→ Vous voyez ici les données brutes du contenu. Basculez vers l'affichage optimisé.
Nom du fichier
1703, 11 (supplément, Journal du siège de Brissac)
Taille
7.80 Mo
Format
Nombre de pages
375
Source
Année de téléchargement
Texte
Libris Cavoli Alexandris DeRougeter
&
Eur.
9931
ка

Bayerische
Startseithiothek
JOURNAL
DU SIEGE
DE BRISAC ,.
REDUIT SOUS L'OBEISSANCE
DU ROY ,
PAR MONSEIGNEUR
LEDUC DE BOURGOGNE
DEDIE'
A SA MAJESTE' BRITANNIQUE .
୧୫: ୨୭
A PARIS ,
Chez MICHEL BRUNET , grand' Salle
du Palais , au Mercure Galant.
M. DC . III.
AVEC PRIVILEGE DU ROT
Ravenscho
Staatshi
JAMAUCI
DA ZIEGE
A
AU
ROY
DE LA
GRANDE
BRETAGNE.
1
SIIRE ,
VOTRE
MAJESTE
n'eftant
occupée qu'à exaa
ij
EPITRE.
miner ce qui fe paffe fur le
Theatre du monde , tant à
l'égard de la Guerre que de
tout ce qui peut convenir au
grand Art deregner , afin de
le mettre unjour enpratique;
je prens la liberté de luy prefenter
un Livre qui renfer
me tout ce qu'ungrand Prince
a fait pour réduire en
treize jours de tranchée ouverte
, une des plus fortes
Places de l'Europe pour ne
pas dire la plus forte . Vous
verrez , SIRE , que fa.
EPITRE .
pieté n'a pas moins contribué
à cette conquefte
, que
toutes les qualitez neceffaires
aux Conquérans , qu'il
poffede au degré fuprême.
Le jour que la Place fut
inveftie , ce Prince implora
le fecours du Ciel par les
actes les plus faints que la
Religion nous propofe , &
comme il a continué à le
faire , pendant qu'il a commandé
l'Armée du Roy en
Allemagne , on ne doit point
eftre furpris qu'il ait fait
a iij
EPITRE.
une Campagne fi glorieufe.
Son attentionpour toutes
les chofes qui ont rapport
aux Autels , est toujours fi
forte, qu'ayant appris qu'u
ne Bombe en avoit détruit
un dans une des Eglifes de
Brifac , il donna auffi- toft
fes ordres pour le faire ré
tablir.
VÔTRE MAJESTE ' remar
quera , SIRE , quependant
tout le cours du Siege de
cette Place , ce Prince s'eft
appliqué à tout ce qui pouEPITRE.
·woit en afſurer le succés ,
•avec desfoins dont on trouve
peu d'exemples qu'il a
prévu à tour avec une prudence&
uneprefence d'esprit
infiniment au deffus , nonfeulement
de ce qu'on devoit
attendre d'un Prince de fon
age , mais de ce qu'on au
roit pu efferer des Generaux
les plus confommez ; qu'il
s'est fait un plaifir continuel
de la fatigue la plus
dure ; qu'il s'eft exposé de
fangfroid à des perilsfiévi-
Y
a
1111
EPITRE .
les
dens , que ceux qui avoient
L'honneur de
l'accompagner
eftoient faifis de frayeur ;
lorfqu'ils envifageoient
dangers qu'il affrontoit à
toute heure ; ce qui caufoit
beaucoup d'inquiétude
à toutes les Troupes , qui
auroient pris la liberté de
l'en empêcher,fielles avoient
ofé le faire. Il en eftoit les
delices , & les plus grands
perils ne pouvoient les rebuter
lorsqu'il s'agiffoit de
Luy obeïr.
EPITRE.
VOTRE MAJESTE
verra avec plaisir que parmy
ce grand nombre d'ac
tions toutes dignes d'une
éternelle memoire , qui ont
fait briller les merveilleuses
qualite de ce jeune Prince
pendant tout le Siege
la
Liberalité , cette vertu
veritablement Royale a tenu
un des premiers rangs.
Il n'a pas efté une feule fois
à la Tranchée ,fans y faire
diftribuer des fommes confi
derables. Famais il n'a fou
EPITRE.
qu'un Soldat ou un Officier
fefuft diftingué par quelque
action d'éclat , fans le récompenfer
dans le même
temps ; & lors qu'ilfat preft
de quitter l'Armée , il fit
des largeffes à tous les Officiers
bleffez , en les affurant
qu'il reprefenteroit leurs fervices
au Roy , afin qu'ils
reçuffent de Sa Majesté de
plus grandes recompenfes.
Enfin ce Prince a fait voir
devant Brifac une vive
image de tout ce que Louis
EPITRE.
LE GRAND , & l'Au
gufte DAUPHIN qui a fi
bien marché fur fes traces
ont fait admirer à toute
l'Europe
.
1
Le Sang dont tous ces
Heros font animez , coule
SIRE , dans vos veines .
Ils defcendent d'un Fils de
Henry le Grand , Roy de
France , & VÔTRE MA
JESTE' defcend d'une Fille
de ce même Monarque.
La pieté de la Reine vo
Mere , a peu d'exemples &
EPITRE.
le Sang de Stuard dont
vous fortez , s'eft rendu recommandable
, par tout ce
qui peut donner du reliefà
la grandeur des Rois , s'il
m'eft permis deparler ainfi.
Il a produit de grands Capitaines
, de grands Politiques,
& de grands Serviteurs
de Dion , & a fait
connoiftre que la plus haute
Bravoure n'eft pas incompatible
avec la plus veritable
Devotion. Enfin cefang
Augufte qui s'eft attiré l'at
EPITREJ
tention de tout l'Univers
'dans les dernieres années
du fiecle paffe , & qui ſe
L'attire encore aujourd'huy
s'eft mis au deffus de tous
les Trônes du monde par
le bon ufage qu'il a fait de
fes malheurs , & en méprifant
des Couronnes periffa
bles , il en a acquis d'éternelles.
Il eft àpréfumer , SIRE,
que le Grand Roy dont je
parle en poffede une de cette
nature dans le Ciel. Dien
E PITRE.
La trouvéfelon fon coeur ,
& fa divine Providence l'a
Laiffe fouffrir beaucoup dans
ce monde afin qu'il fuſt éle
vé dans l'autre. Il paroift ,
SIRE , que le Ciel a refervé
VOTRE MAJESTE
pour degrandes chofes. Les
coeurs des Rois font dans la
main de Dieu , & fes fecrets
font impenetrables. Il
a permis qu'à voftre naiffance
toute l'Angleterre
donnaft des témoignages de
joye fi publics & fi empres
EPITRE.
Jez , que de memoire d'hom
me on men a point vû de
femblables dans aucun Etat
du monde , & qui paruffent
plus finceres. On ne vit jamais
tant de Feftes , & jamais
tant de Feux de joye
n'avoient éclaté dans Londres.
Ainfi il y a fujet de
croire que le Ciel protégeant
VOTRE MAJESTE' a
voulu que vous appriffiez à
de
com
Souffrir avant que
mander ; parce qu'il faut
eftre bien parfait pour ne
EPITRE .
prendre pas un peu d'orgenit
quand le bonheur eft conti
nuel.
?

Dans le temps que le
plus ambitieux
de tous les
hommes paſſa en Angleterre
Dieu qui cherchoit à
faire fouffrir le Roy voftre
Pere, afin de le rendre digne
du rang qu'il tient aujourd'huy
entre les Bienbeureux
, voulut
que
fes
peuples fiffent voir plus de
zele & d'amour pour luy
qu'ils n'avoient fait juf
EPITRE.
ques - là , & jamais on
ne vit un fi grand nombre
d'Adreffes qui marquoient
ce zele & cet amour. Je
ne dis rien que de veritable
, puifque ces Adreffes
font imprimées en Angleterre
& dans plufieurs autres
Cours.
Le Prince qui vouloit
envahir l'Angleterre fe déclara
, & fon entrepriſe eut
tout le fuccés qu'il en attendoit.
On ne doit point en
eftre étonné ; elle pouvoit
C
EPITRE.
réuffer fans que le Peuple
d'Angleterre y euft aucune
part , fi l'on en excepte les
gens inquiets qui courent.
toujours à la nouveauté ;
les avares fur qui l'argent
a tout pouvoir, & les ambitieux
qui fe laiffent gagner
par les promeffes qu'on
leur fait de les élever aux
premieres dignitez . Lors
qu'appuyé de tant de perfonnes
corrompues & fecon
dé d'une armée étrangere
un Ufurpateur commence
"
EPITRE
paroiftre, le Peuple , qui fe
voit environné de Traiftres
& de Troupes d'une autre
Nation , fe trouve bien-toft
dans la cruelle neceffité de
fubir les loix du plus fort.
Il obeit fans que fon coeur
y confente , & s'accoûtume
infenfiblement au joug qu'il
ne peut plus fecouer , parce
que l'Ufurpateur s'eft trop
affermi.
Voila , SIRE , ce qui
seft paffé en Angleterre
peu de temps aprés que le
cij
EPITRE.
Ciel vous a donné à ce
Peuple pour faire un jour
fes delices , &fon bonheur.
Si toute la Nation qui ne
peut eftre heureuse avant
qu'elle foit gouvernée par
fon legitime Souverain,fait
reflexion fur tout ce que je
viens de marquer ; elle verrà
que c'est la verité pure. On
ne peut impoferfur desfaits
imprimez prefque dans tous
les Etats de l'Europe. I
eft aifé de voir par toutes
ces chofes qui font inconEPITRE.
teftables , que tout ce què
s'eft fait en Angleterre contre
le Roy voftre Pere &
contre V. M. n'eft que l'oude
la crainte , de l'ambition
, & de l'avarice , &
vrage
que des interefts particuliers
l'ont plongée dans les maux
qu'elle a foufferts , &qu'elle
Jouffre encore à préfent ;
qu'elle aimoit le Roy voftre
Pere , & qu'elle aime V.
M. Elle le fait voir tous,
lesjours, &fila Nation entiere
n'ofe s'expliquer encore
EPITRE.
,
la voix des particuliers ne
laiffe pas de fe faire entendre.
Mais qui fait fi ce.
n'est point pour vous mieux
fervir que la Fortune em →
pêche que vos voeux nefoient
accomplis, & fielle n'a point
paru fe déclarer contre vous
afin de vous donner lieu de
tirer
d'éclatans
avantages
de la fituation où elle vous
amis , & defaire connoiftre
à l'Univers que vous eftes
par vous - même digne du
Trône qui eft dis a voftre
EPITR E.
naiſſance ? Si la fortune ne
vous avoit pointfait effuyer
fes caprices , vos Sujets qui
n'auroient regardé que ce
que vous eftes né ,feferoient
d'abord foumis à vos loix
en rendant à V. M. la
même obeiſſance que l'on
rend aux Rois qui ne font
diftinguez, quepar leurfang,
&qui même font fouvent
konte à la dignité Roya
le. C'est ce que V. M. na
point à craindre. Elle ne
devra qu'à fes grandes
EPITRE.
qualitez , les Couronnes que
fa naiffance luy auroit affurées
,fi la fortune ne l'avoit
point abaiffée en apparence ,
afin qu'elle ne les duft qu'à
elle-même. Ce qui ſe paſſe
prefentement à voftre avantage
dans le coeur de la pluf
part des Anglois m'en eft
un garant certain. Quoy
que vous ne les gouverniez
pas encore ils ne s'entretiennent
de VÔTRE MAJESTE
, SIRE , qu'en
yous donnant mille éloges .
"
و
Ils
EPITRE.
Ils aiment qu'on leur en
parle , &font ravis qu'un
Prince dont ils entendent
publier de tous coftez de fi
grandes chofes , doive le
jour à l'Angleterre , & qu'il
faffe honneur à la Nation.
Ils vous regardent comme
un Prince qui ne portera
point la guerre chez eux ,
& qui ne doit rentrer dans
fes Etats qu'avec l'Olive à
la main. Ils fçavent qu'il
ne vous eftjamais rien échapé
contre la Nation , &
i
EPITRE
A ..
que V. M. méprife ceux
de fes Sujets qui n'ayant
en vue que leurs interefts
particuliers , facrifient tout
à ceux qui regnent , fansfe
mettre enpeine s'ils regnent
justement ou non. Ces Sujets
intereffe,z entretiennent
le defordre , & facrifient le
repos public aux avantages
qu'ils tirent du trouble &
de la confufion , & c'est ce
qui fait gemir les bons Anglois
qui n'attendent que le
moment où V. M.fera mife
EPITRE.
fur le Trone. Il n'eft point
de jour où ce moment ne
puifle arriver , puifque les
Princes qui ne doivent fe
mettre en poſſeſſion de leurs
Etats qu'armez de leurs
vertus , de leur clemence ,
& de leur bonté, peuvent
à toute heure toucher à l'ine
Stant qui doit rendre leurs
Peuples heureux , en leur
•affurant un repos que rien
ne peut plus troubler. Un
Prince qui ne veut que
coeurs de fes Sujets , qui
les
i ij
EPITRE.
en faveur des bons dont il
connoift l'interieur , vent
bien ne fe pas fouvenir des
crimes des autres ; qui fçait
que l'Angleterre eft remplie
de Sujets auffi fidelles
que ceux dont fa Cour
eft compofée , & qu'il y
a des Chevaliers Baber
dans tous fes Royaumes ,
j'entens des zelez, &fidelles
Sujets , ne doit point doules
defirs ardens
ter
que
mais fecrets , qu'ils ont de
luy remettre en main le
EPITRE.
Timon des affaires , n'ayent
bien-toft leur effet. La Renommée
a déja commencé
l'ouvrage , en faisant le
Portrait de V. M. dans
toutes les Villes d' Angleterre.
Elles fçavent que vous
ne voulez rentrer dans vos
Royaumes que portéfur les
alles de l'Amour. Vos Peu
ples , SIRE ,fe trouveront
au comble de leur joye dans
cet heureux jour , & cette
joye ne fera pas moins grande
que celle qu'ilsfirent pai
iij
EPITRE.
roiftre , lorfque le Ciel vous
accorda à leurs voeux. Quel
bonheur fera celuy dont ils
jouiront! Ils fe verront affranchis
d'une guerre infructueuse
, & déchargez
des fubfides qu'ilsfont contraints
de payerpour lafou
tenir. Un Etat ne peutgouter
de repos que fous un legitime
Souverain
. Les inquiétudes
de ceux qui occupent
les Trones qui ne leur
appartiennent
pas, demandent
qu'ils ayent toûjours
EPITRE.
&
des forcesfur pied comman
dées par leurs creatures ,
ces forces font moins pour
les befoins & pour la gloire
de l'Etat ,
3 que pour leur
propre deffenfe . Ainfi , les
Ufurpateurs endettent &
ruinent les Etats pour fe
maintenir
, & font répandre
le fang des Peuples fans
en tirer aucun avantage
pour la Nation. Quel bon
beur
encore une fois
SIRE , pour l'Angleterre,
lorfque V. M. fera rentrer
i iiij
EPITRE.
la Paix avec elle dans fes
Etats , & qu'elle aura de
plaifir de ne plus porter le
pefant fardeau quefontfentir
les remords , & de n'avoir
plus à fe reprocher
fecrettement fes injuftices.
Le foulagement qu'on ref
fent en cette occafion , cauſe
un calme une tranquillité
d'efprit quifontgoûter toutes
les douceurs du plaifir dont
jouit une belle ame qui s'applaudit
du bien qu'elle fait.
Cefera alors que l' Angleter
EPITRE.
gnages
refe reffouvenant
des témoi
éclatans qu'elle donna
de fa vive joye au temps
de voftre naiſſance , connoiftra
qu'elle avoit veritablement
fujet defe réjouir,
puifque V. M. devoit un
jour la délivrer de toutes les
fang-fues qui la rongent
pourfournir auxfrais d'une
guerre quifait fa honte , &
qui ne luy peut eftre que
tres - onereufe , & la tirer
des chagrins devorans
que
cauſent toûjours les revoltes.
EPITRE .
Quoique V. M. ne compte
encore que peu d'années ,
les Rois ne fontjamaisjeunes
, & leur efprit eft tow
jours plus avancé que leur
âge , fur tout , quand ils
ont efté inftruits par leurs
malheurs , & qu'outre les
grands exemples qui leur ont
efté donnez par un Monarque
que l'on peut furnommer
Jufte , puifque le
Peuple , dont on dit que
voix eft la voix de Dieu,
le tient pour un Saint
la
E PITRE.
& par une Mere que fon
Epoux a fantifié , ils ont
eu une éducation pareille.
à celle de VOTRE MA
JESTE'.
·
Les reparties brillantes
& vives qu'on vous entend
faire tous les jours
Surprennent tous ceux qui
ont l'honneur
de vous approcher
; mais ce n'eft pas few
lement voftre efprit , SIRE,
qui eft beaucoup an deffus,
de vos années , vos forces
le font de même. Le Roy a
EPITRE.
confirmé ces deux veritez
en vous voyant Chaffer à
Fontainebleau
avec autant
de vigueur que d'adreſſe.
Je fçavois , dit ce grand
Monarque , que le Roy
d'Angleterre avoit de l'efprit
; mais je ne le croyois
pas fi fait. Si les Anglois
le voyoient chaffer , ils luy
trouveroient l'air , la vigueur
, & toutes les manieres
du Roy , fon Pere.
Ces veritezfontfortes , &
quand le fang fe fait reEPITRE.
marquer comme il fait en
VOTRE MAJEȘTE ' , il
eft impoffible de ne le pas
reconnoiftre. Quels fujets
d'éloges , SIRE , n'a-t-elle
pas donné à Fontaine-bleau
pendant le fejour qu'elle y
a fait ? Vous y avez paru
comme un Prince parfaitementinftruit
de tout ce qu'un
Souverain doit fçavoir.
Toutes les chofes qu'on vous
a entendu dire , ont marqué
autant de bontéque d'efprit,
& vous avezfait paroi
EPITRE.
"
tre beaucoup
d'affabilité ;
Sans ceffer de conferver ce
qui est dû à la majesté du
Trone,
5. -Geux de vos Sujets dont
le coeur vous est toujours
demeuré fidelle , & ceux
qui nepeuvent plus fupporter
le poids desfubfides , dont
la Nation ne tire aucun
fruit , attendent avec une
extrême impatience que
vous foyez, rapellé en Angleterre.
Il ne fe peut que
-ce bonheur n'arrive bienEPITRE
toft , puifqu'elle ne fe dé
place jamais que pour un
temps. Vous y porterez
des fruits tres- avantageux
à vos à vos Sujets
I
que
vous avez recueillis en
France , en voyant de prés
un Monarque dont la vie
n'est qu'un tissu de vertus ,
que tous les Peuples de la
terre devroient fouhaiter à
leurs Souverains ; un Prince
qui pendant le cours d'un
long regne a toujours donné
des marques de dowEPITRE.
ceur & de clemence , &qui
a fait à peine verfer quelques
gouttes du fang de
fes Sujets , qu'il auroit
peut- eftre épargné s'il avoit
alors tenu le timon de fes
Etats.
Quellejoye pour les Anglois
que leur Couronne foit
fur la tefte d'un Prince qui
n'aura eu que des exemples
d'humanité , & quifçavent
eftre difpofe à les fuivre. Ce
n'eft que par là qu'ils pourront
voir leur repos biên afa
EPITRE
fermi. La guerre qui eft entre
l'un & l'autre Etat ,
n'y fçauroit mettre d'obftacle.
Elle n'a point efté déclarée
par la France , &
on ne peut l'imputer à toute
la nation Angloife . Cette
guerre qui la défole n'a efté
excitée & commencée que
par ceux qui compofent le
gouvernementpreſent. Ils en
avoient befoin pourſe maintenir,
pour s'enrichir d'une
partie desfubfides qu'on leve
pour la continuër , & pour
EPITRE.
tenir toujours des forces
prêtes à s'opposer au deffein
de ceux qui voudroient vous
reconnoître pour leur Sou
verain.
Tous les Princes de l'Europe
font convaincus des
Surprenantes qualitez du
Roy , & dans plufieurs
Etats enparlant de ce Monarque
, oonn ddiitt ,, le Roy
fans rien ajoûter , & par
ce feul mot chacun entend
auffi-toft le Roy de France.
Ily a quelques années qu'un
EPITRE.
François ayant dit à un
Miniftre d'une puiſſante
Nation qu'elle demeuroit
dans une grande létargie ,
ce Miniftre répondit : Donnez-
nous voſtre Roy , &
vous entendrez parler de
nous.
a
Je ne rapporte pas ces
faitspour donner des loüanges
à ce Monarque , la Renommée
en prend foin. Il
ne faut pour le louer que
faire un récit tout fimple de
fes actions ; tout ce qu'on
o ij
EPITRE.
diroit de plus n'en pour
roit affez marquer la grandeur
, &fi j'en trace icy une
ébauche , ce n'est que pour
faire voir que les Anglois
ne devroient rien fouhaiter
avec plus d'ardeur que
voir fur leur Trône un
·Prince qui luy reffemblaft.
Tant qu'il a commandéfes
Armées en perfonne
Victoire ne l'a point abandonné.
Il alloit luy-même
ďa
la
reconnoiftre les Places qu'il
vouloit attaquer , & des
EPITRE.
Perfonnes de diftinction ont
fouvent efté bleffées ou tuées
àfescoftez. VOTRE MA
JESTE' verra , SIRE ,
en examinant les merveilles
de fa vie , deux exemples
d'une moderation inoüie
jufqu'à ce fiecle. Je ne
diray rien dupremier puif
que toutes les Nations du
monde parlent du haut degré
de gloire où il est monté
en facrifiant plufieurs fois
une partie de fes Conqueftes
au repos de l'Europe ; ce
EPITRE.
qui prouve qu'il n'a jamais
afpiré à la Monarchie Univerfelle.
S'il avoit eu ce
deffein , il ne fe feroit pas
luy - même fermé le chemin
qu'il s'y eftoit ouvert par
fes Conquêtes , & ce Prin
ce feroit toujours demeuré
armé , au lieu que pour ne
pas donner d'inquiétude aux
Puiffances qu'on cherchoit
a foulever contre luy , il
avoit
peu de Troupes fur
pied toutes les fois que la
guerre luy a efté déclarée.
EPITRE.
Il vouloit empêcher par là
qu'elle ne fe rallumaft ;
& ceftoit marcher par une
voye toute contraire à celle
qui l'auroit pu faire parvenir
à la Monarchie Univerfelle
, pour laquelle il
luy euft fallu donner encore
beaucoup de combats. L'autre
exemple de moderation
que ce Monarque fait voir
tous les jours , & qui n'eſt
pas fi connu des Etrangers
que de fes Sujets , eſt auſſi
digne d'admiration que le
EPITRE.
port
premier. Il paroift d'autant
plus confiderable que rien
n'eft plus difficile que de fe
vaincre foy- même , & de ne
Laiffer échaper aucun tranfde
colere , ny même une
feule parole defobligeante
quand on eft enpouvoir defe
tout permettre, & qu'on a
de vraisfujets defeplaindre.
L'empire que le Roy fçait
conferver fur luy - même en
ces fortes d'occafions , eftfi
grand qu'il n'eft pas poffible
de s'en donner unejufte idée.
Ce
EPITRE.
Ce Prince connoift que les
Rois ne difent rien qui foit
écouté indifferemment ; &
qu'unregard menaçant, une
parole dure , ou une plainte
quelque legere qu'elle foit ,
peuvent coûter cher à ceux
qui fe les attirent. Ainft
la bonté de ce grand Roy
l'emportant fur la vivacité
du Sang des Boura
toujours fait fi
bons
bien triompher fa moderation
qu'on a remarqué
qu'il n'a jamais rien dit.
1
EPITRE.
en public qui puft chagriner
les perfonnes contre lef
quelles il avoit les plus
grands fujets de plainte.
Ce Monarque , SIRE ,
ous donne à toute heure
de grands exemples à fuiqui
vous rendront
ure ,
un jour les delices de l'Angleterre
. VÔTRE MAJES
TE' travaillera tous les
jours comme ce Prince
aux affaires de l'Etat ,
pour le bien de fes Peuples
, & elle employerafou
EPITRE.
vent , ainsi que luy , des
journées entiéres à ce tran
vail. Elle imitera fa liberalité,
recompenferafur
tout les fervices rendus à
la Nation. Vous ferez le
Pere des Veuves , des Orphelins
, & des Invalides ,
vous ferez voir que
vous fçavez vous vaincre
vous-même , & pardonner
quand il est à propos de
le faire.
Le Roy d'Espagne a eu
devant les yeux les mêmes
u ij
EPITRE
exemples , & il s'eft rèndu
le charme de fes Sujets .
Il a confirmé les Privileges
de ceux qui avoient befoin
qu'on les confirmaft ; il en
a donné de nouveaux à
d'autres ; il a commandé
à la tefte de fes Armées ;
il travaille fans relâche
aux affaires de la Monarchie
; il entre dans tous
les befoins de fes Sujets ,
& dans tout ce quipeut relever
la gloire de fes Etats.
Sa Pieté eft exemplaire.
EPITRE.
il est l'amour de fes
Peuples , comme vous ferez
bien- toft l'amour des
voftres. Vous avez tous
deux refpiré le même air
&ily a du même Sang
dans les veines de l'un &
de l'autre. Vous avez esté
témoin des mêmes prodiges
de valeur & de vertu , &
VOTRE MAJESTE' eft
née chez une Nation belliqueuſe.
Vos inclinations n'ont
rien que degrand & d'hu
u iij
EPITRE.
main , &l'Angleterre trou
vera en V. M. un Souverain
tout formé qui a
vú pratiquer les plus gran
des chofes ; qui n'eft appli
qué qu'à fes devoirs ; qui
n'eft pas moins inftruit des
• que
des vertus des Rois ,
vertus chreftiennes & morales
, & qui a toutes les
qualitez neceffaires , pour
rendre fes Sujets heureux.
Je fouhaite , SIRE, qu'ils
jouiffent bien - toft de ces
avantages , pour la gloire
EPITR E.
de VÔTRE MAJESTE
&
pour le
repos
de
toute
l'Angleterre
, &
fuis
avec
un
tres
-profond
respect
,
SIRE ,
DE VOSTRE MAJESTE',
Le tres- humble & tresobeïffant
ferviteur ,
DEVIZE'.
u iiij

