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1688, 06 (partie 2, Histoire de Soliman III, servant de troisième partie à l'Histoire de Mahomet IV depossedé)
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32.60 Mo
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409
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Texte
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Secci6.
.. ---- -- .... ----:------- ·
Observatorio de Marina
BlBLIOTECA
~(1m.O g .. 3. 2. .. 3
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Cl\rpet"······- .. ..... Ntim.
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EH tante ........ .
Tomo ................... .
T1iblt~ ............... .



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1 ,Q1G M rst .. _r o e Cul ura

HISTOIRE
DE
SOLIMAN· llI. • '
Servant de troifi ~ m:e r ·a1·tie
à I'H.ifioire
DE MAHOMET IV ..
. D .E P 0 S S E D E' ..


A PARI S.,..
Çhcz MrcHP.L _Çu.EROUT ,Cot~rt:-negve
· · · du Palais , au Dauph1~. 1. (
M. D C. L X X: X V 1 1 Ir
Â.~4.c P . ~ Pj,B.U,,, ROT·
~ V ' ~~~~,
~ ~~ - ODSERVATOHlO DE MAnlNA K~
DE ~~·
SAN FERNANDO, ~·
~
~
....
,



,
-. -
• - •

• 1
,
,
' ' •

• • -
~~~~~~~~~~~~~~~~~

A V 1 S.
1Ly. 1t tttnt de chofes pifrticuliert1 dan~
le.s trois YQlumes tf1'Î 'ontienlftlft
"!'Hi/foire d" reg11.e entier 1e Mahomet
1 V. & de celuy de Solim1tn Ill. jufltjll
aux d~rnieres nouvelles q11i font ve~
,.uës de /1t Porte. qu'on d~it eftre for- ·
pris '!'~·on 11jt fteH jHfqttes aux moindres
p•roles. & mefme jufq1tes ~1tx penfles ae eeux des Ojfic;ersTurc1, tftti ont eu le
/lits de pai-t aux mouvemens qui tléfole•t
leur Empire ; mais le Leéleur doit eftre
per[uadé qH' '" n' 1turoit pas tntrepris ces
trois Yolumes, fi on n' 1tvo;t eu p1ur le1
faire que les Relations 'fUi. 1nt &ouru. d".
d'où tes nouvelles publiq11es ont efté tirées.
Elles ne rempliroient pas touret
enfemble , fi"" en ofte /e1 repetition1,
lA moi~dre partit de f UIJ Je ces troi.I
f/Q/umes • & on en verrA /A J.ifferene"t!
fi o'll ~eut bien fl donner la 1' ei11è de /11
'
À V 1 S .

eonfronte'r. AHffi 1!-t-on eu des Relation!
qui tl ont efté comp1fles ny fur des 011ydi.'
re, ny_ far Î'e ,qut l'on écrit dans la·
- chaleur d'un évmement ,fan1 avoir pe·
netré les cAufes q.1#. ont fait agir, ny
découv_ert la politique de1.int.~rreffe~. On·
fçait.que poHr ce/~ i/ fau~ av~ir. aemeurJ'
long-temps en 11n lieu, & f11it de l1nf..ue"
main des haltitMdet avec .ceux quifant
emp_loye:z: dans les f.fjfaires , ce qui ejf
' .difficile da'1s 1tn Eftat , o.Ù /,e.r- fier.et$
du SoHver.tin doivent ejfr.e prefque
impenetr11hle1 , ptiis '1"'' fan. Palairn'
eft pas ouvert mefme à· ceux if,,.
'Pal..1. Comme o-n A- trouvé m.oyen ma[,.
~ri'.tou1 ces obftac/es de 6'.inftruire iè·
fond de la verité., on a refol11 de continuer.
r J.lijloire T JJrq,te ) t!r 4' Cf! donner
deux oH trois Ya/.ûmes toff.s (es .ans .. OtP ,. ·~· -~ .......
ne .fix-e _poi11t les temps , par.et que cela·
dépendra des grandes chofe5 qHi arrive_
ront ,, & 1u' qn ne donnera aës Yolnme~
l , ,If', .,, ' \~\I • 'f UC 01".S qU. Ott ttll'(tt flJJ f~ CU ae mi:t_t~epçfeur:
t',.:t c11r.ieu[e.pour les r8.m.plir~

1
)
HI S T ;O IR Ç

BE

SOLIMAN I.I I. ' • •
~ 0 rcy la fuite du
. Regne d'u11 Prince
f · .qui ne con1ma·nde
plus, quoy qu'il foit encore
viv.ant , & le commencement
·de celuy d'un ~ouve·rain qu~
A

'
2 Hijloire
fe111ble n ... avoir · ·eu d~ahord
que le titre <l'En1pereur,puis
qt1e la pl·us grande partie de
tot1t ce .qu.i s'efl: fait depuis
cette furpre11a11te revolution,
doit eitre plûtofr regardée
comme une fuite · de ce
qu'a produit le gouver11en1ent
des dernieres années de
l't1n, que co1nme un conlmencement
du Regne de
)'autre. Mahomet IV. qμi
eil: celuy que l'on a fait defcendre
dt1 Trône , . a beaucoup
travail.lé à i·agrandiffement
de l'Empire Turc, &
-i-l -l'a fait m~fme avec f uccés ~
~
de Soliman III. 3
pendant un fort .grand nombre
d'années~ Son bonheur
~ n'a pas continué; il a choifi
des Miniftres & des Generaux
d' Armée qui ne fe [one.
pas acquittez de leur devoir,
ou qui en ont efté accufez.
Leurs mauvais fuccés font
retombez fur le Prince qui
les avoir employez, & on a
puny dans fa Pcrfonne , leur
malheur ou leur m;;iuva:i[e
conduite, fans confiderer ce
qu'il avoit fait pour la gloire
de l'Etat, & fans en 1nai:quer
mef me aucun f ouv enir. c· eft
un ufage qui s'cft étably dans
A ij
L...~~~~~~~~~~~-'
4- Hiftoire
cet Empire. Si ceux qui en
font les ·Maifrres y 011blient
fouvent les fervices de letrrs'
·Sujets, leurs Sujers1es voyént
raremetilt dans le malheur,
fans prendre ·contre eux des
roanieres infolentes ,- & ce
manque de ref peé\: qui efl:'.
Prefque toûjours f uivy d'effets
dangereux, leur efr d'aurant
plus [enfible ' qu'il eft '
:bien plus dur à des Souve
·rains d"efire ·méprifez par des
·Sujets, & ·traitez avec indi:
gnité & aveç hauteur, qu'à.
'<les Sttjets de recevoir de
femblables traitemens de. ·- ... - ·- - - -
' .

l ·dé s ·1lîman IIT. ·5·
eeux .à) qui ils fout_ ohligez
d·1efrre f oum is. Maho1ne_t. IV.
a eI prouveI , d e ce co1f.Ll Ie -la°' tout
ce ·qu'un En1pereur 1petlt e,f-
. fuyer de plus .. rude. Il. a v.û
!~orage fe fot·meri, longtempsav.
a11t qu'on ait· entend u t
g~onder la f0~dr"". Des. éclats
terribles l'c.n ont. fouv,ent_.
m.e;nacéJ & il 11'a--re~c·eu le(:oup·
qu'ap.rés- avoir·reffenry en }c: '
I J prevoya11t _, tout c·e qu une·
jiifie crainte peut- avoir de·
r~got1i:eux. C.' efi: cette crainte.:·
qllÎ fait. propre.ment .fouffriif·:
Le ·caup, qi1elque crue:l1ql1':1l \
· p11ifiè efrre , ac.c,able ~n fra .....
A iij.
Je 111
·o I-Iifl·;i1·e j
pant, & ne- laiffe p·oint !an ..
:guir ; n1ais fi l'arrente d'un j
bien caufe de la peille ~uand
mefme on cft feui: <le l'obtenir
, ceLle d"un l:nal que l'on j
voir i11 é~itable doit penctrer
l' ame à tous 'l:OOF11e11s, & la
tenir da11s t1.ne [ouffran·cc continuelle.
Le foL1leveme11t élevé con·.. .
tre Mahomet IV. eut à peine
con1mencé, qu'il donna lieu
. à la mort de ceux· d·ent lesMutins
voulurer1t avoir les
teft es .. On fut obligé de d~pofer
une ,partie des Grands
O.aicie(s.; .le car..nage , & le
dé Soliman fil. f
·pilTage rμ&Iez enfèm'ble fuc,~
éderen.t i ces .preruiers mol!i.vemens
,, & ,comme ·toutes•
,ees <ï:hofes 11'.o,nt e.fré faites-..
<jUe pour parve.nir .à la d 6-
.po·Gti 011 d·1::1 Sultan, & que
les Trou.ble·s d11 nouveau;
Regne 11'011c efr·é qu'une fui- •
. Ile del teux. du précedenr,1111Îg·
"}Ue les_ A.mis dt~ .Mal10met) &.
~eux de.fo11 PiJsJ011tag.y potir
eux, 11 eOE vra y de d.ir·e,c0rrm
·e je v.·bt1s l'ay· déja riiarqué,,
que ce qui s·~ a fâit à Con,f
·ta11ri110ple pe11dant q~elqL1es ..
mois) aprés }?élëvarion dè
S-0lin1atl fur, le l:rô11e, tient.
A iiij,
. i t Cl
1-- Hij!oire '
cnéore au· Rogne de M~ho-.
met , & que rien ne Rourra
~fi·re ençierement: at.t'ribué à
celuy de ·soli1i:1an, que · lors.
qu'il fer~ no11 feulement pof(~!
fe ur paifibl e de l'Em pir~ ,
mais- encore. Cfù'il ne s'y fera
plμ s ri ~11 où M,111.omeç & fon
Prils aye11~. p1rr , 0L1 par leurs
A mis, ou i1a,r ceux qt1i ne
cl1 erclient 9.ue le t,rouble .•
Le.s chofes feront. 'petl't-eftre
dans cet efiat avant· que je.
· fi:-ni!fe ma Lettre. J.e vais ce- .
pe.ndant. la: com1nencer par·
tot1t, ce qui s'eft 11affé daps:.
lçs premier~ n10.is de c_ett.ç~
dè Soliman · Il 1. 9·
efpece d~·interreg~o, pendan~lcquel
le Trône femble_eibre
·t~m1)ly d'u11. Emper,eu:r fàns.
pot1voir ,.__ & qui eft moins
caufe des rp.Guve1nens qui
troublent. enco.re. l'Empire,_,
que le Souv~,rain q11i n'a plu~
la liberté de ~ien fair,e; . je dis ..
S1ouvera.in,, paro.e que c~ caraéteJe
ne pet1t jamais s:eflà-.
cer. J_'ay finy l'Hiftoire de
Mal101net par, fa dépoffeOEon •.
~oy que la plus co1nmune.
o.pi11ion feit.,q-ue. depuis long~ .
t~f? ps il ne re. paife plus rie11
.dans le monde qu'on pui!fè
d.i.r~ . .QOLlV~a:u , . il. ef\: ~a.n7..-
I

A ,r C. ! ,... ~:U .a
ro Fli(loire
moins certai.11 qL1e f.i on examine
ce ~ui s'eil: fait pendant
<]Ucl ques heures J da11s 1efqL1cllcs
eout ce qt1.i regarde
cet eI ve11e1· nen't e111i. renrt;:e rme' ,
& qu'on le co111pare a\rec les
tu1nL1l res qui l'ot1t précedé,
&_qui l'on-t:: fL1ivy ,. on fera,
,perfl.1adé qL1e toutes les Hi~
toires ne. f~auroient fournir.
aL1cun ·exemple· , non pas
d'une pareille dépoffcffion,
mais ·OU cal·me qui a r·egné ati.
injlieu de -IJ G>:uvrage de la.fL1-
rcL1r, s'il n1'efr permis de parler
ainfi'. ·on ne peut l'attribuer
q~"'à la prudente. c..on:-
de Soliman III. 11
duite du Minifrre à qui l'exe"
cL1tion en avoi-t efré remife.
La politiqu,e a-voit enfanté ce
f oulcvemenr, comn1e je vous
le feray voir, quoy que les
Troupes cru!fenr l'avoir feules
excité. La plufpart des
R ev,oltez preten<loient avoir
le meftne bt1t, & ils avoient
pref q~1e tous differens motifs
dans ce qu"' i1s entreprenaient
Ceux qui croyaient agir·
d'et1x-m efme-s > travaillaient
fa11s le [~avoir à ce qui efl:oit
utile à la paffion des autres, &.
'.les divers interefl:s cachez·
· J?ints au fpec.ietlx prctex.tc du\
'
' -
i2 Hiftoire
bien d.e l'Etat , avoitfnt mis
dans un fi gra11d mouv.eme~t
Jes ef prit's qt1i a v·oi en c- part.à.
cette rev,olte, qu'il fe.roit impoOEble
· de voir une confufiun
accompag11ée de plus de
f11reur & de plus de carnage 1
fur tout d·es pe1f0nnes élevées
at1x plus l1at1res Dignitcz.
Cep_enda11t au mi-lieu de·
ce def-0rdre, Cuprogli, €ain1acan.,
dépolfede Mahomet
da11s t1ne Ville où cet Empe ..
ret1r efi enc.ore le. Maifire,
.funs qu'on en rende le moi11-
dre murn1t1re de ceux qui
r~nt. encore. de fon .Rarty , & .
~âe Soliman l I !.
;fans que · 1es Seditieux qui
a'en font pas, agilfent aveci
tamulte dans ces grands mo,
mens, où la cheute qt1e les
Souverai11s font en ·ton1bant
du Trône,,ébranle tout l'Ecat,
& change la .face des affaires
generales,&la fortune desParticuliers.
Ce n' efr feulement
que dans ce temps là que la
fureur a paru endormie., que
le filence a regné , & que les
plus . en1portez de <:haqu<?
Part:y , ont fen1bl-é d'accord
pour refpe&er tout ce qui
·s'~ft fait dans les dernieres
~cures du Regn_e de Maho-

1
'

l4 Htffotre ~
met IV. en regardant avec j
~n fage étonnement tot1tes
·1es chofe~ qui s'y font paffées.
Ce ql1i 'fait H·ne des nouveau'
tez de cette aétion, & qui la
fera par·o· ftre remarquable.,
& tres- finguliere à la pofterité
_, c'eft qu'elle n'a pas efté
plî1toft finie, que les mefmes
de[ordres o.n t recommencé,
& q·ue 1es feditiet1x fe. font
abandonnez à tout ce que la j
fureur, & une licence effrc•
' née leur ont demandé. Touf
ont trouvées impuiffantes
pour les reprimer ; de forte •
de Soliman III. 15
qu~~ucu11e des Seditions qui
out éclaté fous les v·i.ngt-trois
RegL1es precedens , 11' a eil:é
pouffée avec un emportement
ii opiniatre. Dés que la caufe
de ces ancie11s foulev.e111ens.
efroit ofrée > o.n voyoi t ceffer
l'effet , au lieu que celle-cy a
duré beauco11p plus longtemps
qùe fa cau[e, ce qu'on
impute à la mort de quelques
Chefs des Seditieux , & à l'éloignemen
·r· de quelques autres
qui avaient fecretement
travaillé à exciter la revolte,.
Les Rebellions font bien plus
dangereufes quand les Muj
j
j
J
16 , H i.ftoÎ're
-tins n'ayant plus de ·chef,
~·abandonne11t fans avoir pris
~·autre refolution, ·que celle
-de ft1ivrce leur ·fureur , à toU:c
:ce ·qui leur vient en penfée,
<!ans le temps qu'ils ont les
armes à la inai.a ., & qu'~ls
.font dans la êhaleur d'un
emporooment qui les aveugle.
Il efl: bien difficile alors d'arrefter
le cours de la revoltc.
Ceux qui demandent le plus
.J1auten1ent la reforn1e de l'Etat,
craignent 1bien {ouvent
de l'obtenir, & leurs paroles
font dementies I ar. leurs ac!~
01~s. fls ne travaillent qu~
de Soliman fil. 17'
poor- la continuation- d'un\
.defordre. -Oont ils profitent,,
& donc:ils craig11e11t d·autant:
plus· la fin , qt1'ils ogt lie-0.J
d'apprehen·der· le cli-atimeritdes
crimes qu'ils ont c'Ommis:pendant~
le.foulevemenr,auffi-bien
qt1e la pu11ition q\l-'ils·~
1nericen·t oou.r avoir ©fé,_ r~ .. J.
revol ter ; & voilà pcur--qu.oy '
ces ·forces de Seditieu.x met- ·
tent rarement· lcs·arm.es b11s ~
qt1'il s n~y· ioie11t co11traints ,
par la force , ou. qu'ils ne,
Ce foyent entiereme11t affoiblis
en fe divifant eux-mçf-
m- es , & en- _c_o_m_b ... attéUB.l ..t le. s,. · ;
.' -
1 ·~ Hiftoire
un-s con·tre les autres ;. mars..
ils ne font pas alors en eftat·
de rendr.e de grands fervice~
à leur Souverain. Sans ces,
defordres qu'on voit fouvent
arriver dans l '.Em·pire Turc,
& qui épuifent fes forces par
la quantit~ de fat1g q~"'i.ls font
répandre, cet Empire, !tout·
vafre qu'il ;.efi:., aug11te.nteroit
tous le~ jour,s, tant [a politiqtte
efi bon.ne, non (èulen1ent
pour fon.a.c.cr.oiifement, mais-.
encore pot1r faire ·:que les Ha.
bi rans des P. laces conqt1i [es,
eil:~nr fatisfairs de la domination
.Oth-0m,.a.ne., n~ f ongen~.
L
dé Solir4an Ill: 1·~
'Point· à [ê fou lever. A"11fli 11~ y '
voir-o.n· guere . de revolres-:
«Zat1fées par les-f'euples j elles~
arrive11t prefqt1e '.tOUtôs par.:
les .J.anilfaires·, ou. par des--Ba:.
,cl1.as q~1i :!;.eulent fè .r~~ndre;
·Souverai11s dans leur-s :Gou .... -
vernerr1ens. .. V oie y .. q\Jelle eft~
!la poliriqt1e des Ern p~reurs•;
·'i:u·rcsi. à 1' ég.arp.d.e.le.urs -.Con•
·;queftes.. .
-A· 1nefitre ·qu'ils,fê rendènt1•
1maiilres de qt1elque Roya Li~
'!OU d'u11e '.Brovin0e , ils··fe faifilfent
du .Domaine du Pri11ce:
·vaincu,.di.1 bien del'Eglife :>·
. 1&. d~ ~out. c-e qtlG- p.o!fedoien~~
B_ ij
"
~1 OE'UU

20 Hi(inire
· ·cc;:μx. qui fon.t morts.au ·t -om; _
bat, ou qui fe font retirez aill~
urs. ~ant : aux P1et1ples .qui
veulent bien vivre fous .leurs
loix., & s'accommoder à leurs
coûrumes , on leur laiife la
po:ffeOEon de leurs. bie11s &
l'exercice de leur Religion,
en é.tabliaàn.t felon la gran~
deur· d~ Pay.s conquis> des
Vrcerois ou des Got1vcr.neur:~
<lç: Provinces avec des Itrges
po11r leu~ adrninifrrer la juf""
tice. . Ces hiens-ainfi am. aifez
f9n.f. p~rta.gezr en.tre un cerr
t~in · no{l1.D.Ee de gens à-e
g~ç~r~ . ~ neç~~:rçs p,ou~ , ~ .
~

\
'
1
de Sol-iman III. ,, .f'
""!L
garde ·de leurs conqueil:es, &
ils en don11ent auffi à leurs
Ecclefiaftiques at1tant qu'il j
leur en faut pour vivre &
pour [e vefiir.
Comme on ne s' attaGhe ~ j
lire u11e. Hiftoire que pour
s'.infiruire de tou.t ce qui peut
regarder le p,ays d0nt elle
. ., . .
traite , J aJOUteray. 1cy. que
lors que le Grand Seigneur j
veut faÎre n1out.ir .un·e .. perfo!lr
ne e' l e JeI e,, a' que1 q ue eI m1. nen,-
te dignité, tou,te la forme de J
j.l;lftice qu'il .obferve, e1l t1ne
.demande· par écrit au Mufti,
~u G,;~nd P,:e~~e 4,e . ~a Loy 1" .
l ri
~--·~-__.,&.._--~--
2'2' Hiftoire
~puur [~avoir quel· chaffiment
merite un E.[cla(v.e, "ou· un
:S·L1jet ·qui agit contre le fer-vice
de fon Prince & de l E-
.écrit· de t·outes les caufes de
~fon n1.écontenteme11t &de fes .
cfoupçons ·qu'il fu,ppof-e v·eri-·
:tables,.& comme la demande
fait tot1jours croire le crirn.e ·
·effc-&if, . l'avis dt1 Mufti ne. 1
manque jan1ais d'aller à la
·mort. Ainfî.fans autre forme
de prQcés, le Grand Seignet1r
env-oye étrangler. ceux dont
il a deifein de fe défaire)& 011
!1-.e ~eur ~onne q~ 'un pei~ d~ 1
de Soliman III. 23'
temps pour f6ng~r à Dieu ..
ta Jufrice vien·t auffi;.to'f.t ·a ..
prés pour faire inve11[flire des.
biens du Mort comme ·cri-
. minel de leze-Maje.fl:é , & :
·tout .ce qtii fe trouve d'ar- J
gent de meubles, ·de c1ie-..
' ) '
vaux, & de pierreries ~ eft.de:-
fiit1é pou.r-le TreCor de l'Em,.. j
pire, ai11fi.que le refie de fes·
biens, à la referve de ce qu'il,
peut a:voi-r f ubftitué de fon j
vivant,.à fes Enfa11s ou à l'.E-glife.
Cette fubfrirution ne
iè peut faire que ·par la per- mi:ffion dt1 Prince, & c'c{l: là:
:toqt le ~e-~ede q~~ ~~s per.""

2'4 Hiftoire
funnes qui ont dtt bien en ~
Turquie , · pel1vent trouv.cr
pour l'a!fe-urer à letirs D~f-:
c.endans ~
On voit par là" qu<t 1 ~au;,
torité des -Sultans efi foit
grande , & que toutes les .
Loix obfervtes dans leur Empire
n~ fo11t faites _qu~ dans
la veue. de les enrichir. Lie •
pouvoir du· Mufti eft aufh .
tres - confiderable ; mais
. con1me- le Grand Seigneur
le Jepo.[e cp.1and il veut·,
l'autorité d.u Sul.tan doit
iefl:re plû tofi confi:der.ée en c·e
g.'r anQ. P.·r-..eftr·e- -d-e- l-·a loy qul e col e _..., ___ _
de Soliman III. 25
celle ·du Mufti mefme, que
les Turcs regardent comme
l'Isrerprete de l' Alcoran.
Le Grand Seigneur le choifit
de la meilleure vie > & de là
plus grande Do·étrine qu'~l
peut le rouver, & il luy donne
une autorité fupr~me;.
car .ce Prince veut qu'on
croye qu'il tient la j.uftice de
Dieu, & de Mahomet, &
qu·e fes Sujets, qu'il appelle
f es Ef claves, la tiennent de
ltly. Toutes les r6ronfes du
Mufti font nommeesFeifàs;
il prend fept Af pres de chaCLlQ~,
_& çeluy qu~ !es écrit en:
pre~d- -d-e-u.x........ -C
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
~--'
.
