ma gloire que
mor mefme & indiffe
rent für fa felicité parti
Belcsculiere
,
E5
II PARTIE 63
culiere , tout ce qui n'a
point de rapport au bonbeur
de mon amour, ou à
Peclat de ma vèrtu , ne
peut l'intereffer, pouvoisje
connoiftre tant de mesite
, 5 ne pas l'estimers
pouvois-je fentir le prix
d'un fi parfait amour, 5
ne pas l'aimer? Auffi,
ma chere Ifabelle,lapaf
fion que j'aipour lui n'eft
point de celles qu'on voit
diminuer par labfence.
Ab! pourquoifaut-il que
Juillet 1711.
&
2 F
** MERCURE
jefois condamnee à ne le
plus voir,peut- eftre doute
til de ma conftance
, peut
eftre il craint que que mon
amour ne s'affoibliffe
.
A peine eut-elle achevé
ces derniers mots, que
le Prince fortit du bois
tout tranſporté , & ſé
jettant à fes pieds , sé
cria: Abl ma Princeffe
,
ya-t'il un homme auffi
beureuxque moi , p
ce que je vous rends un
bommage que tout l'uni
par
11. PARTIE 67
vers feroit force de vous
rendre faut-ilque jefon
plus heureux que tout
[ Univers ensemble.
Quelle furprife, quel
le joye , quels tranfports
ne firent point éclater
ces tendres Amans: cette
reunion impréveuë produiſit
entre eux un long
filence qui peignoit
mieux leur ſenſibilité
que tous les difcours.
Cette fituation avoit
fans doute , des grandes
Fij
* MERCURE
douceurs , mais l'amour
fecond en plaifus eff
trouve dans les difcours
paffionnez quanduil va
épuifé ceux du ſilence
ce fut alors que ne pous
vant affez le regarder,ils
ne parent fe laffer de
s'entendre.10 2400?
Que fai de plaifir à
vous retrouver,cherPrin
ce , dit tendrement Leonore
, mais que ce plaifir
fera court ,peut-eftre nous
ne nous verrons plus :
IL PARTIE.
nous ne nous verronsplus
ma Princeſſe répondit,
il ab crose que toutes
lesfois que la gloire, onla
felicite de Leonore exige
ront que je paroiffe a fes
geux , rien n'eft capable
de m'en empeſcher, Je
vous verrai, charmante
Princeffe , malgré tous ces
perils , mais que tous ces
perils , que tous ces mal
beurs ne foient que pour
moi feul, j'aurai laforce
de lesfupporter, puifque
* MERCURE
vous m'aimez sand
Jen'entreprends
point
des peindre ici la dous
ceur de leur entretiens
chacun en peut juger
par la propre experience
à proportion des fentiments
dont il eft capas
ble. Il fuffira de dire que
ces plaifirs n'ont point
de bornes dans les coeurs
de ceux qui n'en met
tent point à leur amour.
Chaque jour Leonoré
revit fon Amant , & ce
IL PARTIE or
furent chaque jour de
nouveaux plaifirst Ils
eftoient trop heureux ,
pour que leur bonheur
fut de longue durée , la
fortune leur donna bientoft
d'autres foins , Leo
nore receut ordrende
quitter Saratra , & de
retourner promptement
à Seville. D'abord elle
foupçonna quelque tra
hifon de la part de fes
domeſtiques , & fit fça»
voir aut Prince Fordre
71 MERCURE
cruel qui les féparoit , en
de priant de s'éloigner
inceffamment d'un lieu
où il avoit , fans doute ,
efté découvert.cloud
Les foupçons de Leonore
ne fe trouverent
que trop bien fondez ,
le Duc avoit appris par
un domestique de Leo
nore , qui eftoit depuis
long - temps dans les
interefts de Dom Juan
ce qui fè paffoit entre
elle & le Prince !
11
H. PARTIE.
73
H rappella la Princeffe ,
qui croyant fa paſſion
trop belle pour la defavouer
, ne luy en fit plus
un myftere , non plus
que du combat entre les
deux Princes . La fincerité
de Leonore ne fit
qu'exciter la colere du
Duc , il luy ordonna de
fe preparer à un plus
grand voyage , & afin
qu'elle puft oublier le
Prince , ce pere inflexible
refolut de mettre la
Fuillet 1711.
G
74 MERCURE
mer entre ces deux amants
, & emmena Leonore
dans l'Ile de Gades.
Ce depart fut fi fecret
& fi precipité , que Leonore
ne put en informer
le Prince ; il apprit bien
toft qu'elle n'eftoit plus
à Seville , mais avant
qu'il puft apprendre où
fon pere l'avoit releguće,
il fut long-temps livré à
la plus cruelle douleur
qu'une pareille feparation
ait jamais fait fouffrir.
II. PARTIE. 75
Cette
feparation qui
doit
commencer à interes
fer le Lecteur , va produire
une fuite d'évenemensfinguliers
5 interef
fants , dont on vous don
nera une partie dans le
mois prochain,
dans le mois furvant.
L'impoffibilité de mettre
le refte
dans un feul Mercure
une longue hiftoirefait icy
par neceffité une interrup
tion & une fufpenfion de
curiofité pareille a celles
2 Gij
76 MERCURE
qu'on menageoit exprés
avec art dans nos plus
beaux Romans, aprés
tout il n'y a pas fi loin
dun Mercure à l'autre
2
a
qu'il y avoit du premier
Tome au douliéme dans
les Romans de la Calprenelle
, dont on n'avoit
quelquefois la fuite
qu'au bout de plufieurs
années. Il est vray que·
nos Lecteursfont plus impatiens
que ceux de ce
temps-là , & moins cuII.
PARTIE. 77
rieux d'avantures ferieufes
maispourles dedom
mager d'avoir attendu la
fuite de cette Hiftoire , on
y joindra chaque mois
quelque petite Hiftoriette
comique , qui fera felon
Fufage du Theatre , la
farce aprés la piece ferieufe.
G iij
78 MERCURE
ARTICLE
des Anonymes
.
L'Anonyme plagiaire
de Thouloule.
Je vous pille vous- mesme
, Seigneur Mercure
pour fatisfaire aux peti
tes tafches que vous impoſe
au public , je veux
dire que je refponds à vofire
in vino veritas par
quatre Vers que je crois
de
vous.
II.
PARTIE. 79
In vino finceritas
Le plus fourbe en beuvant
devenu plus fincere ,
Dit tout ce qu'il a fait &
tout ce qu'il veut faire ,
Son coeur nage dans le
verre .
In vino finceritas.
Soyezfincere auffifans
avoir bu , j'ay pris cecy
dans un petit Livre inti
tulé Le Puits de la Veritésce
Livre n'eft-il pas de
Vous
2. G iiij
80 MERCURE
Reſponſe.
Non, Seigneur anoni
me , non. Le Puits de la
Verité n'eſt point de
moy , j'aimerois mieux
qu'on me derobaft tous
mes ouvrages , que d'en
avoir un fur la confcience
qui ne m'appartint
pas : Le Puits de la Ve
rité eft de Mr de Frontignieres
autheur de la
plufpart des paroles dont
feu Mr le Camus avoit
composé les airs ; la yeII.
PARTIE. &
rité eft qu'on me demanda
quelques petites ébauches
que j'avois dans
mon porte-feuille , avec
un petit conte & quelques
autres badineries
pour faciliter la vente du
Puits de la Verité ; ainfi
je puis revendiquer
de
ce Livre une tirade de
couplets eftropiez fur in
vino veritas, & puiſqu'il
en eft icy queſtion en
faire de nouveaux
qui
tiendront lieu des chan82
MERCURE
fons de ce mois -ci . Voicy
les canevas : Faffe les
airs qui voudra , je n'ay
pas le loifir de penfer
eu
à la mufique.
CHANSONS.
Dans le vin la contrarieté
,
Comme des Medecins,
incerta facultas ,
Selon fes dogmes arbitraires
, t d
Donne aux meſmes Ly- »
II. PARTIE . 83
rops des qualiter con
traires
In vino contrarietas.
Dans le vin fertilité &
fterilité ,
Dans le filence à jeun
Belife eft en extafe ,
Le foir entre deux vins,
o Dieux comme elle
jafety
In vino fertilitas.
De peur d'aller rejoindre
un Epoux haiffable ,
Ellepaffe la nuit à table,
$4 MERCURE
In vino fterilitas.
Dans le vin diligence
& pareffe ,
Arrive t-ilcke Darboulin
Quelque excellent quartaut
de vin ,
De peur qu'un autre nè
Penleve
,
Avant le Soleil je me
leve,
In vino diligentia ,
A le boire appliqué rien
ne peut m'en diftraire :
II. PARTIE. 85.
Pareffeux pour toute autre
affaire ,
De jour enjourje la dif
fere ,
In vino
pigritia.
Dans le vin
fimplicité
& duplicité ,
On l'a dit mille fois ,
La pensée eftcommune,
Un homme yvre verra
deuxpiftolespourune.
In vino duplicitas .)
Vains defirs d'intereft ,
deplaifir, de gloire,
86 MERCURE
L'yvrogne vous reduit au
feul defir de boire
In vino fimplicitas
.
Dans le vin yvreffe &
fobrieté
,
Vous n'aurez pas de peine
à croire
Qu'on s'enyore à force
de boire
In vino fit ebietas.
Pourbien enluminer leurs
trognes,
Une croufte de painfuffit
à deux yvrognes
,
IL PARTIE. 87
In vino fit fobrietas.
On donnera au mois
prochain la fuite de ces
Couplets.
ARTICLE
Any the burlesque
Suite du Parallele d'Homere
& de Rablais.
De mefme qu'un courfier
agile , drioit Homere
, s'échappe quelquefois
de la main fçavante du
chartier tirannique , qui
88 MERCURE
a
l'attelant à fon Char ,
l'affujettiffoit aux regles
penibles de l'art quinventa
, pour dompter les
chevaux le Centaure Peletroine
.
De mefme un Autheur
peut s'échapper des regles
tiranniques qui donnent
tousjours des entraves
au genie , & quelquefois
des entorfes au
bon fens .
De mefme encore que ce
Courfier échappé , foulant
II. PARTIE. 89
* !
lant d'un pied libertin
l'herbe tendre des pre
verdoyants , tantoft pren
dra fa courfe rapide &
legere , comme la fleche
qui part d'un arc , pour
voler droit au but où l'oeil
d'Apollon la guide , &
que tantoft ce Courfier
bondiffant, voltige en l'air
à droite 5 à gauche comme
la flamme errante
d'une exhalaifon vagabonde
, échappée du foudre
de Jupiter.
Faillet 1711 2 H
90 MERCURE
De mefme en conti
nuant ce parallele j'iray
droit au but , où je
m'en écarteray volontairemen
De mefme encore que
ce Courfier parcourant avec
mefme legereté , &
les plaines unies , & les
monts escarpe , s'égaye
en bonds & en ruades,
atteint du pied le bandet
attentif à fon chardon
fauvage.
De
mefme
j'attaqueII.
PARTIE. 9f
ray en ftile rablaifien
quelque afnerie Homerienne
, pour delaffer le
public d'une admiration
continuelle &
gefnante
où l'on veut l'affujettir
en faveur des Anciens.
De mefme enfin que ce
Courfier tantoft elevera
fa tefte fuperbe jufqu au
chefne facré , pour en détacher
de fa dent temeraire
quelque rameau
verd , deftiné à couronner
le Heros , & que tantoft
2 Hij
12 MERGURE
ilbaillera humblement fa
tefte aux crins épars pour
brouter l'herbe rampante.
De meſme tantoft fublime
, & tantoft burlef
que , tantoft Homere &
tantoft Rablais , je par-
Jeray leur langue en leur
7
donnant louange oublaf
me fans fiel , & prefque
fans prévention , je dis
preſque , car tous les
hommes font nez prévenus
, ou du moins ils fuçcent
la prévention avec
11. PARTIE 93
le lait.ashd
La prévention eft un
venin fubtil , ou plutoft
un animal venimeux
qui empoifonne tout ce
qu'il mord , & qui mord
fur tout ce qu'il voit , &
fur tout ce qu'il ne voit
pas donnons- luy enco
re à elle-mefme quelque
coup de dent avant que
de commencer noftre parallele
, Rablais diroit
que la prévention eſt un
animal augmentatif, dia
94 MERCURE
minutif, palliatif, deci
fif , & rebarbatif: ,, or fi
de cet animal , l'extrait
genealogique , fçavoir
,, voulez . Scachez - le ,
,, ne tient qu'à vous ,
eft deduit en ces Vers
,, cy-deffous infcrits :
il
Chez Lucifer jadis eut
accointance
Meffer orgueil avec dame
ignorance.
En ligne gauche , iffit de
cette
éngence
II. PARTIE. 9
Fille perverfe en fa folle
Darrogance ,
Prevention fut fon nom
que jepenfe ,
Or Dieu vousgard de fa
prédominance.
Mais continueroit «
Rablais , ventre beuf, «
voilà bien parler fans "
boire , je n'entends icy
vocifonner à mes oreil- "
les
que ce mot préven- “
tion,par cy prévention ,
par la prévention pour
les Grecs , prévention “
96 MERCURE
و ر
و ر
» pour les Latins. Holā,
hola , prévention
eft
Herefie
, & ne veut
,, croire perfonne
hereti- .
que en belles Lettres
,
,, que ne m'ayez démon-
,, tré par où , comment
,
,, & pourquoy
: car quel
,, motif mouvant
peut
démouvoir
ces aucuns
Letrez à preconifer
&
», proner à étripe goſier
les Ecrivains
antiques
,
qu'en revient- il à ces
મે
proneurs ?
Le
II.
PARTIE . 97 .
A cela vais vous re- ❝
partir en bref, mais a- «
vant parler , veux ob- “
ferver la premiere re- “
gle des éloquents par- "
leurs &
harangueurs ,
touflir , cracher , & fe
filentier un moment ,
punctum cum virgula ,
pour reprendre halci- «
ne.
CC
Je vais narrer veri- «
diquement ce qu'en
un mien voyage j'ay
yeu , ou non veu , car
"<<
Juillet 1711. I 2
8 MERCURE
و د
و ر
و د
و د
و و
99
c'est tout un , en fait
de Relations lointaines
.
Au fond des Indes
orientales ou occidentales
, ou imaginaires ;
,, car bonnement avoue-
,, ray que ne fçais autre
,, Geografie que des païs
à bons vignobles , où
je voyage volontiers :
aux Indes donc , deux
peuples y a , dont l'un
defire fans ceffe domiravillir
l'autre ;
و ر
و د
ر و
د ر
? ཎཱ@ TY °
LYON
*1893
DE
LA
VILLE
THEQUE
BLIO
LYON
7893⋅
II.
PARTIE.29
parce que l'autre don
ne jaloufie à l'un , com- "
me l'un en donne à "
l'autre , fi qué ce l'au- «
tre & ce l'un , font en «
guerre l'un contre l'au- «
tre.
<<
Or devinez ce qui
excite noiſe entre ces "
deux peuples , ce font "
des riens , petits riens , “
motifs de rien , comme "
qui diroit d'intereft "
de gloire , & de volup- "
té; ceux-cy ſe faſchent
2
I ij
100 MERCURE
que le terroir des autres
fertilife abondam-
و و
ment par
fon
propre
,, fond , & fans engrais,
,, fi qu'il produit
foudai-
,, nement
, & au mo-
, ment que befoin
eſt
,, fruits
favoureux
, &
fleurs
gentilles , que
ne produit
mie le ter-
,, roir des autres
; mais
,, ceux dont le terroir
eft
fterile
, font en recompenfe
, bons
pourvo-
,, yeurs & grands
provi-
"
و د
و ر
II. PARTIE . 10x
fionneurs; fique ne re- "
cueillant rien de leur "
cru , fçavent tirer des “
contrées eſtrangeres ,
fruits & grains dont ❝
ils empliffent granges , "
& fruitiers, & par ain- “
fi font plus , quoyque
non mieux , approvi- “
fionnez que ceux dont “
le terroir produit.
Notez illec , ô Lec- "
teur attentif, qu'en u- ".
fant icy des mots de "
fruits , grains , & ter- "
2 I iij
102 MERCURE
و و
,, mes pareils , c'eſt élocution
allegorique
&
,, fymbolique
, qui figni-
,, fie belles productions
d'efprit, & folides oeu-
""
vres
de
ر د
و د
gens
lettrez .
,, Difons donc que le terroir
, id eft , les cer-
,, vaux & caboches de
,,l'un de ces peuples font-
,, plus fertiles en produc-
,, tions , & que l'autre
peuple eft opulent en
collections
& maga-
و د
,, zins fcientifiques.
H.
PARTIE.
103
...Ce dernier peuple eft "
plus puiffant que l'au- "
tre , pource qu'il eſt “
plus nombreux , & il “
eſt plus nombreux ,
"
pource que plus de «
gens ont faculté collec- “
tive, & moins de gens "
ont facultéproductive, "
felon la regle que plus
de gens ont ce qu'eft
plus facile d'avoir, ſont “
toutefois grandement
"
louables ces collecteurs "
quant doctement & fa- "
2 I iiij
1
104 MERCURE
و د
gement
fçavent
ufer
de leur talent collectif
,
mais mieux louange-
„, ray certes , tel qui joindra
production
à collection
comme
aucuns
و و
و و
و و
ر و
و ر
و ر
ya
.
Les deux peuples dont
eft queftion font nom-
,, mez par maint hifto
riens les Produifants ,
& les Eruditionnez
Voyons maintenant ce
qui rend fi commune
», parmy les Erudition.
و د
و و
II.
PARTIE . 405
nez la maladie qu'on «
appelle préventiongrec- «
que , c'eft la mon tex- «
te, j'ay long temps tour «<
noyé pour y venir : ab «
regeons
matiere
de «<
peur qué l'ennuy ne «<
vous gagne . S'il vous "
a desja atteint , beuvez «
un coup , bon vin des- «
ennuye le Lecteur & «
l'Ecrivain ; & devroit- «
on , pour écrire joyeu- «
fement , boire par apo- «
ftille à chaque page ,
૯ .
t
106 MERCURE
» mais comme boire tant
» ne puis , au moins en
» parleray fouvent , car
» le refrain & l'énergie
»du langage Rablaifien,
» c'eft à boire à boire ,
» du vin du vin.
·
» Où en eftions nous,
» j'ay perdu la tramon‐
» tane, vite vite ma bouf
» fole , prévention , prévention
, voilà le mot
" pourquoy en font - ils
» fi embrelicoquez en→
" yers les Anciens ? oh
II. PARTIE . 107
c'eft pour trois mille «
quatre cents vingtdeux
raifons & demie ,
ne vous en diray pour «
le prefent que les deux «
& demie , car l'horlo- «
ge fonne , & c'est l'heu- «
re de boire.
Primò les Erudition- «
nez font femblables «
lef«
aux taverniers
quels les ans paffez ,
s'eftant munis de vins «e
maintenant antiques
, «
crient aux biberons , «
108 MERCURE
ג כ
و ر
» plorez & deplorez la
» perte de ces vieux
»fepts de vigne , qui ja-
» dis produifoient les
mirifiques vins , dont
»ayons en cave les originaux
: helas n'en
» viendra plus de tels
» car en l'an du grand
»hiver font peris par
gelée ces vieux fouchons
& farments
» & avec iceux a peri
» tout efpoir de bonne
» vendange.
II. PARTIE. fog
Ainfi les Eruditionnez
s'écrient en dé- «
criant toutes produc- «
tions modernes pour «
mieux s'acrediter , & сс
avoir debit des vieilles &
provifions & denrées «
antiques defquelles &
leurs magazins font «
furchargez.
cc
Secundo Pofons le cas "
que puiffe y avoïr , un «
Eruditionné de petite «<
ftature , il toutefois fe- «
ra ambitieuſement de «
rio MERCURE
"
و ر
و ر
fireux de paroître plus
grand qu'un produi
» fant de riche taille ,
» que fera l'Eruditionné
» baffet , Il grinpera fur
les épaules d'un an
» cien , comme finge fur
Eléfant , or ainfi grinpé
fur fur un ancien .
Plus cet ancien fera
grand , plus le grinpé-
» fus fera elevé , & plus-
» dominera de haut en
» bas le produiſant mo-
» derne .
»
"
II. PARTIE.
Voyez par la qu'Inte
reft eurent de proner «
antiques oeuvres
en c
tous les temps Pays &
moeurs, les Erudition- »
néz.
Ilsfont d'Homere
Un Dromadere
S'imaginant que fur fon dos
montez
Haut élevez , grimpezɔ juchez
guindez
Ils prendront haute place
Au coupeau du Parnaffe ,
Saffociant à cet Autheur fameux
112 MERCURE
Difant de luy tout ce qu'ils
penfent d'eux ;
Ils l'éternifent ,
Le divinifent ,
Puis par droit de focieté
Partagent fa divinité.
Cefuppofant , tous bons Ecrits
modernes
Sont prés des leurs , humaines
balivernes
و و
Parlons naturelle-
» ment
on a pouffe
troplóin l'enteftement
"
» pour
Homere
» ne
peut
on
nier que puif-
,, qu'on la loué danstous
و ر
les
IL PARTIE. 113
les temps , il n'ait me- "
rité d'eftre loué , auffi “
le louerai-je , l'admire-
“
rai -je & l'aimerai - je “
jufqu'à l'adoration
, ex- "
clufivement
.
Homere eft le Gargantua
des Erudition- «‹
nez , ils lefontfi grand "
qu'en rendant ſon me- “
rite gigantefque , ils "
en oftentla vrai reffem- "
blance .
CC
Rabelais a eu fes Eruditionnés
auffi bien "
Fuillet 1711 2 K
1
114 MERCURE !
,, qu'Homere , & fi Alexandre
avoit toujours
.
و ر
و و
و ر
un Homere fous fon
chevet , le Chancelier
,,duPrat portoittoûjours
,, un Rabelais dans fa
›› poche.
و ر
و د
و د
و د
Alcibiades queftionant
un jour un Pro-
,, feffeur fur quelques
و ر
,, Vers d'Homere . Le
,, Profeffeur refpondit
qu'il ne le lifoit point ,
,, Alcibiades luy donna
un fouflet pour le punis
II.
PARTIE. US
d'ofer profeffer les fci- «
ences , fans avoir chez ‹‹
luy le livre des Sça- "
vants le livre unique
excellence . "
le
livre
par
Le Cardinal du Belay
qu'on prioit d'admetre «
à fa Table certain "
Homme de Lettres , "
demanda en parlant
de
Rabelais qu'on appeloit
auffi le livre unique
, le livre par Ex. “
cellence cet Homme "
que vousvoulez admet "
Kij
16 MERCURE
و و
و ر
tre à ma Table a-t-il lû
„, le Livre , non luy ref-
,, pondit on, qu'on le faffe
donc diner avec mes
,, gens , reprit le Cardinal
, ne croyant pas
و د
و د
qu'on puteftreScavant
fans avoir lû Rabelais .
Ces traits de préven-
,, tions me paroiffent encore
plus forts pour
Rabelais qui vivoit a-
» lors que pour Homere
qui du temps d'Alexandre
avoit deja plu-
و د
55
1
II. PARTIE. # 7
fieurs fiecles d'antiqui- “
té , antiquité qui, com- “
me nous avons déja dit «
jete fur les ouvrages un "
voile obfcur & favora- "
CC
ble aux Allegories.
Grande reffource à "
ceux qui veulent trou- “
ver du merveilleux & "
du grand dans les petitelles
mefme qui é «
chapent aux plus ex- c
celents Autheur.
£
GO
cc
Rabelais acela de
commun avec Home- a
AS MERCURE
و ر
"
» re , quona cru voir Al-
» Legoriquement
dans fon
» Livre des Sistemes
entiers
d'Aftronomie
, de
Fifique
, de la pierre
» Filofofale
même
, que
quelques
Alchimiſtes
ont trouvé dans notre
» Auteurcomique
, com,
» me d'autres
l'ont trou,
vé dans le Prince des
» Poëtes.
J'ayconuun Rabelai-
❤ fien outré , qui dans
une tirade de deux cent
II. PARTIE.
F
noms de jeux qu'on
apprend à Pentagruel,
croyoit voir fur chaque o
mot une explication «
Hiftorique , Allegori- «
que & Morale , il eft «
pourtant viſible que
Rabelais n'a eu deffein «
en nommant tous ces &
jeux que de faire voir «
qu'il les fcavoit tous , «
car dans ces temps où
les Scavans eftoient «
rares , ils fe faifoient «
honneur de détailler, de
120 MERGURE
» dénombrer , de citer
» à tous propos , & d'é-
» tendre,pour ainfi dire,
» leurs Erudition , juf-
» que dans les moindres
Arts.Il faut croire pour
» la Juftification d'Ho-
» mere , qu'il vivoit dans
» un temps à peu près
» pareil , car il eft grand
» Enumerateur, grand
» detaillifte , diroit Ra-
» belais , Homere 5 moy
» pouvons eftre abon droit
» Paralellifez
, en ce que
fommes
II. PARTIE . 121
fommes par nature tant
foit peu beaucoup digref
fionneurs & babillards.
Nous parlerons en
temps & lieu,c'eft à dire,
quand l'occafion s'en
prefentera , des digref
fions , & des énumerations
dont nos deux Autheurs
font pleins; il y en
a quelques- unes dansRabelais
dont chaque mot
porte fon application
bonne ou mauvaiſe .
Ces titres de Livres par
Fuillet 1711 .
2 L
122 MERCURE
exemple dont il compoſe
une Biblioteque critique.
Les fariboles du Droit
L'Almanac
desgouteux
,
Le boutevent des Alchimiftes
Le limaffon des rimaf
feurs
Les pois au lard comme
comento
Le tirepet des Apotiquaires
,
La mufeliere de nobleffe
De moutarda poft pran-
J $
II. PARTIE. 123
dium fervienda ,
Malagranatum
vitiorum,
Les Houfeaux , alias les
botes de patience
Decrotatorii Scolarium.
Barbouilla- menta Scoti .
L'Hiftoire des Farfadets.
Oncomprend bien qu'-
il peut y avoir par raport
au temps de Rabelais ,
plus de fel que nous n'en
fentons dans ces critiques
badines , mais la fadeur
, & la platitude
2 Lij.
124 MERCURE
d'une infinité d'autres
nous doivent faire conclure
que fi Rabelais
eftoit un excellent comiqueen
quelques endroits
il eftoit en quelques
autres
tres mauvais plaifant.
Ces prévenus conclueront
au contraire , que
le fublime inconteſtable
d'Homere , nous eft garant
de l'excellence oculte
de ce qui nous paroift
mediocre , ils ajouſteront
II.
PARTIE. 125
que les endroits les plus
obfcurs pour nous brillent
pour eux des plus
vives lumieres : ne foutiendron
t-ils point auſſi
diroit Rabelais , qu' Hcmere
ne laiffoit pas de
voir clair quoy qu'il fuft
aveugle ?
Je viens de commençer
mon Parallele , par
la premiere idée qui s'eft
preſentée , je l'avois bien
promis , on ne me verra
point prendre d'un air
Liij
126 MERCURE
grave la balanceen main
pour pefer fcrupuleufe
ment jufqu'aux moindres
parties qui doivent
entrer dans la compofition
d'un poëme , je devois
examiner d'abord le
choix du ſujet , l'ordonnance
, les fituations , les
caracteres , les penfées, le
ftile , & tant d'autres
chofes dont jene fais pas
mefme icy une énumeration
par ordre de peur
de paroiftre trop arrangé
II. PARTIE. 127
dans un Parallele que
j'ay entrepris par amufement
, & qui ne meriteroit
pas d'eftre placé
dans mon article burlef
que , s'il eftoit ferieux &
regulier.
Voicy donc la metho
de que je vais fuivre
dans cette compoſition .
J'ay fur ma table mon
Rabelais , & mon Homere
, portons au hafard la
main fur l'un ou fur l'autre
, je tiens un Volume
2 Liiij
128 MERCURE
>
qu'y trouvay - je à l'ou
verture du Livre ᏙᏅ
yons , c'eſt un pere qui
parle à fon fils , devinez
fi cette éloquence eſt
d'Homere ou de Rabelais
.
Je te rappelle auprès de
moy , j'interromps la ferveur
de tes études , je t'arrache
aurepos Filofofique,
mais j'aybefoin de toy, &
je fuis ton pere , j'avois
efperé de voir couler dou
cement en Paix mes der
II.
PARTIE 129
nieres annees me confiant
en mes amis & anciens
confedere , mais leur
perfidie a fruftré la feureté
de ma vieilleffe,telle eft.
lafatale deftinée de l'hom
que plus ilfoit inme
و
quieté , par ceux en qui
plus il fe repofoit : viens
donc , quitte tes Livres
pour venir me defendre
car ainfi comme debile
font les armes au dehors
où le confeil n'eft dans la
maiſon , ainfi vaine eft
30 MERCURE
l'eftude, le confeil inutile
, qui en temps oportun
, par vertu n'eft mis à
execution.
Ma deliberation n'est
de provoquer mais d'apaifer
, non d'affaillir mais
de defendre , non de conquerir
mais degardermes
feaux fujets , & terres
hereditaires
contre mes
ennemis.
Fay envoié vers eux
amiablement pour leurs
offrir tous ce queje puis ,
II. PARTIE. 13t
5plus que jene dois , 65°
n'ayant eu d'eux autre reponfe
que de volontaire
jaloufe defiance , par
là je vois que tout droit
des gens eft en eux devenu
droit de force & de
bienfcance für mes terres ,
donc je connois que les
Dieux les ont abandonné
à leur propre fens qui ne
peut produire que deffeins
iniques , fi par inspira
tion divine , n'eft conti
nuellement guide.
132 MERCURE
Ne croyez vous pas en
tendre parler icy le fage
Neftor dans le fublime
Homere , ce n'eſt pourtant
que le pere de Gargantua
qui parle dans le
comique
Rabelais
.
là
Je n'y ay changé que
quelques mots du vieux
ftile , on peut juger parque
Rabelais cuft efté
un bon Autheur ſerieux .
Homere euft-il efté un
bon Autheur burlefque?
Pourquoy non s'il
l'euft voulu , il la bien
II. PARTIE. 13
efté quelquefois fans le
vouloir. Je pourray dans
la fuite citer en badinant
quelqu'un deces endroits
burleſques , mais commençons
par admirer ſerieufement
cet excellent
homme qui a fçu concilier
dans fon vafte genie ,
les faillies les plus vives
de
l'entoufiafme poëtique
, avec le bon fens
& la fageffe de l'orateur
le plus confommé.
Voicy comme il fait
parlerNeftor pour appai134
MERCURE
fer Achile en colere , &
Agamemnon pouffé à
bout , au moment qu'ils
alloient fe porter l'un
contre l'autre à des extremitez
funeftes.
ils
O quelle douleurpour
la Grece, s'écrie touta coup
Neftor , & quelle joye
pour les Troyens ,
viennent à apprendre les
diffenfions des deux hom
mes quifont au deffus de
tous les autres Grecs par
la prudence & par le couIL
PARTIE. $ 135
rage , mais croyez- moy
tous deux , car vous efies
plus jeunes , j'ai frequenté
autrefois des hommes
qui valoient mieux
que vous , &qui ne meprifoientpas
mes confeils ,
nonje n'ayjamais veu
ne verray jamais de fi
grands perfonnages que
Pirritous, Polifeme , égal
aux Dieux , Thefee fils
d'Egéefemblable aux immortels,
c.Voilàlesplus
vaillans hommes que la
16 MERCURE
terre ait jamais portez,
mais s'ils eftoient vaillants,
ils combatoient auſſi
contre des Ennemis tres
vaillants, contre les Centaures
des montagnes
dont la défaite leurs à acquis
un nom immortel
c'est avec ces gens
jay vecu. Je tafchois de
les égalerfelon mes forces ,
& parmy tous les hommes
quifont aujourd' kuy,
il n'y en a pas un qui
evft ofe leur rien difpulà
que
tera
II.
PARTIE. 137
ter , cependant quoyque
je fulle fort jeune , ces
grands hommes écoutoient
mes confeils , fuivez leur
exemple, car c'est le meil-
Leur parti , vous , Agamemnon
, quoique le plus
puiffant, n'enlevel point
a Achile la fille que
Grecs lui ont donnée , &
vousfils de Pelée , ne vous
•attaquez point au Roi ,
car de tous les Rois qui
ont porté le Sceptre , &
que Jupiter a elevez à
Juillet 1711 , 2 M
les
138
MERCURE
cette gloire , il n'y en a
jamais eu defi grand que
luy, fi vous avez plus de
valeur , & fi vous estes
fils d'une Deeffe , il est
plus puiffant parce qu'il
commande à plus de peuples
fils d' Atree appaifel
vostre colere , & je
vais prier Achile de furmonter
la fienne , car il
eft le plus ferme rampart -
des Grecs dans les fanglants
Combats
Le début de ce dif
II.
PARTIE. 139
J
cours deNeftor peut fer
vir de modele pour le
fimple vrayment fubli
me , avec quelart enfuite
Neftor impofe t-il à
ces deux Rois , en leur
infinuant que de plus
grands hommes qu'eux
ont cru fes confeils
lors meſme qu'il eftoit
encore tres jeune e da
Critique ordinaire qui a
fi fort blamé les invecti
ves , & los injures qu'
Hamere mer fi foûvent
Mij
140 MERCURE
53 dans la bouche de fes
Heros , trouvera Neftor
imprudent d'offenfer luy
mefme ceux qu'il veut
reconcilier , en leur difant
en face qu'il y a eu
de plus grands hommes
?
qu'eux , & à qui ils n'auroient
ofe rien difputer ,
mais fuppofons qu'en ce
temps-là les hommes accoutumez
à dire & à s'entendre
dire des veritez
euffent affez de bonne
foy & de grandeur d'aIL
PARTIE. 147
me pour ne fe point faſcher
qu'on reduifift leur
heroiſine
à ſa juſte valeur.
Cela fupposé , quelle
force d'éloquence a Neftor
, & quelle hauteur
de fentiment
, d'humi
lier ainfi
Agamemnon
& Achile, pour les foumettre
à ſes confeils
Mais il n'eft pas vrayfemblable
, dira- t- on que
des Heros fouffriffent
patiemment
une offens
it
#4 MERCURE
fe , mais répondrai-je ,
la verité ne les offenfoit
jamais , c'eftoit les
moeurs de ce temps - là ,
ou du moins il eftoit
beau à Homere de les
feindre telles , les noftres
font bien plus polies; j'en
conviens , mais qu'est- ce
que la politeffe ? la politeffe
n'eft que l'art d'in-`
finuer la flaterie & le
menfonge, c'eft l'art d'avilir
les ames, & d'éner
ver l'heroiſme Gaulois ,
II.
PARTIE 143
dont la grandeur confifte
à ne vouloir jamais
paroiftre plus grand qu'
on n'eft , & à ne point
induire les autres à vou
loir paroiftre plus grands
qu'ils ne font.
Voicy l'occafion d'es
xaminer fi Homere a
bien conneu
en quoy
doit confifter
la grandeur
d'un Heros . Mais
cela me meneroit plus
loin que je ne veux , j'irai
peut- eftre dans la fui-
HT
144 MERCURE
te auffi loin que ce parallele
pourra me mener:
mais je me ſuis reſtraint
à n'en donner dans cha
que Mercure qu'à peu
prés autant qu'il y en
a dans celui - cy , ma
tafche eft remplie.
THESE
II.
PARTIE. 145
THESE NOUVELLE
Je foutiens qu'il vaut
mieux aimer une laide femme
qu'une belle.
Refponfe par Turlupin.
J'aimerois mieux aimer
une l'aide , mais je me
mortifie , j'en aime une
belle.
Reponse parM. Rig..
Qui pour laide a tant fait que
d'avoir de l'amour ,
Eft plus fur d'un tendre retour.
Fuillet 1711. 2 N
146 MERCURE
Refponfe par le Chevalier
de
Ma foy je la quitte du
retour , car je ne sçaurois
tant faire ...
Reponse par la plus fpirituel
le la plus laide fille du
Faux-bourg S. Germain.
Eft-on l'unique amant
D'une femme fi belle
Elle en merite tant
Qu'un c'est trop peu pour elle.
La laide craint toûjours de
perdre fon amant
Et qui craint inconftance aime
plus conftamment.
II.
PARTIE. 147
Femme trop belle eft arrogante ,
La laide eft douce & complaifantes
Enfin l'amour propre me dit
Qu'une laide eft plus amuſante
A
meilleur coeur
d'esprit.
& plus
Refponfe par la belle Mar
quife.
Il me paroift que la gloire
feule d'aimer une belle
perfonne , vaut mieux que
le foible plaifir d'eftre armé
d'une laide..
2 Nij
148 MERCURE
Refponfe par la ferieufe
Clelie.
On eft d'abord char
mé d'une belle femme ,
enfuite on s'y accouftume,
enfin quelquefois on la
méprife.
On eft d'abord rebuté
par la laideur d'une femme,
enfuite on s'y accoutume
quelquefois , enfin
on l'aime conftamment.
Parlons plus jufte , ce
n'eft ny la beauté ný la
laideur , ceft l'humeur
, le
M.
PARTIE .
49
coeur & l'efprit qui decide.
Refponfe par l'Indolent.
J'aime mieux une laide
comme j'aime mieux le
vin de Brie , parce quon a
moins de peine à l'avoir
& à fe le conferver.
CONSEIL.
Que confeilleriez vous
un avare qui aimeroit grande
compagnie , grande chere ,
à qui on auroit donné fa
maiſon pour prifon. I
2 Niij
150 MERCURE
CONSEIL
par le Gafcon.
Cadedis que defa maiſon ,
il faffe une Auverge , il y
aura grande chere
Echo franc.
*
co Son
Suzane Ridondon.
Le grand corps fans
ame.
Carolus Sicaut la prétantaine
, & l'Animal ont deviné
l'Ame, mot de l'Enigme
du mois de May..
Le mot de la premiere
II.
PARTIE . 19
Enigme de ce mois c'eft le
Je ne fcay quoy , & le mot
de la feconde c'eſt Tuyau .
Noms de ceux qui ont
deviné le Je ne fçay quoy.
Je ne fçay qui , Greffier
de je ne fçay où a je ne
fçay comment devine Je
nefçay quoy...
ENEN
VO Y.
par M.
- ce prévention , bon
gouft , ou fantaisie ,
La plus rare beauté , le
a
1252 MERGURE
merite & l'efprit ,
Ont fur mon coeur peu
de credit
Quand le Je ne fçay quoy
n'eft pas de la partie .
Ce n'eft pas par eſprit
c'eft par conduite de
plomb que j'ay devinć
Tuyau de grais.
La petite Tigreffe de
la rue du petit Lyon.
Ceux -cy ont deviné les
L deux Enigmes
.
Pierre Jean Jacques ont
II. PARTIE . 153
deviné , fe ne fçay quoy , &
Nicolas , Tuyau. Coulez ,
murmurez ut re mi fa. La
Clopinante par inégalité
de jambe . Le Moulard
penfif. Manon Chicorée.
L'Oftrogot . Les trois filles
de l'Organifte , haute baffe
, & plus baffe , ce font
trois tuyaux d'orgues difficiles
à accorder .
154 MERCURE
ENIG ME
par M. D. L. P.
Logez auprés du toit d'u
ne haute maifon
Nous craignons le grand
vent , le Soleil , la fumée ;
Par nous on vit jadis
mainte guerre allumée .
Nous faifons des Captifs
fans fortir de priſon.
Nous fçavons diftiller le
plus fubtil poifon ,
II. PARTIE . ISS
Inftrument de terreur , de
courroux , de foibleffe , "
Nous employons pour
vaincre & la force &
l'adreffe ,
Et certaine liqueur qui
trouble la raiſon.
Nous
fçavons
menager
menaces
, & careffe ,
Bien fervir , ou trahir nos
maiftres , & maiftreffes ,
Plus d'un homme en cour
roux , nous appella
menteurs.
156 MERCURE
Nous mentions moins helas
au vieux temps de nos
peres ,
La nature nous fit ingenus
& finceres.
Et ce n'eft que par art ;
qu'on nous rend impofteurs.
Les Yeux m Caupréside
acadenced
ifsuille
MERCURE ,
III. PARTIE.
PIECES FUGITIVES.
SONNET ,
Sur des Vers que Mademoiſelle
M. avoit envoyezal Auteur.
'AUTRE jour la
Cour du Parnaſſe ,
L
Fit affembler tous fes
Bureaux , NA
3
A
2 MERCURE ,
Pour juger au
rapport
d'Horace ,
Du prix de certains
fr vers nouveaux,
Aprés maint Arrêt toûjours
jufté ,
Contre mille Ouvrages
divers ;
Enfin le Courtiſan
d'Augufte ,
Fit rapport de vos derniers
vers.
Auffi-toft le Dieu de
III. PARTIE.
Permeffe
Dit : je reconnois cette
piece ,
Je la fis en ce même
endroit .
L'Amour avoit monté
fa Lyre,
Sa mere écoutoit fans
mot dire , lad
Je chantois , Iris écrisob
J
zov Svoit.qqet
37
2130 2131
ab usia si Boo - BuA
3 A ij
4 MERCURE,
SONNET ,
Sur la mort de M. Duché.
C
$
ELUI que nous
plaignons , &
qu'un fort glorieux
Place au rang des Elûs ,
dans la Cité celefte ,
Brilla par fes talens ,
fut doux , fimple ,
modefte ,
Fidele à fes amis , difcret
, officieux .
Des charmes dont le
III. PARTIE . S
monde avoit flatté
Les yeux
;
Dieu diffipa bien - toſt
l'illufion funefte ,
Et de fes jeunes ans il
confacra le refte
A chater les
grandeurs
du Monarque
des
Cieux.
Il n'eſt plus , & j'ai vû
paffer la derniere
heure ,
Mais en pleurant fa
mort , c'eft moi feul
3 A iij
6 MERCURE ,
que je pleure ,
Mon aveugle fureur
n'accule point fon fort.
Iljoüit des feuls biens ,
qui faifoient fon envie,
Et ne pouvoit trouver,
qu'en paffant par la
moit ,
Le port tranquille &
Hûr de l'éternelle vie .
xx
III . PARTIE. 7
SONNET ,
A M. le Chevalier de S. Gilles.
Α
Aie
Pollon au Parnaffe
hier s'eftant⠀⠀
#rendu ,
Auteurs vieux & nouveaux
vinrent de
compagnie ,
Et difputoient entr'eux
aved telle manie ,
Que le Dieu même à
peine étoit -il entendu .
Entre autres Sarrazin
3 A iiij
8
MERCURE ,
crioit comme un
perdu ,
Se plaignant que Saint
Gilles avoit pris fon
genic .
Non , Meffieurs , difoitil
, ce n'eft point
ironie ,
Et s'il ne me le rend ,
je veux eftre pendu .
Un genie eft là bas cho
fe fi familiere ;
Que ne prend- il celuy
de Pie , de Frontiniere ?
III. PARTIE . 9
Lors Apollón luy dit :
ah ! tu fais le fâché ,
Eh bien , pour te montrer
à quel point je
l'honnore ,
Il gardera le tien , & je
luy donne encore
Celuy d'Anacreon par
deffus le marché.
RONDEAU.M
JE l'aytrouvé ce petit
"
10 MERCURE ,
Ce traître Dieu , parain
de Ménelas ,
Qui mieux armé que
Diane à la Chaffe ,
Dans certains yeux avoit
trouvé la place ,
Pour me jouer quelque
tour de Judas ,
J'ai d'abord dit: fuyons,
doublons
le pas ,
Allons chercher ou
Phoebus ou Pallas ,
C'eft contre amour un
remede efficace ,
III. PARTIE.
Je l'ai trouvé.
Depuis ce temps je
cherche : mais helas
Je cours toûjours fans
fçavoir où je vas ,
J'ai beau marcher , j'ai
beau fuivre leur trace ,
Pour les trouver j'ay
fait tout le Parnaſſe ,
Et le feul Dieu que je
ne cherchois pas
Je l'ai trouvé,
* 3+
12 MERCURE ,
ETRENNES
A M.de Pointis aprésfon expedition
de Cartagene.