436363 43436D
S
J
AU LECTEUR,
AMAIS Place dans une fi
heureuſe fituation que celle
ร de Brifac fi bien fortifiée , fi
facile à deffendre , d'une fi hau .
te reputation , d'un fi diffici
le accés , & fi mal - aifée à prendre,
n'a efté emportée en fi peu
de temps . On n'a point attaqué
depuis trente ans de Place
de cette confequence , & cependant
le Siége en a fi peu
duré qu'il fe trouve renfermé
en deux articles imprimez qui
en ont eſté donnez au public ,
& dans lefquels on n'a cu ny
le temps , ny la place de s'é
PREFACE.
>
tendre : cependant comme ceux
qui parlent les premiers &
qui parlent auffi - bien que ceux
qui ont aujourd'huy cet avantage
, ont le bonheur de remplir
d'abord qu'une Nouvelle a
commencé à fe repandre , l'avide
curiofité des Lecteurs ,
leur empreffement ceffe fouvent
fi-toft qu'ils ont efté inf
truits des principaux faits d'une
action d'éclat , de maniere
qu'il faut que les details qu'on
donne enfuite foient bien étendus
, bien curieux , & bien
nouveaux pour qu'ils jettent
feulement les yeux deffus , &
cette tiedeur , qui part ordinairement
d'un efprit de pre-
Tomption qui croit tout fçavoir
lors qu'il a apris quelques faits,
M
PREFACE.
monte quelquefois à un fi grand
excés qu'ils difent fouvent ,
avant que de jetter les yeux
fur les Volumes qu'on leur prefente
, qu'ils ont déja veu tout
ce qu'ils contiennent , & qu'il
eft imprimé , quoique l'on n'aye
fouvent encore donné que trente
ou quarante lignes au public
fur la matiere dont il s'agit
cependant comme il feroit
fâcheux que la Pofterite
n'apprit ce qui s'eft paffé au
Siége de Brifac , dont un grand
Prince vient de faire la conquefte
, que par deux ou trois
articles au plus qui en ont efté
donnez au public , on a cru
devoir faire un Journal de ce
Siége , & l'on a affemblé pour
cet effet plus de cinquante Res
PREFACE
dations afin d'en former une
complette , où l'on pût trouver
jufqu'à la moindre circonstance
de ce qui regarde ce Siége . Ce
travail eft immenfe , & ne peut
eftre imaginé par ceux qui
n'en ont jamais fait de femblable
. Il ne fe trouve aucune Relation
parmi ce grand nombre
qui ne rapporte quelque fait
qui ne fe trouve point dans les
autres de forte qu'on ne peut
mettre aucun fait dans un Journal
pareil à celui de Brifac ,
qu'on donne aujourd'huy au
public , fans avoir examiné de
quelle maniere en parlent les
cinquante Relations dont on fe
fert pour le compofer , il en eft
ainfi de chaque article pour
lefquels il faut recommences
:
PREFACE.
cinquante fois la même lecture )
Joignez à cela , que plufieurs
Relations rapportent fouvent
beaucoup de choſes dont d'au
tres ne difent rien , & que plu
fieurs autres font mention des
mêmes faits d'une maniere differente
, ce qui fait que la verité
eft fouvent fort difficile à
trouver , & que même l'on n'en
vient pas toujours à bout avec
les plus grands foins , & les
plus grandes recherches : cependant
fi la verité ſe peut dé
mêler , ce n'eft que parmi un
auffi grand nombre de Relations
que celuy dont on s'eft
fervi pour faire ce Journal .
Un Officier qui fe trouve à un
Siége , & qui fe donne tous les
jours la peine d'écrire ce qui
PREFACE.
Te paffe eft tres- capable de fai
re des Relations qui peuvent
aider à de pareils Journaux ;
mais elles ne peuvent fervir
feules à les compofer : cet Of
ficier aura oublié quelques circonftances
des actions où il ne
fe fera point trouvé , & il ſera
partial en beaucoup d'endroits ,
ce qui ne fera pas aifé à deméler
, ainfi il faut neceffairement
que ceux qui travaillent
aux Journaux des Siéges ,
voyent tout ce qui en a efté
écrit ou du moins la plus
grande partie . On doit remarquer
que les Siégés qui durent
peu , quand les Places font fortes
font plus d'honneur aux
Affiegeans qu'aux Affiegez ,
ainfi la conquefte de Brifac eft
2
?
PREFACE.
Fort glorieufe à Monſeigneur le
Duc de Bourgogne : cependant
fi on n'avoit pris ſoin de ramaf
fer toutes les Relations de ce
Siége lors qu'elles ont paru ,
& fi on n'avoit cherché à voir.
la plus grande partie des Lettres
qui en ont parlé , prefque
tout ce qui regarde ce Siége ,
auroit efté enfeveli pour tou
jours , parce que tout ce qu'on
met fur des feuilles volantes fe,
perd ou eft detruit par le temps,
& que co qui fe donne en feüille
au public eft à peu prés fujet,
au même fort: Joignez à cela,
qu'il ne s'eft : trouvé perfonne.
qui ait fait aucune Relation fuivie
du Siége de Brifac , la pluf
part ne s'étant attachez qu'à
écrire ce qui regardoit les amis,
T
PREFACE.
ce qui pouvoit faire plaifir aux
perfonnes à qui ils écrivoient ,
ou ce qui pouvoit flater des
perfonnes de diftinction , par
raport aux interefts que ces
perfonnes prenoient aux Offi
ciers qui eftoient à ce Siége.
Ainfi le Particulier n'ayant eu
en veuë que le Particulier ,
l'Auteur de ce Volume a pris
feul le foin de la gloire du General
, & les actions de ceux
qui fe font diftinguez pendant
le Siége de Brifac ne feront
point ignorées , ils jouiront de
la gloire qui leur eſt deuë , &
qui ne peut eftre trop publiée,
puis qu'elle les excite à continuer
de donner des marques de.
leur valeur pour le ſervice de
leur Souverain , & de leur Pa-
>
PREFACE.
leur don
trie. Enfin on ne peut
ner trop de louanges , & les
faire trop connoiftre au public,
afin que ces loüanges rejaliffant
jufques fur leurs familles ,
elles fourniffent toûjours des
braves au Roy , & à l'Etat .
Il y a dans ce Volume beaucoup
de chofes curieufes qui fe
font paffées aprés la Capitula,
tion de Brifac.
TI
C
HASG
C
0100a asilo
C


**
JOURNAL
DU SIEGE
DE BRISAC.
RISAC , ou Brifach,
que les Latins
nomment Brifacum
& Brifacus mons , eſt
une des plus fortes Places
d'Allemagne , dans le Brif
A
2 Journal du Siege
gaw en Alface
. Elle eft
fituée
ſur le Rhin
, qu'on
y paffe fur un Pont
de
bois . Cette
Place
eft aujourd'huy
regardée
com
me une des plus fortes
Pla
ces de l'Europe
, foit par
fa fituation
qui eft fur une
hauteur
, foit parce
que
l'art a contribué
pour
la
rendre
reguliere
. C'eft
à
caufe de fa fituation
& de
fes fortifications
que les
Auteurs
la nomment
la
Citadelle
de l'Alface
, la
de
Brifac.
3
clef de l'Allemagne , & un
Auteur de noftre temps
L'oreiller fur lequel repofe la
Maifon d'Autriche . Cette
Ville a eſté ſujette à de
grandes revolutions , fur
tout dans le fiecle paffé .
Un celebre Suedois ( Guftave
Horn ) fit en 1633 .
une tentative fur cette Place
, qui luy auroit reüffi
fans les juftes mesures que
le Duc de Feria prit , qui «
firent échouer le deffein
d'Horn. Feria fut affez
A ij
4 Journal du Siege
heureux pour jetter du fecours
dans la Place , & la
garentit ainfi des furpriſes
du Suedois ; cette action
fut trouvée très-hardie &
tres - bien conduite. Cinq
ans aprés , c'eſt-à- dire en
1638. le Duc de Weimar
( Bernard de Saxe ) qui
commandoit l'armée de
Suede , fut plus heureux ,
car avec le fecours du Comte
de Guébriant , qui fut
fait Maréchal de France
quatre années aprés , &
de Brifac.
qui venoit de conduire
Farmée de la Valteline dans
la Franche - Comté , pour
la joindre à celle que
Duc de Longueville y commandoit
, le Duc de Weimar
, dis - je , aſſiſté du
le
Comte de Guébriant remporta
une grande victoire
fur les Imperiaux
, & prit
enfuite Brifac au mois de
Decembre
, étant appuyé de
l'armée de France . Les Soldats
y firent un butin confiderable,
ils y trouvérent
des
A iij
6 Journal du Siege
richeſſes incroïables, il y eut
de fimples Soldats qui ga
gnerent jufqu'à 2000 écus.
L'Artillerie qu'on y trouva
fut tresconſiderable
, on y
prit deux cens pieces de
canon & plus. L'année fuivante
1639. le Comte de
Guébriant s'affura de cette
Place aprés la mort du Duc
de Weimar , qui eftoit tombé
malade à
Newembourg
prés de Brifac. Ce Duc
mourut le 18. Juillet & laiffa
l'armée Suedoife dans
de Brifac. 7
une confternation generale
, il fut pleuré du Soldat
dont il eftoit fort aimé ,
jamais homme en effet
n'eut plus les qualitez &
l'efprit d'un General que
le Duc de Weimar ; c'eſt
une juftice que je fuis obligé
de luy rendre , puifqu'elle
luy fut rendue même
par fes ennemis lors de fon
decés ; je parle des Allemans
. Mr le Comte de
Guébriant fecourut Binghnuen
en ſe ſaiſiſſant de
A iiij
8 Journal du Siege
1
Brifac , & fut cauſe par
tous ces heureux fuccés du
gain de la bataille de Wolfembutel
, qui fut donnée
dix-huit mois aprés , c'eſtà-
dire en 1641. & laquelle
avoit efté precedée du
Traité du neuviéme Octobre
1639. par lequel on
remit au Roy toutes ces
Places dont il s'eftoit déja
rendu maiſtre , & dont la
proprieté luy fut enfin entierement
cedée par le quarante
- feptiéme Article de
de Brifac. 9
la Paix de Weftphalie , qui
fut faite en l'année 1648.
& par laquelle toutes ces
Places furent unies à la
Couronne de France ; Traité
qui fut encore confirmé
par le fixieme Article de la
Paix des Pirenées , qui fut
faite en 1659. La Ville de
Brifac eft fituée fur le bord
ulterieur du Rhin qu'elle
commande , comme elle
fait de l'autre cofté la campagne
, qu'elle découvre
entiérement à caufe de fa
10 Journal du Siege
fituation , qui eft fur une
éminence. Brifac eft à trois
lieuës de Colmar , à ſept de
Scheleftad , à dix de Bafle ,
& à dix-huit de Strasbourg.
Cette Place a eſté autrefois
la capitale du Brifgaw
ou Brifgow , qui eft fitué
entre le Rhin & la Foreſt
Noire. C'est même Brifac
qui a donné le nom à ce
petit Pays ; mais la Ville
de Fribourg l'a privé de
cet avantage , & en eft devenue
la capitale à cauſe
de Brifac.
II
de fes richeffes . On trouve
entre Briſac & Bafle la petite
Ville de
Newembourg.
Zentzingen & Nuyhuit
font les autres Places du
Brifgaw. Ce Pays eſt fertile
& abondant. Il a autrefois
appartenu aux Ducs
de Zeringuen , enfuite lest
Comtes de Furftemberg
s'en rendirent les maiftres .
Le Duc Hegon le vendit
en 1367. aux Ducs d'Autriche
, aufquels l'Empereur
Louis de Baviere avoit
12 Journal du Siege
déja engagé Brifac l'an
1326. Depuis ce temps - là.
le Brifgaw
a toûjours
appartenu
à la Maifon d'Autriche
, & Brifac à la France
depuis les Traitez dont j'ay
parlé jufqu'à la Paix de
Rifwyc , que le Roy le rendit
aprés avoir fait démolir
le pont de pierre. Ceux
qui voudront lire les Guerres
des Suedois en Allemagne
, & l'Hiftoire particuliere
des Troubles de Brifac
& du Brifgaw , n'ont
de
Brifac 13

qu'à voir la belle Hiftoire
que Mr le Laboureur a fait
du Maréchal de Guébriant.
Ils pourront encore voir
le cinquième livre de l'Hiftoire
latine de nôtre temps
de Thuldenus , qui eſt treseftimée
, & qui paffe pour
une des meilleures Hiftoires
du fiecle paffé . Deſcartes
a fejourné quelque
temps
à Brifac
: on dit que
c'eſt dans cette Ville qu'il
compofa fa premiere Meditation.
L'air y eft tres-pur
14 Journal du Siege
& tres-bon par confequent.
On y a vu plufieurs vieillards
de cent dix ans. Ily
a eu des Gens de lettres .
Lorfque le Duc de Weimar
s'en faifit , il y avoit un
Robert qui eftoit un prodige
de fçavoir.
Quoy que cette Place
fuft tres forte avant la Paix
des Pirenées , Mª de Vauban
y avoit ajouté depuis
cette Paix de nouvelles
Fortifications , & l'avoit
renduë plus réguliere....
de Brifac. 15
--Le Rhin paffant devant
Brifac , fait une Inle appelée
l'Ifle des Cadets. La
Ville a huit à neufBaſtions
de face , fes dehors font ad
mirables , ils ne font point
commandez & commandent
à tout eftant fur une
hauteur qui n'eſt que roc ,
& le Rhin paſſant au bas .
Les Ennemis eftoient
en grande inquietude depuis
le départ de Monfeigneur
le Duc de Bourgo
gne pour l'Armée que ce

4
16 Journal du Siege
Prince devoit commander
en Allemagne , & chacun
tâchoit à penetrer fes deffeins.
Ses forces ne paroiffoient
pas d'abord affez
W
grandes pour faire un Siege
auffi confiderable que
celuy de Brifac ; mais à
mefure
qu'elles
augmentoient,
l'inquietude des Allemands
redoubloit. On
fçavoit qu'un fi grand
Prince n'eftoit pas venu
de fi loin fans que les imefures
cuffent efté prifes
de
Brifac. 17
pour qu'il fe fignalaſt par
quelque exploit éclatant.
On fçavoit l'impatience.
qu'il avoit d'acquerir de
la gloire , fon intrepidité ,
l'amour des Troupes pour
luy , le plaifir quelles fe
font de le fuivre & de
s'expofer pour contribuer
à fa gloire , & enfin on
n'ignoroit pas la vivacité
de ce Prince lorſqu'il luy
eft permis de marcher aux
Ennemis de l'Etat . Pendant
que toutes choſes ſe
B
18 Journal du Siege
preparoient pour l'execu
tion du deffein que perfonne
ne pouvoit deviner ,
Monſeigneur le Duc de
Bourgogne fit détruire les
Lignes que les Ennemis
avoient fait élever à Lauterbourg
, dont vous avez
vû la deſcription dans une
de mes Lettres . Ces Life
trouverent infiniement
plus fortes que l'on
ne ſe l'eftoit imaginé , & felon
toutes les apparences
il n'auroit pas efté poffible
gnes
N
de Brifac. 19
de les forcer.
+
Ainfi l'on
-2
peut dire que Monfeigneur
le Duc de Bourgogne employa
bien fon temps en
attendant que toutes chofes
fuffent preparées pour
un grand Siege : Cependant
comme le temps de
le commencer approchoit ,
ce Prince monta à cheval
plufieurs jours de fuite
pour vifiter fes Troupes &
pour faire la reveue des
nouveaux Bataillons qui lui
arrivoient journellement.