26 Hi(toire
Ava11t que ère comtnell.(et- ~
vous écrire c·e qmïi ~eft patré
à C0nfta.ntinople depuis que,
6oliaran IlLr a efté m1-s fur le
c,Frône:, je cr.oiis devoirvous-a:p-..!
prendre qu·e'1 eft le caralt<tte
decePrince,puifquec1GA:pref- . qt1e un moyen certa-in pot1r
faire juger de quelle ma:niere
un Souverain regncra, qu,e de
c!onner une jufre idée de fes
.inclinations-. Ce n'efr pas
qu'il ne foit di.ffi"~ile die vous
faire le Portrait d~ ce-noavcl
Empereur. Voust f~a'.Vzetriqn"il
a efté enf!trmé JtOtlte fa )\l'Ïe
da~~ u~ ~S-Appart~me~ dti
• 1
t -
• •
ISk'r n d 1 ra
de J'oliman III. 27
Serr_ail , & qu,il efr roefme
malaife de connoiftre ceux

qui y demeurent, quoy qu'ils
n'y foie11t pas tenus prif on-
. . ' . . n1ers, puis que n ayant 1ama1s
pcrmillion d'en fortir ,ils ne
peuventavoirde communica~
tion avec les g.ens de de~ors. j
- Soliman III. efr plus grancl
que petit, & d'une taille qui j
peut paffer pour belle. Il a les 1
épa11les un peu larges, les j
fourc1ls noirs,les yeux grands,
& a!fez vifs, quoy qu'un pea ·enfoncez , & le teint d·une pafieur qui tire fur le blanc.
Il a l'air do':lx & inélanco~i.-: ç ij
e
.2.s H ijl:oire
que' & les maniereis civiles .&
_zraves. 11 paroift â.gé de .ci-n4.
~uant~-. .cinq.ans , quoy qu'il
n ' en . , . .ait qu env1r.on qua~antefix.
::Il1e.ft fort .. f~av.ant dans la
·_Loy . qu'il a toujours étt1di.ée
11eridant fa longue prif on ,
;mais .peu infrruit .des .affaires
;4u .monde,.& de l'art p~ re-_
~ner,. Ses premieres aél:ion.s_,
1font cro,ire qu'il a les_ :inclinations
d'un honnefbel1omme,
& fa .p·hifionomie le .p.r.o.met.
~rid .après fon éle:v.atio11
fur l'e Trône, Cupro.gli,.powlors
Caimacan, luy .demanda ·
fes ordres fur e,e,qu'il avoit à _..,._ i...,-------i- - - - .. - ' - -·,-~--- - • 1 •

<::O 1 ~~ ISi. •10 tje Cultu a
de Soliman· III. t9:
faire, il luy répondit, qu'ayant
eflé prifonnier quarante années,-.
il' n'aruoit pu apprendre à gou.. j
'Oerner un-Empire., & que (on·
pe.u1Joir n' eflant ptt-5 encore bien
ajfifrmy _, zl ne fça'Uoit ce qu'il j
~e'Voit refoudre & o~donncr.
Certe fage répnnfe fait voir·
_'Ju'il n'efi:oi[ point préven_u· j
en.favellr dé luy-m~fme, &.
qu·ir ne reJfemble· pas à1ceux'
qai croyenr que l'autoritt les j
riend habiles. ~oy que · Mahomet
fon Frere l'eufi: tent1 en•
prifon, at1 ii"eu·d'o:rdonner-fâ.:
m0r[ fuivant l'ufage le plusordinaite
des Sulta11s·,_& q~1ç;
c iij,
30 Hi(tlJire~ · ' ..
Soliman femblaft cfir€ obli.-.
gé de luy faire la inef1ne gta·
ce , on poit n~anr.ho.ins · regarder
c·e·tre aél:ion com.IP<?c
;Jnè gra11de· n1arque d'l1u·tn~·
nité & d'amitié pour fon·
Sang, car l~a fir-uation des af .. ,
faires efiat)t tqute autre .que
lors q·ue Mal1omet n1011ta·.
fur le TrQ11e ,, -la politique
votùoit qtie Soliman n' euil:
_pas' po.ur l uy -les mef1ne! égards,
&.qu'il fifl mourir fon
Frere, quo y 91:le ce Frere luy
eJ1il l1-tet1 voul'u laiîfer la vi~. 1
En effet, tout·eftoit à craindi:
e d'un Prince (jUi .ayant re~ - - ., ... .__.. -
de Soliman III. 31;'
gné',u.n fi gtflud n0mbre·cl"an.
nées· ~ avoit faic des C'F~aru"'
re_s.Le feul .m~lheur av-oit. fai~ ·
.defcendr.e Ma-homet du Trô ...
pe , .& nGh.feuiernent i~ y
av·oit pour Imy des Par·ti.s fermez
&. connus; mais ence'r~ •
dés Chefs qui a"ttoi~nt beaa;·
coup (;le Troup~s qui lr.:.nr
efio~ent devoii~es .. Il ;y:_a. plus ~
Manomé·t a:vdit volilltt f~ire~ .
f>t:tit ·splirm~n de fa propre:
m.ain ~ .u.n p:eb' atvant qu'il full·
pr1• v.eI d e l"E R1pf~,' e', & Soi i·. ..
'man efloit r~ll!h·-de ~.erdre d'ui
,moiirs la C0t1ro-.nnc qL1" ©11 ve ....
i1oit de luy n1ettre fur la çefte,,
1 c iii j
....
201 O '~ JSter o de Cul u a
j2 Hi/foire
s·il arrivoit que le Party de
f on Frere eu fr le defft1s fur
celuy qu'on ne püu~ oît ar.}pell'er
le fien , qtie parce que
ce P~rty l'a voit re~onnu 11011r
Empereur.C''efioie11r des Mut
i11s qu'il n'avait point tr:i · j
vaillé à. s'attirer ; & comn1e
l'efl)flt de rebcifion leur a- j
v oit inf pirè la pe11{èe de le j
inertre ft1r le Trô11e, ils pouvaient
l'abandonner a11ffi
pro1n11tement. qu'il"s a\1 o~e11t
CU de précipi·t·ation à 1' e\even. Cependant Soli1nan aime tn ieux riiguer de perdre la vie avec t .. Empire, eue del~ ~l ·: M1 1ste o d c~ 1
de S ofiman III. 33
fà.iFc perdre à nn Frere qt1i la
luy av,oit conf~tvée pc11dant
tot1t fan Regne, dur'1nt le:..
quel il })OU,10it tous les j;ours
en oi:donner, & _il lu-y pardonne
les der11ieres ref6lutions
violentes qti'il a prifcs
co11Ere luy ~ parce qu'il les.
impute au deiêfpoir que luy.
caufoit fa perr.e du Trône, &
~ l'apprehënfion d'un~ mort
quifembloit· eft:te prochaine ...
$i tes fenrin1ens d/1i,u111anité &
.d'amitié peuvent faire juge·r
dti -Çarallere d 'u11. l1orilme,
0:1.1~ p~ut eoniwiftre par là
.(el·uy de S0lin1an. Ce Prince..
'ID10 M lStr.'rlo de Ct.H Ufel
34- Hi(lo ire
èn fit v.oir aù.ffi de tendretîe
dés gu'il et1t cfié nommé Em- 1
pere.ur. 11 d~manda des nou- 1
velles de la Sultane fa Mere, J
qu'il 11'avo·it point veuë de- j
puis douze ans , & il fit 1
promener fon Frere Achmet 1
avec luy. Ils font tous deùx
nez de la mefme Mere. Quelqt1es,
uns ont parlé de ce.t J
Achn1et fous le nom d'Of- . , . .
man , mais on n en a Jamais
rien dit d'avantageux, pareie
qu'il pa1e pour un l1onln1e
fans efprit, & comme l1eheté~
Solima11 paioifi avoir de l~
fermeté dans fes reColutions •

· de ul L
de Soliman Ill. 35
inais fans ebfl:ination.
Q1a11d les Rebelles Iuy demandere11t
les tefl:es de quelquc:
s ofEciers , outre celles
qu'ils avoient d.éja obrenuës
de fon Frere Mahomet un
1)et1 avant qri.'il eu{t efié de ..
po[é, il let1r répo~Mit que c'étoit
flulement à eux~ [e plaindre
, & à lff.y à leur fitire juftice
felon la Loy.1 , qu'il prendrait
toûjours pour regle ,J?ns toutes
f fèç ,,,,a.; - s-: · : __ ;rtïtt a c. ~· ... ". o·ns. on 1 n tr,t t' ~'"' .......
efl:é jufqu·à propofeF de donner
fur les Rebelles, voyant
~u'ils continuoien~ dans leur
muti11erie, fans qu'ils en euf-:
'

0 t..~ 1 'er o de C 1 u a
1
1
1
:rs H ijloire \
fe11t aucun pretexte ny· ve~ 1
- i:irable , ny faux ; inais on 1
luy fit co11noifire qu'il n'a- \
voit pas de fo·r,es fuffi- 1
·fan res pour cela, & que les· 1
plus grands Souverains f0nn ·\
qt1elquefois obligez de s'ac .. 1
com111oder au tem11s·. Sa gran- 1
de honnefieté ne l'empe[che 1
point de parler en Maifrre \
lors qu'il efi a proros de le: 1
faire ; n1ais qμelque refolu- tio11 qï:1'rf- preMn·e , il ée0uoe= les avis de ceux qt1i ont pl~s d'éxperience que luy dans leS1 aff:~res , & fair co~~oi~re· 'q_~ 11 ne cl1etche 'E1 a. s m= .
de S olimari III. ..~·7
R:ruire d.es cho[es quJl n·e·
pot1voit apprendre iJendant
fa f>r"if 011. La -parfa:ue .connoiffance
qL1'il .a de la loy.;
fait qu'il.coiadamne la déclaraçion
de la ~L1erre qui a
èfté faite à l'Emp.ereu.r Leopold
avant ique la Trév_e fufl: ·
expirée , & cette r.aifon le
p9rte à dire que pour 'l!epa~@r
la mauvaûe foy qt1' on a fait
p~roifrre :11 cDntrevenaht aux
Traitez , iJ n"y a- point de
honte po·ur les Othomans .d~
marquer à Sa Mà jefl:é Impe,.
ria le qu' i'ls .font prefl:s d'en-
• •
~r.er e~ ne:go.c1at1on pout .
• :;:01 '111 ntster o de Cul•ura
'
33 H iftoire.
traiter d'une paix~'gui puilfe
arrefter l' effufion Jù fai1g qui
fe repand. t0\1S les jours.
Voilà ce que contiennent
plufieurs Lettres écrites de
Confiantinople par des perfonnes
auffi dignes de f oy ,
·que f~avantes dans les affaires
del'Em·pire Turc. Je ne vous
en ay marque' 1. cy que ce que
j'ay cru le plus affuré , & qui
a. efié écrit par differentes
perfonnes. Ce que je puis
ajoûtej, c'e!b que· le nom de
Soli111an eft en fi grande ve ...
neration chez les Othomans
à caufe, de Soli~an l_l, qt1i

1
de S oliman 111. 39
prit la Vi1LG de Rhodes , &
qui fic. un~- ~n6n~t:b d'autfes
Conquefi:es,-que plu.Geur~, &
fur tdltt 1•es PeL1p~e~, croyent
que c-e nou.ve·l Empereur doit
f.l'ille trembler tou~ les CnF~tiens
par ce nom de Soliman.
Il fignifie Salomon, con1m~
celu.y tf Jbra-l1i11t1 , VCUE dite
Abraham-. f! en-eft ainfi de
beaucoep cl.~a\1tres. Si S·oliman
II. eft fi· reveré parmy
les Tui:cs- , ils g' Gt~-iment
guere moins Seliman-1. Il-ne
tegina qu(l deu~ ans &, €}J.:Iel ..
quesltn9i.s , & ne. lai,ifa pas de
yainct:e l<.;~--Gfecs. en Elit=ope

.
4o __ ·~ Hiftoire -
& en A fie.il {ç rendit Maifrrc
de la pluf P-art de leurs Places,
& a prés avoir emporté ·Galli ...
pbli , -Pl1ilippopoli & An.
drinople , il fe prcparoit à
éteadre fes Conquefi:es lors
qu'il mourut d'une cheute
de cheval. Il y en a qui attifi .~
buent fa more à une ·autre
cat1fc. Le.s.grandes cl;iofes que
ces deux Empereurs ont faites
, quoy que le regne de
l'un .foit éloigné de cçloy de
! 'autre de prés de deux Siecles,
engagent ces Infidelles à
avoir une grande éonfiapce .
-~n ceux qui portent ce nom. -- - .

de-...
dé Soliman ·IIT. ~î~
1Sol1man I·II. n~eff pas EOUr.:;
ta11t ft. bien affer1ny, qu'il 11,r·
ait e1rcore· des parti~ pbu ~
llv!til1omet· IV':_ ~ ,pour deux-.
Fils cte'ce mefme Mâl1ornet;
C'e~ ce qui m"éngage à you~
fes faire·connoîfire. o~ailleurs.~
fi Jeurs· .Amis , &- les brigues:.·
& l'argent-d·è là: Sulran.e i-eut
~1ère ,_ qu·i· n!'épargne rien 1
pour f_aire monter l~un ou. ·
l~-âutre- flir' le'• rrÔt1C!. ' . n~cn l
feuvent ven'ïr· à· bout-da·v:f: .... ·
vant- de· ce d-ernier Ernpe-teur,
il eft pref que fèur que
l'on des deLlX luy .. fuccedera',;..
puis qu~11 n ~y a aucune ~ toea!
n,
- 201 o JI r ~torio de cu1•u a
42' H iftoire ·
l'ence qu'ït puiffe lai!fer d"att~
tres Succeffeurs ..
O.n en a ufé pour luy pend'a11t
!fa prifGn , comm·e on
t:n ufe ordinairement pour
les P·ri11€es Othomans dont
'0n· éparg11~ La vie, & q11'on
fe colit-eflte d~· retenir enfer ...
mez. ÜLl' a co~1tu111e d·e leu.t
donner des bi:euvages ,. quii
non feul~n1~nt les empefche.
roient d''avoir des ·Enfans
€luai11d, Qil le\!J:t pe.rm.ettro1t
l 'u.fage des Femmes ,, mais.
f:]Ui les mettent .hors d'cfiae
d'en fouhaiter "fi ce n'efr par
des raifons. pol1tiqt1es >· tou~.
V de ~
de Soliman fIT. 431 .
les d~fi~s que fa natu-re pmur"roit
i11f pirer eftanr i:~froidis;
par ces potions. 1[ a urne f©rtie
averfi1011 ~1our l'e vim·: à taufe
de ladéfen[~ <que la Loy el\l
fair, & comt11e il en eft tPes~
i;jgide ~bfcrvateur ,·il a gr~~cl
.fo1.t1 d empefcher <qt!i.c . 1 om
n"en. b@iv·e .. Cet articlt de lai.
loy ne fait pas la mef1n~im ....
prcffion• ffur be-iucoup de:
l'ur~s ,, quino font pas gvandi
f(rurtale· de le tra.i1f greffer .,.
les uns. par foib1e.(fé, efta.11tr
cfifeél:ivem.ent pe:rfu ad.ez qt1é·
c: eit." un peché., & les aurr~s,,
parce qu:i.Ls ll, G.nt. poin~ d~
.. D ij,

'
Slf-.4 · H ijf oire
Religion . . Il eft vray qu'ils
n·en boivent.~ qu'en p~rticu ..
lier, & pref que toûjours pendant
la nuit, mais c'efl: fouvent
jüfques à l'excés. Le
, Grand Vifir AfmetCuprogli
c:iui s' eft rendu, fi fameux par
prife de Candie, en~ beuvoit
co1nme les autres, & vous ne
ferez pas fachée .de [~avoir
ce qui luy en fit prendre
l ~habitude .. Il affieg~oit cette
Place ,, & lo·i:s <l·u'il apprit
qu'il y eCl:oit c11tré des Troupes
françoifes ,il tomba dans
un chagrin qui ne fe peur
concèvQir~· Tout favory qu'il
r
de Soliman III. 45
ettoit , il ne pouvoir manqμer
à s'en rend~e n1aifire;
qu' il n'y alla!t de fa vie.. . j
,Cette Guerre qui dur0it depuis
vingt ans,, couftoit au
Sultan· plus de quatre cens _
mifle Hdm1nes. les Troupes
s'efioient revoltécs plufieurs
fois, refufant d'aller de ce
cofl:é. là, & fi les Turcs euffent
efté obligez de lever le j
Siege , le Grand Seigneur
couroit rif que de voir arri";' ver une fâcheufé revolut1on
dans iès Etats. La crainte qu'il
en ·a-voit le f.aifoit f-0nger à
préve11ir ce deforclre ; & il
O \il ist r o 1e C 1 u a
'46 ~ Hiftoire _ ·
effoit fur 1~ point d'alXer Iuy ..
mefme en- Candie commander
l' Armée. Il eufi ~Lté obligé'
en m.efme temps de faire.
par politi~ue le procés à Cuprogli,
qwy qu'i~ l'aiJnafr ~·
&. qu'il fervift bien. Ce Vifii
qu"o.n ave.rfi~oiç de tout, fecl1Q.
it de chagrin , & qu01
qu'il l)uft f4ire pour l~ djffi"'
per, il luy eftoit impoffible
6,.en venir à bout. Un fameux
Medecinltal i.en nommé Mar ..
(:elin , qui s'eftoi~ attaché au ..
prés de luy, 1~ voyant en cet
e:fiat , entreprit de l'ea tirer ..
Il l' aili:ura que non feulemtnc
. •
' • ,.. .
de Soliman III. 47
11 banniroit fa mélancolie,,,
mais qu,il luy feroitfentir de
la ,joyc !J pourveu qu'ïl fit\: ce . j
qu'il luy diroit. le Grand
Vifir luy ayant promis de s'ab4ndonner
à [on rcmede, il
fit apporter du vin, & comj
men~a d''en boire a ve(: luy ..
Cuprogli le trouva bon. Plt1s.
il en beuvo.it, plus il y pre-
11oit plaifir. Il fe [entait gay
~};>rave, & s'expefti:J1t avec
.tnQ~ns de crainte ·, il voyoit
fes entreprifcs fui vies toujours
d'un heuteux fuccés. Alors
condam~)a;nt la Loy de Ma~
ome~, qui défe:lld~~t le vin: . -

• •
· '',.f g H i.ftoire
fi feverement , il continu~
'd"en boite, cômme-le-jugeantuîi~.
chofe· utile au b re11 de
·lsErat.· ; &. s~il- -avoit mefme
"efd, il en·attroit-· fait donner
.à toL1tes· l·~s T-roupes €h~que
fois eiu'e.lles devaient· aller1 a
l'affit11t. Il pr·ir la Vil~e , .. &_ n·o
:èeifa po-in?-de boiFe du Vin:
Il pa!fa de· là: aux· Liqueurs,
-'rles Li:queut;5 .à l"Eau-de-vie >
~& de l~Eau 1de. vie ordinaire à
l1'Eau-d© .. v-ie rc&.ifiêe , qu'il
·ne tr.ouvoit pas· oncor:e aifez
forte-, dè f or1te <.'JU, ayant.C011;,
tinué j.ufqu'en 1676. jl en
d-eviat hyàFopique~ ,) ce qui
. fut
.
"O 1 tsterio de Cut•urc1
de Soliman III. .i-9 _
fut la caufe de fa mort.
Les Turcs font perfnadez
que Dieu ne leur marque fa
colere par les dif gracçs qu•i[
leur envoye, qu~autant qu,il'
fe les font attirées par leuris
pechez. C' efr ce qui leur fait
âire que les Chrefriens n'ont.
remporté tant d'avantage~·
fur eux, qu'à caufe que le~
Othomans ~,ont pas affez.
obfervé la Loy, & que.
quand ils l' obferveront c.om :
me ils le doivent , 1 i
Cl1rcfi:ien$ feront battus 4
leur tour. Soliman inftruiÇ
à f.~n~ ~ ~o~~ je v.o.l!~
"T E
• • -
de 1 a
· 5o · · Hiftoire ·
l'ay ·-déja dit , de_ totJt eè..
~ui efl:' dè la Loy, entra dans
'.c,ette penfée lors q1:1'il co·n-..
'd amna Ma.l 1omet Con Fr(7, re à
~emeurer · en prifon .tout le
~efl:e dé (a wie. Il dit · u'il efte.Jt
julfequ'il :Y pleuraf1 es-pt._che~,
-'fnû qü•i[s eftoient ca~(e Ju mal ..
fleur âe l'Empire .pés qu·il (è vit
F.lacé fur le Ttl>ne,il femon:
rra digne du choix qu'on.
faifoit de ~uy pour le · rem-
. plir, par u~e réponfe qu~ilfit
aux Rebelles. Ils luy declarç ..
rere11t qui ils n' obeiroien.t· peint
d fas or,dre's, s'il ne les conçertoit
fi~P.~!~~a~~ ~:;~~:~ eux J ·&_ . ~J
~ .

'de Soliman III. r~1
répondit avec une genercu[e
fermeté , qu'il préfa·teroit fa~
ancienne retrajte à l'Empire de
toute la. terre, s'il luy efloit offert
a'TJec det co.nditions fi fervile.s,
& Ji in.dignes d• un !!and Empereur.
Je ne vous ay point parlé.
de fa proclamation qui fe fit
à:Pera & à. Galata, le mefme
jour que le Sulran Mahomet~
fut dépofé. Tout s'y paffa.~
avec auta11t de tra11quillité ;
qu'on en avoic eu en deil:ituant
fon Frere. Les Bouti-~
ques furent toujours ouver- ·
tes, & ceux· qui ferôient en- ·
~r~z .çe j.o ~.~ =~~ ~ans ECo n.f.t al!~t.,
- lJ
irtstro
j
j
5z l-li_ffoire
tinople, ·fans a.voir rien fceu
de la grande Scenc qui s'y
.venoit de joüer,loin de croire
qu·il ·y1euft eu un change ..
~ent de cette importance ,
, ~ > • n auro1ent pu s appei:cevo1r
qu'il s'y·fu!t rien fait de çonf..
iderable & de nouveau .
1e viens au Portrait que je
~ousay promis des deux Princ~
s, Fils de Mahomet , · ~
Neveux de Soliman. L . .A:1fné •
qui Ce noμ1me Sμltan1Mu·fl:a-
Fha? peut a.voir preft.ptement
. . ' .
~1ngt- trois a vingt - quatre
ans. Il rift-bien fart ~-de belle
-~ail-l-e· ; -~L ;i. l~ p-iine Piure, ·~ --~ - -~ - - . - -· - -. ... -- ... -
de Soliman Ill. 53
beablcoup de regular.it-~ dan~
l~ trairs. Son vifage Fai:oift
un peu rond, fes yeux f 011t
grands, noirs, & vifs_. Il a le
!1CZ a!fez aquilin ; & f.1 bouche
peut paffer pour belle>ai11.
G que f on teint , qt1i eft
i1att1rellcn1ent blanc & uny.