L'An paffé , qu'un
deffein un
peu
trop hazardeux
,
Vous avoit fait fortir
de France ,
A tel jour qu'aujourd'huy
je fis pour vous
des
voeux ,
Et mes voeux vous ont
porté chance ,
Vous eftes revenu gailIII.
PARTIE . 13
lard & bien payé
Des dépens de voſtre
voyage ;
En vous voyant paſſer
chacun s'eft écrié :
Voila le vainqueur de
Cartage ,
C'eſt Scipion , non pas
Scipion l'Afriquain
,
Mais Scipion l'Ameriquain
,
Or bien que dans ce
temps une paix neceflaire
,
Semble avoir des Guer14
MERCURE ,
riers fufpendu les
projets
Il reste encor pour vous
des conquêtes à faire ,
Et j'ai pour vous encor
à faire des fouhaits ,
Voici
comment , il eſt
certains ſujets rebelles ,
Que l'on
nomme jeunes
cruelles ,
Que ces
peuples par
vous foient vaincus
à leur tour ,
Tâchez d'en
dépeupler
la
terre ,
III.
PARTIE . 15
Allez & revenez , s'il
ſe peut , en amour
Auffi
formidable qu'en
guerre.
EPITAPHE
Du Chien de Madame D...
PA
ASSANS pleurez
mon triſte ſort ,
Il fut
toûjours
digne
d'envie ,
Tant que je fus prés
de Silvie ,
Mais fa rigueur cauſa
ma mort ,
16
MERCURE ,
Amour voyant que la
cruelle
Bravoit fes coups , fuyoit
fes loix ,
Voulut punir ce coeur
rebelle ,
Il prend fon arc & fon
carquois ,
Et dans fon courroux
il fit choix
De ſa fleche la plus
mortelle ;
J'eftois alors prés de la
belle , i !
Je joüois fans fonger à .
mal ,
Amour
III. PARTIE .
Amour tira , le trait
fatal ,
Part , vole , & m'atteint
au lieu d'elle , !!
Un feu prompt & féditieux
S'alluma dés-lors dans
mes veines ,
Aprés mille fecrettes
peines ,
La mort vint me fermer
les yeux ,
Ainfi je garantis Sylvie
Du plus cruel de tous
3
B
18 MERCURE ,
fat
les maux
;
Elle jouit d'un plein
repos ,
Mais il m'en a coufté
la vie.
<
III. PARTIE: 19
PROLOGUE ,
Qui fut chanté chez Mad.
**** avant la reprefentation
de l'Ecole des
Maris
MELPOME'NE ,
Mufe de la Tragedie.
QUittez
Uittez ,
quittez
ma foeur une
arrogance vainę ,
Ofez
- vous comparer
3 Bij
20 MERCURE ,
vos frivoles chanfons
Aux nobles , aux fubli
mes
fons
De l'Heroïque Melpoméne
?
THALIE
Mufe de la Comedie.
Hé de grace , ma foeur
tréve de vanité ,
Vivez en paix avec
Thalie ,
Vous fçavez que vingt
fois elle a déconcerté
Par une agreable folie ,
III.
PARTIE . 21
Une
ennuyeuſe
gravité-
CLA
MELPOME'NE.
Ma voix refufcite la
gloire
De mes antiques demi
Dieux ,
Et je confacre la memoire
De ceux qui brillent à
vos
yeux .
THALIE,
Vos chants par leur lugubre
accord ,
Fatiguent ſouvent leur
oreille ,
22 MERCURE ,
Ma flute fouvent les
réveille ,
Et vôtre Lyre les endort,
MELPOMENE.
Croyez - vous que ce
foit un talent fort
utile
De
badiner à tous propos
?
THALIETE
Vous imaginez - vous
qu'il foir fi difficile
De faire bailler les
Heros ?
III. PARTIE . 23
MELPOME'NE.
De Lauriers immortels
je couronne leurs
têtes .
THALIE.
Je fçai les délaffer par
d'agreables fêtes.
MELPOM E'NE.
Je vante leurs exploits.
THALIE.
J'amufe leurs defirs .
MELPOME'NE. !
Je prends foin de leur
gloire.
24 MERCURE ;
THALIE.
Et moy de leurs plaifirs
.
MELPOME'NE.
Je m'étonne qu'une
Deeffe
Qu'une Mufe fe laiffe
à l'orgueil entraîner.
L'amour propre eft une
foibleffe
Qu'aux mal - heureux
mortels il faut abandonner.
THALIE .
Ne vous y
trompez pas ,
le feul
III. PARTIE . 25
le feul orgueil vous
touche ,
J'ai reçû comme vous
ce dangereux prefent,
Mais le mien eft vif &
plaifant ,
Et le vôtre eft fombre
& farouche.
MELPOM E'N E...
Vous eftes ma cadette
au jugement detous ,
Et l'on eft modefte à
vôtre âge.
THALIE.
Si je fuis plus jeune
3 C
26 MERCURE ,
1 que vous ,
Ne vous étonnez pas fi
je plais davantage . )
MELPOME'NE.
Ne profanons plus nôtre
voix
Par une odieufe querelle
,
Un Prince des Heros
le plus noble modele ,
Nous fournit de plus
doux emplois ,
Il a mille vertus dignes
de fa
naiffance ,
III. PARTIE . 27
7
Les Mufes dont il eft
l'appuy
Doiventy fe confacrer
à luy
Par zele & par reconnoiffance.
THALIE.
A fervir ce Heros bornons
nôtre defir.
MELPOMENE,
C'est le plus digne employ
des filles de memoire.
THALIE.
Que Melpoméne veille
3 Cij
28 MERCURE ,
à celebrer fa gloire.
MELPOM E'NE.
Que Thalie ait le foin
d'occuper
fon loifir.
TOUTES DEUX.
Que Melpoméne
veille
à celebrer
fa gloire.
Que Thalie ait le foin
d'occuper
fon loiſir.
III. PARTIE . 29
POLLICHON.
Poëme par M. de N *** Directeur
de l'Hôtel- Dicu
de Vienne en Dauphiné.
Lefujet eft tiré d'une Echope
, fous la porte d'entrée
de l'Hôtel- Dieu , demandée
à l'Auteur par une infinité
de perfonnes ; les unes
pour Pollichon , & les
autres pour Henriette.
LEs Dieux font
pour
Céfar, &
Caton pour
Pompée
.
Bon jadis , mais les
3 Ciij
30 MERCURE ,
Dieux , les Catons
de ce temps
Ont de plus grands
foucis la cervelle
occupée ,
Et fe partagent bien
pour d'autres combattans
,
Pollichon d'une part ,
& de l'autre Hen- t
riette ....
I
Quelle verve vous pred
Poëte ,
Et quel debut ? qu'ont
de commun entr'eux
III. PARTIE . 31
Deux inconnus & ces
Romains fameux ?
Jede dirais c'eft que
l'un & l'autre homme
Veut eftre feul maître
abfolu dans Rome ,
En leur faveur il fe fait
des partis ,
Adolefcens , hommes
faits , cheveux gris ,
Sages & fols , chacun
pour eux s'engage ; )
Les dieux contre les
dieux l'Olimpe ſe
* partage.
3 C iiij
32 MERCURE ,
Tout commeà Troye ,
Apollon d'un côté ,
Et d'autre part quelt
que autre Deité .
Rome
voit une guerre
en cruauté
feconde
;
Il fe verfe du fang fur
la terre & fur l'onde ,
Et tout cela pourquoi
?
feulemét
pour fçavoir
Qui fur la République
aura le plein pouvoir
Du fier Beau
- pere ou
de l'obstiné
Gendre
;:
Ces deux Maîtres
d'efIII.
PARTIE . 33
crime en pouffant
tout à bout
Firent tant qu'ils gâterent
tout .
Catule en fut témoin ,
il pourra vous l'apprendre
;
Or , ce fait entendu , le
LE
mien fe peut com -
prendre ,
Il ne faut tout au plus
que changer quelque
nom :
Par exemple au mot
•
Republique ,
34 MERCURE
,
Subftituez le mot boutique
:
APompée Henriette , à
Cefar Pollichon ,
Au fonds vous trouve-
10
rez que la chofe
eft
flenségale
;
Au fang prés répandu
c'eft un autre Pharfale
, she
Dans les efprits même
chaleur ,
Même efpoir du fuccés,
mêmeamour de la
gloire ,
III.
PARTIE. 35
Même attente de la
Victoire ,
Même bruit , & même
fureur,
Mêmes détours , & mê-
0 mes rufes .
O Lucain ! ô Breboeuf!
j'invoque ici vos
Mufes ,
Venez
entoufiafme, hyperbole
, grands
mots ;
Je ne sçaurois fans vous
celebrer mes Heros
,
36 MERCURE ,
Dire de leurs defirs l'ardeur
impatiente
Et dans tous leurs projets
l'audace triomphante
;
Prêtez- moy vôtre emphafe
& vos plus.
vifs crayons
.
Encor pourrai- je à peine
entreprendre ;
effayons.
Sous un portique étroit
dont l'antique ftru-
Єture
N'offre aux yeux des
III. PARTIE . 37
paffans qu'une caverne
obfcure ,
HabitePollichon l'honneur
de fon quartier
,
Demi porteur de chaiſe
& demi favetier
:
Non , loin de là fe montre
une jeune Amphibie
,
Et Fille & femme &
veuve , engageante
& hard ie
Henriette , en un mot ,
38 MERCURE,
qui de deffein
formé
Veut ravir au vieillard
fon Palais enfumé.
Mufe , raconte - moy
quelles furent fes
brigues , b
Quel art ou quel demon
a noüé cette
intrigue :
Mais je le prens trop
haut ; parlons plus
fimplement
:
La verité s'explique
avec moins d'orIII.
PARTIE . 39
Uus nement.
Mes gens en veulent
donc à la même demeure
,
On m'en rompt la tête
à toute heure ;
Dés
que
pour l'un
des
deux
je vais me déclarer
,
A quoy dois-je me preparer
?"
Les
Pollichons vont
dire
rage ,
Eft - ce là ce Juge fi
befaget k
40 MERCURE ,
Et les Henriets d'autre.
part
Me le revaudront tôt
ou tard .
Cruel reſpect humain ,
quelles loix tu m'ımpoſes
!!
Mais
non , c'eft
par
fond
qu'il
faut
regler
le
les chofes ;
Quiconque aura raifon
chez moy l'emportera
,
Aprés grondera qui
voudra :
GronIII.
PARTIE" 41
Gronder eſt choſe juridique
;
Ca , parlez donc , on
vous écoutera .
Commencez
Pollichon
, vous aurez la
replique ,
Henriette elle durera
Autant de temps qu'il
luy plaira ;
Laiffez à Pollichon enfler
fa
Rhetorique ,
Aprés luy la vôtre vien .
dra
,
Qui ne fera pas laco-
3D
42 MERCURE ,
nique ;
Car tout vieux Avocat
Safe pique you
De ne pas s'expliquer
catera....!
i par un
Quoy tous deux à la
fois ? O bruit diabolique
!!!
Un Huiffier pour crier ,
paix là.
Je m'enfuis , je n'ai pas
la tefte affez ftoïque
Pour fupporter cette
mufique :
Finiffons à tous deux 5
III. PARTIE. 43
j'adjuge la boutique ;
A tous deux ! Mais aboMais
voyons
fi cela
fe
pourra :
Tous deux infolidum !
nenny , la chofe
implique ;
Faifons donc mieux ,
hé bien ! on la partagera.
Salomon , Prince Pacifique
,
D'un femblable procés
de même ſe tira .
Voila mon Jugement ,
3 Dij
44 MERCURE
,
on l'executera .
L'executer , répond la
Nymphe colerique
,
Quoy l'on m'enpollichonnera
!
Moy prés de Pollichon !
oh la belle repliqué
!
Sur elle le vieillard jette
un regard oblique
,
Et qui te dit , qu'on le
voudra ?
Les paffans me feroient
III. PARTIE . 45
la
nique ,
Moy
vivre
auprés
de
toy ? plûtôt
dans
l'Amerique
,
Pollichon plein d'honneur
ira , vivra ,
mourra .
Que faire donc? en vain
mon eſprit s'allambique.
Themis , ſage Themis,
toy ma refſource
unique ,
Infpire - moy ce qu'on
fera ;
46 MERCURE ,
Quel nouveau jugement
faut- il que je
fabrique ?
Le voici , nuls des deux
la boutique n'aura :
Donner tout ,
partager
,
ôter tout la fottife
N'eſt pas où l'on la
croit ; maint Juge A
comme moy
Donne , ôte ou fait partage
en dépit de
la loy i
Nul par ce Jugement ,
II. PARTIE . 47
donné
vaille que
vaille ED
N'aura ni l'huïtre ni
l'écaille .
Belle Leçon , pour tous
grands , petits Magiftrats
,
Ne tombez jamais dans
mon cas.s
Mais j'entens des cenfeurs
, qui d'un ton
pedantefque ,
S'acharnent fur mes
vers , & difent , quel
grotefque?
48 MERCURE,
C'est justemenc celuy
dont Horace a parlé :
Sur une téte humaine
un cheval eft colé ;
Plumes , membres divers
, affemblage
bizare ,
Au deffus belle femme ,
au deffous montre
affreux ;
Meffieurs qui ne riroit
d'un contrafte firare ?
Qui ne riroit ? riez , c'eſt
tout ce que je veux .
DE
LA
BIBLI
AOTHEQUE
DE
LYON
MERCURE
IV PARTIE .
Nouvelles de Flandres.
************
Ordre de Bataille de l'Armée
duRoy en Flandres..
GENERAUX.
Mr le Marefchal , Duc de
Villars .
Mr le Marefchal de Montéfquiou.
Fuillet 1711 .
4.
A
VILLE
2 MERCURE
Lieutenans Generaux de la
premiere ligne.
Mrs Gaffion , Prince de
Rohan , Mezieres , la Valliere
, Deftain , Albergo
thy , Croify , Duc de Guiche
, Maulevrier , Hauteforr.
Maréchaux de Camp.
Mrs de Silly , le Vidame
, Chafteau - Morand ,
Choifeul , Rooth , Duc de
Mortemart , Nangis , Ravignan.
+
IV. PARTIE 3
Brigadiers.
Mrs Berville , Suzy , Caftel
- Moron , la Tremoille,
Krakemborg , Courtade ,
Choifeul , Saumery , Montbazon
, Gaffion , Dargelos
, Daubigné , Colandre,
Obrien , S. Simon , Bernholes
, Defrouville , Beaupuys
, Periffan , Seignelay,
PREMIERE LIGNE.
DRAGON S.
Colonelle Generale 3 efc .
A ij
4 MERCURE
Beautremont
3
.G
CAVALERIE.
Maiſon du Roy -13
Gendarmerie
13
8
8
Royal Piedmont 3
S.
Agnan
24
la Tremoille
Rottembourg
Royal Allemand
3
2
7
Druhot
Dauphin ,
7
IV.PARTIE. $.
Prince Marfillac . 2
Monteil ,
7
Choifeul ,
2
Courcillon , 2
Dalzcau ,
2
6
Cherizy ,
2
Royal Rouffillon , 3
Commiffaire Generale 3
8
INFANTERIE.
Picardie ,
Bourbon ,
Nice ,
62 efc.
3 bat
.
2
I
G
A iij
6 MERGURE
Navarre,
Bourgogne ,
34
2
6
Monroux ,
Bourbonnois , 2
Languedoc , 12
Aunis ,
Royal ,
2
3%
Royal Comtois, 2
Daunay ,
Les Vaiffeaux ,
La Marck ,
Royal Italien ,
2
6
6
3
1
6
Léc ,
Obrien ,
IV .
PARTIE. 7
Dorington ,
Galmoy
Odondel ,
Gardes
Françoifes , 41
Gardes Suiffes , 2
6
Alface ,
Vezin ,
La Reine ,
Haynault ,
Vauge ,
Le
Roy ,
Foix ,
4
2
6
3
2
* MERCURE
3 Piedmont ,
Royal la Marine , 2
Dellandes , I
C I
Mortemart ,
Ifenghien ,
Champagne ,
6
71
bar
.
RESERVE.
Lieutenant
General
Mrle Chevalier de Luxem
bourg
Brigadiers
Mrs Bellerieux , Mauny.
IV PARTIE
INFANTERIE
La Marine ,
Bigore ,
Santerre ,
2 bat
.
2
2
6
Lannois
Luxembourg ,
S. Second ,
Lafond ,
2
6
12
Lieutenans Generaux de la
feconde ligne.
Mrs Magnac , Galmoy,
Vivans , Puiffegur , VieuxFO
MRGURE
.
pont, Dreux, Brendle, Lée,
Geoffreville
.
Maréchaux de Camp.
Mrs Beauveau , Comte
de Nille , Leffars , Ifeng
hien , Mouchy , Miromelnil
, la Mark , Chevalier de
Roye.
Brigadiers.
,
M'S. Poange, Gaydon ,
Daultane Sandrusky
Rios , Capy , Montal , S.
Morel, Depinay, la Chaux,
IV. PARTIE IT
May , Grenets , Mercy ,
Sury , Lionne , de Lifle ,
Remirecourt , Gondrin ,,
Beringhen , Meleun , Saa
SECONDE LIGNE.
CAVALERIE.
Colonelle Generale , 3 efd.
S. Poanges ,
Ligondez ,
Chartres ,
Maifontiers ,
Clermont ,
2
2
7
3
2.
12 MERCURE
Daultanne
Villiers , 2
Grandmont
Aubeterre,
2
2
8
Brabant ,
S. Phal
Caycux ,
Efclainvilliers ,
Rios
,
S. Blimont ,
Montauban ,
Capy ,
Cravattes,
2
2
2
3
6
6
41 cfc.
7
IV.PARTIE 13
INFANTERIE.
Poitou ,
Lorraine ,
Miromefnil ,
2 bat
.
2
Tourraine,
Charollois
,
2
Bugey ,
2
6
Limofin , 2
La Chaux I
Boufflers ,
Villiers Suiffe ,
2
S
3
44 MERCURE
May ,
3
G
Brendle, 3
Surbeck , 3
6
Gardes de Baviere , 4
Heffy ,
Phiffer ,
4
3
3
Royal Rouffillon , 2
Lionne ,
Laonnois ,
La Fere ,
Tournefis,
Beauce ,
2
2
IV. PARTIE is
Tourville,
Barrois ,
Agenois
,
Greder Allemand 2
Solre ,
Gondrin
,
6
63 bat.
CAVALERIE
La Reine ,
Beringhen
Eftaniol
,
eſc.
3
16 MERCURE
Toulouze 3
Meleun ,
Dupalais ,
Lenoncourt ,
Flandres ,
Gouffer ,
Joyeuse ,
2
2
2
2
23 cfc.
RESERVE.
Lieutenant General.
Mr de Coignies.
7
8
IV. PARTIE 17
Brigadiers.
Mrs Bellefond, S. Savin .
DRAGONS.
la Reine
Hondfchot ,
Coettiman ,
3 cfc.
3
3
Chaſtillon , 3
Guyenne , 3
G
Droffia , 3
S. Chaumont , 3
Bonnelles , 3
9
Fuillet 1711
24
efc.
4.
B
i
18 MERCURE
AUTRE RESERVE.
Lieutenant General..
Mr de Broglie.
Brigadiers.
Mrs Tarneau, Combout,,
Paſteur.
CAVALLERIE.
Le
Roy ,
La Tour ,
Beauveau ,
Tarneau
3 eſc.
2 .
2
2
J
IV. PARTIE 10
Combous ,
2
Du Belley,
2
Biron ,
2*
Houffards de Nerville , 1
Paſteur , Dragons , 2
3*
18 efc.
CAMP SEPARE
Lieutenans Generaux.
Mrs Sailly , Conflans
Reichberg , du Rozel , S.
Fremont.
Bij !
20 MERCURE
Maréchaux de Camp.
M's S. Mortany , Santigny
, Prince Charles.
Brigadiers.
Mrs Nugent , Gaffé , Danumis
, Jouy ,. Girault , S.
Micault , Locatelly, Cloys ,
Prince de Bergets , Midefars
, Flavacourt.
>
CAVALLERIE.
Royal Eftranger, 3 cfc.
Villeroy, 3
IV . PARTIE 21
Nugent
2
Dauphin Eſtranger , 3
Vauldray ,
Matignon ,
Bourgogne ,
Gefvres ,
Villequier ,
Orleans ,
Villepreux
,
Dumaine ,
Frezin ,
Condé ,
2
2
2
3
3
3
2
3
2
8
5.
22 MERCURE
Bourbon , 3.
Arcobau , 3
Loctelly ,
2-
S
Carabiniers , ΙΟ
IO 10 *
Gardes d'Espagne 2
Gardes de Baviere 2
DRAGONS.
Royal ,
Flavacourt ,
-2
2*
4
62 cfe,
IV. PARTIE 28
RESERVE.
Brigadiers
Mrs Livry , Sebret :
INFANTERIE
Beüil
Mirabeau
,
Nivernois
,
2 bar
2
2
Perche ,
Cambrefis
2
Spaar ,
2
12
24 MERCURE
AUTRE CORPS. "
Lieutenans Generaux.
Mrs la Ficzeliere , Bouzols
, Davaray.
Maréchaux de Camp.
Mrs Cofta , Mimur .
Brigadiers.
Mrs Thourotte , Montjoyc
, Livry.
IV . PARTIE. 25
CAVALLERIE.
A
Thourotte , 2 efc
.
Pardeilhan ,
Raigecourt ,
6
Cofta , Bav. 3
Posh , Bav.
S
Prince Lambefc ,
Livry ,
Meltre de Camp GCnerale
,
3/
2
Juillet 1711.
3
8
42
efc.
4.
C.
26 MERCURE
Royal Artillerie ,
Bombardiers
,
2 bat.
3
Houffards de Rasky 3 efc.
camperont au Quartier
General.
Totaldes Escadrons , 252.
Total des Bataillons ', 161 .
On a fait depuis plufieurs
détachemens pour l'Allemagne.
IV. PARTIE 27
Ordre de Bataille de l'Armée
des Alliez en Flandres ,
commandée par le Duc de
Marlborough.
GENERAUX.
Le Duc de Marlborough ,
le Comte de Tilly , le Prince
hereditaire de Heffe, Dopsf,
Prince d'Orange , Bulleau ,
Lumelly.
Lieutenans Generaux.
Hompeſch , P. H. Hem-
4. Cij
28 MERCURE
bery , P. G. de Helle , Efbach
, Heyden , Murray ,
Palland , Holſtein - Beck ,
Rantzau , Withers , Norsh ,
Oiknay , Scoulembourg ,
Cadogan , Mans , Temple ,
Roffe , Word.
Autres Officiers Generaux.
Kellun, Bothmar , Peutz ,
S. Laurent , Prifoofe , Euvars
, Sibourg , Subin , Vegelin
, Ranch , Ivoy , Hamilton
, Exk , Pritzelvaitz ,
Wirtemberg >
Strakembourg
, Chanclos , SalxemIV
. PARTIE 29
keylbourg , Brelembach
Hagn , Duvel , Sillion , Ruffel
, Moriffon , Hamilton ,
Du Breül , Stutter , Ruhlereu
, Berchoffer , Douglas ,
Leinkesfeld , Vorſt , Loohaux
, Glinsha , Lalech ,
Sairs , Macfbag
.
ESCADRONS.
Royal Ecoffois ,
3
d. Royal Irlandois , 3
Lauly ,
Cadogan ,
Harwich ,
3
2
2
Palmes , 2
4. Ciij
30 MERGURE
Woord ,
Betmard ,
Elle ,
Wight ,
S. Laurent ,
Frechapelle ,
2
4
3
2
2
2
2 Grosk ,
Peutz ,
Sculembourg ,
2.
Leib ,
Hagn ,
2
2 R2
4d.
Bulow ,
BATAILLONS.
Gardes Britanniques , 2
Royal
I
Subin ,
IV PARTIE. 31
Newton ,
Hasford ,
I
I
Royal ,
Privrofc ,
Erram ,
Duvel
,
Selvin ,
Preftion ,
Suton ,
Ingolsby ,
Veebb ,
Sibourg ,
Prikaabh ,
Eecle
,
I
I
I
I
I
L
I
I
Noorth ,
Hamilton ,
Wym ,
4 Ciiij
32 MERCURE
Orrery ,
Gauvin ,
Greck.
Mileville ,
Dixprembouck ,
Belling ,
Du Breüil ,
Rantzau ,
I
I'
I
I
Orange
2
Fagel ,
1
May,
Wigers ,
Holfteinbeck ,
Prince Maximilien ,
I
I
I
IMarquel
,
I
Lircdal ,
I
Croonsprins ,
I
IV.
PARTIE . 33
Croonsfront , I
Chambrier ,
Wondebourg , I
Douglas ,
Colliot , I
Muray ,
Gardes
Hollandoifes , 3
ESCADRONS.
Vandernach,
Tilly .
6
2
Oyeu ,
Villingosf,
Grouveftin ,
Wirtemberg
,
Cralinge ,
Chanclos ,
I
2
23
34 MERCURE
Lalech ,
2
Erbach ,
2
Prince hereditaire ,
2
Gardes bleues , 2
Gardes du Corps ,
Carabiniers ,
I
4.
Smitterm ,
Gardes ,
4
S
Generaux de la feconde Ligne,
Albemarle , Fagel , Prince
d'Anhalt .
Lieutenans Generaux.
Oyeu, Vittentotf, Lalech ,
IV. PARTIE 35
Athlone , Dohna , Colliers ,
Lander,Frankenſtein,Natzmer.
Autres Officiers Generaux.
Dorfling, Hackemborn ,
Du Portail , De Veyne
Trosfel , Berg , Croon ,
Gauvin , Hafuvoudent
Vixoufe , Weftimiler , Koppel
, Grovenftein , Du Portail
, Comte Moornay ,
Shemefan, Bechleren, Wau--
ters , Vanderſbeck , Wichfurft
, Rador , Recdert
Cofcritz, Chambrier, May,
Smettingh , Cronftroon ,
Wallesf , Benthen , Hum-
+
36 MERCURE
nefben , Bechleren , Wittemhorf.
ESCADRONS.
Leib ,
Etlbreigt
,
4
d...
4
Souvelzi ,
4
Anfpach ,
4
Dorsflingue ,
4
Panevilz ,
Leib ,
Croonfprins ,
3
3
Be
3 '
Prince Philippe ,
Heyden ,
Portal ,
Cat ,
3
2
32
2
IV.
PARTIE 37
Bataillons.
Gardes ,
Albregl,
Leib ,
Croonfprins ,
2
B2
丸
3.
2
Lollern , 2
Erpprins ,
I
Alsdhna ,
Varenne ,
Jouy-Dhona ,
Heyden ,
Anhn & Zelbz ,
Denhol ,
Treler ,
Gromhonn ,
I
I
I
I
H
38 MERCURE
Cofcritz ,
Stamaiſter ,
Lerkoors ,
Baldeuvin ,
Delleur ,
Telkelemberg
,
Rantzau ,
Albermarle
,
Streeshen ,
Elft ,
Nigelin
,
I
I
I
I
I
I
I
S. Marais ,
Charcauſe ,
I
I
Innens , I
Pariot , 1
Maurice , 1
IV .
PARTIE 39
I
Bugwiftz ,
Metrail ,
Dobrobiky ,
Hauler ,
Bernard ,
Groy ,
Pallanne ,
Heyden ,
Ilangereberg ,
1
4
3
2
2
2
2
ESCADRONS.
Walleff,
Hoffemhomb ,
Saxemheylberg ,
Eck ,
Humnerben ,
2 2 2
40 MERCURE
Guichel ,
Sgrabemvoir ,
Voorst ,
2
Rechteren , 2
Briftzeelw , 2
Athlone , 2
Prince
d'Orange ,
Gardes du Corps ,
Dopff,
2
4
IV. PARTIE . 41
Ordre de Bataille de l'Armée
des Alliez en Flandre , commandée
par
le Prince Engene.
GENERAUX.
Le Prince Eugene ,
Le Duc de Wirtemberg ,
Le Comte de Velen .
Lieutenans Generaux.
Averoche , Gordorf ,
Schwertzel , Wilcke , Mercy.
Fuillet 1711. 4. D
42 MERCURE
Generaux Majors.
Cheufe , Weffenfelz
Milhan , boiffet , Prince de
Heffe Philipidal , Sachen ,
d'Albert , Sechembach
Bonneval , Statzfelt , Souchon
, Prince Lobkowitz ,
>
ESCADRONS.
Colonitz , Houffards , s
Felz ,
6 d
Palafi 6 d
Weſterla , 3
Mercy ,
6 .
IV . PARTIE. 43
3 R
Leyb ,
Velen ,
BATAILLONS.
3 d
Holſtein , 2
Baaden ,
2
Grenadiers , I
Taftring ,
I
Dalbert ,
Fechembag ,
Wanderbeck ,
Caftel ,
Erf Prince Wolffen
I
[
>
Beveren Wolffen
Gardes de Heffe I
Efterde ,
t
4 Dij
44 MERCURE
Erf Prince de Heffe , I
Schwerizel ,
Romeleny ,
I
Sugnen ,
Bonnard ,
I
I
Preternis ,
Boiffet ,
Vanſtoker ,
Gardes Danoifes ,
ESCADRONS.
Leib , Saxon .
I
Remechet ,
Leib ,
Weiffenfeltz ,
Erf. Prince Heffe ,
Cheux , Danois.
4 R.
4
2 B2.
4
2
IV . PARTIE 45
Kneyl ,
Leib ,
Wirtemberg ,
2
2 B2.
S
General de lafeconde Ligne.
Le Comte de Felz.
Lieutenans Generaux.
Lagnace , Caunflz , Vanderberk
, Schellart .
Generaux Majors.
Schemetteau , Heynflein ,
Sechendorf , La Roche
Sternfelz , Velen .
46 MRCURE
ESCADRONS.
Spleny , Houffards , s
S. Amour , 6 d.
Dandigneres ,
2 d.
Wirtemberg ,
4 d .
Falkeftein , 6 d.
Halzfelt , 3
Shellart ,
3
BATAILLONS.
Grenadiers Paffor ,
Sulzbach ,
Saxemmeynteing ,
Iffelbach
IV.
PARTIE. 47
Grenad .
Wirtemberg , 2
Harinans ,
Sternfeltz ,
Schwartz
,
Etrerfelz ,
Caves ,
2
t
I
Radinge ,
Deucheft ,
Prince George de Heffe , t
Koomugmac ,
Weiffenfelz ,
Wakerbart ,
Schendorf,
Gelz ,
Furftemberg ,
Charprins ,
Gardes Saxe ,
I
I
48 MERCURE
ESCADRONS .
Milkan , 4
Spiegel ,
Boinebourg ,
Averches ,
Brochedorf ,
Schemetteau ,
Wirtemberg ,
Grabo ,
Rantzau ,
2
2
4
4
2
2
2
Total des deux Armées ,
Bataillons
Escadrons,
148
256
Les Alliez ont auffi fait
des détachemens pour l'Allemagne.
IV. PARTIE :
49
Le 27. Juin une partie
de la Garnifon de Douay
fortit dans le deffein d'aller
rompre une digue qui
retenoit les eaux de la
Scarpe & de la Senſée , &
qui eftoit couverte par un
petit Chafteau & par une
Redoute prés d'Arleux.
Ces Troupes ne pouvant
rompre la Digue fans
s'eftre auparavant empa-y
rées de ces poftes , elles les
attaquerent ; mais quoy
qu'ils ne fuffent gardez
que par foixante & dix
hommes ils fe deffendi-
4 E
Juillet 1711 .
o MERCURE
s .
cent fi bien que leles Ennemis
furent obligez de fe
retirer avec perte , ainfi
qu'ils avoient déja fait plu
fieurs autres fois aupara
yant,fed Si to
we
O COMITIROL
Cependant ayant refolu
de s'en rendre maiſtres à
quelque prix que ce fuft
parce que cette Digue empefchoit
la navigation de
la Scarpe & du Canal de
la Deule , & qu'elle rete,
noit les eaux de maniere
que les Moulins de Doujay
ne pouvoient tourner , ils
firent marcher la nuit du
IV. PARTIE. ft
cinq au fix Juillet huit mil
le hommes tant Cavalerie
qu'Infanterie
, avec quatre
pieces de canon pour les
attaquer de nouveau. Les
foixante & dix hommes
qui les gardoient , ſe deffendirent
fi vigoureuſement
qu'ils tuerent beaucoup
de monde aux ennemis
; mais enfin la breche
ayant efté faite ils furent
emportez d'affaut & faits
prifonniers au nombre de
foixante
& fix , quatre
ayant efte tuez.ovJog911
Les Ennemis s'en eſtant
A E ij
32 MERCURE
rendus maiftres , reſolu
rent de les bien fortifier
afin de les mieux confera
ver. Pour couvrir leurs
Travailleurs its pofterent
douze Elcadrons & dix
Bataillons à une demi
licue de Douay , la droite
à Goulzin , & la gauche à
Sains-leNoble , ayant det
riere eux les inondations
& le ruitfeau du Moulinet.
Mr le Marechal de Villars
alla le 9. reconoiſtre
ce Camp , & trouva que
la droite eftoit fi peu appuyée
, que fi l'on pouvoit
cel
IV. PARTIE 53
cacher la marche de nos
Troupes , il feroit facile
de le forcer. La difficulté
eftoit de faire arriver les
Troupes fous Bouchain
partant des Portes d'Arras
& du Camp qui eftoir
entierement découvert
par les grandes Gasdes
Ennemis.
an La nuir du 9. au 10. ce
Maréchal fit marcher plufeurs
Pontons , avec ordre
de les cacher le jour fous
des arbres prés de l'Eſcaut,
& aprés avoir fait recon
noiſtre le terrain entre
E iij
54 MERCURE
Bouchain & les Ennemis
par Mole Baron de Raski
Colonel des Houffards , il
détacha trente Efcadrons
des Gardes du Corps ,des
Grenadiers à cheval de
Dragóns , de Cavalerie &
de Houffards , fous les or
dres. Mr le Comterde
Gaffion , avec Mrle Madquis
de Coignies ,le Prince
Charles de Lorraine , &
Mr le Marquis de Hautefort
, des Mouſquetaires ,
Marchaux de Camp ; Mr
le Duc de la Tremoille ,
Mr Gaydon , Mr le ComIV
. PARTIE 55
te de Saumery , Mr de St.
Serving & Mr de Belle
fond , Brigadiers , Mr le
Prince de Marfillac , Mr
le Duc de St. Agnan , Mr
de Prince de Lambefc, Mr
de Manicamp, Mr. de
Chabannes , Mr d'Arembergry
Mr de Rotten
bourg , Mr de Leémout ,
Mrdu Til , Mr le Marquis
de faint Chaumont , Mr
dess Granges , & Mr de
Beaufremont , Colonels.
M Mr le Marquis de Coignies
marcha le premier
fous Bouchain avec les
4 E iiij
56 MERCURE
Dragons , & il fe tint fur
ilfe
Jes BONGS
,
pour
empekcher
que des Villages voi
Cher
fins il ne puft aller per
fonne au Camp des Enne
mis , & que leurs partis ne
puffent découvrir nos
Trcupes quand elles y arriveroient.
Lorfqu'elles
fortirent du Camp les
Houffards & les Cavalierss
défilerent la plus grande
partie à pied , les autres
tenant leurs chevaux en
main comme s'ils eftoient
allez en paſture. , TIQVHOD
Pendant une partie de
IV. PARTIE. $ 7
journée on fit faire l'e
xercice aux Troupes du
Campfur les lieux les plus
élevez , & à dix heures on
ordonna à tous les poftes
de la Scarpe , de l'Eſcaut
& de la Sensée ,
d'arrefter
tous les payfans fous prétexte
de quelques Eſpions
qu'on avoit eu avis qui
avoient examiné le Camp.
Toutes ces
précautions
ayant efté priſes , Mr de
Gaflion arriva fous Bouchain
fans avoir efté deth dé
couvert , & marcha enfuite
avec Mr de Coignies
ys MERCURE
peur aller attaquer les En
nemis. Harriva à la poin-
Te du jour prés de leur
Camp où il fepara
Troupes en quatre corps ,
dont il forma quatre li
ra fes
gnes qui fe foutenoient
fune Fautre. La premiere
eftoir compofée de trois
cens Dragons , & d'un pareil
nombre de Houffards
commandez par Mr le Baron
de Raski leur Colonel
, qui avoit encore efte
la nuit , luy fixieme , reconnoiftre
s'il n'y avoit
point quelque ravinebu
IV. PARTIE. 39
chemin creux qui couvriſt
le front des Ennēmis ; la
feconde eftoit de Dragons
& de Cavalerie , & les deux
autres entierement de Ca
valerie , la quatriéme qui
fervoit de Reſerve eftoit
commandée par Mr de la
Tremoille .
On arriva en cet ordre,
fans eftre découvert ,
dans le Camp ennemi juf
qu'à la garde de l'Etendart
qui fue taillée en pieces ,
dés qu'elle cut crié : Qui
vive . En mefme temps les
Houffards & les Dragons
*。MERCURE
de la premiere ligne fe
depanderent donne-
4
rent l'alarme par tout le
Camp en tuant tout ce
qui fe rencontra fous leur
main à coups de fufil , de
piftolet , & de fabre . Quel .
ques pelotons d'Infante.
rie firent feu fur nos
Troupes , mais ils furent.
bientoft diffipez.on en tua
une partie , & le refte fe
fauva dans le chemin cou
vert de Douay. Le carna
ge fut beaucoup plus
grand dans la Cavalerie
ennemie qui n'eut pas le
IV. PARTIE. 61
temps de fe former en
corps un grand nombre
d'Officiers & de Cavaliers
ayant efté tuez dans leurs
Tentes . Il y a eu des Regi
ments dont il n'eft pas refté
cent hommes , & un
entr'autres dont il n'en
eft refté que cinq , ce que
l'on a appris par des Lettres
venues de Douay le
lendemain
de l'action .
Tout le Camp fut pillé , &
l'on mit le feu à ce que l'on
ne put emporter aprés que
Fon cut ramaffé prés de
treize cens chevaux qui
a
62 MERCURE
onteſté emmenez aau
Camppavec les prifonniers.
On a pris auſſi plufieurs
Etendarts & quel
ques paires de Timbales,
Nous avons perdu en cette
action Mr de Coëtmen
Colonel de Dragons
, Mr
le Baron de Rafki a efté
bleſſé ainſi que quelques
Officiers
de Dragons
. M
Aprés avoir refté plus
d'une heure fur le Champ
de Bataille , Mr de Gaffion
fit fa retraite fans eftre
pourſuivi , Il s'eft conduit
dans cette action avec
IV. PARTIE. 67
beaucoup de prudence &
d'habilleté , ainfi que Mr
de Coignies & tous les autres
Officiers Generaux &
Subalternes , & particulierement
Mr le Baron de
Rafki
oba su
Mr le Marechal de Vil
lars , pour favoriſer leur
retraite, avoit fait avancer
Mr d'Albergoti & Mr le
Prince d'Ifenghien au village
d'Aubigny avec deux
mille Grenadiers , & fit atsaquer
par Mr le Comte
de Brogho les gardes a
vancées de l'aile droite de
24 MERGURE
l'armée ennemie,afin d'at
tirer leur attention de ce
cofté la , les Houffards les
poufferent du cofté de
Lievin ils tuerent plu
fieurs Cavaliers , en prirent
auffi plufieurs , & ra
menerent foixante che
vaux. !
Nouvelles du Nord
de Pologne
,
•d'Allemagne.ta
Les Lettres de Craco
vie , de Varfovie , & nde
Drefden , venues de Jarof
Jaw
V. PARTIE. 65
law portent que le Czar
avoit fait marcher 25000.
hommes fous le comman
dement du Comte de
Wilback pour s'appro
cher du Danube , & empef
cher les Turcs de paffer ce
Fleuve, que pour cet effet
ce General avoit fait con
ſtruire deux Ponts fur le
Borifthene pour faire paf
fer l'Infanterie , que l'un
de ces Ponts devoit eftre
conftruit au deffous de
Rafov , & Fautre dans un
lieu plus prés de Bender ,
pour aller inveftir cette
Juillet 1711. 4 F
66 MERGURÉ
Place avant l'arrivée du
Grand Vifir.
LAIKOZA
D'autres Lettres portent
les Mofcovites aprés que
s'eftre affemblez à Braclaw
, s'eftoient avancez du
315
cofté de Jampol , mais que
file Roy de Suede eftoit
obligé d'agir avant la jon
ction du Grand Vifir , il
pourroit affemblerune ar
mée de quatre vingt mille
hommes de fes propres
Troupes , de celles du Pa
latin de Kiovic , de Turcs,
de Cofaques , & de Tarta
res qui faifoient de freIV.
PARTIE. 67
quentes courfes dans les
Palatinats de Kiovie , de
J
Servie , & de Czervikowie
, d'où ils remportoient
beaucoup de burin . Ces
mefmesLettres adjouftent
que lesHofpodars de Moldavie
& de Walaquie avoient
receu ordre d'affembler
& de faire conduire
du cofté de Bender ,
deux à trois cens mille
boeufs pour la fubfiftance
de l'armée du Grand Vifir
qui eftoit en marche.
On apprend par celles
de Dantzîk que le Gene-
W
4 Fij
68 MERCURE
ral Smigielski avec un
corps de deux mille hommes
faifoit des courfes
dans la grande & dans la
petite Pologne , ainſi
dans la Pruffe Polonoife ,
où il avoit enlevé plufieurs
convois aux Mofcovites
que
aprés avoir battu les ef
cortes ; qu'il n'exerçoit au
cune hoftilité contre les
Polonois du parti du Roy
Stanillas , ou qui paroif
foient neutres , mais ſeulement
contre ceux qui s'ef)
toient declarez pour le
Roy Auguſte , que ces Pa
IV. PARTIE
latinats de Cracovie , de
Sandomir & de Lublin ,
avoient refolu de ne point
confentir à faire la guerre
aux Turcs.
Celles de
Hambourg
dus de ce mois , portent
que les Troupes Danoifes
qui eftoient dans les Ifles
de Fuhnen & de Zeeland ,
& dans le pays de Judland,
marchoient
du coſtéo dul
Holftein où le Roy de
Dannemarcevouloit
af
fembler
une Armée de
vingt cinq mille hommes :
pour entrer dans la Pome10
MERCURE
ranie ou dans le Duché de
Bremen , fi l'Armée Suedoife
marchoit vers la Po
logne , Que dans les Conferences
tenuës entre le
Czar & le Roy Auguſte à
Jaroslaw , il avoit efté refolu
que
les
Armées
de
la
Couronne
& de
Lithuanie
fe
tiendront
fur
la
défenfive
, & n'exerceroient
aucune
hoftilité
contre
les
Turcs
qu'en
cas
qu'elles
en fuffent
attaquées
. H
IV
PARTIE
Extrait d'une Lettre de
Lauterbourg du 6.
Sorby Juillet.
Nous avons fait trois
grands fourages en quatre
jours de tempsfans quelesEm
nemis ayent paru , quoyque la
plaine de Camdel où nous avons
fourrage foit éloignée de
quatre lieues d'icy, & affez
prés de Landau Nous atten
dons le premier Détachement
de Flandres qui doit arriver
le 13. à VVeiffembourg, où
Mr le Marechal d'Harcours
7 MERCURE
va eftablir fon Quartier pour
quelques jours. Mr le Mare
chal de Bezons a le fien à
Feltz , Mr le Comte du
Bourg eft à Moutre , petit
village prés du Rhin ,
une lieue d'icy. Ily a appar
rence que nous nous mettrons
bientoft en mouvement ,
Les Lettres de Vienne
portent que l'Archiduc a
nommé les Comtes de
Liechtenſtein , & de Kinf
ki , Mr de de Conſpruck ,
pour eftre fes Ambaſſa
deurs Plenipotentiaires à
Francfort en qualité de
Roy
IV. PARTIE. 73
Roy de Boheme , mais que
le premier s'eftant excusé
d'accepter cet employ ,
I'Imperatrice Regente avoit
nommé en fa place le
Comte de Vindiſcgratz ,
& qu'on croyoit que cette
Commiffion feroit donnée
au Prince Lobkowitz,
parce que le Comte de
Vindifcgratz eftoit´indifposé.