Bij
20 Fournal du Siege
gneur
Le 10. Aouft , Monfeile
Duc de Bourgogne
détacha à la pointe du
jour de fon Camp d'Urlaff
, Mr le Comte de Marfin
, avec trois mille hommes
de pied , fans qu'on
fçeuft où il alloit. On
apprit le lendemain qu'il
avoit couché à Wilſtet , où
les gros bagages furent
to
auffi conduits. Monfeigneur
le Duc de Bourgogne
refta dans fon Camp
d'Urlaff.
de Brifac.
21
L'onzième ce Prince fit
décamper fon Armée &
& la fit marcher à la pointe
du jour & fe mit à l'arriere
- garde , les bagages
pafferent fur le Pont de
Strasbourg , & ce Prince
paſſa la Kintche à Offembourg
, & pourſuivit ſa
route par
le bas des Montagnes
de la Foreſt
Noire.
Ce mouvement
perſuada
aux Ennemis
que toute
l'Armée
alloit
repaſſer
pour prendre
la route
de
22 Journal du Siege
la baffe Alface , en forte
que le General Tungen
envoya en diligence à Landau
un détachement des
Troupes des Lignes de
Stolhoffen . L'Armée ayant
paſſé la Kintche , continua
fa marche par le bas des
Montagnes de la Foreſt
Noire , ainfi que je l'ay dé
ja marqué.
Le 12. Monfeigneur le
Duc de Bourgogne monta
à cheval à la pointe
du jour & alla camper à
de Brifac. .23
l'Abbaye
de Schuttern
.
Le 13. ce Prince s'eſtant
encore mis en marche à la
pointe du jour , il fit paffer
la Schutten à fon Armée
, & vint camper fa
droite à Eftenheim , fa
gauche s'étendoit à Greffen.
Mr le Comte de Marfin
marcha en avant.
Mr de Saint Second ;
partit de Strasbourg pour
fe rendre à Rhinau .
Le 14. Monſeigneur le
Duc de Bourgogne alla
24 Journal du Siege
dés le matin camper à Reigel
fur la rivière d'Eſtz à
quatre lieuës de Fribourg ,
& à pareille diſtance du
vieux Brifac. Mr le Comte
de Marfin arriva en même
temps deuant Fribourg
avec la Cavalerie qu'il
diftribua autour de la Place
, comme s'il eut voulu
l'inveftir. Le Gouverneur
perfuadé qu'il alloit
eftre affiegé fit tirer beaude
canon fur les troucoup
pes de Mr de Marfin , dont
?
il
de
Brifac
25%
il n'y eut de tué que le
cheval d'un
Gendarme. Un
détachement de la Garnifon
alla mettre le feu à un
Village voifin , & brûla le
Fauxbourg
qui eft au- delà
de l'autre cofté de la montagne.
Le Gouverneur envoya
demander un renfort
au Gouverneur de Brifac ,
qui luy envoya en même
temps un détachement
de
dix
hommes par
Compagnie
de fa Garniſon , avec
un bon nombre de Ca-
C
26 Journal du Siege
nonniers ,de Charpentiers,
& d'autres ouvriers.
Deux mille chariots
chargez de munitions de
guerre partirent déStraſ♫
bourg pour fe rendre au
Neuf- Brifac.
Dix mille Payfans s'affemblerent
, fçavoir ceux
de Briſgaw, à Newbourg ,
& ceux d'Alface , au Neuf-
Brifac.
¥
>
Sur les cinq heures du
foir on fit partir du Camp :
de Reigel Mrs d'Imecourt ,
de
Brifac 27
de Givry , & de Hautefort,
avec dix- huit Efcadróns ,
& deux Brigades de Cavalerie
, qui avec les trois
mille Fantaffins , & les
vingt Compagnies de Grenadiers
que Mr de Marſin
ávoit laiffez en chemin fe
rendirent devant Brifac.
Toutes ces Troupes
y
arriverent le 15. à la pointe
du jour. Mr de Blanfac y
eftoit déja arrivé avec un
détachement de la Cavalerie
de l'Armée , le Regi-
Cij
28 Journal du Siege
ment de Vercel , un Efcadron
de Ligondez
, & plu
fieurs nouveaux Bataillons
fortis d'Huningue, de Neubourg
, & du Neuf- Brifac.

Ces Troupes s'emparérent
fans aucune refiftance
des environs de Brifac : de
forte que cette Place fut
entierement
inveſtie
même jour. Les mesures
avoient eſté ſi bien priſes ,
pour que les Gouverneurs
de Fribourg & Brifac prif
le
de
Brifac. 29
fent le change , qu'ils donnerent
dans tous les panneaux
qui leur furent tendus
, & que le Gouverneur
de Brifac envoya la veille
que fa Place fut affiegée
trois cens hommes choifis
de fa Garniſon , à celuy de
Fribourg.
Les Regimens de Marfilly
, de Bareith , & de Baden
, eftoient dans Briſac ,
Mr le Comte d'Arco en
eftoit Gouverneur , & Mr
de Marfilly luy avoit eſté
C iij
30 Journal du Siege.
donné pour. Adjoint. Sa
reputation eft grande parmi
les Allemans. Il entend
parfaitement les fortificatións
, & il eftoit Plenipotentiaire
de l'Empereur à la
Paix de Carlowits.
Avant que les Troupes
arrivaffent devant Brifac ,
On s'eftoit emparé du
Chafteau de Munzunghen,
que les Ennemis avoient
abandonné , & on y avoit
trouvé cinq picces de canon
avec quantité de Fude
Brifac. 31
fils & de munitions que les
Ennemis y avoient enterrées
en l'abandonnant.
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne fit fes , dévotions
le jour que Brifac fut
invefti , afin d'attirer les
Benedictions du Ciel fur
cette entrepriſe.
Mr le Maréchal de Vauban
arriva le ineſme jour
15. au neuf- Briſac ; & aprés
avoir conferé avec Monfeigneur
le Duc de Bourgogne
& Male Ma-
Ciiij
32 Journal du Siege
t
réchal de Tallard , il fit
travailler à la conſtruction
d'un Pont au deffus de
Brifac , & d'un autre Pont
au deffous , & rétablir celuy
qui alloit du Fort du
Mortier à l'Ifle , qui eſt
vis-à-vis dans le Rhin , &
où l'on établit dans la fuite
une batterie qui a battu à
revers les Ouvrages de
Brifac du coſté du haut
Rhin. On doit remarquer
icy que le Rhin paffant de
yant Brifac y fait une Ifle ,
de Brifac.
33
& que c'eſt dans cette Inle
où l'on fit d'abord la batterie
dont on vient de parler,
qui battit directement le
Baſtion du haut Rhin qui
eſt au pied de la butte du
Moulin , & à qui ce nom
a efté donné , parce qu'en
effet il y a un Moulin avant
deffus. Ce Fort du Moulin
eft un Roc qui fait une
tres - haute butte. Il y a
un eſpace de maiſons qui
font comme
un Fauxbourg
, & une baffe Ville ,
·
34 "Journal du Siege
enfuite un Chafteau tresfort
, & tres-conſiderable ,
& fur la mefine ligne la
Ville qui s'éleve en longueur
d'une grande hauteur
, le tout compofé de
ſept Baſtions , & de deux
demi Baftions avec beaucoup
d'autres fortifica
tions .
Il ne paroiffoit pas aux
Ennemis que nous euffions
fuffifament de canon , dans
noſtre armée ny à portée
pour attaquer une Place fi
de Brifac: 35
forte ; mais on avoit réfolu
d'en prendre dans chaque
Place dont on en pour
roit tirer fans les dégarnir
; c'est-à- dire en leur
laiffant ce qu'il leur en falloit
pour leur deffenſe
ainfi on en tira mefme de
la Franche - Comté , d'où
l'on fit auffi venir tous les
Officiers qui n'y eftoient
pas abfolument neceffaires.
Le 16. au matin le
J
gros
canon , & les bagages arriverent
au Neaf - Brifac.
36 Fournal du Siege
"
Deux mille Pionniers , &
fept mille Chariots de Payfans
, qui apporterent des
munitions de guerre. ME
de Vauban continua à faire
travailler à la conſtruction
du pont , & l'on continua
à réparer celuy de la Ville
de paille , autrement appellée
l'Ifle , où eftoit bâtie la
Ville Neuve.
Ce mefme jour les
Ponts d'Huningue , & de
Newbourg arriverent à la
Rive d'Alface , & au deſſus
de Brifac.
de Brifac. 37
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne eftant monté
à cheval à la pointe du
jour , ce Prince arriva vers
le midy devant la Place
avec toute l'armée . La
marche ayant efté longue
il fit halte au pied du Fort
de Weimar , pour donner
temps à l'Infanterie d'arriver.
Pendant cette halte
Mr de Vauban le vint faluer
, & eftant enfuite
monté fur la hauteur , fur
laquelle eftoit autrefois ce
38 Journal du Siege
Fort , à une lieue de Brifac ,
il ordonna en meſme temps
aux Ingenieurs de la fortifier
, & de faire des redoutes
fur trois hauteurs qui
font contigues . Quoy que
ce Fort ait confervé le nom
de Weimar , il n'y reftoit
aucuns ouvrages mais
feulement quelques veftiges
de ceux que ce Duc y
fit faire pour bloquer Brifac.
Toute l'Armée & les
bagages défilerent dans la
plaine fans que les Enne'
de Brifac 39
mis fiffent aucune déchar
ge'de leur Artillerie , quoy
que nos Troupes fuſſent à
la petite portée du Canon
& n'envoyerent qu'environ
une trentaine de boulets
du cofté du petit Village
de Hochftet “, d'une
batterie de quatre pieces.
d'Artillerie qu'ils avoient
fur un Cavalier prés du
Moulin. Pendant que l'Armée
défiloit Mr le Duc de
Bourgogne alla reconnoître
quelques Poftes , &

40 Journal du Siege
s'avanca jufques à la portée
de la carabine avec M
le Maréchal de Tallard , &
cinq ou fix perfonnes feu
lement. Il fe rendit enſuite
au Village de Ginglinghen
où le quartier General fut
étably . Celuy de la droite
eftoit commandé par M
de Loëmaria , & la gauche
par Mr de Zurlauben. Mr
de Vauban prit fon poſte
à Biefen audelà du Rhin
pour eſtre plus à portée des
ponts , & des attaques ,
de
Brifac. 4I
qui fe devoient faire aux
Baſtions du haut Rhin.
Mr.de Marfin s'établit à
Hochftet , entre la Ville
& le Quartier General.
Le mefine jour l'armée
fe mit en ligne , la droite
à Ginglinghen & la gauche
tirant vers Diringh parce
que Mr le Duc de Bourgogne
y prit fon quartier:
jufqu'à ce qu'il euft fait
bâtir une maifon qui devoit
eftre au milieu de fon
quartier , qu'il prit environ
D
42 Journal du Siege
*
dans le centre de la circonvalation.
On mit ſeize bataillons
pour entourer le
Village de Ginglinghen.
Mr le Maréchal de Tallard
cuft avis qu'il eftoit
forty la veille trois cens
hommes de la Garnifon
de Brifac avec les Canoniers
qui eftoient dans cette
place , pour ſe jetter dans
Fribourg, où ils eftoient entrez
fort à leur aiſe : enfin
l'entrepriſe de ce Siege fut
conduite avec tant de fede
Brifac 43
cret que M de Tungen ,
General des Troupes des
Lignes de Bihel , écrivit au
Gouverneur de Brifac que
Monfeigneur
le Duc de
Bourgogne
marchoit
à Fribourg.
Mr le Maréchal
de Vauban
dit à ce Prince
qu'il croyoit
que cette
conquefte
feroit aiſée
quoy -que le Roy n'euft
point fait depuis trente ans
de conquefte
de cette confequence
. Jamais
Place
n'a fait voir un plus beau
Dij.
44 Journal du Siege
front de fortifications .
Le 17. Monfeigneur le
Duc de Bourgogne monta
à cheval pour viſiter le
Camp on commença ce
jour- là les lignes de circonvalation
, & à placer les
bataillons entre les Regimens
de Cavalerie. Les ennemis
avoient encore deux
cens hommes de la garni
fon de Brifac dans le Château
de Moutzing. Monfeigneur
le Duc de Bourgogne
changea d'avis , &
de
Brifac. 45
laiffa fon quartier à Ginglinghen
.
Les deux Ponts au deffus
& au deffous du Rhin
furent perfectionnez
, on
acheva de tracer les lignes
de circonvalation , on n'en
fit point de contrevala
tion.
Voicy de quelle manie
re les Quartiers furent dif
poſez .
46 Journal du Siege
DISPOSITION
DE L'ARMEE
DEVANT BRISAC.
Quartier du Haut- Rhin
commandé par M le
Marquis de Loëmaria.
LIEUTENANS GENERAUX.
Meffieurs ,
De Clerembault.
De Saint-Maurice.
Le Comte de Rouffi,
de
Brifac.
47
MARE CHAUX DE CAMP.
Meffieurs ,
D'Imecourt.
De
Nogent.
De Forfat.
Du Chaftelet .
Dragons de Verfel. Efc.3
Cravattes .
efc. 3
Royal.
bat. 2
'La Valliere.
efc. 2
Sourches ,
& Teffé .
}bat .
2
Orleans.
efc. 2.
48 Journal du Siege.
La Marche ,
& Tournaifis .
bat. 3
P
Cröy.
efc . 2
La Couronne ,
& Auxerrois.
bat.
3
Briffac.
efc. 2
Robecq.
bat. 2
Quartier du centre , qui étoit
celuy de Monfeigneur
le Duc de
Bourgogne.
LIEUTENANS
GENERAUX .
Meffieurs ,
Le Comte de Marfin.
De Grandmont. 3
Le
'de Brifac. 49
Le Comte de Hautefort.
Le Marquis de Surville.
Le Comte d'Horne.
MARE CHAUX DE CAMP.
Meffieurs ,
De Blanzac .
Le Duc d'Humieres.
Le Prince Camille.
De Sainte- Hermine.
De Vaillac.
1
De Joffreville .
Saint Poüange.
Touraine.
eſc. 2
bat. 2
E
50 Journaldu Siege
Noailles. efc. 2
Flandres.
Aulnis.
3 bat.3
Scheldon . eſc. 2
Orleanois.
Froulay,
bat.
3
Haynaut .
Dauriac.
eſc. 2
Nice.
Brie. }bat.
bat. 2
Gaëtano , Espagnol. efc. 2
Laffé.
Bandeville .
}bat.
bat. 2
7
La Baume.
Le Roy.
efc. 2
bat. 2
de Brifac.
51
1
Bourgogne..
Le Roy.
efc. 2
bat. 2
Meftre de Camp gen. efc. 3
Santerre.
Ifle de France. }
bat. 3
Referve campée derriere le
Quartier de Monfeigneur
le Duc de Bourgogne.
Gendarmerie.
Navarre.
efc. 8
bat
. 3
.
E ij
252 Journal du Siege
Quartier du Bas - Rhin ,
commandé par Mr le
Comte de Zurlauben.
LIEUTENANT GENERAL.
Mr de Courtebonne.
MARE CHAUX DE CAMP .
Meffieurs ,
De Flamanville ,
Milord Galmoy..
Asfeld.
de Brifac. 53
Au Fort de Weimar.
Royal Italien.
Sillery.
Monroux.
Les Grenadiers de
Bourgogne.
bat.
4
Depuis le Canal de Vauban
jufqu'au
Bas-Rhin.
DRAGONS ..
Colonel general.
efc.
3
Dragons de Vaffé. eſc. 3
E iij
54 Journal du Siege
Saint-Second .
Treffeffon.
}
bat.
3
Dragons d'Hautefort. eſ.3
Maubourg.
Courriere.
bat. 2
Dragons de Bouville . efc. 3
Wandergraff.
Greder , 2º batail .
bat. z
Dragons de Rohan . efc. 3
Greder r bataillon . bat. I
Dragons de la Reine. efc. 3
Pour la garde des trois
Parcs d'Artillerie.
Royal Artillerie.
bat. I
de
Brifac.
Caftelet.
bat . I
Sillery.
bat. I
Aux deux Ponts & au
quartier de M le Maréchal
de Vauban , qui
eft de l'autre cofté du
Rhin.
Thoy.
Boulonnois.
Caſtaja.
Clermont .
E iiij
56
de Brifac
.
Sur le Canal de Molsheim ,
aux ordres de M
de Sailly
.
CAVALERIE.
Chartres.
Vienne .
Ligondez.
Tarnau.
Eſcadrons 2
efc. 2
efc. 2
efc. 2
3
Dragons
de Pezeux .
Dragons de Montmain . 3
INFANTERIE .
Premier de Surbeck. bat. I
Foix. I
Journal du Siege 57
Xaintonge.
Janfac.
Savines .
Grimaldy.
Broffia.
I
I
I
I
I
L'Hoſpital fut mis au
Village de Setan .
Total. Bataillons 7.
Efcadrons 14 .
Total des Troupes du Siege.
Eſcadrons
57
Bataillons
53
58 Journal du Siege
Le 18. Monfeigneur le
Duc de Bourgogne monta
le matin à cheval , & alla
au haut Rhin pour voir le
Pont . Mr de Saint Second
ramena l'apreſdinée les bagages
.
Quatre mille Pionniers
arriverent d'Alface .
Mr le Maréchal de Vauban
affura que depuis quarante
ans on n'avoit point
attaqué de Place , dont le
Siege fuft plus difficile , &
les gros bagages pafferent
de
Brifac. 59
fur le pont du haut Rhin .
On fe fervit d'une vieille
chauffée trouvée dans une
des Ifles du Rhin , & qui
en traverſe un petit bras
pour fauver une augmentation
de pontons , ou batfans
quoy ce che- t teaux ,
min auroit eſté tres- dangereux
, parce que faifant
un crochet en fſe rapprochant
de la Place , la chauf
fée & un petit pont qui
touche jufques à l'autre
bord du Rhin du coſté
60 Fournal du Siege
d'Alface , font enfilez abfolument
par le grand cavalier
de la Ville.
On acheva de voiturer
de Strasbourg au Camp
quatre-vingt pieces de canon
de trente - fix & de
vingt - quatre , & autant de
mortiers à bombes , tirez
de la Citadelle . On conduifit
au Camp cinquante
pieces de canon de campagne.
Il y avoit pour le
Siege foixante & dix mille
boulets , douze cens bomde
Brifac.
61
bes , & quatorze cens milliers
de poudre.
Le premier pont fut
achevé , & on y paffa les
gros bagages , les vivres &
une brigade d'Artillerie.
Douze cens Pionniers continuerent
de travailler aux
lignes de circonvalation .
On travailla aux deux
Ponts qui eftoient neceffaires
fur le Rhin , & aux
lignes de circonvalation
qui eftoient fort éloignées
de la Place , parce qu'on
"
62 Journal du Siege
fut obligé d'occuper un
Village où logeoit Monfeigneur
le Duc de Bourgogne.
Mr. le Maréchal
de
Vauban projetta de faire
deux attaques , l'une au
haut Rhin , & l'autre au
bas Rhin. On refolut de
faire encore plufieurs batteries
du cofté d'Alface pour
battre à ricochet les fronts
des
attaques
.
Monſeigneur le Duc de
Bourgogne alla prés duneuf
Brifac par tous les Ponts
de
Brifac. 63
5
vifiter le parc d'Artillerie,
deftiné pour les attaques
dans l'enceinte des lignes ,
qui devoit eftre tranf
porté prés le Village de
Hochftet , on y amena le
canon. De là ce Prince alla
voir un autre Parc au Village
de Bieſen pour ſervir
aux batteries de l'Ifle des
Cadets , & à celles qui
devoient eftre en deçà du
bas du Rhin. Il y avoit fix
pieces de canon de trentetrois
livres de balles , & il
64 Journal du Siege
&
y avoit à ce Siége cent dix
pieces de gros canons ,
quarante depuis feize juſqu'à
quatre livres. Pendant
la promenade de Monfeigneur
le Duc de Bourgogne
, on s'apperçut que
les ennemis travailloient à
dreffer quelques batteries ,
ils en tirerent quatre coups
fur les files des Chariots
d'Artillerie qui alloient au
Parc de Hochftet.