ûn le croit bon,~ rien n'a,
fait encore voir qu'il ait d~\
pa.ncl1a111t pour la ciuauré~. quoy
qu' el lc fe111ble efire na~
u rclle, à, tous Jes l?rincc~ qui
font defl:inoz à. co1nma11der
cl1ez les Turcs. Aufii 11'ell:elle
pas tOUJours da1'ls le fang>
la poli1ique, & la 11ecefficé
E iij

a a
~4 Hi/foire .
des affaires ·l'infpirent ·fou:
vent lors que 1' on efi: fur le
Trône, fur tot1t, dans un pays
eù elle efi:en ufage, & oil l'on
a de\·a·nt les yeu~ les ·exemples
de tous ·fes Predece!feurs.
Mufiapl}a fait paroiftre pour
la Cl1affe autant d-e paffion
qu'en avoit fon Pere , c'eft à
ÔÎre, "<JL1e }'attachement qu'il
.a pot1r cei: exercice, eft outré,
& pat confeque11t blân1able,
puis qu.,il n'y~ point d'excés
qui ne le f oit,mefme à l'égard
des c11ofes qui font k plus
g.:11eraleme11t approuvées. Ce
.l1rincr, aime fore tous les p1ai~
__ _.
de Soltman III. "ij
firs qu'on peut prendre clans
le Serrail , & fur tout ceux de
1, table, Il s'y plaih: beatt....:
coup, parce qu'il aime ex..i
traordi11airement à manger . ..
Achmet peut avoir -prè.J.
fenrement treize ~ quator':t~
at1s. 11 a toutes les qualite·i
du corps, & tle l~efpri't . qu'on
peutfoubaiter dans un grand
Prince,& fi l'en en peut juger
par les apparences, lors qu'il
aura atteint u11 âge parfait·, il,
fera pe11 d'hommes d'au"ffi
belle taille, & auffi bien f:.iits
<].ue IL1y. Ses traits refièmblent
atfcz à ceux du Prince Muf.
.. E iiij ..
e
56 Hiftoire
tapha 'fon 11tel!_e ) mais 011' r j
remarque quelque. cbofe de·
plrusn11a.fle&! d~ plus grand. j
Ses yeux foBt tout pleins de
f~ u, & font découvrir , ainfi
que tour <::e qu'il fart, ·beau.. j
c;oup·de fierté>& de gra11del1·r
d'ame.On en p<:)urroit efperer j
de grandes c:hofes, s'il efl:oit
un JOUt en eftat d'en faire. Il
ne paroift point qu'il ait de j
panchant pou·r aucun vice.
Il eft naturellement prompt,
&. impetueux, mais ce font de J
ces promptitudes qui paffent
& qui ne fc r~ncollltrent que dans les perf onnes d'un
If.
0 ~ o Cul u
de Soliman II!. 57
bon natilrel. Aufli ce· Princo.
ert ïl fort l1um.ain. Il cl1erche
tot1tes les occafio.ns de faire
du bien à ceux qui. font auptés
de fa perfonne, & jamais
nul at1trc n'.a eil:é pl'us
avide de [~avoir ro·ut c~ qui
f.eut ir1f pirer de la Gurio.fi ré.
a Ull }1omrn.e qui V~llt ne
rien ig11ore1:. Il cheicl1e particulieretnent
à s'inftr11ire de
toutes· les chofes qui regar..:.
dent la Guerre; &. dês qu'il
· peut parl-er à quelque Offi ..
cier d' Armée, il ne le quitte
point ·q.l!1'il ne:luy ait fait mille.
que.frio11s touchant fon
.
.. 01 C:i· 1 ' ;t~no (!e Cul Lt a
'
f s · Hiffolre \
Em ploy , & generalement fur 1
les Exercices militaires. Il j
veut tout entendre , & toùtt I
f~avoir ; & lors qu'il s' eft pre..i j
fenré quelque occafion d 'apprendre
ou de vo-ir quelque j
chofe pendant qu'il efioit à
t.able, on l'e11 aveu forrir plu... J
!leurs fois avec une v.ivaciré
furprenante, & s'attacher ttl.a. I
len1cnt aux chofes qui l'occuPoient&
qui l'inftruifoient, 1
qu'il ne fongeoit plus à ach~- J
ver le repas qu'il avait com- mencé. Ce jeune Prin{:e a -toujours beaucoup aimé So- ~iman fon Oncle, prefent~- . •
de Soliman I 11. -
59
.nrcnt ·Empereur,. & on dit
qu'il y a beaucoup de fimpatl1ie
entr'eux, parce qu1ils
ont tous deux l'an1e grande.
Le bie11 qu'on dit du nouveau
Sulra11 , efl: trop. general
pour n'efire pas veritablc.
J'ay l(u dans des Memoires
tres-particuliers, que dans le
te'rrips ~u· on l~ tenoit prifonnier,
ch4cun fça~oi;t dans Conf1antinople
, par les n·ou'Uelles qui s1 échapoient
du Serrai! , ·que ce
?rince arvoit de tres-grandes
q,ualitez:., & qu~il ne luj manquoit
que les occajions de s'inf
truire, .@!. d'agir , pour de'Uenir_
'
6~ . · . Hiftoire
fo.r:t ~.akile dans. bout ce:qu'i1 au;,
roit ewvie d' ent~ep1!enzlre: Ce:
n· eft ·pas que l' ©n do.ivct en:riere1nerrt
ajotJ;tet foy ·à ce
f]U'oh n ~ f~ait qt1e par des
bruits d~ cette nanure. Nous
e11tcndo11s rous 1-es jours van~
t er; des ge11s. -qu'on ctoit capables
des pl_us ha11te:s -pi ...
gnitez & des En1pl0is les plus
in:iporta-ns , qui lors· qrre
leur teputaEio11 les\ y a fait
parvenir , repot1dent tresn1al
à l'attente 1qu'0n av.oit
~uë d'eux. No~u!s verrons d.e.
'9uel1e maniere Soliman remplira
les devoi~s de Souve ...

\
~
_Q 1 ~ lste o Je Gt1J+ll a
,

de Soliman 11 !. 6t
r~in , en cas qu,il n•arrive
aucun cl1é\ngement qui caufe
fa cheute. On peut dire ce:
pendant quel~ vie luy a efté
con[ervée par une longue
fuite de miracles. Le mall1eur
d~eftre né Cadet, .& les . . .
~nax;ime5 politiques de l'..f.tat,
foûtenuës dç-l'ufage depuis
la ·nailfance c).e !'-Empire
Turc·, l'av@ient condamné à ·
la mort prcfq~e dés le temps
qu'il efioit da~s le ~erceau ..
.p1ais Ja S,nltane Validé qui
l'aimoit fort tendrement, fe
fer~it ·de fon pouvoir pouf
!'~? --garantir. Les .diver-s
• 1
1
61 · _ Hifloire . .
foulevcinens qui font arrive~
dans l'Empire pendant quarante
ans qu'a regné fon Ere_.
re, _ont dà: fouvent l'e.Xpofer
au mefme peril, où il s'efi:
I • trouve ,·un peu avant qu on
l'ait placé ·rur le Trô~e, &
dont il n'auroit pas~ échaP.é
fans la-'prude.1t1te conduite de
Cuprogli, pour lors Caïmacan,
qui -a fi bien menagé
les chofes pendant les huit
derniers jours du regne de
Mahomet, que ·quoy ·que ce
temps deût vray.femblable-.
menteil:re celuy du defordre,
~n y v~t regner un p~~fo~4
de Soliman Ill._ 6~
~~Jme} Ce fut dans ce te~ ps~fà
· gueMal101net alla luy-mefmc
â l' Appartement: de [es Fils. &
·de fon fr~reJp(;)ur les facrifier
à,., la.-c:rainte gu'il a voit qu'on
n~ J.uy· oftaft la vie en le privant
4e· 11 ~mpire .' ~~~t il
c.omm~n~o1t a voir qlt.:tl ne
p.ouvoit évitvr la perte.' Je.
·vous ay inart:11ué les raifons # l" 1 J. # qu-'il.., ayoit de croire què la
_ l'μ'o~t ~e ces trois. Pri~ces luy
'empefc,l1eroit que l'on n' or
·donnaft la fienne ; mais je
rie · vous . a.y pa.s apris qu;il
·avoi;t _fi forte.ment :refolu de .
r~ les pa~ épargner·; .qu'il a
\
_o 1 \1 •sterio e ul u a

'
tJ 4- H iftoire _
dit depuis, que ppur 11-jjèurer fan
.coup , il a'Voit rflé luy-mefme
à. l'Appa1tement 01' ils eflqient,
·dtt.ns la penfie que. la Jituation
. où ['on 'i.l".JBÏt ,a/or$ les ttjfaire_s,
forait que·ceux ~ qui. ~l a·uroit
'donné /'or;dre de Jaire mourir
êes Princes, l'auraient mal exe
·çf,Jté, & l'auroi:en~"mefme peut- .
·C'flre t"Y.ahy, eu . que ·s~ils a'Voi.e-nt
efté entiererr;entrefolusà leur ofter
1a fVie, .on :/es en aurait empef
-..cl1·e~ plut..oR,~ue luy , pour rq·ui
·~n .a·'V,oit enaor.e quelque re-fle
- Je refoeE! •. Vans voyLe.z par là
-:à quels ilanger.s .. la ,tefle de
Soli~ .a '.C.~é c.xpofé,e ·> ·~

2 1 'v11 1ster o Je, Cultu a
de Soliman Ill. 65.
que ce dernier n' eft-0it pas
moins à craindre pour luy,
que ce qu'il devoit apprehe11-
der apres la mort de fon pere,
puis que c'efr en ce temps-là
que les nouveaux Souverains
font perir lew-s Freres. Je n~ ay
plus tien à vous dire de cetE1np.
ereur. Je \lOUS en a.y fait u.t.1
Portrait plu-s étei.1du que je ne
croyais, quand j'ay commencé
à vous écrire , parce qu'il
m'eft venu d,e nouveaux Memoir(
s,J e vous pui~ al!lffi afièu ..
rer <iue les Pot.traits des deux
Princes fes Neveux font veri~
ahles, je les tiens d'un habile
f
e •
• 66 Hi/foire -
homn1e qui· ayant paffé plu~
· fieurs années à Confrantinop
l~, a et1 occafion .de les voir
f ouven·t Ce que je vous en ay
dit peutfuflire pour.faire c-0n ...
noilt-re ~e quelle man1ere ils
r.egneront , "S'il arrive quelque
jour qu'ils parviennent à
l'E1npire. Des 1incllnations
.. bien formées degenerent ra ..
rement & le temperamentefr
~·ou jours le mefine. Un hom4
me prompt à quinze ans l 'eft
encore plus à foixante. L~
raifon jointe à i âge fait fo\1·
vent joüer differcns Rôles ;
Mais quoy que l'Dn ~e .de:

e ..
de -Solima.n Ill. t57
gui[e, le ·dedans ne change
point. ~ant aax Princes, , les fages, & hàbile5 Miiuif- ttes , les bons Confeils , le
maniment des atffa-ites , & .certaines neceflicez qui fo·nt
.quelquefois preffantes , peuve11t
leur donne:..- lieu d:c: fe
c-orriger de quelqu-es défauts,
ou du 1ro·o'ins l~s engag.er à
· les faire moirt~ paroill:re, puif..
que fans. cela i:ls pourroient
eifl:re cxpofe:z. à de crt1e·ls irevers
de Fortune, mais d'un
autre,coft·é l'autorité abfolu·êi,
le pancbant pour_ les pfaifirs"}'
tll efr. pref que naturel a tous
F ij
1
1
1
1
1
1
l
1
68 · Hiftoire
les hommes, la grande.facilité
què les Souverai11<S ont de
jouïr de ceux qui leur plaifent,
le pouvoir ·qu'ils_ ont
de s'abfoudre, oμ du moins
le. peu de crainte qu'ils ont
d'efi:re (~pr,is · cle leurs vices,
tout cela -eft caufe qu'ils s'y
abandonnent avec tnoi11s de
· r:etenu:ë ·que les Particuliers
n'en ont, lors que leurs paf.
, -fions les entraînent._ On _reut
·dir-e niefme· q~'ils le font
prefquè fans qu'ils s'en -appeI($
OÎvent, & il .ne faut ·pas. s•e n re, tonner. L es~"C l at~tirs qui.
:a?nnent des loüanges â '-t<?~
01 '"11 1 ,ter o 'ie Cultu~
de S oliman Ill 69
tes leurs a étions en f 011t en partie
la caufc , & c' efi pour cela
qu'un Souverain vercu'eux cfi:
mille fois plus digne d' tloges,
qu,un hom,me qui· efiant
Sujet n'a pas la liberté toute
enriere de faire ce qu'il lny·
plaifi. Je vous fais voir par
}~ en peu de paroles , ce 'qni
a fait perdre l'Empire à Maho1net
IV. ~oy que Je-s
1cvers de Fortune qu'il a eus
dans fcs affaires en foient la
caufe, fi fa conduite n'avoit
poii1t don11é fu.jet d'en faire
des plaintes, s'il n'eufr point
~ba.odonné les foins d~ l'Etat . ' ~
-'"'"O de
·70 Hifloire
po·ur fe ·doriq1er entieretnent
aiux:~plaifirs, &-s'"i:l s'efr0it-pû·
c~nrtaindre pour reformer
les defordres ·de l'Etat, ai.I,l{i
qu.'il l'i:voi1:' 'pro1nis' ap~és
les remontra-nces , qu'i'Fa--·
voit bie:1:1 voulu -écouter la
delfus , loin defonger-à punir
en Iuy le '. mal,hèur 'de ceu?.'~
n·ùi àvoien't 1e c-om1nari(I~~ J . ~
ment -de fe.S Armées, -On l'au...::..

· r-0ir plaint, --on l'aurait ·con><
fùl é, & il fetoit encore fur· Ie~
Trône; 011 n"·auroit point ,eu:
de· prerexte ·po·ur' fe f~ulevet; ·
& on auFoit admiré fon co·u-
r.a..g e,' ·f i1 ~p·re/s av-01.r ~lil·.LCl "b ~ t~'


10 ~ ISterc de Cul ura
de S olim1tn Ill. 7t·
il s,eftoit encore cxpofé' tout
de nouveau -à la te fie de· f es
Troup·es ; mais Join de cela;
il n,en a jamais approché,
quand elles ont eil:é prés des
Ennemis. On a publié qua il
alloit à l, Armé·e ,,lors que
fortant de Conftantinople, il
fuifoit la moitié tn·oins de
chemin que fes Troupes n> en
faif oient pour aller aux b~
mis. On n'a jan1aîs fait
i:dlexion que l,on ne faifoic
courir -c.es bruits que pour
éblouir les peuples , & que
.s~atreftan·t toujours .à Andri-
~ople , ~1 ~~ jama~~ eu un
....
'
\'11 1s no de Cul ura •
de j ·ofiman III. 73
<fe Vifirs. Depuis le feul
Siege de Vienne on e11 a vû
per1r quatre, & avant le pliniftere
du vieux Ct1prôg,Ii
qui eftoit fous le me{me re ~
gne,ils ne duroienrguere plt1s
long-temps. C'efi ce qui lt1y
a fait dire un peu avant qu·it
fuft depor~, qu'il a'Voit ·tant
vû de chofes depuis le commencement
de fan regne, qu•i/ ne luy
refloit plus à 'Voir que fa dcfli...,

t~tton. ,-
. La vetitable éaufe e11 e!l:
encore ignorée. icy) & je fuis
mefme perf uadé que beau:
·coup ne la f~avent pas e~
-G-
-~ -v
7 + Hiftoire ~
Turquie ... Vous l'apprendrez
• • par ce qt1e Je vais vous raconter
dé ~l'Hi~oire d Yeghen
Bnch:a ,. ~a.n.t yay 8es cho(es
tlles- particulieres à :vou'S diro-,
& .que j' ay f cc:uës par des perfonnes
_qui viennent d'arriver
de eonftanti~?Ple, & qu1i
f'iavent à f 0nd l'Hrtf0ire de
cette rebellion, dont.Y ~gl1en
cft 1· A·uteur. L' écla1rciffe, r
ment que j·ay à vous en1don .. ·
ner, pe~t faire .con.rioifire è~
que c'eft qi1lu11e 'forte .refolurion
confuirnment fu.ivie.rpar
un hotnn,1e v~oureux-, intre.
pidt: ,.opiniât\C. oons-fes 'pro~
... '

de Soliman III. 7~.
jtts,~& qui rif que le:tout poun
le tout, plt1ftoft q~e de nç pas..
çonduir~ à: fa lin les projets.
quil a 'formez. -Vous verrez
ttnpo,te .p~r Ia :q11èil·n:r:~ _poi.Bn
d'e·ntref)tifç-{i biiarr.e;.fi·extra~
ordinait<:; &Ji difficile, qu'un.
hPmme~ ~e : ~o .: caralbe1·e· ne l l
puifife .fàjreJré.üflir ,. & p.;rtic:.
ulierem~nt aans un Pays fuje.
t aux grcmdes révolutions:
&i o.Ù[l.a. for.tun~ exerce fes ca-
. l •f ! ptJc.es ~ us ~.qu ~n aucun auter~
lieu du montlc. ,
La braV<S>ure aV.lt.C laquelle
Ghe.ita;n--lbx41hin1.JPacha a voie
défe.n.àa .. la Y·ill~ de J:}ude lor~
9 ij
76 Hi(foire ' l
qu'il for~·a les ·Cl1refriens de
~ever le Siege , porta Mal10-
n1et à le choifir l'annéé fui.;
' vante· pour SenaJ<:ier cle l' Ar-"
mée qui· devoir s' oppo.fer aux
Imperiaux'. Les !ures furent
inall1eureux da·ns cette Ca1fipagne
, qui fut celle de 1686.
& on impt1ta à ce Ser-askiet
la perte q_u'ils , firent prés d.e
Strigonie, qui· fut fuivie de
celle de la Forcèreffe de1·Nett- 1
hau[el, & de l'embrafen1ent J
Ju Pont d'E!fck. -Il fut de
plus a-ccufé :d: av~ir(-'tète~.'ti.
\].uelques denier:S1 ëlefi:inez
:pour le payement des Ttou- . ' • • j ~ ., . ~ ~

J )
' t _I ~ · \
de Soliman III. 7f.
1pes1; &· com~e fa vaJ,eur lu){
.avoit~ déj~ attivé d ~~· ennemis,
.dont .ufil hom1n.e de me,.
;ite ne_ ma.nq·1e jamais à la
Port©,,. fll'r.Jtout lors qu'il :en
~ (l Ç.1.0igné ~ açax_-qù,i s"él·~~~~
·r.eu.t c.~-Qt•~e l μy, ~11_ga~e_re,n ~
le ~ul ta r). ~ envo.yer de1n:an~
d~r ~ teil:eï ., & ç elle~ de qu ~l~
ques a.l't,~tes-, 1 dc;s- prililci~paux
Officiers ·~qti~ a.v0ivnt fçJi!vy
au prés .de 1ll!lÎ. JeyqtiS a y_déja
!Ji>iarqu é ~!a n;,'lorn de c~ inal,,,.
h~~~e11x1 1G.01J~ra'l ~,.1 & je _ n~
vou~- , én paJ:ly. :ic;y que pqu·r ,
':OUJi . fai{e -_v.o·if J.e.~ _,gi:and~
inouve1nens qui 1' ont fui vie,
-- G iij
, .. t 110 rJe Cul UCl
1! ~ Hi'(loire _' , .
& qui ont e~é caufèlJùeMa~
hom{t 1 V. a efl~ dépofé.:
:Y eghen efl:oit- Kiaia, c'eft à
dire, Lieuten~nt de Chtiran,
pendant que ce Serasxier efcoit
Gouverneur de Bùde.
l Comme il avoit ef\:é te1noin
de tou t'es fes léè:ions, il eftoit
charm~ d~ fa v~lear , & ils
s'efi:oient érroirement liez
d'amitié enfemble. Yeghen ne
l'avoir point quitté_, & avoit:
f~it avec luy la Campagne
qui · a càufé fa perte. I-1 ne
tnanquoitluy-même ny d'experience,
ny de coeur. Il a voit
~econnu que les malheurs qui
'1
de Soliman III. 7.,
cftp~cnt arriv·e:Z à Che~raa n~ dev·o~~R~ pas lq:y 1c:fire } impu~
t·~~ ,, ~· qri'il 11'y a,~di~ 'poînt . de fa fa.ut~ dans tou·sl es màu,
v11is fuccés qa 'il a voit eus.
Un General peut avoir de la
conduire & du coeur, & payer
de fa perfon11e, fans.qL1c pour j
cela il luy [oit queiquefois
p()ili~!:- ~~ · ~viter d'efirebatru. 1
S'il n'avoit jamais le n1all1eur
de l'eftre, & qu'il s'en tr:ou•
V.'.lit qui pu ffent ne l' efrre
poi11t , une Ar1née qui eU;
a11roit un d~ cette forte à fa j
tefie , fc;roit alfeur-ée d' efi:re
invincible; 1nais quél a van-
. . G iiij .

fè . H~(foile · . ~ j
tage tirerôi c--el le d' eft:re cotnmand
ée par un G gra11q Ca...: j
piraine , fi les Eru1emis l'ef<-
oienr au~ p .• r un Genetal
qui 11e pu fr t ilre défait ? It j
tfr co11ila11t qu't111 · G1e ne.{a~
t'eut eftre quelquefois battu; j
!a11s qu'.011 pui~e l'accufer
d'avoir n1anqt1é ny de coeur j
nV de· ("()1"',..l ,,: .. ..,, Tl l r n::: .. , / _ _ ...;._.._~ '""'' 11 ltly lUllJL
pour s'aêqt1itter dignement·
d·e fon E1nploy, de prendre j
fi bie11 fes n1efures, qu0il f~ache
route-s les démarches' de's Enne1ni~; qu'il fe'tatnpe biel\
pour n'en efire poi11t fur-.
· pris · & pour les embaraifer ;~ •
de Salim,an:III. &~{
qu.r fa tofre ~agi1fe avec· de 'a.
juJlesl. p.ré(cal,.lt\qns.,, qu'il .. n~
·pL1:Jffêeftre ~atr~qL1é qt1e qi1an~
i~,Le:ve:i.,it bien .~fire; quil n:at;(
U!.que pojn,.r tnal à propos , .Ô{;
GJ.~~ ~·~c.~al;l\-~1;pet1î ç\es foi11~
differe11s. qu:it ·dois: av.G1r lor&
' • j ' 1
qu'il [e reiout ~ do.nn,~r .B.~L.~
trille. , 11~ l' érc:nne poin-t1
j,ef.q~_'à luy faire oublier. çç·
qp~ Îo11 eft1·p~.oy Çema~1de μ;e~
. 1u y da ns '\ .}De J. O. Urpte; e, d· o n~ 1~ ,j.
fl-tccé~ d.è.Fend ,fie_ fa teAe p,lusj
qqf de, ; (q~ J?~~,s ~.<j ~e .. ~efle i1e.
l~ . .fre_g~~Wr " pfis 1 e.~~tier~111ei:-it.11
Les St19~)tw11es pe·uy,ent fair~
deis f~u tÇ~ .. ·, 1~e.~ ~SolÇats p~.v.·· . ..