ག ོ་ ཡ
Celles de Berlin marquent
que le Comte de
Donha qui a efté nommé
par l'Electeur de Brandebourg
pour aſſiſter auſſi à
Juillet 1711. 4 G
74 MERCURE
cette Election en qualité
d'Ambaffadeur Plenipotentiaire
fe difpofoit à
partir , qu'il feroit accom
pagné par M › Mardefelt
& Hennings ; qu'il auroit.
un équipage & une fuite
magnifique ; que M. Viereck
feroit Marefchal de
l'Ambaffade ; qu'il auroit
plufieurs Gentilshommes ,
un Secretaire , douze Pages
, vingt - huit Valets de
pied ; quatre Gardes Suiſfes
, & deux Trompettes.
IV. PARTIE.
budsup ng noia
Nouvelles d'Espagne
.
6 moloqlib : 4
moLettre de Corella
lotol du 28. Juin.
*
asi Depuis que la Reine eft
icy, elle a repris fon eftat or
dinaire & fe porte parfaitement
bien.
*
29 Monfieurde Vendofme doit
partir le 8 , du prochain de
Sarragoffe pour l'Armée de
Catalogne . La jonction des
Troupes de France avec celles
d'Eſpagne fefit le 19 .
mais le
manque de vivres & de mu-
4 G ij
76 MERCURE
nitions en affez grande quantité
a empefché jusqu'à prefent
les Troupes d'avancer
dans un Pays que
les Ennemis
ont entierement ruinépour
nous empefcher
d'y pouvoir
fubfifter ,fans avoir de tresgrands
Magafins.
Madame la Ducheffe de
Popoli eft morte.
Il est arrivé à Penifcola
vingt-cinq mille fanegas de
grains, up.
D'autres Lettres portent
que l'on continuoit
de travailler aux fortifica
tions de Cervera ; que les
a
IV.
PARTIE. 77
-"
Troupes augmentent tous
les jours en ces quartierslà
, que les Alliez eftoient
tousjours dans leurs mef
mes Quartiers ; qu'ils faifoient
approcher lesTrou
pes Allemandes pour eftre
toutes fous le même Commandant
qui devoit eftre
le General Vezel quieftoit
le feul de leurs Generaux
qui fuft encore forti de
Barcelone ; que le bruit
couroit qu'ils fe devoient
mettre inceffamment en
Campagne , & que leur
premier Camp fera prés
4 G iij
8 MERCURE
de Tarragones mais que
les provifions leur manquent
, & que leur Artille
rie n'eft pas prefte, Slove
Celles d'Eftremadure
portent que les Portugais,
aprés s'eftre tenus longtemps
dans un Camp avantageux
, avoient
envoyé
quelques
détache
mens du cofté de Zafra
pour lever les contribu
tions , & s'eftoient enfuite
retirez ; que M. le Marquis
de Bay pour les obliger à
fortir de leur Camp , avoit
fait bombarder
Elvas ;
IV PARTIE . 79
qu'il s'eftoit avancé enfuite
vers la ville de Borva
qui avoit efté pillée, & qui
avoit donné feize mille
Ecus pour empefcher
qu'on n'y mift le feu , &
qu'un de fes Partis avoit
deffait trois cens Grena
qu'ils
diers que les Portugais
avoient fait courir le bruit
attendoient des
Mortiers pour bombarder
Badajoz par repreſail ·
les , & que fi M. le Marquis
de Bay s'y oppofoit ,
ils luy donneroient bataille
, que ce General , en
4 G iiij
80 MERCURE
ayant efté informé s'étoit
approché d'eux que les
Ennemis le voyant en leur
prefence , s'eftoient avancez
en batailles mais
qu'ayant reconnu que M.
le Marquis de Bay fe dif
poloit à les
bien
re
ils avoient défilé fur leur.
gauche , & eftoient allez
camper plus loin entre la
Caya & la Catola vers la
Tour de Segovie ; quent
quelques jours aprés ils
publierent encore qu'ils
retourneroient pour atta
quer M.le Marquis de Bay 2
IV.PARTIE 87
qu'ils abattroient
, parce
qu'ils eftoient plus forts
que luy en Infanterie ; que
cependant il s'eftoit encore
avancé, & avoit campé
en leur prefence , fans
qu'ils euffent ofé venir à
luy
&
D'autres Lettres confirment
que M. de Monte-
Negro avoit repris Caravalajez
; qu'il eftoit enfuite
entré en Portugal
par la Province de Tra
los -Montes , où il avoit .
détaché Dom Nicolas de
San Severino avec un
82 MERCURE
Corps de Cavalerie , qui
avoit pris la villende Vi
miofo, fituée quatre lieuës
au- deffus de Miranda &
que M. de Monte - Negro
l'ayant fuivi avoit prissle
Chafteau ou il y avoit
deux Compagnies d'In
lay
fanterie , & où il avoit
trouvé beaucoup de mu
nitions de guerre & de
bouche.
Sliq
PRISE Sob
Six Vaiffeaux Hollan
dois venant de Curaffo ,
IV. PARTIE . 83
ont efté pris para trois
Vaiffeaux François , la Fi
delle & la Mutine armez
à Dunkerque, & leJúpiter
armé à Bayonne. Ces fix
Vaiffeaux ont efté amenez
à Paimbeuf ; ils eftoient
chargez de Cacao , d'Indigo
, de Tabac, de Sucre,
de Bois de teinture , de
plufieurs autres Marchandifes
, & de trente mille
piaftres, le tout eftimé plus
de douze cens mille livres .
Une Barque Françoife
a pris un Baftiment de
douze canons , fur lequel
84 MERCURE
"
Ro
les Ambaffadeurs du Royaume
de Naples qui alloient
à Barcelone étoient
119,549
embarquez. Ils portoient
trente- deux mille piftoles
à l'Archiduc.
M. l'Aigle a pris &
conduit à Alicante un
Vaiffeau Majorquin chargé
de cinq mille cent
Quintaux de Froment. Ce
Vaiffeau alloit à Barce
lone.
Tab
૧૯
sloup
IV. PARTIE.
HAUS
by
fen
Mon-
Service
pour
feu
Monfeigneur
le Dauphin
.
l'Eglife
Le 18. Juin on fit dans
ife de l'Abbaye Royale
de S. Denis le Service
folemnel pour le repos de
l'Ame de feu Monfeigneur
le Dauphin .
Toutes les Portes de la
Ville eftoient tendues de ..
noir fans Ecuffons ; celle
de l'entrée du Parvis eftoit
ornée de Cartouches & de
petits Ecuffons , entre lef
quels il y en avoit de
86 ว
MERCURE
grands aux Armessilde
Monfeigneur. Les trois
grandes Portes de l'Eglife
eftoient tendues , ainfi que
toute la largeur du Portail
juſques aux petites Tou
relles. La Nef eftoit couvertejufqu'à
dix ou douze
pieds de la voute , ainfi
que les bas coftez, & ornée
de plufieurs rangs de Car
touches & d'Ecuffons.
Au deffus de la Grille
ou des Jubez , pendoit dépuis
la voute un grand
Tapis noir qui garniſſoit
tout l'efpace d'entre les
IV. PARTIE . 87
piliers.Au deffous de ce
Tapis on avoit appliqué à
la grille un Jubé de menuilerie
qui avançoit d'environ
vingt pieds dans la
Nef, & dans lequel la Mu
fique fur placée . De chaque
cofté du Choeur au
deffus des hautes Chaiſes ,
regnoient jufqu'à l'Autel,
fix grandes pieces quarrées
de drap noir bordées
d'Hermine
& ornées
dans le haut & dans le bas
Id'une Bande de trois
rangs en Quinconge femée
de Larmes d'argent
,
>
88 MERCURE
de Dauphins, & de Fleursde-
Lys d'or. Entre cha
cun de ces grands quarrez
eftoient des bandes en forme
de pilaftres auffi femez
de Larmes , de Dauphins,
& de Fleurs de - lys. Dans.
le milieu de ces pilaftres
eftoient de grands Ecuffons
aux Armes & aux
Chiffres de Monfeigneur
alternativement
, ainfi que
fur les Corniches qui eftoient
furmontées d'un
grand Luminaire qui regnoit
tout autour du
Choeur, Vis - à - vis des
Ecuffons
IV. PARTIE. 89
Ecuffons qui eftoient au
deffous de la Corniche
d'enhaut , on avoit attaché
des Girandoles garnies
de
Cierges.
La Repreſentation
ef
toit élevée de huit degrez
fur un Champ
quarré de
deux pieds & demi de
haut , fous un Dais fouftenu
de quatre
Colomnes
.
Au deffus de ce Dais eftoit
une Couronne
fermée
de
dix Dauphins
heriffez
de
pointes
où l'on avoit mis
des Cierges
qui formoiént
un Groupe
de Luminaire
Fuillet 1711. 4 H
90 MERCURE
•
dont l'effet eftoit fort
beau. Du milieu de ce
Groupe fortoit un Cierge
qui eftoit beaucoup plus
élevé que les autres , & les
degrez de la Reprefental
tion eftoient tout couverts
de Chandeliers .
6 zina
Il n'y en avoir que fix
fur le Grand Autel , & fix
au deffus du Contre Ta
ble , à la hauteur duquel
partoit des deux coftez
des Courtines de velours
garnies de franges d'ar
gent & d'Ecuffons , & il y
avoit des Rideaux de fatin
IV. PARTIE. 91
qui eftoient attachez aux
Colonnes de l'Autel .
5. Au deffous du Contre-
Table eftoit une grande
Croix de Moire avec quatre
grands Ecuffons fur du
velours , furmontée d'un
Dais avec les Rideaux ar
reftez , qui cachoit entierement
l'eſpace depuis le
Contre Table jufques à la
hauteur du Luminaire
d'enhaut . Il y avoit à coté
de ce Dais deux efpeces de
Pilaftres femez de Larmes
d'argent , de Dauphins &
de Fleurs-de- lys d'or , &
Hij
92 MERCURE
accotez de deux Confoles
fur lefquelles il y avoit des
Cierges. 014950
On commença à allumer
le Luminaire à dix
heures & un quartersvolle
Monſeigneur
le Dauphin
eftant arrivé avec
Monfeigneur
le Duc de
Berry & S. A.R. Monfieur
le Duc d'Orleans, ces Prin
ces furent conduits dans
l'Appartement
qui leur
avoit efté préparé au bout
de la premiere partie de
l'ancien Cloiftre . L'Efca
lier eftoit tout tendu de
IV. PARTIE . 93
Drap noir , ainfi que le
paffage jufqu'à l'Appartement
où il y avoit un Dais.
Aprés que ces Princes y
eurent efté habillez , ils
allerent prendre leurs places
dans les trois Chaifes
hautes du Choeur les plus
proches de celle qui eft
deftinée pour l'Abbé , &
qui eſt tousjours vacante
lorfqu'il n'y en a point.
Le Requiem fut entonné
par les cinq Chantres , &
continué par la Mufique
du Roy , & enfuite Kyrie
eleifon ; & les Prélats en
94 MERCURE
entrant dans le Choeur
faluerent la Repreſenta
tion , des Princess,pola
Repreſentation de Louis
XIII. & l'Autel . Le Gele
brant eftoit M. l'Arche
vefque de Reims ; & les
Affiftans , M. l'Evefque de
Quebec ; M. l'Evefque
d'Auxerre ; M. l'Evefque
de Séez , & M. l'Evefque
d'Autun.
Dans le Sanctuaire à
droite , du cofté de l'Evangile,
eftoit un Amphitheatre
garni de Bancs
pour les Religieux de la
IV. PARTIE.
98
Maifon , qui avoient pfalmodié
Prime , Tierce , &
None dés fix heures & demie,
dans la Chapelle du
Chevet derriere le Grand
Autel, du cofté de l'Epif
tre il y avoit des Bancs
pour le Clergé , vis- à - vis
defquels eftoient cinq fauteuils
de velours , pour
l'Archevefque & pour les
quatre Evelques affiftans.
L'Epiftre fut chantée par
Dom Taveroles , Reli
gieux, Sous- Diacre, & l'Evangile
par Dom Quener,
Religieux , Diacre , deux
96 MERGURE
des Evefques affiftans ef
tant Diacre , & Sous - Diacre
d'honneur . Le Graduel
fut chanté par les
cinq Chantres Religieux ,
&la Profe par la Mufique.
L'Offertoire eftant finie ,
Monfeigneur le Dauphin
alla à l'Offrande précedé
du Maistre des Ceremonies,
qui fit les Reverences
à l'Autel du bas des degrez
du Sanctuaire , aux Princes
, aux Cours Superieures
, & au Clergé, & il alla
baifer l'Anneau du Cele-"
brant aprés avoir preſenté
le
IVA .
PARTIE. 97
le Cierge . Il y avoit dix
pieces d'or à celuy de
Monſeigneur le Dauphin ,
huit à celuy de Monſeigneur
le Duc de Berry ,
& fix à celuy de Monfieur
le Duc d'Orleans.
L'Oraiſon Funebre fut
prononcée par Mr. l'Evefque
d'Angers. Il prit pour
Texte les 13. & 17. Verlets
du 3. Chapitre des Prover
bes dont il ne fit qu'un ,
pour l'apliquer à Monfeigneur.
Beatus homo qui invenit
fapientiam & affluit
prudentia ; Via ejus , Via
Juillet 1711 .
4 I
98 MERCURE
recta , omnes femita ejus
pacifica. Heureuxl'homme
rempli de fageffe & de
prudence , les voyes fonc
toujours droites & ne tendent
qu'à da paixl ob 1091
HSQU
YON
zio On nexdonnera paint lés
Extraits des Qraifons Funebres
, parce qu'elles font imprimées,
& auffi parce qu'il y en
aura troppour entreprendre de
les donner toutes que de
donner feulement les plus belles
ce feroit marquer qu'on
eftime moins les autres, For
Monseigneur
le Dau
phin, Monfeigneur
le Duc
VALIO
THERE
DE
VILL
IV. PARTIE ON
de Berry , & Monfieur
Duc d'Orleans fortirent
de l'Eglife un peuilavant
quatre heures pour aller
fe deshabiller & ils fortirent
de leurs Apartements
al quatre heures trois
quares parla grande porte
de l'Eglife , fuivis da
Pricur , de plufieurs Religieux
de leurs Offi
ciers ; & ces Princes monterent
tous trois dans le
mefine Caroffe pour retourner
à Marly, il y a
voit plufieurs Compagnies
des Gardes rangées obli-
4 I ij
100 MERCURE
quement en haye depuis
la première porte du parvis
juſques dans la rue qui
conduit hors de Saint De
nis par le chemin de Pau
ris .
310
92 209
lly Il y eut de fi vives conteftations
entre les Cent
Suiffes
& les Gardesodu
Corps au fujer de la bar
riere
, qu'il fallut envoyer
un Exprés
à Marly
pour
fçavoir
à qui elle devoir
appartenir
. La queftion
fut decidée
en faveur
des
Gardes
du Corps
qui la
firent enlever
.
30
IV. PARTIE 101
Le 3. Juillet on fit auffi un
Service folemnel pour
le re
dans l'E
pos
de l'Ame
de fenfeigneur
le
Dauphin
, glife
de
Notre
Dame
. Mon.
fieur
de
Gardinal
de
Noailles y officia
pontificalement
; &
Le Pere
de
la Rue
Jeſuite
y pro
2002
Fordifon
Funebre
.
nonça
Monfeigneur
le
Dauphin accompagné
de
Monfeigneur le
Duc
de
Berry
& de
Mon- Mon
fieur
le Duc
d'Orleans
, eftoit
à la tefte
du
Deüil
ainfi
qu'à
celuy
de
S. Denis
; & le Cler
gé
, le Parlement
, la Chambre
des
Comptes
, la Cour
des
Aides
, l'Univerfité
& le Corps de
Ville
y affifterent
.
voient
efté
invitez
de
la part
du
Roy
par
Mr.
des
Granges
y as
1
4 Iij
102 MERCURE
Maiftre des Ceremonies, Monfieur
le Cardinal de Noailles
donna à difner aux trois Pring
ces après le Service.
On ne parlera point de
la Ceremonie de Notre.
Dame , niz de la Sainte
Chapelle ni particonfe
quent des autres quife font
faites par toute la France.
Ces Ceremonies n'ef
tant prefque que des repetitions
les unes des autres
. & de plus il faudroit
des Volumes entiers pour
bien marquer juſqu'où
les François ont porté
62153000
IV. PARTIE . 103
leurizele pour honorer
lal memoire du grand
Prince qu'ils ont perdu.b
GES
Funebres
910
190
L'origine des Ceremonies
eft auffi ancienne que celle
des Loix. Elles en font au
moins l'ornement fi elles n'en
font pas le foutien , Elles font
aufli variables que les temps,
& auffi variées que les moeurs
& les ufages des peuples , &
ce qui eft regardé comme un
honneur , dans un temps ou
dans un Pays , elt quelquefois
envifagé comme un opprobre
dans un autre.
I iiij
104 MERCURE
L'ancienne Chevaleriea
introduit beaucoup de Cere
monies extraordinaires , dans
les Pompes funebres . Lors
que les Rois ne nommoient
perfonne pour conduire la
Ceremonie , le foin en eftoit
donné en partie aux Herauts
d'Armes qui eftoient de Vice
Chevaliers inftruits de toutes
les Loix de la Chevalerie , &
qui par leurs belles actions
meritoient l'eftime du Publics
& à qui leur valeur avoit ac
quis une authorité qu'ils confervoient
avec l'âge.
Depuis le regne de Charles
VI, la qualité de Heraut s'eft
fort avilie. Les Rois ont tou
jours nommé à chaque Cere
monie quelque Seigneur de
IV.
PARTIE 105
diſtinction pour la regler furvant
l'ancien ufage.
21 Lors que Henry HI. paſſa
par l'Italie il prit du gouft
aux manieres de ces Peuples
qui aimoient beaucoup les
Ceremonies , il crea plufieurs
Charges. Et entrlautres en
l'année 1585. il fit un Maiftre
des Ceremonies ; & un Mair
fervir en fon abfence.
Les Titre de Grand Maiſtren'a
eſté donné an premier
que long temps depuis.
ftre
pour
Ilfembleroit par les Char
ges que toutes les Ceremonies
devroient eftre reglées , &
qu'il n'y auroit rien à innover.
Cependant elle font rarement
les mefmes & il arrive
fouvent quelque incident',"
106 MERCURE
chacun voulant s'elever &
empieter fur les droits des au
tres , polish 20 val floudly wo
Les Rois fe font trouvez
quelquefois fort embarraffez
pour decider avec juftice fur
ces affaires de point d'hon
neur ne fcachant préciſement
à qui il doit appartenir.
Aux Funerailles de Philippe
Augunte le Cardinal Le
gat & l'Archevêque de
Reims vouloient officier pontificalement.
La difpute fut
grande , & pour les accorder
on dreffa deux Autels fur lef
quels chacun celebra en mefme
temps & de mefme voix,
afin qu'un feul Choeur refpon
dift aux deux Officians .
Aux Obfeques de S. Louis ,
IV.
PARTIE . 107
$
le Roy Philippe III . fon fils
porta fur les épaules le Corps
ou plutoft les os de fon Pere
depuis Notre- Dame juſqu'à
S. Denis . Les Croix que l'on
trouve fur le chemin furent
élevées dans les endroits où il
fe repofa . On affure qu'il fe
fit
endroits
,
plufieurs
plufieurs Miracles en ces
meſmes
Malades y ayant reçu du
foulagement à leurs maux . La
foule du Peuple qui fuivoit le
Convoy eftoit grande . Tous
les Seigneurs les plus diftinguez
s'y trouverent ; tous les
Prelats qui eftoient alors à la
Cour , s'y trouverent en ha→
bits Pontificaux. Les Religieux
crurent que les Archevefques
& Evefques avec
108 MERCURE
leurs habits Pontificaux entreprenoient
fur leurs droits .
Ils fermerent les portes de
leur Eglife & ne voulurent
point fouffrir qu'on v
y entraſt
jufqu'à ce qu'il cuft efte refolu
que les Prelats quitteroient
leurs ornemens pour y entrer
fans pompe & Tans marque
d'authorité ni de Jurifdiction
fur eux.
444206-21670
Aux Convois où les Rois
fe trouvoient ils fuivoient
le Corps à Cheval dans les
Champs dans les Villes &
les Villages de leur paffage
ils merroient pied à terre. Cette
coutume s'eft abolie entierement
depuis Charles V.
Tous les Enterremens des
Princes ne fe font pas toujours
IV.
PARTIE. 109
2.
faits avec pompe en France,
Aux Fenerailles d'Ifabeau
de Baviere veuve du Roy
Charles VI . fon Corps fut
porté du Chateau des Tour.
nelles où elle mourut, juſqu'à
l'Eglife de S. Denis fans aucube
Pompe . Les Regiftres du
Parlement portent qu'il s'y
fit quelques Ceremonies ;
mais aucun Autheur contemporain
n'en parle Au contrai
re ils difent tous qu'on le mit
fans pompe dans un Batteau
avec un Preftre, deux Cierges,
& trois Officiers de fa Maifon
qui le conduifirent par
eau à S. Denis où les Reli
gieux qu'elle avoit comblez.
de bienfaits luy firent à leurs
frais un Service le plus hono110
MERCURE
rable qu'ils purent . Ils attri
buent la faute de ce manque
d'honneur qu'on luy devoit
aux Anglois
allfestoient
maique
ftres du Pays , & qui la ħaïffoient
ensnaroid
Aux Obfeques de Charles
VIII . vingt Gentils hommes
de fa Mailon porterent fon
Corps .
2101
A celles de Louis XII.
les hanouars ou porteurs de
fel pretendirent que cet honneur
leur appartenoit , les Rois
le leur ayant concedé dans
leurs Privileges. Les Gentils
hommes le leur cederent , &
depuis ce temps là ils fe font
confervez dans ce Droit.
Le 4. Juillet 1711. Jean
IV. PARTIE ar
29a mon 2002
AuberyMarquis de Vatan
preſta ſerment de fidélité
Movab yu no up maunoji b
entre mains de Sa Ma
jefté pour la Charge de
Lieutenant de Royau
Gouvernement d'Orlea
nois, és Pays Blaifois, Dunois
, Amboife & Vendomois
, fur la demiſſion
du fieur Comte de Sau
mery , qui prefta auffi le
ferment de fidelité entre
les mains de Sa Majesté
pour la Lieutenance Generale
du mefme departement
le 30. Juin dernier.
Ileft fils de Claude Au112
MERCURE
bery Marquis de Vatan
Baron de Moncy, & c . & de
Catherine le Coq de Cor
beville fille de Jean le Coq
Doyen du Parlement defcendu
du celebre Avocat
General qui vivoit
fous le Roy Jean , & que
la Cour nomme encore
aujourd'huy Joannes Gal-
Le Marquis de Varan
à époùfé en l'année 1689 .
Madelaine Louife dé Bailleul
, foeur , fille & petite
fille de Prefident à Mor
tier , de l'ancienne Nobleffe
IV. PARTIE 113
bleffe de Bailleul en Normandie
il a deux freres
au fervice du Roy , l'un
ancien , Chevalier de Mal
te , & Capitaine de Vail
feau , l'autre Capitaine
au Regiment des Dragons
de la Reine.
Claude Aubery pere
de celuy - cy avoit quatre
foeurs ; l'ainée mariée au
Marquis de Vieux Pont ,
la feconde au Comte de
Nonant , la troifiéme au
Comte de Vauvineux
deſquels Madame la Princeffe
de Guemené eft fil-
Fuillet 1711. 4 K
th
#4 MERCURE
le , la quatrieme au Mar
quis de Raray.
Entre plufieurs hommes
de confideration cette
Famille a donné un Jacques
Aubery , fameux par
fon éloquence , qui fut
Ambaffadeur de Henry
fecond en Angletere : il fit
un Traité de Paix entre
fon Maitreon
Edouard
VI . Monfieur le Chance
lier de l'Hopital a traduit
en Vers la ins , un fameux
Plaidoyer de ce Jacques
Aubery , dont
dont le petit
neveu Benjamin Aubery
1
IV. PARTIE. 115
fur Ambaſſadeur en Hollande
fous
Henry IV. Ils
font tous defcendus de
Pierre Aubery Confeiller
au Parlement fous le regne
de Philippe de Va-
Lois.
Il y a eu dans care fa
mille cinq Chevaliers
de
Malte , & elle eit alliée à
LaMaifon
de laTremouille
de Noirmoutier
parRenée
Julie Aubery
, qui époufa
Louis de la Tremouille
d'où font fortis Monfieur
le Duc de Noirmoutier
,
Monfieur
le Cardinal
de
Kij
116 MERCURE
la Tremouille , Madame
la Princeffe des Urfins &
Madame la Ducheffe de
Chatillon Montmorency;
elle eft auffi alliée par des
femmes des maifons de
Lillebonne , de Rohan, de
Montmorency Luxem
bourg , de Fiefque , & da
plufieurs autres Maifons
illuſtres. galapa yónDu̸MM
On peut faire une res
marque affez curieufeifur
le Marquifat de Vatan
que depuis douze cens
ans, cette Seigneurie n'ait
jamais efté vendue , ayant
IV, PARTIE fr
paffé par droit de fucceffion
foit en ligne droite j
foit en ligne collaterale ,
jufqu'ac Dame Claude de
de Prefteval de Panilleu
fe , reftée derniere heritiera
deda Maifon de Va
tan ; laquelle époufa cen
mile fix cent vingt neuf
Robert Aubery , Baron de
Moncy , qui prit alors la
nom de Vatan , & en fayeurduquel
cette Ferre
fut érigée en Marquifat.
2 Varaneftune petite Vib
les d'environ quatre cent
feux , diftante de dix licues
118 MERCURE
de Bourges & de quatre
d'Iffoudun , diftraite de
l'ancien reffort du Berry,
& foumise à celuy de
Blois 6 zda zinash shig
Ce qui prouve fonantiquité,
c'eftun ancien teme
ple des faux Dieux qui fers
depuis plufieurs fiecles de
magazin pour des Bleds.
LeMartyrologe de l'Ab
baye de S. Sulpice
Bourges fait mention que
S. Sulpice Archevefque
de Bourges en l'an cinq
cent quatre vingt ſept, du
temps de Gomiran oncle
IV. PARTIE.
du Roy Clotaire , eftoie
fils d'un Seigneur de Vaa
dans cette
tan , & il y a
Ville un tres- ancien Cha
pitre depuis plus de huid.
cent ans , fous le titre de
S. Laurian qui y fue mar
syrisé enl'an 145. par l'or
dre de Totila Roy des
den
Goths. S
On mettra dans le mois
procham les Morselet
Mariages de celuy cy , parce
que le temps me manque,
le temps me manque , parce
qu'on attend trop tard à m'ent
voyer les Memoires. Je prio
10 MERCURE
ceux qui me font l'honneur des
m'en envoyer de les écrire plus
correct ment , & je prie ceux
qui negligent de me les envoyer ·
de pardonner fi l'on fait des
fautes groffieres. Févite autant
que je puis ces inconvenients
.
en ne parlant point du tout ou
fort peu de certaines Familles
eftrangeres dont je n'ay. pås eu
le loifir de chercher les Memoires
exacts.
D'OR. 121.
ARTICLE XXII.
De l'ordre de la Marche des
Princes Electeurs , & par qui
font portées les Marques honoraires,
Our déclarer le rang que
les Princes Electeurs doi
vent tenir en marchant
avec
l'Empereur
ou avec le Roi
des Romains en public & en
cerémonie , &
ont
nous
avons ci - deffus fait mention ,
Nous ordonnons que toutes
les fois que pendant la tenuë
d'une Diete Imperiale , il
faudra que les Princes Elec
Juillet 1711.
A
$ 22 BULLE
porteurs
marchent proceffionnel
lement avec l'Empereur ou le
Roi des Romains , en quel
ques actions ou folemnitez
que ce foit , & qu'ils y portent
les Ornemens Imperiaux ou
Royaux ; le Duc de Saxe.
tant l'Epée Imperiale ou
Royale , marchera immédiatement
devant l'Empereur,
étant au milieu entre luy &
FElecteur de Treves ; ledit
Electeur de Saxe aura à fa
droite le Comte Palatin du
Rhin , qui portera le Globe
ou la Pomme Imperiale , & à
fa gauche le Marquis de
Brandebourg ,> portant le
Sceptre , tous trois marchant
de front le Roi de Boheme
fuivra immédiatement l'EmDOR.
823
pereur ou le Roi des Romains ,
fans que perfonne marche ertre
l'Empereur ou ledit Roi
& lui.
ARTICLE XXIII.
Des Benedictions des Archevefques
en la prefence de
l'Empereur.
S.1.
T
Outes les fois qu'on
celébrera en folemnité
la Meffe devant l'Empeteur
ou le Roy des Romains
& que les Archevefques de
Mayence , de Tréves & de
Cologne ; ou deux d'entre eux
s'y trouveront preſens , on
obfervera à la confeffion qui
fe dit à l'entrée de la Meffe
A ij
124
BULLE
au baifer de l'Evangile & de
la Paix qu'on prefente aprés
l'AgnusDei,& même aux Bénedictions
qui fe donnent à la fin
de la Meffe , & à celles qui
fe font à l'entrée de table &
aux graces quife rendent aprés
le repas , cet ordre que Nous
avons eftimé à propos d'y étatablir
, de leur avis & confentement
; qui eft que le premier
aura cet honneur le premier
jour le fecond , le fecond
jour ; & le troifiéme
troifiéme jour .
婴
le
§ . 2. Nous déclarons en cè
cas , que l'ordre de la primauté
ou pofteriorité entre
les Archevefques , doit eſtre
reglé fur l'ordre & le temps
de leur confecration. Et afin
DOR.
125
qu'ils fe préviennent les uns
les autres par des témoignages
d'honneur & de déference
& que leur exemple oblige
les autres à s'honorer mutuellement,
Nous defirons que celui
que cet ordre , touchant
les chofes fufdites , regardera
le premier , faffe à fes Collegues
une civilité & une honnêteté
charitable pour les inviter
à prendre cet honneur , &
qu'aprés cela il procéde aux
chofes fufdites , ou à quelqu'une
d'elles.
A iiij
126 BULLE
ARTICLE XXIV .
Les Loix fuivantes ont efte
publiées en la Diete de Metz
le jour de Noel' , l'an 1356.-
par Charles IV. Empereur des
Romains toujours Augufte,
Roy de Boheme , affifté de tous
les Princes Electeurs du Saint
Empire en prefence du Vene---
rable Pere en Dieu le Seigneur
Théodorique Evêque d'Albe ,
Cardinal de la fainte Eglife
Romaine , & de Charles Fils
aîné du Roy de France , Illuftre
Duc de Normandie , &
Dauphinde Viennois.
§. 1 . I quelqu'un eftoit
entré dans quelque Sen
D' OR. 127
complot criminel , ou auroit
fait ferment ou promeffe de
s'y engager avec les Princes
& Gentilshommes
ou avec
des Particuliers
& autres
Perfonnnes
quelconques
,
3
A
"
mêmes roturieres , pour attenter
à la vie des Reverends
& Illuftres Princes Electeurs
du faint Empire Romain ,
tant Ecclefiaftiques que Seculiers
, ou de quelqu'un d'eux ,
qu'il periffe par le glaive , &
que tous fes biens foient
confifquez comme criminel de
leze . Majefté car ils font
partie de noftre Corps : Et en
ces rencontres les Loix puniffent
la volonté avec la même
feverité que le crime mefine .
Et bien qu'il fût jufte que les
A iiij
2128 BULLE
•
>
fils d'un tel parricide mouruffent
d'une pareille mort
parce que l'on en peut appréhender
les mêmes exemples
; néanmoins par une bonté
particuliére , Nous leur donnons
la vie : Mais Nous vou-
Ions qu'ils foient fruftrez de
la fucceffion maternelle ou
ayeule , comme auffi de tout
les biens qu'ils pouroient efperer
par droit d'heredité &
de fucceffion , ou par teftament
de leurs autres parens &
amis ; afin qu'étant toûjours
pauvres & neceffiteux , l'infamie
de leur pere les accompagne
toûjours qu'ils ne puiffent
jamais parvenir à aucun
honneur & Dignité , même à
celles qui font conferées par
3 D'OR.
126
'Eglife & qu'ils foient reduits
à telle extremité , qu'ils
languiffent dans une neceffité
continuelle , & trouvent par
ce moyen leur foulagement
-dans la mort & leur fupplice
dans la vie . Nous voulons auffi
que ceux qui oferont intercéder
pour telles fortes de gens ,
foient notez d'une infamie
- perpetuelle .
§. 2. Pour ce qui eſt des
filles de ces criminels , en
quelque nombre qu'elles
puiffent eftre , Nous ordonnons
qu'elles prennent la falcidie
ou la quatrième partie
en la fucceffion de leur mere,
foit qu'elle ait fait teftament
ou non ; afin qu'elles ayent plûatôt
une médiocre nourriture
130
BULLE
de fille , qu'un entier avan
tage ou nom d'heritieres . Car
en effet la Sentence doit être
d'autant plus moderée à leur
égard , que nous fommes perfuadez
que la foibleffe de leur
fexe les empêchera de commettre
des crimes de cette
nature.
§. 3. Déclarons auffi les
émancipations que
telles gens
pourroient avoir faites de leur
fils ou de leurs filles , depuis
la publication de la prefente
Loi , nulles & de nul effet
pareillement Nous déclarons
nulles & de nulle valeur toutes
les conftitutions de dot , donations
& toutes les autres
aliénations qui auront été faires
par fraude , & même de
D'OR. 1'31'
droit , depuis le temps qu'ils
auront commencé à faire le
premier projet de ces confpirations
& complot . Si les
femmes ayant retiré leur dot
fe trouvent en cet état , que?
ce qu'elles auront reçû de
leurs maris à titre de donations
, elles le doivent referver
à leurs fils , lorfque l'ufufruit
n'aura plus lieu; qu'elle fçachent
que toutes ces chofes
qui felon la Loi devroient
retourner aux fils , feront appliquées
à noftre Fife , à la
referve de la falcidie ou qua- ·
triéme qui en fera priſe pour
les filles , & non pour les fils.-
§. 4. Ce que nous venons
de dire de ces criminels & de
leurs fils , doit auffi eftre en
.
132
23
BULLE
I
tendu de leurs fatelites , com
plices & miniftres , & de
leurs fils. Toutefois fr aucun
des complices , touché du
defir d'une veritable gloire
découvre la confpitation , en
fon commencement , il en recevra
de Nous récompenfe
& honneur: Mais pour celui
qui aura eu part à ces confpirations
& ne les aura revelées
que bien tard , avant
néanmoins qu'elles ayent été
découvertes , il fera eftimé
digne feulement d'abfolution
& du pardon de fon crime .
§. 5. Nous ordonnons auf
fi , que s'il eft revelé quelque
attentat commis contre lef
dits Princes Electeurs Ecclefiaftiques
ou Seculiers , l'on
D'OR. 133
puiffe même aprés la mort
du coupable pourfuivre de
nouveau la punition de ce
crime, i
§. 6. De même , l'on pour
ra pour ce crime de leze-Majefté
, à l'égard defdits Prin
ces Electeurs , donner la queftion
aux ferviteurs du Maître
qui aura été accufé .
§. 7. Ordonnons de plus
par ce prefent Edit Imperial ,
& voulons que même aprés
la mort du coupable l'on
puiffe commencer à informer
contre lui , afin que le
crime étant averé , fa memoire
puiffe eftre condamnée
& fes biens confifquez .
Car dés - là que quelqu'un a
formé le deffein d'un crime
134
BULLE
déteftable , il en eft en quelque
façon coupable & bourrelé
en fon ame.
§. 8. C'eft pourquoy , dés
que quelqu'un fe trouvera
coupable d'un tel attentat
Nous voulons qu'il ne puiffe
plus ni vendre , ni aliener , ni
donner la liberté à fes efclaves,
& même qu'on ne lui
puiffe plus payer ce qui lui
eft dû.
>
§. 9. Pareillement ordonnons
qu'à ce fujet on applique
à la queſtion les ferviteurs
du criminel ; c'est - à - dire
pour le crime du complot déteftable
fait contre les Princes
Electeurs Ecclefiaftiques
& Seculiers.
S. 10. Et fi quelqu'un de
D'OR.
135-
ces criminels meurt pendant
l'inftruction du Procez , Nous
voulons que fes biens , à caufe
qu'on eft encore incertain
qui en fera le Succeffeur ,
foient mis entre les mains de
la Justice.
ARTICLE XXV.
De la confervation des Princi
S
pautez
des
Electeurs en
leur entier.
' Il eft expedient que toutes
Principautez foient
confervées en leur entier , afin
que la Juftice s'affermiffe , &
que les bons & fideles Sujets
jouiffent d'un parfait repos &
136
BULLE
d'une paix profonde il eft
fans comparaifon encore
..
beaucoup plus jufte que les
grandes Principautez , Domaines
, Honneurs & Droits
des Princes Electeurs demeurent
auffi en leur entier
car là où le peril eft le plus à
craindre , c'eft là où il faut
ufer de plus grandes précautions
, de peur que les colomnes
venant à manquer
toute le bâtiment ne tombe
en ruïne .
§. 1. Nous voulons donc &
or donnons parcet Edit Imperial
perpetuel , qu'à l'avenir
& à perpetuité les grandes
& magnifiques Principau
tez , telles que font le Royaume
de Boheme , la Comté
འ
D'OR. 137
Palatine du Rhin , la Duché
de Saxe & le Marquifat de
Brandebourg , leurs Terres
Jurifdictions , Hommages &
Vaffelages , avec leurs appartenances
& dépendances , ne
puiffent eftre partagées , divifées
ou démembrées en
quelque façon que ce foit
mais qu'elles demeurent
perpetuité unies & confervées
en leur entier..
§. 2. Que le Fils aîné y
fuccéde , & que tout le Domaine
& tout le Droit appartienne
à luy feul ; fi ce n'eft
qu'il foit infenfé , ou qu'il ait
tel autre grand & notable
défaut qui l'empêche abfolument
de gouverner
; auquel
cas la fucceffion luy eftant
Fuillet 1 11 .
I B
138 BULLE
défenduë , Nous voulons que
le fecond Fils , s'il y en a un
en la même ligne , y foit appellé
; finon l'aîné des Freres
ou Parens paternels laïque
qui fe trouvera eftre le plus
proche en ligne directe &
mafculine lequel toutefois
fera tenu de donner des preuves
continuelles de fa bonté
& liberalité envers fes autres.
Freres & Soeurs , contribuant
à leur fubfiftance felon la
grace qu'il aura reçue de
Dieu , & felon la bonne volonté
& facultez de fon
patrimoine lui défendant
expreffément tout partage ,.
divifion & démembrement
des Principautez , & de leurs
appartenances & dépendan
DOR. 139
ces , en quelque façon que
Te puiffe être spomeni
- ARTICLE XXVI.
odfolati 33 expotong
De la Cour Imperiale & de fa
thensféances nonton agt
Isuda,L
E jour que l'Empereur
ou le Roi des
Romains voudra tenir folèm
nellement fa Cour les Prin
ces Electeurs tant Ecclefiaf
tiques que Seculiers , fe rendront
à une heure ou environ
, au logis de la demeure
Imperiale ou Royale , ou
l'Empereur ou le Roi , étant
revêtu de tous les Ornemens
Impériaux montera à cheval ,
of
Bij
n
140 BULLE
avec tous les Princes Electeurs
qui l'accompagneront
jufqu'au lieu préparé pour
· la Séance chacun en l'ordre
& en la maniere qui a éré cideffus
preferite , & inferée
dans l'Ordonnance qui regle
les marches des mêmes Princes
Electeurs. OpM
2. L'Archichancelier dans
Archichancellariat duquel
la Cour Imperiale fe tiendra ,
portera auffi au bout d'un Bâton
d'argent tous les Sceaux
Imperiaux ou Royaux. brok
§. 3. Mais les Princes Electeurs
Seculiers porteront le
Septre , la Pomme & l'Epée ,
en la maniere qui a été dite
ci- deffus , asfboman buat
DAS 4. Quelques autres PrinIDOR.
14
es infericurs qui feront députez
par l'Empereur & à
fon choix porteront immé
diatement devant l'Archevefiquesde
Treves marchant en
5 fon rang, premierement › la
› Couronne d'Aix-la-Chapelle :
& en fecond lieu , celle de
Milan : Ce qui ne fe pratinquera
feulement que devant
sl'Empereur , orné de la Cou❤
ronne Imperialepon sel
Sny L'Imperatrice auffi , ou
la Reine des Romains , étant
revêtue des Habits & Ornemens
de Ceremonie , marchera
aprés le Roi ou l'Em
pereur des Romains , & auffi
paprés le Roi de Boheme , qui
fuit immediatement l'Empereurs,
mais éloignée d'un ef
142 BULLE
pace compétanti, & accom
pagnéa.de fes principaux Of
ficiers & de fes Filles d'Hon
neurs & ce jufqués au lieu de
la Séance. wif shaOT
el. Jaar vachm But
not
ARTICLE XXVIIS
Des Fonctions des Princes Elec
-teurs dans les rencontres où
lesEmpereurs ou Rois des Ro₂-
y mains, tiennent ‹‹folemnel-~
lement leur Cour.hool.H
N
Qus ordonnons
ordonnons
que
toutes les fois que P'Em
pereur ou le Roi des Ro
mains voudra tenir folemnellement
fa Cour , & où les
Princes Electeurs feront obli
D'OR. 143
gez de faire les Fonctions de
leurs Charges , on obferve.cn
cela l'ordre fuivant, i
§. 1. Premierement , l'Empereur
ou le Roi des Romains
étant affis en fa Chaire Roya
le , ou fur le Trône Imperial ,
le Duc de Saxe fera fa Charge
en la maniere que nous
allons dire. On mettra de
vant le Logis de la Séance
Imperiale ou Royale , un tas
d'Avoine , de telle hauteur
qu'il aille jufqu'au poitrail
ou jufques à la felle du che
val fur lequel le Duc fera
*** monté ; & le Duc ayant en
fes mains un Bâton d'argent ,,
& une Mefure auffi d'argent ,
qui peferont enſemble douze
Marcs d'argent & étant à
$44 BULLE
cheval remplirala mefure
d'avoine & la donnera aur
premier Palfrenier qu'il rencontrera.
Aprés quoi , fichant
le Bâton dans l'avoine , il fe
retirera ; & fon Vice - Maré-`
chal , fçavoir de Pappenheim
, s'approchant , ou lur
abfent , le Marefchal de la
Cour , permettra le pillage de
l'avoine.
S.2 Dés que l'Empereur
ou le Roi des Romains fe fera
mis à table , les Princes Electeurs
Ecclefiaftiques , c'eft -àdire
les Archevêques , étant
debout devant la table avec
les autres Prelats , la beniront
fuivant l'ordre qui a été
ci - deffus par Nous prefcrit .
La Bénédiction étant faite ,
les
D'OR 145
les mêmes Archevêques , s'ils
Y font tous prefens , ou bien
deux , ou un d'entr'eux , prendront
les Sceaux Imperiaux
ou Roïaux des mains du Chancelier
de la Cour ; & l'Archevefque
dans l'Archichancellariat
duquel la Cour fe tiendra
, marchant au milieu des
deux autres Archevefques qui
feront à fes côtez , tenant avec
lui le Bâton d'argent où les
Sceaux feront fufpendus , tous
trois les port ont ainfi , &
les mettront avec refpect fur
la Table devant l'Empereur
ou le Roy. Mais l'Empereur
ou le Roi les leur rendra auffi
toft : Et celui dans l'Archichancellariat
daquel les Cerémonies
fe feront , comme il
Fuillet 1711 .