Le 29. on continua les lignes
de circonvalation ; il
de Brifac. 65
7
arriva au Camp fix mille
Pionniers outre les quatre
mille , & huit Mortiers ,
faifant quarante en tout
l'équipage d'Artillerie , non
compris dans les cent dix
piéces de batterie arrivées
âu Camp .
Le 21. Monfeigneur le
Duc de Bourgogne monta
à cheval à neuf heures du
foir ; ce Prince fit le
tour du Quartier general ,
& tous les Officiers des
rioüacs vinrent prendre le
mot.. F
66 Journal du Siege
Les Troupes continuerent
à faire des magazins
de fafcines , & Mr de la
Freſeliere à faire travailler
aux trois Parcs d'Artillerie,
dont l'un eftoit dans l'Ifle
des Cadets , l'autre au Village
d'Hochftet , & le troifiéme
auprés du Moulin
de l'Ecreviffe.
On continua à perfectionner
les lignes de circonvalation
, ainfi que les
Ouvrages qui fe faifoient
au Fort de Weimar , &
1
de Brifac. 67
fur les hauteurs voisines.
Mr de Saint Second joignit
l'Armée avec fa brigade.
Mr le Comte d'Arco ,
Gouverneur de Brifac , &
qui eſt ſujet né du Roy
d'Eſpagne , envoya faire
compliment à Monſeigneur
le Duc de Bourgogne , &
luy fit dire , qu'il s'eftimoit
beureux de fe voir affiéger
par un auffi grand Prince,
& que pour augmenter fa
gloire il fe deffendroit tout
Fij
68 Fournal du Siege
autant qu'il le pourroit. Les
ennemis en voyant les ·
grands preparatifs qu'on
faifoit pour les attaquer ,
tirerent beaucoup.
Le matin du 21. on ne
leur avoit pas encore tiré
un feul coup .
Le Gouverneur voulut
faire fortir de la Ville trois
à quatre cens femmes ;
mais à peine furent - elles
hors du chemin couvert ,
qu'on leur fit dire qu'elles
n'avoient qu'à rentrer , fide
Brifac. 69
non qu'on tireroit fur elles
comme elles ne trouverent
pas cette propofition
de leur gouft , elles
rentrerent.
Le 22. les Grenadiers
fe faifirent de trois redoutes
qui avoient eſté abandonnées
par les ennemis
,
depuis que cette Place étoit
inveftie , parce qu'elles en
5 eftoient éloignées d'une
tres-grande portée de carabine
; elles eftoient entre
la Place & le haut
S
70 Journal du Siege
Rhin ; onfit un logement
à chacune pour y tenir cinquante
Fufilliers. Les ennemis
tirerent quelques
coups de cañon. Les batteries
qui étoient dans l'Iſle
des Cadets étoient une de
douze pieces de canon , &
une de huit mortiers .
On fit un épaulement
derriere la derniere
maiſon
du Village d'Hochſtet
.
Ön fit une batterie
de
douze pieces de canon
à
cent toiſes du baftion que
de
Brifac. 71
l'on devoit attaquer du côté
du haut Rhin ; cette
batterie eftoit dans une
Ifle , & prenoit à revers
tous les Ouvrages des ennemis
, la contrefcarpe , les
foffez , & le corps de la
Place. On en fit encore une
autre de fix mortiers dans
le logement qu'on avoit
fait , où il pouvoit tenir
cinquante Fufilliers. Les
ennemis tirerent quelques
coups de canon.
On fit un petit boyau
72 Journal du Siege
du cofté du haut - Rhin
dans l'Ifle pour y établir
les batteries , & un petit
pofte pour ouvrir la tranchée
avec plus de feureté .
Le 23. on travailla tout
le jour à tracer la batterie
de l'Ifle , à laquelle Mr le
Maréchal de Vauban donna
le nom de la Frefeliere ,
parce que ce Marquis la
faifoit luy mefme. I fe
trouva de grandes difficultez
à y faire dreffer du canon.
Cette batterie devint
de
Brifac. 73
vint le feul objet des En
nemis & ils réunirent
toutes leurs forces contre
elle. On n'y faifoit toutes
les manoeuvres qu'avec
beaucoup de difficulté , &
elle eftoit tres- perilleuſe .
Mr de Rochambaut y fut
bleſſé au coſté , mais lege- "
rement. On y perdit un
Sergent de Canoniers , &
fept Soldats .
Sur les fept heures du
foir on ouvrit la tranchée
au haut - Rhin. M de
G
74 Journal du Siege
,
Vauban jugea à propos
de ne l'ouvrir que de ce
cofté là › parce qu'il craignit
de trouver plus d'eau
au bas du Rhin . Elle fut
ouverte par deux mille
Travailleurs à demie portée
du Canon , le long de
la Digue du haut - Rhin
vis- à- vis le Moulin , & un
peu au deffus du Village
d'Hochftet, fitué à un quart
de lieuë de la Ville & 200 .
toifes ou environ de la gauche
à la gauche du Village,
de
Brifac 75-
Les Officiers Generaux
qui monterent la tranchée
font ,
Mr le Comte de Marfin ,
Lieutenant General.
M² de Sailly , Maréchal
de
Camp.
Mr de Monroux , Brigadier.
Les trois bataillons du
Regiment de Navarre , le
Regiment de Monroux
& celuy de Laffé monterent
la tranchée.
Sur la fin du jour Mon-
Gij
76 Journaldu Siege
feigneur le Duc de Boura
gogne
monta
à cheval
&
Le rendit
à la tranchée
; -
ce Prince
mit pied à terre
auffitoft
qu'il y fut arrivé ,
& s'avança
à la tefte des
Travailleurs
, & porta
fa
fafcine. M le Maréchal
de
Tallard
qui l'accompagnoit
porta auffi la fienne.
Tout
ce qui ſe paſſa
pendant
cette premierenuit
de tranchée
fut derobé
à la connoiffance
des -
Ennemis
& quoy qu'il
de
Brifac 77
fift clair de Lune , ils ne
s'en aperçurent que le matin
. Un Gendarme de
Renti qui portoit la faſcine
eut fon cheval tué , & la
jambe emportée d'un boulet
de Canon perdu . Les
Ennemis ayant beaucoup
plus tiré du cofté de la
batterie de l'Ifle & y ayant
meſme fait pendant toute
la nuit un feu continuel
de Canon & de Moufqueterie
, il y eut un Sergent
& fix Canonniers
G iij
78 Journal du Siege
tuez , & Mr du Martrais
Commiffaire d'Artillerie
fut dangereuſement bleffé .
Deux chofes faciliterent
le travail , & détournerent
l'attention des Ennemis ,
ce qui fit qu'on avança
beaucoup.
La premiere eft qu'on
avoit mis quelques méches
aux ouvrages commencez
vers le bas du Rhin , &
dans l'Ifle où eftoit autrefois
la Ville neuve.
La feconde eft que les Ende
Brifac. 79
nemis avoient veu pendant
le jour , paſſfer dans l'Iſle
prés de la butte , une grande
quantité de chariots &
d'outils à remuer la terre ;
de forte qu'ils pointérent
tout leur canon de ce côté-là
& qu'ils y firent un grand
feu pendant toute la nuit .
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne , aprés avoir
veu tracer l'ouvrage avec
Mrs les Maréchaux , de
Vauban , & de Tallard
& veu ouvrir la tranchée ,
G iiij
80 Fournal du Siege
retourna à fon Quartier ;
fur les onze heures du foir
aprés avoir animé les Troupes
par fa preſence , & par
une diftribution de deux
cent Louis d'or. La tranchée
ayant eſté ouverte à
la demie portée du Canon ,
fut pouffée cette premiere
nuit à celle du Fufil.
Le 24. les Ennemis
s'eftant apperçus à la pointe
du jour du travail qu'on
avoit fait pendant la nuit
precedente tournerent tout
de
Brifac.
81
leur feu fur la tranchée ,
mais comme on s'eftoit
déja mis à couvert par tout,
ils ne tuérent que trois
hommes , & ils en blefférent
autant. Ils avoient
tué ou bleffé quinze Canonniers
dans l'Ifle.
Mr Nobleffe , Brigadier
Ingenieur d'Huningue ,
eftant allé par ordre de
Mr de Vauban reconnoître
un ruiffeau
,
jambe emportée d'un coup
eut
la
de canon .
82 Journal du Siege
Le 24. au foir Monfeigneur
le Duc de Bourgogne
monta à cheval & alla
voir defcendre & monter
la tranchée , mais ce ne fut
pas fans danger , puifque à
vingt pas de l'endroit où
eftoit ce Prince , le canon
des Ennemis tua au piquet
un cheval de Mr d'Imecourt.
Les Officiers generaux
de la tranchée qui fut
montée , eſtoient ,
Mr de Laubanie Lieutenant
general.
de Brifac. 83
Mr le Marquis de Flamanville
Maréchal de
>
Camp.
Mr de Polignac , Brigadier.
Les Troupes qui estoient
fous les ordres de ces
trois Officiers generaux
.
eftoient ,
Les quatre
bataillons
du
Regiment
du Roy.
Le fecond bataillon de
Flandres.
Le Regiment de Clermont.
84 Journaldu Siege
Ces Troupes montèrent
lá tranchée en bataille fous
le canon de la Place , en
prefence de Monfeigneur
le Duc de Bourgogne ;
elles défilerent tambour
battant , & ayant leurs
hautbois à leur tefte. Les
Ennemis tirerent une vingtaine
de coups de canon
qui tuerent avant que les
Troupes fuffent entrées
dans la
tranchée , quatre
hommes d'un feul coup .
Le Lieutenant de la Com-
>
1
de
Brifac. 85
pagnie de M Deflandes ,
fut bleffé à mort . Monfeigneur
le Duc de Bourgogne
donna deux cent Louis
aux Travailleurs.
On tira cette nuit-là un
boyau de la droite de la
tranchée pour aller embraffer
le baſtion de Richelieu
, & ce travail fut
pouffé à fix cent toiſes . On
travailla en même temps à
une ligne paralelle pour
la communication de ce
boyau à la tranchée ; de

86 Journal du Siege
maniere que cette attaque
embraffa les baftions de
Vermandois
, de Sainte-
Croix , & de Richelieu .
On n'eut cette nuit - là
qu'un Soldat tué d'un boulet
, qui en enleva deux autres
fort legerement , &
quatre bleffez du Moufquet.
Le travail de la nuit
fut tres-beau , & Monfieur
de Lapara contribua
beaucoup à fon avancement.
Mr de Vauban ordonna
de Brifac. 87
la mefme nuit une batterie
de huit pieces de canon
à la gauche de la tranchée
, les ennemis firent
grand feu , fur tout de
mouſqueterie , voyant que .
l'on avançoit les travaux
prés de l'avant -fofſé . On fit
un boyau de communication
de la gauche à la droite,
& l'on élargit la tranchée.,
Mr de la Frefeliere fit ,
travailler la mefme nuit à
la fixiéme batterie que Mr.
de Vauban avoit marqué88
Journal du Siege

dans l'Ifle. On
commença
für la gauche de cette batterie
une batterie de fix
mortiers. Mr de Varennes
Officier de reputation , &
environ vingt Canonniers
ou Soldats furent tuez ou
bleffez en eſtabliſfant
ces
batteries.
Le travail fut fort avancé
pendant la nuit , on
n'eut qu'un foldat tué . Sur
les deux heures aprés minuit
le travail eſtant fini ,
Mr de Laubanie fit don-
}
de Brifac. 89
ner pendant une heure
& demie , des ferenades
militaires par des hautbois
& tambours . Dans
les intervalles
de ces concerts
, les Soldats crioient
de toute leur force : Serviteur
à Madame la Comteffe
d' Arco ; bonjour pour
la Saint Louis à Monfieur
le Comte d' Arco; vive
le Roy Louis XIV. Mon-
Seigneur , & Monfeigneur
le Duc de Bourgogne , vive
le Roy, vive les Louis . Les
H
90 Journal du Siege
foldats eftoient en bonne
humeur , parce que Mª de
Laubanie leur avoit fait diftribuer
quantité de pain ,
de vin , & d'eau de vie :
Ils beuvoient dans leur chapeau
qu'ils jettoient enſuite
en l'air , avec des cris &
de grands éclats de rire. Il
eft à remarquer qu'on cèlebroit
ce jour-là la feſte de
Saint Louis , dont le Roy
porte le nom. Pendant toute
cette fefte les ennemis
répondirent de leur butte,
de
Brifac. 91
& de
leurs
remparts , &
femblant
eſtre
ſimplement
les ſpectateurs
, ils ne tirerent
point
du tout. Mª de
Laubanie
traita
en même
!
temps une cinquantaine
d'Officiers & de Volontaires
qui fe trouverent à la
tranchée . Le concert ayant
ceffé , le feu des ennemis
recommença au point du
jour.Nôtre batterie de l'Ifle
des Cadets qui n'étoit que
de fix Canons ,
commença
auffi à tirer , & continua
Hij
92 Journal du Siege
vigoureuſement jufqu'à midy,
que quatre affuſts ayant
efté brulez , & le Merlou
fort
gafté par le canon
de
la place
, il falut ſe taire
pour
tout reparer
.
Nous
eûmes
quatre pieces
de
demontées
, quatre
hommes
tuez , & dix ou
douze
bleffez
.
On fit marcher toute
l'Artillerie du cofté de l'attaque
du Rhin . Elle paffa
fierement depuis le Village
de Bieffen jufqu'à Vode
Brifac. 93
gelheim toûjours expoſée
au canon des ennemis qui
la laifferent paſſer fans tirer
un feul coup.Tout le feu
qu'ils faifoient n'eftoit que
de la pointe de la butte
du Moulin. On remarqua
que Mr Tichinge, Echevin
de la Ville , fe promenoit
avec fa famille dans fon
jardin qui eft hors de Brifac
, du cofté qui regarde
l'Alface fur le bord du
Rhin , & l'on obſerva au
travers de nos Lunettes
94 Journal du Siege
qu'ils regardoient ce paffage
d'Artillerie avec une
grande tranquilité .
Toutes les batteries de
I'Ifle ayant efté achevées ,
Mr de la Freſeliere en fit
commencer une le foir du
vingt- cinq , une autre de
huit pieces qui eftoit deſtinée
pour battre en breche
le bastion du Rhin , & les
deffenfes de la butte qui
incommodoient
beaucoup
la tranchée : il fit auffi travailler
à une batterie de
de Brifac. 95
fix mortiers à la droite de
cette batterie de huit. Le
foir ,
Mr le Marquis de Loëmaria
, Lieutenant general.
Mr le Marquis de Blanfac
, Maréchal de Camp,
& Mr le Prince de Robec
Brigadier ,
monterent la tranchée avec
Deux bataillons du Roïal,
Deux de Touraine ,
Un de Tournefis , &
Un d'Auxerrois .
96 Fournal du Siege
Quoy qu'on fut fort incommodé
du grand feu
des ennemis , la batterie de
la butte du moulin où
eftoient leurs batteries , &
qui voyoient la nôtre, étant
fi élevées qu il eſtoit difficile
de les démonter
que
par des bombes
: cependant
leur feu continuel
n'empécha pas qu'on ne fit
cette nuit-là trois cent toifes
d'ouvrages , la paralelle.
fut continuée depuis l'angle
de la contregarde du
baftion
de
Brifac. 97
baftion de Richelieu , juſqu'au
Rhin , & l'on fit
prés de l'avant-foſſé , un
logement pour y établir
une batterie.
La batterie que
les
ennemis
avoient fur la hauteur
du moulin démonta
quatre pieces de l'Ifle , &
il y cut quatre hommes
tuez & dix ou douze
bleffez.
Les ennemis jetterent
quelques bombes qui creverent
fans effet.
-0
auden
98 Journal du Siege
Le vingt - fix Monſeigneur
le Duc de Bourgogne
alla fur le midy à la
tranchée , ce Prince la vifita
, & examina tous les
ouvrages , il s'avança juſqu'à
la tefte des Sappeurs ,
& s'éleva fur un fac à terre
pour mieux reconnoiſtre
les Fortifications . Il ne fortit
qu'à trois heures de la
tranchée , aprés s'être beaucoup
expoſe , & avoir eſté
conduit par tout par Mr le
Maréchal de Vauban ; Ce
de
Brifac. 99
1
1
Prince continua de donner
des marques de fa liberalité
aux Soldats , & aux
Travailleurs.
Les fix Pieces de la batterie
de l'Iſle ayant eſté rétablies
, furent encore démontées
par le canon de
la hauteur , de maniere
qu'elles ne purent tirer depuis
dix heures du matin
jufqu'à deux heures aprés
midy.
Le foir du mefme jour,
Mr de Zurlauben , Lieu-
I ij
100 Journal du Siege
tenant general.
Et M d'Imecourt , Maréchal
de Camp ,
Monfieur le Chevalier
de Croiffi , Brigadier ,
monterent la tranchée avec
-les deux bataillons de
la Couronne deux de
>
Greder , le fecond de Sourches
, & le ſecond de Bandeville.
Sur les onze heures &
demie du foir les Ennemis
au nombre de cinquante
feulement fortirent pour
de Brifac.
IOI
inquieter les Travailleurs,
qui eſtoient déja couverts.
Fon cria à lerte ; ce mot
paſſa juſqu'au delà des lignes
, où les Payſans prirent
l'allarme & vinrent
I pour ſe réfugier dedans
croyant
que c'eſtoient
les
Allemands
qui venoient
fecourir
la Place. Les Senti
nelles
des barrieres
voyant
au clair de Lune arriver
tant de monde , demanderent
qui vive , & tiree
rent , ce qui fit que cet
I iij
I
102 Journal du Siege.
à lerte alla juſqu'au Quartier
de Monſeigneur le Duc
de Bourgogne , qui s'habilla
, & fe botta mefme ,
pendant qu'on eftoit allé
voir ce que c'eftoit , l'on
reconnut auffi- toft l'erreur
, & on luy en vint
rendre compte , les Gre
nadiers de la Couronne
Mr le Chevalier de Croiffi
, Brigadier de jour , &
ceux de Greder Allemand
fortirent de la tranchée
, & tomberent com
de
Brifac.
103
1
I
f.
me des Lions fur ces cinquante
hommes , tuerent
l'Officier qui les commandoit
, & prés de la moitié
de cette Troupe , le refte
s'eſtant jetté
promptement
dans le chemin couvert
où nos Grenadiers eftant
entrez n'en vouloient point
fortir , & il falut que
de Zurlauben , Lieutenant
General de jour alla luy
mefine les faire revenir.
Mr le Chevalier de
Croiffi eut en cette occa-
Mr
I iiij
104 Journal du Siege
fion un Valet tué auprés
de luy.
Ce fut un Capitaine du
Regiment du Roy dont
on ne devroit pas avoir
oublié le nom , qui tua
avec fon efponton le Commandant
des Troupes qui
firent cette fortie , les Ennemis
aprés s'eftre retirez
avec precipitation dans
leur chemin couvert , y
firent un tres gros feu.
La Compagnie des
Grenadiers de Sourches fit
de
Brifac. 105
des merveilles en les repouffant
, le Capitaine ,
le Lieutenant & deux Sergens
de cette Compagnie
furent bleffez .
On travailla cette nuit
là à établir une communication
de la gauche à la
droite par des Lignes paralelles.
Cette communication
ne put eftre achevée
, quoy que le travail
qu'on fit cette nuit là , fuſt
de trois cent cinquante
toiſes ; ce travail ne fut
a
11-
ez
Ins
y
3
fit
106 Journal du Siege
la forinterrompu
que par
tie dont je viens de vous
parler. On ne laiſſa pas
de faire une batterie de
huit canons & de dix mortiers
du cofté du Rhin
& d'avancer juſqu'à quinze
toifes du chemin couvert
. On poufſa à la droite
une fappe vers l'ancien
foffé du Baftion de Richelieu
, & on tira une paralelle
à dix toifes de l'avant-
foffé vers une redoute
qui eft devant le Baſtion
de
Brifac. 107
de Sainte Croix que l'on
gagna cette mefme nuit.
On fit à la gauche une
paralelle jufqu'au Rhin ,
pour couvrir une batterie
de trois gros canons , &
de fix mortiers , le travail
ayant eſté pouffé preſque
jufqu'au bord de l'avantfoffe
, n'en eftant en quelques
endroits qu'à quatre
toiſes , on y trouva beaucoup
moins d'eau qu'on
ne s'étoit imaginé. Il y eut
cette nuit là environ
108 Journal du Siege
vingt - cinq hommes tant
tuez que bleffez avec deux
Ingenieurs , & quelques
Officiers.
La vigueur avec laquelle
la fortie des Ennemis
fut repouffée rendit la même
nuit leur perte tresconfiderable.
Le 24. au matin la batterie
de huit pieces de
canon & celle de fix mortiers
tirerent avec beaucoup
de fuccés. L'Artillerie
des Ennemis ne fit pas
de
Brifac. 109
grand bruit ce jour là , ils
mollirent pendant toute la
-journée & ne tirerent pas
-cinquante coups de fufils
& dix coups de canon , &
ne s'attacherent à tirer que
fur la batterie de l'Ifle.
On travailla à d'autres
lignes entre Tringue &
Hochftet , afin que fi le
t fecours venoit , Monſeigneur
le Duc de Bourgogne
puft quitter fon Quartier
& fe mettre dans ces
nouvelles lignes . Ce Prin110
Journal du Siege
alla voir défiler à l'iffuë de
fon dîner les Troupes qui
devoient relever la tranchée
, elles eftoient commandez
par
Mr le Marquis de Clerambault
, Lieutenant General
.
Mr le Duc d'Humieres ,
Maréchal de Camp .
Et Mr le Marquis de Silly
, Brigadier
Les Troupes qui monterent
la tranchée eftoient ,
Un Bataillon du Royal
Italien.
de Brifac. III
ce .
Deux , de Santerre ,
Un d'Orleanois ,
Et un de l'Ifle de Fran-
Ce qui fuit eft tres cu-
On fait chaque
rieux.
jour tant que dure un Siege
, un memoire preſque
Temblable
à celuy que vous
allez lire , touchant ce
qu'il y a à faire felon l'état
où se trouvent les travaux.
Comme ces difpofitions
qui fe font chaque
jour , font à peu prés pa112
Journal du Siege
7
reilles , je vous en envoye
une pour vous faire voir
feulement de quelle maniere
elles fe font . Ainfi
figurez vous qu'on a donné
des ordres à peu prés
pareils pour eſtre obſervez
chaque nuit de tranchée
tant qu'a duré le Siege.
DISPOSITION
de la tranchée pour
nuit du 27. au 28.
la
Garde ordinaire de la
de
Brifac. 113
tranchée , fix bataillons.
Garde de Cavalerie , un
le
efcadron.
Travailleurs
, mille pour
la nuit , & autant pour
jour ; fçavoir , quatre cents
pour l'attaque gauche , &
fix cents pour la droite ,
caufe des communications de
celle- cy qui nefont pas acheà
vées. On en détachera de