~ 1ster10 de Cul u à
32 · Hiftoire
vent manquer de courage; J
. la frayeur fe p~ut gliffer parmy
i e~ x >& .. l e~ Er1nemis p eu~ J
ve11t eftre plus forts & plus
braves Ai11fi les grands Cal">:
tJines [ont quelquefois ft1- j
·jets à efire bar rus f:1ns qu'il y
ait de leur fJ.tJte. Q uant aux
Otl1on1ans, ils doivent moins j
que les Cl u-tres co11damner
leurs Generaux lors qt1;iis ont
perdu une Bata1 lle. Comme j
ils ne font poi11t Ja guerre pa.r
rcgles , ils ne peuvent fe
pla111dre d'un Ge11etal, pour- j
vet1 qu'il faffe c011noiftre
qu'il ne ma11que point de.
de .roliman JIJ. -s3
~<iur. Gheira-n .en avoir cxtraordinàiremenr
;_cependant
[es ennemi l~ perdirent, & le
Sultan qt1i le~ écouta trop,figna
l' Arrcfr de fa propre perte
en fignant cel U), de la mort
èe ce Sera~K i ei:, pL1 is gt1e cet
Arrefr a efré cau[e qu'on l'a
dè1)0Cé, tomme je vais vous
le faire vo1r.Mal1omet devoit
épargner cet homme intrepido,
quand ce n'aurait efté
que pour le 1nettre dans qt1elqu'.
une ties Places les plus ex·
pofécs , & dont le Siege auroit
paru le plus à craindre. -
Il eft c.011ftilnt qu'aprés avoir
\
H ;n . 1 8 4- 'J.,otre _ j
(outenu celuy de Bude pett: 1
dant quatre mois, co11tre un J
fort grand nombre de tres.. 1
belles Troupes, il n'y a point \
de Plac~s qu'il n'et1fi pQ dé-. I
fe~dre, & que les Soldats ani- 1
n1ez p:ir [a prcfe11ce & par la 1
créance qu'i~s a\1oiencen luy1 1
a.uroienr liéfendu long-tet11ps J
les plus faibles. Si les Chte.. 1
fiier1s s'affoibl1ifoiept eux- 1
m~mes de l<i mef n\e forte, & 1
qu'ils répandi.ffc-nt cous -les l
jours le. ,fang de .leur~ Cl1.~fs,. les. Turcs en t1rero1ent de gra11ds avanr~ges ; 'mais il fcmble q~1~ Dtt u aveugle ces L '
de S·oliman III. ~ 5
lnfidelles .' ~n Iour- .fai1fanc
uiaintenir, une·politique qui . ·
leur eft fi ~aturGlle, afin que
Ies·Chirefl:iens· profir~111t de la
foibl~~.e qu·e l' éèoul:è.m~nt
p~rpetuel du fang de ce vaf:tç
Emp.1.re ., _· caufe Q.ai;is tous les
liçux de fon étenduë.1 ·
, .. · ~eghen .. n€i pu·~ ap_pre11dr~
~u:on ayoit ·V~Ffé ce lu y : · d~
Cheican, qui ·eft-0it fon Mai"':''
fire & fon A·my, & l'u11 des·
Flus intr:epid1es Cl1ef~ tie ~toüt '
l~Em1pire> & lê; p.;lus c-a;R_ab'lë
de.. lo1fervir ~·farts 'el.Il •relfenrir1
ùne-douleur.dôi-1·t il ft:it ê'rùël2.\
~'.tme~'J::. j>Gnecrél,, &. 'l\li- l~:

"010 V. i:>ter ode Cul ura
8'6 · Flifto1re
porta jufqu"au j defc.fpo,i'r . . n
prit dans jcè rnorpç:nit une for-
. ~e -rcfolucio,n d.e Vflnger· fa
tnorç , .,& forma . des deif~ins
t'f Lll dClvoienç plW.toft ·ptj{'en
pour l~s vifiot)s d'ur1 de(ef.. .
pe~é & d'un homme a.,v~uglé
par la cglé.re-:> é}li~ . po~J .l.OE
p~nféGs d;'u~ h,l{);n.\lJtè • titge.
-t1~re .fit r~rmen~à ltiy·-mefme,
quo y qu' i.l ne pltfl: a\0,rs eftr·e1
re,gardé <ilile co;ln:me l!Q {un"t
ple ,particttlittr , d'C eO\ll:flt
toute la terre ) &.de .~e r~reI!'·-
4rc a,W,c,t1n .re_p0,s, q14-JJ n,e.uTh
htvé ·a.ae· Ar·m~e a!fez . fQJit~
ppu~ l.e mçtf(C.. Ç,P. ~f\at·d'·exs:.: .
1 li! · ·roJe(.;ulua
de S oliman III. S7
çutcr fa vangean.cc. U c;fi.oit
du Pays des Curds ., dont je
yous a)' parlê dans ma..Lottro
· precedenre.ll y retour.oa av-cc
une p.o.ig11ée de Ces '.Amis,
tous bra.ves, &·-ge11.s d 'execution
; ·il y en cr.ouwa d·autres
avec lcfquels il e)l fitde..nou"!:
veaux, qui luy- en procure ...
rent encore- qu~lques-un~ •. Ils
amafferent ce qu'ils purent
d'argent, & leyereut jufques
à de~1x roille .PayC'lns , donn
ils morn:erent quelques-uns~
Yegheo en fic:plu!ieursCorps.
qlli f1i1•ite1nt , ~Qretn~ndc.z pari
Ç<tP>= 4~. fcs .,.&mis tJl ·_qt1i il
,
s s · Hi.ftoire
avoit le plus de confiance.,
Cette petite Armée ~fiant
.encor~ .. -gro.ffie , /3' Y eghcn
voyant qu'~ln'y avoit plus de
Troupes~nyd'argent à efperer
du Pays_.,où .il efi:oit ~ refolut
d'.aller dans .la Natoli'e. 5011 ~
Arinée loi~d.ediminu.~r p.e:n:dant
fa tJ?.a.rche ~ a·ugmenta
confide~ab_lement, pa.rc~ qu'il
çn eut beaucot1_p ~e foin , &
qu'il ne la laiffa manqu·er de
rien. Com,me qllc s'eftôit dé .. ' •
ja renduë puilfante , .&.1 que
fon Chef -eftoit redour.able ,
les Peuples ne luy oferentrie[_l
Iefu(er. Il e~ tira quantité d~

' ' .
f'
_ de Soliman III. 89
bons chevaux, qu'il dorina à.
une partie de !es Troupes qui
n'en avoient point , & il re..:.
n1onta l'autre, dont les cl1e~
vaux efroient méchans. Cette
A1rmée s·~ccrut ·encore, & la
maniere dont elle efroit en.
tretenuë , excicà beaucoup
de Troupes à s'y joindre.
Ces dcrnieres abandonnerent
leurs Corps , & c·omme ~Iles
avoie11t plus d'intelligence
dans le 1nétier de la guerre
que celles qui efioient nouv
·elle1ne11t levées, elles aider,~
nt à les di(c1pliner. ~oy
ql{t les -Turcs ne rafi11ent pa~
H
1


90 H iftoire ·
tort dans l'art Militaire, il~
ne lailfent pas d'avoir des manieres
, & des regle'S qu'~ls
obfervcnt , & il eftoit necef.. .
faire que <::es·T roupes en fuf..
fent inftruites. Elles en avoient
déja quelque teinture;
eiles en apprirent davantage,
de forte qu'en pea de tomps
~l ne leur manqua plus rien.
Yeghen ne s' arrefia guere
dans tous les lieux où il alla,
& il fe contenta d'y faire vivre
quoique cemps fes Troupes
fans vouloir ruiner le
Pays. ll fe rendit enfuite à
T.he1falonique ·avcç f on Ar~
1
de Soliman III. 91·
n1ée.-Jl fqavoit qu'u·o' Bâcha·
qui v~enoit d'Alep, y devoi·t ·
paifer . a:vec deux cens mille
~èus qu'il pone0it à Mah,o,,
mec. J,h les ·luy .. dc1nanda , en
d,ifant qu'il luy en efloié -dû, .
~ que c'efro1t pour le fervic~
~e· i·Empcrc~r. Lé Bacha .f~
·trouva fort erμba.ra(fé ·. Il n' e...i
~oit pa,~ le plu~ fort ' & rl f~ç·
co11traint; d~abando.nne-r ce
' ' qu:il ne pouvoir: déf-e-ndrér
· Le_s Troupes fe re[c:iniirClJt der
cet .arg~nt dont on ,lêur diC,-u:
ibua une 11a.rtiç ., & cela
~yan;: redoubl~ l~aff~étiotj.
q q' c.l!es av o,iç1..1t-pour le.~~· G~.i.
H ij
\A .tl.-ro Je iuu
9 z Hjftoi.re ·
ÎlCilral , ~ fit ·en in.cf m~ temR9
gro1ffiri:·{oh '..$ rin~e.-i On1 ~y
com pt-a ' qtlktl'î~;j ou~ oin.q~n1il1é
c1~e1\7l0'!'r-rd'élite. ~ egàen .qu·~
ne vouloiti: que , la"per.te"'des
J?articùlibr~r'''lui eftoiè'nt Çilufc
dèi la m0t~1d~; fon -tMailtr'è;
pe ·r.fe déc·la·ra paiat- €ont·r~
l:Etatl, &-tint· fes deffeins, ta- •
<:(lréz. Il ,di tr'qtt i·l · ferviiroi t'ta
H'ofil·gric avec ,fes· T.tol.fp@s,~·
il s'y rendit e11 éftet Le Grancf1
Seigneurr de1nanda à I-e·voit
lors qu'il cm pirit la 'route,. '&.1
luy tic faire (dits~ honneffetez>1
. mais-Yeghen jt1gca à: propos~
tk· p~tfer ~utre:>i fJ(. de·;fê join~_
"O teric • e- ul ll"a
de Soliman-III. 93"
~re à l' Armée , fans fe jetter·
4âns Jes pieges qu,il foup~on"
a ,luy r ~fite'"' tenclll , .&-cela
.n'rjt,oi~pas-hors d'apparence_•.
V nus f 'iavez de quelle maniere
... fe p~!fa la Campagne; je
~e le repete point. Le mal~
eureux 1f uccés qu'elle eut ,,
fut avan\tag(:ux à ~egl1en, & i
luy donna lieu de c.ommen-'
cer a' mettre en execut1. on ce
qu'il avoir projetté depuis fi
!Qngremps~, & , qui lu,y avoit
çouré tant. de foins, de_ pei..:
l)~s., & de dépenfe. Il fit fe-'
creten1ent fonder fes Trou-=
pes par f ç~ Crcatures , _·P <?~·,

94- Hif!oire
f~avoir fi elles né feraient
point difpoféc:s à prendrel,ef-
'prit de re:volte qu,il vouloir
leur infpire·r; & ayantappFis
que felon les apparences tout
devoir répondre à fes defirs,
il employa des perfonnes fi
habiles, & qui agitent, avec
tant de f~fre;c. ou,il .s,éleva
• • :i
tout à coup un foulevement
ge11eral , fans qu'on en puft.
d~viner les Auteurs. Il leur
ft1t aifé ' de fe cacher parmy
la confufron. Elle. devint fi
grande & fi generale, qu'il
efioit irnpoflible que la veritt
fLril . aloes devel0ipée, &

de S oliman III. 9 5
qu'on puct connoiftre ce qui avoir donné un fi grand mouve1nent
aux Troupes quiap- puyoient la rebel_lion. Chacun
z;;royoit y av.oir efré
pouffé.de foy-rnefme. Cepen- dant les premiers y avaient
e{lé portez par les Emi!faires
d,Yegh-e.n,& les autres avoie_nt . ]
in[entiblement {uivy fo.n e"
xemple. 011 cria contre le
Grand Viiir Soli~an , parce
~u 'Yeghen avoit refolu fa
pérte; & comme Siaous dl:oit ]
aimé des Troupes qui avaient
a-dmiré l'increpidïté de fun j
courage e1~ ·plt1fieu.rs occa- ..
-
~ 1
1
.96 Hi/foire
fions, & qu'elles ne voulaient
point reconnoii~te plufieurs
de lc;t1rs Chefs qu·elles accu7
foic1'l t . de l~cl1eré auffi.bien
que le Vifir Soliman , elles
choifirent ce mef rne Siaous
p~ur les commander, & c'eft
ce qui a fait croire qu'i\ cR:oit
le pren1i.er Auteur de la re ..
volte , ~ien qu'elle ait ~fié
vcritablement excitée de la
maniere . que je viens de le
warquer. SiaOl}S qui eltoit
fage· & pQlit~que 11e le_s. rèbu·
ta point. Il auroit tnal fervy
le Grand Seigneur , & .... l'.Bn1-
pire en agifià11t de .la,. forte>
'j .& .
de Sr;fima'n-II l. ~7
~ f®!eroit:.exprif~ à la·furreltr 1
d~s.1 1;:F~upes , c.}ui àttioren~
pû1 le Caorifi.er à l'eur rëfle11ti'"'
men,t. ~Je voüs:ay;·èlit.de qri'ell~
ma.nieré~. il s'e.fr go:uvt:rné jlJ-fqm.
es1 àu-. jotlit qtJe' Mahb:met
r:v. aoofi6· d~p'Ofîê ; ~çomlife
il .. s'aecommed~ "'au' '.tèmps-,
voyant qu'il ·ll~~peû:voit eni ...
pefclïè·t l!,enti~te!è'liOEte- dê:ce't
Emp-erear~ 'll-y a\i'mefi\te:·l.ïe~
de croire ~qu"Y çgfien ·& tuy
(;fta:nt del mê·ftne p.aft,y ~· cOt).
que Si~ous ~fîed:âà.c-ttu m_0;ins
1d~e,n'' e~~ '}-1~ fôn de[ein-~'n' é~
tànt .. qûe .. d.e iè ~tonferver .da:rt$
ies: ·b'?.~f!es·, g·91c~s. ~t1 pl~
,.., I h ,
, 10 ~ 1ster"o de Cul ura



• de Soli,nan 111. , 9·~
cf un Mouffaip ou Favory qu·~.
ayoi.t tendrement aimé, ~,ivp~
là/ ,p.our,quoy çeux g~i.,
nlon,t p~s appro~o11dy, l'h,if~~·
toire d'Y ~ghen ont dit 1 q9e.
~-1~ 9.rancl Seigneur, lors 1qu!i[J
l~y avoit voulu dqnner~ _,,fa~
~ille, l'av9i~91ferte ~n wariifrrii
ge à un 'Y.ol)ut d, Aftce. çe;1
Favory, ~gt,lt -~l~e e{\oi~Y~\:!r;i
v.e , & , qq~ f~ g~omm?.it 1{1.}~J
· taph,a .culogli~ ,(,.avoit e!fé ~!i"
4~;1r~ux i ·t: q~e'l JK,,g~aq~ ~Çi.fi;
gne\lr ~·a~ajb\·~i~S1 ~'{~5:tg:~
~tça~~e~çqt i'ô~onè~v:a?)f. ll
râvoic g:agnéÎesbonnes 01:acês1
J ~ J ~ _, , t>- < - :1•
P~\ld~tAf.L'i:il $~oJc P.~g~61!19s
· , I îj. .


I
201 \.11 ISterro de Llll.u
. de Soliman Ill. 1Ôt
fumez dans le Serrail du
·Sul.tan , & qu,ils ne pari.en~ ·
,jamais de la puiffance d~'ati-,
cun autre. Prince, S.'il arrive
qu'on leur en di[e qt1elq1:Jie·
cl1of e , ft1iva11t les ocëa{Îoii~
~tri en 11ailfent à prÔpos , if~
·d,emapdent auffi- toft fi cretJ
pour ~es menacer. u' on /e~t~·tie~:
<tle famblafJles. di cours. Cul9gI1
;n'en ufoit pas ~c mefine. ~l
.voul-'lit cfi:re1nftruit de t.out,
r. &. pre11oit un plaiûr finguliér
J. ~nrendreracont·er toutes lés-
V<>4 ':;/ ~ ' •,j Q
~ion~s d~ (~oy: ·ce ,dïg~c
fay9,çy 1fut a~r~9~~ d:~J;l~ mf ..
1ad1c exrraorè11na1re , &:. dont
1 iij ~
, '\
. .



e w

JQ4 Hifto'ire
l' Armée que le Grand· Sei ...
~neur qui avoir offert fa Fille
a Yeghen , c1l:oit t:n Traité
avec luy, on en fit de grands
n1ur1nures. Ce Bacha en ap- j
prehenda les fuites, & s'éloi ...
gna de quelques. jo11rnées de
l' Armée .avec fes Troupes,
de la fi~l e}ité defquelles il fc
tenoit fetf~. Vous avez fceu j
Je rc:fte j?f qu'à la dépoifef-
. fion de ~ahomet, ~ ce que j
"lll". vou~ avez appris a pu
vqus fair~· connoifire que s'il
n,avoit point eflé dépofé fi.. toft, par.la prude11te conduite
& par Ja .fi11e· politique de .· -
de Soliman 111. 10~ . "
-Cuprogli: Y r.gl1efi at1roit pu
tra,vaille·r ·urilemc:n:t à dttoui-i
ner ce cot1p. Iî efr demeutré'
fp erll:areur de la fang-lant&
Tragedie qpta fuivy la cl1ure~
de ~<::c:t Empereur . . JNous'1 vet~;
rons dans l~ fuite d@ èett~.
Hrfroire quel party tl aura!
pris, & quel perf onnage il aura
joüé. ' · 1 ,i
Comme~ les· frequen~cs tél1
volutions qui arrivent da11s'I).
l'Empire · Otl101nan c0uten-t
pre(que toüjours la vie auxOEancls
V ifirs; 1& qu,·innèceh~sJ
ou coupables, ·on les facriiie ..
ordinairement à la fureur des,.. . .
. .

'"1,q6 · · , .Ji iftoi~e \ j
)(~titin~, lor~ qt1~il ~~ a .qt;e
ce feul ·moye.n de le.~ appa1-
fcr, il_faut qll;'il y ait df gran~s j
,~qarrn,es. ~tt~chcz à cetçe pi:e-
-mier~ Dignité, l'uis. qu'Jl fe
rioJ.1ve touj6urs aes Suje55, qui
:V.t~le~~ bien J'asceprfrJguoy
, aiil~l QC puJ!ffJtj po;utel" qqe j
-c~e , tri_fiç , 11}.ql\ne.~f ~fi .. Jc}oiv,e
-bien-to.ft- caufer elt,r ~ .ne1rte. - .J. "' , • -:i J 1.,.... , J ,. ..nr L.
.,N!~s 4~ux I:~ tre~~q1:1Lf~~t Jl5s j
. Qe\lx _. pr~μiitrs ,Wolumcs de
ce,tte ;Hifroir.e fous , le)tit~~ qe M ahomet detJ.ofledé, "onrenant
. 1 :: • • r; 'Ji ~a ., c. ·' •ll .t r~
la n1ort de quatr,r Gr.and~ V,i·
• '· .J j.)711. i
{jr~ )·j~ vais vou~ marq~er !cr.y ~e g.u,e c:eft quç.~S~~~~~n~rg_~l
1 lt od v 1Ua
.
rle Soliman III. 107
o.âfi11 que vous jugiez mieùx
-~e l'efprit, de la cônduite, &
't1e I·apprel1enfion toritinuel-
Iê que doivent avoi'r 'èeux que
l'on éleve ji .ce pofte1 dange-
·reux- . • - .... - 1 ' l '
~ ~ Le Grand' 'Yiifi r comnian-
' dc: à ro'u't l'En1~ire, &' difpore ]
.de tot1s lés honneurs & de
toutes les Cl1arge's, à l'exce
·{ptron 'dç·c_eJl1es ae Judicature.
·11 écoute luy feul tous les
'fAmbaffadeurs & tous les Mij.
nrftres tle t·E~a~, & let1r rÇ- 1
~~tn·él n.~t?mtne·1 ~l luy plaifi.
\El1fintedurts"les gr~11des affui ..
~e~~ ~» rani: 'èivilès que. t:Di~i::

I& 0 d
los · Hiftoi1·e .
nclles font en fa puiffance, &
fe terminent par fa volonté.
Il va, tepir le Confeil qa-On
appelle Divan, quâtre fois la
fe1naine au Serrail du Prince
avec les autres Mi11ifrres, {ans
toutefois qu'il fair obligé de
P,rendre fc'ur' avis. Le Di111an·
cl1e & le Mardy il re11d CO{Il·
pte de fon ad1niniftration au
Grand Seigneur; que fi pen.
dant la fen1ai11e il arr.ive quelque
chofe de con (e~uçpcç,, il
l'en infqrme par 'éçrit; & apprend
fa volonté par.la· mefme
voye. C' eft par ce . n1oyen
qt1'1l fait Çcrangler cet!x qu1il
eC



1 a :11· steno de CutlU'a
'
. '-
. .
Hiftoire ~, ,

11 O.
avantage. pour ceux cw1 ne
p_euvent avoir ju~ice, ou qui
font opp.t:elfez p~r ~u~lque
G·rand. Il entend .bien fouvent
des differends où il ne
s'agit pas de deux écus, & .
conda~nè ]es coup~1~s jtifqu'..
à cinqJ.laptc; , ou cenc ~~- .
fionn.~dès ,,~ ,: qu.~i\, ~FtJ~ fait
d,onner fous la pla~t~ ètes
pieds. en- fa ,prcfe~~e·_·Voilà
le bien & fé• foul~g~1nent
qu'il appo.r.te au P~9p~e;::.n1a~~
qu.and il fe rencont.r.e.,quel ..
qu'un .en cet~e Chaig{.,eap~-
1'le d'en- abufer. 1il a~ h_é-aucoup
de cQ'mmQ{l~tè. ·4~ m~l ,
faire. · · · :.i - - , '"''""' • · .i

'de ·soliman-f II. 1t1
1
~ie·Gra·na 'V-ifir và f orf <}tou-:·-"
ent la nuit a1ux·Prif ons,& ine .. ~ ~
- r ·r ~ • r · ~ ne rou1ôurs ttn Bourreau aye·c
l'u~~ afi11 de faire +nourir e~-
. fa prefence c·eux qu'il crouv~
coùpa·Bl~ ;·'~·ar il n'y àpporte
àut~ for'trte d~ proèê1 gue f01t
feti13e" olonté: s.,11-~rintê.?ntrèf:
àu:ll1 a·uèlq_u·~11 pa'.r.:la, Ville; .
P. h 'Il nr11 ~ t , ~ .,, l ·f t:i 1a,nS' · amoe~u aptes que a
d~r'Hilr~fl:ôi-~-iCon'. efi:· :.f;t!~e· ~"!
qui e'ft envi~on à ·trois lieu.:~,
re5' de n~it _ èh hyver, }I Iel
faitr.P~l!dre , au g~e~ie,r ._en~:'
d{dît trd&~e1.~Enfin fon' at1Y
totîrf eh abfôlu'ë ·, &1 il eOE.
p1rus1 Eî~pèrAil'f~ qt1e le s~ltà'~~
·•
)
"
1
1
11~ · , Hi(toire • -
l}lefme._. ~c· çfi à f on Sç.rr~il
çiùe chacun va faire Ca Ceur,
à caufe ~~iue to~tcs chofes dé~
pendent de luy, de forte que
s'il n'efioit point en danger
d' eftr.~ ét~anglé, il aufoit fu}
jet de s' eftimcr plus peureux
.. que fon Maifl:rç. . ,
Quand le Grand Seigneur
n' eft p<f:int en perf onnc à l~
guerre, le G.rand Vifir y va
ordinairement , pour 'coml!
lander l' Armée avec μn
p.~u :1oîr entier~ment abfolu:
car aut~ejl1ent les Jan~ffa,ires
& les autres Soldats -de li'
P~rt~ refuferoisg.c d'y aller,
' .