C
14.6 BULLE.
été dit , pendra à fon col·le
plus grand Sceau , & le por
tera ainfi durant tout le Dif
*ner & aprés , juſques à ce qu'il
foit retourné à cheval du Palais
à fon Logis. Or le Bâton
dont nous venons de parler ,
doit eftre d'argent , du poids
de douze marcs ; & les trois
Archevefques doivent payer
chacun le tiers , tant du poids
de l'argent que du prix de
la façon. Le Bafton & les
Sceaux deme eront au Chancellier
de la Cour , qui en fera
ce qu'il lui plaira ; & c'eſt
pourquoi auffi-toft que celui
des Archevefques auquel il
aura appartenu de porter le
plus grand Sceau au col , depuis
le Palais juſqu'à ſon LoD'OR.
147
gis ( comme il a été dit ) y
fera arrivé , il renvoyera par
quelqu'un de fes Domeftiques
audit Chancelier de la Cour
Imperiale , ledit Sceau fur le
même cheval ; & l'Archevefque
, felon la décence de fa
propre Dignité & l'amitié
qu'il portera audit Chancelier
de la Cour , fera tenu
de lui donner auſſi le cheval .
§. 3. Enfuite le Marquis
de Brandebourg viendra à
cheval , ayant en fes mains un
Baffin & une Aiguiere d'Argent
, du poids de douze
marcs , avec de l'eau & une
belle Serviette. En mettant
pied à terre , il donnera à laver
au Seigneur Empereur
Cij
148 BULLE
ou au Roi des Romains .
§. 4. Le Comte Palatin du
Rhin entrera de mefine
Cheval , portant quatre Plats
d'argent remplis de Viande ,
chaque Plat du poids de trois
marcs ; & ayant mis pied à
rerre , mettra les Plats fur la
Table devant l'Empereur ou
Roi des Romains.
§. 5. Aprés eux viendra
le Roi de Boheme Archi-
Echanfon , étant auffi à Che
val , & tenant à la main une
Coupe ou Gobelet d'argent ,
du poids de douze marcs ;
couvert & plein de Vin &
d'eau ; & ayant mis pied à
terre , prefentera à boire à
l'Empereur ou au Roi deș
Romains,
D'OR. 149
$ 6 . Nous ordonnons auffi
, que fuivant ce qui a été
pratiqué jufqu'ici , les Prin
ces Electeurs Seculiers ayant
fait leuts Charges , le Vice-
Chambellan de Falkenstein
ait le Cheval , le Baffin &
l'Aiguiére du Marquis de
Brandebourg : le Maistre de
Cuifine de Nortemberg , le
Cheval & les plats du Comite
Palatin du Rhin ; le Vice-
Echanfon de Limbourg , le
Cheval & le Gobelet du Roy
de Bohême ; & le Vice-
Marechal de Pappenheim ,
le Chevalle Bâton & la Mefure
du Duc de Saxe . Bien
entendu que c'eft en cas que
ces Officiers fe trouvent en
Perfonne à la Cour Imperia-
C iij
150
BULLE
le our Royale , & y faffent les
Fonctions de leurs Charges :
Autrement , & s'ils font tous
abfens ou quelques-uns d'eux ,
alors les Officiers ordinaires
de l'Empereur ou du Roydes
Romains ferviront
des Abfens , chacun en fa
Charge ; & comme ils en
feront les fonctions auffi
jouiront- ils des émolumens .
au lieu
,
292
252
25
D'OR.
IS T
ARTICLE XXVIII:
Des Tables Imperiales &
S.I.
Electorales .
LA
A Table Imperiald
ou Royale doit eſtre
difpofée en forte qu'elle foit
plus haute de fix pieds que
les autres Tables de la Salle ;
& aux jours des Affemblées
folemnelles perfonne ne s'y
mettra que l'Empereur ou le
Roy des Romains feul.
§. 2. Et même la Place &
la Table de l'Imperatrice ou
Reine fera dreffée à côté , &
plus baffe de trois pieds que
celle de l'Empereur ou Roy
Ciiij
152
BULLE
des Romains ; mais plus haute
celle des Electeurs auffi
de trois pieds. Pour les Taque
>
>
bles & places des Princes
Electeurs on les dreffera .
toutes d'une même hauteur .
§. 3. On dreffera fept Tables
pour les fept Electeurs
Ecclefiaftiques & Seculiers ,
au bas de la Table Imperiale s
fçavoir trois du côté droit
& trois autres du côté gauche
& la feptiéme vis-à-vis de
l'Empereur ou Roy des Romains
, dans le même ordre
que nous avons dit icy à l'Article
des Séances & du Rang
des Princes Electeurs ; en
forte que Perfonne , de quelque
qualité & condition qu'elle
foit , ne fe puiffe mettre
DOR. 153
entre deux ou à leurs Tables..
§. 4. Il ne fera permis à
aucun des fufdits Princes Electeurs
Seculiers qui aura fait
fa Charge , de s'aller mettre
à la Table qui luy aura efté
preparée , que tous les autres
Electeurs ſes Collegues
n'ayent fait auffi leurs Charges
mais que dés que quelqu'un
d'eux ou quelqu'uns auroit
fait la leur ils fe retireront
auprés de leur Table , & fe
tiendront là debout , juſqu'à
ce que tous les autres ayent
achevé les Fonctions fufdites
de leurs Charges ; & alors ils
s'affoiront tous en même
temps , chacunà fa Table.
§. 5. Dautant que nous
trouvons par les Relations
154
BULLE
tres-certaines & par des Tra
ditions fi anciennes qu'il n'y a
point de memoire de contrai
re , qu'il a été de tout temps
heureufement obfervé , que
l'élection du Roydes Romains
futur Empereur fe doit faire.
en la Ville de Francfort , & le
Couronnement à Aix-la-Cha
pelle , & que l'Elû Empereur
doit tenir fa premiere Cour
Royale à Nuremberg ; c'eft
pourquoy Nous voulons , par
plufieurs raifons , qu'il en foit
ufé de même à l'avenir ; fi ce
n'eſt qu'il y ait empêchement
legitime .
2
S. 6. Toutes les fois que
quelque Electeur Ecclefiaftique
ou Seculier qui aura efté
appellé à la Cour Imperiale ,
1
D'OR
ne pourra pour quelque raifon
legitime s'y trouver en Perfonne
, & qu'il y envoyera un Ambaffadeur
ou Deputé ; cet Ambaffadeur
de quelque condition
ou qualité qu'il foit
quoi qu'en vertu de fon pouvoir
il doive eftre admis en la
place de celuy qu'il reprefente
, ne fe mettra pas à la Table
que l'on aura deftinée pour celuy
qui l'aura envoyé .
Enfin toutes les Ceremo
nies de cette Cour Imperiale
eftant achevées , tout l'échaf
faut ou Bâtiment de bois qui
aura efté fait pour la Seance &
pour les Tables de l'Empereur
ou Roy des Romains , & des
Princes Electeurs affemblez
pour ces Ceremonies folem
156
BULLE
5.
nelles , ou pour donner l'Inveftiture
des Fiefs , appartiendra
au Maiftre d'Hôtel .
ARTICLE XXIX .
Des Droits des Officiers , lorf
que les Princes font Hom
mage de leurs Fiefs à l'Empereurou
au Roy des Romains.
5.1.
prefent Edit
Imper
O
Rdonnons par le
rial , que lorfque les Princes
Electeurs , tant Ecclefiaftiques
que Seculiers , recevront leurs
Fiefs ou Droits Souverains
des mains de l'Empereur ou
du Roy des Romains , ils ne
foient point obligez de payer
D'OR. 157
ou de donner aucune chofe à
qui que fe foit Car comme
l'argent que l'on paye fous ce
pretexte eft dû aux Officiers ,
& que les Princes Electeurs
ont la Superiorité fur tous les
Officiers de la Cour Imperia
le , ayant même en ces fortes
d'Offices leurs Subftituts étaablis
& gagez à cet effet par
les Empereurs , il feroit abfurde
que des Officiers fubftituez
demandaffent de l'argent
ou des prefens à leurs
Superieurs ; fi ce n'eft que
lefdits Princes Electeurs leur
veuillent donner quelque
chofe de leur propre volonté
& liberalité.
S. 2. Mais les autres Princes
de l'Empire , tant Eccle-
T
158 BULLE
fiaftiques que Séculiers , en
recevant leurs Fiefs , comme
nous venons de dire , de l'Empereur
ou du Roy des Romains,
donneront aux -Officiers
de la Cour Imperiale ou
Royale , chacunfoixante- trois
marcs & un quart d'argent ;
fice n'eft que quelqu'un d'eux
pût verifier fon exemption , &
faire voir que par privilege
Imperial ou Royal il foit dif
penſé de payer ladite fomme ,
& tous les autres droits que
l'on a accoutûmé de payer .
quand on prend l'Inveftiture
& ce fera le Maistre d'Hoftel
de l'Empereur ou du Roy des
Romains qui fera le partage
de ladite fomme de foixante.
trois marcs & un quart d'ar.
D'OR.
1.5.9
>
gent , en la maniere qui fuit.
Premierement
, il en prendra
dix marcs pour lui ; Il en
donnera autant au Chancelier
de l'Empereur ou du Roi
des Romains ; aux Secretaires
Nottaires & Dicteurs
trois marcs ; & à celui qui
fcelle , pour la cire & le parchemin
, un quart ; fans que le
Chancelier & les Secretaires
foient tenus de donner pour
cela autre chofe , finon un
Certificat du Fief reçû ou de
fimples Lettres d'Inveftiture .
Semblablement , le Maiftred'Hoftel
donnera de ladite
fomme dix marcs à l'Echanfon
de Limbourg ; dix aux
Vice - Marêchal de Pappenheim
, & dix au Vice-Cham,
160 BULLE
bellan de Falkenſtein ; pourvû
qu'ils fe trouvent en perfonne
à ces Inveftitures , &
qu'ils y faffent les Fonctions
de leurs Charges ; autrement
& en leur abfence , les Offi
ciers de la Cour de l'Empereur
ou du Roi des Romains
qui feront la Charge des Abfens
, & qui en auront eu la
peine , en recevront auffi le
profit & les émolumens
§. 3. Mais lorsque le Prince
monté fur un Cheval ou tou
te autre Bête , recevra l'Inveftiture
de fes Fiefs de l'Empereur
ou du Roi des Ro
mains , quelque foit cette Bé
te , elle appartiendra au grand
Maréchal , c'est-à -dire au Duć
de Saxe , s'il eft préſent ; fi
DOR. 161
non à fon Vice-Maréchal de
Pappenheim , & en fon abfenée
au Maréchal de la Cour de
PEmpereur.
ARTICLE XXX .
De l'Inftruction des Princes
Electeurs aux Langues.
§ . I.
D
Autant que la
Majefté du faint
Empire Romain doit prefcrire
les Loix , & commander
à plufieurs Peuples de diverfes
Nations , moeurs , façons
de faire & de differentes Langues
; il eft jufte , & les plus
fages le jugent ainsi , que les
Princes Electeurs qui font les
Juillet 1711 . D
162 BULLE
colomnes & les arcs-boutans
de l'Empire , foient inftruits
& ayent la connoiffance de
plufieurs Langues ; parce qu'étant
obligez de foulager l'Empereur
en fes plus importan
tes affaires ; il eft neceffaire
qu'ils entendent plufieurs perfonnes
, & que reciproque
ment ils fe puiffent faire entendre
à plufieurs.
§. 2. C'est pourquoy Nous
ordonnons que les Fils ou Heritiers
& Succeffeurs des Illuftres
Princes Electeurs ; fçavoir
du Roy de Bohême , du
Comte Palatin du Rhin , du
Duc de Saxe , & du Marquis
de Brandebourg , qui fçavent
apparemment la Langue Allemande
, parce qu'ils la doi
D'OR. 163
vent avoir appriſe dés leur enfance
; eftant parvenus à l'âge
de fept ans , fe faſſent inftruire
aux Langues Latines ,
Italienne & Efclavonne en
telle forte qu'ayant atteint la
quatorziéme année de leur âge,
ils y foient fçavans , felon
le talent que Dieu leur en aura
donné ce que Nous ne
jugeons pas feulement utile ,
mais auffi neceffaire , à caufe
que l'ufage de ces Langues
eft fort ordinaire dans l'Empire
pour le maniement de fes
plus importantes affaires.
:
§. 3. Nous laiffons toutefois
à l'option des Peres le particulier
de cette Inftruction ; en
forte qu'il dépendra d'eux
d'envoyer leur fils ou les Pa-
;
164
BULLE
rens qu'ils jugeront leur de
voir apparemment
fuccéder
en l'Electorat , aux lieux où
ils pourront apprendre commodement
ces Langues , ou
de leur donner dans leurs
Maifon des Precepteurs & de
jeunes Camarades , par l'inf
truction & la converfation
defquels ils puiffent s'inftruire
dans ces Langues.
BIBLIO
LYON
#
1093
VILLE
TABLE.
I. PARTIE
Litterature.
Proteftations des Electeurs de
Baviere & de Cologne.
Hiftoire Espagnole .
II. PARTIE.
43
Article des Anonimes. 78
Suite de la Paralelle d'Homere ,
& de Rabelais.
87
Egnimes. 145
Thefes , Confeils , Reponfes ,
III. PARTIE .
Pieces Fugitives.
TABLE *
IV. PART- I E.
Services pourfeu Monfeigneur le
Dauphin
Preftation de Serment.
Avis.
Bulle d'Or.
85
110
119
121
GALAN LYON
JUILLET , 17
UN
NC
NIN
A PARIS ,
M. DCCXI.
Avec Privilege du Roy.
MERGURE
GALANT.
Par le Sieur Du F *
Mois
de Fuillet
1711.
Le prix eft 30. fols relié en veau , &
25. fols , brochez
A PARIS ,
Chez DANIEL JOLLET , au Livre
Royal, au bout du Pont S. Michel
du côté du Palais .
PIERRE RIBOU , à l'Image S. Louis,
fur le Quay des Auguſtins.
GILLES LAMESLE, à l'entrée de la rue.
du Foin , du côté de la rue
Saint Jacques.
Infotot to
ณ
MERCURE
GALAN TAIL
I.
PARTIE.
LITTERATURE.
ACADEMIES .
LYON
7893
Le Feudy 25. Jnin 1711. M.
l'Abbé
d'ESTRE'ES, ayant
efté élû par
Meffieurs de
Academie
Françoile , à
la place de feu
Monfieur
Boileau Sieur des
Preaux,
y vint prendre feance.
LE
Difcours
que
I A ij
4
MERCURE ,
prononça Monfieur L.
d'Eſtrées
, & la Répon
fe qu'y fit M. de Valincour
, font de ces pieces
d'éloquence
dont il
eft dangereux de faire
des extraits
; comment
abbreger avec fuccés
un précis déja réduit
aux plus juftes bornes
que l'excellence de l'art
lui puiffe donner? comment
retrancher d'une
compoſition
ſi bien ordonnée
, fans la décomI.
PARTIE .
S
pofer , pour ainfi dire ?
& quel choix peut- on
faire entre des pensées
également folides , ou
brillantes , fans eftie blâmé
par ceux qui regretteront
, avec raifon , les
beautez qu'on aura obmifes
?
Ces difficultez m'ont
déterminé à une nouvelle
maniere de faire
des extraits : c'eft de
compoſer , par exemple
, des propres mate-
1 A iij
6 MERCURE ,
riaux d'un difcours , un
petit extrait ſuivi , qui
contienne à peu prés en
racourci l'idée de l'original
.
Par ce moyen je ne
ferai pas moins de tort
à l'ouvrage : mais l'Auteur
pourra fe difculper
en jettant la faute
fur le Compilateur , &
je me difculperai moimême
d'avoir obmis ,
peut - être , les plus
beaux endroits , par
I.PARTIE . 7
la neceffité de préferer
les plus convenables ,
& les plus propres à
la liaifon d'un extrait
fuivi.
Pour conferver le
plus que je pourrai l'ef
prit de l'ouvrage & les
droits de l'Auteur , je
ne mettrai du mien que
quelques mots pour
cette liaiſon que je me
propofe; & je diftinguerai
même par la difference
des caracteres de
1 A iiij
8 MERCURE ,
l'impreffion , les morceaux
dont je n'aurai
rien retranché , d'avec
ceux dont j'aurai retranché
ou changé le
moindre mot .
Mon but principal ,
en effayant de cette nouvelle
methode , a eſté
d'épargner au Public
les
tranfitions ennuyeufes
, qui font inféparables
des meilleurs extraits
; on eft contraint
d'y repeter fans ceſſe :
I. PARTIE. 9
Icy Monfieur
un tel découvre
avec une vive
penetration
les caufes de
tels & tels effets... Là
des
l'Auteur prouvepar
raifonnemens
folides ,
par une érudition
` profonde
que... En cet endroit
Monfieur *** dépeint
avec les traits les
plus vifs de l'Eloquence
la plus parfaite , &c.
Par ces explications ,
on ne fait , pour ainfi
dire , que raconter un
10 MERCURE ,
ouvrage , & mettre en
récit , ce qui doit eſtre
en action 3 car , comme
on fçait , toute piece
d'Eloquence
a fon action
, & l'on ralentit
cette action en y mêlant
des digreffions
,
où l'on ne voit fouvent
que les loüanges de
l'ouvrage , & les décifions
de celui qui en fait
l'extrait ; le public eſt
un juge jaloux , on l'irrite
en prévenant fes
I. " PARTIE . 11
jugemens ; il ne veut
pas qu'on lui défigne ,
qu'on lui montre au
doigt les endroits qu'il
doit admirer ; faites lui
•
fentir les beautez de
l'ouvrage par l'ouvrage
méme , il fera content :
Et voila l'Eloge de
l'Auteur fait.
Toutes ces reflexions
me font conclure, qu'il
vaut peut- eftre encore
mieux alterer , & méme
défigurer un ouvra12
MERCURE ,
ge en l'abbregeant, que
d'en ôter la force par
des digreffions
.
Quoiqu'il en foit effayons
de cette forte de
compilation abbregée ,
fimple & fuivie ; fi elle
ne réuffit pas , nous en reviendrons
bien aux extraits
ordinaires , où je
me ferai toûjours honneur
d'imiter ceux qui
font excellens en ce
genre.
1. PARTIE. 13
EXTRAIT
Du Difcours de M. l'Abbé
d'Eftrées .
MESSIEURS ,
Rien ne m'ajamaisflatté da
vantage , que l'honneur d'avoir
étéadmis dans vôtre¦illuftreCorps,
je connois le prix
de ce bienfait , j'en ay la plus
vive reconnoiẞance , & je
me trouve heureux de ce
qu'un de mes premiers devoirs
, en qualité d'Academicien
, eft de la rendre pu
14 MERCURE ,
bl
que..... mais trouvez
bon que fans rien diminuer
de l'obligation
que
je vous ai je croye auffi
devoir vos fuffrages à l'eftime
dont vous honnorez
celui de qui je porte
le
nom : ce nom fe trouve à la
tefte de tous les vôtres par le
droit d'ancienneté dans les
Regiftres de l'Academie ,
ily eft avec des qualitez qui:
rendent à celle d'Academicien
le luftre qu'elles en reçoivent
elles-mêmes.
Je fuccede à un homme qui
ne pouvoit estre remplacé ,
I. PARTIE
c'est un de ceux qui
a donné le plus de droit à
nôtre fiecle de s'égaler à ce
beau fiecle fi fameux par la
polueffe , par le goût &…… ..
Il a fait fur cela des le
çons, les a faires en les
réduisant en pratique , c'est
par lui qu'on a vû renaître
dans la compofition ce goût
exquis , qui s'étoit prefque
perdu , il faloit inftruire ,
détromper , détruire les
jugez , rectifier les idées fur
le style , fur l'Eloquence ,
fur la Poëfie , donner des
précautions contre la contapre-
८
16 MERCURE ,
gion du faux bel efprit.....
faire goûter les beautez
du caractere naturel, T...
C'est le principal but que
Monfieur Defpreaux fepropola
, & ily reuſfit : il ôta
Le voile de dessus les yeux du
Public , qui commença à ſe
fçavoir mauvais gré d'avoir
fi Jouvent prodigué mal à
propos fes applaudiſſemens
de s'eftre laiffé ebloüir par
defauffes lueurs , & d'avoir
admiré l'esprit deftitué de
bon fens.
C'eſt ainfi , Meffieurs ,
que cet homme rare contribuoit
I. PARTIE .
17
tribuoit à l'execution de
vos deffeins , dont le fuccez
fait vôtre éloge.
Ecrire poliment , folidement
, avec netteté , & avec
precifion , ce n'est presque
plus une louange en France ;
cè talent émané de vous ,
`eft
& c'est devenu
commun
Meffieurs
, une diftinction
que vous avez
perdue
, à
force d'en faire
connoître
le
prix , C ...
Je ne fçai fi le grand
Cardinal , qui parmi tant
d'admirables projets , forma
celui de vôtre Acade-
1 B
18 MERCURE ,
mie ; eût jamais ofé s'en
promettre de fi grands
luccés : mais .
Il ne pouvoit gueres imaginer
un moyen plus propre
pour immortalifer fa memoi
re : les merveilles du regne
fous lequel nous vivons ont
prefque éface le fouvenir , ou
du moins l'éclat des grandes
chofes qu'il fit pendant Jon
miniftere: mais l'Academie
eft un monument fubſiſtant ,
qui s'embelit par lafuite des
années , dont le luftre a
toûjours cru depuis qu'il l'a
érigée.
I. PARTIE. 19
Le vafte genie de ce
grand Miniftre , & la profonde
capacité du Magif
teat illuftre qui luy fucceda
, feront également celebrez
dans les fiecles fuivans
.
Le nom du Chancelier Seguier
s'éternifera avec celuy
du Cardinal de Richelieu ;
ils vous en feront redevables
parla fidelitè que vous aurez
apayer le tribut qui leur eft
dû, comme aux reftaurateurs
aux protecteurs des Lettres
, ...
JeJuis aujourd'huy , Mef-
I
1 Bij
20 MERCURE ,
fieurs , l'organe de vôtre reconnoiẞance
: mais comment
que
exprimer
cetle
nous
devons
à un Prince. qui
a bien
voulu joindre au titre de
Roy, & au titre de Grand ,
que toute l'Europe luy donne
, celuy de Protecteur de
l'Academie Françoiſe ?
Quelle gloire pour vous : mais
quel embaras pour moy !
Ses vertus Royales font
un fond inépuisable d'éloges :
mais mon Zele eft refferré par
des bornes qui me defendent
de les developer..
fons donc tous ces prodiges de
...
Laif
I. PARTIE 2E
valeur, de magnanimité, de
Sageffe, &
Contentons-
nous d'envifager pour
un moment dans l'évenepar
le
ment funefte pour lequel
nous pleurons encore : D’une
part ,fa tendreffe paternelle
qui l'atache a un fils , dont il
ne peut eftre arraché
plus extrême danger de Sa
Perfonne; de l'autre, ceite
fermeté avec laquelle il foûtient
un fiterrible coup. Mefurons
celle cy par l'autre ,
reconnoiffons- en l'heroïfme.
•
Arrétons-nous icy , Mef22
MERCURE,
feurs. La douleur 世l'admiration
doivent nous tenir
dans le filence. Souhaitons
Jeulement au grand Monarque
une longue fuite d'années....
Attendons qu'une
heureuſe paix vienne nous
fournir une nouvelle matiere
pourfon éloge. 7 apprendrai
parmy vous à exprimer dignement
fur un fi noble fu
jet les fentimens de mon
coeur , & ceux des perfonnes
de ma famille , qu'il a comblez
de bienfaits d'honneurs
.
I. PARTIE. 23
EXTRAIT
De la Réponse que fit à
ce Dilcours Monfieur
4.
de Valincour , Secretaire
General de la Marine
, alors Chancelier
de l'Academie .
ONSIEUR ,
fait
Le confentement unanime
de vos fuffrages vous a
affez voir combien vous ef
tiez defire , & avec quel
plaifir l'Academie Françoiſe
va pour lafeconde fou écrire
24 MERCURE ,
dans fes fuftes , un nom dont
elle s'honore depuis tant d'années.
Quelles terres , quelles
mers , quelles guerres , quèlles
negociations ; & pour
parler de ce qui nous convientparticulierement
, quelles
Academies peut- on citer
aujourd'huy où l'on ne trouve
des traces de la gloire de
ce nom illuftre ? Quel amour
pour les Lettres dans tous ceux
qui le portent , & qu'ils ont
-çu joindre à tant d'actions
éclatantes , & à tant de fervices
onlus à l'Etat ?
QuelI.
PARTIE.
25
la
Quel exemple plus propre
à confondre également
groffierete barbare qui méprife
l'amour des Lettres ,
comme indigne des Grands
Hommes , la delicateße
oifive , qui n'y cherche qu'un
amufement frivole , où une
vaine reputation .
N'a-t on pas vû vôtre
illuftre pere donner encore
à la lecture des bons livres
, les plus doux momens
defon loifir , dans une vieil
leße echapée à tant de combats
qu'il avoit rendus funeſtes à
nos ennemis.... Fay vû ce
I C
26 MERCURE ,
#
Frere , qui vous est fi cher
adoucir les ennuis d'une longue
navigation , tantôt avec
ce Poëte qui fut l'amy de Scipion
, tantos avec celuy qui
fit les delices d' Augufte ...
à la veille d'un grand
combat étudier tranquillement
dans les Heros des tems .
paẞez des actions de conduide
valeur dont il al- te
loit lui-même donner de nou
veaux exemples.
Et quel honneur n'a point
fait aux Lettres ce grand
Cardinal, Doyen de l'Acas
demie , lorſque joignant à la
I. PARTIE .
27.
force d'un genie fuperieur ,
toutes les graces & toutes
les lumieres qu'on trouve
dans le commerce des Mufes,
il regnoit par la parole dans
toutes les Cours de l'Europe,
Maitre dans l'art de perſuader,
dont il pouvoit donner
des preceptes comme Ariftote
, des exemples comme
Demoftenes , il raffuroit nos
Alliez incertains , diffipoit :
les ligues de nos ennemis ,
faifoit ceder aux feules
forces de la raifon , ceux qui
étoient en état de réfifter i
aux plus puißantes armées.
1 C ij
28 MERCURE ,
ن م
Qui de nous en Le
voyant
aujourd'hui dans ce noble repos
aquis par tant de travaux
celebres , ne croit voir ce
Neftor d'Homere
, qui par
les charmes de fon éloquence,
par lafageffe de fes confeils
, avoit moderé fi longtemps
les paffions des Princes
des Republiques , & qui
avoit efté l'amy & le compagnon
fidele des Heros de
trois âges ?
âges, & dans quels fiecles
cet illustre Cardinal ne padans
quels
roift-ilpoint avoir vécu? ..
Puifque nous fommes pri…..
I. PARTIE. 29
vez du plaifir de le voir à
nos exercices , c'est à vous ,
Monfieur, d'en remplir la
place, auffi bien que celle de
T'excellent homme à qui vous
Juccedez; faites - nous part
de ces richeſſes qui vous font
naturelles , de celles que
vous avez acquifes par vos
-grands emplois dans les Pais
étrangers ; montrez- nous en
quoy la Langue Françoife
peut eftre comparable , ou
même préférée à tant d'autres
Langues qui vous font
fi familieres.
Que l'Academie , en
I C iij
30 MERCURE ,
vous voyant , croye voir
fon illuftre Doyen , & l'illuftre
confrere qu'elle a
perdu.
Je ne crains point , Meſfieurs
, que l'amitié me
rende fufpect fur le fujet
de MonfieurDES PREAUX ..
quel éloge en puis -je faire
que vous n'ayiez déja prévenu
? J'ofe attefter , Meffieurs
, le jugement que
tant de fois vous en avez
porté vous - mêmes , j'attefte
celui de tous les Peuples
de l'Europe.... L'approbation
univerſelle
I. PARTIE.
31
eft le plus grand éloge
les hommes puiffent
donner à un écrivain , &
en.même temps la marque
que la plus certaine de la
perfection des ouvrages ,
par quel heureux fecret
peut-on acquerir cette
approbation.... Monfieur
Defpreaux nous l'a appris
lui -même , c'eſt par l'amour
du vray.
En effet , ce n'eft que dans
le vrayfeulement que tous les
hommesfe réuniffent , differens
d'ailleurs dans leurs
moeurs , dans leurs préjugeZ,
i Ciiij
32 MERCURE ,
dans leur maniere de penser ,
d'écrire , dejuger de ceux
qui écrivent ; dés que le vray
paroît clairement àleursyeux,
il enleve toûjours leur confentement
leur admiration.
Monfieur Defpreaux
avoit puiſé dans la nature
même , ce Vray qu'on ne
peut voir qu'en elle , mais
qu'elle ne laiffe voir qu'à
fes favoris .
Mais c'eft en vain qu'un
auteur choifit le vray pour
modele , il eft toûjours fujet
à s'égarer , s'il ne prend
aufli la raifon pour guide :
I.
PARTIE. 33
elle apprit à Monfieur
Defpréaux à éviter les excez
de Juvenal & d'Horace
même, qui avoient attaqué
les vices de leur temps
avec des armes qui faifoient
rougir la vertu. Il
ofa le premier faire voir
aux hommes une fatyre
fage & modefte , & rendit
fa vie auffi pure que fes
écrits .
Incapable de déguisement
dans fes moeurs , comme d'affectation
dans fes ouvrages ,
il s'eft toûjours montré tel
qu'il eftoit , aimant mieux ,
34 MERCURE ,
difoit- il , laiffer voir de veritables
deffauts que de les
couvrir par de fauffes vertus.
*
Tout ce qui choquoit la
raiſon ou la verité , excitoit
I en luy - même un chagrin ,
dont il n'étoit pas le maistre,
& auquel peut eftre fommes
nous redevables de fes plus
ingenieufes compofitions : mais
en attaquant ce deffaut des
Ecrivains, il a toûjours épargné
leurs perfonnes.
Il croyoit permis à tout
homme qui fait parler au
écrire de cenfurer publiqueI.
PARTIE. 35
ment de mauvais livres :mais
il ne regardoit qu'avec borreur
ces dangereux ennemis
du genre humain , qui fans
refpectpour l'amitié, pour la
verité même, déchirent indifferemment
tout ce qui s'of
fre à leur imagination ,
qui du fonds des tenebres qui
les dérobent à la rigueur des
Loix,fe font un jeu cruel de
publier les fautes les plus ca
chées,&denoircir les actions
les plus innocentes.
M. Defpreaux s'animoit
fur tout contre ces genres
de poëfies , où la Religion
36 MERCURE ,
luy paroiffoit offenſée &...
Heureux d'avoir pu d'une
même main imprimer un
oprobre éternel à des ouvrages
fi contraires aux bonnes
maurs, & donner à la vertu,
en la perfonne de nôtre Augufte
Monarque , des louanges
qui neperirontjamais.
Souvenons nous que
"nôtre fiecle fera regardé
un jour du même point
d'éloignement
d'où nous
regardons maintenant celuy
d'Augufte...
*´¨On ne voit que foiblement
fa gloire dans les
I. PARTIE
37
arcs de triomphes , médail-
:.
les & autres monumens
que ce temps a détruits
ou alterez mais quand
on le contemple dans les
vers de Virgile & d'Hora
ce foûtenant luy ſeul tout
le poids des affaires du
monde , vainqueur de fes
ennemis , & toûjours pere
de fes fujets , baniffant le
vice par fes Loix , ſes Loix , enſeignant
la vertu par fes
exemples , &...
Alors les coeurs & les
efpritsſe réünißent pourfor
mer un nouveau concert de
38 MERCURE ,
louanges. On benit le Ciel
d'avoir donné aux hommes
unfi bon Maistre , & l'on
Jouhaite que tous ceux qui
viendront aprés luy puiffent
luy reßembler.
N'en doutons point, Monfieur,
tel & plus grand encore
la pofterité verra l'Augufte
Louis dans les ouvra
ges de M. Defpreaux , &
dans ceux de cette. illuftre
Compagnie.
Puiffe - t- il encore durant
nn grand nombre d'années
préparer aux fiecles à venir
de nouveaux sujets d'admira1.
PARTIE. 39
tion; puiße une longue &
heureuſe paix le mettre bientoft
en eftat de procurer à ſes
peuples un bonheur qui fait
le plus cher objet de fes defirs
qui fera la consommation
de fa gloire.
40 MERCURE ,
t
1
Il paroift depuis peu un Li¸ ‹
vre qui a pour titre , less
Regles de la Prononcia-
+ tion pour la Langue Françoife
, par M. B.
СЕ
E Livre eft tres
bon dans fon genre
& tres utiles on fçait
bien , dit l'Aureur , que
ce n'eft pas un grand
honneur ni un grand
merite de fçavoir bien
fa langue , & d'en prononI.
PARTIE. 41
noncer regulierement
tous les mots : mais
c'eſt un grand blâme
& une honte à un
honnéte homme de ne
le fçavoir pas ... Un mot
mal prononcé luy fait
quelquefois plus de tort
qu'un faux raiſonnement
, parce que tout
le monde eft choqué
d'une mauvaiſe prononciation
, & que peu de
gens ont l'efprit aſſez
jufte pour s'appercevoir
I D
42 MERCURE ,
de la fauffeté de certains
raifonnemens , &...
Ceux qui aiment à
voir un livre commencer
fimplement feront
contens du début de celuy-
cy: voicy comme il
commence. Il y a vingtquatre
lettres à l'Alphabet
. A bcdefg , & c.
Le début des Elemens
d'Euclides eft auffi fimple
que celuy-là , un &
un font deux , le tout
eft plus grand que flaa
I. PARTIE. 43
partie : C'eft pourtant
fur ces fondemens fi
fimples qu'on éleve
des fyftemes jufqu'aux
cieux pour meſurer le
cours des aftres, prédire
les éclipfes , & rendre
raiſon des phenomenes
les plus étonnans.
EXTRAIT
des proteftations des Electeurs
de Baviere & de Cologne.
L
'Electeur de Cologne
expoſe que
fon inten-
1 Dij
44 MERCURE ,
tion eftoit de demeurer
neutre durant la guerre
qu'il voyoit prefte à s'allumer
entre les Maiſons de
France &
d'Autriche pour
la
fucceffion d'Espagne. Il
devoit cette neutralité à
fon peuple , attendu la ſituation
de les états , qui les
expofoit aux premiers defordres
de la guerre fi le
Prince avoit pris un parti.
S. A. E. fit donc toutes les
démarches neceffaires durant
l'automne de 1701. à
Vienne & à la Haye , pour
obtenir cette neutralité , &
L. PARTIE.
45
Il les fit avec
d'autant plus
d'inftance , que la guerre
eftoit
deformais
certaine.
Dés le 7. du mois de Septembre
1701.
l'Empereur
Leopold , le Roy Guillaume
, & les Etats Generaux
avoient figné le traité fi
connu fous le nom de la
grande Alliance.Le traité ef
toit une ligue offenfive
contre les couronnes de
France &
d'Efpagne , par
laquelle
les Puiffances
contractantes
s'engagerent à
leur faire
conjointement
la
guerre
, fi dans fix mois el
46 MERCURE ,
les ne donnoient à ces Al
liez des fatisfactions & des
füretez telles que des Princes
qui ont les armes à la
main ne les donnent qu'aprés
pluſieurs campagnes
malheureuſes . Suivant tou-
-
tes les conftitutions de
l'Empire l'Electeur de Cologne
eftoit loüable de
prendre le parti de la neutralité.
Jufques au 27. Septembre
1702. la guerre que
l'Empereur a faite aux couronnes
n'a point eſté une
guerre de l'Empire. Ce ne
fut que le 27. Septembre
1. PARTIE.
1702. datte remarquable ,
que l'Empire declara par
un refultat des trois Colleges
qui compofent la
Diette , qu'il époufoit la
querelle de la Maiſon
d'Autriche, & qu'il entroit
en fon nom dans la guerre
qu'elle faifoit aux couronnes.
Neanmoins la neutralité
fut refufée à l'Electeur
de Cologne à Vienne dés
le mois d'Octobre 1701. &
la réponſe qu'on luy fit à la
Haye valoit un refus. Les
Hollandois dés le mois
d'Octobre 1701. commen48
MERCURE ;
cerent même à agir hoftis
lement fur le territoire de
Liege , dont il eſt Evêque
& Prince , en y élevant des
fortifications fans fon confentement.
Cet Electeur
qui n'avoit pas affez de
troupes pour maintenir ſa
neutralité contre de fi puiffans
voifins , & contre l'Electeur
Palatin , & d'autres
Princes leurs Alliez , appella
& reçut dans fes places
au mois de Novembre
1701. les troupes du cercle
de Bourgogne , aprés leur
avoir fait prêter ferment
de
I. PARTIE. 49
de ne rien attenter contre
l'Empire, & de fortir de fes
places dés qu'il lerequereroit.
Suivant les conftitu
tions de l'Empire , il eſt
permis aux états de l'Empire
d'appeller à leur fecours
les troupes des autres
états de l'Empire. Depuis
Charles-Quint le cercle
de Bourgogne eſt un
des états de l'Empire , &
les Empereurs de la Maifon
d'Auftriche ont appellé
à leur fecours , &
introduit fouvent dans
l'Empire les troupes de ce
+
I E
so MERCURE ,
cercle. L'Empereur publia
plufieurs mandemens contre
l'Electeur de Cologne
qui écrivit le 19. Mars 1702.
à l'Empereur une lettre
auffi forte que refpectueufe
défendre fa conpour
duite,dans laquelle on voit
que S. A. E. étoit prête d'écouter
la Diette , qui feule
étoit fon juge competant ,
avec toute forte de déference.
Neanmoins dés le
mois de May 1702. les Hollandois
& d'autres Princes
alliez de l'Empereur attaquerent
Kaifervvert , &
I. PARTIE.
SI
l'Electeur de Cologne eftoit
prefque dépouillé de
tous les états , pour n'avoir
pas voulu faire la
guerre conjointement a
vec l'Empereur , quand
l'Empire declara le 27.
Septembre 1702. que fes
Membres devoient prendre
part à cette guerre.
Les chofes en refterent
蒙
là durant la vie de l'Empereur
Leopold. L'Empereur
Joſeph , dans la pre.
miere année de fon regne
, publia une procla
mation dattée du 25. Avril
I1 Eij
$2
MERCURE
,
1706. par laquelle il mit
Son Alteffe Electorale au
ban de l'Empire , autant
qu'un Ecclefiaftique y
peut eftre mis. La protef
tation fait voir pleinement
l'iniquité & la nullité
de cette Sentence ,
rendue contre un Prince
qui n'eftoit pas coupable,
par un Tribunal incompetant
, puifque , fuivant
les conftitutions de l'Empire
, la Diete feule peut
connoiftre des caufes capitales
des Electeurs, Princes,
& autres états de l'EmI.
PARTIE.
53
.
pire. Son Alteffe Electorale
finit , en proteftant
de nullité contre l'élection
future d'un Empereur
, à laquelle on ne l'auroit
pas invitée , pour la
confervation de fes droits ,
& pour celle des droits de
fon Eglife.
fon
La proteftation de l'Electeur
de Baviere dattée
de Namur le 7. Juillet eft
beaucoup plus courte. Cet
Electeur expofe que
honneur & fes interêts ne
lui permettoient pas d'entrer
en guerre contre les
1 E iij
54 MERCURE ,
་
couronnes
, lorſque l'Empereur
commença
de fon
autorité privée en 1701. la
guerre qui dure encore ,
qu'il prit des mefures pour
demeurer
neutre
, & que
plufieurs eftats de l'Empire.
fe trouverent
dans les mêmes
fentimens
que lui . Il
concerta avec eux pour
empêcher que la Cour de
Vienne n'arrachât d'eux
une declaration forcée :
Mais cette Cour gagna la
plupart des états qui s'étoient
joints , ou qui devoient
fe joindre avec S. A.
I.
PARTIE
55
E. pour empêcher que
l'Empire ne fût oblige à
rentrer en guerre, &à rompre
la paix de Rifvvik fans
fujet en effet dés le mois
d'Avril 1702. il fe fit plufieurs
violences dans l'Empire
par les Alliez de l'Empereur,
qui forçoient ceux
qui témoignoient vouloir
demeurer neutres , à ſe défaire
de leurs troupes. Dés
le mois de Juillet l'Empereur,
à qui les conftitutions
de l'Empire défendent étroitement
d'attaquer jamais
directement ni indi56
MERCURE ,
rectement la couronne de
France fans le confente
ment des trois Colleges ,
commença lefiege deLandau
, de fa feule autorité.
L'Electeur de Baviere ne
pouvoit plus douter aprés
ce qui s'étoit paffé , qu'il ne
dût être attaqué inceffamment,
& le 8.Septemb.1702.
il jetta des troupes dans
Ulm & dans Meminguen
,
qui ouvrent l'entrée de fes
états , pour fe couvrir de
ces places durant le danger
, avec promeffe de les
évacuer dés qu'il feroit
I. PARTIE
57
paffé . La Diette ne declara
qu'il falloit faire la guerre
à la France que le 27. Septembre
1702. L'Electeur
de Baviere voulut demeurer
neutre: mais au mois de
Mars 1703.le Comte Schlik
entra hoftilement dans fes
états , & le mit en droit de
pourvoir par toutes fortes
de voyes à la jufte défenſe.
Le 26. d'Avril 1706. l'Empereur
Jofeph le mit au
ban de l'Empire par une
Sentence émanée fur des
procedures du Confeil Aulique
, qui n'eſt pas Juge
*
18 MERCURE ,
competant
en pareil cas.
Le pretexte de cette Sentence
eft l'infraction
de la
conftitution
de la paix publique
commiſe
par l'Eleteur
quand il occupaUlm
.
On appelle en Allemagne
conftitution
de la paix publique
l'Ordonnance
qui
fut publiée dans laDiete tenue
à Vorms
en 1495. fous
l'Empereur
Maximilien
I.
par laquelle il eft défendu
aux états de l'Empire d'ufer
d'hoftilitez
les uns envers
les autres dans leurs querelles
particulieres
: L'Ele1.
PARTIE. 59
cteur n'occupa Ulm que
pour ſegarantir des infultes
qui avoient été faites à
d'autres Princes depuis peu
de mois , parce qu'ils étoient
dans le même cas
que lui , avec promeffe de
l'évacuer dés que la bouraſque
feroit paffée.Toute occupation
de place n'eft pas
une infraction de la paix
publique , & depuis quatre
mois il s'en eft fait dans l'interieur
de l'Empire , qui
font plus odieufes que celle
d'Ulm , & qui n'ont pas attiré
le moindre mande60
MERCURE ,
ment , ni fait écrire aucune's
lettres avocatoires à l'Empereur
Jofeph . La plupart
des autres griefs rapportez
dans la Sentence de Ban ne
regardent pas l'Empire ,
mais l'Empereur comme
Archiduc d'Autriche.
L'Electeur proteſte contre
ce Ban injufte dans le
fonds & dans les formes
& contre ce qui s'eft paffe
depuis ; ainfi que contre
l'election
d'un Empereur
,
à laquelle il n'auroit point
été appellé , déclarant que
d'autres que lui feront coupables
I. PARTIE. 61
pables des malheurs qu'u
ne pareille élection , faite
contre les Loix , pourroit
attirer fur l'Allemagne.
L'hiftoire qui fuit ,
tirée d'anciens memoires
Eſpagnols, eft écrite
dans le gout de Zaïde ,
& de la Princeffe de
Cleves , genre d'écrire
excellent ; mais qui paroift
allongé & languiffant
à ceux qui ne veulent
dans une avanture
amoureuſe ni converfa-
I F
62 MERCURE ,
tions, ni ſentimens ; défaut
de gout , fondé fur
le défaut des moeurs
.