la
jour cent de chaque attaque
perfectionner les vieil- pour

les tranchées qui ne l'ont
pas efté , à cause de la viteſſe
K
114 Journal du Siege
aveclaquelle on travaille, le
furplusfera emploie àpouffer
en avant , & à achever les
ouvrages de la nuit precedente.
" Les gens armez,porteront
chacun une fafcine , qu'ils
poferont fur le revers de la
tranchée , le plus prés de la
tefte qu'ilfera poffible , ob-
4
fervant de n'en point laiffer
trainer dans le fond des
tranchées , & même de ne
la point mettre trop prés d'es
bords pour n'en point eftre
embaraffé.
de
Brifac. 115
ES
ont
Pils
RG
Les
Travailleurs porteront
chacun une fafcine , &
prendront
leurs outils fur
le revers de la tranchée
, où
il s'en trouvera
affez des
nuits precedentes
, &ſeront
tous difpofez par
dila
vifions de cent hommes chacune
, commande , par un
Capitaine , un Lieutenant ,
la
des
Jer & quatre Sergens , & fe
tiendront à la queuë des
ne gens armez , jusqu'à ce
des qu'on lesfaffe avancer pour
Fr les pofer.
Kij
116 Journal du Siege
Ilsferont relevez le lendemain
au matin par un
pareil nombre , qui ne fortira
pas de la tranchée qu'elle
ne foit en fa perfection ;
c'est- à-dire , de douze pieds
de large , fur trois reduits de
profondeur, le bord exterieur
proprement alligné.
Le Directeur fera une
petite brigade de fix hommes
pour relever & ranger les
outils qui traînent dans la
tranchée , & fur les bords ,
lesfera obferverpour voir
de Brifac. 117
s'ils feront leur devoir.
Et attendu le redoublement
des attaques ordonné
par Monfeigneur le Duc de
Bourgogne , on partagera les
Troupes en deux , dont trois
F
nes
Les
bataillonsferont à la droite ,
& trois à la gauche .
On fera la même chofe des
Travailleurs
, en les partageant
de même , felon que
1 les befoinsferont plus grands
à l'une qu'à l'autre. La
dgarde de l'attaque de lagauchefe
montera par la gau118
Journal du Siege
de
che , la droite par la tefte
du Village d'Hochftet environ
à l'endroit où la garde
Cavalerie fe retire de jour.
Les Officiers generaux de
ces attaques doivent eftre
un Lieutenant general , un
Maréchal de Camp , &
deux
Brigadiers.
Ilfaudra d'icy- en-avant
que la garde des tranchées
& des Travailleursfe trouve
à quatre heures précifes
dans la Plaine derriere le
Village d'Hochftet , pour en
de Brifac. 119
fuite relever la tranchée
& le travail , continuër
à faire faire des gabions
par le Regiment de Greder,
par tous ceux des Troupes
qui en fçavent faire , &
par les Payfans.
le
Ordonner qu'ilsferont tous
voiturez par les chariots à
la queue des tranchées ,
plus avant quefairefe pour
& là , on fera trouver
des gens qui les recevront
&qui donnant certificat de
la quantité qu'ils en auront
ra ,
120 Journal du Siege
reçu , feront payez fur le
champ.
Fait au Camp devant le
vieux Brifac , le 26. Aoust
1703.
Du 27. au 28. la nuit ,
le boyau qui eftoit à la
droite de tout fut continué
la longueur de cinquante
toifes. On y plaça
une batterie de huit pieces
de canon , qui battit la
face gauche de la contregarde
du baftion de Richelieu.
*
de
Brifac. 121
lieu. La même batterie pou
voit auſſi battre la face
droite de ce baftion . On
continua tout le long de la
flaque d'eau ou avant-foffé ,
la paralelle qui alloit joindre
celle qui venoit de
l'attaque de la gauche derriere
celle-cy. On en prolongea
une fort petite , fur
laquelle on établit une batterie
de quatre pieces , qui
ruina les faces de la lunette
ou grande redoute. Il n'y
eut que dix ou douze hom-
L
122 Journal du Siege
mes tuez , vingt- cinq ou
trente bleſſez , un Ingenieur
bleſſé , un Commiffaire
d'Artillerie bleffé , un
Capitaine , & deux Officiers
fubalternes. La batterie
de l'Ifle fut rétablie
& tira beaucoup . Les Affiegez
n'avoient plus que
deux pieces de canon fur le
cavalier du Moulin , en eſtat
de tirer. Leur demi-baftion
du Rhin que la batterie de ·
l'Ifle battit en bréche , n'étoit
couvert que d'une
pe-
I
de
Brifac
123
tite redoute. Il y avoit dans
l'Iſle & à la tranchée vingtdeux
pieces de canon , &
fix mortiers .
Les Ennemis fortirent
au nombre de foixante- dix
hommes , mais les Grenadiers
les repoufférent jufques
dans les barrieres , &
M² de Zurlauben ſe logea
à trois toifes de la contrelcarpe.
Mr de Langran Sousbrigadier
, cut la cuiffe percée.
Lij
124 Journal du Siege
Le 28. Mr le Maréchal
de Vauban ordonna le long
du Rhin une batterie de
deux Picces de canon qui
voyoit un angle rentrant
du bastion du Rhin , qui
eſtoit battu par fix pieces.
de canon de la batterie de
l'Ile par la face gauche à
noftre égard. Il en ordonna
auffi une autre de trois
piéces auprés de celle - là
pour battre la feconde Redoute
du Baftion de Sainte
Croix, Il en ordonna de
de
Brifac. 125
plus une autre de douze
pieces pour battre une batterie
de fix pieces de canon
que les ennemis avoient
fait la nuit precedente
fur
le Rocher
, & qui pouyoit
enfuite battre la face
gauche du baition de Sainte
Croix. La batterie de
quatre pieces qui avoit été
ordonnée la veille , eftoit
tres- bien placée pour battre
la feconde Redoute.
Mr de Vauban ordonna
encore huic mortiers , &
L iij
126 Journal du Siege
>
quatre Pierriers à la tranchée
de la droite à la
droite des douze mortiers
une batterie de quatre pieces
de canon pour ruiner
le Flanc gauche du baſtion
du Rhin .
La troifiéme batterie
commença à battre en Breche
la courtine du baftion
du Rhin jufqu'à la porte
de la Ville , les Affiegez
y répondirent par un affés
beau feu.
Les ennemis avoient en-

de Brifac. 127
core fur la butte cinq pieces
de canon en batterie ;
mais nos bombes en demonterent
quelques unes ,
le canon n'y pouvant porter
à caufe du bas en haut.
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne vifita toutes les
lignes , depuis le pont du
haut - Rhin jufqu'à celuy
du bas - Rhin ; ce Prince
vit enfuite relever la tranchée
par
M le Marquis de Gramont
, Lieutenant general,
L
iiij
128 Fournal du Siege
Mr le Prince Camille ,
Et brigadier ,
Et M* le Marquis de Raffetot
,
Avec deux bataillons du
Regiment de la Marche ,
Un de Hainaut , Eſpagnol
,
Un de Brie ,
Et deux de S. Second.
Le 29. les ennemis joüerent
à la pointe du jour de
la Trompette marine , &
d'autres Inftrumens ; mais
cette joye affectée ne pou
1
de Brifac. 129
voit nous cacher la mauvaiſe
fituation où ils fe
trouvoient.
La batterie de l'Ifle ruina
entierement le baſtion
du moulin de fon cofté . Il
y en avoit une ſeconde qui
commença à faire breche
de l'autre coſté de l'angle ,
& une troifiéme battit dés
le matin à l'autre pointe ,
en attendant la batterie
Royale qui devoit battre
le baftion fuivant , ou ce
baftion mefine. Cette bat
130 Journaldu Siege
terie devoit eſtre de quarante
pieces.
Pendant ce mefine jour
quatre batteries
, dont la
moindre
eftoit de huit canons
, ne diſcontinuerent
point de tirer. Il y cût au
baftion du cofté de l'Ifle
une breche de plus de fix
toiſes. Une batterie la prit
à revers , & y fit une nouvelle
breche.
La batterie de cinq pieces
de canon que les ennemis
avoient fur la butde
Brifac. 131
te , demonta deux de nos
canons.
Cette Butte auroit pû
empécher que toute autre
Armée qu'une Armée du
Roy commandée par Monfeigneur
le Duc de Bourgogne
ne prit une Place fi
forte. Ce Prince alla ce
mefme jour deux fois à la
tranchée
, & s'avança
juſqu'à
l'extremité
des Sappes
, où il demeura
pendant
deux ou trois heures.
Il alla jufqu'aux batteries
132 Journal du Siege
qui n'étoient qu'à la portée
du fufil : Il eftoit venu
à cheval juſqu'à la queïe
de la tranchée , où il y
avoit beaucoup de danger,
parceque c'eft où le canon
donnoit plus ordinairement
, & alloit de volée
demy quart de lieuë plus
loin. Ce Prince prit des rafraichiffemens
dans la tranchée
qui l'y retinrent longtemps.
Il fit diftribuer deux
cens Louis aux foldats , &
aux travailleurs.
de Brifac. 133
Les ennemis avoient trois
cens hommes dans le Fort
de l'Hermitage , à une lieüe
& demie d'icy qu'ils abandonnerent
: Mr le Maréchal
y envoya auffi -tôt cent
de nos Houffars avec leur
Capitaine nommé Bodaï ,
homme de reputation
, &
cent hommes d'Infanterie :
ils furent inveftis dans ce
Fort par une troupe d'Al
lemans ; mais Mr le Ma--
réchal de Tallard y eftant
allé avec trois cens hom…
134 Journaldu Siege
les ennemis prirent mes ,
auffi-tôt la fuite.
Les
Officiers
generaux
qui releverent
ce foir - là
la tranchée
font ,
Monfieur
le Marquis
de
Cayeux
, Lieutenant
general.
Mr le Baron d'Asfeld ,
Maréchal de Camp ,
Et Mr le Comte de Calvo
, Brigadier.
La tranchée fut montée
par
Un bataillon d'Aunix ,
de
Brifac.
135
Un de Froulay , bundy,
Un de Caſtaja ,
Et un de Caftelet à l'attaque
de la droite.
La tranchée fut auffi
montée à l'attaque de la
gauche , par
Deux bataillons de Sillery
,
Un de
Maubourg , &
deux cens Grenadiers
de
Bourgogne.
Il y avoit beaucoup de
Soldats de ce Regiment
malades lors qu'il paffa en
136 Journal du Siege
Baviere , & fes foldats
n'ayant pû le ſuivre. Monfeigneur
le Duc de Bourgogne
les avoit tous fait
Grenadiers & le nombre
en eſtant confiderable,
puis qu'il montoit à deux
cent , ce Prince en avoit
donné le commandement
à Mr le Marquis de Coetquin.
>
Environ entre onze heures
& minuit un foldat du
Regiment du Roy ne ſe
trouvant pour lors qu'à
de Brifac. 137
quatre toifes & demy de
la paliſſade , ſe mit en tête
d'aller arracher trois palifles
porter le lenfades
pour
demain
à Monſeigneur
le
Duc
de
Bourgogne
, il les
arracha
en
effet
, & ce fuccés
luy
ayant
enflé
le coeur
,
& ne voyant
perfonne
dans
le chemin
couvert
, il defcendit
dans
le
foffé
, &
ayant
reconnu
qu'il
n'y
avoit
que
trois
pieds
d'eau
,
il monta
fur
la demy
- lune
,
qui
eft
entre
la Ville
& le
M
138 Journaldu Siege
chemin couvert , où n'aïant
trouvé perfonne , il fe mit
à crier à moy , vive le Roy ,
en appellant les Grenadiers
à fon fecours. On délibera
dans la tranchée fi on ircit
à luy , mais on ne jugea
pas à propos de marcher
fans ordre. Ce brave Soldat
prit le parti de ſe retirer ;
mais en revenant il reçut
un coup de moufquet au
travers du corps. Il ſe ſouffrit
panfer avec toute la
fermeté poffible , & marde
Brifac 139
1
qua enfuite qu'il eftoit preſt
de s'expofer encore de la
même maniere , fi on vouloit
le luy permettre
.
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne envoya pendant
la nuit pour faire diligenter
une batterie de
douze mortiers .
Les Ennemis firent beaucoup
de fignaux fur la hauteur
de la Vallée de Saint
Pierre , & de leur plùs haute
Tour ; ce qui donna lieu
de croire qu'ils manquorent
Mij
140 Journal du Siege
de quelque chofe.
A la droite on pouſſa la
fappe jufqu'à l'angle faillant
du chemin couvert
de la lunette ; & à la gauche
jufqu'à la redoute du
Rhin. On continua auffi
de
travailler aux lignes paralelles
pour
cation
des
attaques
.
On
remarqua
que
les
ouvrages
des
Ennemis
du
baſtion
du
Rhin
, s'ébouloient
facilement
.
la communi-
Il y eut pendant la nuit
de Brifac.
141
un Capitaine , & cinq ou
fix Soldats tuez & fept
و
ou huit Soldats bleſſez .
Le 30. au matin on
s'apperçut que les Ennemis
avoient abandonné
. tous les Ouvrages pour fe
retirer dans le corps de la
Place.
On battit ce jour- là la
Place des batteries de la
tranchée avec vingt- quatre
pieces de Canon &
douze mortiers , & de la
batterie de l'Ifle avec qua
142 Journal du Siege
tre Pieriers , & huit mortiers
.
Pendant la nuit du 29 .
au 30. & toute la journée
du 30. juſqu'à l'heure
que la tranchée fut relevée
il n'y eut que dix Soldats .
tuez ou bleſſez . Le 30. au
foir la tranchée fut monréé
par
Mr de S. Moriz , Lieutenant
general .
Mr de Forfat , Maréchal
de Camp
Et Monfieur de S. Sede
Brifac. 143
cond , Brigadier.
Les Bataillons qui releverent
la tranchée étoient,
Le fecond bataillon de
Boulonnois
,
Un bataillon de Teffé ,
Un de Treceffon ,
Et un de Thoy.
Ces bataillons monterent
la tranchée à la droite
, & la gauche fut mon
tée par deux bataillons de
Robec , &
Par un de Vandergrat
Eſpagnol.
144 Journal du Siege
On fit pendant la nuit
deux cens cinquante toiſes
d'ouvrages à la Sappe de
la droite , & à la gauche
de cette droite , & on alla
juſqu'à l'avant - foſſé de la
feconde redoute. On felogea
à la droite fur l'avantfoffé
, qui eſt une flaque
d'eau en hyver , & un marais
en Efté .
Les ennemis ayant abandonné
le Château de Muntzingen
à l'aproche de l'Armée
, ainfi que je l'ay déja
marqué ,
de Brifac. 145
on y trouva
les
marqué , on y
quantité d'armes , cinq
pieces de canon , & beaucoup
de munitions que
ennemis avoient enterrées ,
& tout cela fut conduit
au Camp le 31. au matin
.
Le Regiment de Touraine
, commandé par M
de Maillebois releva la même
matinée la Garde du
Quartier General .
Trente neuf pieces de
canon en quatre batteries
N
>
146 Journal du Siege.
22
.
que
de
& trente - deux mòrtiers ,
& Pieriers avoient fait
grand feu toute la nuit.
La batterie que les
affiegez avoient fur la butte
ne parut plus tirer
trois pieces , mais leur
Moufqueterie ne ceſſa pas.
Ils nous tuerent ou blefferent
, tant durant la nuit
du 30, que pendant la
journée du trente - un environ
vingt cinq Soldats ,
& deux Officiers.
La breche du Baftion
de
Brifac.
147
de
Richelieu
parut fort
avancée
.
Mr de
Lapara
voyant
Mr le
Maréchal
de Vauban
fort
exposé
dans un
endroit
d'où il
regardoit
la Ville , en tira de force
ce
Maréchal
, & à peine
en fut-il
éloigné de
quelques
pas , qu'un
Sergent
qui eftoit
dans
le mefme
lieu
fut
coupé
en deux
d'un
boulet de
canon .
Le
mefme
jour 31.
Monfeigneur
le Duc
Aouſt
N
ij
148 Journal du Siege
de Bourgogne monta à
cheval àa l'iffuë de fon dîné
& ce Prince alla voir
les Troupes qui relevoient
la tranchée.
Les trois Bataillons de
Navarre monterent à la
droite.
La tranchée fut montée
à la gauche , par deux Bataillons
du Roy , & par
le Regiment de Laffay.
Les Officiers Generaux
eftoient ,
Mr le Marquis de Haude
Brifac. 149
tefort , Lieutenant General
,
Milord Galmoy , Maréchal
de Camp ,
Et Mr de Mouroux , Brigadier.
Quarante - deux canons
de nos batteries , & trente
- quatre mortiers firent
grand feu pendant toute
la nuit.
Les trois pieces de canon
qui reftoient aux ennemis
fur la butte , ainfi
qu'il a déja eſté marqué ,
Niij
150 fournal du Siege
ne furent point
augmentées
, de forte que le feu
qu'ils firent de ce lieu incommoda
beaucoup
moins
qu'il n'avoit fait auparavant.
Les ennemis firent une
batterie de cinq canons fur
le baſtion Mazarin qui tira
en écharpe fur la tranchée.
Celles de nos batteries
qui avoient eſté faites , les
premieres eſtant ſurmontées
par nos Sappes , &
nous ayant tué cinq homde
Brifac.
mes furent auffitoft avancées.
La Sappe fut pendant
la nuit avancée de quarante
toifes vers la gauche
, de forte qu'on laiſſa
derriere la redoute du haut-
Rhin . On paſſa l'avantfoffé
, aprés l'avoir comblé
avec des faffines : ainfi la
tefte de la Sappe n'étoit
plus qu'à quinze toiſes de
l'angle faillant du chemin
couvert de Vermandois :
ce baſtion eftoit déja fort
Niiij
152 Journal du Siege
éboulé . La demi- Lune qui
couvre la courtine , & celle
du baftion de fainte Croix
parurent auffi fort ruinées,
& le boulet du canon commençoit
à y labourer.
A l'attaque de la droite
on paſſa auſſi l'avant- foffé,
quoy que plus difficile à
combler. La Sappe ne pût
par la mefme raiſon eſtre
pouffée que vingt pas au
de-là elle eftoit le matin
à vingt- cinq toifes de l'angle
faillant de la contrede
Brifac. 153
garde du baſtion de Richelieu
.
A la gauche de ce travail
la Sappe fut pouffée
juſques au chemin couvert
de la Lunette , ou grande
redoute. On y defcendit ,
& on ſe logea , ainſi cet
Ouvrage fut abandonné.
Les ennemis jetterent quelques
Grenades & quelques
Bombes , dont nos Travailleurs
ne furent point
incommodez , les Grenades
eftant jettées du Rem154
Journal du Siege
part , & tombant
dans le
foffé , & les Bombes
crevant
en l'air. On n'eût pendant
la nuit que
quatre
foldats tuez
& quinze
bleffez ; mais la tranchée
fut plus meurtriere le lendemain
premier de Septuez
,
tembre , quatre Officiers ,
& trente foldats ayant eſté
ou bleffez : cela n'empécha
pas Monfeigneur le
Duc de Bourgogne d'y aller
aprés fon dîné , & même
d'y refter plus longde
Brifac. 155
temps qu'il n'avoit accoutumé.
Ce Prince ne fut
point content que Mr le
Maréchal de Vauban ne
luy eut montré la ſappe ,
il alla jufqu'au dernier gabion
qui avoit efté posé ,
& donna deux cens Louis
d'or pour eſtre diſtribuez
aux Canoniers & aux Sappeurs.
Il remarqua que
l'on
eftoit à dix toifes de l'Angle
du chemin couvert de
la contregarde de Richelieu
, & qu'on avoit tiré
156 Journal du Siege
à la gauche de la droite
deux branches vis - à- vis la
feconde redoute , une fur
la droite qui alloit gagner
l'Angle du chemin couvert
de la contregarde de
Richelieu. Ce Prince vit
auffi , qu'à la gauche de
la droite on avoit tiré deux
branches qui regardoient
la feconde redoute
, une
fur la droite qui alloit gagner
l'angle du chemin
couvert de la contregarde
de Richelieu , & celle de