de Soliman Ill. rt;
s"il n'avoit le .ttioren de· rè ..
çotnpenfer ceux qui fervente
bien , ou de châtier ~eux qui
font mal. Si la guerre fe
fait du cofté de Perfe "le Sul--
.ran a accoûtumé de fe dépoüillet
de la conduite & du
gouvernement de toutes ·les
Provinces de l' A fie .pour le
'donner au Grand Vifir ,avec
:pouvoir de , co11ferer t:omes
fes Cl1arges; mef m:e (ell~s des
:Beglietbeis ou Vicerois. La ]
!Jlefme chofe fe' pratique,
'quand1 ils font· la-guerre èlu
~ofté de l'Europe >~.fin d'ot:
lig~r ":* p'lufiei1rs · p~r(onnes. ]
' J(
a
'


1 • M :'l~l?-'ic> ~é Cul ura


-
1
1
1
1 l
1
' ,-- ~ .
1 Io •. :· H iftoire· ·
. ,, Qe dernie,,n .Arti-0le devrt>it
.em pcf ch~r ·qu'on n' eqft c.n:vr~e
11, de joiiir ·de €~.tte Charg,~. On
l a neâ,.. n. i m:.· o.. in·s le mefino emj>
teffe.~ent .1p·cur y,-,parvenir"
. _ ':}U.~jil1ors qu'on e11 eft ~evofiu
}l on·ne devuit1pas efire.dapsd~
:<~. • c0ntinuelles a1armc".s'".\ ·~ha,cun ~ crait qt1~il îera oû plus, heu~·
Jeux , ou· plus ha~bile qlll~ f0μ
Pr~deceffeur , ,& da.n& ce,1OEJe
p·enfée 11 n' ~nvr~f~ge qu~
l )honneùr., & le p0u-veir,.qt1'it
.y voit at.t.açhei .fans jt'tt~ri l~s
yçux fur Je ·pe1fiil, & fans:·Ce-n:.:1
fiderer qnela.b©n-11.e condui~é
n: e,m p.ef chc pas to.û jo:urs l~
. \ - -
••
1
' 10 ~ .::..ter ode Cul u•él
de S@liman Ill. tf7
:p~rte d' ùtll' 1 malheureux, lors
~quJii c-ft; en:vié ;,.;e qui ar11"ive
,pr~fq 1l'e ~oûj0urs dan5· •11-n"e
haute fott·U-ne _J parte qu~iti eil
.imp0f1i@ie ·:,de fatisfaire to'u~
ceu"d~·wi croy,ent ~mer~iiter dol.
gra'eest& &es ta'Veltrs. '''" ~ · · ·
· 1J eAc:rdy; qt.i.aptéoS· avoir éftê
·é'ct-htlircie a~ tan~ d<t .chofe~ -
-qui poar:r.oi·e.utt attrefle_.r ·cèU~
11uin'·enfir0·f'ènt p.~s infrrui;ts 1~.
vous lire~ avec plu&dt; pl~i,/;i~,
la cpntinttation d~ o~tre·hif~
·toir·ei p\JiS" "fu~., rl'Cn"' ,n' emb~
r:affe1:a~o plus 1
' ~~ftre · ,ëurio~
fité ,tJu. nroi~nsiors quïl fera
~q:eihion-~e plui}eu.ts p-eJ?f~~~

' • •
.01î 'iA11isterio .ie 11,ura
.
~O U lste•10 de Cultura
. .
de SolimAn 111. 119
:ttësllliil~ .feure , ''l~SfJ:"Gfrardi'n ·~
·-:Amliaffal1.eu~ dè Fr~h;c't'â.'.~14
Pbitt~ ~oûJbors.J~leirr~é-~e
·v·oy1inctf; fitl amaîfer qûauêitê ,
de· provifions tte· ,bo·ffiitlè"·~
. .de Guerre , P' ordon11U 'qti~
·FôJ:. ri1fra~la~_g~ t~~~r~es VaiÇfe~~
frâ!{~ots1 ~u1 ,~~~ied~ 'à
t)bn&ant}ttop~e: :[es · Mar~
~li~ds1• J1fi(·F~t-in~tr?e J~'ur~
iiffitlèufs tWèc~t> 8f' cet-'1\m:.
. ' 11·a!fà1lèur:r1i\f <tlùr1le fé âifén- l( ... 1Jt('jufqnè~aal;;I"êxtrêntiiè aveb
l:.gûteîfitMafforl?~ 1d~ s"etti~
Ha:~~~~:>~rlru~tèvfur~1;és ~ttHi~
·s V~iîfeau:i;f~iv~î?t le cb'llrs
T1e pr~~ar:oi~~~·- r~ 1P~uv~
• ,. . . ' '
~ 010 'v1 "'ISter ode Guti:ura



1 to · :Jfijoi'·re ·
tnens don.t· il. '°Voyoit. ~a1o-t:S
l'"Empit-e agi:rè. , • . · . • '
"'· Soliman ·ayant efié pl~cé
(ar le 'f rbn~ , le P.et.1ple em
marqua b.éaucoup .. de·jerc: I~
11'·y a "pas lien rl~e,:,s;' enr-iétonser_,.
La ~.nouveaoté ~ toûjours lié;.
_.qu«)y.luy·pl-aire, & quan:â·ellt
luy aevr.oit efire prejta~i€ià.l.
bl~ , il: fcrffiÇ qu?-dJe ap,prol'tê
que'lque change.m'en,t~· la fa<JC·
.â'es a ffaiire~ fïO'.U'r 'lLLy·d(D:nne:r
tieo des'em1réj.oiiir. &Tu:r.G~
àlî=oi~nt en cené o€aafion. d~s·
" .fu;j.ets do fair.e.iléclattel'.lJl ~l~f·
• ) • • j • )'oyt , que n· amo1~nr· pcts-.eusi
leS<P·e:uplcs,de p1'1Ü!.e1lts ~~
·1-2 Nations. , , - ----- -
o vl st rio oe Cul ura • •
de S of iman III. tir
N,ations,. Comme ils.·fontcx:·
tremement furetft.it ieux , ilsfe
perf\;ladoieBt qu~il fuffifoit
-d .. avoir changé d'Empereur
P-"ur.chariger "en m.&1ne temps•
~e fo:w.tne, & ·qtt.e le mtl:ll1eur .
qui a~oi,t: acrompagné Ma;.
l1om:et .depuis quelque temps:,
& qu'il c~mmuniquoit , ~
l~EJ.~pire ,.,fetoit detourné par.
le nouvel -Empereur > . fous. _
qüi le Gouv~rneme~t ·feroio
plus- ·heureux.- Su1,vant. lN
~nfée.. l'0il .. ~ irs efl:oicnt to~c.
d:e:voic~ cOEre: tranquill~, & il
ne fall~ie fong~r qu·à: cour~~~~
.'.s~~ni~ .... CepL9,nda~.
.. "!•1• i ~"-""~ ·o; r"".~:Jl
-_o O ~1 !Steno de Gui urci
1 i 2 · Hiftoi1·e
il y eut e11core beaucoup de1
ting répandu avant qu'on fe
di·f pofafr à tetté ceremdnie:
Ce qui avoit ~aufé les defôrdres
n" efto i t pas encprç· airez
trieur non plu~ que les f tiïtes,
pour p~rmet1:re q~1e_ la 'trâil-.
quillité fé rcrablît en fi pea de
t.~mps, & que l~ori r.~naiO:
fi -toit le calme à. ceux qui
n'ag1ffoient qu2'Par un ~fprit
de rebellon & de fui:erir.
~oy que le. malheur qu.i
avoi t f uivy - toutçs les· en ..
:tteprifes de M'ahomer;~dëpuis
lâ_-fevée élu Siege de Vienne,·
&· :(on ;:n1au:vai'.5 gopv.e.rnçC"
-m--e-nt,, ~eu.f f.e n-·t- fait d_.. e _ m-an_. d. _.e . . t.
1
de Soliman III. 123
qu'on le dépofaft , les Chefs
n'efroient pa_s encore d:ac-~
· c9i:çl ~ptre eux,. Les uμs voJ.L..
!oient fe ·mieux. affermir d1ins
les nouve~es dignitez où les
avoieot faitmonter les 1roù~
les , pà~cf qu'ils s'y riouyoieot
en.ç·ore cl1ane'e~.'1ns.;
& les autre~, qui n'avoie(lt pas
à leur gré affez profité Çe la
revolte , vouloient s'·tlever
âavantag~, ~faire defcendre
rl~ ,let1~s p,offes pour .s~en ~m,. :
p~~er 1 la,plitfpart de "ce.u:x: qui
les venaient .. d' occup'er-; _Les I; ~ -. •
ÏrRupes . cfe .leur coll:é que
i~~n avqit ëxcitées~ à. vouloir ~ i.. .. "."' .. L~ • L .. W 5-_ ,,
,,...,;. . 't!'f.- ..,L ·... "~, . , lj ~ . .SV :i. .. ~ tJ v Il .v: .1. ~ 1 !- •, , ~ 1
_: l .J.
' • ,
t~-4- H~flo~re -:-1
~ nouveau. Maifl:re , ne~ fc ,
trou:voie:nt point du tout difp9fées.
à.}1~é.ttr~ les ai:mes bas
·quay qu'ell~ l'euffent obte ~
~ , & quand leurs Chefs au ...
r~ellL efté mieu~ d~,c~ord ~ ]
& 1u' on les eult veus conten;
de cu~s1 ~ouvelles dignîtez ~ .. j
&. de leur fortu.l}e , elles ne
pouvoient fe refondre à ,ren~ ..
tJèr fous .la difcipline. d?nc-. j
on le.ur avoit~fait. ft;coiier le
joQ.g , en y excitant mefme
par des prieres çeux qui é.:
tQient les plus difiiciJcs a,
émouvoir. On leur avo~~
l~i~ gqQ.~~~ !~ p~~ ~~ ~ . - '


1
de Soliman Ill. r2r
domination. Elles agi!f oiertt
c11 Souveraines , elles dépo~
foie11t , elles condamno1cnt., ·
rllès execu to!ent les Arrefrs
qu,elles a voient do11nez_., ellei
ne reco.nnoiffoient i1y Chefs,
· ny Souverain, ny Loix, & ee
qui leur plai[oit plt1s que·
tout cela, elles s·e11richilfoient
par le pillage qui eft·oit leur
continùel . e·x~rcice: Voilà •
po~rquoy les T oupes ·n'ont
pas efié ar>paifées dés· le mo.ot
~ent qu'elles virènt Soliman
~n poffeOEon de l'Empiré , &
ce" qui les a empefcl1é~·s1d~' d<Z~
.~eurer trarlquilles ~ ~ef~
L iij
fZ6 l 1 Hi/Joile _
)af qttès à fon Couronne.metl~.
Lés -trou~l es •'ayant paru erl-
\lierem~e'n~ affoupis , quelquës
jours kprès ... qu'il eut pris le
,, rnanime11t des' aff~ires ' on
marqùa Ji-0nziémé de N:"o- r ~ ·- vêifibrë 1peUt .. rs'aëquittefJ·ae j
· tette ceremonie , &. Yon
cominenca à travaillér aux , ) .
P.r1epar,'1:tifs. } ~ 101 t' ir " j
· "' Il n'y, avo!t dàns Cânfran
·tinople ~ qud''qûinze ou. fe1ze
. cens ·hommes , Siâous , nouveau
Grand Vifit, h'ay11nt as
~Jrigé · ~ ptop8sf11d~èrt'1 'ênv3 er
-davantage: . Ces Troupes qùi
n' êftoie~c compoféès ... que
1 '
- -~-

de Sofimart III. ?il':ï7
d'Officiers & de Soldats cl1,o- ifis
, eftoient venuës f-0t1s la
~
~ c~~duj;e ~·~p. .(iJPJ?fG ~Fa,l~y
nommè le Petit Maho.n1et,
que ics Spahis 84 les Janilfairès
qui s'eftoiept liguez enfembie
, e·n fe j·ura11t frate1rnité·,
(ce font les tcrm.es 9-ont jl. fc
fervent en ces occa.fions ) a-
~~ affellfo~it. (qrt d'eilre dès
Amis du Grand Vifir, & p.a- j
roifiàit luy cltrè entieren1ent
4év.q~é "çe,qui ~·~fi:oit pourrant
pas, c,omme la iùitc le
·1(era paroiftre." Siao;û~ . qu~.t~ ...
y.oit en lu~ upe gça.nde. con-
. L iii j .
i ·2 a Hi(roire ' .
.hapce, .}'avolt envoyé (;om~
.me . u11 homm.e. de 1nain , &
.Ptctendoit juger pari la ma;. J
n1ere dont il . feroi~- rec eÙ',
.:omment on le r~cevroit luy"m~
fme ', & s~il n_,y'"1voi~p-oint
dr; par~is, CÂ'chtz dans 1Gàn:.
ftanti;1oplc quireuifentformê
qu·e.lqucs deJfeins.contre luy, J
.& ~ iqtri.· ~he.rcha!f~mo ~« lie~·
truii;~. Tuu~ fe ' tirol!va·, dctUS j
- l'efra·t qti'il fou.baitioit, &tqlle
Cuprogli ., nouveau Caiima4'
can , luy avoit marqué ; &/. le
P~tit Mahomet ne rencl>rttira
pa_s encore d' ocçafion d'ag.IP po~~ r~ propre~ ~!!~~r~~~ ~ •

1 a
de 9Dli·~'Àh l~I.- 5i~~
-com·m~e1il·l!aivoî1: téfdlu :QE'.e1- -
:ques:jo·oersaprês~ Si~~us· ~rr-1\Tà
~n~ohftàll1l ti î'@p )e'ï'lW'C!é ,lpè~i
Ide ;r'3"oupes.;1fl,rvoul~t~ani
,f~~er le·t'<ïlmê, ~; àpp?ê~en~
:dnir-qrie l~~i0p gràîlidê!(juânt
ti1té:'de :g~nssd,~ ;:(;àètt~tiafrf~
tfa1 fitii.1niGn.rw efroit..1ttur• êr-r
prit' ;"nè,.caufartf~ lc _1c léfp~tltt
'!U, l• .CJ r_ ~i) " •r-J. f1i C'I'" ' ' & 1.1u n;.en~i:~1· .ce e-:XO:t1:1;1. i;J1a0u~
~;efli'iei~l'à lCh1r~e'Qfê Grà:nl'.f
~ifiit., 1D1111,,tcf g1-ii" fb1i1:) B,~~û~
,freF~eft0i1:€aimacan,'J &'.Sol ..... .6 "--
1ir$n i~onrrle\èêitt~i'E'1:lpir@1
~3fur.J1'<1l~li0hl~utl ~îtiile .tt 01i1l
lrlni<té' .~-eiliallp1~g11 gùl tJ ~j
~ • I 1 I ,J. • .. ,...,
rV.Q~~~~~~.,~~ûl.J!.~ ~a~e!'êA~,


. J 50 H iftoire ..
iμy bien.faire augtrer de.(qp
llegne ,, d~ forte qu·e. cet .ha..
bjle-Capitaine , & ,ce iage :Mi·
·nifl:re n'avoient plus aueuns
de . firs à former que pour la
tr~nquitrité pub!ique . . Ç' é- ·
.-toit ~Ile feiul~ qrii lFs pouvoi.t
conferver dans les hautes di~
gn·itez~ & dans·Iafaveur aù
~ls eftoie11t , at1 lieu- qL1ç de
J,lçuV.eau.x t,r.oubles , ~ ~e
nouvelles fedirions ' pouv.
oie11t les d~truire, &en .élev.
er d'autres efl: . leur plf\CC.
Ma~s. tous le,s rem~qe5:· qlfe
leur prévoyance, let!~ .l1abil~:
té, & leqr pru~ence y ~pp1Ql;-::
. • •
'

de Soliman III. i 31
·terent furent fans effet, &
pref que auili~:roft qU:e Siaous
e'ut guitt~ le' Camp , les 'J'ani[
aires & les Spal1 is s~ étant ·
·débandez ,v inre-Ht à Confta.... n-
"tinople par· petit~s Troupes~
~I y en entra de la forte prfs
··de cinq' ~illè é}μi fe mutine~
·ent aprés s'rl\:re confederez,
'ave1c ceux q1te le Petit. Ma"
homet y avoit amenez ' &
-avec d'aûtres Spahis & Janif"'
faires ' qui avoiént accompagn~
le Grand V1fir Siaous.
' lls s'affemblerent dans la Place
·dé l5Hippodrome , & ces affçmblé
·es ·durerçnt prcfqu~
et;
132 Hi(!oire -. ·
pendant tout le refte du moiS
âe Novembre.
. L'Hippodrome eft· , une
gra11de Place qui a environ
quatre cens pas de long &
c~n t de large , & qt1i eft bafl:ic
fur un ~and nombre de pil-
. lers & d'arcades qui la foû ..
tiennent,, & empefche qu'el ..
le -ne f oit f ubmergée par les
eaux de la Mer qui coulent
deffous par le moyens_ -de di.
vers Canaux. C'efl:oit en ce1
' · lieu-là que les Einp!rè9rs
Grecs faifoicnt manrer "les
plus fuperbes chevaux , &
qu'i~~ ~~~oi~~~ ~~ J?~upl~ ·
.
de Soliman III. t3J
'l~i les regardoit d'un Thea'!"
tre dre!fé au bout, le .. pla:ific
de leurs ;nagniftqt.te.s courfcs;
Ce Tl1eatre .eft . .inaintenant.
~~attu , &. les. belles pierres
(lont il efroit conftrui~t , ont
ferv.y Àe ma.t~riaux pour les1
Palais des Bachas que l'on a
bâtisautour,C~ft.e placequ'on1
appelleencore.AtmeideJt ~ c'tft
à dire; ,M'aneze ,f~rt au~_ J:efies,
~ui fe font pour la Circon-:
.cifion des Princes Turcs. I Lès Mutins continu~rent
à s'y affembler , . & plus leur J
nombre s'accrut, plus leur
infoleate téroerité redoubla.
- - - t -- .. -
'
) de
·1;3~ H ift.-oir( • .
~es E~~s 'fet'liti~ux apim~~e.nt_
1 lt:s .Elu&_ ti!JlfdeS,-; I' ~~-~NRli
les fortifia dans la revolte ;A
l~impunité· les encouràg~.'l '
& ils ~μrent c,hatmez du pl~l'.i
fi.r qu .1ls ~u,re~t de p~rl~r ,_ &
d'ag'ir efi Souvèrai11s.· Ils n~é- /J · T. f fb,Ji p
pa.rgnere!f.t pas le Grana .s~i:-.
gneur dans ces airemolé.es tq:
~ultμeu.(~~· !~~1f© ~~~(gn~~en~·
~μ Gr~?4-~1{\r qu ~Îs a~9.ient
6-lu po11,r leur Chef, lors qu'ils
avo1. ent ci:ommence' 'af. ceI '.:.io u. .j
• " 1 ' l_e.ver·,· & l?:o~i J~q~·el, ils a~
~,pie.~t ,tolf j~pf& .. 1trlaf,'l~é do.
1 e~1,mef~ "S47_âe If ~qtp.1ffiop._
Çuorogl1.:f~~1 Bt;aufrere, UQU· .
. 1" .. 't.- ~...i\1 "''~ 11. - ' J ....
••
•0 lv ~ ." "lstèroo de Cul~u à
' •I •
de Soliman III. r;s~
veau Caimacan , leur · avoir
ç
pa~ digne d'adoration quelques
jours auparavant. ( .Ce
font les termes employez
dans mes M emoires. ) Ils fi~
rent voîr des fentimê:ns tbut ·
contraires, 1mais' on peut dire l
qu'ils furent . avantageux à.
cî:t ha.bileMi t1if\:re-. Ils av oient 1
c0nnu fon .efpr.it: fon adreffe, 1
fa cond11i.te & fa · fermeté-, &
quand ils vinrent à faire f~
fre~ion :'lu· efl:ant auffi hàbile ]
~v~1en,t , pas 1p~etend~e qn il
apt1r9u.vafr leur rebell1on qu'e 1
pai èies 'r~i:fb ns pôliciqtleS' ,1&._
1
·o 1 1steno e lt r . ]
1
r3ô · H iftolre ·
pour s·acommoder au temp~
ils crurent que la mefm.e a ..
dre~e qu'il avoit J:t:të:..~li mé,..
nageant: toutes çhofes 1 pou~
d~p·oCer Mahomet ;, ·afin d.c i
les fatisfa~t;e' peur~oit eil:i:c
cmp.l o ye' e1uru1·.011r avec 1a me"" . .. ,
ine ·ptudenc.e ;pour les châtier
.. Ce_ fut· poùr cela qu:if $
chercliercn~ à. Ce 1ilaindtc
de.. ·Illy, -t afinf· de.le ,fuettto
, hors· r d'eftat ~de travailler
au. châtiment ,. .dbnt .toute
l'autori·t.é qu'ils ayoienc.aio.rt'
ne les cmpefchoit p~ de fê~
.reaonnoill:rc dign~S:. Ces Mu~
dns.:.tenoient des· caafeils fQC
....... __ -·-- · "'- --- - - - -- --~ . . . .. --1 .. ...
"
1 ~1"' ,t r o (le Cultura

àe S'OlimaJiI11.. t~?
leurs- a:ffaires communes : ils
nommaient· des Députez qui
alloieot tous:les j:0urs trouver
le. Grand V 1fir,& luy parloieU:'
avec 1, outragean~e infolence
dont f on-t .remplis des R.ehelles
, qui s, e.Cbat1't :uhe fois af-.
f~rmis dàns l!cf p1it ~e révol
·te:, net gardena plu·s <lie mef u-res.
-, G:e.s E>énutez F.endoient . l J'
compte d.cleurs negQc.i:àtîons.
au~ plus· emportez · des fe_
ditieu.x: ·, .. que.. dcur car.altere
'aVoir·rr:faît 1mom?ler ·par. <:es
!nro1upes~1'oui:(_::lts. ,c omman'•
-tl~r,·)' &cl1att:url de ces ch~fs
'
~~p p,o:tt'ai1. _. :~nf~~t,.-lj\Jl~--e.orps
M
,
_ 1o '-ft1 ·oe 10 Je cu1•uo:p
,j)~~ ~ r 1 r Hift6i:le ·;\'.
:;r9tti'll1 o,<DJromandoi~, te que
1~mnJaw:<r>:it n'egocit: ~infi on
Jrpau.t! n:liro!<fue malgre·leitù.
-JIDlaltd de c-es afièmb'1·é~s "'fa.