Nos jeunes gens feroient
ravis qu'on traitât
l'amour dans un livre
come ils le traitent
dans le monde ; ils voudroient
voir le dénouement
dés la feconde page
; ils ne veulent plus
que l'extrait d'une hiftoire
, parce qu'ils n'aiment
plus que l'extrait
d'une intrigue : tout ce
I. PARTIEM 63
qui doit intereffer les
ennuye , ils appellent!
romanefques , tous les
fentimens élevez & de
licats que produit la
belle nature ; extrémité
opofée à celle du temps
de Voiture , où l'on appelloit
beau naturel les
fpiritualitez quinteffenciées
d'Alcidalis & de
Zelide . L'hiſtoire fuivante
eftécrite auffi noblement
, mais plus naturellement
qu'on ne
64 MERCURE ;
l'eût écrite en ce temslà
, & j'ay crû faire
honneur, au noftre en
luy donnant une hiftoire
où l'amour eft traité
avec delicateffe . Puis
qu'on donnoit en ce
temps- là , pourra dire
quelqu'un dans cent
ans, un tel ouvrage dans
un Journal public , il
falloit donc qn'il y eût
encore un certain nombre
de gens à qui cette
maniere d'aimer fift
Plastif
LIO
¡ YON
VILLE
7293
SHO
THEAGE
LYON
TELA VILLE
IL PARTIE
D'U MERCURE. I
AMUSEMENTS,
Hiftoriette Espagnole.
Dans le
temps
que
l'Eſpagne
eftoit
divifce
en plufieurs
pays
dont
chacun
avoit
fonSouverain
, le Duc
d'Andalòùfie
eftoit
le plus
confide-
Juillet
1711 .
2 A
MERCURE
rable
d'entr'eux , foit par
l'eftenduë de fes Eftats ,
foit
par la fagefle avec
laquelle il les gouver
noit. Il eftoit l'arbitre
des autres Ducs fes voifins
, dans les differens
qui les defuniffoient
, &
ces raiſons luy attiroient
la veneration , & le refpect
de toute l'Eſpagne ;
le defir qu'avoient les
jeunes Princes de voir
un Souverain dont la reputation
faifoit tant de
IL 3 PARTIE.
bruit , & qu'on leur propofoit
fans ceffe comme
le plus excellent modelle
, les attiroit dans fa
Cour , mais les charmes
de Leonore fa fille les
retenoient : c'eftoit la
beauté la plus reguliere ,
& la plus touchante
qui euft jamais paru en
Efpagne , la beauté de
fon efprit , & l'excellen-
,
ce de fon coeur formoient
de concert avec
fes appas tout ce qu'on
Abij
4 MERCURE
peut imaginer de plus
parfait .
Les Princes qui ornoient
une Cour déja fi
brillante par l'esclat de
la Princeffe Leonore ,
joüiffoient d'un je ne
fcay quel charme ſecret,
que fa prefence faifoit
fentir , & que la renommée
n'avoit pas pû aſſez
publier : Ils l'aimoient ,
ils l'admiroient , mais le
refpect ne leur en permettoit
que les marII.
PARTI E.
ques qui efchapent neceffairement
à l'admiration
, & à l'amour . Le
feul Dom Juan fils du
Duc de Grenade ofa
bien toft reveler le ſecret
que tous les autres
cachoient avec tant de
foin. C'eftoit un Prince
trés - puiffant , & de
grands intereſts d'Eſtat
que le pere deLeonore &
le fien , avoient à demefler
, pouvoient faciliter
un mariage auquel fon
A iij 2
6 MERCURE
amour , & fa vanité le
faifoient aſpirer , enforte
que Dom Juan sûr de
l'approbation du Duc
d'Andaloufie , & contant
auffi fur fon merite declara
fon amour à Leonore
, avec une hardieffe
qui dominoit dans
fon caractere.
La Princeffe ne luy
refpondit point avec ces
vaines oftentations de
fierté ridicules fur tout
dans celles que l'amour
II. PARTIE.
n'a pas touchées ; mais
fon difcours portoit un
caractere de moderation
qui luy annonçoit une
longue indifference , il
ne reccut d'elle que
quelques marques de la
plus fimple eftime , fentiment
froid qui ne fait
qu'irriter les feux de l'amour
,Dom Juan euſt
mieuxaimé que Leonore
euft efclaté contre luy ,
l'indifference eft en effet
ce qui tourmente le
A iiij
8 MERCURE
plus un amant , elle luy
ofte le plaifir de l'efperance
auffi - bien que la
haine , & n'éteint pas
comme elle fa paffion .
Dom Juan parla fouvent
de fon amour à Leonore
, & il en receut toujoursles
mefmes refponfes
, rien ne put attendrir
pour, luy , ce coeur
dont l'amour refervoit
la conqueſte à un autre
, mais en perdant
Pefperance de toucher
II. PARTIE. ,
fon coeur , il ne renonça
pas à celle de la poffeder
, il agit auprés du
Duc plus vivement que
jamais , il efperoit que
Leonore aimeroit fon
époux par la mefme raifon
qu'il l'empefchoit
d'aimer fon amantil
preffa fi fort fon mariage
qu'en peu de temps
il fute conclu : quelle
fut la defolation de cette
Princeffe , elle n'eftoit
pas infenfible à l'amour,
10 MERCURE
le Prince deMurcie avoit
fceu lui plaire , mille
qualitez heroïques le
rendoient digne de fon
amour , elle l'aimoit
quel malheur d'eftre
deftinée à un autre . Cet
aimable Prince qui l'adocair,
n'avoit jamais o
fé luy parler de fon a
mour , & n'avoit auſſi
jamais reçu aucune marque
de celuy que Leo .
nore fentoit pour luy :
Il arrive à Seville où
II. PARTIE. 11
eftoit la Cour du Duc
d'Andaloufie. Le mariage
de Dom Juan fut la
premiere nouvelle qu'-
apprit l'amoureux Prince
de Murcie, il fut frappé
comme d'un coup de
foudre. Il crut avoir
tout perdu , ainfi il ne
menagea plus rien` , &
fans rendre
fes premiers
devoirs
au Duc , il
court chez Leonore dans
l'eftat le plus violent qu’-
un amant puiffe éprou12
MERCURE
ver : Il est donc vray ,
Madame, luy dit-il, que
vous épouse Dom Juan,
l'heureux DomJuan va
vous poffeder. Toute la
Cour qui retentit de fa
gloire & de fon konkeur,
il
m'annonce le feul malkeur
quiput m'accabler :
car enfin , Madame ,
n'eft plus temps de vous
cacher mes fentiments , il
faut maintenant qu'ils cclatent
, je vous aimay
dez que vous paruftes à
II. PARTIE. 13
l'amour ne
j
mes
yeux ,
peut plus fe taire quand
il eft reduit
au defefpoir
Dom
Juan
fera l'epoux
de Leonore
ceffe
Ah Prinquelle
reffource
pour moy dans un pareil
malheur , Eh ! quel
autreparty puis- je prendre
que celuy de mourir
: ce difcours du Prince
furprit Leonore : il
luy donna encore plus
de joye , le refpect du
Prince avoit jufques- là fi
14 MERCURE
bien caché fon amour
qu'elle n'avoit pas meſme
peu le foupçonner ,
quel charme pour elle
de fe voir fi tendrement
aimée dun Prince qu'-
elle aimoit.
Leonore dont le coeur
eftoit grand & incapable
des petiteſſes de la
feinte & du déguiſement
fe livra toute entiere au
premier mouvement de
fa generofité , Prince ,
dit elle , loin que voftre
11. PAR TIE. is
amour m'offense , je ne
fais point difficulté de
vour dire que j'y
refponds
par tout celuy dont je
Juis capables ouy, Prince,
je vous aime, & fi j epoufois
Dom Juan je Jerois
?
encore plus à plaindre
que vous maintenant
que je connois voftre amour
, & que vous fçavezle
mien nos malheurs
ne feront pas fi
grands , la poßeffion
de
voftre coeur va me faire
16 MERCURE
à un
Surmonter les plus rudes
difgraces , & l'aveu que
je vous fais de mon amour
vous refponds que
je ne feray point
autre que vous.
Cet aveu paroîtra fans
doute bien promt à ceux
qui croyent que l'amour
eft toujours une foibleffe
, il feroit condamnable
en effet dans une
amante ordinaire , mais
l'amour heroïque plus
independant
ſe preſcrit
à
II. PARTIE. 17
a
à luy mefme fes regles ,
fans violer jamais celles
de la vertu .
On peut juger combien
le Prince fut fenfible
à un aveu dont il
n'auroit jamais ofé ſe
a
flater , fa joye plus vive,
& plus forte que celle
que l'amour content
infpire d'ordinaire , ne ſe
monftra que par des
tranſports , il luy prouvoit
par le filence le plus
paffionné que fon bon-
Juillet 1711.
2 B
18 MERCURE
heur épuifoit toute fa
fenfibilité , tandis que la
Princeffe , oubliant le
danger d'eftre furpriſe ,
s'abandonnoit au plaifir
de le voir fi tendre . Il
reprit l'ufage de la parole
que fa joye extrémeluy
avoit ofté : Eſt-il
poffible , ma Princeffe !
que vous soyez fenfible
à mon amour , n'eftoitce
pas affez que la pitié
vous intereffaft dans mes
malheurs Je comptois
II. PARTIE 1
fur la gloire de vous admirer,
& de vous aimer
plus que tout le monde
enfemble , mais pouvoisje
me flater du bonheur
de vous plaire:Soyez sûr,
dit Leonore , de la fincerité
de més
fentiments :
la vertu n'a pas moins
de part à l'aveu que je
vous en fais que mon amour
: ouy , Prince , c'est
cette vertu fi fenfible à
la vostre qui vous afait
l'aveu que mon amour ,
Bij
20 MERCURE
tout violent qu'il eft , ne
m'auroitjamais contraint
à vous faire d'eft
cette vertu qui me fait
foubaitter defire plus dide
vous mais belas !
que le plaifir d'un entretien
fi tendre va nous
gne
coufter cher, noftre amour
eft trop violent pour ne
pas éclater , on le remarquera
, Prince, & l'on
va nousfeparerpour tousjours.
Aprés une converſaII.
PARTIE. 21
1
"
tion telle que fe l'a
peuvent
imaginer ceux qui
ont reffenti en mefme
temps l'amour , la joye
& la crainte. Le Prince
de Murcie fe fepara de
fa chere Leonore , de
peur de trahir par un
trop long entretien le miftere
fi neceffaire à leur
amour : iballa rendre fes
dévoirs au Duc d'Andaloufic
, qui luy confirma
le mariage de Leonore
avec Dom Juan'; fa vi22
MERCURE
fite fut courte, il n'aimoit
pas affez Dom Juan pour
s entretenir fi long- tems
de fon bonheur : la tefolution
du Duc L'allarmoit
extremement , il
prévoyoit des éclats que
fon amour pour Leonore
luy faifoit craindre
plus que la mort. Agité
de foins & d'inquietudes
il va chercher la folitude
pour y réver aux
moyens de détourner le
malheur qui le mena-
है
II. PARTIE.
23
çoit ; il y trouva juftement
Dom Juan qui fe
promenoit feul dans les
jardins du Palais : quelle
rencontre que celle
d'un Rival qui rendoit
malheureux l'objet de
fon amour. Si le Prince
euft fuivi les mouve
ments de fa colere , il au
roit fans doute terminé
fur le champ leur que
relle : mais il importoit
au Prince de diffimuler
plus que jamais ; il abor→
24 MERCURE
da Don Juan avec cet
air d'enjouement , & de
politeffe qui luy eſtoir
particulier , & luy parla
en ces termes : Je ne
m'attendois pas , Prince,
de vous trouver enfoveli
dans une profonde reverie
lorfque toute cette
Cour ne s'occupe , & ne
s'entretient que de voftre
bonheur , le Duc d' Andaloufie
vient de vous
rendre le Prince d'Efpagne
le plus heureux ,
vous
II. PARTIE.
25
vou's fuyez tout le monde
qui applaudit à fon
choix. Eft -ce ainfi que
vous recevez la plus
grandefaveur que puiffe
vous faire la fortune ?
Prince , refpondit Dom
Juan , loin d'eftre infenfible
au bonheur
·que
le
choix du Duc me procure
, c'est peut - eftre afin
de le mieux
goufter que
je cherche la folitude :
pour y estre auffifenfible
que je le dois , je n'ay be
Fuillet 1711. 2 C
26 MERCURE
foin que de mon propre
coeur , & je le poffede
mieux icy qu'au milieu
d'unefoule de courtisans,
dont quelques - uns peut-..
eftre donneroient des applaudiffements
force à
un Prince dont ils envient
le bonheur.
Quoy qu'il enfoit , reprit
le Prince , vofire
froideur m'eftonne : vous
eftes trop heureux pour
vous renfermer dans les
bornes d'une joye fi moII.
PARTIE. 27
derée. Eh! qui eutjamais
tant de fujets de joye ?
Vous allez poffeder Leonore
, & vous poffedeZ
apparemment fon coeur ,
car Dom Juan , delicat
5genereux comme je le
connois , ne voudroit point
faire fon bonheur aux dépens
de celle qu'il aime
'il n'auroit point accepté
Les offres du perefans eftre
feur du coeur dela fille.
Leonore, refpondit Dom
Juan , n'a point flatté
Cij
28 MERCURE '
mon amour, & fi j'etois
d'humeur
à
m'inquieter
,
je trouverois peut - eftre ,
qu'elle eft fans inclination
pour moy : mais enfin
je rapporte la froideur
dont elle a payé mesfeux,
à fon indifference naturelle:
l'amour mutuel ri'eft
pas neceffaire dans de
pareils mariages , les raifons
d'Eftat , & les interefts
de famille en déci
dent ordinairement ; &
lorfque j'accepte l'horII.
PARTIE. 29
neur que le Duc veut me
faire , fa vertu me refpond
qu'elle n'a point
d'antipathiepour l'époux
que fon pere luy deftine ,
ni
d'inclination
pour ceux
que le choix du Duc naw
thorife pas à luy marquer
de l'amour. Permettezmoy,
Seigneur , repliqua
le Prince , de douter de
la fincerité de vos difcours
pour estimer encore
vos fentimens , oui , puifque
vous voulez estre
G iij
30 MERCURE
Efpoux de Leonore ,
vous eftes feur de fon
coeur mais fans doute
vous voulezjouirfeul de
vosplaifirs. Je vous laiffe
en liberté.
Si le Prince quitta
brusquementDomJuan ,
c'eftoit moins pour luy
plaire , que parce qu'il
craignoit de ne pouvoir
pas affez retenir la colere.
Il eftoit en effet bien
dangereux qu'elle n'éclataft
à la veuë d'un
II. PARTIE . 31
Rival qui offenfoit également
fa delicateffe &
La paflion.
Le Prince courut rendre
compte à ſa chere
Princeffe de ce qui s'eftoit
paffé entreDomJuan
& luy mais bientoft
les inquietudes le réprirent
quand Leonore luy
dit
le Duc fon pere
que
vouloit
abfolument achever
ce fatal mariage,
qu'elle en auroit efperé
plus de condefcendan-
C iiij
32
MERCURE
1
ce , mais qu'il paroiffoit
inflexible & qu'elle
craignoit bien que rien
و
ne peut changer fa refolution..
Fors que
Ce
fut
pour
le
Prince
fe
trouva
cruellement
agité
: Que
de
malheurs
, luy
dit-il ,
je
vais
vous
fufciter
!
quelles
violences
ne
va
point
vous
faire
le Duc
?
quelles
perfecutions
de la
part
de Dom
Juan
? mais
en
vain
cet
indigne
Ri
1
IL PARTIE. 33
val ventforcer vostre inclination,
appuyé duchoix
de voftre Pere , mön amour
mon courage ,
plus forts que leurs interefts
, & leurs refolutions
vaincroient des obftacles
mille fois encore plus
grands vous m'aimek
, je ne feray jamais
malheureux , Dom
Juan nefera jamais vo-
Are Epoux je cours le
punir. & vous venger.
Ah Prince ! dit Leono
34 MERCURE
t
le
re , qu'alleZ- vous faire ?
je ne crains point que
bruit d'un combat puiffe
ternir ma gloire , mais
que deviendrois - je s'il
vous eftoit funefte ? la
fortune n'eft pas tousjours
du party
Prince , au nom de cet
amour , n'expoſe point
une vie à laquelle s'atta
che la mienne : contentevous
du ferment que je
fais de n'eftre jamais
qu'à vous.
de Famour.
11. PARTIE . 35
Quel coeur ne feroit
pas fenfible à tant de tendreffe
mais qui pourroit
l'eftre autant que le
fut ce Prince le plus delicat
, & le plus tendre
de tous les amans : on
peut croire que ſes tranſports
éclatoient fur fon
viſage , & ce fut en effet
ce qui trahit le miſtere
de ces amans . Dom Juan
venoit vifiter Leonore ,
il entroit dans ſon appartement
, dans les mo
36 MERCURE
mens les plus vifs , &
les plus heureux où le
Prince fe fuft encore
trouvé ; il foupçonna
d'abord fon malheur, &
la Princeffe qui craignoit
de fe trahir elle- mefme ,
aprés quelques difcours
de civilité feignit une
affaire , & fe retira dans
fon cabinet. Pour lors
Dom Juan qui n'avoit
d'abord ofé produire ſes
foupçons , ne menagea
plus rien , ces deux Ri+
II. PARTIE.
vaux quitterent l'appartement
de la Princeffe ,
& fansfe donner rendezvous
que par des regards
, ils fe trouverent
enfin feuls dans une allée
extrememeut éloignée
du Palais , & Dom
Juan parla ainfi le premier
Si favois fcen
Prince , que vous estic
feul avec Leonore , je
Z
n'aurois eu garde de trou
bler voftre entretien , il
a
vous faifoit plaifir à l'un
38 MERCURE
à l'autre , où toutes les
marquesfur lesquelles on
enpeut jugerfont équivo
ques : je me fuis pour lors
fouvenu des maximes genereuses
que vous voulieZ
tantoft m'inspirer, j'en
ay reconnen la fageffe
auffi-toft que le principe.
Seigneur , refpondit le
Prince , quand on est né
genereux onn'ignorepoint
ces maximes , un amant
delicat fe croit indigne
d'épouser fa maiftreffe
II. PARTIE . 39
quand il ne s'enfait pas
aimer, l'époufer fans luy
plaire c'eft luy ofter la
liberté de concert avec
ceux qui ont droit de dif.
pofer d'elle , & pour
moy..
Pour
vous
repliqua Dom Juan
vous accepterie le choix
de fon Pere s'il eftoit
en voftre faveurs fans
craindre d'opprimer
fa
liberté , & vous feriez
un ufage plus agreable
de la delicateffe
de
40 MERCURE
י
vos fentiments : je n'en
produirois pas du moins ,
reprit le Prince avec émotion
, d'indignes &
delle & de moy. Feferay
bientoft voir, reprit fierement
Dom Juan , que
ce n'eft pas eftre indigne.
du bien auquel on afpire,
que de faire des envieux.
A ces mots le Prince fentit
redoubler fa colere :
Un amant , luy dit-il ,
qui ne trouve que de l'indifference
dans l'objet
qu'il
II. PARTIE. 41
He!
?
qu'u aime, fait d'ordinai
re peu d'envieux. Je fuis
furpris, reprit Dom Juan,
de l'audace avec laquel
le vous ofez m'infulter
.
que pretende - vous
fur Leonore pour en foutenirles
droits : je pretends
les luy conferver , dit le
Prince , & fçavoir fi
Dom Juan aura le cou
rage de les détruire. Aces
il tire fon épée , &
Dom Juan ſe met en devoir
de fe deffendre..
Fuillet 1711. 2 D
mots ',
1
42 MERCURE
A voir leur mutuelle
fureur on auroit deviné
fans peine l'importance
du fujet qui les animoit:
ces fiers Rivaux , qu'un
grand courage & de
puiffants motifs rendoient
prefqu'invincibles
, combattirent longtemps
à égal avantage :
mais enfin la force &
Fadreſſe du Prince prévalurent
; il defarma
Dom Juan , qui fans avoir
receu aucune blefII.
PARTIE.. 43
feure,fe trouva à la merci
de fon vainqueur .
Alors le Prince , loin d'abufer
de fa victoire , fentit
mourir toute fa haine,
il ne put s'empefcher de
plaindre le trifte eftat
d'un malheureux . Dom
Juan eftoit en effet digne
de fa pitié : il fe
monftroit à la verité peu
genereux en pourfuivant
des prétentions que
Finclination de Leonore
a'authorifoit pas , mais
2
Dij
44 MERCURE
r
il
dementoit fa
generofi
té pour la premiere
fois ,
& jufque là le Prince
l'avoit trouvé digne de
fon eftime. Il ne voulut.
point auffi luy donner la
mort : Dom Juan , luy
dit ce genereux
Rival
renonce
à lapoffeffion
de
Leonore, & vive . Non,
non , refpondit
Juan , termine
ma vie,
ou laiffeX-moy lefperance
depoffederle feulbien qui
me la fait aimer. Vous
Dom
IL PARTIE. 45
voulez donc mourir , re
prit le Prince ? Ouy , dit
Dom Juan , Eh ! quefcrois
- je d'une vie qui ne
feroit pas confacrée à Leonore
; ah ! je feray trop
heureux de luy donner
cette preuve de ma conf
tance,ouije veux mourir.
Non , dit le Prince , que:
ce difcours avoit attendri
, non vous ne mourrez
point , deuffai -je vivre.
tousjours malheureux , je
respecte dans coeur la
46 MERCURE
mour queLeonore y a fait
naifre : Vive Dom
Juan , vivek, & qu'on
ne puiffe jamais dire que
vous moure pour avoir
aimé cette divine Princeffe.
En mefme temps:
il luy rendit fon épée ,
preft à recommencer le
combat. Mais DomJuan
charmé de la generofité
du Prince , fentit tout à
coup changer fon coeur ,
il fut quelque temps incapable
de prendre une
IL PARTIE . 47
reſolution , & mefme de
prononcer une parole :
enfin plus vaincu par la
Comme
generofitédu Prince que
par fes armes
s'il fut tout à coup de
venu un autre homme
il parla ainſi à ſon Rival.
Au moment que vous me
rendeeZ la vie , je comprends
que je meritois la
mort E je vais vous:
donner la plus grande
ve de mareconnoif
marque
fance : vous aimezfans
48 MERCURE
doute Leonore , & vous
eftes trop aimable pour
n'en eftre pas aime , je
vous cede , Prince , tou
tes mes prétentions , puiffiez-
vous vivre tousjours
heureux amant de Leonore
: pour moy je vais la
fuirpourjamais, &5 mettre
toute magloire à éteindre
une paffion qui offenfe
les plus illuftres amans
du monde confervek
,
Prince , voftre amitié que
vous venez de me rendre
fi
II. PARTIE.
fepretieuse , & accomplir
tous nos fouhaits. On ne
peut exprimer la joye ,
& la ,furpriſe du Prince ,
A
il n'auroit pas cru que la
generofité cuft tant de
pouvoir für le coeur de
Dom Juan , & fa refolution
luy paroiffoit fi
grande , qu'à peine pouvoit-
il fuffire à l'admirer
; il le tint longtemps
entre fes bras , arrofant
fon vifage de fes larmes .
C'eftoit un fpectacle
Juillet 1711 .
2 E
50 MERCURE
bien touchant que ces
fiers rivaux devenus tour
d'un coup fi tendres. Ce
Prince déploroit la fatalité
des conjonctures qui
forçoient Dom Juan sà
luy faire un fi violent fa
crifice ,
pendant que
Dom Juan croyoit faire
encore trop peu pourfon
illuftre amy . Leur genereufe
amitié fit entre eux
un fecond combat, auſſi
charmant que le premier
avoit efté terrible.rund
II. PARTIE st
25 Ils fe jurerent une éternelle
amitié , & fe dirent
enfin Adieu. Dom
Juan ne voulut point re
tourner fitoft dans fes Etats,
craignant les efclairciffemens
que le Duc de
Grenade fon pere auroit
exigé fur fon retour imprevû.
Il refolut d'aller
voyager dans toute l'Ef
pagne. Il ne crut pouyoir
mieux accomplir fa
promeffe , que par des
courfes continuelles , où
E ij
32 MERCURE
la multiplicité des diffe
rens objets qui s'offrent
aux Voyageurs
, pouvoit
le diftrairen, & chaffer
fes premieres impreft
fiops Cependant le Prins
ce qui avoit tant de fu
jets d'eftre scontent de
Famour , & de la fortub
ne , prévoyant de terri
bles efclats qu'il croyois
devoir efpargners auda
vertu de Leonore, eftoit
accablé de douleur . Il fe
reprochoit d'avoir plus
II. PARTIE. $1
écouté les intereſts de
fon amour que peux de
fa Princeffe . Il craignoit
de s'eftre rendu tout- à
faitindigne delle. Aprés
avoural hefité berquelque
temps entre cette crainte
& le defir de luy appren
dre fa deftinée , ce dernier
fentiment l'empor
tag & là il confia à fon
Ecuyer unes Lettre qui
apprit bientoft à la Princelle
comment le Prince
L'avoit delivrée des im
a
E iij
34 MERCURE
portunes pourfuites
de
Dom Juan. Si elle reçut
avec plaifir la nouvelle
de la victoire du Prin
ce : elle fat encore plus
charmée de la delicateffe
de fes fentimens
. Quoy ,
difoit elle , le Prince eft
victorieux dans un combar
qui décide de fon bonheur
, cependant crap
gnant de s'eftre rendu in
digne de mon amour par
l'excez du fien. Il we
peut gonfler en liberté la
II. PARTIE
jaye la plus grande qu'il
fost capable de reffentir ;
non,
Princetropgenereux
,
ne crais point la colere
de Leonore : je n'enviſage
dans ce combat que le
peril où tu t'expofois pour
empeſcherqueje ne fuffe
a un autre qu'à toy.
C'eſt ainſi que cette
genereufe Princeffe infenfible
à des revers que
de Prince craignoit pour
elle , donnoit au fort de
fon Amant , une joye
E
iiij
36 MERCURI
laquelle il s'eftoit luy
mefme refuféstilomais
comme fi elle n'euft på
goufter fon bonheur
t fans l'y rendre fenfible,
elle voulut par une lettre
qu'elle luy écrivit luy
rendre toute fa tranqui
lité. L'affeurance d'eftre
aimé de Leonore eftoit
bien heceffaire au Prince
pour luy faire fupporter
fon abſence : ell alloit
eftre éloigné d'elle fans
fçavoir quand il la re
2:
TI. PARTIE W
verroit. Il s'éloigna pn
finirelifant mille fois la
lettre de Leonore & fe
retira à deux lieues de Seville,
dans un lieu qu'elle
avoit autrefois habité, où
il s'occupa uniquement
du plaifir d'eftre aimé
d'elle , & de la douleur
d'ens eftre féparé Leo
nore de fon coftén'avoit
gueres d'autre occupat
tion , les mefmes fentimens
leur donnoient les
meſmes peines , & des
8 MERCURE
mefmes plaifirs. 609
Un temps confidera
ble fe paffa , fans que ces
deux Amans puffent ny
s'entretenir , ny s'écrire :
& Leonore qui n'avoit
de plaifir qu'en penfant
au Prince, en eftoit pour
comble de malheurs diftraite
par les foupçon's
de fon pere qui croyoit
que les froideurs de få
fille avoient éloigné
Dom Juan. Enfin le tumulte
d'une Couroù
II. PAR TIE.
l'on ne s'entretenoit que
de Dom Juan, luy devint
tout- à -fait infuportable i
elle pria le Duc fon pere
de luy permettre de quit
ter Séville pour quelque
temps , fous prétexte de
rétablir
fafanté , que
Tabfence de fon cher
Amant avoit extrême
ment alterée : elle choifit
Saratra Maifon de plaifance
à deux lieues de
Seville où elle avoit paffé
une partie de fon en
60 MERCURE
fance, elle alloit tous les
foirs le promener dans
un bois épais , où ella
eftoit feure de trouver le
filence, & la liberté: Un
jour fans s'eftre cappers
çue de la longueur du urdu
chemin , elle fe trouva
plus loin qu'à l'ordinaire
du Chafteau de Saratrap
elle s'affit , & fit affeoir
auprés d'elle Ilabelle
l'une de fes Filles qu'elle
aimoit plus que les quel
trés, & qui ne la quittain
II. PARTIE.
prefque jamais ,elle tom
basdans une fi profonde
refverie qu'Ifabelle ne
put s'empefcher de luy
en demander le fujet, &
pour lors , foit que fon
arhours fortifié par un
trop dong filence ne puft
plus fer contenir foit
quilfabelle méritaft cet
te marquè de ſa confian³
ce , Leonore luy ouvrit
fon coeur , & par le recit
le plus touchant luy ap
prit tout le mystere qui
62 MERCURE
eftoit rentre elles, & lex
Prince.Tov veel ob
Ifabelle eftoit , fans
doute , attendrie à la
peinture d'un fi parfait
amour ; mais elle fe crut
obligée d'exhorter Lea
nore à bannir le Prince
de fon coeur : elle luy
reprefenta refpectueufe
ment tous les égards
qu'exige des perfonnes
de fon rang , le public à
qui elles doivent , pour
ainsi dire, rendre compte
IL PARTIE.
de leurs fentiments &
de leur vertu . Abima
chere Ifabelle, reprit Leonore,
des que je connus le
Prince, je perdis la liberté
de faire toutes ces refle
xions , ma raiſon qui en
fit beaucoup en fafaveur
n'enfit aucunes contre lui.
Je l'aime enfin , & je
crois , par mon amour,
eftre au-deffus de celles
quin'ont pas le coeur affez
vertueux pour l'aimer, ce
m'est point parce qu'il eft
છ
64 MERCURE
mieuxfait que les autres
hommes , niparce qu'il a
plus d'efprit. C'eft , ma
chere Ifabelle, le caractere
de fon coeur que j'eftime.
en lui , c'est fon amour
genereux , delicat , defin
tereffé , respectueux. J'ai
cruc cet amour inte-.
·
que
reffoit ma generofité à le
payer par tout celui dont
je fuis capable : plus attentif
a ma gloire que
mor mefme & indiffe
rent für fa felicité parti
Belcsculiere
,
E5
II PARTIE 63
culiere , tout ce qui n'a
point de rapport au bonbeur
de mon amour, ou à
Peclat de ma vèrtu , ne
peut l'intereffer, pouvoisje
connoiftre tant de mesite
, 5 ne pas l'estimers
pouvois-je fentir le prix
d'un fi parfait amour, 5
ne pas l'aimer? Auffi,
ma chere Ifabelle,lapaf
fion que j'aipour lui n'eft
point de celles qu'on voit
diminuer par labfence.
Ab! pourquoifaut-il que
Juillet 1711.
&
2 F
** MERCURE
jefois condamnee à ne le
plus voir,peut- eftre doute
til de ma conftance
, peut
eftre il craint que que mon
amour ne s'affoibliffe
.
A peine eut-elle achevé
ces derniers mots, que
le Prince fortit du bois
tout tranſporté , & ſé
jettant à fes pieds , sé
cria: Abl ma Princeffe
,
ya-t'il un homme auffi
beureuxque moi , p
ce que je vous rends un
bommage que tout l'uni
par
11. PARTIE 67
vers feroit force de vous
rendre faut-ilque jefon
plus heureux que tout
[ Univers ensemble.
Quelle furprife, quel
le joye , quels tranfports
ne firent point éclater
ces tendres Amans: cette
reunion impréveuë produiſit
entre eux un long
filence qui peignoit
mieux leur ſenſibilité
que tous les difcours.
Cette fituation avoit
fans doute , des grandes
Fij
* MERCURE
douceurs , mais l'amour
fecond en plaifus eff
trouve dans les difcours
paffionnez quanduil va
épuifé ceux du ſilence
ce fut alors que ne pous
vant affez le regarder,ils
ne parent fe laffer de
s'entendre.10 2400?
Que fai de plaifir à
vous retrouver,cherPrin
ce , dit tendrement Leonore
, mais que ce plaifir
fera court ,peut-eftre nous
ne nous verrons plus :
IL PARTIE.
nous ne nous verronsplus
ma Princeſſe répondit,
il ab crose que toutes
lesfois que la gloire, onla
felicite de Leonore exige
ront que je paroiffe a fes
geux , rien n'eft capable
de m'en empeſcher, Je
vous verrai, charmante
Princeffe , malgré tous ces
perils , mais que tous ces
perils , que tous ces mal
beurs ne foient que pour
moi feul, j'aurai laforce
de lesfupporter, puifque
* MERCURE
vous m'aimez sand
Jen'entreprends
point
des peindre ici la dous
ceur de leur entretiens
chacun en peut juger
par la propre experience
à proportion des fentiments
dont il eft capas
ble. Il fuffira de dire que
ces plaifirs n'ont point
de bornes dans les coeurs
de ceux qui n'en met
tent point à leur amour.
Chaque jour Leonoré
revit fon Amant , & ce
IL PARTIE or
furent chaque jour de
nouveaux plaifirst Ils
eftoient trop heureux ,
pour que leur bonheur
fut de longue durée , la
fortune leur donna bientoft
d'autres foins , Leo
nore receut ordrende
quitter Saratra , & de
retourner promptement
à Seville. D'abord elle
foupçonna quelque tra
hifon de la part de fes
domeſtiques , & fit fça»
voir aut Prince Fordre
71 MERCURE
cruel qui les féparoit , en
de priant de s'éloigner
inceffamment d'un lieu
où il avoit , fans doute ,
efté découvert.cloud
Les foupçons de Leonore
ne fe trouverent
que trop bien fondez ,
le Duc avoit appris par
un domestique de Leo
nore , qui eftoit depuis
long - temps dans les
interefts de Dom Juan
ce qui fè paffoit entre
elle & le Prince !
11
H. PARTIE.
73
H rappella la Princeffe ,
qui croyant fa paſſion
trop belle pour la defavouer
, ne luy en fit plus
un myftere , non plus
que du combat entre les
deux Princes . La fincerité
de Leonore ne fit
qu'exciter la colere du
Duc , il luy ordonna de
fe preparer à un plus
grand voyage , & afin
qu'elle puft oublier le
Prince , ce pere inflexible
refolut de mettre la
Fuillet 1711.
G
74 MERCURE
mer entre ces deux amants
, & emmena Leonore
dans l'Ile de Gades.
Ce depart fut fi fecret
& fi precipité , que Leonore
ne put en informer
le Prince ; il apprit bien
toft qu'elle n'eftoit plus
à Seville , mais avant
qu'il puft apprendre où
fon pere l'avoit releguće,
il fut long-temps livré à
la plus cruelle douleur
qu'une pareille feparation
ait jamais fait fouffrir.
II. PARTIE. 75
Cette
feparation qui
doit
commencer à interes
fer le Lecteur , va produire
une fuite d'évenemensfinguliers
5 interef
fants , dont on vous don
nera une partie dans le
mois prochain,
dans le mois furvant.
L'impoffibilité de mettre
le refte
dans un feul Mercure
une longue hiftoirefait icy
par neceffité une interrup
tion & une fufpenfion de
curiofité pareille a celles
2 Gij
76 MERCURE
qu'on menageoit exprés
avec art dans nos plus
beaux Romans, aprés
tout il n'y a pas fi loin
dun Mercure à l'autre
2
a
qu'il y avoit du premier
Tome au douliéme dans
les Romans de la Calprenelle
, dont on n'avoit
quelquefois la fuite
qu'au bout de plufieurs
années. Il est vray que·
nos Lecteursfont plus impatiens
que ceux de ce
temps-là , & moins cuII.
PARTIE. 77
rieux d'avantures ferieufes
maispourles dedom
mager d'avoir attendu la
fuite de cette Hiftoire , on
y joindra chaque mois
quelque petite Hiftoriette
comique , qui fera felon
Fufage du Theatre , la
farce aprés la piece ferieufe.
G iij
78 MERCURE
ARTICLE
des Anonymes
.
L'Anonyme plagiaire
de Thouloule.
Je vous pille vous- mesme
, Seigneur Mercure
pour fatisfaire aux peti
tes tafches que vous impoſe
au public , je veux
dire que je refponds à vofire
in vino veritas par
quatre Vers que je crois
de
vous.
II.
PARTIE. 79
In vino finceritas
Le plus fourbe en beuvant
devenu plus fincere ,
Dit tout ce qu'il a fait &
tout ce qu'il veut faire ,
Son coeur nage dans le
verre .
In vino finceritas.
Soyezfincere auffifans
avoir bu , j'ay pris cecy
dans un petit Livre inti
tulé Le Puits de la Veritésce
Livre n'eft-il pas de
Vous
2. G iiij
80 MERCURE
Reſponſe.
Non, Seigneur anoni
me , non. Le Puits de la
Verité n'eſt point de
moy , j'aimerois mieux
qu'on me derobaft tous
mes ouvrages , que d'en
avoir un fur la confcience
qui ne m'appartint
pas : Le Puits de la Ve
rité eft de Mr de Frontignieres
autheur de la
plufpart des paroles dont
feu Mr le Camus avoit
composé les airs ; la yeII.
PARTIE. &
rité eft qu'on me demanda
quelques petites ébauches
que j'avois dans
mon porte-feuille , avec
un petit conte & quelques
autres badineries
pour faciliter la vente du
Puits de la Verité ; ainfi
je puis revendiquer
de
ce Livre une tirade de
couplets eftropiez fur in
vino veritas, & puiſqu'il
en eft icy queſtion en
faire de nouveaux
qui
tiendront lieu des chan82
MERCURE
fons de ce mois -ci . Voicy
les canevas : Faffe les
airs qui voudra , je n'ay
pas le loifir de penfer
eu
à la mufique.
CHANSONS.
Dans le vin la contrarieté
,
Comme des Medecins,
incerta facultas ,
Selon fes dogmes arbitraires
, t d
Donne aux meſmes Ly- »
II. PARTIE . 83
rops des qualiter con
traires
In vino contrarietas.
Dans le vin fertilité &
fterilité ,
Dans le filence à jeun
Belife eft en extafe ,
Le foir entre deux vins,
o Dieux comme elle
jafety
In vino fertilitas.
De peur d'aller rejoindre
un Epoux haiffable ,
Ellepaffe la nuit à table,
$4 MERCURE
In vino fterilitas.
Dans le vin diligence
& pareffe ,
Arrive t-ilcke Darboulin
Quelque excellent quartaut
de vin ,
De peur qu'un autre nè
Penleve
,
Avant le Soleil je me
leve,
In vino diligentia ,
A le boire appliqué rien
ne peut m'en diftraire :
II. PARTIE. 85.
Pareffeux pour toute autre
affaire ,
De jour enjourje la dif
fere ,
In vino
pigritia.
Dans le vin
fimplicité
& duplicité ,
On l'a dit mille fois ,
La pensée eftcommune,
Un homme yvre verra
deuxpiftolespourune.
In vino duplicitas .)
Vains defirs d'intereft ,
deplaifir, de gloire,
86 MERCURE
L'yvrogne vous reduit au
feul defir de boire
In vino fimplicitas
.
Dans le vin yvreffe &
fobrieté
,
Vous n'aurez pas de peine
à croire
Qu'on s'enyore à force
de boire
In vino fit ebietas.
Pourbien enluminer leurs
trognes,
Une croufte de painfuffit
à deux yvrognes
,
IL PARTIE. 87
In vino fit fobrietas.
On donnera au mois
prochain la fuite de ces
Couplets.
ARTICLE
Any the burlesque
Suite du Parallele d'Homere
& de Rablais.
De mefme qu'un courfier
agile , drioit Homere
, s'échappe quelquefois
de la main fçavante du
chartier tirannique , qui
88 MERCURE
a
l'attelant à fon Char ,
l'affujettiffoit aux regles
penibles de l'art quinventa
, pour dompter les
chevaux le Centaure Peletroine
.
De mefme un Autheur
peut s'échapper des regles
tiranniques qui donnent
tousjours des entraves
au genie , & quelquefois
des entorfes au
bon fens .
De mefme encore que ce
Courfier échappé , foulant
II. PARTIE. 89
* !
lant d'un pied libertin
l'herbe tendre des pre
verdoyants , tantoft pren
dra fa courfe rapide &
legere , comme la fleche
qui part d'un arc , pour
voler droit au but où l'oeil
d'Apollon la guide , &
que tantoft ce Courfier
bondiffant, voltige en l'air
à droite 5 à gauche comme
la flamme errante
d'une exhalaifon vagabonde
, échappée du foudre
de Jupiter.
Faillet 1711 2 H
90 MERCURE
De mefme en conti
nuant ce parallele j'iray
droit au but , où je
m'en écarteray volontairemen
De mefme encore que
ce Courfier parcourant avec
mefme legereté , &
les plaines unies , & les
monts escarpe , s'égaye
en bonds & en ruades,
atteint du pied le bandet
attentif à fon chardon
fauvage.
De
mefme
j'attaqueII.
PARTIE. 9f
ray en ftile rablaifien
quelque afnerie Homerienne
, pour delaffer le
public d'une admiration
continuelle &
gefnante
où l'on veut l'affujettir
en faveur des Anciens.
De mefme enfin que ce
Courfier tantoft elevera
fa tefte fuperbe jufqu au
chefne facré , pour en détacher
de fa dent temeraire
quelque rameau
verd , deftiné à couronner
le Heros , & que tantoft
2 Hij
12 MERGURE
ilbaillera humblement fa
tefte aux crins épars pour
brouter l'herbe rampante.
De meſme tantoft fublime
, & tantoft burlef
que , tantoft Homere &
tantoft Rablais , je par-
Jeray leur langue en leur
7
donnant louange oublaf
me fans fiel , & prefque
fans prévention , je dis
preſque , car tous les
hommes font nez prévenus
, ou du moins ils fuçcent
la prévention avec
11. PARTIE 93
le lait.ashd
La prévention eft un
venin fubtil , ou plutoft
un animal venimeux
qui empoifonne tout ce
qu'il mord , & qui mord
fur tout ce qu'il voit , &
fur tout ce qu'il ne voit
pas donnons- luy enco
re à elle-mefme quelque
coup de dent avant que
de commencer noftre parallele
, Rablais diroit
que la prévention eſt un
animal augmentatif, dia
94 MERCURE
minutif, palliatif, deci
fif , & rebarbatif: ,, or fi
de cet animal , l'extrait
genealogique , fçavoir
,, voulez . Scachez - le ,
,, ne tient qu'à vous ,
eft deduit en ces Vers
,, cy-deffous infcrits :
il
Chez Lucifer jadis eut
accointance
Meffer orgueil avec dame
ignorance.
En ligne gauche , iffit de
cette
éngence
II. PARTIE. 9
Fille perverfe en fa folle
Darrogance ,
Prevention fut fon nom
que jepenfe ,
Or Dieu vousgard de fa
prédominance.
Mais continueroit «
Rablais , ventre beuf, «
voilà bien parler fans "
boire , je n'entends icy
vocifonner à mes oreil- "
les
que ce mot préven- “
tion,par cy prévention ,
par la prévention pour
les Grecs , prévention “
96 MERCURE
و ر
و ر
» pour les Latins. Holā,
hola , prévention
eft
Herefie
, & ne veut
,, croire perfonne
hereti- .
que en belles Lettres
,
,, que ne m'ayez démon-
,, tré par où , comment
,
,, & pourquoy
: car quel
,, motif mouvant
peut
démouvoir
ces aucuns
Letrez à preconifer
&
», proner à étripe goſier
les Ecrivains
antiques
,
qu'en revient- il à ces
મે
proneurs ?
Le
II.
PARTIE . 97 .
A cela vais vous re- ❝
partir en bref, mais a- «
vant parler , veux ob- “
ferver la premiere re- “
gle des éloquents par- "
leurs &
harangueurs ,
touflir , cracher , & fe
filentier un moment ,
punctum cum virgula ,
pour reprendre halci- «
ne.