de Brifac. 157
la gauche qui alloit fe communiquer
à l'angle du
chemin couvert du baſtion
du Rhin , où la gauche
eftoit environ à dix toifes.
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne n'étant pas content
des liberalitez dont
les travailleurs & les foldats
qui eſtoient à la tranchée
s'eftoient reſſentis , en
fit encore de particulieres,
aprés en avoir fait de generales
, & fit donner trois
ou quatre Louis d'or à cha158
Journal du Siege
0
cun des foldats bleffez qu'il
trouva fur fon paffage.
On ajoûta trois pieces
de canon aux batteries de
la tranchée.
Le foir du mefme jour
premier Septembre la tranchée
fut relevée à la
droite.
Par les deux bataillons du
Royal , & le Regiment de
Clermont & à la gauche.
Par deux bataillons du
Roy qui prefererent cette
attaque comme celle qui
·
de
Buifac. 159
leur paroiffoit la plus importante.
Et par le Regiment de
Tournaifis .
Les
Officiers
generaux
eſtoient ,
Mr le Marquis de Courtebonne
, Lieutenant general
,
Mr de Sainte Hermine ,
Maréchal de Camp ,
Et Mr le Comte de Polignac
Brigadier.
La nuit on ouvrit trois
Sappes à dix toifes de l'An160
Journal du Siege
gle faillant du chemin couvert
, & ces Sappes devoient
fe joindre pour y
former une paralelle.
Mr de la Frefeliere fit
faire deux batteries de quatre
canons chacune à la
droite de l'attaque pour
tirer à ricochet. Ces batteries
eftoient auffi deftinées
à battre la communication
de la Lunette avec
la demi - Lune de la
che , la face gauche du
baſtion de Sainte Croix ,
gau-
1
de Brifac.
161
& le flanc droit du même
Baſtion.
On fit auffi une batterie
de quatre mortiers à la
gauche , & une de cinq
canons dans l'Ifle pour ruiner
le flanc oppoſé au Baſtion
du Rhin , auquel on
avoit déja fait une grande
breche.
Il y eût pendant la nuit
trois Officiers & quarante-
cinq foldats tucz , ou
bleffez .
Monſeigneur
le Duc de
162 Journaldu Siege
Bourgogne
eftant monté
à cheval à l'iffuë de fon
dîné , ce Prince alla voir
defiler les Troupes
qui devoient
relever la Garde de
la tranchée
qui fut montée
,
Par Mr le Comte de
Rouffi Lieutenant general,
Mr le Comte de Nogent
Maréchal de Camp ,
Et Mr le Prince de Robec
Brigadier ,
Et par les deux bataillons
de Touraine
,
de
Brifac. 163
Un bataillon de la Couronne
,
Un d'Auxerrois ,
Un de Flandres ,
Et un de Baudeville .
Sur les dix heures du
foir on fit crier une fauffe
alerte dont on avoit averti
auparavant les travailleurs
, parce que ce n'étoit
que pour les favoriſer,
& les faire avancer. L'on
commanda en mêmetemps
dix Grenadiers de Touraine
avec chacun trois Gre-
O ij
164 Journal du Siege
nades pour fe mettre devant
eux , n'ayant plus que
quelques pas à faire
faire pour
pouffer leur travail jufqu'à
la paliffade.
On pouffa pendant la
nuit à la droite , fur le
Glacis & à l'Angle , faillant
vis-à-vis de la contregarde
de Richelieu
,
un
boyau en demi- cercle pour
empêcher les forties. Au
meſine Angle faillant , &
fur le Glacis du chemin
couvert on pouffa la trande
Brifac. 165
chée en paralelle à la Paliffade
tirant vers la demy
Lune entre les Baſtions de
Sainte Croix & de Riche
lieu . Deplus on communiqua
à la gauche de la Lunette
la tranchée avec l'attaque
de la gauche , & l'on
pouffa une Sappe pour
aller à la breche de la Lunette
vis -à-vis du Baſtion
de Vermandois , & fur
l'Angle faillant du chemin
couvert . Mc de Lapara
fit achever un logement
166 Fournal du Siege
avec beaucoup de valeur
& de conduite. Mr de
Riffe , Ingenieur qui l'avoit
commencé
par fes
ordres à la tefte d'un Sergent
& de quinze Grenadiers
y fut tué . Les Ennemis
firent un grand feu
pendant la nuit , tant de
Moufqueterie que de grenades
, bombes & canon .
Ils brûlerent quelques Gabions
avec des fafcines
gaudronnées qu'ils jetterent
du rempart , il n'y a cut
de Brifac. 167
cependant que douze ou
quinze Soldats tant tuez
que bleffez : Cependant
la communication
ſe trouva
faite des deux attaques
de la gauche de la droite ,
à la droite de la gauche ,
& tout a fait à la gauche ,
& comme l'on avoit coulé
le long du Rhin , on eſtoit
à quatre toiles de l'Angle
du chemin couvert du
Baſtion du Rhin .
Le 3. à la petite pointe
du jour Mr le Comte de
168 Journal du Siege
Rouffi courut un fort
grand riſque , un éclat de
bombe ayant coupé en
deux un Soldat qui eſtoit
à fon côté droit.
Sur les dix heures du
matin Mr de Carriere , Ingenieur
fut tué d'un coup
de Canon .
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne ayant mangé
de bonne heure alla vifiter
la tranchée
& y refta pendant
quatre heures avec
M de Vauban, Les affiegez
de Brifac 169
,
gez avoient toûjours fur
la butte trois pieces de canon
& une batterie de
cinq pieces fur le Baſtion
Mazarin qui voyïoient nos
Ouvrages en écharpe.
Monſeigneur le Duc de
Bourgogne eftant encore
dans la tranchée , on prit
en preſence de ce Prince ,
la Redoute ou Lunette ,
I qui eft entre deux demi-
Lunes , & l'on fit un lo-
Igement dans l'épaiffeur du
parapet de la face droite à
Р
170 Journal du Siege
l'égard des attaquants. Il
n'y eût qu'un foldat bleffé,
deux ou trois tuez , & un
Ingenieur volontaire.
Sur les quatre heures
aprés midy , une bombe
de la Ville tomba dans
une de nos batteries , &
mit de feu à trois barils de
poudre , dont il n'y eût
qu'un homme bleffé.
La Garde de la tranchée
fut relevée le 3. au
foir.
Par M le Marquis de
de
Brifac 171
Surville , Lieutenant General.
Mr le Comte de Vaillac
Maréchal de Camp.
Et M le Chevalier de
Croiffy Brigadier.
La tranchée fut montée
à la droite.
Par le premier bataillon
du Royal Italien.
Et les deux de Santerre.
Et à la gauche ,
Par deux bataillons de
· Greder Allemands.
Et
par
le fecond Ba-
Pij
172 JournalduLSiege
taillon de Sourches.
L'Ingenieur qui eftoit
à l'attaque de la gauche ,
où commandoit Mr de
Vaillac , luy propofa de
tafter le chemin couvert ,
Cavec quinze Grenadiers
Mr de Vaillac luy répondit
, qu'il ne fçavoit ce que
de tâter , qu'il c'étoit
que
alloit l'attaquer avec fes
deux Compagnies de Grenadiers
de Greder Allemand
, & que s'ils nefuf-
•fifoient pas il feroit venir
de Brifac. 173
le Regiment tout entier , &
fur les neuf à dix heures
du foir il fit fortir les deux
Compagnies de Grenadiers
du Regiment de Greder
du logement où ils étoient,
fur l'angle faillant du chemin
couvert du baſtion de
Vermandois ; ils fe jetterent
auffi - tôt dans le chemin
couvert , qui n'étoit
gardé que par vingt - cinq
hommes , lefquels aprés
avoir fait leur décharge ,
rentrerent dans la Place ,
P iij
174 Journal du Siege
ayant abandonné leurs ar
mes , dont une partie étoit
encore chargée , & quantité
de poudre , & autres
munitions , ainfi les Grenadiers
fe rendirent maîtres
de deux traverſes de
la Place d'armes du chemin
couvert vis-à-vis la face du
baſtion de
Vermandois , &
firent un logement fur le
chemin couvert de cinquante
toiſes , nonobſtant
le tres-grand feu de moufqueterie
, de Grenades , &
de
Brifae. 175:
de canons chargez à cartouche
que firent les ennemis.
Des quatre Offciers
de la feconde Compagnie
des Grenadiers trois
furent tuez & un bleffé ,
& dans les deux Compagnies
il y eut trente- cinq
Grenadiers tuez ou bleffez :
rs de Leife & Duquartier
Ingenieurs furent du
nombre des morts , ainfi
que les deux premiers Capitaines
du Regiment de
Greder qui étoient de tran
Mrs
P
iiij
176 Journal du Siege
chée. A la droite on pouſſa
la tranchée qui embraſſoit
l'angle faillant du chemin
couvert de la contregarde
du Baſtion de Richelieu ,
pour aller joindre la Lunette
où l'on faifoit la fappe.
Les ennemis y firent
une fortie de huit hommes
qui rentrerent fans ofer tirer
. Ils avoient fait à la
mefme pointe de l'angle
du chemin couvert de la
contregarde de Richelieu :
Une Fougaffe : mais ayant
de
Brifac. 177
5
1
mis le feu trop tôt , elle
ne bleffa & n'enterra per- -
fonne : on n'eût de ce côté-
là qu'un foldat bleſſé ,
& quinze travailleurs. La
breche que la batterie de
l'Ifle avoit fait au Baſtion
de Vermandois inquieta
beaucoup les ennemis pendant
toute la nuit , ils y
jetterent quantité de feux,
e & ils y tirerent beaucoup,
1 ils couperent quelques arbres
fur les baſtions qui
vont au pied de la butte du
t
178 Journal du Siege
Moulin pour ſe retrancher
autour. On fit pendant la
nuit foixante toifes de travail.
On travailla à un Pont
de fafcines pour conduire
au Baftion qui eftoit tout
éboulé.
Il y avoit alors une breche
de cent trente toifes
aux deux faces du Baſtion
d'auprés la porte de Fribourg.
On avoit fait approcher
dés le jour deux
batteries
de vingt pieces
de canon pour ruiner les
1
de
Brifac.
179
1
S
S
deffenfes des Baſtions &
Courtines qui deffendoient
la breche , & la batterie
Royale de cinquante pieces
de gros canons , & de
quarante mortiers à bombes
tirant continuellement
dans la breche pour la rendre
moins efcarpée. Les
Affiegez tirerent fort peu
pendant le jour ; mais ils
firent un feu continuel de
I moufqueterie pendant la
nuit : on jugea par les fignaux
qu'ils firent , & par
180 Journal du Siege
les feux qu'ils allumerent
que leur inquietude eſtoit
grande. Ils abandonnerent
plufieurs Baſtions pour jetter
toutes leurs forces du
côté de l'attaque.
Le fable amaffé auprés
de l'Eclufe du haut
du Rhin empêcha les eaux
d'entrer dans les foffez
,
ce qui fit un grand plaiſir
aux affiegez. On prepara
quantité d'échelles au
neuf Brifac.
J
Sur le foir du 4. on arde
Brifac. 181
rêta un Eſpion chargé de
lettres du Gouverneur de
Fribourg
› pour
Mr
le
Compte d'Arco. On apprit
que ce Comte eftoit
en mauvaiſe intelligence
avec le General Marfilly .
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne alla à ſon ordinaire
voir défiler les
Troupes qui devoient rélever
la tranchée .
Mr le Comte d'Horn ,
Lieutenant General releva
à la gauche Monſieur de
182 Journal du Siege
Vaillac à la teſte.
Du Regiment de Nice ;
D'un Bataillon d'Orleanois,
Et d'un de l'Ile de
France.
Mr le Marquis du Châtelet
, Maréchal de Camp
releva à la droite ,
Avec le Regiment de la
Marche ,
Et deux Bataillons de
Hainat Wallon.
Mr de Signy , Brigadier
monta auffi la tranchée .
de Brifac. 183
1
*
à
La nuit du 4. au 5. a
la droite , l'on pouffa
la Sappe une ligne droite
devant la pointe de l'Angle
faillant de la Contregarde
de Richelieu , &
l'on travailla à deux autres
Sappes à droite & à gauche
de cette ligne pour
l'embraffer
entierement .
A la gauche la Sappe fut
continuée dans le chemin
couvert jufques à la preiniere
place d'armes de la
droite de la demy -lune
184 Journal du Siege
du Baſtion de Ste Croix ;
l'on pouffa auffi une Sappe
fur l'Angle faillant du che◄
min couvert de la demy
lune , & de là jufqu'au
Rhin une paralelle. On fit
auffi au bord du Rhin une
nouvelle batterie de quatre
pieces qui battirent en
breche le Flanc qui défend
la face du Baftion de
Vermandois qui regarde
le Rhin. On fit deux def
centes dans le foſſé qui
eftoit prefque comblé avec
de Brifac. 185
des fafcines. On approcha
du rempart une batterie
de mortiers qui en eftoit
affez éloignée . Une bombe
eftant tombée ſur un
corps de Cafernes y mit le
feu , & il ne put eftre
éteint que le matin .
Les affiegez ne firent
qu'un feu tres - mediocre
pendant la nuit , & le
nombre des Soldats bleffez
ne fut que de ſept ou
huit.
Les ennemis qui n'a186
Journal du Siege
voient fait aucun mouvement
depuis le commencement
du Siege , & qui
eftoient toujours reftez
dans leurs retranchemens
de
Stoloffen ,
prevoyant
que leurs Alliez s'en pourroient
plaindre , refolurent
d'entrer en mouvement ,
& pour cet effet ils firent
conftruire un Pont fur le
Rhin à Drufenheim , à cinq
lieues au deffous de Srafbourg
, & commanderent
à tous les Paifans de fe troude
Brifac. 187
ver le 5. Septembre à Drufenheim
pourpaffer dans la
baffe Alface ; mais comme
nous avions cinq à fix mille
hommes fur le Canal
de Strasbourg à Molsheim
pour garder ce paffage qui
eftoit fortifié par des Redoutes
de diftance en diftance
, il y avoit peu d'ape
parence qu'avec une auffi
petite Armée que celle des
ennemis ils puffent forcer
les retranchemens faits le
long de ce Canal : cepen
Q ij
188 Journal du Siege
4
dant pour ne rien negliger
on detacha de l'Armée
le mefme jour cinquiéme
avant le jour , trois mille
chevaux qui partirent du
Camp, & pafferent le Rhin .
Ce detachement compoſé
de huit hommes par Compagnie
de la Gendarmerie ,
Cavalerie , & Dragons ,
partit du Camp , & paffa
le Rhin , conduit par Mrs
de Vertilly , & de Blanfac.
On vint avertir Monſeigneur
le Duc de Bour'
de
Brifac. 189
1 gogne , que M¹le Prince de
Bade avoit fait un mouvement
vers le Wirtem-
Iberg
pour fecourir Brifac ;
+ & quoy qu'il parut que ce
Prince ne pouvoit
revenir
affez à temps , on ne laiſſa
pas de redoubler
les Gardes
du Fort de Weimar
, qui
eftoit le feul endroit
par
les Affiegeans
pouvoient
eftre inquietez
.

La tranchée fut relevée
le foir.
Par Monfieur de Marfin
190 Journal du Siege
Lieutenant general .
2
Mr de Joffreville Maréchal
de Camp ,
Et Mr de Raffetot Brigadier.
Un bataillon de Brie.
Un de Monroux.
Et deux de S. Second .
Monterent à la gauche
qui eſtoit devenuë le poſte
d'honneur.
Un bataillon d'Aulnix.
Un de Froulay.
Un de Caftelet .
: Er un de S. Second .
de
Brifac. 191
Monterent à la droite .
On travailla toute la
nuit , à la gauche , à la
I defcente du foffé . Mr de
Marfin demeura toujours
à la tefte des travailleurs ,
il parut infatigable , & fit
travailler avec tant de dieligence
, qu'il fit combler
: le baftion de Vermandois
avec des fafcines.
A la droite on pouffa les
paralelles de communication
fur les angles du chemin
couvert , & l'on y
192 Journal du Siege
établit la batterie de quatre
pieces qui n'avoit pû
eftre achevée le jour precedent
& qui ne tira
point fans faire tomber
quelque pan de muraille.
Les travailleurs evanterent
vne mine vis - à - vis du baftion
de fainte Croix.
On n'eut pendant la
nuit que huit foldats blef
fez , & M de la Brigaudiere
Commiffaire d'Artillerie
qui fut bleffé au bras
d'un coup de biſcayen.
Mr de
de Brifac. 193
S
zonMode Laubanie partit
le matin du fixiéme avec
un détachement de dixhuit
cent chevaux pour
aller joindre les Troupes
du Canal de Molsheim
, fur l'avis que l'on
eut que les Ennemis qui
ayoient fait un Pont à Drufenheim
avoient paffé le
Rhin & que toute leur
Cavalerie avoit couché
à Haguenau , ce qui fit
croire qu'ils en vouloient à
Saverne.
R
194 Fournaldu Siege
A la pointe du jour nos
batteries redoublerent leur
feu & les Ennemis ne
croyant pas eftre en ſeureté
, la breche eſtant allez
grande pour qu'un Ba
taillon y puft montér de
front , arborerent
l'Etendare
blanc fur les deux
heures , & demanderent
des oftages
.
Avant que de Capitu
ler Mr le Comte d'Arco
& Mr de Marfilly qui ne
s'eftoient pas bien accor'
de Brifac. 195
dez pendant le Siege , eurent
enſemble une groffe
difpute. Mr le Comte
d'Arco qui avoit reçu
une lettre de Mr de Bade
qui luy mandoit de tenir
juſqu'à la derniere extreinité
differoit de fe rendre
& excitoit tous les Bourgeois
à le feconder ; mais
Mr de Marfilly luy dit
qu'ils ne pouvoient pas fou
tenir un affaut , qu'il ne
falloit pas rifquer toute une
Ville , & que quant à luy il
Rij
196 Journal di Siege
ne vouloit pas faire pertr
fon Regiment , & qu'il luy
•feroit mettre les armes bas.
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne qui devoit ce
jour là , aller voir le logement
du chemin couvert
& vifiter la tranchée , ne
fortit point & vit les oftages
qu'on luy amena , ce
Prince loua leur valeur &
leur deffenſe , & aprés
leur avoir parlé fort gracieuſement
, ordonna qu'ils
fuffent régalez.
de
Brifac. 197
Le canon continua de
tirer dans les Parcs d'Artillerie
, le matin du jour
fuivant , afin de faire croire
aux ennemis que la place
n'avoit pas encore capitulé
.
Monſeigneur le Duc de
Bourgogne avoit choiſi
M de la Baume , fils de Mr
le Maréchal de Tallard
pour porter au Roy la
nouvelle de la réduction
de la Place . Mais Mr de
Tallard le fupplia tres- inf-
R. iij
198 Journaldu Siege
tamment de choisir quelqu'un
attaché auprés de fa
perfonne & qu'il honoraft
de fon affection . Monfeigneur
le Duc de Bourgogne
infifta fort ; mais
Mr de Tallard ayant continué
de s'en deffendre
ce Prince nomma Mr Dénonville
, l'un de fes Aides
de Camp.
Sur les dix heures du
foir l'Intendant de l'Armée
alla porter à Mr le Comte
d'Arco la Capitulation
de Brifae. 199
avec les changemens que
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne avoit jugé à
propos d'y faire ; ce Comte
les acceptan & figna
Elle contendit les vingt
un articles qui fuivent.
R iiij
200 Journal du Siege
2
CAPITULATION.
Articles des conditions propofées
par Monfieur le
Comte d'Arco , Gouverneur
de Brifac , Maréchal
,
Lieutenant
general
de S. M. I. pour la
reddition de cette Place.
I.
Mr le Comte d'Arco
avec fes Officiers , & tou
de
Brifac.
201
te fa Garniſon fortira de la
Place dans trois jours , à
compter de celuy que la
Capitulation fera fignée ,
tambour battant , drapeaux
deployez , avec armes &
bagages , balle en bouche,
& autres honneurs , cinquante
coups à tirer chacun
& par la breche , qu'ils
pourront coucher le même
foir à Muntzingen , & le
lendemain arriver à Fribourg
, ou bien ils pourront
fejourner deux ou trois
1
202 Journal du Siege
jours audit Muntzingen
pour accommoder leursbagages
; & fi M le Comte
d'Arco ou quelqu'autre
Officier de la garnifon n'eſt
pas preft , qu'il pourra encore
demeurer deux ou
trois jours pour ſe preparer.
,
I.
Monfieur le Comte d' Are
co livrera demain 7. Sep¬
tembre à fix heures du ma→
tin la Porte- neuve , qui eft
lapremiere du coftédu haut
de Brifac
203
• Rhin , vers le Brifgaw , &
La Garnifon fortira aprés
= demain 8. avec les marques
d'honneur demandées.
Imême par la breche : les ba
gages par le Pont de ladite
• porte les Saldats ayant
chacun trente -fix coups
tireriront coucher à Muntzinghen
, le lendemain à
Mullen aù ils auront fe¬
à
jour , de là à Hertingen ,
aprés à Lorch où ils auront
fejour , enfuite à Intztigen,
de là à Rinfeld.
204 Journal du Siege
Les Officiers qui ne feront
pas prefts pourront demeurer
deux jours dans la
Ville aprés le depart de la
Garnifon , le tout à leurs
dépens.
II.
Que tous les canons &
& mortiers aux Armes de
S. M. Imperiale pourront
eftre emmenez avec cinquante
coups à tirer pour
chacun , & l'on fournira les
Chevaux neceffaires pour
les tirer.
1
de
Brifac. 205
H.
Accordé quatre pieces de
vingt-quatre , une defeize,
& une de douze , & deux
mortiers , l'un du premier
rang ,
l'autre du
fecond
rang , & les chevaux
neceffaires
pour les tirer.
III.
Tous les
Bourgeois &
Habitans
de la Ville de
Brifac
demeureront
dans
l'exercice de leur
Religion,
& les Officiers
de la Ville
qui font en charge ne
206 Journal du Siege
feront point deftituez ;
& les Capucins demeureront
felon la Capitulation
du 17. May 1700. faite
entre l'Autriche & les Cantons
Suiffes.
III.
Il en fera ufé à l'égard
de la
Religion
quan
comme
quand la Ville eftoit au
Roy ; au furplus Monfeigneur
ne veut pas fe lier
les mains.
I V.
Tous les chevaux & basyde
Brifac. 207
ages qui appartiennent
aux Officiers.our Soldats
aufervice de S. M. Imperiale
, auffi-bien que les Chevaux
des vivres fortiront
librement.An q l
IV.
A Accordé en ce qui ne
concernera que les Troupes.
V.
L'on fournira fix cents
Chariots attelez de quatre
chevaux chacun , pour la
conduite des bagages , les
femmes des Officiers , &
208 Fournal du Siege
leurs familles , les bleffez &
les malades.
V.
Accordé trois cens Chariots.
V I. L
Il pourra refſter un Medecin
& un Chirurgien
des Troupes de l'Empereur
dans la Ville avec les bleffez
qui feront nourris aux
dépens de S.M.T. C. &
enfuite les Convalefcens
feront
conduits aux depens
du Roy à la premiere garnifon
Imperiale
.
de Brifac. 209.
V I.
Accordé.
VII.
Mr le Comte d'Arco ,
fes Officiers , & toute fa
garniſon , & tout autre
Officier au fervice de Sa
Majeſté Imperiale , Ingenieurs
, ou des vivres , ou
autres , feront conduits à
Fribourg en toute ſeureté ,
avec les Paffeports neceffaires.
VII.
Accordé à Mr le Com-
S
210 Journal du Siege
te d'Arco , & à Mr de
Marfilly feulement d'aller
à Fribourgavec leurs équipages
, le refte marchera
avec la garnifon , qui fera
efcortée jufqu'à Rhinfeld.
.
VIII.
Les bagages & meubles
qui ne pourront eſtre d'a¬
bord emmenez
, pourront
refter dans la Ville l'efpace
de trois mois , pendant lefquels
il fera permis de les
vendre. VIII.
Accordé
fix femaines
.
de
Brifac.
211
IX.
Mr le Comte d'Arco &
toute fa garniſon , pourront
faire des fejours de
1 deux ou trois jours en fe
retirant dans leur marche.
IX.
Accordé à leurs depens.
X.
L'on
n'inquietera perfonne
de la garniſon , ny
femme ny homme , & on
ne leur prendra
aucun meuble
ny bagage , l'on échangera
generalement
tous les
S ij
212 Journal du Siege
Prifonniers qui auront eſté
faits de part & d'autre depuis
la Declaration de la
guerre.
X
..
Accordé, & l'on échangera
les Prifonniers faits
entre l'Armée & la Garnifon.
XI.
Tous les Bourgeois &
Habitans Chreftiens &
Juifs feront compris dans
cette Capitulation , &
maintenus dans leurs frande
Brifac. 213
chifes & libertez , il leur
fera permis d'acheter tout
les meubles , grains & autres
effets que la Garnifon
ne pourra ny ne voudra
emmener , & particulierement
il fera permis au
Juif Confpurg de demeu
rer dans la Ville , & aller
librement par le Pays pour
fes affaires
particulieres
pendant l'espace de fix femaines
, & luy fera auffi
permis de vendre à ſon gré
& quand il le voudra , les
214 Journal du Siege
grains
qui font dans fa
maifon .
XI.
Accordé pour ce qui eft
aux particuliers
, & non à
Sa Majesté Imperiale. Le
Juif Confpurg pourra de+
meurer pendant
quinze
jours dans la Place.
XII
Les dettes des Officiers
& Soldats de la Garnifon
feront déclarées dans vingtquatre
heures aprés la Capitulation
concluëmmen 30
de
Brifac. 215
XII.
Accordé.
XIII.
Les Bourgeois à qui les
Officiers devront quelque
argent emprunté pour
leur fubfiftance & dépenfe
ne pourront les faire
arrefter , & lefdits Bourgeois
fe contenteront des
billets qui leurs feront
donnez par lesdits Officiers.
XIII.
Accordé
216 Fournal du Siege
XIV.
Les Bourgeois & Habitans
de Brifac auffi bien
que les Habitans du Pays
ne demanderont rien pour
la viande ou vin pris , ou
donné , non plus que pour
les paliffades & bois ruinez
, & l'on ne retiendra
point les oftages donnez
de part & d'autre fous ce
pretexte , ny fous aucun
autre .
XIV.
Accordé,
X V.
de Brifac. 217
XV.
Si les bagages , les meubles
& les biens en fond
appartenant à M¹ le Comte
d'Arco & aux Officiers
de la Garniſon ne peuvent
eſtre emmenez d'abord
ils pourront les laiffer dans
la Place , & il en fera ufé
à cet égard comme dans
l'article precedent .
XV.
Accordé un mois.
XVI.
L'on ne vifitera point
T
:
218 Journal du Siege
les équipages des Officiers
ny douze Chariots de
Payfans couverts , & l'on
ne rendra aucun Déferteur
François .
XV I.
Accordé fix Chariots
couverts qui ne feront point
vifitez , les Deferteurs
François feront repris.
XVII.
Les Chariots & chevaux
qui feront fournis
aux dépens de S. M. T. C.
pour la Garniſon , feront
de Brifac.
219
pour plus de commodité
relevez en chemin ; & l'on
me fera que trois lieuës
jour.
XVII.
par
Ils pourront faire relever
-les Chariotsfur les terres de
t'Empereur , accordé trois
lieuës par jour.
XVIII.
Il fera permis à tous
ceux qui feront réfugiez
dans la Place , tant hommes
que femmes , & domeftiques
, d'en fortir avec
Tij
220 Journal du Siege
leurs effets aprés la Capr
tulation fous écrite, & aller
où bon leur femblera , ou
bien refter dans la Villes
XVIII.