?1.&ieuf{ts ,. i} y a·voit une ef pcce
.1df.<:>Jjclr11er <lam~ le~ aff~rrre~ de
~etlttl{dont1l~cfpt'itf& dàe ~con~
~::duite mai'q~oient l!Jrt .e.nr:ier
dérfg'lemaμt , & qu'il 'Fly
rJ1'3M.©i-t paslln ·d~ ~s Seditieux
. -qui ne .. f uil: ~init-rU-itt d.c.s .cho
·~ f;(jS tîjhli regard-0ientf la1Confe-
:dèiràti0.n e.n gerteral , .«::e qui
.. mJarrri~e p-as · que.lqtfef-O>~s~hns
"' ~e. •>~®Clrft~ ;<Let.tpa·.rrio:üdicp.
• bs.t Jani.OEaires , cHagrimlS ~'de
=-tw· .IDi<i>int"~ roeev.·a1r .. " l»a:r~'(ljnt
··~ . 1 ·w' .A .
.1 ' l'!li. '
"
·o 1 ,.,t. .. 10 de -ul'1.1 a
. de ,f ofi'man III. .. JF39
· rqu;ils demandoiont· deptii:is
·li . long_temps a:v~ec 11·merimp.t~
t:~0firé ~ooroyahle, , ~1illotept
~ les pr1etnièr's ,crie.r à la "l'>dtt:te
du .iSer:r:ail r,, & ·.pleins ;;~'lin
çi~mpu(te.ment, qui .,n·oih ·.feu.
ment' ·eft0it;fort .éloigné.:.i de
1a prof oridè ,.,venen tion que
-; les Tu.11.lCS ; qui fu .tienrient it;.f-
4' ~lavès .. Q.es.. Emperear~ 0 cdm -
mans:_, _;o.~tt .~accdu111umé ~m-
- ' ' ~oir. 1?.our . eux., JJ:Ylis enc~ore
~tdu fi1n pk~refpe&,. ils d~na11-
:?.derentil'.ft.~:en. _~ ~eur d.0 11nt1~t
fqu•~mais ... d.e.paye. q~.i- leur
---~ftor~t1 dûs, c-a~et:{ lflt1 1 A·frre
.rpard·j G1Jr >l'. da1J t: ;0 n ·rau g·tp e.n te
i1 ij
... ~ ~ .. -..----
.. Q10 ~ft l'"ster o Je Cul ura
i-4 ô Hiftoire
la paye de ~haque Janiffaire,
lors qu'un , Empereu·r
monte fur le Trône~ ils .vou~
lurent auffi avoir le prefent
qu· on fait aux Troupes pour
le couronnement des nou ..
veaux Sultan~ ,. quoy quo Soli ..
man ri' euft pas encore·· efié
couronné, & qu'ils {ceuffent
bien qu'en I•eftat où eftoienr
les affaires, il y avoitrde.l;.im ...
poflibil.ité à leur donner tou.
tes ces f-0mmes à la fois. Il!
allerent encore pl~s lom. Ils
demand~rènt ~rVoir1ltt Gvand
Se~gneùr , & fur ce qu~ il· ne
jugea pas à.pi;opoS:4' f~ m~J?s
..

él
de ;g()/~mathIII. .>41
frèt -'davant d,es. Seditieux_, :ils
men~~erint ~ d~enfo.JJG.~r ~ l~s
po.r·tes du ~èrtàil s~iJ · rejuf ~.it
:dé pavoifrre. Ils djre.nt.l!p©Ult
·excufer.U:me teïn~fitt fi.h.1lr·~i~,
,qu,'~on. lavoit. publ~.~ .que Ma;!hCD.
met av,Git .fait m~μri.r ' f~s
F~~res ~ & qu'il}s'eJloit (a:uv~
en ,J\lie~,, & ,qu'ils vou.loient
que a.l:a p,re(ç-~e du. ·Gf~~
Seign·ear ·les éclairJ;:iuil1 ,de .. l~
fau~té. de cç:~ bru_its ... là, d~
\'
1furte qLUe · Spl.j_m_an.~ fc ,trou-.
~à .fotcé .. ,our 3~~~erJl'~ml;
-po.rrcm~nt~ ~es1M:Ut.!n,~,ïàre
p_aroit.!J:~ 3:1ull\ ;Kiofqu.~~ .C~ic(t
~c·ef_pec.e.J.d~1C a~ill~~· f l~·':~ !-
• • •


"O 1 O ~ "'JSterio J~ Cul'u'"a
/

142 · Hijloire
~ il y a beaucoup_ de ces
Cabinets dans le Serra;ils font r
faits pour le Rlai!ir de· la veuë .
... Les Rebelles retournerent r . •
plufieurs fois d.evant le Ser.
rail, & de1nanderent les teftes
d'un fi grand nombre
d'Officier:s , qu·el'le-s .fe- trouverent
monter à cent foi-xante
& deu4. fur la lifte qu'ils
en firent. La plu·fpa-rt de.ces
1nalheureux n'eftoient repu.-
- riez coupab1es , . que parce
qo,ils .avoient adminiftré les
Finances,_ ou qu'ils avoient
la reputa:ti_on d'avoir,du bien.
rarmy , l~·-~gvra11d n~mbre .. _, !.~ 1
1.--. . •
c
-
'de J1oliman III. I41
pouvoit s'en trouver qael ...
-.qu·un qui euit malverfé. L' oc€
afion nrefme qui tente tous
l~s hommes, pouvait e·ftre
caufe 'qu'il y . en avoir plus
qui avoient manqué à leur
devoir , dans ce maniment
d~argent • que s'ils avoiefit
·eJCercé d:autres Emplois·;
mais la malverfation n'eftant
~point indif penfablement attachée
au manîmens des J:=i-
11ances > on ne pei1t condam:
nér co1n1ne; criminels c'eux
lJUi en ont eu l'adminifiration,
feulement parce qu'ils
t~.onr lC.Uë---·füans le fort de. ces
_. ... - . . . . . .. . - ... -- - ...
t
0 o e'"' •
.., .
'J 44 H iftoire 1
L
de"f ordres, <Soulouc , furnom~
n1Â le' Petit Ma.home, dont'1jè
vbi:l's ay déja' -parlé, en qui
Siaous a voit beaucoup de cre:.
ance, promit~ ce Grand Vifir J
1qu'il employeroit tout-le cre..
-dit qu'il avoit parmy la Mi,.
.lice pour .a~refrer le c~?rs ~e j
·cett-e fed1ti-on.' Ce · n e·ftott
-cependant pas f on delfein·,
Comme il n'avoir en veu-ë
~ue de s'élever' , il vôuloit
fe conferver., & avec le pre• j
mier Vifir, & avec les Re ..
. belles, afin' qué l'un des Par~
tis ve11ant ~.,f'uccorril::>er, il ne J
pufr roa~que~ ~~avoir des
· Amis
- - ,
. 1
de S olim-an Ill. ILL).
dans celuy qui auroit le de' t:
fus. Son principal but efioit
cependant çle profiter ;du ma~- .
heur des autres .. Il ne le pou.
voit que par la fedition &
par le def ordre, parce qu .. en
continuant il falloit nece.ffairement
que pl uueurs grands
Officiers periffcnt ; & .ù eifJeroit
tirer avantage de leur
cl}eμte ~ & rrriver ~ p~r -là..
aux plus hnutes dignitez. 5011
ambition qui efro1t (ans bornes
, le r.,ortant à toL1 t , il
f 9~l1ai.to~~r J~ Ber.te , d_~ S.i~o1.i.s
dans le tenips qu'il l'embraf-
(oit;, &, qu~ pa,r les o!fre~. d.~

~ . . . N
.,

., 4 ,6 Hi(foire ,
tout çe qu'il pourr6j t ·faiiiç
Four le feTyir; ~l faiiûît pat
. roii1r.ç· qu'il lu,y voul1oi•t rdé.i.
· .v oir fa fortune;,1 nais il eut
b~au. renfcrrue-r to.ut'1:s · · fes
penfée! en luy- ine'lme, Lie i-ba~
i:i,eg.e qu'il fir e11 fom,.enta:t1t
fot1~ main' la divifi.on .au .liea
de travailler à l'éteindre ~ ai- . da ·à f~ire. develo:per fe·s fen ..
ti.P1ens ~ & Sl-aous fut é,lai17::..
cy bien-tofi de la verité. Lé
procedé de te Tra.ifrre J)irrita
de re1le forte, qu'il jug.ca à
prqpos slès'endéfatFe .. A pei.
ne eue-il 1narqt1é· les .raifo11s.
qL1i 11:1Y faif oie11t c~oire ,quo .
..
te o de G:ul u a

. de Soliman Ill. 147
fa perte eftoit ncce.lfaire au
bien de l'Efra:t , que les
Chefs de la Milice furent de •
fon fentime11t, de forte quiils
y travailler. Les traiftres eftant
toujours fur leurs gardes,
Coulouc en fur bien - tofl:
averty, & ne marcl1a plus'
qu'avec. fcs Creatur·es, qui
avec leurs Ainis & leurs gens,
fe mc11terent à plus de deux
ce11s l101nmes, qui l'accotnpagnerent
par tour b~cn .. armez.
Il eftoit à craindre que'
dans un temps otl les plus_
fcelerats avoient le plus~ de
N ij

14s · Hi(loire · ·
pouvoir. , c-ette Troupe ne
groffift, mais les ennemis de
ce perfide ne luy laifferent
pas le temps de fortifier fon
Party. Ils firent adroitement
répandre _parmy les Troupes
qu'il ,!es t~ahi~oit > & qu'a.
oandonn;i.nt let1rs inrereits il
1 ~ ~ ; ·~ a voit des~ intcllige11ces ,fere~
tes avec les (Mini.O:res de la
Porte. Il voulut s'en jufi~fier ·
dans l'affemblée qt1e les Sedi ..
tieux tin.rent le 14. de No:vernbre
) 111ais comme fon
ainbition avoit déja éclaté
en quelques rencontres, que
les préjugez c;.O:oiç11t c:ontrç
• ,
de Soliman ·]JI. r49
1uy, & que pour -efi:re efii1n~
coupable, il fuffit de do-nner
iie·u au foup~on parmy 'des
Revol cez qui font toujours
en défiance , les J aniffaires, &
les Spal1is le regarderent comme
un traifl:re, & au lieu de
L'écouter, ils· fe jettererit fur
Juy dés qu,il com1nen~a à
ouvrir la bouche, & l'a!fommerent
à coups de baflon. 11-s
ne fe contenrerent pas d.e 1uy
avo·ir ai11fi ar1·acl1é la vie , ils
inirer1t f on corps en pieces,&
iê jetterent dans la Mer. Le
mefme jour le corps du Cairnacan
Redgep qui avoit·efi:é
N iij

f'50 Hi(t(jire ·
·e1 rrangl e' qtle 1..q ues J.O .ur.s au.pa-
~avant da11s,la prifon;fut jett~
hors du Serrail. Ils luy couperent
le· nez &·les oreilles,
1
Iuy arracl1erent la langue, &.
1L1y .firent mille indig·nièei;.
c~~f\;-Dit 1 un h@mme de fprt
bon fens; ,Çx_ p·o11t ·Ia politiqt1e.
plei11e de yiguet1r aurait
empefché les· 'Rebelles d.'a.,.
~ancef jt1fques à Confranti::
nop·l~ , & les at1roit 111elme .
di1Ii11ez , fi .Mahon1ec IV~
?,'euft pàs rcfi,n~ à ·res iavis·,
co1n11.>1e je 1 vous '; l~a'Y, d éja
marqué ; & c' efb pat ..c·etfe
~a~Co11 que les I\1utins. lux a.v:
• •• •
,
de Soliman 11 !. i 5·r
racherent la langue, voulà11~
punir l~inftrument qui a voie:
parlé contre eux. Si les con~ 1
feils de Redgep n'eu.!fenc pas,
efrébons _, & qu'onn'en eufl:
pas deu tirer de grands ava11.
ra_ges pot1r détruire la révolte
, les Rebelles n'auroicnt .
}JlS fait voir ra11 t d' e111 porre-
111en t co11tre fo11 cad:JVre.
· .Le le nden1a i.n c:.~s Mutins •
·eila11t encore tout échaufl".'c::z
du inaffacre qt1'ils nvoie11t .
fait le jour precede11t, & des
indignircz qu'ils avoie11t
exercées fur le corps n1orc de
Re4gep. , . allere11r ei1 fort ·
N iiij
. -.
r52 · Jlifioirt
1
• J
grand nbmbre au Serra1l du·
-Grand Vifir Le refus qu'il lit j
de leur parler les irrita >J ils
s~ernporterent, & fans -entrer
dans de longs raifonnemens, j
ils femirent d'abord en efl:at
.:d·e luy faire violence ~ & a ..
-voient 1neGne d~ja vou1u entrer
de force, lors que ce Vifir
_parut à un Kiofq11e , ou J
Bal con de !on Serrai}. Il n' oublia
rien _,pour les gagner_, & · j
îâcha de toutes inanieres de
les adoucir. Ils f.e retirerenic· f.Ans efl:re perfuadez de J fes
railons, mais auffi ils ne luf
fiirent aucune infulte. Toute
de Solimttn Ill. i53 l
Ja ref olut.ion qu'if s prirent, 1 f\lt d'envoyer fix Dèputez'
porte~ leurs plaintes au nou- 1 v.eau Sulta11 ,. & d'alle.r da11:S 1:
la Place de !'Hippodrome .1
en ~ttendre la réponfe. Soli- J
ma11 ne fit point de difficulté ,
de les a.d1nettre l fon audien ...
ce, & les -écouta d'L1n.air qui
q\loy C]Ue tranquille , n1arqu.
oit be~uçoup d'indigna- J
rion & de n1épris. La m·aniere
.dont i_l leur répondit leur
~ç.voi+ de la~ grand eur , & it
ptjt un .ton at1ffi 1l!feurt que '
fier pour" leur dire , ~'ils
efloient bien infalen; d'ofer en ...
r d ' 1 l
15 + 1-li.ftot~re ~ J
trepreridre fans auct~nt autJJtit~
legitime J de fe r:1êler des a.ffaires
de f' Etat, @f de difpofer de ltr j
"Vie & dls l/Jiens de fr:s Sujet.s;
qu'ilefloitaj]~z inftruitdes Loix j
d.e l'Empire. J & de tout ce qui
en dépcndoit , pour-n'ignorer ptt~
que. · lrrtr defoGeijfance & Leut j
.t.émerité meritoient d'e.fl:re cha~
ftiées rigaureufart1ent, puis qu'elles
eftoierzt caufa dtt. 1r1a14ru4i~ j
e11at où [e trou'Voit alors la
7~urqt~i.e, & de la continuation des co.nqneftes de~ Cl1refttr;ns ,
a.ufquels i/5 abando11naient d~s
JJfaces que let,/,r honnefi.r, la fi- delrté qu'ils luy devoient , ·&
• •
de Soliman III. 155
/fur Religion dervoient les engager
à dé.fondre. Il ajoî1ra avec
la mef me fierré , & le mef me
t01), ~~il 'Vou/oit rétablir par.,.
YfJJ (!f.f.X l'ancienne dijèip line J &
comrncnccr par là la reforme de
l'Etat, & qu'il leur Jeroit 'Voir
par la maniere dont 1l fçauroit
trouruer leJ moyens de Je faire
obeir ~ Cf'' 'il n' arvoit poi11 t de fain
plus prçjfant q1-1e de fe rendre
a1tJ!i cfign~e qr-te fls Anceftres, du
T1 Ône qu'il occupait ; que ca ferait
mal le t fmoig,ner, s'il ne le
remplijfoit que pour recervoir des
Loix de ceux d qui il en dervoit
donner, & qu'il aimerait beatt:
' .
l56 Hiftoir~ j
ceup mzeux rentrer dans une fa.:.
litude qui ne Luy Jèrqit point de,
honte , que d~ obeir quand il de- j
'Uoît commander. Il leur dit enfuite
d'un ton de com1nan- j
deme.nt, qu'ils ordonna(fe11t
de fa part à la Miliçe d~ fe
retirer prompteme11t en. fes
9uartiers , de celfer [es a!fem·
bLées dans l'Hippodr0me, & j
de fe re11dre le 1S. au Divan,
pot1r recevoir l'argent qui j
leur efioit dcftiné. Comme
rien ne fait plus d'effet que la
prefence & les difé:ours d_~un Souverain qu'o!: voit ·fJce à
face> ~ & que l'on entend don• ·
de Soliman Il!. 151
ner fes orè.lres , les plus emportez
& les plas rebelles [e
fentent · · faifis ·d'un certai11
n1ouveme~t qui leur infpire
du refpeét & de la craiinte ..
~a veL1ë du 5ultan caufa cet
e'ffet dans ces ' Députez. Ils
s'e n rerournerent avec un ai. r
auffi hu1nble & auffi f oumis;
qu'ils avoient .affeété d'en
faire voir un ren1ply-d'a!furance
en abordant Soliman.
Rien n'efr plus politique, & ·
ne marque plus d'efprit que
· c'e que ce !' rince ~t dans çette
preffante occcafion. ll parla
d't1n ton fier pour ~onfer::.
~

I)& Hirfoire '.
ver 1'4onneur de fon rang, &
pour inerîter L'e fiime de fes
Sujets, en faifant corinoifire
qu'il efioit' digne du 'l""rône;
m~is comme il efioit dangereux
de trop aigrir 1' ef prit
des Mutins , qui n'efioienr
déja que trop animez, le Sultan
s'apperceva11t qu'ils i1'e.
fioient pas en efiat de fe re11·
dre à la raifo n , & qu' oh n'a~
voir point de forces à leu'r op·
pof er pour les faire renrrei.:
dans leur devoir, ou pour les
punir , &nit f on dif cours par
l'ordre qL1'il leur donna de
. ve11ir réc.evoir de 1·a rge~t .
r .. •
de j'"'.olima n l Il. I 5 9
.s'il s·,oftoi~ f~;vy d'àborêl de
~èrm~s. -ru~es· & ,fiers, il ju,.
.geoit bien que éet ord~e ei1
adouciroir l'a-igreur, & ofreroi~
le prétexte de fe pl~i11-
clte aμx Flus. ,.mal jncevtion~
nez. Le Gra11d Vifir a voit eu
beauco.up de peine à ·trouver
l'argent qui d.evoit efi:re diftribué,
& il ri' y en a voit qt1e
pour neuf n1ois de paye, au
lieu de qui11z.e que les Troupçs
pretendoie11t leur eflre
det15. Les J aniffaires receuren r
c·et argent , ainfi qu'il avoit
cflt marqué. 011 crut qu'ils
Çftoient preils de re11tre1, da1~_s
r•

160 · Hiftoire
la foumiOE.on qu'ils devoient
à leur Souverain, & ils l'au ..
roient fait .fans ce qui arriva
dans la fui ce. On leur ordon ..
na de fe preparer à marcher
ince1fammenr vers la Frontiere,
& ils ne dirent rien qui
marquait qu'ils n'avoie-nt pas
<ie.ffe!n d'obeir.
Les Spahis furent mandez
pour recevoir auffi neuf mois
de paye ; ils en voulurent a·
voir quinze, & refuferenr c~
qu'on leur offrit ., en répondant
ave-c une infolente fier~
té, qu'ils ne recevroient rien,
qu'on ne le·ur don!1all: tout
de Sotinian l l !. 16 L
ce qui 1eur efioit dî1. La cl1ofe
efioit i1npoffible , & ce n'a.- •
voit pas efié fa11s faire de
grands eftorts qu'on avait
trouvé ce qu" on le.ur offroic, & ce que les J anitfair-es av
oient r(:cet1~ lls fe ;r~tirerent . en proteftant qu'ils trouveroient
bien les 1n-0·yens d·e fè
faire payer, & s"eftant difper.,.
fez par toui:e la Ville, ils re.
-commencerent leurs dcrordres
, & leurs .brigandages. Ils
fe raffembkrent le lendema!1:i"
& E;lalgr-é i'égàreinent où ils
efi:oient, & l'efprit de ft1reuJ
~u,i l~s ·agi to·it ; & ·qui [en1-:.
0
Yo 2 _Hiftoi re ·
bloit ne let1r pas deyoir laiffer
• la li.bercé du raifo~1ncment >
jls firent reB.exion que fi les
J aniffaires .JJ.e. fe joign.oient
- . .
avec eux , on\ s en pourro1t
fervir quelque, jour p·our les
.. ;111ertre à la rai.f on , & qt1e
,·- Solima1:i, qui_ efroit up Pri11ce
J fier ' n.e t11anqu ~rait pas de
Jes pu-ni r·.s'ils tle~neuroie·nt les
· · fètrls ob-fi i1i.e-z. Cela leur. fit
VG>ir qu'ils avaient. befoin q·μe
le,s Ja11iffaires_ cont111uaffe11t à
.eftre d·e leur pa.rty, afin qu~il
fu fr impoffibleau ·Gra-nd. Seigneur
de _fe vanger , ~d - t111 fi
gran-d i10mbre de.. T. r.o upes
r ,-r ..:te Cul u <i

de S o!i11ia:r1 l l I . t 63
puis. qu'à 111oi11s que les t111es. 11~ fer~iifcnt à dktraire les au ...
tres, il n'e11 avoit point qu'il .
fuit en pot1voir de le11 r oppo- ièr. Ces ratfoi1nen1ens ne fu·
rc11t faits qt1'entre q11elques Cl1efs; mais co111n1eccs· Cl1ef~
efroîent rour-puifiàns dans le
Corps,ilsfirenr répandre p.ai:..:
111y les Spahis, qu'il eftoi ~ al-:-..;
folun1ent 11eceffaire , qt1'i ls
n1i!fent les Janiffaires da .1 !~
leur p::irt y, & on en fit. e11r · cvoir
l~s rai(ons aux plus 11a--. j
biles de ces Spahis , l'Jrce q·ue
les autres fe laiffcroient con ..
dL1ire con1111e fo.11r t ot1s Jçs j
6 ij


1
cl

1164 . Hijloire .
· 'Sediti~ux 1, qui ayant. une fois
.Çecoüé le jou·g, coht1nue11t
· .dans la .r~v0l.te fans · prefquc
f~avoir pourquoy -ils agiffent.
c~·tte ref0luti.on prife.)le&Spa..i
hisn' oubJjerent·rien de.c<! qui
pou voit .. c·hliger lies ~niifaires
des· op1n1at4:er a·de1nander le..
refl:e de leur paye_, _&·defeμlier
avec eu"X pQ.ur e.ilrt paye-z ~n2
·tieren1e11t .. ils-alloren1t:les;.trou.~
ve.r juf que dan--s Jeiur !Jda:~
Vous f 9av.e.z q.ile.ce C2orps efit:,
diviCè Rar;(Zha.mbre.s ,_> ~'. quei
c'efl: ainfi. , qt1~ on~les a.pp;ll~~11
~ti·.fin les; Spahi.s a·1près l~ur ·f ,
~~ô.ir. r-cpreçAf ~leui;., foib:l~lfei'
~ t ro 0 c; ltu a
de Soliman 111. t65
de:s'efire fi ai·fément conten~
t-ez de belles paroles peur le
refte de }·argent qui leur eftoit d1î, engagerent les Ja ..
niifaires à faire avec eux une
é·tFoite liaifon. Cette t1nion
ayantrendules uns & les autres
plus infolenci , les d'efl'
ordres augmenterent., & on1

fe·rma Jes Boutiqu·es ~ ·Con-·
fiantinoplc., & mefn1e à Pera1
& à ... Ga~ata. Ces deux Corps
de,Milice s"alfemblerent de
nouveau dans l,Hippodro-'
m-~ · , nommer-entrdes Deputez'
& les envoyere.nt au'
Gtand Vifir ~ au· Cajmacan,
1-66 ' - Hi(loire ·
pour de111ander leur paye,
avec le prefent du Couronnement,&
l'augme11tation d'une
Afpre qui fe do11ne à l'.avene~
ment de çhaque 11ouveau S11ltan,
comme je vous l~ay déja
marqué. On peut juger pat la
hardielfe qu'ils avoient et1ë
d'envoy.er au Grar1d SeigneL1r
~prés qu'ils furent arrivez à
Confia11tinople, & par la_11taniere
don.( leurs Deputez parlerent,
avec combien d 'i11fo ..
le11ce ceux-cy fe prefc11tere11t
devant le ViGr , & devant le
Caimacan , & av ec · qt1elle
11aL~teur ils firent les deman ...