CC
Je vais narrer veri- «
diquement ce qu'en
un mien voyage j'ay
yeu , ou non veu , car
"<<
Juillet 1711. I 2
8 MERCURE
و د
و ر
و د
و د
و و
99
c'est tout un , en fait
de Relations lointaines
.
Au fond des Indes
orientales ou occidentales
, ou imaginaires ;
,, car bonnement avoue-
,, ray que ne fçais autre
,, Geografie que des païs
à bons vignobles , où
je voyage volontiers :
aux Indes donc , deux
peuples y a , dont l'un
defire fans ceffe domiravillir
l'autre ;
و ر
و د
ر و
د ر
? ཎཱ@ TY °
LYON
*1893
DE
LA
VILLE
THEQUE
BLIO
LYON
7893⋅
II.
PARTIE.29
parce que l'autre don
ne jaloufie à l'un , com- "
me l'un en donne à "
l'autre , fi qué ce l'au- «
tre & ce l'un , font en «
guerre l'un contre l'au- «
tre.
<<
Or devinez ce qui
excite noiſe entre ces "
deux peuples , ce font "
des riens , petits riens , “
motifs de rien , comme "
qui diroit d'intereft "
de gloire , & de volup- "
té; ceux-cy ſe faſchent
2
I ij
100 MERCURE
que le terroir des autres
fertilife abondam-
و و
ment par
fon
propre
,, fond , & fans engrais,
,, fi qu'il produit
foudai-
,, nement
, & au mo-
, ment que befoin
eſt
,, fruits
favoureux
, &
fleurs
gentilles , que
ne produit
mie le ter-
,, roir des autres
; mais
,, ceux dont le terroir
eft
fterile
, font en recompenfe
, bons
pourvo-
,, yeurs & grands
provi-
"
و د
و ر
II. PARTIE . 10x
fionneurs; fique ne re- "
cueillant rien de leur "
cru , fçavent tirer des “
contrées eſtrangeres ,
fruits & grains dont ❝
ils empliffent granges , "
& fruitiers, & par ain- “
fi font plus , quoyque
non mieux , approvi- “
fionnez que ceux dont “
le terroir produit.
Notez illec , ô Lec- "
teur attentif, qu'en u- ".
fant icy des mots de "
fruits , grains , & ter- "
2 I iij
102 MERCURE
و و
,, mes pareils , c'eſt élocution
allegorique
&
,, fymbolique
, qui figni-
,, fie belles productions
d'efprit, & folides oeu-
""
vres
de
ر د
و د
gens
lettrez .
,, Difons donc que le terroir
, id eft , les cer-
,, vaux & caboches de
,,l'un de ces peuples font-
,, plus fertiles en produc-
,, tions , & que l'autre
peuple eft opulent en
collections
& maga-
و د
,, zins fcientifiques.
H.
PARTIE.
103
...Ce dernier peuple eft "
plus puiffant que l'au- "
tre , pource qu'il eſt “
plus nombreux , & il “
eſt plus nombreux ,
"
pource que plus de «
gens ont faculté collec- “
tive, & moins de gens "
ont facultéproductive, "
felon la regle que plus
de gens ont ce qu'eft
plus facile d'avoir, ſont “
toutefois grandement
"
louables ces collecteurs "
quant doctement & fa- "
2 I iiij
1
104 MERCURE
و د
gement
fçavent
ufer
de leur talent collectif
,
mais mieux louange-
„, ray certes , tel qui joindra
production
à collection
comme
aucuns
و و
و و
و و
ر و
و ر
و ر
ya
.
Les deux peuples dont
eft queftion font nom-
,, mez par maint hifto
riens les Produifants ,
& les Eruditionnez
Voyons maintenant ce
qui rend fi commune
», parmy les Erudition.
و د
و و
II.
PARTIE . 405
nez la maladie qu'on «
appelle préventiongrec- «
que , c'eft la mon tex- «
te, j'ay long temps tour «<
noyé pour y venir : ab «
regeons
matiere
de «<
peur qué l'ennuy ne «<
vous gagne . S'il vous "
a desja atteint , beuvez «
un coup , bon vin des- «
ennuye le Lecteur & «
l'Ecrivain ; & devroit- «
on , pour écrire joyeu- «
fement , boire par apo- «
ftille à chaque page ,
૯ .
t
106 MERCURE
» mais comme boire tant
» ne puis , au moins en
» parleray fouvent , car
» le refrain & l'énergie
»du langage Rablaifien,
» c'eft à boire à boire ,
» du vin du vin.
·
» Où en eftions nous,
» j'ay perdu la tramon‐
» tane, vite vite ma bouf
» fole , prévention , prévention
, voilà le mot
" pourquoy en font - ils
» fi embrelicoquez en→
" yers les Anciens ? oh
II. PARTIE . 107
c'eft pour trois mille «
quatre cents vingtdeux
raifons & demie ,
ne vous en diray pour «
le prefent que les deux «
& demie , car l'horlo- «
ge fonne , & c'est l'heu- «
re de boire.
Primò les Erudition- «
nez font femblables «
lef«
aux taverniers
quels les ans paffez ,
s'eftant munis de vins «e
maintenant antiques
, «
crient aux biberons , «
108 MERCURE
ג כ
و ر
» plorez & deplorez la
» perte de ces vieux
»fepts de vigne , qui ja-
» dis produifoient les
mirifiques vins , dont
»ayons en cave les originaux
: helas n'en
» viendra plus de tels
» car en l'an du grand
»hiver font peris par
gelée ces vieux fouchons
& farments
» & avec iceux a peri
» tout efpoir de bonne
» vendange.
II. PARTIE. fog
Ainfi les Eruditionnez
s'écrient en dé- «
criant toutes produc- «
tions modernes pour «
mieux s'acrediter , & сс
avoir debit des vieilles &
provifions & denrées «
antiques defquelles &
leurs magazins font «
furchargez.
cc
Secundo Pofons le cas "
que puiffe y avoïr , un «
Eruditionné de petite «<
ftature , il toutefois fe- «
ra ambitieuſement de «
rio MERCURE
"
و ر
و ر
fireux de paroître plus
grand qu'un produi
» fant de riche taille ,
» que fera l'Eruditionné
» baffet , Il grinpera fur
les épaules d'un an
» cien , comme finge fur
Eléfant , or ainfi grinpé
fur fur un ancien .
Plus cet ancien fera
grand , plus le grinpé-
» fus fera elevé , & plus-
» dominera de haut en
» bas le produiſant mo-
» derne .
»
"
II. PARTIE.
Voyez par la qu'Inte
reft eurent de proner «
antiques oeuvres
en c
tous les temps Pays &
moeurs, les Erudition- »
néz.
Ilsfont d'Homere
Un Dromadere
S'imaginant que fur fon dos
montez
Haut élevez , grimpezɔ juchez
guindez
Ils prendront haute place
Au coupeau du Parnaffe ,
Saffociant à cet Autheur fameux
112 MERCURE
Difant de luy tout ce qu'ils
penfent d'eux ;
Ils l'éternifent ,
Le divinifent ,
Puis par droit de focieté
Partagent fa divinité.
Cefuppofant , tous bons Ecrits
modernes
Sont prés des leurs , humaines
balivernes
و و
Parlons naturelle-
» ment
on a pouffe
troplóin l'enteftement
"
» pour
Homere
» ne
peut
on
nier que puif-
,, qu'on la loué danstous
و ر
les
IL PARTIE. 113
les temps , il n'ait me- "
rité d'eftre loué , auffi “
le louerai-je , l'admire-
“
rai -je & l'aimerai - je “
jufqu'à l'adoration
, ex- "
clufivement
.
Homere eft le Gargantua
des Erudition- «‹
nez , ils lefontfi grand "
qu'en rendant ſon me- “
rite gigantefque , ils "
en oftentla vrai reffem- "
blance .
CC
Rabelais a eu fes Eruditionnés
auffi bien "
Fuillet 1711 2 K
1
114 MERCURE !
,, qu'Homere , & fi Alexandre
avoit toujours
.
و ر
و و
و ر
un Homere fous fon
chevet , le Chancelier
,,duPrat portoittoûjours
,, un Rabelais dans fa
›› poche.
و ر
و د
و د
و د
Alcibiades queftionant
un jour un Pro-
,, feffeur fur quelques
و ر
,, Vers d'Homere . Le
,, Profeffeur refpondit
qu'il ne le lifoit point ,
,, Alcibiades luy donna
un fouflet pour le punis
II.
PARTIE. US
d'ofer profeffer les fci- «
ences , fans avoir chez ‹‹
luy le livre des Sça- "
vants le livre unique
excellence . "
le
livre
par
Le Cardinal du Belay
qu'on prioit d'admetre «
à fa Table certain "
Homme de Lettres , "
demanda en parlant
de
Rabelais qu'on appeloit
auffi le livre unique
, le livre par Ex. “
cellence cet Homme "
que vousvoulez admet "
Kij
16 MERCURE
و و
و ر
tre à ma Table a-t-il lû
„, le Livre , non luy ref-
,, pondit on, qu'on le faffe
donc diner avec mes
,, gens , reprit le Cardinal
, ne croyant pas
و د
و د
qu'on puteftreScavant
fans avoir lû Rabelais .
Ces traits de préven-
,, tions me paroiffent encore
plus forts pour
Rabelais qui vivoit a-
» lors que pour Homere
qui du temps d'Alexandre
avoit deja plu-
و د
55
1
II. PARTIE. # 7
fieurs fiecles d'antiqui- “
té , antiquité qui, com- “
me nous avons déja dit «
jete fur les ouvrages un "
voile obfcur & favora- "
CC
ble aux Allegories.
Grande reffource à "
ceux qui veulent trou- “
ver du merveilleux & "
du grand dans les petitelles
mefme qui é «
chapent aux plus ex- c
celents Autheur.
£
GO
cc
Rabelais acela de
commun avec Home- a
AS MERCURE
و ر
"
» re , quona cru voir Al-
» Legoriquement
dans fon
» Livre des Sistemes
entiers
d'Aftronomie
, de
Fifique
, de la pierre
» Filofofale
même
, que
quelques
Alchimiſtes
ont trouvé dans notre
» Auteurcomique
, com,
» me d'autres
l'ont trou,
vé dans le Prince des
» Poëtes.
J'ayconuun Rabelai-
❤ fien outré , qui dans
une tirade de deux cent
II. PARTIE.
F
noms de jeux qu'on
apprend à Pentagruel,
croyoit voir fur chaque o
mot une explication «
Hiftorique , Allegori- «
que & Morale , il eft «
pourtant viſible que
Rabelais n'a eu deffein «
en nommant tous ces &
jeux que de faire voir «
qu'il les fcavoit tous , «
car dans ces temps où
les Scavans eftoient «
rares , ils fe faifoient «
honneur de détailler, de
120 MERGURE
» dénombrer , de citer
» à tous propos , & d'é-
» tendre,pour ainfi dire,
» leurs Erudition , juf-
» que dans les moindres
Arts.Il faut croire pour
» la Juftification d'Ho-
» mere , qu'il vivoit dans
» un temps à peu près
» pareil , car il eft grand
» Enumerateur, grand
» detaillifte , diroit Ra-
» belais , Homere 5 moy
» pouvons eftre abon droit
» Paralellifez
, en ce que
fommes
II. PARTIE . 121
fommes par nature tant
foit peu beaucoup digref
fionneurs & babillards.
Nous parlerons en
temps & lieu,c'eft à dire,
quand l'occafion s'en
prefentera , des digref
fions , & des énumerations
dont nos deux Autheurs
font pleins; il y en
a quelques- unes dansRabelais
dont chaque mot
porte fon application
bonne ou mauvaiſe .
Ces titres de Livres par
Fuillet 1711 .
2 L
122 MERCURE
exemple dont il compoſe
une Biblioteque critique.
Les fariboles du Droit
L'Almanac
desgouteux
,
Le boutevent des Alchimiftes
Le limaffon des rimaf
feurs
Les pois au lard comme
comento
Le tirepet des Apotiquaires
,
La mufeliere de nobleffe
De moutarda poft pran-
J $
II. PARTIE. 123
dium fervienda ,
Malagranatum
vitiorum,
Les Houfeaux , alias les
botes de patience
Decrotatorii Scolarium.
Barbouilla- menta Scoti .
L'Hiftoire des Farfadets.
Oncomprend bien qu'-
il peut y avoir par raport
au temps de Rabelais ,
plus de fel que nous n'en
fentons dans ces critiques
badines , mais la fadeur
, & la platitude
2 Lij.
124 MERCURE
d'une infinité d'autres
nous doivent faire conclure
que fi Rabelais
eftoit un excellent comiqueen
quelques endroits
il eftoit en quelques
autres
tres mauvais plaifant.
Ces prévenus conclueront
au contraire , que
le fublime inconteſtable
d'Homere , nous eft garant
de l'excellence oculte
de ce qui nous paroift
mediocre , ils ajouſteront
II.
PARTIE. 125
que les endroits les plus
obfcurs pour nous brillent
pour eux des plus
vives lumieres : ne foutiendron
t-ils point auſſi
diroit Rabelais , qu' Hcmere
ne laiffoit pas de
voir clair quoy qu'il fuft
aveugle ?
Je viens de commençer
mon Parallele , par
la premiere idée qui s'eft
preſentée , je l'avois bien
promis , on ne me verra
point prendre d'un air
Liij
126 MERCURE
grave la balanceen main
pour pefer fcrupuleufe
ment jufqu'aux moindres
parties qui doivent
entrer dans la compofition
d'un poëme , je devois
examiner d'abord le
choix du ſujet , l'ordonnance
, les fituations , les
caracteres , les penfées, le
ftile , & tant d'autres
chofes dont jene fais pas
mefme icy une énumeration
par ordre de peur
de paroiftre trop arrangé
II. PARTIE. 127
dans un Parallele que
j'ay entrepris par amufement
, & qui ne meriteroit
pas d'eftre placé
dans mon article burlef
que , s'il eftoit ferieux &
regulier.
Voicy donc la metho
de que je vais fuivre
dans cette compoſition .
J'ay fur ma table mon
Rabelais , & mon Homere
, portons au hafard la
main fur l'un ou fur l'autre
, je tiens un Volume
2 Liiij
128 MERCURE
>
qu'y trouvay - je à l'ou
verture du Livre ᏙᏅ
yons , c'eſt un pere qui
parle à fon fils , devinez
fi cette éloquence eſt
d'Homere ou de Rabelais
.
Je te rappelle auprès de
moy , j'interromps la ferveur
de tes études , je t'arrache
aurepos Filofofique,
mais j'aybefoin de toy, &
je fuis ton pere , j'avois
efperé de voir couler dou
cement en Paix mes der
II.
PARTIE 129
nieres annees me confiant
en mes amis & anciens
confedere , mais leur
perfidie a fruftré la feureté
de ma vieilleffe,telle eft.
lafatale deftinée de l'hom
que plus ilfoit inme
و
quieté , par ceux en qui
plus il fe repofoit : viens
donc , quitte tes Livres
pour venir me defendre
car ainfi comme debile
font les armes au dehors
où le confeil n'eft dans la
maiſon , ainfi vaine eft
30 MERCURE
l'eftude, le confeil inutile
, qui en temps oportun
, par vertu n'eft mis à
execution.
Ma deliberation n'est
de provoquer mais d'apaifer
, non d'affaillir mais
de defendre , non de conquerir
mais degardermes
feaux fujets , & terres
hereditaires
contre mes
ennemis.
Fay envoié vers eux
amiablement pour leurs
offrir tous ce queje puis ,
II. PARTIE. 13t
5plus que jene dois , 65°
n'ayant eu d'eux autre reponfe
que de volontaire
jaloufe defiance , par
là je vois que tout droit
des gens eft en eux devenu
droit de force & de
bienfcance für mes terres ,
donc je connois que les
Dieux les ont abandonné
à leur propre fens qui ne
peut produire que deffeins
iniques , fi par inspira
tion divine , n'eft conti
nuellement guide.
132 MERCURE
Ne croyez vous pas en
tendre parler icy le fage
Neftor dans le fublime
Homere , ce n'eſt pourtant
que le pere de Gargantua
qui parle dans le
comique
Rabelais
.
là
Je n'y ay changé que
quelques mots du vieux
ftile , on peut juger parque
Rabelais cuft efté
un bon Autheur ſerieux .
Homere euft-il efté un
bon Autheur burlefque?
Pourquoy non s'il
l'euft voulu , il la bien
II. PARTIE. 13
efté quelquefois fans le
vouloir. Je pourray dans
la fuite citer en badinant
quelqu'un deces endroits
burleſques , mais commençons
par admirer ſerieufement
cet excellent
homme qui a fçu concilier
dans fon vafte genie ,
les faillies les plus vives
de
l'entoufiafme poëtique
, avec le bon fens
& la fageffe de l'orateur
le plus confommé.
Voicy comme il fait
parlerNeftor pour appai134
MERCURE
fer Achile en colere , &
Agamemnon pouffé à
bout , au moment qu'ils
alloient fe porter l'un
contre l'autre à des extremitez
funeftes.
ils
O quelle douleurpour
la Grece, s'écrie touta coup
Neftor , & quelle joye
pour les Troyens ,
viennent à apprendre les
diffenfions des deux hom
mes quifont au deffus de
tous les autres Grecs par
la prudence & par le couIL
PARTIE. $ 135
rage , mais croyez- moy
tous deux , car vous efies
plus jeunes , j'ai frequenté
autrefois des hommes
qui valoient mieux
que vous , &qui ne meprifoientpas
mes confeils ,
nonje n'ayjamais veu
ne verray jamais de fi
grands perfonnages que
Pirritous, Polifeme , égal
aux Dieux , Thefee fils
d'Egéefemblable aux immortels,
c.Voilàlesplus
vaillans hommes que la
16 MERCURE
terre ait jamais portez,
mais s'ils eftoient vaillants,
ils combatoient auſſi
contre des Ennemis tres
vaillants, contre les Centaures
des montagnes
dont la défaite leurs à acquis
un nom immortel
c'est avec ces gens
jay vecu. Je tafchois de
les égalerfelon mes forces ,
& parmy tous les hommes
quifont aujourd' kuy,
il n'y en a pas un qui
evft ofe leur rien difpulà
que
tera
II.
PARTIE. 137
ter , cependant quoyque
je fulle fort jeune , ces
grands hommes écoutoient
mes confeils , fuivez leur
exemple, car c'est le meil-
Leur parti , vous , Agamemnon
, quoique le plus
puiffant, n'enlevel point
a Achile la fille que
Grecs lui ont donnée , &
vousfils de Pelée , ne vous
•attaquez point au Roi ,
car de tous les Rois qui
ont porté le Sceptre , &
que Jupiter a elevez à
Juillet 1711 , 2 M
les
138
MERCURE
cette gloire , il n'y en a
jamais eu defi grand que
luy, fi vous avez plus de
valeur , & fi vous estes
fils d'une Deeffe , il est
plus puiffant parce qu'il
commande à plus de peuples
fils d' Atree appaifel
vostre colere , & je
vais prier Achile de furmonter
la fienne , car il
eft le plus ferme rampart -
des Grecs dans les fanglants
Combats
Le début de ce dif
II.
PARTIE. 139
J
cours deNeftor peut fer
vir de modele pour le
fimple vrayment fubli
me , avec quelart enfuite
Neftor impofe t-il à
ces deux Rois , en leur
infinuant que de plus
grands hommes qu'eux
ont cru fes confeils
lors meſme qu'il eftoit
encore tres jeune e da
Critique ordinaire qui a
fi fort blamé les invecti
ves , & los injures qu'
Hamere mer fi foûvent
Mij
140 MERCURE
53 dans la bouche de fes
Heros , trouvera Neftor
imprudent d'offenfer luy
mefme ceux qu'il veut
reconcilier , en leur difant
en face qu'il y a eu
de plus grands hommes
?
qu'eux , & à qui ils n'auroient
ofe rien difputer ,
mais fuppofons qu'en ce
temps-là les hommes accoutumez
à dire & à s'entendre
dire des veritez
euffent affez de bonne
foy & de grandeur d'aIL
PARTIE. 147
me pour ne fe point faſcher
qu'on reduifift leur
heroiſine
à ſa juſte valeur.
Cela fupposé , quelle
force d'éloquence a Neftor
, & quelle hauteur
de fentiment
, d'humi
lier ainfi
Agamemnon
& Achile, pour les foumettre
à ſes confeils
Mais il n'eft pas vrayfemblable
, dira- t- on que
des Heros fouffriffent
patiemment
une offens
it
#4 MERCURE
fe , mais répondrai-je ,
la verité ne les offenfoit
jamais , c'eftoit les
moeurs de ce temps - là ,
ou du moins il eftoit
beau à Homere de les
feindre telles , les noftres
font bien plus polies; j'en
conviens , mais qu'est- ce
que la politeffe ? la politeffe
n'eft que l'art d'in-`
finuer la flaterie & le
menfonge, c'eft l'art d'avilir
les ames, & d'éner
ver l'heroiſme Gaulois ,
II.
PARTIE 143
dont la grandeur confifte
à ne vouloir jamais
paroiftre plus grand qu'
on n'eft , & à ne point
induire les autres à vou
loir paroiftre plus grands
qu'ils ne font.
Voicy l'occafion d'es
xaminer fi Homere a
bien conneu
en quoy
doit confifter
la grandeur
d'un Heros . Mais
cela me meneroit plus
loin que je ne veux , j'irai
peut- eftre dans la fui-
HT
144 MERCURE
te auffi loin que ce parallele
pourra me mener:
mais je me ſuis reſtraint
à n'en donner dans cha
que Mercure qu'à peu
prés autant qu'il y en
a dans celui - cy , ma
tafche eft remplie.
THESE
II.
PARTIE. 145
THESE NOUVELLE
Je foutiens qu'il vaut
mieux aimer une laide femme
qu'une belle.
Refponfe par Turlupin.
J'aimerois mieux aimer
une l'aide , mais je me
mortifie , j'en aime une
belle.
Reponse parM. Rig..
Qui pour laide a tant fait que
d'avoir de l'amour ,
Eft plus fur d'un tendre retour.
Fuillet 1711. 2 N
146 MERCURE
Refponfe par le Chevalier
de
Ma foy je la quitte du
retour , car je ne sçaurois
tant faire ...
Reponse par la plus fpirituel
le la plus laide fille du
Faux-bourg S. Germain.
Eft-on l'unique amant
D'une femme fi belle
Elle en merite tant
Qu'un c'est trop peu pour elle.
La laide craint toûjours de
perdre fon amant
Et qui craint inconftance aime
plus conftamment.
II.
PARTIE. 147
Femme trop belle eft arrogante ,
La laide eft douce & complaifantes
Enfin l'amour propre me dit
Qu'une laide eft plus amuſante
A
meilleur coeur
d'esprit.
& plus
Refponfe par la belle Mar
quife.
Il me paroift que la gloire
feule d'aimer une belle
perfonne , vaut mieux que
le foible plaifir d'eftre armé
d'une laide..
2 Nij
148 MERCURE
Refponfe par la ferieufe
Clelie.
On eft d'abord char
mé d'une belle femme ,
enfuite on s'y accouftume,
enfin quelquefois on la
méprife.
On eft d'abord rebuté
par la laideur d'une femme,
enfuite on s'y accoutume
quelquefois , enfin
on l'aime conftamment.
Parlons plus jufte , ce
n'eft ny la beauté ný la
laideur , ceft l'humeur
, le
M.
PARTIE .
49
coeur & l'efprit qui decide.
Refponfe par l'Indolent.
J'aime mieux une laide
comme j'aime mieux le
vin de Brie , parce quon a
moins de peine à l'avoir
& à fe le conferver.
CONSEIL.
Que confeilleriez vous
un avare qui aimeroit grande
compagnie , grande chere ,
à qui on auroit donné fa
maiſon pour prifon. I
2 Niij
150 MERCURE
CONSEIL
par le Gafcon.
Cadedis que defa maiſon ,
il faffe une Auverge , il y
aura grande chere
Echo franc.
*
co Son
Suzane Ridondon.
Le grand corps fans
ame.
Carolus Sicaut la prétantaine
, & l'Animal ont deviné
l'Ame, mot de l'Enigme
du mois de May..
Le mot de la premiere
II.
PARTIE . 19
Enigme de ce mois c'eft le
Je ne fcay quoy , & le mot
de la feconde c'eſt Tuyau .
Noms de ceux qui ont
deviné le Je ne fçay quoy.
Je ne fçay qui , Greffier
de je ne fçay où a je ne
fçay comment devine Je
nefçay quoy...
ENEN
VO Y.
par M.
- ce prévention , bon
gouft , ou fantaisie ,
La plus rare beauté , le
a
1252 MERGURE
merite & l'efprit ,
Ont fur mon coeur peu
de credit
Quand le Je ne fçay quoy
n'eft pas de la partie .
Ce n'eft pas par eſprit
c'eft par conduite de
plomb que j'ay devinć
Tuyau de grais.
La petite Tigreffe de
la rue du petit Lyon.
Ceux -cy ont deviné les
L deux Enigmes
.
Pierre Jean Jacques ont
II. PARTIE . 153
deviné , fe ne fçay quoy , &
Nicolas , Tuyau. Coulez ,
murmurez ut re mi fa. La
Clopinante par inégalité
de jambe . Le Moulard
penfif. Manon Chicorée.
L'Oftrogot . Les trois filles
de l'Organifte , haute baffe
, & plus baffe , ce font
trois tuyaux d'orgues difficiles
à accorder .
154 MERCURE
ENIG ME
par M. D. L. P.
Logez auprés du toit d'u
ne haute maifon
Nous craignons le grand
vent , le Soleil , la fumée ;
Par nous on vit jadis
mainte guerre allumée .
Nous faifons des Captifs
fans fortir de priſon.
Nous fçavons diftiller le
plus fubtil poifon ,
II. PARTIE . ISS
Inftrument de terreur , de
courroux , de foibleffe , "
Nous employons pour
vaincre & la force &
l'adreffe ,
Et certaine liqueur qui
trouble la raiſon.
Nous
fçavons
menager
menaces
, & careffe ,
Bien fervir , ou trahir nos
maiftres , & maiftreffes ,
Plus d'un homme en cour
roux , nous appella
menteurs.
156 MERCURE
Nous mentions moins helas
au vieux temps de nos
peres ,
La nature nous fit ingenus
& finceres.
Et ce n'eft que par art ;
qu'on nous rend impofteurs.
Les Yeux m Caupréside
acadenced
ifsuille
MERCURE ,
III. PARTIE.
PIECES FUGITIVES.
SONNET ,
Sur des Vers que Mademoiſelle
M. avoit envoyezal Auteur.
'AUTRE jour la
Cour du Parnaſſe ,
L
Fit affembler tous fes
Bureaux , NA
3
A
2 MERCURE ,
Pour juger au
rapport
d'Horace ,
Du prix de certains
fr vers nouveaux,
Aprés maint Arrêt toûjours
jufté ,
Contre mille Ouvrages
divers ;
Enfin le Courtiſan
d'Augufte ,
Fit rapport de vos derniers
vers.
Auffi-toft le Dieu de
III. PARTIE.
Permeffe
Dit : je reconnois cette
piece ,
Je la fis en ce même
endroit .
L'Amour avoit monté
fa Lyre,
Sa mere écoutoit fans
mot dire , lad
Je chantois , Iris écrisob
J
zov Svoit.qqet
37
2130 2131
ab usia si Boo - BuA
3 A ij
4 MERCURE,
SONNET ,
Sur la mort de M. Duché.
C
$
ELUI que nous
plaignons , &
qu'un fort glorieux
Place au rang des Elûs ,
dans la Cité celefte ,
Brilla par fes talens ,
fut doux , fimple ,
modefte ,
Fidele à fes amis , difcret
, officieux .
Des charmes dont le
III. PARTIE . S
monde avoit flatté
Les yeux
;
Dieu diffipa bien - toſt
l'illufion funefte ,
Et de fes jeunes ans il
confacra le refte
A chater les
grandeurs
du Monarque
des
Cieux.
Il n'eſt plus , & j'ai vû
paffer la derniere
heure ,
Mais en pleurant fa
mort , c'eft moi feul
3 A iij
6 MERCURE ,
que je pleure ,
Mon aveugle fureur
n'accule point fon fort.
Iljoüit des feuls biens ,
qui faifoient fon envie,
Et ne pouvoit trouver,
qu'en paffant par la
moit ,
Le port tranquille &
Hûr de l'éternelle vie .
xx
III . PARTIE. 7
SONNET ,
A M. le Chevalier de S. Gilles.
Α
Aie
Pollon au Parnaffe
hier s'eftant⠀⠀
#rendu ,
Auteurs vieux & nouveaux
vinrent de
compagnie ,
Et difputoient entr'eux
aved telle manie ,
Que le Dieu même à
peine étoit -il entendu .
Entre autres Sarrazin
3 A iiij
8
MERCURE ,
crioit comme un
perdu ,
Se plaignant que Saint
Gilles avoit pris fon
genic .
Non , Meffieurs , difoitil
, ce n'eft point
ironie ,
Et s'il ne me le rend ,
je veux eftre pendu .
Un genie eft là bas cho
fe fi familiere ;
Que ne prend- il celuy
de Pie , de Frontiniere ?
III. PARTIE . 9
Lors Apollón luy dit :
ah ! tu fais le fâché ,
Eh bien , pour te montrer
à quel point je
l'honnore ,
Il gardera le tien , & je
luy donne encore
Celuy d'Anacreon par
deffus le marché.
RONDEAU.M
JE l'aytrouvé ce petit
"
10 MERCURE ,
Ce traître Dieu , parain
de Ménelas ,
Qui mieux armé que
Diane à la Chaffe ,
Dans certains yeux avoit
trouvé la place ,
Pour me jouer quelque
tour de Judas ,
J'ai d'abord dit: fuyons,
doublons
le pas ,
Allons chercher ou
Phoebus ou Pallas ,
C'eft contre amour un
remede efficace ,
III. PARTIE.
Je l'ai trouvé.
Depuis ce temps je
cherche : mais helas
Je cours toûjours fans
fçavoir où je vas ,
J'ai beau marcher , j'ai
beau fuivre leur trace ,
Pour les trouver j'ay
fait tout le Parnaſſe ,
Et le feul Dieu que je
ne cherchois pas
Je l'ai trouvé,
* 3+
12 MERCURE ,
ETRENNES
A M.de Pointis aprésfon expedition
de Cartagene.
L'An paffé , qu'un
deffein un
peu
trop hazardeux
,
Vous avoit fait fortir
de France ,
A tel jour qu'aujourd'huy
je fis pour vous
des
voeux ,
Et mes voeux vous ont
porté chance ,
Vous eftes revenu gailIII.
PARTIE . 13
lard & bien payé
Des dépens de voſtre
voyage ;
En vous voyant paſſer
chacun s'eft écrié :
Voila le vainqueur de
Cartage ,
C'eſt Scipion , non pas
Scipion l'Afriquain
,
Mais Scipion l'Ameriquain
,
Or bien que dans ce
temps une paix neceflaire
,
Semble avoir des Guer14
MERCURE ,
riers fufpendu les
projets
Il reste encor pour vous
des conquêtes à faire ,
Et j'ai pour vous encor
à faire des fouhaits ,
Voici
comment , il eſt
certains ſujets rebelles ,
Que l'on
nomme jeunes
cruelles ,
Que ces
peuples par
vous foient vaincus
à leur tour ,
Tâchez d'en
dépeupler
la
terre ,
III.
PARTIE . 15
Allez & revenez , s'il
ſe peut , en amour
Auffi
formidable qu'en
guerre.
EPITAPHE
Du Chien de Madame D...
PA
ASSANS pleurez
mon triſte ſort ,
Il fut
toûjours
digne
d'envie ,
Tant que je fus prés
de Silvie ,
Mais fa rigueur cauſa
ma mort ,
16
MERCURE ,
Amour voyant que la
cruelle
Bravoit fes coups , fuyoit
fes loix ,
Voulut punir ce coeur
rebelle ,
Il prend fon arc & fon
carquois ,
Et dans fon courroux
il fit choix
De ſa fleche la plus
mortelle ;
J'eftois alors prés de la
belle , i !
Je joüois fans fonger à .
mal ,
Amour
III. PARTIE .
Amour tira , le trait
fatal ,
Part , vole , & m'atteint
au lieu d'elle , !!
Un feu prompt & féditieux
S'alluma dés-lors dans
mes veines ,
Aprés mille fecrettes
peines ,
La mort vint me fermer
les yeux ,
Ainfi je garantis Sylvie
Du plus cruel de tous
3
B
18 MERCURE ,
fat
les maux
;
Elle jouit d'un plein
repos ,
Mais il m'en a coufté
la vie.
<
III. PARTIE: 19
PROLOGUE ,
Qui fut chanté chez Mad.
**** avant la reprefentation
de l'Ecole des
Maris
MELPOME'NE ,
Mufe de la Tragedie.
QUittez
Uittez ,
quittez
ma foeur une
arrogance vainę ,
Ofez
- vous comparer
3 Bij
20 MERCURE ,
vos frivoles chanfons
Aux nobles , aux fubli
mes
fons
De l'Heroïque Melpoméne
?
THALIE
Mufe de la Comedie.
Hé de grace , ma foeur
tréve de vanité ,
Vivez en paix avec
Thalie ,
Vous fçavez que vingt
fois elle a déconcerté
Par une agreable folie ,
III.
PARTIE . 21
Une
ennuyeuſe
gravité-
CLA
MELPOME'NE.
Ma voix refufcite la
gloire
De mes antiques demi
Dieux ,
Et je confacre la memoire
De ceux qui brillent à
vos
yeux .
THALIE,
Vos chants par leur lugubre
accord ,
Fatiguent ſouvent leur
oreille ,
22 MERCURE ,
Ma flute fouvent les
réveille ,
Et vôtre Lyre les endort,
MELPOMENE.
Croyez - vous que ce
foit un talent fort
utile
De
badiner à tous propos
?
THALIETE
Vous imaginez - vous
qu'il foir fi difficile
De faire bailler les
Heros ?
III. PARTIE . 23
MELPOME'NE.
De Lauriers immortels
je couronne leurs
têtes .
THALIE.
Je fçai les délaffer par
d'agreables fêtes.
MELPOM E'NE.
Je vante leurs exploits.
THALIE.
J'amufe leurs defirs .
MELPOME'NE. !
Je prends foin de leur
gloire.
24 MERCURE ;
THALIE.
Et moy de leurs plaifirs
.
MELPOME'NE.
Je m'étonne qu'une
Deeffe
Qu'une Mufe fe laiffe
à l'orgueil entraîner.
L'amour propre eft une
foibleffe
Qu'aux mal - heureux
mortels il faut abandonner.
THALIE .
Ne vous y
trompez pas ,
le feul
III. PARTIE . 25
le feul orgueil vous
touche ,
J'ai reçû comme vous
ce dangereux prefent,
Mais le mien eft vif &
plaifant ,
Et le vôtre eft fombre
& farouche.
MELPOM E'N E...
Vous eftes ma cadette
au jugement detous ,
Et l'on eft modefte à
vôtre âge.
THALIE.
Si je fuis plus jeune
3 C
26 MERCURE ,
1 que vous ,
Ne vous étonnez pas fi
je plais davantage . )
MELPOME'NE.
Ne profanons plus nôtre
voix
Par une odieufe querelle
,
Un Prince des Heros
le plus noble modele ,
Nous fournit de plus
doux emplois ,
Il a mille vertus dignes
de fa
naiffance ,
III. PARTIE . 27
7
Les Mufes dont il eft
l'appuy
Doiventy fe confacrer
à luy
Par zele & par reconnoiffance.
THALIE.
A fervir ce Heros bornons
nôtre defir.
MELPOMENE,
C'est le plus digne employ
des filles de memoire.
THALIE.
Que Melpoméne veille
3 Cij
28 MERCURE ,
à celebrer fa gloire.
MELPOM E'NE.
Que Thalie ait le foin
d'occuper
fon loifir.
TOUTES DEUX.
Que Melpoméne
veille
à celebrer
fa gloire.
Que Thalie ait le foin
d'occuper
fon loiſir.
III. PARTIE . 29
POLLICHON.
Poëme par M. de N *** Directeur
de l'Hôtel- Dicu
de Vienne en Dauphiné.
Lefujet eft tiré d'une Echope
, fous la porte d'entrée
de l'Hôtel- Dieu , demandée
à l'Auteur par une infinité
de perfonnes ; les unes
pour Pollichon , & les
autres pour Henriette.
LEs Dieux font
pour
Céfar, &
Caton pour
Pompée
.
Bon jadis , mais les
3 Ciij
30 MERCURE ,
Dieux , les Catons
de ce temps
Ont de plus grands
foucis la cervelle
occupée ,
Et fe partagent bien
pour d'autres combattans
,
Pollichon d'une part ,
& de l'autre Hen- t
riette ....
I
Quelle verve vous pred
Poëte ,
Et quel debut ? qu'ont
de commun entr'eux
III. PARTIE . 31
Deux inconnus & ces
Romains fameux ?
Jede dirais c'eft que
l'un & l'autre homme
Veut eftre feul maître
abfolu dans Rome ,
En leur faveur il fe fait
des partis ,
Adolefcens , hommes
faits , cheveux gris ,
Sages & fols , chacun
pour eux s'engage ; )
Les dieux contre les
dieux l'Olimpe ſe
* partage.
3 C iiij
32 MERCURE ,
Tout commeà Troye ,
Apollon d'un côté ,
Et d'autre part quelt
que autre Deité .
Rome
voit une guerre
en cruauté
feconde
;
Il fe verfe du fang fur
la terre & fur l'onde ,
Et tout cela pourquoi
?
feulemét
pour fçavoir
Qui fur la République
aura le plein pouvoir
Du fier Beau
- pere ou
de l'obstiné
Gendre
;:
Ces deux Maîtres
d'efIII.
PARTIE . 33
crime en pouffant
tout à bout
Firent tant qu'ils gâterent
tout .
Catule en fut témoin ,
il pourra vous l'apprendre
;
Or , ce fait entendu , le
LE
mien fe peut com -
prendre ,
Il ne faut tout au plus
que changer quelque
nom :
Par exemple au mot
•
Republique ,
34 MERCURE
,
Subftituez le mot boutique
:
APompée Henriette , à
Cefar Pollichon ,
Au fonds vous trouve-
10
rez que la chofe
eft
flenségale
;
Au fang prés répandu
c'eft un autre Pharfale
, she
Dans les efprits même
chaleur ,
Même efpoir du fuccés,
mêmeamour de la
gloire ,
III.
PARTIE. 35
Même attente de la
Victoire ,
Même bruit , & même
fureur,
Mêmes détours , & mê-
0 mes rufes .
O Lucain ! ô Breboeuf!
j'invoque ici vos
Mufes ,
Venez
entoufiafme, hyperbole
, grands
mots ;
Je ne sçaurois fans vous
celebrer mes Heros
,
36 MERCURE ,
Dire de leurs defirs l'ardeur
impatiente
Et dans tous leurs projets
l'audace triomphante
;
Prêtez- moy vôtre emphafe
& vos plus.
vifs crayons
.
Encor pourrai- je à peine
entreprendre ;
effayons.
Sous un portique étroit
dont l'antique ftru-
Єture
N'offre aux yeux des
III. PARTIE . 37
paffans qu'une caverne
obfcure ,
HabitePollichon l'honneur
de fon quartier
,
Demi porteur de chaiſe
& demi favetier
:
Non , loin de là fe montre
une jeune Amphibie
,
Et Fille & femme &
veuve , engageante
& hard ie
Henriette , en un mot ,
38 MERCURE,
qui de deffein
formé
Veut ravir au vieillard
fon Palais enfumé.
Mufe , raconte - moy
quelles furent fes
brigues , b
Quel art ou quel demon
a noüé cette
intrigue :
Mais je le prens trop
haut ; parlons plus
fimplement
:
La verité s'explique
avec moins d'orIII.
PARTIE . 39
Uus nement.
Mes gens en veulent
donc à la même demeure
,
On m'en rompt la tête
à toute heure ;
Dés
que
pour l'un
des
deux
je vais me déclarer
,
A quoy dois-je me preparer
?"
Les
Pollichons vont
dire
rage ,
Eft - ce là ce Juge fi
befaget k
40 MERCURE ,
Et les Henriets d'autre.
part
Me le revaudront tôt
ou tard .
Cruel reſpect humain ,
quelles loix tu m'ımpoſes
!!
Mais
non , c'eft
par
fond
qu'il
faut
regler
le
les chofes ;
Quiconque aura raifon
chez moy l'emportera
,
Aprés grondera qui
voudra :
GronIII.
PARTIE" 41
Gronder eſt choſe juridique
;
Ca , parlez donc , on
vous écoutera .
Commencez
Pollichon
, vous aurez la
replique ,
Henriette elle durera
Autant de temps qu'il
luy plaira ;
Laiffez à Pollichon enfler
fa
Rhetorique ,
Aprés luy la vôtre vien .
dra
,
Qui ne fera pas laco-
3D
42 MERCURE ,
nique ;
Car tout vieux Avocat
Safe pique you
De ne pas s'expliquer
catera....!
i par un
Quoy tous deux à la
fois ? O bruit diabolique
!!!
Un Huiffier pour crier ,
paix là.
Je m'enfuis , je n'ai pas
la tefte affez ftoïque
Pour fupporter cette
mufique :
Finiffons à tous deux 5
III. PARTIE. 43
j'adjuge la boutique ;
A tous deux ! Mais aboMais
voyons
fi cela
fe
pourra :
Tous deux infolidum !
nenny , la chofe
implique ;
Faifons donc mieux ,
hé bien ! on la partagera.
Salomon , Prince Pacifique
,
D'un femblable procés
de même ſe tira .
Voila mon Jugement ,
3 Dij
44 MERCURE
,
on l'executera .
L'executer , répond la
Nymphe colerique
,
Quoy l'on m'enpollichonnera
!
Moy prés de Pollichon !
oh la belle repliqué
!
Sur elle le vieillard jette
un regard oblique
,
Et qui te dit , qu'on le
voudra ?
Les paffans me feroient
III. PARTIE . 45
la
nique ,
Moy
vivre
auprés
de
toy ? plûtôt
dans
l'Amerique
,
Pollichon plein d'honneur
ira , vivra ,
mourra .
Que faire donc? en vain
mon eſprit s'allambique.
Themis , ſage Themis,
toy ma refſource
unique ,
Infpire - moy ce qu'on
fera ;
46 MERCURE ,
Quel nouveau jugement
faut- il que je
fabrique ?
Le voici , nuls des deux
la boutique n'aura :
Donner tout ,
partager
,
ôter tout la fottife
N'eſt pas où l'on la
croit ; maint Juge A
comme moy
Donne , ôte ou fait partage
en dépit de
la loy i
Nul par ce Jugement ,
II. PARTIE . 47
donné
vaille que
vaille ED
N'aura ni l'huïtre ni
l'écaille .
Belle Leçon , pour tous
grands , petits Magiftrats
,
Ne tombez jamais dans
mon cas.s
Mais j'entens des cenfeurs
, qui d'un ton
pedantefque ,
S'acharnent fur mes
vers , & difent , quel
grotefque?
48 MERCURE,
C'est justemenc celuy
dont Horace a parlé :
Sur une téte humaine
un cheval eft colé ;
Plumes , membres divers
, affemblage
bizare ,
Au deffus belle femme ,
au deffous montre
affreux ;
Meffieurs qui ne riroit
d'un contrafte firare ?
Qui ne riroit ? riez , c'eſt
tout ce que je veux .
DE
LA
BIBLI
AOTHEQUE
DE
LYON
MERCURE
IV PARTIE .
Nouvelles de Flandres.
************
Ordre de Bataille de l'Armée
duRoy en Flandres..
GENERAUX.
Mr le Marefchal , Duc de
Villars .