Accordé ,
pourveu que
fous ce pretexte
on n'enleve
rien des effets de l'Empereur.
XIX.
Il fera permis à tous les
Officiers & Soldats de la
Garnifon de prendre avec
eux des vivres pour huit
jours , tous les Bourgeois
1
de Brifac.
221
tant Laïques que Ecclefiaftiques
feront remis en
poffeffion & joüiffance de
leurs biens confifquez , &
l'Artillerie ne pourra rien
prétendre aux Cloches de
la Paroiffe & du Couvent.
XIX
Accordé la permiffion de
prendre des vivres pour
quatre jours , le furplus
fera amplement examiné.
La demande pour les Cloches
refufée , comme hors
dufage.
T iij
222 Journal du Siege
XX.
Il fera donné de part &
d'autre pour la feureté de
la Capitulation
des Oftages
qui ne feront point
rendus que les articles ne
foient
fidellement
executez.
XX.
Accordé.
XXI.
Il fera deffendu aux
Troupes du Roy d'inquie
ter aucun . Soldat à la fortie
de la Garniſon , ny
de
Brifac. 223
1
de les tirer hors des rangs į
ny prendre les Déferteurs
pour les engager quand
même ils levoudroient . Fait
le feptiéme Septembre
1703. Signé , PHILIPPES ,
Comte d'Arco .
X X.
Accordé, à
l'exception
des
Déferteurs
François .
Signé, LOUIS.
Le 7. à la pointe du
jour on apporta la Capitu
lation à Monſeigneur le
T
iiij
224 Journal du Siege
Duc de Bourgogne : Aufſitôt
que ce Prince l'eut fignée
, le Regiment de Navarre
marcha à la porte du
Coffre , qui eft proche du
haut-Rhin , & qui luy fuc
livrée. Mr le Maréchal de
Tallard partit pour Strafbourg
, où il devoit trouver
onze Eſcadrons de Cavalerie
qui avoient toujours
efté en Alface , trois mille
chevaux qu'il avoit detachez
de cette Armée en
deux fois , onze bataillons.
de Brifac. A
225
I entiers , & trois mille hommes
choifis de cette même
Armée , dont il y avoit dixfept
Compagnies de Grenadiers
qui furent embarquez
fur les batteaux du
Pont de Brifac du bas-Rhin
qu'on avoit rompu , & par
ce moyen ils furent plûtôt
à Strasbourg que la Cavalerie.
Les Lieutenans generaux
detachez eftoient MES
de Clerambaut , de Sainte
Hermine , de Gramont , &
Mr le Comte de Rouffy ,
226 Fournal du Siege
qui demanda à y marcher
comme Volontaire , parce
que ce n'étoit pas fon tour.
Les Maréchaux de Camp
eſtoient Mr le Prince Camille
, Mr le Duc d'Humieres
, Mr d'Imecourt , &
Mr le Chevalier d'Asfeld .
Ce même jour on travailla
avec toute la diligence poffible
à rétablir le Pont de la
porte par où devoit fortir
la Garnifon.
Monſeigneur le Duc de
Bourgogne monta à chede
Brifac. 227
val l'apreſdinée , & alla à
decouvert vifiter les travaux
& les tranchées : ce
Prince parla aux Oſtages
pendant fon dîné d'une maniere
tres- gracieuſe .
La Place n'eft nullement
endommagée , fur tout la
haute Ville , le canon étoit
demonté , & il ne reſtoit
qu'un feul Canonnier : ils
pouvoient cependant tenir
plus long - temps à caufe
de plufieurs retranchemens
qu'ils avoient faits : mais ils
228 Journal du Siege
craignoient l'aſſaut. Onmit
dans cette Place en garnifon
les Regimens de Tournaifis
, de Boulonnois , de
l'Ile de France , de Laffay,
de Maubourg , de Trecef
fon , de Caſtelet , de Cafteja
, de Clermont , & de
Thoy: mais ce dernier devoit
fortir lors que les bréches
feroient hors d'infulte.
Le matin du 30. trois
cens Chariots de Païfans
qu'on devoit fournir à la
Garniſon pour emmener lẹ
de Brifac. 229
Bagage , entrerent
dans
Brifac & la Garnifon fe
¿diſpoſa à ſortir le ſoir. Monfeigneur
le Duc de Bourgogne
receut avis que les
ennemis avoient paffé le
Rhin , & formé le Siége
du Château de Biſcheveiler
où il y avoit trente - cinq
homines que Monſeigneur
le Duc de Bourgogne avoit
accordé à M le Prince
de
Birkenfeld pour le garder
; les Ennemis avoient
jouvert lé 6. la tranchée de
f
230 Journaldu Siege
vant ce Château , & le battoient
avec fix pieces de
canon & deux mortiers , ils
apprirent , magré toutes
les precautions qu'on avoit
priſes la reddition de Brifac
, & leverent le Siége
fi promptement qu'on ne
les pût joindre. Ils repafferent
le Rhin : cette entreprife
avoir efté faite par
Mr le Comte de Frife .
Mr de Corberon premier
Prefident de Colmar , à la
tête de tout le Corps qui
de Brifac 231
forme la Juriſdiction , vint
feliciter Monfeigneur le
Duc de Bourgogne par un
difcours fort éloquent.
Sur les quatre heures
aprés midy ce Prince monta
à cheval , & alla voir la
la Garnifon défiler . Mr le
Comte d'Arco Gouverneur
, & Mr de Marfilly
Commandant , eftoient à la
tefte , ils faluerent Monfei
gneur le Duc de Bourgo
gne , defcendirent de che
val , & vinrent luy acco232
Journal du Siege.
ler la botte , & luy baiſer
la main. Le premier luy
dit fort peu de choſe en
Allemand , & le ſecond
qui parloit mieux François ,
luy dit , que dans le malbeur
où il fe trouvoit d'avoirperdu
à l'Empereurfon
Maiftre une fi importante
Place , il avoit la confolation
de ne l'avoir renduë
qu'à un tres -grand Prince ,
digne des plus grandes
Conquêtes.
Les Regimens qui comde
Brifac.
233
pofoient la garniſon étoient
le vieux Baden , Bareith ,
Marfilly , Gratz , & un
bataillon Suiffe : fi le tout
avoit été complet , il auroit
du faire huit mille hommes
, mais on n'en compta
qu'environ trois mille ; en
forte que les Affiegez ayant
perdu cinq à fix cens hommes
pendant le Siege , &
plufieurs Soldats ayant pris
parti dans nos Troupes
avant que de fortir de la
Place , on jugea que cette
V
234 Journal du Siege
garnifon eftoit de quatre
mille hommes au commencement
du Siege.
On trouva dans la Place
outre quantité de provi-:
fions , trente-fept pieces de
canon de fonte , & autant
de fer , huit mortiers , cent
quatre - vingt milliers de
poudre , cinquante milliers
de plomb , quinze cens
boulets , quinze cens bombes
, & quelques moufquets
& point de pierres à
fufils ; ce font les deux cho
L
de Brifac 235
fes dont ils manquoient
principalement
. Il y a eu
pendant tout le Siege beaucoup
de divifion entre Mr
le Comte d'Arco & Mr le
Comte de Marfilly.
Mr de Marfilly avoit envoyé
le matin à M¹ de Vau
ban un cheval de plus de
trois cens piſtoles , en l'envoyant
complimenter; mais
Mr de Vauban le luy renvoya
& luy fit faire de
grandes honneftetez.
M' de Marfilly ayant re-
V ij
236 Journal du Siege
joint fa troupe , trouva Mª
de Marfin , & charmé de
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne , il luy demanda
s'il voudroit bien luy
obtenir la grace de le voir
fouper. Mr de Marſin le
mena chez ce Prince , &-
luy dit que M de Marfilly
luy demandoit en grace
de luy permettre de le
voir fouper. Monſeigneur
le Duc de Bourgogne
luy répondit , qu'il le verroit
bien mieux à table ,
de Brifac. 237
s'il s'y vouloit bien mettre
avec luy , & que cela
luy feroit beaucoup de
plaifir. Ce Comte voulut
s'en excufer fur ce qu'il
avoit mangé , mais enfin
il fut forcé par les honnêtetez
de ce Prince de fe
mettre à table à fon coſté
droit.
Monſeigneur le
Duc de Bourgogne l'entretint
pendant tout le repas,
& la converfation fut vive.
Au fortir du ſouper ce
Comte affifta au coucher
238 Journal du Siege
de ce Prince qui luy fir
donner le bougeoir. Il
vouloit dés le foir aller rejoindre
fa Compagnie ;
mais Monfeigneur le Duc
de Bourgogne luy fit connoiftre
qu'il eftoit fort
tard , & que le lendemain
il la rejoindroit facilement ,
ce Prince chargea Mr de
Sailly d'avoir foin de luy.
Le 9. Monfeigneur le
Duc de Bourgogne fe leva
de bonne heure . Mr de
Marfilly qui avoit couché
de
Brifac. 239
dans une maison qu'on luy
avoit fait preparer , vint au
lever de ce Prince , mais il
trouva le lever fait ; il l'accompagna
à la Meffe , l'entendit
, & luy vit faire fes
devotions. Monſeigneur le
Duc de Bourgogne luy demanda
en fortant de la
Meffe , s'il vouloit bien encore
luy faire le plaifir de
diner avec luy ; mais il s'en
excufa fur ce que ſon abfence
feroit trop longue.
Ce Prince luy dit , qu'on
240 Journal du Siege
alloit donner ordre à cinquante
de fes Gendarmes .
defe tenirprefts pour l'escor
ter ; mais qu'en attendant
on alloit luyfervir à dîner.,
Ce qui fut fait auffi- toft
que Monfeigneur le Duc
deBourgogne en eut donné
l'ordre à M de Cambray ',
Maiſtre d'Hoſtel du Roy ,
qui l'a fervi pendant toute
la Campagne. M' de Marfilly
dîna , & l'on reinarqua
qu'il avoit beaucoup
de peine à s'en aller. Il dit
même
de
Brifac. 241
même, que s'il avoit ofé il
auroit encore une fois pris
congé de Monfeigneur le
Duc de Bourgogne , tant il
eftoit charmé de ce Prince.
Mr le Maréchal de Rofen
vint luy faire compliment
fur fa conquefte , & eut
l'honneur de dîner avec ce
Prince.
+
Les Bourguemeftres &
les Principaux de Brifac
vinrent faluer Monfergneur
le Duc de Bourgogne
, & luy dirent , qu'ils
X
242 Journaldu Siege
avoient toujours efté trap
bons & trop fidelles, Serviteurs
du Roy, pour ne pas
esperer qu'il leur envayeroit
dans peu un Ange
pour les délivrer de la fervitude.
Il eft conftant que les
Habitans de Brifac avoient
toûjours confervé beaucoup
d'inclination pour
la France , depuis qu'ils
eftoient tombez fous la
domination des Allemans
& qu'ils ne refpiroient

X
de Brifac. 243
qu'à s'en voir délivrez. ✨
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne dit ce jour-là
Mr de Raouflet , Major de
Navarre , que le Roy le
faifoit Lieutenant de Roy
de Brifac , & qu'il n'eut
pas fait un autre & meilleur
choix file Roy l'en avoit
Laiffe le maistre ,& qu'ill'en
felicitoit.
à
S. M. avoit auffi nommé
Mr de Reignac , qui com
mandoit dans Limbourgi
pour.commander dans Bri
X ij
244 Journal du Siege
fac, & M le Chevalier Cor
bet , Capitaine des Grenadiers
du Regiment Royal ,
pour fervir dans la même
Place , en qualité de Major.
Mr le Maréchal de Tallard
qui eftoit allé avec le
Détachement , revint ule
10. & l'on apprit que Mr
le Comte de Frife n'avoit
pas tiré grand honneur de
fon expedition , puifqu'il
n'y avoit dans Beſcheveiler
que vingt - cinq hommes
& un Lieutenant. On
de
Brifac. 245
eut avis que ce Comte ,
aprés avoir repaffé le Rhin
à Drufeinheim
, avoit fait
defcendre fon Pont vers le
bas Rhin.
Mr le Maréchal de Tallard
rendit compte à Monfeigneur
le Duc de Bourgogne
de tout ce qui s'étoit
paſſé. On acheva de
combler les tranchées ; on
déchargea les mines des
ouvrages de la Place , &
l'on déchargea les bombes.
Il fe trouva plus de muni-
X iij
2462
Journal du Siege
tions dans les magafins ,
qu'il n'en avoit efté confommé
pour le Siege.
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne devant entrer
dans Brifac le onze , on fit
vuider pluſieurs mines que
Mr de Marfilly avoit declarées
en fortant de la Place.
Ce Prince fit fon Entrée
ſur un Cheval ſuperbement
harnaché ; il fut
receu au bruit de tout le
canon de la Ville : il alla
d'abord dans l'Egliſe Pade
Brifac. 247
7)
:
roiffiale où l'on chanta le
Te Deum , il alla enfuite
fur les Remparts , & vifita
les bréches des baftions de
Sainte Croix , & de Vermandois
que l'on commençoit
à reparer , il trouva
à fon retour les Bourguemeftres
de Strasbourg qui
Fattendoient à fon quartier
, & qui le complimenterent
au nom de leur
Ville. Lage
2
a
Brifac ne pouvoit tenir
vingt- quatre heures de plus
X iiij
248 Fournal da Siege
fans rifquer la Garniſonpar
un affaut , parce que Mr de
Vauban avoit pouffé les travaux
jufques fur le foſſé
des deux baſtions , & qu'il
fe feroit trouvé deux breches
, cependant la Garnifon
n'étoit pas fi foible
qu'on la croyoit , mais tous
les canons de la Place
étoient demontez à l'excep
tion d'un feul , & il n'y
reftoit plus qu'un Canonnier.
Cette Place a eſté attade
Brifac. 249
quée par le baftion qui eft
fur le haut- Rhin , & fous
la butte où eftoit un Moulin.
Cet endroit avoit paru
jufqu'à prefent pour le plus
fort de la Place à cauſe de
cette butte qui voit de tous
coftez , & que les ennemis
avoient garnie d'Artillerie,
ayant mis quatre pieces de
24. fur le fommet , &
plufieurs autres en divers
endroits fur la pente. On
s'étoit attaché à cette attaque
, & M de Vauban,
250° Journal dus Siege
qui s'étoit propofé d'abord
d'en faire une fauffe du côté
du bas-Rhin , fut obligé
de changer de deſſein ,
ou du moins de le differer
à caufe des Eaux que le
Rhin , qui baiffe fort lentement
, répand de ce coftélà
: les ennemis n'ont prefque
tiré que de la butte
, mais leurs décharges
étoient frequentes ; ils faifoient
toutes les nuits un
feu de moufqueterie encor
plus beau que celuy que
i
de Brifac. 251
Fon a veu à Kell . L'attaque
a eſté faite dans les regles,
& on a avancé pied à pied ,
la maxime de Mr de Vauban
eftant, qu'il vaut mieux
épargner deux mille hommes
que de les perdre pour
avoir une Place quinze
jours plûtôt : cependant le
travail a efté pouffé avec
tant de diligence qu'un Of
ficier de marque de la Gar
nifon qui eftoit au Siége
de Landau , a avoué , que
dans la premiere nuit que
252 Journal du Siege.
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne fit ouvrir devant
luy la tranchée , on
avoit plus avancé le travail
qu'en quarante-cinq jours
à Landau lors qu'il fut af
fiegé par Monfieur le Prince
de Bade ; il ne faut pas
s'en étonner , à peine le
Roy des Romains fe faifoitil
voir aux Troupes . Son
Quartier eftoit à Altheim,
à une lieue du Camp , &
ce Prince demeuroit fouyent
àHeildelberg pendant
de
Brifac. 253
huit jours de fuite .
Monfeigneur le Duc de
Bourgogne eftoit adoré des
Soldats , s'il m'eft permis
de parler ainfi , ce Prince
n'alloit point à la tranchée
fans que les Troupes & les
Travailleurs fe reffentiffent
de ſes liberalitez , & il avoit
foin d'y envoyer des fommes
confiderables lors qu'il
s'y eftoit paffé quelque ac
tion d'éclat ainfi ceux
qui emporterent le chemin
couvert eurent lieu de fe
254 Journal du Siege
>
louer de fes liberalitez ; de
forte que l'on peut dire que
ce Prince a pris une des
plus fortes Places de l'Europe
en quatorze jours de
tranchée ouverte & la
gloire dont il s'eft couvert
pendant ce Siége eft d'au
tant plus grande , qu'un
Trompette des ennemis
ayant été envoyé au Camp
dit , qu'onfe rejouiffoit dans
leur Armée de ce qu'on
avoit affiegé Brifac , parce
que nous perdrions dix milde
Brifac 255
1 le hammés à ce Siége ; que
-les chofes changeroient
bientot
de face , & qu'ils viendroient
nous rendre visite ;
à quoy on luy répondit ,
qu'ils nous obligeoient beaucoup
, de ne vouloir point
nous Surprendre , & qu'ils
faifoient la guerre en braves
gens.
...Monfeigneur le Duc de
Bourgogne fit le 12. au matin
Chevaliers de S. Louis,
Monfieur le Marquis de
Clerambaut Lieutenant ge
256 Journal du Siege
neral ; M de Marfillac',
Major d'Infanterie du Regiment
de la Marche; Mr
de Saint Paul , commandant
le troifiéme bataillon
du Regiment du Roy , &
M de Villars Ingenieur ,
ce Prince s'enferma enfuite
dans fon Cabinet avec
M de Tallard & Mr de
Vauban , où ils refterent
pendant prés de trois heures.
On fit fauter le Fort de
l'Hermitage , où on avoit
1
de
Brifac. 257
mis deux cens hommes
parmy lefquels il y avoit
cent Houfflars qui firent
merveilles pendant le Siege
, ayant eſté jufqu'à quinze
lieuës par de-là Fribourg,
d'où ils avoient ramené
quantité de boeufs & d'autre
butin. Ils avoient fait
plufieurs courſes auſſi heureufes
, & avoient eſté couper
la tefte de la Sentinelle ,
& pris tous les beftiaux qui
eſtoient fur le glacis de Fribourg.
Y
258 Journaldu Siege
Ce qui fe paffa à la tranchée
la nuit du 28. au 29 .
Aouſt ayant efté oublié
dans le Journal , on l'ajoûte
icy , afin qu'il n'y manque
rien.
On ouvrit la fappe qui
prolongeoit la flaque d'eau
qui eft au devant du chemin
couvert. On pouffa
une autre fappe à l'angle
faillant , vis-à-vis le baftion
de Sainte Croix. La ſappe
n'eftoit plus éloignée que
de quatre à cinq toifes du
de Brifac. 259