-'


- -
de Soliman 111. 167 l
des dont on les a voit chargez. , Ils les ?1{0ac~rent l'un & l'at1tre dç les faire dépofer, & mef me de demand,er leurs tefres, & ajoûterent, que fi on 1
-ne les leur accordoit pas , ils [ça- 'Voient bien les m,o_,,yens de les 11-'Voir. Le Grand V 1fir qui les 1
connoi ffoit à fond , & qui 1
avoit éprouvé dcquoy ils 1
eftoie11t capables , parce que /
depuis le co1ntnence111ent de I
leur revol te , il avoi t eu beau- 1
.cot1p de peine à les gouver- 1
1}er , leur dit qu'il n'aruoit point 1
cefJé de trarvt1i!fer jJOUr leurs in- J
~ercfts;qu' il al!oit cont!nuer a'Vec I
• •
-~~~-~~------ 1
i:o 8 Hij?oirc .
l~ mef me ze le , @pitt m.ef me afJiduiié
; q-u·' its faroie11~ è.o~terii .
de .luy, & qu"il errJ,[Jloyeroit non
feulement tou~ fan bien _, m,ais
encore tout fan cred.it & · celuy.
de Je s.:Arnis ,,afin qu'ils .n' eujferf!
auèun [u;et de fa plaindre. Il>s
ne pouvoient fouhaiter autre
ch·ofe , & il~ ne de,tnandoient
pas da-vant~.ge. Cependan.t
co1nme des Seditieux ne f~a-vent
ordinairement ce qu'ils
, ·v,e·u1e11t , & qu'ils n'o11t en
tefte que à' cftre :toujours fu~
rieux , ils repliqucrent ~~~u·
Vifir de la me.f me forte qu'ils
·~u-ro !en t p!û, fai.(e ·s' il av,oi t .ab ..
fol urne ru
'
_o 1 _,t ro eCulura
de Soliman III. 169
folument refufé de faire ce
qu'ils fouhaitoient, & Iuy dirent
avec les termes les plus
inrolens, qu'il commençait trop
tofo à fui'Vre le mau'7Jais exernple
de [es Predecef[eurs ; qu'il de'
lloit craindre de perir de la mif me
forte , & de rece'Voir bien,-toft
le chfitiment q'tti efloit dû à fes
femblables, puis qu'ils fçauroient
bien eux-mémes fe faire juftice de
[on procedé, fi le Grand Seigneur
ne 'Vouloit pas rece'l!oir leurs
plaintes. Ils devoient attendre
l'eff~t des promelfe~ que leur
avoiê faites le Vifir. Ils a·
voient fujet d'en eftre con-'
.". . p
r70 Hiftoire
te~ts ? 1nais _·qqoy qu'"clfe ~
f~1ffent for~ .obligeante·s , ils
en uferent Gôt11me s'îl ne leui.avoit
rien prcmis· , & qu''it
les eufr rebutez, & aprés l1avoir
quitté ils allerent en fu ..
r~eu,xdans lagrande Place du
S.err_ail·,. &: a·vec des cris fedi ..
tieu.x , demander la tefte du ·
Grand Vifi:r ~ ~ celle du
Caima,c.an. Ils pouiferent
mef1ne leurs menaces juf ques
~ dire , qt1e fi on refu[oit dç.
les fa tisfai.re , ils ne 1nan..: ·
quoient pas de moyen_~ fciut~
pour venir à bout de ce qu'ils
~ntreprendroient! L~ Gran~

_ 1 'v! ? e ul •a
de Soliman III. 17!
Seigneur, aprés les avoir fait
avertir qu,ils l'obligeraient à
faire arborer la ·Baniere de
Mahomet, kltr ënvoya dire,
qu'il firoitpunïr ngoureufe ment
ceux qui 'Voudraient attenter fur,
/, 'Vie de fes·Su.fets, & qu,.on
fa garda.fi bièn de faire aucune
e-nt1eprift fur celle d~ nou'Veau
Yifir & du nou'Veau Caimacan,
parce quïl a~oit befo'in tle ces
aeux perfonnes. Outre l'efprit
de révolte qui lès animoit, le
Grand Vifir avait découvert
qu'ils y efloient auffi pou!fez
par l' Aga des Jani!faires. Cet
Aga f e nomme Iifouf; il eft
p ij
1
1
1
112 H i.fto·i,~e ·
More , & de race Gtenadine. . '
Comme il efi:oit fort con •
..f ideré .des Janiffaires , on ~
I·uy ordori~a lors . qu'ils envoyerent
la premiere fois
~~s .P,é_pu~ez flU , ~p,ltap )\ ~e
faJ.re tous f~s efforts pour les
éontenir, dans l~ur devoir,en
leur periùadant' d~attendre le
~ouronnement , .. qui rt' efi:oit
differé que pour q,uelques
j~urs , avéc alf urance qu''on
leur fer oit alors recevoir leQf
paye , & Ir. prefent ordinai}.-e,
fans prejudice ~e l'a~gn1ep ..
tation de leur f olde à raifoh
d·un Afpre par jour. Il ~u~
1 l ~ \
·de Solimdn III. i 7 3 ~uffi ordre d·e leur dire, qu·e
leDivans'eftoitaffemblé plu';" lieurs fois po.ur avi'fer aux
moyeni d'avoir de l'argent,
mais ·que le trefor du Serrait ~·eftoit trot1vé entiereme.pt J
épüifé- par les femmes que
Mahom'!t avoit e11voyées à
1' Armée, avant qu"il et1ft eilé
dépofê, & qu~on y avoit auffi
' envoy"e' tout ce qu~ on avo1.. t ,
tir1é -de la confifcatio11 dc:s
biens du Vifir Ibrahi111, du
.Caimacan Redgep, du Grand _I
Doüanier, & de plufieurs aa
·t,res Offi~iers. Cet Aga avo~_t
prornis .d"employer toutes 1
p iij
l
1

1·~ + H ift~ire
·ces. m,efmes,r.aiÇops ,,& h'e~-g ;
- cb.qp 1 d'-a;qJ:~~.s ~. . ·ainfi qus lf
credit qu'il av.0it fur. les .la~
ni.OE1ires pour fcrvirutilerpenF
le Su-Iro~, ~1 F9Jlf:!·0bligef ~~
Gtq.na .Vifir; cepe}1clan.t,b1ien
· loin .de tei.11ir parole 1 il avoic
fous :tnai-n fomenté tou-t
ce de(ordre) da~s ('efperan·ce
qu'il cleviendroit Gra91d~ Vi~
.f1:r .• Siaotrs qui a·v'oÏ-t e11-G>Qre
des Creatures par111y cesTroupe:
s , f tvt inf or;mé cîe· la p:er-,
iidie. de. leur .A.ga~ Il e~ ~-ve:rr
tie le Grand ·Seigneur., qf.ii It
dépo(l aμffi-· t.00:. ; mais il
.n',o,i.à-- 4.'!,etnander ,fa; tei\e;,Jde
' - -
l - -'
1 V ,te o de .... i..Htu1a
de Soli man III. 175
.crainte d'irriter trop les Mutins.
Ot1 le r~legua à -une
maifon de Ca1upagne , &,
le Sc:liétar Aga fuc mis à
fa place. - Mais ce i1ouveau
Com1nan,dant ne s'efia11t a-cqu
is aucut'l efl:ime parn1y
ceux à la refie de qui 011
le 111etroit , ce cl1angemcnt
prod t1i Gr de tres .., 1nat1vais
eftè ts. Les Ja11iffaires ~y-ant
refufë de luy obcir, eluren"t
pl ufiet1rs Chefs pour les coma1a11der,
& cl1oifire11t les plus
· feditieux, fous lefgucls il:s fe
partagerent en differe11s endr.
oits de la Ville. Il fe rqit
p iiij
• 17§ 1 Hi(foire 1
di$cile de ·bien exprin1et j
rqus les defordrc:s · qu'ils y J
cauf~.(e nt, & jufqu'où allere,
nt les cxcés qu'ils y commirent.
V oie y ce que les plus
fidelles Relatiqn_s en ra-ppor-;
rent. Elles djfe11ç en parlant
de l'Aga des Jani!faires qui
venoit d'eftre dépo{~, qt1e la 1
ch eu re. de ce· Cl1ef et.J éJeva J
c~11t autre~ ;.& q1ue ConUan-- 1
tinople devint co111ni,e uti~. J
forefl: remplie de Bandits, où l'on vol oit~ où l',en cdér pçiüilloit, & où l'pn tl.!<1>it e.a.1 plein jour corμtne dans un Pays ennemy, de for-te qt1'<m· •
\
u
àe S oiiJilàn III. t71 . li .
:tie pou voit· fe ipontrer fans'
- c~pofer manifeftement fa vie'.
QEoy qu'ils eÙifènt cl1oi.fi des1
Ci1efs qui dépendoîent dtet1x~
& ~ui lèt1r avoielit paru 1es
Plus determin~z, .& les plus
propres a' ~t~ri, 1re r le' -i1rs briga-
t1dages, & me[n1c à leur en
.donner l'exe1nple,il s'-en trouva
quelc1uesur1s de 1noins emporterl
, & qui vou·lu.rent les.'
en1pefcl1er de poulfer les ch~ 1
fes juCq11es au der11ier excés.
Ils les de·p0féren.t, & mirent
~es p'lu'S reu11es) ·& les plus
'miferables à ·leur place ) afin
que le fe·u de la ~uncife, &
...
178 Hi.ffoi1·e
r·envie de -~·enricl1ir ) les
port-a!fent à he garder aucunes
n1cf ure·s , & à n'avoir
11lL1s de confi deration.
Il y ~11 ct1t· d'alfez ir1fo ..
le11s parmy ceux-là , i1our
1'1.re11dre l1ardin1ent le Titre j
de Cl1efs de la SeditioYI. Ces
Murins cha1!gerent de leur J
pro11re at1 torité le Got1verneur
de 'Gala ta, & y en éra.
blirent un au tre. Ils prot10 ·
fere11t au M11 fti d,aller dans
1:ourës les Maifo11s des Juifs,
& des Ar menie11s, & de faire
porter au Tre[or public tout
}'.argent qu'on y trouveroit.
~-------=-------~---!
àe Soliman III. . . 199
:Le Mufty ieur répondit ,
,qu'it ny pouruozt .conftntjr,, &
-que cela efloit contre. les Loix
·dzivines & h11rnaines! Plufieurs
i1e laiifei:~11t p.as d~y allbr) &
.le Patriarche ~tc;c ft1_t obligÇ
.d'aba·nd·on11er fa 1naiio.n; ils
alletent auffi daniS lçs Bai11s ·
des f em1nes- où ils com111i·
.renc de~ 'brural.itez inconce- • . ~
V<lh;l.e·s., Ils firent les mefn1es
çhofes dans les ru~s, & mçf.
t"&tt en.J)lê.Ïn JO\\.'ft;. Leur aveuT
. gle·tne;nt· leur .faif0it croire
·que le defordre dùreroit roûjours,
& jl s'en .trouvait parJJ,'
ly eqx qui.di[oienE touttiaut
• 1 _,t i o de Cul u <:1
1'8 o Hiftoire
qu'ils ne 'Voulaient plu1 aller à /4
guerre. C,euft efté tr;op peu
pour eux que d"' attaquer les
paffans ; ils f orcerent des
maifons pour s"abandcnner à
'leurs dc:{irs effrenez , & pour
:Cr1lever ce -qμ 'ils y trouvcroient
de ,plus pretiet1x; & fur
tout les M'agazins , parce
·qu'iisefto.ient plus feurs d'.c:n
, -en1p·cmter de"<juoy s'enrichir.
On a remarqué que s"efta11t
faifis d'un Marchand
Grec, ils t1:1y Jïrent endurer
-les tou,rmen·s ·les plus ·cruels ,
a1fin de l.uy fair.e declarer l 'en~
<f;r0it où il.:av!Ôit mis [es meil- . ..


de S'oliman III. 1 ~{
leurs effets 8r fon argent~ Le$
Turcs naturels ne ·futent pas
plus ép!rgnez que ceux des
autres Nations. ~lques
Spahis ayant ,fort. maltraité
deux Chrcftie. ns devant le
Palais tle M 1 t'Amba!fadeur
d'Angleterre , cet Ambaffa~·
deur crut d'abord qu'il alloît
·efi:r:e affiegé par ces Mutins.
Le tumulte eftant app4ifé·,. il
envoya fon Secretaire avec
un lnterprete chez le Caimacan
pour {e plaindre de cette
inf olence. Le Caimacan fic •
mettre deux do ces s·pahis en
prif on, & relaf cher les deux·
' ste 1

is2 - Hijloire
Cfueftiens qu'ils av.oient ·ar~
reftez, & à qui ils a voient 1iè
les m,ains; mais plus ~ç:·1det1~
mille de C6S Revoltez:allerent
retirer les deu~ s·pahis
fàifant retentir la' Ville d,injures
contre les Chreftiens, &
contre le Caimaèan.. lrs ne
firent pas moins de defordre
fur le Canal, &-dans le dé ..
troit de la. Mer-Noire. lis ·
armerént des Canots, ~ piraterent
comme des Corfaircs
font en pleine Mer.
a.ien n'eftan,t- fi fort quo
l'exemple, & fâ-r tout.lors
~ue la chofe dôftt il s'agit

de Soliman III. _ l $3
nous -regarde, les Li!rv:en·tî., ou
Sold.ats d~.Vailfeaux, ·qtii n'a·'
vôient receu.aucun payen1eE c·
p.end-aJ1t toute' ~ Can1 pa·gne j
voyant. q.ue ,lu. Ja~iffaires:
aveiçn·t receu de I,atgent' ~I
qu,p.n s~er,npre!foit ~~n ,trouyer
,~a.tin aé'Ppuv.oir-l$'p~a-y-erl
entieremem:_, .& .de fat~sfai-te·
les S·pahis fur res..qu'n~e mois
qu~ils demànd.oient > cr-t1rent·
qu'ils devoient les i,m-ieer
pour eftre payez , & pr@·~ter
€omme eux de çe qu'ils pour-·
roie~t p~ller, puis que
1
rien'
ne devait eftre con1pue aux
f'r-o·up:es d~, c.e qu,ellies pou-: .
"01 ':A1 ·~~r o de ,.., 1 Ci
-
1 s 4 H~fl-oire · J
voient prendre pendant le 1
defor4'~· Ainfi s'cftant au1ft J
, refolus à fe foulever, il.s en- 1
trerent en ·foule dans Conf- J
tantinople, où ils commirent 1
les mefmes brigandages &.les J
tnéfmes cruàutez, que les Janiffaires
& les Spahis. Ils ne J
forcerent pas feulement les 1
ma if ons des Boilrgeois, mai~ J
auffi celles de quelques Mi- J
nifire~ du Pîvan: Ils f e cl1oi- J
firent' mefme des Officiers , J
aprés avoir dépofé ceux de. J
qui ils firent remplir les pla-r'
ces par ces nouveaux Cliefs, a~nd'aur.orifer leui ~rime par
,,,.
1 -1· .L l ' ae Soït'man.III.. 18-i
w ~ .,. ' ~
. l~nr ay~~.J !ls. ~rle~ent ~ufB,tt:,~
liomau·de! ·l~s rdtes d~e :iql~e.l.q11es
·~ u.ns~ de ·feuls Cnt;,f~, _ & 15
Capitan. Pa.châ·, fL~t ~~igé de
lès leur .fa ëf1ifirer. ~IL fut auffi. ' - l ....
contrâin~ èle~c:n.a't{ger :I:lnt~ndant
, lè-T-rèfqr_iér ; .& tPuP les ,
Officiers '<!tir P, ort, & d~ B~. -
gne., & ' ~,e{:e rei1dir:e c~uti0J:!.
qu'ils feroie~t payez incefira.
.mm.e n\x . Q f' i ~J. e1lt ·qu" 1'l ~ ne
lite.nt p~s moins .de ray.age
dttns (Cbbftfliiti,Pople 9ue les
Janiffaires 11 ·.~ les Spa-llis , , &
q~ê\t~-~,tt~-w..'.1nif erabJe Vill~ fe
vit r:ëi:pplt:e , de pre~ 4.e ci~.- .
quan:t:e· "mille 'Rebelles :> qt1~
. . ·- ~
.
1 86 Hiftoire ___
l 'on ne put .appai[or queipar . trente millions de li11res>tant
pour ce qui leur eft-0it Jeu, que pour te Bacchis . 0114gra ...
. ti1fica ci0n <JU. on fait .'.ordinai"'I
.ren1ent à la Milice à chaqu~ changement .d.e -Grand Sei:
gneur. Vous verrez clans la j
{t1it.e oemment oet .arge.1'\t pnt
efire trouv~.
Le Di.van fut a·!fembléplu~ J
fleurs fois en prefen:e d.e Solima1il.,
.& dL1 Gra:nd Vifirf 1
p·our confulter fur tous les ex~ 1
ped,iens qu" on pou·r-oit imagi-
_tl cr pour faire l)romptement J
for.tir les Troupes nmt:inées
• l
1

' 1 '
de S olinJan III. i 87
t1e Confr;antinople. Le Graiqd
'Seigneur d.ont tous les fentimens
f on.t .fiers, & qui fup.
·portait jmpatien1·1nenr· 1~,outra-
ge que {es Suj er·s faifoicn1t
à [on rang , en lu y impofant
des Ioix,, _auroît voult1 que le
Crand V.tfir eu,fi re·pri1l7l·é l<eut
inf ole11ce,, mais le Vifir a:efl1ta.
tl'e11 pl-us tenr.er Les n1-0yen~
.allegu~nt que dtf.nS la Jitu4-tion
-0ù ~ftoient leschofes il n·en p-oitrroit
rien obtenir par la do11cer-t-r,,
-& qu'il fill.oit craindre ·de le-s
irriter par de ·mau'Vai& traire~
mens ; qu'ils s'eftoient déja po1-
:tez à des extrcmitc';( trop fa~
Q__,ij
/ -
1 s.s - Hiftoire
che~s > -OEb' que qu~nd mef m.e il,s.
ne ivoudroient f M les pouffer plus
loin pour. peu q·u '.ils .co.nt_inU:aft-·nt
comm~ ils avaient. tortJmenc.é,
l~Empir~' ne pourr.oit plM é'lJ:i.ter.
fa •! fui.n_e anitiere .; _qU:t:. de, deux
md'u~ il_ft1tl1f1.it-. ~afcher\1defoi1 le
pir~, &'qu'il e"fto:it bea~caup plus
à, profO$ que ·qti~lques. Particu ....
lie,rJ:;_foujJ-rijfant g,n .lf}JJ.r bJ,en~ qu.e
d e'perm.e.t:tr( qu~ u.1Je :g,ra-nde.ViU~'·
. . & J;pnt"~tpe:nd,ôit le faltit de to.ut
l'Etat~ achre'V,afi. d'efh.e. r:u.inée·~
c.e qui .ttr.ri'Ueir.Qit :irif.a:ïllible.mc-n.t ..
-C~t àwis ..ne fu.t.:pas) .appr0:N~.é
<le .tout l~ m0nde~ · Q9elques"'.'
uns d~ ceux q.ui aiiiftoien.t ~
• •
· IS o ie Cu 1 ura
de Soliman III. 1 ~9
ceConCeil, é:lirent, q_ue c'efioit-'
·en ~ouf ant 0:mpefche,r que [4·
Vi·ll~ ·ne fuft ruinfe d'une ma.
niere; chercher ~ la ruiner d"'une
autre ; que· la fureur .de1 Trou-,
pes pourroii .fe ralen ~ir, @!· qu'•
enfin .quelque tmportement qu'el'-
1 ,(G 1·· 1fftb.'l' / ,~ f' CS ·eujjent-, tmpojj!, t· ïte 0'U oli
pou'1J.oit leur faire ~oir qu~~n
e.fteit de· ·leur donner ce qu'on
n"'a~~it ptU,)eurlfè.ro~tpéut~eft~e,
ouvrt-T- lrs ye·ux; qu au tnezns il
y at.'fJoÏt encorè' lieu de. z· efp~rer.,
en t~s - ménage·ant ave;c doùce-ur:.,
mais . ,q.-μ$1 le "'Y(l·âl qu~an· s' ailoit
faire .. foy-me(me efloùt ·ajfe·uré',
(7, qu:it ;uaLtiit mieux que_ d~'au~
. - ' .
"01 ·~ •~te o ci~ ,..t1l'1J a

-
r~o Hijloire ·
treJ .le- fijfèn't:, i'il' cfooit iné'Vita~
'hie ·., 1ue· de fe port-cr f oy-mefm~
Jes çoups dant la playe faigne,
"Yoit .long.- temps. D~autros '.at.
joût:ercht · .,. · 'J.Ue le ·Gr.and
f.,ijr ne penfoit q·u",à . (es inte ..
refis partictiliers , & qu~il 'VOU~
loit fe conferwer ilu t.tcfdit parmy
le'S ~Troures.,,, ·@ ttcquie-rir
1eur Ltmicié ,- afin qu' elf.es "empe(
è.hafl_~nt qri~on ne le fifl
Jifèendre ·du. rrang 'O:ft elles. [•a'
1:Jaient éle.rué,. Cès .av,is fute11t
·écoutez, tnaÎ\$11-0î11Pasf uivis•
-0n les cra t plûtofr dqffnezv pa11
,des ennemis df1 Vifir, qne-pa,.
d~s per.[01iriê.s a.ffeltio1111.ée:&
• t 0 de Cul u ël
de Soliman III. 1~1 1
~u. bien de l'Etat; & <l'ailr
Jeurs ~les Troupes n'àuroient
~jamais cru qu,,il fufl: impof-
Jible de leur donner I·argen.t
<Ju'elles demànd-0ient .> puis
que les Spahis avaient propofé
de faire le·s·taxes dont il
efroit quefl:ion.Ain.fi vû l'impoilibilité
:qt1'il y .avoit de
faire -ceffer le t'Um11lte , & de
contemer les f editieux, fil' 011
n'en venoit à ce remede, la
recperche.des Aifez fur ref o- ]
luë ,. & l'on con,c lut e1,1 mef.-
me te1rnps , qu on n auro1tï
tgard à perfonne , quel<
JU:c employ 'lu' il euft J &.de.
i 9·2 Hijfoire . ·
-quelque ra·ng qu:il fuil:. Les
Grecs n'en furent pas exemts,
& les Cadis, -& Gens de la
Loy furen·t a:uffi taxez, parce
que les ·p·lùs ricl1es s~eftant retirez
avec leurs ctfets, les ta.
xes n'avoient pas produit de
grandes fomime~. ~lques
Minifrr.es , & quelques Officier'S
en Chef du Serrail, fe
taxerent d'abord eux-mefro(s.