Mr le Marefchal de Montéfquiou.
Fuillet 1711 .
4.
A
VILLE
2 MERCURE
Lieutenans Generaux de la
premiere ligne.
Mrs Gaffion , Prince de
Rohan , Mezieres , la Valliere
, Deftain , Albergo
thy , Croify , Duc de Guiche
, Maulevrier , Hauteforr.
Maréchaux de Camp.
Mrs de Silly , le Vidame
, Chafteau - Morand ,
Choifeul , Rooth , Duc de
Mortemart , Nangis , Ravignan.
+
IV. PARTIE 3
Brigadiers.
Mrs Berville , Suzy , Caftel
- Moron , la Tremoille,
Krakemborg , Courtade ,
Choifeul , Saumery , Montbazon
, Gaffion , Dargelos
, Daubigné , Colandre,
Obrien , S. Simon , Bernholes
, Defrouville , Beaupuys
, Periffan , Seignelay,
PREMIERE LIGNE.
DRAGON S.
Colonelle Generale 3 efc .
A ij
4 MERCURE
Beautremont
3
.G
CAVALERIE.
Maiſon du Roy -13
Gendarmerie
13
8
8
Royal Piedmont 3
S.
Agnan
24
la Tremoille
Rottembourg
Royal Allemand
3
2
7
Druhot
Dauphin ,
7
IV.PARTIE. $.
Prince Marfillac . 2
Monteil ,
7
Choifeul ,
2
Courcillon , 2
Dalzcau ,
2
6
Cherizy ,
2
Royal Rouffillon , 3
Commiffaire Generale 3
8
INFANTERIE.
Picardie ,
Bourbon ,
Nice ,
62 efc.
3 bat
.
2
I
G
A iij
6 MERGURE
Navarre,
Bourgogne ,
34
2
6
Monroux ,
Bourbonnois , 2
Languedoc , 12
Aunis ,
Royal ,
2
3%
Royal Comtois, 2
Daunay ,
Les Vaiffeaux ,
La Marck ,
Royal Italien ,
2
6
6
3
1
6
Léc ,
Obrien ,
IV .
PARTIE. 7
Dorington ,
Galmoy
Odondel ,
Gardes
Françoifes , 41
Gardes Suiffes , 2
6
Alface ,
Vezin ,
La Reine ,
Haynault ,
Vauge ,
Le
Roy ,
Foix ,
4
2
6
3
2
* MERCURE
3 Piedmont ,
Royal la Marine , 2
Dellandes , I
C I
Mortemart ,
Ifenghien ,
Champagne ,
6
71
bar
.
RESERVE.
Lieutenant
General
Mrle Chevalier de Luxem
bourg
Brigadiers
Mrs Bellerieux , Mauny.
IV PARTIE
INFANTERIE
La Marine ,
Bigore ,
Santerre ,
2 bat
.
2
2
6
Lannois
Luxembourg ,
S. Second ,
Lafond ,
2
6
12
Lieutenans Generaux de la
feconde ligne.
Mrs Magnac , Galmoy,
Vivans , Puiffegur , VieuxFO
MRGURE
.
pont, Dreux, Brendle, Lée,
Geoffreville
.
Maréchaux de Camp.
Mrs Beauveau , Comte
de Nille , Leffars , Ifeng
hien , Mouchy , Miromelnil
, la Mark , Chevalier de
Roye.
Brigadiers.
,
M'S. Poange, Gaydon ,
Daultane Sandrusky
Rios , Capy , Montal , S.
Morel, Depinay, la Chaux,
IV. PARTIE IT
May , Grenets , Mercy ,
Sury , Lionne , de Lifle ,
Remirecourt , Gondrin ,,
Beringhen , Meleun , Saa
SECONDE LIGNE.
CAVALERIE.
Colonelle Generale , 3 efd.
S. Poanges ,
Ligondez ,
Chartres ,
Maifontiers ,
Clermont ,
2
2
7
3
2.
12 MERCURE
Daultanne
Villiers , 2
Grandmont
Aubeterre,
2
2
8
Brabant ,
S. Phal
Caycux ,
Efclainvilliers ,
Rios
,
S. Blimont ,
Montauban ,
Capy ,
Cravattes,
2
2
2
3
6
6
41 cfc.
7
IV.PARTIE 13
INFANTERIE.
Poitou ,
Lorraine ,
Miromefnil ,
2 bat
.
2
Tourraine,
Charollois
,
2
Bugey ,
2
6
Limofin , 2
La Chaux I
Boufflers ,
Villiers Suiffe ,
2
S
3
44 MERCURE
May ,
3
G
Brendle, 3
Surbeck , 3
6
Gardes de Baviere , 4
Heffy ,
Phiffer ,
4
3
3
Royal Rouffillon , 2
Lionne ,
Laonnois ,
La Fere ,
Tournefis,
Beauce ,
2
2
IV. PARTIE is
Tourville,
Barrois ,
Agenois
,
Greder Allemand 2
Solre ,
Gondrin
,
6
63 bat.
CAVALERIE
La Reine ,
Beringhen
Eftaniol
,
eſc.
3
16 MERCURE
Toulouze 3
Meleun ,
Dupalais ,
Lenoncourt ,
Flandres ,
Gouffer ,
Joyeuse ,
2
2
2
2
23 cfc.
RESERVE.
Lieutenant General.
Mr de Coignies.
7
8
IV. PARTIE 17
Brigadiers.
Mrs Bellefond, S. Savin .
DRAGONS.
la Reine
Hondfchot ,
Coettiman ,
3 cfc.
3
3
Chaſtillon , 3
Guyenne , 3
G
Droffia , 3
S. Chaumont , 3
Bonnelles , 3
9
Fuillet 1711
24
efc.
4.
B
i
18 MERCURE
AUTRE RESERVE.
Lieutenant General..
Mr de Broglie.
Brigadiers.
Mrs Tarneau, Combout,,
Paſteur.
CAVALLERIE.
Le
Roy ,
La Tour ,
Beauveau ,
Tarneau
3 eſc.
2 .
2
2
J
IV. PARTIE 10
Combous ,
2
Du Belley,
2
Biron ,
2*
Houffards de Nerville , 1
Paſteur , Dragons , 2
3*
18 efc.
CAMP SEPARE
Lieutenans Generaux.
Mrs Sailly , Conflans
Reichberg , du Rozel , S.
Fremont.
Bij !
20 MERCURE
Maréchaux de Camp.
M's S. Mortany , Santigny
, Prince Charles.
Brigadiers.
Mrs Nugent , Gaffé , Danumis
, Jouy ,. Girault , S.
Micault , Locatelly, Cloys ,
Prince de Bergets , Midefars
, Flavacourt.
>
CAVALLERIE.
Royal Eftranger, 3 cfc.
Villeroy, 3
IV . PARTIE 21
Nugent
2
Dauphin Eſtranger , 3
Vauldray ,
Matignon ,
Bourgogne ,
Gefvres ,
Villequier ,
Orleans ,
Villepreux
,
Dumaine ,
Frezin ,
Condé ,
2
2
2
3
3
3
2
3
2
8
5.
22 MERCURE
Bourbon , 3.
Arcobau , 3
Loctelly ,
2-
S
Carabiniers , ΙΟ
IO 10 *
Gardes d'Espagne 2
Gardes de Baviere 2
DRAGONS.
Royal ,
Flavacourt ,
-2
2*
4
62 cfe,
IV. PARTIE 28
RESERVE.
Brigadiers
Mrs Livry , Sebret :
INFANTERIE
Beüil
Mirabeau
,
Nivernois
,
2 bar
2
2
Perche ,
Cambrefis
2
Spaar ,
2
12
24 MERCURE
AUTRE CORPS. "
Lieutenans Generaux.
Mrs la Ficzeliere , Bouzols
, Davaray.
Maréchaux de Camp.
Mrs Cofta , Mimur .
Brigadiers.
Mrs Thourotte , Montjoyc
, Livry.
IV . PARTIE. 25
CAVALLERIE.
A
Thourotte , 2 efc
.
Pardeilhan ,
Raigecourt ,
6
Cofta , Bav. 3
Posh , Bav.
S
Prince Lambefc ,
Livry ,
Meltre de Camp GCnerale
,
3/
2
Juillet 1711.
3
8
42
efc.
4.
C.
26 MERCURE
Royal Artillerie ,
Bombardiers
,
2 bat.
3
Houffards de Rasky 3 efc.
camperont au Quartier
General.
Totaldes Escadrons , 252.
Total des Bataillons ', 161 .
On a fait depuis plufieurs
détachemens pour l'Allemagne.
IV. PARTIE 27
Ordre de Bataille de l'Armée
des Alliez en Flandres ,
commandée par le Duc de
Marlborough.
GENERAUX.
Le Duc de Marlborough ,
le Comte de Tilly , le Prince
hereditaire de Heffe, Dopsf,
Prince d'Orange , Bulleau ,
Lumelly.
Lieutenans Generaux.
Hompeſch , P. H. Hem-
4. Cij
28 MERCURE
bery , P. G. de Helle , Efbach
, Heyden , Murray ,
Palland , Holſtein - Beck ,
Rantzau , Withers , Norsh ,
Oiknay , Scoulembourg ,
Cadogan , Mans , Temple ,
Roffe , Word.
Autres Officiers Generaux.
Kellun, Bothmar , Peutz ,
S. Laurent , Prifoofe , Euvars
, Sibourg , Subin , Vegelin
, Ranch , Ivoy , Hamilton
, Exk , Pritzelvaitz ,
Wirtemberg >
Strakembourg
, Chanclos , SalxemIV
. PARTIE 29
keylbourg , Brelembach
Hagn , Duvel , Sillion , Ruffel
, Moriffon , Hamilton ,
Du Breül , Stutter , Ruhlereu
, Berchoffer , Douglas ,
Leinkesfeld , Vorſt , Loohaux
, Glinsha , Lalech ,
Sairs , Macfbag
.
ESCADRONS.
Royal Ecoffois ,
3
d. Royal Irlandois , 3
Lauly ,
Cadogan ,
Harwich ,
3
2
2
Palmes , 2
4. Ciij
30 MERGURE
Woord ,
Betmard ,
Elle ,
Wight ,
S. Laurent ,
Frechapelle ,
2
4
3
2
2
2
2 Grosk ,
Peutz ,
Sculembourg ,
2.
Leib ,
Hagn ,
2
2 R2
4d.
Bulow ,
BATAILLONS.
Gardes Britanniques , 2
Royal
I
Subin ,
IV PARTIE. 31
Newton ,
Hasford ,
I
I
Royal ,
Privrofc ,
Erram ,
Duvel
,
Selvin ,
Preftion ,
Suton ,
Ingolsby ,
Veebb ,
Sibourg ,
Prikaabh ,
Eecle
,
I
I
I
I
I
L
I
I
Noorth ,
Hamilton ,
Wym ,
4 Ciiij
32 MERCURE
Orrery ,
Gauvin ,
Greck.
Mileville ,
Dixprembouck ,
Belling ,
Du Breüil ,
Rantzau ,
I
I'
I
I
Orange
2
Fagel ,
1
May,
Wigers ,
Holfteinbeck ,
Prince Maximilien ,
I
I
I
IMarquel
,
I
Lircdal ,
I
Croonsprins ,
I
IV.
PARTIE . 33
Croonsfront , I
Chambrier ,
Wondebourg , I
Douglas ,
Colliot , I
Muray ,
Gardes
Hollandoifes , 3
ESCADRONS.
Vandernach,
Tilly .
6
2
Oyeu ,
Villingosf,
Grouveftin ,
Wirtemberg
,
Cralinge ,
Chanclos ,
I
2
23
34 MERCURE
Lalech ,
2
Erbach ,
2
Prince hereditaire ,
2
Gardes bleues , 2
Gardes du Corps ,
Carabiniers ,
I
4.
Smitterm ,
Gardes ,
4
S
Generaux de la feconde Ligne,
Albemarle , Fagel , Prince
d'Anhalt .
Lieutenans Generaux.
Oyeu, Vittentotf, Lalech ,
IV. PARTIE 35
Athlone , Dohna , Colliers ,
Lander,Frankenſtein,Natzmer.
Autres Officiers Generaux.
Dorfling, Hackemborn ,
Du Portail , De Veyne
Trosfel , Berg , Croon ,
Gauvin , Hafuvoudent
Vixoufe , Weftimiler , Koppel
, Grovenftein , Du Portail
, Comte Moornay ,
Shemefan, Bechleren, Wau--
ters , Vanderſbeck , Wichfurft
, Rador , Recdert
Cofcritz, Chambrier, May,
Smettingh , Cronftroon ,
Wallesf , Benthen , Hum-
+
36 MERCURE
nefben , Bechleren , Wittemhorf.
ESCADRONS.
Leib ,
Etlbreigt
,
4
d...
4
Souvelzi ,
4
Anfpach ,
4
Dorsflingue ,
4
Panevilz ,
Leib ,
Croonfprins ,
3
3
Be
3 '
Prince Philippe ,
Heyden ,
Portal ,
Cat ,
3
2
32
2
IV.
PARTIE 37
Bataillons.
Gardes ,
Albregl,
Leib ,
Croonfprins ,
2
B2
丸
3.
2
Lollern , 2
Erpprins ,
I
Alsdhna ,
Varenne ,
Jouy-Dhona ,
Heyden ,
Anhn & Zelbz ,
Denhol ,
Treler ,
Gromhonn ,
I
I
I
I
H
38 MERCURE
Cofcritz ,
Stamaiſter ,
Lerkoors ,
Baldeuvin ,
Delleur ,
Telkelemberg
,
Rantzau ,
Albermarle
,
Streeshen ,
Elft ,
Nigelin
,
I
I
I
I
I
I
I
S. Marais ,
Charcauſe ,
I
I
Innens , I
Pariot , 1
Maurice , 1
IV .
PARTIE 39
I
Bugwiftz ,
Metrail ,
Dobrobiky ,
Hauler ,
Bernard ,
Groy ,
Pallanne ,
Heyden ,
Ilangereberg ,
1
4
3
2
2
2
2
ESCADRONS.
Walleff,
Hoffemhomb ,
Saxemheylberg ,
Eck ,
Humnerben ,
2 2 2
40 MERCURE
Guichel ,
Sgrabemvoir ,
Voorst ,
2
Rechteren , 2
Briftzeelw , 2
Athlone , 2
Prince
d'Orange ,
Gardes du Corps ,
Dopff,
2
4
IV. PARTIE . 41
Ordre de Bataille de l'Armée
des Alliez en Flandre , commandée
par
le Prince Engene.
GENERAUX.
Le Prince Eugene ,
Le Duc de Wirtemberg ,
Le Comte de Velen .
Lieutenans Generaux.
Averoche , Gordorf ,
Schwertzel , Wilcke , Mercy.
Fuillet 1711. 4. D
42 MERCURE
Generaux Majors.
Cheufe , Weffenfelz
Milhan , boiffet , Prince de
Heffe Philipidal , Sachen ,
d'Albert , Sechembach
Bonneval , Statzfelt , Souchon
, Prince Lobkowitz ,
>
ESCADRONS.
Colonitz , Houffards , s
Felz ,
6 d
Palafi 6 d
Weſterla , 3
Mercy ,
6 .
IV . PARTIE. 43
3 R
Leyb ,
Velen ,
BATAILLONS.
3 d
Holſtein , 2
Baaden ,
2
Grenadiers , I
Taftring ,
I
Dalbert ,
Fechembag ,
Wanderbeck ,
Caftel ,
Erf Prince Wolffen
I
[
>
Beveren Wolffen
Gardes de Heffe I
Efterde ,
t
4 Dij
44 MERCURE
Erf Prince de Heffe , I
Schwerizel ,
Romeleny ,
I
Sugnen ,
Bonnard ,
I
I
Preternis ,
Boiffet ,
Vanſtoker ,
Gardes Danoifes ,
ESCADRONS.
Leib , Saxon .
I
Remechet ,
Leib ,
Weiffenfeltz ,
Erf. Prince Heffe ,
Cheux , Danois.
4 R.
4
2 B2.
4
2
IV . PARTIE 45
Kneyl ,
Leib ,
Wirtemberg ,
2
2 B2.
S
General de lafeconde Ligne.
Le Comte de Felz.
Lieutenans Generaux.
Lagnace , Caunflz , Vanderberk
, Schellart .
Generaux Majors.
Schemetteau , Heynflein ,
Sechendorf , La Roche
Sternfelz , Velen .
46 MRCURE
ESCADRONS.
Spleny , Houffards , s
S. Amour , 6 d.
Dandigneres ,
2 d.
Wirtemberg ,
4 d .
Falkeftein , 6 d.
Halzfelt , 3
Shellart ,
3
BATAILLONS.
Grenadiers Paffor ,
Sulzbach ,
Saxemmeynteing ,
Iffelbach
IV.
PARTIE. 47
Grenad .
Wirtemberg , 2
Harinans ,
Sternfeltz ,
Schwartz
,
Etrerfelz ,
Caves ,
2
t
I
Radinge ,
Deucheft ,
Prince George de Heffe , t
Koomugmac ,
Weiffenfelz ,
Wakerbart ,
Schendorf,
Gelz ,
Furftemberg ,
Charprins ,
Gardes Saxe ,
I
I
48 MERCURE
ESCADRONS .
Milkan , 4
Spiegel ,
Boinebourg ,
Averches ,
Brochedorf ,
Schemetteau ,
Wirtemberg ,
Grabo ,
Rantzau ,
2
2
4
4
2
2
2
Total des deux Armées ,
Bataillons
Escadrons,
148
256
Les Alliez ont auffi fait
des détachemens pour l'Allemagne.
IV. PARTIE :
49
Le 27. Juin une partie
de la Garnifon de Douay
fortit dans le deffein d'aller
rompre une digue qui
retenoit les eaux de la
Scarpe & de la Senſée , &
qui eftoit couverte par un
petit Chafteau & par une
Redoute prés d'Arleux.
Ces Troupes ne pouvant
rompre la Digue fans
s'eftre auparavant empa-y
rées de ces poftes , elles les
attaquerent ; mais quoy
qu'ils ne fuffent gardez
que par foixante & dix
hommes ils fe deffendi-
4 E
Juillet 1711 .
o MERCURE
s .
cent fi bien que leles Ennemis
furent obligez de fe
retirer avec perte , ainfi
qu'ils avoient déja fait plu
fieurs autres fois aupara
yant,fed Si to
we
O COMITIROL
Cependant ayant refolu
de s'en rendre maiſtres à
quelque prix que ce fuft
parce que cette Digue empefchoit
la navigation de
la Scarpe & du Canal de
la Deule , & qu'elle rete,
noit les eaux de maniere
que les Moulins de Doujay
ne pouvoient tourner , ils
firent marcher la nuit du
IV. PARTIE. ft
cinq au fix Juillet huit mil
le hommes tant Cavalerie
qu'Infanterie
, avec quatre
pieces de canon pour les
attaquer de nouveau. Les
foixante & dix hommes
qui les gardoient , ſe deffendirent
fi vigoureuſement
qu'ils tuerent beaucoup
de monde aux ennemis
; mais enfin la breche
ayant efté faite ils furent
emportez d'affaut & faits
prifonniers au nombre de
foixante
& fix , quatre
ayant efte tuez.ovJog911
Les Ennemis s'en eſtant
A E ij
32 MERCURE
rendus maiftres , reſolu
rent de les bien fortifier
afin de les mieux confera
ver. Pour couvrir leurs
Travailleurs its pofterent
douze Elcadrons & dix
Bataillons à une demi
licue de Douay , la droite
à Goulzin , & la gauche à
Sains-leNoble , ayant det
riere eux les inondations
& le ruitfeau du Moulinet.
Mr le Marechal de Villars
alla le 9. reconoiſtre
ce Camp , & trouva que
la droite eftoit fi peu appuyée
, que fi l'on pouvoit
cel
IV. PARTIE 53
cacher la marche de nos
Troupes , il feroit facile
de le forcer. La difficulté
eftoit de faire arriver les
Troupes fous Bouchain
partant des Portes d'Arras
& du Camp qui eftoir
entierement découvert
par les grandes Gasdes
Ennemis.
an La nuir du 9. au 10. ce
Maréchal fit marcher plufeurs
Pontons , avec ordre
de les cacher le jour fous
des arbres prés de l'Eſcaut,
& aprés avoir fait recon
noiſtre le terrain entre
E iij
54 MERCURE
Bouchain & les Ennemis
par Mole Baron de Raski
Colonel des Houffards , il
détacha trente Efcadrons
des Gardes du Corps ,des
Grenadiers à cheval de
Dragóns , de Cavalerie &
de Houffards , fous les or
dres. Mr le Comterde
Gaffion , avec Mrle Madquis
de Coignies ,le Prince
Charles de Lorraine , &
Mr le Marquis de Hautefort
, des Mouſquetaires ,
Marchaux de Camp ; Mr
le Duc de la Tremoille ,
Mr Gaydon , Mr le ComIV
. PARTIE 55
te de Saumery , Mr de St.
Serving & Mr de Belle
fond , Brigadiers , Mr le
Prince de Marfillac , Mr
le Duc de St. Agnan , Mr
de Prince de Lambefc, Mr
de Manicamp, Mr. de
Chabannes , Mr d'Arembergry
Mr de Rotten
bourg , Mr de Leémout ,
Mrdu Til , Mr le Marquis
de faint Chaumont , Mr
dess Granges , & Mr de
Beaufremont , Colonels.
M Mr le Marquis de Coignies
marcha le premier
fous Bouchain avec les
4 E iiij
56 MERCURE
Dragons , & il fe tint fur
ilfe
Jes BONGS
,
pour
empekcher
que des Villages voi
Cher
fins il ne puft aller per
fonne au Camp des Enne
mis , & que leurs partis ne
puffent découvrir nos
Trcupes quand elles y arriveroient.
Lorfqu'elles
fortirent du Camp les
Houffards & les Cavalierss
défilerent la plus grande
partie à pied , les autres
tenant leurs chevaux en
main comme s'ils eftoient
allez en paſture. , TIQVHOD
Pendant une partie de
IV. PARTIE. $ 7
journée on fit faire l'e
xercice aux Troupes du
Campfur les lieux les plus
élevez , & à dix heures on
ordonna à tous les poftes
de la Scarpe , de l'Eſcaut
& de la Sensée ,
d'arrefter
tous les payfans fous prétexte
de quelques Eſpions
qu'on avoit eu avis qui
avoient examiné le Camp.
Toutes ces
précautions
ayant efté priſes , Mr de
Gaflion arriva fous Bouchain
fans avoir efté deth dé
couvert , & marcha enfuite
avec Mr de Coignies
ys MERCURE
peur aller attaquer les En
nemis. Harriva à la poin-
Te du jour prés de leur
Camp où il fepara
Troupes en quatre corps ,
dont il forma quatre li
ra fes
gnes qui fe foutenoient
fune Fautre. La premiere
eftoir compofée de trois
cens Dragons , & d'un pareil
nombre de Houffards
commandez par Mr le Baron
de Raski leur Colonel
, qui avoit encore efte
la nuit , luy fixieme , reconnoiftre
s'il n'y avoit
point quelque ravinebu
IV. PARTIE. 39
chemin creux qui couvriſt
le front des Ennēmis ; la
feconde eftoit de Dragons
& de Cavalerie , & les deux
autres entierement de Ca
valerie , la quatriéme qui
fervoit de Reſerve eftoit
commandée par Mr de la
Tremoille .
On arriva en cet ordre,
fans eftre découvert ,
dans le Camp ennemi juf
qu'à la garde de l'Etendart
qui fue taillée en pieces ,
dés qu'elle cut crié : Qui
vive . En mefme temps les
Houffards & les Dragons
*。MERCURE
de la premiere ligne fe
depanderent donne-
4
rent l'alarme par tout le
Camp en tuant tout ce
qui fe rencontra fous leur
main à coups de fufil , de
piftolet , & de fabre . Quel .
ques pelotons d'Infante.
rie firent feu fur nos
Troupes , mais ils furent.
bientoft diffipez.on en tua
une partie , & le refte fe
fauva dans le chemin cou
vert de Douay. Le carna
ge fut beaucoup plus
grand dans la Cavalerie
ennemie qui n'eut pas le
IV. PARTIE. 61
temps de fe former en
corps un grand nombre
d'Officiers & de Cavaliers
ayant efté tuez dans leurs
Tentes . Il y a eu des Regi
ments dont il n'eft pas refté
cent hommes , & un
entr'autres dont il n'en
eft refté que cinq , ce que
l'on a appris par des Lettres
venues de Douay le
lendemain
de l'action .
Tout le Camp fut pillé , &
l'on mit le feu à ce que l'on
ne put emporter aprés que
Fon cut ramaffé prés de
treize cens chevaux qui
a
62 MERCURE
onteſté emmenez aau
Camppavec les prifonniers.
On a pris auſſi plufieurs
Etendarts & quel
ques paires de Timbales,
Nous avons perdu en cette
action Mr de Coëtmen
Colonel de Dragons
, Mr
le Baron de Rafki a efté
bleſſé ainſi que quelques
Officiers
de Dragons
. M
Aprés avoir refté plus
d'une heure fur le Champ
de Bataille , Mr de Gaffion
fit fa retraite fans eftre
pourſuivi , Il s'eft conduit
dans cette action avec
IV. PARTIE. 67
beaucoup de prudence &
d'habilleté , ainfi que Mr
de Coignies & tous les autres
Officiers Generaux &
Subalternes , & particulierement
Mr le Baron de
Rafki
oba su
Mr le Marechal de Vil
lars , pour favoriſer leur
retraite, avoit fait avancer
Mr d'Albergoti & Mr le
Prince d'Ifenghien au village
d'Aubigny avec deux
mille Grenadiers , & fit atsaquer
par Mr le Comte
de Brogho les gardes a
vancées de l'aile droite de
24 MERGURE
l'armée ennemie,afin d'at
tirer leur attention de ce
cofté la , les Houffards les
poufferent du cofté de
Lievin ils tuerent plu
fieurs Cavaliers , en prirent
auffi plufieurs , & ra
menerent foixante che
vaux. !
Nouvelles du Nord
de Pologne
,
•d'Allemagne.ta
Les Lettres de Craco
vie , de Varfovie , & nde
Drefden , venues de Jarof
Jaw
V. PARTIE. 65
law portent que le Czar
avoit fait marcher 25000.
hommes fous le comman
dement du Comte de
Wilback pour s'appro
cher du Danube , & empef
cher les Turcs de paffer ce
Fleuve, que pour cet effet
ce General avoit fait con
ſtruire deux Ponts fur le
Borifthene pour faire paf
fer l'Infanterie , que l'un
de ces Ponts devoit eftre
conftruit au deffous de
Rafov , & Fautre dans un
lieu plus prés de Bender ,
pour aller inveftir cette
Juillet 1711. 4 F
66 MERGURÉ
Place avant l'arrivée du
Grand Vifir.
LAIKOZA
D'autres Lettres portent
les Mofcovites aprés que
s'eftre affemblez à Braclaw
, s'eftoient avancez du
315
cofté de Jampol , mais que
file Roy de Suede eftoit
obligé d'agir avant la jon
ction du Grand Vifir , il
pourroit affemblerune ar
mée de quatre vingt mille
hommes de fes propres
Troupes , de celles du Pa
latin de Kiovic , de Turcs,
de Cofaques , & de Tarta
res qui faifoient de freIV.
PARTIE. 67
quentes courfes dans les
Palatinats de Kiovie , de
J
Servie , & de Czervikowie
, d'où ils remportoient
beaucoup de burin . Ces
mefmesLettres adjouftent
que lesHofpodars de Moldavie
& de Walaquie avoient
receu ordre d'affembler
& de faire conduire
du cofté de Bender ,
deux à trois cens mille
boeufs pour la fubfiftance
de l'armée du Grand Vifir
qui eftoit en marche.
On apprend par celles
de Dantzîk que le Gene-
W
4 Fij
68 MERCURE
ral Smigielski avec un
corps de deux mille hommes
faifoit des courfes
dans la grande & dans la
petite Pologne , ainſi
dans la Pruffe Polonoife ,
où il avoit enlevé plufieurs
convois aux Mofcovites
que
aprés avoir battu les ef
cortes ; qu'il n'exerçoit au
cune hoftilité contre les
Polonois du parti du Roy
Stanillas , ou qui paroif
foient neutres , mais ſeulement
contre ceux qui s'ef)
toient declarez pour le
Roy Auguſte , que ces Pa
IV. PARTIE
latinats de Cracovie , de
Sandomir & de Lublin ,
avoient refolu de ne point
confentir à faire la guerre
aux Turcs.
Celles de
Hambourg
dus de ce mois , portent
que les Troupes Danoifes
qui eftoient dans les Ifles
de Fuhnen & de Zeeland ,
& dans le pays de Judland,
marchoient
du coſtéo dul
Holftein où le Roy de
Dannemarcevouloit
af
fembler
une Armée de
vingt cinq mille hommes :
pour entrer dans la Pome10
MERCURE
ranie ou dans le Duché de
Bremen , fi l'Armée Suedoife
marchoit vers la Po
logne , Que dans les Conferences
tenuës entre le
Czar & le Roy Auguſte à
Jaroslaw , il avoit efté refolu
que
les
Armées
de
la
Couronne
& de
Lithuanie
fe
tiendront
fur
la
défenfive
, & n'exerceroient
aucune
hoftilité
contre
les
Turcs
qu'en
cas
qu'elles
en fuffent
attaquées
. H
IV
PARTIE
Extrait d'une Lettre de
Lauterbourg du 6.
Sorby Juillet.
Nous avons fait trois
grands fourages en quatre
jours de tempsfans quelesEm
nemis ayent paru , quoyque la
plaine de Camdel où nous avons
fourrage foit éloignée de
quatre lieues d'icy, & affez
prés de Landau Nous atten
dons le premier Détachement
de Flandres qui doit arriver
le 13. à VVeiffembourg, où
Mr le Marechal d'Harcours
7 MERCURE
va eftablir fon Quartier pour
quelques jours. Mr le Mare
chal de Bezons a le fien à
Feltz , Mr le Comte du
Bourg eft à Moutre , petit
village prés du Rhin ,
une lieue d'icy. Ily a appar
rence que nous nous mettrons
bientoft en mouvement ,
Les Lettres de Vienne
portent que l'Archiduc a
nommé les Comtes de
Liechtenſtein , & de Kinf
ki , Mr de de Conſpruck ,
pour eftre fes Ambaſſa
deurs Plenipotentiaires à
Francfort en qualité de
Roy
IV. PARTIE. 73
Roy de Boheme , mais que
le premier s'eftant excusé
d'accepter cet employ ,
I'Imperatrice Regente avoit
nommé en fa place le
Comte de Vindiſcgratz ,
& qu'on croyoit que cette
Commiffion feroit donnée
au Prince Lobkowitz,
parce que le Comte de
Vindifcgratz eftoit´indifposé.
ག ོ་ ཡ
Celles de Berlin marquent
que le Comte de
Donha qui a efté nommé
par l'Electeur de Brandebourg
pour aſſiſter auſſi à
Juillet 1711. 4 G
74 MERCURE
cette Election en qualité
d'Ambaffadeur Plenipotentiaire
fe difpofoit à
partir , qu'il feroit accom
pagné par M › Mardefelt
& Hennings ; qu'il auroit.
un équipage & une fuite
magnifique ; que M. Viereck
feroit Marefchal de
l'Ambaffade ; qu'il auroit
plufieurs Gentilshommes ,
un Secretaire , douze Pages
, vingt - huit Valets de
pied ; quatre Gardes Suiſfes
, & deux Trompettes.
IV. PARTIE.
budsup ng noia
Nouvelles d'Espagne
.
6 moloqlib : 4
moLettre de Corella
lotol du 28. Juin.
*
asi Depuis que la Reine eft
icy, elle a repris fon eftat or
dinaire & fe porte parfaitement
bien.
*
29 Monfieurde Vendofme doit
partir le 8 , du prochain de
Sarragoffe pour l'Armée de
Catalogne . La jonction des
Troupes de France avec celles
d'Eſpagne fefit le 19 .
mais le
manque de vivres & de mu-
4 G ij
76 MERCURE
nitions en affez grande quantité
a empefché jusqu'à prefent
les Troupes d'avancer
dans un Pays que
les Ennemis
ont entierement ruinépour
nous empefcher
d'y pouvoir
fubfifter ,fans avoir de tresgrands
Magafins.
Madame la Ducheffe de
Popoli eft morte.
Il est arrivé à Penifcola
vingt-cinq mille fanegas de
grains, up.
D'autres Lettres portent
que l'on continuoit
de travailler aux fortifica
tions de Cervera ; que les
a
IV.
PARTIE. 77
-"
Troupes augmentent tous
les jours en ces quartierslà
, que les Alliez eftoient
tousjours dans leurs mef
mes Quartiers ; qu'ils faifoient
approcher lesTrou
pes Allemandes pour eftre
toutes fous le même Commandant
qui devoit eftre
le General Vezel quieftoit
le feul de leurs Generaux
qui fuft encore forti de
Barcelone ; que le bruit
couroit qu'ils fe devoient
mettre inceffamment en
Campagne , & que leur
premier Camp fera prés
4 G iij
8 MERCURE
de Tarragones mais que
les provifions leur manquent
, & que leur Artille
rie n'eft pas prefte, Slove
Celles d'Eftremadure
portent que les Portugais,
aprés s'eftre tenus longtemps
dans un Camp avantageux
, avoient
envoyé
quelques
détache
mens du cofté de Zafra
pour lever les contribu
tions , & s'eftoient enfuite
retirez ; que M. le Marquis
de Bay pour les obliger à
fortir de leur Camp , avoit
fait bombarder
Elvas ;
IV PARTIE . 79
qu'il s'eftoit avancé enfuite
vers la ville de Borva
qui avoit efté pillée, & qui
avoit donné feize mille
Ecus pour empefcher
qu'on n'y mift le feu , &
qu'un de fes Partis avoit
deffait trois cens Grena
qu'ils
diers que les Portugais
avoient fait courir le bruit
attendoient des
Mortiers pour bombarder
Badajoz par repreſail ·
les , & que fi M. le Marquis
de Bay s'y oppofoit ,
ils luy donneroient bataille
, que ce General , en
4 G iiij
80 MERCURE
ayant efté informé s'étoit
approché d'eux que les
Ennemis le voyant en leur
prefence , s'eftoient avancez
en batailles mais
qu'ayant reconnu que M.
le Marquis de Bay fe dif
poloit à les
bien
re
ils avoient défilé fur leur.
gauche , & eftoient allez
camper plus loin entre la
Caya & la Catola vers la
Tour de Segovie ; quent
quelques jours aprés ils
publierent encore qu'ils
retourneroient pour atta
quer M.le Marquis de Bay 2
IV.PARTIE 87
qu'ils abattroient
, parce
qu'ils eftoient plus forts
que luy en Infanterie ; que
cependant il s'eftoit encore
avancé, & avoit campé
en leur prefence , fans
qu'ils euffent ofé venir à
luy
&
D'autres Lettres confirment
que M. de Monte-
Negro avoit repris Caravalajez
; qu'il eftoit enfuite
entré en Portugal
par la Province de Tra
los -Montes , où il avoit .
détaché Dom Nicolas de
San Severino avec un
82 MERCURE
Corps de Cavalerie , qui
avoit pris la villende Vi
miofo, fituée quatre lieuës
au- deffus de Miranda &
que M. de Monte - Negro
l'ayant fuivi avoit prissle
Chafteau ou il y avoit
deux Compagnies d'In
lay
fanterie , & où il avoit
trouvé beaucoup de mu
nitions de guerre & de
bouche.
Sliq
PRISE Sob
Six Vaiffeaux Hollan
dois venant de Curaffo ,
IV. PARTIE . 83
ont efté pris para trois
Vaiffeaux François , la Fi
delle & la Mutine armez
à Dunkerque, & leJúpiter
armé à Bayonne. Ces fix
Vaiffeaux ont efté amenez
à Paimbeuf ; ils eftoient
chargez de Cacao , d'Indigo
, de Tabac, de Sucre,
de Bois de teinture , de
plufieurs autres Marchandifes
, & de trente mille
piaftres, le tout eftimé plus
de douze cens mille livres .
Une Barque Françoife
a pris un Baftiment de
douze canons , fur lequel
84 MERCURE
"
Ro
les Ambaffadeurs du Royaume
de Naples qui alloient
à Barcelone étoient
119,549
embarquez. Ils portoient
trente- deux mille piftoles
à l'Archiduc.
M. l'Aigle a pris &
conduit à Alicante un
Vaiffeau Majorquin chargé
de cinq mille cent
Quintaux de Froment. Ce
Vaiffeau alloit à Barce
lone.
Tab
૧૯
sloup
IV. PARTIE.
HAUS
by
fen
Mon-
Service
pour
feu
Monfeigneur
le Dauphin
.
l'Eglife
Le 18. Juin on fit dans
ife de l'Abbaye Royale
de S. Denis le Service
folemnel pour le repos de
l'Ame de feu Monfeigneur
le Dauphin .
Toutes les Portes de la
Ville eftoient tendues de ..
noir fans Ecuffons ; celle
de l'entrée du Parvis eftoit
ornée de Cartouches & de
petits Ecuffons , entre lef
quels il y en avoit de
86 ว
MERCURE
grands aux Armessilde
Monfeigneur. Les trois
grandes Portes de l'Eglife
eftoient tendues , ainfi que
toute la largeur du Portail
juſques aux petites Tou
relles. La Nef eftoit couvertejufqu'à
dix ou douze
pieds de la voute , ainfi
que les bas coftez, & ornée
de plufieurs rangs de Car
touches & d'Ecuffons.
Au deffus de la Grille
ou des Jubez , pendoit dépuis
la voute un grand
Tapis noir qui garniſſoit
tout l'efpace d'entre les
IV. PARTIE . 87
piliers.Au deffous de ce
Tapis on avoit appliqué à
la grille un Jubé de menuilerie
qui avançoit d'environ
vingt pieds dans la
Nef, & dans lequel la Mu
fique fur placée . De chaque
cofté du Choeur au
deffus des hautes Chaiſes ,
regnoient jufqu'à l'Autel,
fix grandes pieces quarrées
de drap noir bordées
d'Hermine
& ornées
dans le haut & dans le bas
Id'une Bande de trois
rangs en Quinconge femée
de Larmes d'argent
,
>
88 MERCURE
de Dauphins, & de Fleursde-
Lys d'or. Entre cha
cun de ces grands quarrez
eftoient des bandes en forme
de pilaftres auffi femez
de Larmes , de Dauphins,
& de Fleurs de - lys. Dans.
le milieu de ces pilaftres
eftoient de grands Ecuffons
aux Armes & aux
Chiffres de Monfeigneur
alternativement
, ainfi que
fur les Corniches qui eftoient
furmontées d'un
grand Luminaire qui regnoit
tout autour du
Choeur, Vis - à - vis des
Ecuffons
IV. PARTIE. 89
Ecuffons qui eftoient au
deffous de la Corniche
d'enhaut , on avoit attaché
des Girandoles garnies
de
Cierges.
La Repreſentation
ef
toit élevée de huit degrez
fur un Champ
quarré de
deux pieds & demi de
haut , fous un Dais fouftenu
de quatre
Colomnes
.
Au deffus de ce Dais eftoit
une Couronne
fermée
de
dix Dauphins
heriffez
de
pointes
où l'on avoit mis
des Cierges
qui formoiént
un Groupe
de Luminaire
Fuillet 1711. 4 H
90 MERCURE
•
dont l'effet eftoit fort
beau. Du milieu de ce
Groupe fortoit un Cierge
qui eftoit beaucoup plus
élevé que les autres , & les
degrez de la Reprefental
tion eftoient tout couverts
de Chandeliers .
6 zina
Il n'y en avoir que fix
fur le Grand Autel , & fix
au deffus du Contre Ta
ble , à la hauteur duquel
partoit des deux coftez
des Courtines de velours
garnies de franges d'ar
gent & d'Ecuffons , & il y
avoit des Rideaux de fatin
IV. PARTIE. 91
qui eftoient attachez aux
Colonnes de l'Autel .
5. Au deffous du Contre-
Table eftoit une grande
Croix de Moire avec quatre
grands Ecuffons fur du
velours , furmontée d'un
Dais avec les Rideaux ar
reftez , qui cachoit entierement
l'eſpace depuis le
Contre Table jufques à la
hauteur du Luminaire
d'enhaut . Il y avoit à coté
de ce Dais deux efpeces de
Pilaftres femez de Larmes
d'argent , de Dauphins &
de Fleurs-de- lys d'or , &
Hij
92 MERCURE
accotez de deux Confoles
fur lefquelles il y avoit des
Cierges. 014950
On commença à allumer
le Luminaire à dix
heures & un quartersvolle
Monſeigneur
le Dauphin
eftant arrivé avec
Monfeigneur
le Duc de
Berry & S. A.R. Monfieur
le Duc d'Orleans, ces Prin
ces furent conduits dans
l'Appartement
qui leur
avoit efté préparé au bout
de la premiere partie de
l'ancien Cloiftre . L'Efca
lier eftoit tout tendu de
IV. PARTIE . 93
Drap noir , ainfi que le
paffage jufqu'à l'Appartement
où il y avoit un Dais.
Aprés que ces Princes y
eurent efté habillez , ils
allerent prendre leurs places
dans les trois Chaifes
hautes du Choeur les plus
proches de celle qui eft
deftinée pour l'Abbé , &
qui eſt tousjours vacante
lorfqu'il n'y en a point.
Le Requiem fut entonné
par les cinq Chantres , &
continué par la Mufique
du Roy , & enfuite Kyrie
eleifon ; & les Prélats en
94 MERCURE
entrant dans le Choeur
faluerent la Repreſenta
tion , des Princess,pola
Repreſentation de Louis
XIII. & l'Autel . Le Gele
brant eftoit M. l'Arche
vefque de Reims ; & les
Affiftans , M. l'Evefque de
Quebec ; M. l'Evefque
d'Auxerre ; M. l'Evefque
de Séez , & M. l'Evefque
d'Autun.
Dans le Sanctuaire à
droite , du cofté de l'Evangile,
eftoit un Amphitheatre
garni de Bancs
pour les Religieux de la
IV. PARTIE.
98
Maifon , qui avoient pfalmodié
Prime , Tierce , &
None dés fix heures & demie,
dans la Chapelle du
Chevet derriere le Grand
Autel, du cofté de l'Epif
tre il y avoit des Bancs
pour le Clergé , vis- à - vis
defquels eftoient cinq fauteuils
de velours , pour
l'Archevefque & pour les
quatre Evelques affiftans.
L'Epiftre fut chantée par
Dom Taveroles , Reli
gieux, Sous- Diacre, & l'Evangile
par Dom Quener,
Religieux , Diacre , deux
96 MERGURE
des Evefques affiftans ef
tant Diacre , & Sous - Diacre
d'honneur . Le Graduel
fut chanté par les
cinq Chantres Religieux ,
&la Profe par la Mufique.
L'Offertoire eftant finie ,
Monfeigneur le Dauphin
alla à l'Offrande précedé
du Maistre des Ceremonies,
qui fit les Reverences
à l'Autel du bas des degrez
du Sanctuaire , aux Princes
, aux Cours Superieures
, & au Clergé, & il alla
baifer l'Anneau du Cele-"
brant aprés avoir preſenté
le
IVA .
PARTIE. 97
le Cierge . Il y avoit dix
pieces d'or à celuy de
Monſeigneur le Dauphin ,
huit à celuy de Monſeigneur
le Duc de Berry ,
& fix à celuy de Monfieur
le Duc d'Orleans.
L'Oraiſon Funebre fut
prononcée par Mr. l'Evefque
d'Angers. Il prit pour
Texte les 13. & 17. Verlets
du 3. Chapitre des Prover
bes dont il ne fit qu'un ,
pour l'apliquer à Monfeigneur.
Beatus homo qui invenit
fapientiam & affluit
prudentia ; Via ejus , Via
Juillet 1711 .