chemin couvert . On n'eut
pendant la nuit que dix ou
douze Soldats tuez ou
bleffez . Une de nos bombes
qui creva emporta le
bord du chapeau de M¹ le
Prince Camille. Il y avoit
le matin du 30. vingt- deux
pieces de canon en batterie
en differens endroits
neuf mortiers & quatre
pierriers , qui tirerent continuellement
.
On continua de travailler
à la Batterie Royale ,
Y ij
260 Journal du Siege
qui devoit eftre de quaran=
te canons.
On a remarqué que les
tranchées ont efté faites
dans les mêmes endroits
où eftoient autrefois celles
des Suedois.
Il ne fe paffa rien de
confiderable
le 13. & le
14. Monfeigneur le Duc
de Bourgogne continua ,
avec fon application ordinaire
, à donner fes ordres
, & à faire fes dépêches.
de Brifac. 261
Le 15. ce Prince alla vifiter
les Troupes , & fon
Camp.
Le 16. la gauche de fon
Armée marcha à Burekem
, du cofté de Veille.
Le 17. Monſeigneur le
Duc de Bourgogne travailla
dans fon Cabinet.
Ce Prince monta le 18.
à cheval à la pointe du
jour , il alla voir décamper
le reſte de fon Armée , &
vint coucher au Vieux-
Brifac chez le Gouverneur ,
262 Journal du Siege
dont le logis tient à la
Tour verte. Mr Denonville
arriva à onze heures
& demie du foir , & rendit
à Monfeigneur le Duc
de Bourgogne les Lettres
du Roy , qui luy mandoit
de revenir.
Ce Prince monta à cheval
le 19. au matin , & vint
coucher à Beffort. Il en
partit le 20. à la pointe
du jour pour fe rendre
à Besançon , & ayant enſuite
paſſé par Auxerre
de Brifac. 263
Mr Martineau de Solleyne ,
fils de Mr le Prefident Martineau
, eut l'honneur de
luy prefenter les Vers fuivans.
**********************
A MONSEIGNEUR
LE DUC
DE BOURGOGNE ,
V
Sur la prife de Brifac.
EPITRE :
Aillant & fage PRINCE , en
qui les deftinées
Font déja plus compterde vertus que
d'années ,
264 Fournaldu Siege
TQ
Toy, que Mars & Louis ont en
foin d'aguerrir ,
Quifçaisfi toft lesfuivre en l'Art de
conquerir ,
Vainqueur du fier BRISAC , à
quel degré de gloire
Ne va point t'élever cette prompte
Victoire ,
Qui dans le fein de l'AIGLE en
portant la terreur
Luy donne tout à craindre , unjour ,
de ton grand coeur ?
Elle qui dans BRISAC mettoitfon
esperance
Et du haut de fon Roc fembloit braver
la France
En moins de quinzejours voitfoumis
à tes loix
Ce Brifac , que WEIMAR ne prit
qu'en quatre mois .
Contre
'de
Brifac. 265
Contre toy quels remparts oferont fe
deffendre
Si tu forces ainfi les plus fiers àfe
rendre ?
Aces rares Exploits , à des Lauriersfi
beaux
Le Rhin te reconnoift pour Fils de ce
Heros ,
Qui, le tonnerre en main , rempliffant
tout d'allarmes ,
Sur fes rives rendit tout poffible àfes
armes.
D'une valeur égale avec rapidité ,
Comme luy tu parviens à l'immortalité
En reduifant BRISAC , que
& la nature
l'art
Fleuve , Marais , Rochers , tout
vainement raffure .
Que tu viens de cueillir de palmes à
lafois !
Z
266 Journal du Siege
Sans qu'on ait prefque vû couler la
fang François
Dans ce Siege fameux , où tufçus
mettre en poudre
Ces murs qui du Cielfeul ne traignoient
que la foudre !
Par tout de tes vertus nos Guerriers
éblouis
Au Confeil , aux travaux te prenoient
pour LOUIS .
A ta noble conduite on doit cette
Conquefte
Où l'on admire autant ton grand
coeur que ta tefte .
En courage , en prudence , en liberalité
Combienfaifois.tu voir de magnanimité!
Mais allant au peril avec tant de
vaillance
'de Brifac. 267
Ta rifquas trop en toy le falut de la
France.
De ton augufte Ayeul , en marchant
far lespas
Eléve de LOUIS , que ne vaincrastu
pas ?
Va , PRINCE né Heros , par cet
heureux prefage ,
A tefuivre en tous lieux la Victoire
s'engage ;
Que de triomphes fürs ! quels projets
inoüis !
Si tu portes encor la foudre de
LOUIS !
On peut dire que l'Auteur
en donnant ces Vers
à Monfeigneur le Duc de
Bourgogne preſenta le pre-
Zij
268 Journal du Siege
mier à ce Prince
victorieux
les Palmes
qui luy
eſtoient
deuës
pour l'importante
conquefte qu'il
venoit de faire . On ne
peut couronner de plus
vives fleurs un Vainqueur
au fortir du Champ , de
Mars . Ce Prince receut
ces Vers des mains de
l'Auteur avec la maniere
gracieuſe qui luy eft crdinaire.
Le 22. eftant party de
Monbar où il avoit
'de
Brifac. 269
1
couché , il arriva fur les fix
heures du foir à Fontainebleau
, fans y
eftre
atten-
71-
du , ayant fait une diligence
extraordinaire depuis
fon départ de l'Armée
, & quand il ne ſe ſeroit
pas accoûtumé à la fatigue
pendant la glorieuſe
Campagne qu'il venoit de
faire ; le plaifir qu'il avoit
de venir embraffer le Roy,
Monfeigneur le Dauphin ,
& Madame la Ducheffe de
Bourgogne l'auroient em-
Z üj
270 Journal
du Siege
pêché de reffentir
la fati→
gue qu'il effuya pendant
ſa
route. Il trouva Madame
la Ducheffe
de Bourgogne
avec le Roy , & fut reçu
de Sa Majeſté
, & de cette
Princeffe
avec toutes les
demonſtrations
de joye , &
toute la tendreffe
imaginables
. Si le Roy charine
par fon air tout engageant
,
les particuliers
fur lesquels
il a la bonté de jetter feulement
quelques
regards favorables
; Monfeigneur
le
de
Brifac. 271
gu
Duc de Bourgogne devoit
eftre bien penetré de toutes
les marques de tendreffeque
ce Monarque luy donna.
Quant à la maniere dont
ce jeune Vainqueur fut rede
Madame la Ducheffe
de Bourgogne , il eſt plus
aifé de fe l'imaginer que de
la décrire . Aprés une converfation
de demie heure
il defcendit chez Madame
la Princeffe de Conty où
eftoit Monſeigneur le Dau
phin , cet Augufte & ten-
Z ïíïj
272 Journal du Siege
dre Pere , joignant la tendreſſe
paternelle à la bonté
qui luy eft naturelle , &
que toute la France reconnoît
tous les jours aux éclatantes
marques que ce Prince
en donne , embraſſa avec
une tendreſſe inexprimable
ce fils qui luy reffemble, ce
fils vainqueur comme luy
dés fes premieres Campagnes
& qui venoit de
marcher fur les traces
d'un pere , qui dans une
feule Campagne , s'empade
Brifac 273
ra de tout le Palatinat
aprés avoir fait voir au Siége
de Philifbourg dont il fe
rendit maiſtre , toute l'intrepidité
, la conduite , la
bonté genereuse pour les
Troupes , & generalement
tout ce que fon auguſte
fils vient , en l'imitant , de
faire voir au Siége de Brifac.
Madame la Princeffe de
Conty, que fa vertu, les manieres
engageantes qu'elle
tient de fon fang , & l'air
doux & majestueux
qui
274 Fournal du Siege
brille dans toute fa perfonne
, rendent le charme
de la Cour , eftant temoin
de la tendreffe de Monfeigneur
le Dauphin , & des
Lauriers que Monfeigneur
le Duc de
Bourgogne apporta
à ſes pieds , prit toupart
que fa naiſſance ,
& mille raiſons l'engageoient
de prendre à ce qui
fe paffoit de touchant devant
elle , & de capable
d'infpirer de la joye , &
de la tendreffe aux coeurs
te
la
de Brifac. 275
les plus indifferens .
Le bruit
s'étant repandu
dans toute la Cour de
l'arrivée de
Monfeigneur
le Duc de
Bourgogne ,
toutes les perſonnes
de diftinction
qui fe trouverent
alors à Fontainebleau
vin-
,
rent avec un empreffement
qui marquoit la
grandeur de leur joye pour
feliciter ce Prince fur fon
heureux retour & fur
les grands avantages qu'il
avoit remportez pendant
276 Journal du Siege
La Campagne , qui bien.
qu'elle n'eût pas eſté fort
longue eftoit des plus glorieuſes
.
Ceux qui n'étoient pas
d'un rang à marquer à ce
Prince par leurs complimens
, la joye qu'ils reffentoient
, & le plaiſir ſenfible
que leur donnoit l'heureux
retour d'un Prince ,
qui en s'expoſant trop ,
avoit fait aprehender pour
Les jours , coururent ainfi
que les autres , pour avoir
de
Brifac. 277
le plaifir de le voir , & de
luy témoigner par leurs regards
, qu'ils eftoient charmez
de la gloire dont il
venoit de fe couvrir , &
que rien ne pouvoit eſtre
égal à la joye qu'ils avoient
de le revoir .
Il paroît que le Ciel veut
recompenfer la valeur &
les vertus de ce Prince , en
luy donnant tout ce qui
doit faire les fouhaits d'un
grand Prince , à qui il ne
manque pour eſtre parfai278
Fournal du Siege
tement heureux , que des
Enfans qui luy reffemblent
; ce doit eftre le fujet
des voeux de toute la France
, à qui il feroit avantageux
que le Sang de
Bourbon regnaſt éternel -
lement.
Ce qui fuit regardant
le Siege de Brifac , doit eſtre
ajoûté icy.
7
de Brifac. 279
LETTRE
DU ROY ,
ECRITE A Mr LE
Cardinal DE NOAILLES ,
Archevefque de Paris
pour faire chanter le Te
Deum dans l'Eglife Nôtre
Dame , en action de
de la Priſe de Brigraces
fac par Monfeigneur
le
Duc de Bourgogne
.
ON Coufin , L'importante
Place de
Mo
280 Journal du Siege
Brifac que j'avois abandonnée
pour le bien de la
Paix , a été heureusement
foumise à mon obeissance
en quatorze jours de tranchée
auverte. Je fuis d'autant
plus fenfible à cette
Conquête ; qu'outre les
avantages que je puis en
tirer dans la fituation
prefente
des affaires , ce Siége
a été fait par mon . Petit-
fils le Duc de Bourgogne
, qui dans cette Expedition
a marqué toute laferde
Brifac.
281
meté, l'intelligence, & l'ap
plication qu'on auroit pis
"defirer dans un Capitaine
experimenté. Et voulant
rendre graces à Dieu d'un
que
fuccés fiprompt . &ſi beureux
; Je vous écris cette
Lettre , pour vous dire
mon intention eft , que vous
faffiez chanter le Te Deum
dans l'Eglife Metropolitai
ne de ma bonne Ville de
Paris , au jour & à l'heule
Grand Maître ,
re
que
pu le Maître des Ceremo-
A a
282 Journal du Siege
nies vous dira de ma part:
Aquoy m' affurant que vous
fatisferez, avec votre pieté
ordinaire ; Je prie Dien
qu'il vous ait , mon Coufin,
en fa fainte & digne garde.
Ecrit à Versailles le 17.
jour de Septembre 1703 .
Signé , LOUIS ; Et plus
bas , PHELY PEAUX.
Et au deffus eft écrit :
A mon Coufin le Cardinal
de Noailles Archevêque
de Paris , Duc & Pair
de France , Commandeur
de mes Ordres.
de Brifac. 283

1
Catarata CEDEA Cataratas
GENDEREDGEOIDEREDBEHIND
ODE
SUR LA PRISE .
DE BRISA C.
Par M¹ de la Granche , Secretaire
du Roy , de l'Academic
Royale de Nifmes .
Vous qui fous le poids de la
gloire,
Dont brille le plusgrand des Rois ;
Succombâtes cent & cent fais
Squvantes Filles de memoire ,
Pour le premierde fes Neveux
Digne objet de nos tendres voeux
Aa ij
284 Journal du Siege
-Reprenez desforces nouvelles :
Et plus ja valeur vous furprend
Pluspar des chanfons immortelles
Celebrezun Heros fi Grand.
S
De Lours cette vive image
L'exprime trop bien ( dites- vous )
L'un & l'autre au deffus de nous
Exige un plus difcret hommage :
De BRISACle fameux vainqueur
Fait éclater le même coeur
Que dansfon Ayeul on admire
Pour l'un nos efforts impuifants
Al'autre pourroient - ils fuffire ?
Ilefface auffi tous nos chants .
S
N'importe. Une telle conquefte
Doit ranimer vos plus beaux airs
Mufes , par de charmans concerts
Ilfaut en publier la fefte :
t
de
Brifac. 285
"
Au Germain ce fort boulevart
Que forment la nature & l'art
Nefut accordé que par grace :
Mais l'oubli de tant de bienfaits
Luy fait bien -toft perdre une place,
Qu'il ne tenoit que
S
de la Paix .
Chantez comment cejeune Alcide
Affrontant les plus grands hazards
Fait infulterfesfiers remparts
Et luy - même au Siege prefide :
Comment les ravaux avancez
Sous lagrefle des traits lancez
L'occupe fouvent en perfonne ;
Et comment les plus durs emplois
Qu'à fa valeur offre Bellone
Sontfeuls dignes de fes exploits
S
Sa vive & prompte vigilance
S'étendfur le moindre foldat ,
286 Journal du Siege
Famais une action d'éclat
Nefut chez luy fans recompenfe :
Tous dans leurs plus preffans befoins
Qui redoublent fes tendres foins
Ont des reffources toujours fures
Etfes regards campatians
A leurs honorables bleffures
Raniment leurs corps languiſſans
,
S
Par quelle rapide vitesse ,
De Louis retraçant
les pas
A fes loix ne foumet- il pas
Cette importante Fortereffe ?
L'Empire entier en eft furpris ,
Ala pourfuite d'un telprix
Il n'ofajamais fe refoudre :
Nos, Lis dans BRISAC arborez
Des Cefars méprifoient la foudre
Et par eux fembloient reverez,
S
de Brifac.
287
Mais ce qui parut temeraire
A tant de celebres Guerriers
Ouvre une moiffon de lauriers
Par un évenement contraire :
Noftre Prince plusfortuné
Par la gloire en eft couronné
Tout cede à fon bouillant courage :
Chacun fuitfes fages confeils ,
Et quelquegrand quefoit l'ouvrage
Il l'acheve en treize Soleils.
2
Ainfi d'un Ayeul&& d'un Pere
Suivant l'exemple & les leçons ;
Ilfait voir que leurs Nourriffons
N'ontrien en eux qui degenere :
Ainfi d'un Oncle genereux
Imitant les exploits heureux
De l'Aigle il reprime l'audace :
Et prefage à fes Alliez
Que fous le bras qui les menace
288 Fournal du Siege
Ils vont tous eftre humiliez
2
Déja , Conquerant trop aimable ,
Effroy du fuperbe Germain ,
Louis eft charmé qu'en ta main
Sa foudre foit fi redoutable :
Déja dans l'art de le vanger
De quiconque ofe l'outrager
Tute rends an habile Maitre :
Et l'on peut jugerfur lafoy
Des Vertus que tu fais paraitre
Ce qu'on doit attendre de Toy .
c、,༡༦ 、.9༡
RECED
1
de Brifac. 289
>
Monfeigneur
le Duc de
Bourgogne s'eft attiré des
louanges par tant d'endroits
pendant
que le
Siége de Brifac a duré
qu'on ne doit pas s'étonner
fi ce Prince s'eft attiré
un grand nombre d'éloy
a paru le Pere des
Soldats , & a donné des
recompenfes
à tous ceux
qui ont fait quelque action
d'éclat. Tous les Of
ficiers bleffez reçurent
,
avant fon départ, des mars
Bb
ges
. Il
290 Journal du Siege
t
J
ques de fa liberalité. Une
bombe ayant détruit un
Autel dans une Eglife de
Brifac , ce Prince ne l'eût
pas pluftoft appris qu'il
donna une fomme confiderable
pour le retablir
& la Ville en reconnoiffance
fit mettre l'infcrip- |
tion fuivante au deffus de
cet Autel.
PYROBOLO IN HOC
SACELLUM DELAPSO LUDOVICUS
BURGUNDIÆ
de Brifac. 291
DUX , URBIS EXPUGNA
TOR SERVATORQUE LEVE
DAMNUM SE INVITO IL-
>
LATUM, IN LUCRUM VERTIT
, PECUNIIS MUNIFICE
COLLATIS , QUIBUS VIC
TORIARUM PRIMITIAS IN
HAC ÆDE ET ARA CON
SECRAVIT .
On mit ce qui fuit au
deffous .
HOC REGIA PIETATIS
MONUMENTUM
INSCRIP
292 Journal du Siege
SIT , URBS ET ECCLESIA
BRISACENSIS LUDOVICI
MAGNI IMPERIO A NEPOTE
FELICITAS RESTITUTA
XIV . OBSIDIONIS
DIE VIII . IDUS SEPTEMBRIS
>
ANNO DOMINI
MDCCIII.
FIN.
APOSTILLE.
Le Public ayant fouhaitté
d'aprendre combien
'de
Brifac. 293
Ti
1'Auteur du Mercure a
donné de Relations de
Guerre au Public , feparées
des Mercures, & les titres de
cesRelations.Voici ce qu'on
a cru devoir ajoûter icy
pour fatisfaire fa curiofité.
La Campagne de Monfeigneur
le Dauphin , où fe
trouve un Journal du Siege
de Philifbourg , & tout ce
qui s'eft paffé à la conquê
te des Places emportées par
ce Prince , pendant la même
année.
C
294 Journal du Siege
La
Relation du Siege de
Vienne.
L'Hiftoire du Siege de
Bude.
Le Journal du Siege de
Luxembourg.
La Relation de ce qui a été.
fait devant Genes en 1684 .
par l'Armée navale du Roy.
Deffaites des Armées
Ottomanes par les armées
Chrêtiennes en
Hongrie ,
& dans la Morée , avec la
priſe de plufieurs Places fur
les Infidelles.
de Brifans
295
La Bataille de Fleurus,
dedié à Monfieur le Duc
de Chartres.nl
Le Siege de Namur ,
avec un Journal des mouvemens
faits pendant ce
Siege par l'armée du Roy,
& par celle des Alliez ;
feconde édition . Dediée à
-fon Alteffe Monfieur le
Duc.
Hiftoires du Siege du
Chafteau de Namur , dediée
à fon Alteffe Monfieur
a
le Comte de Toulouſe.
296 Journaldu Siege
La Relation du Combat
de Steinkerke..
La Relation de la Bataille
de Nerwinde , dediée au
Roy.
Le Journal de la Cam
pagne de Piémont , avec le
détail de la Bataille donnée
à la Marfaille , dediée
à Monfieur le Duc de Vendofme.
I
La Relation de la Journée
de Crémone , & de la
deffaite des troupes Impe
riales.
de Brifac. 297
L'empreffement d'avoir

de cette Relation de la
Journée de Crémone,a efté
fi grand , que l'Impreffion
ayant entierement manqué
, il fe trouve plus de
le cent perfonnes qui n'ont
pû en avoir; de forte que
l'on en a fait venir de Nantes
où cette Relation a eſté
imprimée ; mais comme le
caractere en eft beaucoup
moins gros que celuy de
Paris on ne la vendra
que dix-fept fols . Ce prix
298 Four du Siege de Brif
eft different de ce qu'elle
8
fe vendoit à Nantes , à caule
de la relieure.
Le Blocus de Mantone.
Le Journal du Siege de
Landau.
J
Le Journal du Siege de
Brifac dedié au Roy
d'Angleterre.
De l'Imprimerie de D. JOLLET , au
boutdu Pont S. Michel , au Page
du Roy , 1703 .


Baned
,
382
.
13.4.91
.
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le