4 I
98 MERCURE
recta , omnes femita ejus
pacifica. Heureuxl'homme
rempli de fageffe & de
prudence , les voyes fonc
toujours droites & ne tendent
qu'à da paixl ob 1091
HSQU
YON
zio On nexdonnera paint lés
Extraits des Qraifons Funebres
, parce qu'elles font imprimées,
& auffi parce qu'il y en
aura troppour entreprendre de
les donner toutes que de
donner feulement les plus belles
ce feroit marquer qu'on
eftime moins les autres, For
Monseigneur
le Dau
phin, Monfeigneur
le Duc
VALIO
THERE
DE
VILL
IV. PARTIE ON
de Berry , & Monfieur
Duc d'Orleans fortirent
de l'Eglife un peuilavant
quatre heures pour aller
fe deshabiller & ils fortirent
de leurs Apartements
al quatre heures trois
quares parla grande porte
de l'Eglife , fuivis da
Pricur , de plufieurs Religieux
de leurs Offi
ciers ; & ces Princes monterent
tous trois dans le
mefine Caroffe pour retourner
à Marly, il y a
voit plufieurs Compagnies
des Gardes rangées obli-
4 I ij
100 MERCURE
quement en haye depuis
la première porte du parvis
juſques dans la rue qui
conduit hors de Saint De
nis par le chemin de Pau
ris .
310
92 209
lly Il y eut de fi vives conteftations
entre les Cent
Suiffes
& les Gardesodu
Corps au fujer de la bar
riere
, qu'il fallut envoyer
un Exprés
à Marly
pour
fçavoir
à qui elle devoir
appartenir
. La queftion
fut decidée
en faveur
des
Gardes
du Corps
qui la
firent enlever
.
30
IV. PARTIE 101
Le 3. Juillet on fit auffi un
Service folemnel pour
le re
dans l'E
pos
de l'Ame
de fenfeigneur
le
Dauphin
, glife
de
Notre
Dame
. Mon.
fieur
de
Gardinal
de
Noailles y officia
pontificalement
; &
Le Pere
de
la Rue
Jeſuite
y pro
2002
Fordifon
Funebre
.
nonça
Monfeigneur
le
Dauphin accompagné
de
Monfeigneur le
Duc
de
Berry
& de
Mon- Mon
fieur
le Duc
d'Orleans
, eftoit
à la tefte
du
Deüil
ainfi
qu'à
celuy
de
S. Denis
; & le Cler
gé
, le Parlement
, la Chambre
des
Comptes
, la Cour
des
Aides
, l'Univerfité
& le Corps de
Ville
y affifterent
.
voient
efté
invitez
de
la part
du
Roy
par
Mr.
des
Granges
y as
1
4 Iij
102 MERCURE
Maiftre des Ceremonies, Monfieur
le Cardinal de Noailles
donna à difner aux trois Pring
ces après le Service.
On ne parlera point de
la Ceremonie de Notre.
Dame , niz de la Sainte
Chapelle ni particonfe
quent des autres quife font
faites par toute la France.
Ces Ceremonies n'ef
tant prefque que des repetitions
les unes des autres
. & de plus il faudroit
des Volumes entiers pour
bien marquer juſqu'où
les François ont porté
62153000
IV. PARTIE . 103
leurizele pour honorer
lal memoire du grand
Prince qu'ils ont perdu.b
GES
Funebres
910
190
L'origine des Ceremonies
eft auffi ancienne que celle
des Loix. Elles en font au
moins l'ornement fi elles n'en
font pas le foutien , Elles font
aufli variables que les temps,
& auffi variées que les moeurs
& les ufages des peuples , &
ce qui eft regardé comme un
honneur , dans un temps ou
dans un Pays , elt quelquefois
envifagé comme un opprobre
dans un autre.
I iiij
104 MERCURE
L'ancienne Chevaleriea
introduit beaucoup de Cere
monies extraordinaires , dans
les Pompes funebres . Lors
que les Rois ne nommoient
perfonne pour conduire la
Ceremonie , le foin en eftoit
donné en partie aux Herauts
d'Armes qui eftoient de Vice
Chevaliers inftruits de toutes
les Loix de la Chevalerie , &
qui par leurs belles actions
meritoient l'eftime du Publics
& à qui leur valeur avoit ac
quis une authorité qu'ils confervoient
avec l'âge.
Depuis le regne de Charles
VI, la qualité de Heraut s'eft
fort avilie. Les Rois ont tou
jours nommé à chaque Cere
monie quelque Seigneur de
IV.
PARTIE 105
diſtinction pour la regler furvant
l'ancien ufage.
21 Lors que Henry HI. paſſa
par l'Italie il prit du gouft
aux manieres de ces Peuples
qui aimoient beaucoup les
Ceremonies , il crea plufieurs
Charges. Et entrlautres en
l'année 1585. il fit un Maiftre
des Ceremonies ; & un Mair
fervir en fon abfence.
Les Titre de Grand Maiſtren'a
eſté donné an premier
que long temps depuis.
ftre
pour
Ilfembleroit par les Char
ges que toutes les Ceremonies
devroient eftre reglées , &
qu'il n'y auroit rien à innover.
Cependant elle font rarement
les mefmes & il arrive
fouvent quelque incident',"
106 MERCURE
chacun voulant s'elever &
empieter fur les droits des au
tres , polish 20 val floudly wo
Les Rois fe font trouvez
quelquefois fort embarraffez
pour decider avec juftice fur
ces affaires de point d'hon
neur ne fcachant préciſement
à qui il doit appartenir.
Aux Funerailles de Philippe
Augunte le Cardinal Le
gat & l'Archevêque de
Reims vouloient officier pontificalement.
La difpute fut
grande , & pour les accorder
on dreffa deux Autels fur lef
quels chacun celebra en mefme
temps & de mefme voix,
afin qu'un feul Choeur refpon
dift aux deux Officians .
Aux Obfeques de S. Louis ,
IV.
PARTIE . 107
$
le Roy Philippe III . fon fils
porta fur les épaules le Corps
ou plutoft les os de fon Pere
depuis Notre- Dame juſqu'à
S. Denis . Les Croix que l'on
trouve fur le chemin furent
élevées dans les endroits où il
fe repofa . On affure qu'il fe
fit
endroits
,
plufieurs
plufieurs Miracles en ces
meſmes
Malades y ayant reçu du
foulagement à leurs maux . La
foule du Peuple qui fuivoit le
Convoy eftoit grande . Tous
les Seigneurs les plus diftinguez
s'y trouverent ; tous les
Prelats qui eftoient alors à la
Cour , s'y trouverent en ha→
bits Pontificaux. Les Religieux
crurent que les Archevefques
& Evefques avec
108 MERCURE
leurs habits Pontificaux entreprenoient
fur leurs droits .
Ils fermerent les portes de
leur Eglife & ne voulurent
point fouffrir qu'on v
y entraſt
jufqu'à ce qu'il cuft efte refolu
que les Prelats quitteroient
leurs ornemens pour y entrer
fans pompe & Tans marque
d'authorité ni de Jurifdiction
fur eux.
444206-21670
Aux Convois où les Rois
fe trouvoient ils fuivoient
le Corps à Cheval dans les
Champs dans les Villes &
les Villages de leur paffage
ils merroient pied à terre. Cette
coutume s'eft abolie entierement
depuis Charles V.
Tous les Enterremens des
Princes ne fe font pas toujours
IV.
PARTIE. 109
2.
faits avec pompe en France,
Aux Fenerailles d'Ifabeau
de Baviere veuve du Roy
Charles VI . fon Corps fut
porté du Chateau des Tour.
nelles où elle mourut, juſqu'à
l'Eglife de S. Denis fans aucube
Pompe . Les Regiftres du
Parlement portent qu'il s'y
fit quelques Ceremonies ;
mais aucun Autheur contemporain
n'en parle Au contrai
re ils difent tous qu'on le mit
fans pompe dans un Batteau
avec un Preftre, deux Cierges,
& trois Officiers de fa Maifon
qui le conduifirent par
eau à S. Denis où les Reli
gieux qu'elle avoit comblez.
de bienfaits luy firent à leurs
frais un Service le plus hono110
MERCURE
rable qu'ils purent . Ils attri
buent la faute de ce manque
d'honneur qu'on luy devoit
aux Anglois
allfestoient
maique
ftres du Pays , & qui la ħaïffoient
ensnaroid
Aux Obfeques de Charles
VIII . vingt Gentils hommes
de fa Mailon porterent fon
Corps .
2101
A celles de Louis XII.
les hanouars ou porteurs de
fel pretendirent que cet honneur
leur appartenoit , les Rois
le leur ayant concedé dans
leurs Privileges. Les Gentils
hommes le leur cederent , &
depuis ce temps là ils fe font
confervez dans ce Droit.
Le 4. Juillet 1711. Jean
IV. PARTIE ar
29a mon 2002
AuberyMarquis de Vatan
preſta ſerment de fidélité
Movab yu no up maunoji b
entre mains de Sa Ma
jefté pour la Charge de
Lieutenant de Royau
Gouvernement d'Orlea
nois, és Pays Blaifois, Dunois
, Amboife & Vendomois
, fur la demiſſion
du fieur Comte de Sau
mery , qui prefta auffi le
ferment de fidelité entre
les mains de Sa Majesté
pour la Lieutenance Generale
du mefme departement
le 30. Juin dernier.
Ileft fils de Claude Au112
MERCURE
bery Marquis de Vatan
Baron de Moncy, & c . & de
Catherine le Coq de Cor
beville fille de Jean le Coq
Doyen du Parlement defcendu
du celebre Avocat
General qui vivoit
fous le Roy Jean , & que
la Cour nomme encore
aujourd'huy Joannes Gal-
Le Marquis de Varan
à époùfé en l'année 1689 .
Madelaine Louife dé Bailleul
, foeur , fille & petite
fille de Prefident à Mor
tier , de l'ancienne Nobleffe
IV. PARTIE 113
bleffe de Bailleul en Normandie
il a deux freres
au fervice du Roy , l'un
ancien , Chevalier de Mal
te , & Capitaine de Vail
feau , l'autre Capitaine
au Regiment des Dragons
de la Reine.
Claude Aubery pere
de celuy - cy avoit quatre
foeurs ; l'ainée mariée au
Marquis de Vieux Pont ,
la feconde au Comte de
Nonant , la troifiéme au
Comte de Vauvineux
deſquels Madame la Princeffe
de Guemené eft fil-
Fuillet 1711. 4 K
th
#4 MERCURE
le , la quatrieme au Mar
quis de Raray.
Entre plufieurs hommes
de confideration cette
Famille a donné un Jacques
Aubery , fameux par
fon éloquence , qui fut
Ambaffadeur de Henry
fecond en Angletere : il fit
un Traité de Paix entre
fon Maitreon
Edouard
VI . Monfieur le Chance
lier de l'Hopital a traduit
en Vers la ins , un fameux
Plaidoyer de ce Jacques
Aubery , dont
dont le petit
neveu Benjamin Aubery
1
IV. PARTIE. 115
fur Ambaſſadeur en Hollande
fous
Henry IV. Ils
font tous defcendus de
Pierre Aubery Confeiller
au Parlement fous le regne
de Philippe de Va-
Lois.
Il y a eu dans care fa
mille cinq Chevaliers
de
Malte , & elle eit alliée à
LaMaifon
de laTremouille
de Noirmoutier
parRenée
Julie Aubery
, qui époufa
Louis de la Tremouille
d'où font fortis Monfieur
le Duc de Noirmoutier
,
Monfieur
le Cardinal
de
Kij
116 MERCURE
la Tremouille , Madame
la Princeffe des Urfins &
Madame la Ducheffe de
Chatillon Montmorency;
elle eft auffi alliée par des
femmes des maifons de
Lillebonne , de Rohan, de
Montmorency Luxem
bourg , de Fiefque , & da
plufieurs autres Maifons
illuſtres. galapa yónDu̸MM
On peut faire une res
marque affez curieufeifur
le Marquifat de Vatan
que depuis douze cens
ans, cette Seigneurie n'ait
jamais efté vendue , ayant
IV, PARTIE fr
paffé par droit de fucceffion
foit en ligne droite j
foit en ligne collaterale ,
jufqu'ac Dame Claude de
de Prefteval de Panilleu
fe , reftée derniere heritiera
deda Maifon de Va
tan ; laquelle époufa cen
mile fix cent vingt neuf
Robert Aubery , Baron de
Moncy , qui prit alors la
nom de Vatan , & en fayeurduquel
cette Ferre
fut érigée en Marquifat.
2 Varaneftune petite Vib
les d'environ quatre cent
feux , diftante de dix licues
118 MERCURE
de Bourges & de quatre
d'Iffoudun , diftraite de
l'ancien reffort du Berry,
& foumise à celuy de
Blois 6 zda zinash shig
Ce qui prouve fonantiquité,
c'eftun ancien teme
ple des faux Dieux qui fers
depuis plufieurs fiecles de
magazin pour des Bleds.
LeMartyrologe de l'Ab
baye de S. Sulpice
Bourges fait mention que
S. Sulpice Archevefque
de Bourges en l'an cinq
cent quatre vingt ſept, du
temps de Gomiran oncle
IV. PARTIE.
du Roy Clotaire , eftoie
fils d'un Seigneur de Vaa
dans cette
tan , & il y a
Ville un tres- ancien Cha
pitre depuis plus de huid.
cent ans , fous le titre de
S. Laurian qui y fue mar
syrisé enl'an 145. par l'or
dre de Totila Roy des
den
Goths. S
On mettra dans le mois
procham les Morselet
Mariages de celuy cy , parce
que le temps me manque,
le temps me manque , parce
qu'on attend trop tard à m'ent
voyer les Memoires. Je prio
10 MERCURE
ceux qui me font l'honneur des
m'en envoyer de les écrire plus
correct ment , & je prie ceux
qui negligent de me les envoyer ·
de pardonner fi l'on fait des
fautes groffieres. Févite autant
que je puis ces inconvenients
.
en ne parlant point du tout ou
fort peu de certaines Familles
eftrangeres dont je n'ay. pås eu
le loifir de chercher les Memoires
exacts.
D'OR. 121.
ARTICLE XXII.
De l'ordre de la Marche des
Princes Electeurs , & par qui
font portées les Marques honoraires,
Our déclarer le rang que
les Princes Electeurs doi
vent tenir en marchant
avec
l'Empereur
ou avec le Roi
des Romains en public & en
cerémonie , &
ont
nous
avons ci - deffus fait mention ,
Nous ordonnons que toutes
les fois que pendant la tenuë
d'une Diete Imperiale , il
faudra que les Princes Elec
Juillet 1711.
A
$ 22 BULLE
porteurs
marchent proceffionnel
lement avec l'Empereur ou le
Roi des Romains , en quel
ques actions ou folemnitez
que ce foit , & qu'ils y portent
les Ornemens Imperiaux ou
Royaux ; le Duc de Saxe.
tant l'Epée Imperiale ou
Royale , marchera immédiatement
devant l'Empereur,
étant au milieu entre luy &
FElecteur de Treves ; ledit
Electeur de Saxe aura à fa
droite le Comte Palatin du
Rhin , qui portera le Globe
ou la Pomme Imperiale , & à
fa gauche le Marquis de
Brandebourg ,> portant le
Sceptre , tous trois marchant
de front le Roi de Boheme
fuivra immédiatement l'EmDOR.
823
pereur ou le Roi des Romains ,
fans que perfonne marche ertre
l'Empereur ou ledit Roi
& lui.
ARTICLE XXIII.
Des Benedictions des Archevefques
en la prefence de
l'Empereur.
S.1.
T
Outes les fois qu'on
celébrera en folemnité
la Meffe devant l'Empeteur
ou le Roy des Romains
& que les Archevefques de
Mayence , de Tréves & de
Cologne ; ou deux d'entre eux
s'y trouveront preſens , on
obfervera à la confeffion qui
fe dit à l'entrée de la Meffe
A ij
124
BULLE
au baifer de l'Evangile & de
la Paix qu'on prefente aprés
l'AgnusDei,& même aux Bénedictions
qui fe donnent à la fin
de la Meffe , & à celles qui
fe font à l'entrée de table &
aux graces quife rendent aprés
le repas , cet ordre que Nous
avons eftimé à propos d'y étatablir
, de leur avis & confentement
; qui eft que le premier
aura cet honneur le premier
jour le fecond , le fecond
jour ; & le troifiéme
troifiéme jour .
婴
le
§ . 2. Nous déclarons en cè
cas , que l'ordre de la primauté
ou pofteriorité entre
les Archevefques , doit eſtre
reglé fur l'ordre & le temps
de leur confecration. Et afin
DOR.
125
qu'ils fe préviennent les uns
les autres par des témoignages
d'honneur & de déference
& que leur exemple oblige
les autres à s'honorer mutuellement,
Nous defirons que celui
que cet ordre , touchant
les chofes fufdites , regardera
le premier , faffe à fes Collegues
une civilité & une honnêteté
charitable pour les inviter
à prendre cet honneur , &
qu'aprés cela il procéde aux
chofes fufdites , ou à quelqu'une
d'elles.
A iiij
126 BULLE
ARTICLE XXIV .
Les Loix fuivantes ont efte
publiées en la Diete de Metz
le jour de Noel' , l'an 1356.-
par Charles IV. Empereur des
Romains toujours Augufte,
Roy de Boheme , affifté de tous
les Princes Electeurs du Saint
Empire en prefence du Vene---
rable Pere en Dieu le Seigneur
Théodorique Evêque d'Albe ,
Cardinal de la fainte Eglife
Romaine , & de Charles Fils
aîné du Roy de France , Illuftre
Duc de Normandie , &
Dauphinde Viennois.
§. 1 . I quelqu'un eftoit
entré dans quelque Sen
D' OR. 127
complot criminel , ou auroit
fait ferment ou promeffe de
s'y engager avec les Princes
& Gentilshommes
ou avec
des Particuliers
& autres
Perfonnnes
quelconques
,
3
A
"
mêmes roturieres , pour attenter
à la vie des Reverends
& Illuftres Princes Electeurs
du faint Empire Romain ,
tant Ecclefiaftiques que Seculiers
, ou de quelqu'un d'eux ,
qu'il periffe par le glaive , &
que tous fes biens foient
confifquez comme criminel de
leze . Majefté car ils font
partie de noftre Corps : Et en
ces rencontres les Loix puniffent
la volonté avec la même
feverité que le crime mefine .
Et bien qu'il fût jufte que les
A iiij
2128 BULLE
•
>
fils d'un tel parricide mouruffent
d'une pareille mort
parce que l'on en peut appréhender
les mêmes exemples
; néanmoins par une bonté
particuliére , Nous leur donnons
la vie : Mais Nous vou-
Ions qu'ils foient fruftrez de
la fucceffion maternelle ou
ayeule , comme auffi de tout
les biens qu'ils pouroient efperer
par droit d'heredité &
de fucceffion , ou par teftament
de leurs autres parens &
amis ; afin qu'étant toûjours
pauvres & neceffiteux , l'infamie
de leur pere les accompagne
toûjours qu'ils ne puiffent
jamais parvenir à aucun
honneur & Dignité , même à
celles qui font conferées par
3 D'OR.
126
'Eglife & qu'ils foient reduits
à telle extremité , qu'ils
languiffent dans une neceffité
continuelle , & trouvent par
ce moyen leur foulagement
-dans la mort & leur fupplice
dans la vie . Nous voulons auffi
que ceux qui oferont intercéder
pour telles fortes de gens ,
foient notez d'une infamie
- perpetuelle .
§. 2. Pour ce qui eſt des
filles de ces criminels , en
quelque nombre qu'elles
puiffent eftre , Nous ordonnons
qu'elles prennent la falcidie
ou la quatrième partie
en la fucceffion de leur mere,
foit qu'elle ait fait teftament
ou non ; afin qu'elles ayent plûatôt
une médiocre nourriture
130
BULLE
de fille , qu'un entier avan
tage ou nom d'heritieres . Car
en effet la Sentence doit être
d'autant plus moderée à leur
égard , que nous fommes perfuadez
que la foibleffe de leur
fexe les empêchera de commettre
des crimes de cette
nature.
§. 3. Déclarons auffi les
émancipations que
telles gens
pourroient avoir faites de leur
fils ou de leurs filles , depuis
la publication de la prefente
Loi , nulles & de nul effet
pareillement Nous déclarons
nulles & de nulle valeur toutes
les conftitutions de dot , donations
& toutes les autres
aliénations qui auront été faires
par fraude , & même de
D'OR. 1'31'
droit , depuis le temps qu'ils
auront commencé à faire le
premier projet de ces confpirations
& complot . Si les
femmes ayant retiré leur dot
fe trouvent en cet état , que?
ce qu'elles auront reçû de
leurs maris à titre de donations
, elles le doivent referver
à leurs fils , lorfque l'ufufruit
n'aura plus lieu; qu'elle fçachent
que toutes ces chofes
qui felon la Loi devroient
retourner aux fils , feront appliquées
à noftre Fife , à la
referve de la falcidie ou qua- ·
triéme qui en fera priſe pour
les filles , & non pour les fils.-
§. 4. Ce que nous venons
de dire de ces criminels & de
leurs fils , doit auffi eftre en
.
132
23
BULLE
I
tendu de leurs fatelites , com
plices & miniftres , & de
leurs fils. Toutefois fr aucun
des complices , touché du
defir d'une veritable gloire
découvre la confpitation , en
fon commencement , il en recevra
de Nous récompenfe
& honneur: Mais pour celui
qui aura eu part à ces confpirations
& ne les aura revelées
que bien tard , avant
néanmoins qu'elles ayent été
découvertes , il fera eftimé
digne feulement d'abfolution
& du pardon de fon crime .
§. 5. Nous ordonnons auf
fi , que s'il eft revelé quelque
attentat commis contre lef
dits Princes Electeurs Ecclefiaftiques
ou Seculiers , l'on
D'OR. 133
puiffe même aprés la mort
du coupable pourfuivre de
nouveau la punition de ce
crime, i
§. 6. De même , l'on pour
ra pour ce crime de leze-Majefté
, à l'égard defdits Prin
ces Electeurs , donner la queftion
aux ferviteurs du Maître
qui aura été accufé .
§. 7. Ordonnons de plus
par ce prefent Edit Imperial ,
& voulons que même aprés
la mort du coupable l'on
puiffe commencer à informer
contre lui , afin que le
crime étant averé , fa memoire
puiffe eftre condamnée
& fes biens confifquez .
Car dés - là que quelqu'un a
formé le deffein d'un crime
134
BULLE
déteftable , il en eft en quelque
façon coupable & bourrelé
en fon ame.
§. 8. C'eft pourquoy , dés
que quelqu'un fe trouvera
coupable d'un tel attentat
Nous voulons qu'il ne puiffe
plus ni vendre , ni aliener , ni
donner la liberté à fes efclaves,
& même qu'on ne lui
puiffe plus payer ce qui lui
eft dû.
>
§. 9. Pareillement ordonnons
qu'à ce fujet on applique
à la queſtion les ferviteurs
du criminel ; c'est - à - dire
pour le crime du complot déteftable
fait contre les Princes
Electeurs Ecclefiaftiques
& Seculiers.
S. 10. Et fi quelqu'un de
D'OR.
135-
ces criminels meurt pendant
l'inftruction du Procez , Nous
voulons que fes biens , à caufe
qu'on eft encore incertain
qui en fera le Succeffeur ,
foient mis entre les mains de
la Justice.
ARTICLE XXV.
De la confervation des Princi
S
pautez
des
Electeurs en
leur entier.
' Il eft expedient que toutes
Principautez foient
confervées en leur entier , afin
que la Juftice s'affermiffe , &
que les bons & fideles Sujets
jouiffent d'un parfait repos &
136
BULLE
d'une paix profonde il eft
fans comparaifon encore
..
beaucoup plus jufte que les
grandes Principautez , Domaines
, Honneurs & Droits
des Princes Electeurs demeurent
auffi en leur entier
car là où le peril eft le plus à
craindre , c'eft là où il faut
ufer de plus grandes précautions
, de peur que les colomnes
venant à manquer
toute le bâtiment ne tombe
en ruïne .
§. 1. Nous voulons donc &
or donnons parcet Edit Imperial
perpetuel , qu'à l'avenir
& à perpetuité les grandes
& magnifiques Principau
tez , telles que font le Royaume
de Boheme , la Comté
འ
D'OR. 137
Palatine du Rhin , la Duché
de Saxe & le Marquifat de
Brandebourg , leurs Terres
Jurifdictions , Hommages &
Vaffelages , avec leurs appartenances
& dépendances , ne
puiffent eftre partagées , divifées
ou démembrées en
quelque façon que ce foit
mais qu'elles demeurent
perpetuité unies & confervées
en leur entier..
§. 2. Que le Fils aîné y
fuccéde , & que tout le Domaine
& tout le Droit appartienne
à luy feul ; fi ce n'eft
qu'il foit infenfé , ou qu'il ait
tel autre grand & notable
défaut qui l'empêche abfolument
de gouverner
; auquel
cas la fucceffion luy eftant
Fuillet 1 11 .
I B
138 BULLE
défenduë , Nous voulons que
le fecond Fils , s'il y en a un
en la même ligne , y foit appellé
; finon l'aîné des Freres
ou Parens paternels laïque
qui fe trouvera eftre le plus
proche en ligne directe &
mafculine lequel toutefois
fera tenu de donner des preuves
continuelles de fa bonté
& liberalité envers fes autres.
Freres & Soeurs , contribuant
à leur fubfiftance felon la
grace qu'il aura reçue de
Dieu , & felon la bonne volonté
& facultez de fon
patrimoine lui défendant
expreffément tout partage ,.
divifion & démembrement
des Principautez , & de leurs
appartenances & dépendan
DOR. 139
ces , en quelque façon que
Te puiffe être spomeni
- ARTICLE XXVI.
odfolati 33 expotong
De la Cour Imperiale & de fa
thensféances nonton agt
Isuda,L
E jour que l'Empereur
ou le Roi des
Romains voudra tenir folèm
nellement fa Cour les Prin
ces Electeurs tant Ecclefiaf
tiques que Seculiers , fe rendront
à une heure ou environ
, au logis de la demeure
Imperiale ou Royale , ou
l'Empereur ou le Roi , étant
revêtu de tous les Ornemens
Impériaux montera à cheval ,
of
Bij
n
140 BULLE
avec tous les Princes Electeurs
qui l'accompagneront
jufqu'au lieu préparé pour
· la Séance chacun en l'ordre
& en la maniere qui a éré cideffus
preferite , & inferée
dans l'Ordonnance qui regle
les marches des mêmes Princes
Electeurs. OpM
2. L'Archichancelier dans
Archichancellariat duquel
la Cour Imperiale fe tiendra ,
portera auffi au bout d'un Bâton
d'argent tous les Sceaux
Imperiaux ou Royaux. brok
§. 3. Mais les Princes Electeurs
Seculiers porteront le
Septre , la Pomme & l'Epée ,
en la maniere qui a été dite
ci- deffus , asfboman buat
DAS 4. Quelques autres PrinIDOR.
14
es infericurs qui feront députez
par l'Empereur & à
fon choix porteront immé
diatement devant l'Archevefiquesde
Treves marchant en
5 fon rang, premierement › la
› Couronne d'Aix-la-Chapelle :
& en fecond lieu , celle de
Milan : Ce qui ne fe pratinquera
feulement que devant
sl'Empereur , orné de la Cou❤
ronne Imperialepon sel
Sny L'Imperatrice auffi , ou
la Reine des Romains , étant
revêtue des Habits & Ornemens
de Ceremonie , marchera
aprés le Roi ou l'Em
pereur des Romains , & auffi
paprés le Roi de Boheme , qui
fuit immediatement l'Empereurs,
mais éloignée d'un ef
142 BULLE
pace compétanti, & accom
pagnéa.de fes principaux Of
ficiers & de fes Filles d'Hon
neurs & ce jufqués au lieu de
la Séance. wif shaOT
el. Jaar vachm But
not
ARTICLE XXVIIS
Des Fonctions des Princes Elec
-teurs dans les rencontres où
lesEmpereurs ou Rois des Ro₂-
y mains, tiennent ‹‹folemnel-~
lement leur Cour.hool.H
N
Qus ordonnons
ordonnons
que
toutes les fois que P'Em
pereur ou le Roi des Ro
mains voudra tenir folemnellement
fa Cour , & où les
Princes Electeurs feront obli
D'OR. 143
gez de faire les Fonctions de
leurs Charges , on obferve.cn
cela l'ordre fuivant, i
§. 1. Premierement , l'Empereur
ou le Roi des Romains
étant affis en fa Chaire Roya
le , ou fur le Trône Imperial ,
le Duc de Saxe fera fa Charge
en la maniere que nous
allons dire. On mettra de
vant le Logis de la Séance
Imperiale ou Royale , un tas
d'Avoine , de telle hauteur
qu'il aille jufqu'au poitrail
ou jufques à la felle du che
val fur lequel le Duc fera
*** monté ; & le Duc ayant en
fes mains un Bâton d'argent ,,
& une Mefure auffi d'argent ,
qui peferont enſemble douze
Marcs d'argent & étant à
$44 BULLE
cheval remplirala mefure
d'avoine & la donnera aur
premier Palfrenier qu'il rencontrera.
Aprés quoi , fichant
le Bâton dans l'avoine , il fe
retirera ; & fon Vice - Maré-`
chal , fçavoir de Pappenheim
, s'approchant , ou lur
abfent , le Marefchal de la
Cour , permettra le pillage de
l'avoine.
S.2 Dés que l'Empereur
ou le Roi des Romains fe fera
mis à table , les Princes Electeurs
Ecclefiaftiques , c'eft -àdire
les Archevêques , étant
debout devant la table avec
les autres Prelats , la beniront
fuivant l'ordre qui a été
ci - deffus par Nous prefcrit .
La Bénédiction étant faite ,
les
D'OR 145
les mêmes Archevêques , s'ils
Y font tous prefens , ou bien
deux , ou un d'entr'eux , prendront
les Sceaux Imperiaux
ou Roïaux des mains du Chancelier
de la Cour ; & l'Archevefque
dans l'Archichancellariat
duquel la Cour fe tiendra
, marchant au milieu des
deux autres Archevefques qui
feront à fes côtez , tenant avec
lui le Bâton d'argent où les
Sceaux feront fufpendus , tous
trois les port ont ainfi , &
les mettront avec refpect fur
la Table devant l'Empereur
ou le Roy. Mais l'Empereur
ou le Roi les leur rendra auffi
toft : Et celui dans l'Archichancellariat
daquel les Cerémonies
fe feront , comme il
Fuillet 1711 .
C
14.6 BULLE.
été dit , pendra à fon col·le
plus grand Sceau , & le por
tera ainfi durant tout le Dif
*ner & aprés , juſques à ce qu'il
foit retourné à cheval du Palais
à fon Logis. Or le Bâton
dont nous venons de parler ,
doit eftre d'argent , du poids
de douze marcs ; & les trois
Archevefques doivent payer
chacun le tiers , tant du poids
de l'argent que du prix de
la façon. Le Bafton & les
Sceaux deme eront au Chancellier
de la Cour , qui en fera
ce qu'il lui plaira ; & c'eſt
pourquoi auffi-toft que celui
des Archevefques auquel il
aura appartenu de porter le
plus grand Sceau au col , depuis
le Palais juſqu'à ſon LoD'OR.
147
gis ( comme il a été dit ) y
fera arrivé , il renvoyera par
quelqu'un de fes Domeftiques
audit Chancelier de la Cour
Imperiale , ledit Sceau fur le
même cheval ; & l'Archevefque
, felon la décence de fa
propre Dignité & l'amitié
qu'il portera audit Chancelier
de la Cour , fera tenu
de lui donner auſſi le cheval .
§. 3. Enfuite le Marquis
de Brandebourg viendra à
cheval , ayant en fes mains un
Baffin & une Aiguiere d'Argent
, du poids de douze
marcs , avec de l'eau & une
belle Serviette. En mettant
pied à terre , il donnera à laver
au Seigneur Empereur
Cij
148 BULLE
ou au Roi des Romains .
§. 4. Le Comte Palatin du
Rhin entrera de mefine
Cheval , portant quatre Plats
d'argent remplis de Viande ,
chaque Plat du poids de trois
marcs ; & ayant mis pied à
rerre , mettra les Plats fur la
Table devant l'Empereur ou
Roi des Romains.
§. 5. Aprés eux viendra
le Roi de Boheme Archi-
Echanfon , étant auffi à Che
val , & tenant à la main une
Coupe ou Gobelet d'argent ,
du poids de douze marcs ;
couvert & plein de Vin &
d'eau ; & ayant mis pied à
terre , prefentera à boire à
l'Empereur ou au Roi deș
Romains,
D'OR. 149
$ 6 . Nous ordonnons auffi
, que fuivant ce qui a été
pratiqué jufqu'ici , les Prin
ces Electeurs Seculiers ayant
fait leuts Charges , le Vice-
Chambellan de Falkenstein
ait le Cheval , le Baffin &
l'Aiguiére du Marquis de
Brandebourg : le Maistre de
Cuifine de Nortemberg , le
Cheval & les plats du Comite
Palatin du Rhin ; le Vice-
Echanfon de Limbourg , le
Cheval & le Gobelet du Roy
de Bohême ; & le Vice-
Marechal de Pappenheim ,
le Chevalle Bâton & la Mefure
du Duc de Saxe . Bien
entendu que c'eft en cas que
ces Officiers fe trouvent en
Perfonne à la Cour Imperia-
C iij
150
BULLE
le our Royale , & y faffent les
Fonctions de leurs Charges :
Autrement , & s'ils font tous
abfens ou quelques-uns d'eux ,
alors les Officiers ordinaires
de l'Empereur ou du Roydes
Romains ferviront
des Abfens , chacun en fa
Charge ; & comme ils en
feront les fonctions auffi
jouiront- ils des émolumens .
au lieu
,
292
252
25
D'OR.
IS T
ARTICLE XXVIII:
Des Tables Imperiales &
S.I.
Electorales .
LA
A Table Imperiald
ou Royale doit eſtre
difpofée en forte qu'elle foit
plus haute de fix pieds que
les autres Tables de la Salle ;
& aux jours des Affemblées
folemnelles perfonne ne s'y
mettra que l'Empereur ou le
Roy des Romains feul.
§. 2. Et même la Place &
la Table de l'Imperatrice ou
Reine fera dreffée à côté , &
plus baffe de trois pieds que
celle de l'Empereur ou Roy
Ciiij
152
BULLE
des Romains ; mais plus haute
celle des Electeurs auffi
de trois pieds. Pour les Taque
>
>
bles & places des Princes
Electeurs on les dreffera .
toutes d'une même hauteur .
§. 3. On dreffera fept Tables
pour les fept Electeurs
Ecclefiaftiques & Seculiers ,
au bas de la Table Imperiale s
fçavoir trois du côté droit
& trois autres du côté gauche
& la feptiéme vis-à-vis de
l'Empereur ou Roy des Romains
, dans le même ordre
que nous avons dit icy à l'Article
des Séances & du Rang
des Princes Electeurs ; en
forte que Perfonne , de quelque
qualité & condition qu'elle
foit , ne fe puiffe mettre
DOR. 153
entre deux ou à leurs Tables..
§. 4. Il ne fera permis à
aucun des fufdits Princes Electeurs
Seculiers qui aura fait
fa Charge , de s'aller mettre
à la Table qui luy aura efté
preparée , que tous les autres
Electeurs ſes Collegues
n'ayent fait auffi leurs Charges
mais que dés que quelqu'un
d'eux ou quelqu'uns auroit
fait la leur ils fe retireront
auprés de leur Table , & fe
tiendront là debout , juſqu'à
ce que tous les autres ayent
achevé les Fonctions fufdites
de leurs Charges ; & alors ils
s'affoiront tous en même
temps , chacunà fa Table.
§. 5. Dautant que nous
trouvons par les Relations
154
BULLE
tres-certaines & par des Tra
ditions fi anciennes qu'il n'y a
point de memoire de contrai
re , qu'il a été de tout temps
heureufement obfervé , que
l'élection du Roydes Romains
futur Empereur fe doit faire.
en la Ville de Francfort , & le
Couronnement à Aix-la-Cha
pelle , & que l'Elû Empereur
doit tenir fa premiere Cour
Royale à Nuremberg ; c'eft
pourquoy Nous voulons , par
plufieurs raifons , qu'il en foit
ufé de même à l'avenir ; fi ce
n'eſt qu'il y ait empêchement
legitime .
2
S. 6. Toutes les fois que
quelque Electeur Ecclefiaftique
ou Seculier qui aura efté
appellé à la Cour Imperiale ,
1
D'OR
ne pourra pour quelque raifon
legitime s'y trouver en Perfonne
, & qu'il y envoyera un Ambaffadeur
ou Deputé ; cet Ambaffadeur
de quelque condition
ou qualité qu'il foit
quoi qu'en vertu de fon pouvoir
il doive eftre admis en la
place de celuy qu'il reprefente
, ne fe mettra pas à la Table
que l'on aura deftinée pour celuy
qui l'aura envoyé .
Enfin toutes les Ceremo
nies de cette Cour Imperiale
eftant achevées , tout l'échaf
faut ou Bâtiment de bois qui
aura efté fait pour la Seance &
pour les Tables de l'Empereur
ou Roy des Romains , & des
Princes Electeurs affemblez
pour ces Ceremonies folem
156
BULLE
5.
nelles , ou pour donner l'Inveftiture
des Fiefs , appartiendra
au Maiftre d'Hôtel .
ARTICLE XXIX .
Des Droits des Officiers , lorf
que les Princes font Hom
mage de leurs Fiefs à l'Empereurou
au Roy des Romains.
5.1.
prefent Edit
Imper
O
Rdonnons par le
rial , que lorfque les Princes
Electeurs , tant Ecclefiaftiques
que Seculiers , recevront leurs
Fiefs ou Droits Souverains
des mains de l'Empereur ou
du Roy des Romains , ils ne
foient point obligez de payer
D'OR. 157
ou de donner aucune chofe à
qui que fe foit Car comme
l'argent que l'on paye fous ce
pretexte eft dû aux Officiers ,
& que les Princes Electeurs
ont la Superiorité fur tous les
Officiers de la Cour Imperia
le , ayant même en ces fortes
d'Offices leurs Subftituts étaablis
& gagez à cet effet par
les Empereurs , il feroit abfurde
que des Officiers fubftituez
demandaffent de l'argent
ou des prefens à leurs
Superieurs ; fi ce n'eft que
lefdits Princes Electeurs leur
veuillent donner quelque
chofe de leur propre volonté
& liberalité.
S. 2. Mais les autres Princes
de l'Empire , tant Eccle-
T
158 BULLE
fiaftiques que Séculiers , en
recevant leurs Fiefs , comme
nous venons de dire , de l'Empereur
ou du Roy des Romains,
donneront aux -Officiers
de la Cour Imperiale ou
Royale , chacunfoixante- trois
marcs & un quart d'argent ;
fice n'eft que quelqu'un d'eux
pût verifier fon exemption , &
faire voir que par privilege
Imperial ou Royal il foit dif
penſé de payer ladite fomme ,
& tous les autres droits que
l'on a accoutûmé de payer .
quand on prend l'Inveftiture
& ce fera le Maistre d'Hoftel
de l'Empereur ou du Roy des
Romains qui fera le partage
de ladite fomme de foixante.
trois marcs & un quart d'ar.
D'OR.
1.5.9
>
gent , en la maniere qui fuit.
Premierement
, il en prendra
dix marcs pour lui ; Il en
donnera autant au Chancelier
de l'Empereur ou du Roi
des Romains ; aux Secretaires
Nottaires & Dicteurs
trois marcs ; & à celui qui
fcelle , pour la cire & le parchemin
, un quart ; fans que le
Chancelier & les Secretaires
foient tenus de donner pour
cela autre chofe , finon un
Certificat du Fief reçû ou de
fimples Lettres d'Inveftiture .
Semblablement , le Maiftred'Hoftel
donnera de ladite
fomme dix marcs à l'Echanfon
de Limbourg ; dix aux
Vice - Marêchal de Pappenheim
, & dix au Vice-Cham,
160 BULLE
bellan de Falkenſtein ; pourvû
qu'ils fe trouvent en perfonne
à ces Inveftitures , &
qu'ils y faffent les Fonctions
de leurs Charges ; autrement
& en leur abfence , les Offi
ciers de la Cour de l'Empereur
ou du Roi des Romains
qui feront la Charge des Abfens
, & qui en auront eu la
peine , en recevront auffi le
profit & les émolumens
§. 3. Mais lorsque le Prince
monté fur un Cheval ou tou
te autre Bête , recevra l'Inveftiture
de fes Fiefs de l'Empereur
ou du Roi des Ro
mains , quelque foit cette Bé
te , elle appartiendra au grand
Maréchal , c'est-à -dire au Duć
de Saxe , s'il eft préſent ; fi
DOR. 161
non à fon Vice-Maréchal de
Pappenheim , & en fon abfenée
au Maréchal de la Cour de
PEmpereur.
ARTICLE XXX .
De l'Inftruction des Princes
Electeurs aux Langues.
§ . I.
D
Autant que la
Majefté du faint
Empire Romain doit prefcrire
les Loix , & commander
à plufieurs Peuples de diverfes
Nations , moeurs , façons
de faire & de differentes Langues
; il eft jufte , & les plus
fages le jugent ainsi , que les
Princes Electeurs qui font les
Juillet 1711 . D
162 BULLE
colomnes & les arcs-boutans
de l'Empire , foient inftruits
& ayent la connoiffance de
plufieurs Langues ; parce qu'étant
obligez de foulager l'Empereur
en fes plus importan
tes affaires ; il eft neceffaire
qu'ils entendent plufieurs perfonnes
, & que reciproque
ment ils fe puiffent faire entendre
à plufieurs.
§. 2. C'est pourquoy Nous
ordonnons que les Fils ou Heritiers
& Succeffeurs des Illuftres
Princes Electeurs ; fçavoir
du Roy de Bohême , du
Comte Palatin du Rhin , du
Duc de Saxe , & du Marquis
de Brandebourg , qui fçavent
apparemment la Langue Allemande
, parce qu'ils la doi
D'OR. 163
vent avoir appriſe dés leur enfance
; eftant parvenus à l'âge
de fept ans , fe faſſent inftruire
aux Langues Latines ,
Italienne & Efclavonne en
telle forte qu'ayant atteint la
quatorziéme année de leur âge,
ils y foient fçavans , felon
le talent que Dieu leur en aura
donné ce que Nous ne
jugeons pas feulement utile ,
mais auffi neceffaire , à caufe
que l'ufage de ces Langues
eft fort ordinaire dans l'Empire
pour le maniement de fes
plus importantes affaires.
:
§. 3. Nous laiffons toutefois
à l'option des Peres le particulier
de cette Inftruction ; en
forte qu'il dépendra d'eux
d'envoyer leur fils ou les Pa-
;
164
BULLE
rens qu'ils jugeront leur de
voir apparemment
fuccéder
en l'Electorat , aux lieux où
ils pourront apprendre commodement
ces Langues , ou
de leur donner dans leurs
Maifon des Precepteurs & de
jeunes Camarades , par l'inf
truction & la converfation
defquels ils puiffent s'inftruire
dans ces Langues.
BIBLIO
LYON
#
1093
VILLE
TABLE.
I. PARTIE
Litterature.
Proteftations des Electeurs de
Baviere & de Cologne.
Hiftoire Espagnole .
II. PARTIE.
43
Article des Anonimes. 78
Suite de la Paralelle d'Homere ,
& de Rabelais.
87
Egnimes. 145
Thefes , Confeils , Reponfes ,
III. PARTIE .
Pieces Fugitives.
TABLE *
IV. PART- I E.
Services pourfeu Monfeigneur le
Dauphin
Preftation de Serment.
Avis.
Bulle d'Or.
85
110
119
121
Qualité de la reconnaissance optique de caractères