& les Spahis allerent che~
tous ceux de Confiantino ple,
qui avoient quelque oien, &
chez toutes les perf onnes qui
efroient en rcputatién d'en
avoir\ Il~ alle~~nt part4culiee
. •
-re-ment ~ -
de Soliman III. 193
renr'ent tl1cz tous ceux qui
avoieut eu quelque Cl1arge
publique, ot1 qui ~n avoiet1t
poffedé dans le Serrail ~ & le~
ineneret1t ar1 Tribu.nal étably
poL1r cela, qui fu t app.ellé.p~i,...
bliq.uernent, Le Tribunal des
.Rebellës.0n leur demanda d'a ..
bord ce qu'ils pouvoient don-
.ner pou·r les preffans bef oiris
.de l'E1npire., & on accepta les .....
-.offres de ce'ux qui en firent,
·lors .qu:on les Jugea a!fez proportionnées
aμ bien dont on
.pre~e11d~~t: q~ils .joüi!foien~.
Quoy qtte la rlufpart protef ..
- ta!fe11t qu'ils;' i1' e{loieqt pa,s
R

,

194 Hij!oire .
en eftat de fatisfaire ~ cè
;qu'on exigeoi't d>eux, o'n
'ne laiifa pas de les taxer, &
'ceux qui refuferent d,e payer,
furent appliquez à la torturè,
& on le'l:lr donna des coups
de bafi:on , ju[qu'à ce qu'ils
-eulfeflt d'Cclaré 'tout leur bien.
-Pluïieut,s mou;urent dans les
tourmen-s ,. & l'es autres fe garantirent
de la mort, el1 po1Ptant
prompteniènt €hez, 'it
Tefrerclar ou T·r,ef orier, le-ur
argent, leu,rs ine·l'.lbles, &•tous
·1ts effeesqu'ils avoieni; dans-l'a
Ville, dent· ceTref0ri·er man~
<J..Ua d'-au·tant moins de tenir

"' 1 ~A 1:>te 10 e Cul ura
de Soliman III 195
un Regillre exa6l:, qu'il y alloit
de fa vie. Ainfi. ceux qui
pafioient pour les plus riches
dans Conftantinople , furent
reduits à la mendicité. Ceux
m~mes qui s'eftoient d'{lbord
fauvez, fe racheterenten contribuant
volonrairement, de
peur de s'expofer à une· en"-
_ciere rqiné q~'ils n>aurqient
.pu éviter. La J uftice eftoit
promptement Jenduë dans
ce Tribunal; on y eftoit c9.p: ...
· damné d'unç heure à l'autre,
& on fe voyoit contrai!lt d~
p4yer de mefme. Comme _~es
taxes excederent la. refolution
R ij
t96 - Hiftoire - . qu'pn · a voit pr1(e a~ Divan·;
on en fit des plai~tes at1x-Mi ..
nifires, ~ ils répondirent ,
qu'ils n'efloientpa~les .AJ'aiflres;
qu'ils avoient eux.mefme.s couru
rifque de leur ~ie; qu'ils ne Je
reté, & qu'il falloit que chacun
compatifl à la calamité pu·bli· j
que. On affure que voyant la
neceffité où ils efl:oient de
faire ces taxes , ils avoiént
fot1s n1ain engagé les Spal1is
à s'en mefler, pour n'efire pas
tout à fait chargez de l'i11i. 1
qui té, & ne fe pas attirer les
plus confideralJles perfonnes
• •
de Soliman Ill. 197 ·.
Je l'Etat qui iauroient. pu un
jour fe va11ger d'eux.
Pe11dant tous ces defoi;dres
Yegl1en Bacha demeura toûjo-
urs c-ân1pé hors de Confi:antinot)
le , avec les Troupes
qu'il co1111nandoit , & c'efi
une cl1ofe furprena11te que
l6ur retenuë dans une occafion
de tumulte & de licence,
& qt1i doit faire avoir une
haute ell ime de · la conduite
& de 1-a- fermeté de ce Cl1ef.
Il [emble me[me qu' 011 ne
p ~ ut fa.ire une ferieufe reB.ex1on
là-defiùs fans que la cl10-
fe paroilfe' i11croyable. Non
, R iij
te
1
1
l
1
1

198 Hiftoire
feulement {es Troupes qt1i
n'avoient point receu d'ar.l
gent, en voyoieilt donner
aux autre~ , mais elles ap~
pre11oie11t àuffi t-ot1s les jours
c}ue les Révoltez s'enrichiffoient
par le pillage, & cela,
fans qu'ils euifent à craindre
.auct1 n chafiimen,t,_ pt1is qu· on
n3avoit point de forces pour
s"oppofer à leur violence, ny
pour les pu11ir. On peut affurer
aprés cela qu'il n~efl: rien
dont un bon Chef ne. ptJiife
1venir à bout, quand il joint
une grande conduite à
une exne"m .e .v1.g t1et1r. ~1oy .
t e â

de Soliman III. t99
qU:'Y eghen ne fift aucun mou~
vement , il faifoit neanmoins
beaucoup pour luy que d~
:s'ç1npefcher d'en faire, puis
qu'il eufl: gaOEé en agiffant·,
• • • ce qt:11 pouvait t1n JOUr tourner
à f on avantage ; car les
TroL1pes du Grand Seigneur
1 s'affoibliffant, il devenait par
là en eflat de donner la lQy.
li envoya toutefois dire au
Grand Seigneur qu'il eftoit
preft de marcher au premier
ordre qu'il plairait à Sa Hauteffe
d~ lt1y ei1voycr, pot1r
tâcher de re1nettre les Mu- ,
tins dans leur .devoir, & pour
R iiij
'
~
2'00 Hïftoi1·e .
les faire fortir de Confra.nti..~.
nople ; mais le Grand Vifir
ayant cru qu'il n'efloit pas -de
la politiqL1e de luy pertnettre
d'ava11cer,le Sultan ltry fit ré ..
pondre qu'il étoit fort co11 tét
de [on zele.)& il le nom.111a Beglierbey
ctè . 1\om~nie ou Romeli
·e. Ce'Gouver11e1nent,qui efl:
celuy deGr-ece, efr le plus 110.norâblé,&
le premier de tGute
la :Turquie, tat).t parce que le
Grand Seigneut tient le Siege
de [011Empire à Co11franrinople
,'qt1i efr da·ns l' étenduë de
ce Gouvernerne11t , qt1e pour
le· gr<t11d 11on1bre de Places

'111 ISt rio rie v .1 u cl

'
de Soliman Ill. 201
qui en dépendent. Ce Beglierbey
co1nn1ande à la Romanie,
à la Bulgarie , à la Macedoine,
à !'Epire, à l'Acl1~ye, & à
la }dorée. Il .a _fous luy vingt,
Gouverneurs partict1liers ile
Provinces, & il doit avoir le
co1n1nandcn1ent (.te tre.ntetrois
111ille l101nmes qui y doi.. ..
vent efire .entretenus. La Vil-•
le d' Ai1drinople eil: de cé
n1efn1e Gouver11e1nenc , &
celle de Sophie , Capitale de
Bulgarie, efl le Siege du Beglicrbey.
Le 2.5. Novembre 011 fit
pul)lier t111 Ban f>Ot1r f1ire for-
••
1

202 Hifloi·re
t ir la Milice de Confi:anti..:
nople, & pour l'obliger à retourner
au Cain p.
Le 2.6. du mefme mois oq
Çé-clara que la Cere·monie du
Couronnement de S.olimaq
III. [e ferait le lendcmai11.
Ce jour-là le Grand S~ig11et1r,
.a·ccompagné de trente perfonnes
.feulement, fe rendi~
au Serrail de la Marine, où
Sa Hauteffe monta dans un
C::ii'que f-0rt dort. La fortne
.ce Bafriment efi à peu prés
femblable à celle d 't1ne Galere.
Le Caïque dt1 Sultan
av oit vingt,huit ~a111es, & il
.

de Solimdn lII. 203 ..
y' avoit rrois homm~s à chacuné.
Le Boftangi Bachi,dont
1a Vefie eftoit de brocard d'or,
tenoit , 1 e gouvernail , parce
que fa Charge luy ~onne ce
droit , qui eft eftimé fort honorable.
Il n'y avoit dans ce
Bafriment que les quatre prin~
cipaux Officiers de la Ma if on
àu Grand Seigneur. L.es Ra- ·
meurs s'arrefioient de fois à
~utre, non pas pour fe repofer
, mais poi1r donner le
t~mps aux Speél:atet1rs qui
e·rl:oient fur le Rivage, de
fuivre à pied Sa Haureife, &
de la confiderer. La Poupe
de ce Bafiiment paroiff oi.c o.r:
1
1
1
1
1
1
204 Hijlcire
née de q11elques Pierres pre..._
cieu!es > '& il y a voit u11 c·on -
ccrt de ML1fique à la pro11ë. j
Le Caïque d-e Soliman cfioit
fuivy d 'un autre fort magni-
1ique> da11s legL1el eftoit celuy j
qui portait le Turban. de Sa
I:Iaure.lfe. On en voyoit en ..
fuite paroifire un autre, où j
cfroier1t huit Itchoglans; ou
Pages. Plus- de mille autres·
petits Bafl:imens., qt1i appar- j
t enoient à divers Particuliers
de Co11frantjnople, ft1ivoient
ces Caïques. Le Grand Sei- gnet1r paOE'l le long du Port,
qL1i eftoit remply d'uu affez

de S ofiri-tan III. · 205
~rand nombre de Vailfeaux, dont il y avoir beaucoup d'étrangers.
Cependant Sa Hau-
:teffe n'en fut point faluée. J~ ne vous en f~aurois dire la
raif on, fi ce n' efi que l c Sul- tan efi:oit encor~ incognito, &
que fa marche d'appareil ne
fe devoit faire qu'~prés fon ]
Couronnen1ent. Sà Hauteffe
débarqua au Serrait de la Fille
du Sultan Mal1omet IV.C'eft
la Veuve du déft1nt Favory
de cet Empereur , âont je j
vous ay déja parlé, & ·qu'il
a'-:oit offerte en mariage à j
. Yegl1en :Bac}la. Soliman fut
OM JE ra .. -: 1
1
2-06 - H ijloire· ·
.{eçeu par le Grand Vi'fi:r,. &
par le Caim~can, , au dernier
_Kiofque d.e ce Serrail, où le
Grand Vifir luy avoit fait
.preparer un magnifique rq;
pas. Il en partit à midy po.ur
.fç rendre à . la Mofqu.ée
,dYub,ou ,de S. Job, qui eQ
dans_l~s F~μ~ hpurgs tLors qu· i_l
arriva ~is ~ yi~ d.e ceçte-Moi:
qqée i il crpuva .le Grand V,-ifir,
qui awo~t p~is les sie:v~n.s1
· & qμi l,~t~Jen~oiç fur.le riv.a,..
.ge .avçç les pripcip~ux Ofij,
ciers d·μ Pi van,, qui l,,accom:·
pagnereuc .tQus dans le lieq
où t·oμ 4e;voittfijr~ lacer~-,

M .ter o de 'u1 li a

de Soliman III. zo1
.tnonie que les Turcs appellent
CoQronnement , quoy
qu'on n'y empl~ye point de
Couronne , comme on fait
par tout_ ailleurs. Il y fit fes.
prieres, &lors qtJ'elles furent
fâites , un des vingt-quatre
Predicateurs de Sa Hautelfe
luy fit un Di[cour.s fur la
g~andeur de la Charge à laquelle
Dieu i· ~p1pe!loit. Il
l'exhorta d'av,oi.r foin de fan,
,Etat, & d<Z tiav.ailler non feu,
l~ment à ~-ai~tenii; la Lay d~
Mahomet -> mais meGne à
l'accroifrre. Ce Sermon finy ..
le niefme Predic~teur luy
.
0 M n1 ero e ltura
..
l
l
1 l
l
l
-
·20·8 - Hifloire ·
donna fept fois la benedi ...
ll:ion, & chaque fois le Peu. ple répondait Amen. Le Muf.
ty luy fit enfui te. prêter fer.
ment fur l~ Alcoran ; & le
Chef de la'Famill"e de Mt1llu j
HunKiar, fameux Derviche,
ou Religieux_, que les Turcs J
confiderent com1ne un Saint,
& ~eluy de la Famille de
Cl1eiK Becrache, qt1i fit le j
pren1ier écabli.ffeme11t de la
Milice des · Jani!faires-, luy
ceignirent , fuivar1t leurs an- ]
_ ciens pri~ ileges, l'épée que 1
portait aurrefois J'Empe,. j
rèur Othoman., en luy di-
1
de Soli?n~nllf. 209
fant, ·Dièu te ~donrre la ·bonté,
d'Othoman, & luy mirent le
Turb.an, l1aut 011 .Grand_ Tur ... ·
ban, enrichy dè gros Dia1nans
qui formaient une ef pece de
Diademe, & qui ef.l:oit garny
de. deux Aigretes nojr-es· de
Heron , qt1e tous. les . .Sultans
· vent porte.r jufquà ce qu~ls
aye11t ren1porré de grand~
avantages fur les Bnnemis,
foit en gagnarit quelques Batailles
fignalées , o.ù en ajoutant
à l'Empire quetques
Provinces , ,où du n1oins
quelques Places im:pprtantes~ "
Cett~ ceren:io·n~ .:.finit .pa1' les
s .


~10 1-Ii_/foire
benedill:ion-s ique le peuple
donna à ce nouvel Empereur
.; aprés quoy Soliman
monta à cl1eval., pour retour~
ner au gra·nd Serrai! par terre.
_ La marche commen'ia par la
porte d'Andrinople .à caufe
·qu'elle ;eil: la plus éloignée de
ce Serrai1.. En voicy l~or<
lre.
Le Sou'bathi ·Ou Capitaine
-Ou ·Guet qui fait obferver la
Police .,.avec environ fix ·,cens
.. hommes ·qui fuiveat · [es
<>rdres..
Le Gebeigi-Ba·chi qui.corn ..
. ma.ode ~eux. qui ?nt la ,gard~
.. .

de Soliman III. -2l'I
·ides armes , & des poudres,
-avec dix Capi taities & huit
"ens ho·m1nes à pi~d.
Troi~ ce11s . Topigis , oa
Canonnier~ ayant e-n refte les
Topigis Bachis leurs Offi- ]
ciers, à. chevalj .devant leÇ.
<}Uels on portoit quarre Canons
de Carton peiru:s el\
hronz e~ · ·
1 • Huit mille la:ni!faires à
. pied ayant leurs groffes Call:-nes
à la ma-i11, & leurs Ttirbans
en ferme de Mitr0es en
teft~. ]
Les Chaoux des J Jnilfaires
& cinquanr'e Capitaines à.che~ . s ij
ltu 1
1
2r 2 Hiftoire
val veftt1s ·de fatin, avec des
:plumes blancl1es à letrr Turba11
, en for111e de Croi.ffa11t.·
Le Kiaia Bey ou Lieutenant
C olonel des J anilf~ites, e·nrrc
-ce11t Janiffaires· des plus propres.
·
L' Aga ou ·colonel General
.des Janiffaires feul , au milieu
àe ·l": .~01npagD:ie .Colonelle ,
& .'de tot1s les Officiers de fa
Maifon. ·
Douze -Officiers d es Spa·
b is avec toate cette Milice ..
. Vingt-quatre Capig,i.s du
~i~nd Vifir à pied ..
~ ..T rentè"Chaou.x du Divan
' . .
.
01 ,ti rod.e 1.:11 u a
de Soliman III. 213
-armez de ma!fes. .
Les Mullas,&gens deLoy
à cheval.
_ Vingt-quatre Mutaferakas.
_ Vingt-quatre Emirs du
non1bre de ceux qt1i preten·
dent e.tlre de la. race de Mal1omet
, ayant des Turbans
verts pour·les difl:inguer.
L'Iman.d.u Grand Seigneur,
avec les douze Imans ou Curez
& Vrcdicateurs des Mof..
I • quees.
· Trente Chaoux.
~tre - vi11gt Cadis ou
J Liges.
~- Douze Capigis du Grand

1
1
1
214 HiHoire •
Seigneur , qui avoient des
Ve. il:es de Brocard d'or douhl~
es ·d'l1ermines , & qui étoient
montez fur des ·chevaux
richement enharnachez
·;-
Le Nakib des Emirs feul..
Deux Cadiieskers <le Ro ..
melie & de Natolie t'.nfem,
ble. 1 • - •
Les Vifirs de Banque.
Le Grantl Vifir, & le Mufti
fur une mef1ne ligne ; le
premier 'à la droite , & le
ièoo11d à la gau~h-e , envîronne.
z de cent Cavaliers
.avec leur Caftan paf d.cifus
de Soliman/JI. ~15
leurs habits, & accompagnez.
de plufieurs Bachas !J & de
f1Uantité -de Pages .
. Le prerriie·r Ecuyer , à la
tefte des chevaux de main dll
Grapd Seigneu·r, menez· par -.
les ·Ecuyers , & .touvèrts
èe harn·ois.. brodez dë Perles
& de. Pierreries.
L'Emir Acor ~ ·OU Grand
Ea.u.yer f:eul. - ·
Le Grand S·ei'gnemr enyi..:
ronnéde trente PriKs, ()U v·a-·
.lets· de pied·, v.e.ftu,s d.e t·G-il.e
d.,()rc ·& .d 'a.r;gent ) avec l'e.urs_
:bonnets _g~tnis d.e plaques d.e
!~!-m~il:_d0ré,,.~ ~~argez d'~i:'.:
~ .
01 O 'v11"'1sterio ie Cul tu .P

21·6 Hiftoire
gtettes. & dç cent cinquante
Arcl1ers._ de la Garde, armez
d' Arcs & de Carquois.Il a.voit
μbe Vefte de · drap gris de
Perle, fourée de Martes..,Zibelines,
avec un Doliman ou
Jupon de Satin vert 'pardeff
u~. Son ,Turba11· eftoit oi·né
de la maniere que je vous l'ay
dit auparavant.Deux Eftafiers
tenoient la bride de f on che4
val , & deux Officiers à pied
foutenoient le coin de. fa·Ve- •
fie. Je 11e vous dit rien icy de
ce Pri11ce, puis que je vous en
ay fait déjala peinture. Il faluoit
l~ P~uple d'un air enga-
,. geant7

'de Soliman III. 211
geant·, & d'une maniere civile
qui ne paroiffoit point
affeéèé e.
Le Seliéè1r Aga, ou Porte ..
Epée, fuivoit Sa Hat1teffe, &
portoit fon Sabre fur l'épàule
droite.
Le Chocadar) ou Po:·teManteau.
Le RiKiabdar, qui tient
l'étrier,
Le Dalbandar , qui porte
le Turban.
Le Kizlar-Agaffi, ou Chef
des Eunuques , fuivy de trente
yalets de p·1ed. .
. . Ot1atre Officiers qui jet-
-~ T

1
1
1
1
21s - Hi(loire
toi~nt des ·Afpres à cI1aq~e
coin de ruë à la p,opt1lace.
Ûh avait difi:riboé d'es Veile.
s felon la coutume , .à tous
les 0 'fficiers qui devaient afuil:.
er à èctte Ceremonie. . . . -
L.'E·tat déplorable où ~ou--
te la Ville fe trot1voit albrs,
n'empefcha pas ,que. le 'Gt"and
Seigneur n" eufi: b~auçoμp
d'ac,la.mations pend.ant. l~
marche. ··
On dit que tout co Jqui
compofoit cette Cavalcade,
. . ' . monco1t environ -a quinze
. mill~ hom-mes , aa liët1 qu'eri
· par~ille ôcca{io.n elic e.t):o1t:
l
'
tero de Cul•Llla

de Soliman III. 219
de cen-~ ~milie dans la profpe ..
rité de l'Empir.e. On voyoic
parmy les ricl1effes de celle ...
cy , beaucoup de chofes qui
fai foient connoiftre le n1au-:
vais efrat otl l'Etnpire fe .trou.
voit. On tira le foir du Canon
devant le Serrail _, & il y
eut des Feux & cles Illumi11ations.
Il y en ~ut auffi à !'Hippodrome,
& devant les maifons
des Minifl:res, mais on
n'en 1fit point devant celles
des Particuliers, qui t1'ofoient
encore marcher da11s les ruës,
-de crainte d'y eitre maltrai.:..
. te.z par la MW.ice fou levée, à
T ij
1
1
1
1
1
220 · Hiftoire ·,
laquelle quantité de vaga.:
bonds fe joignoienr, ai11fi que
des Bourgeois d époüillez qui
cl1ercl1oié11t, à reparer les pertes
qu'il~ avoient faites.Comme
les Minifl:res ne regarcioie11t
la Ceremonie de ce -
Couronneme11r que c.omme
u11e Ceremonie de· pu,re ne ..
ceffiré, & qu'ils s'imaginoient
bien que tout ce qu'on y ver_
roit marqueroit plûtoft la
décadence de ce gra11d Em ...
pire , que l'ancien fafie de la
Nation, on n'avoit pas refolu
d'y convier les Reprefentans
; m~is le Grand Vifir
- · • • .. .... .. ... • - • · -· --- c.-
• ·-
àe S olinian III. :zir
ayant appris qu:i1s fouhaitoient
de la voir, en ei1voya
prier les Atnba!fadeurs de
Fra11ce, & d'Angleterre, &
l'Env·oyé d~ Hollande, & let1r
fit donner à chacun t1ne mai, -
fon dans les e11droits les plus
propres pour bie11 voir la
marcl1e.
Le 29. on envoya ordre à
l'Armée q11i efioit aux envi ..
rons de la Ville de retourner
vers Ai1dJ.jnople pre11c.{re des
C]Uartiers d'Hiver , en atten.
dant qu'on luy fi.fr reprendre
.au mois de Mars la rot1te de
Hongrie. Y eghen Bacha par-
T iij -


!
1
1
• •
222- 1 Hi/foire
· tit le t. "'d·~ Decembre a.vet
_do11z~ <:(~s Spa-his," péu-rcom~
mencer à marcl1er du co·fué
de Sophie. On diftribU'a ~prés
le Coμronnerne11~ .la pa~e .at1x
Ja,niifairë§ ' ~ ~a.u:x S'pal1is. en
prefe·nëci df1 • Gra.nd ~V1iir ~ c'e
ëjui d·l!fra p-luiie11r~ jomvs , fans
·.q!J~en con11uft ·pouP cel~· que
-] ~efp-r iè de ftrd~tion ~fu-&'lbi-e,n
· ilêrâè-îtfê ·cru f0nd de ie.ur
coeur .-0n di'ftrilYua a.uiii les
prefen.s qui fe font .à l~otca,
.fion· du- 'G0uron.nM'Ih«.mt des
, rtoL1\teau·x tSùl~~n~ .. -Le G·ramd
·Vi·fir &:le Mùfti..,o.nt c·l1~cui1
'det1r fnil1e c'.inq_ cé.ns. fequ1ns~

' .t · c e eut u a
de Solirt'lan III. 22 j
ie Sul tam donne au.x a·utics
Vifirs deux mille fequi11s chacun
.; aux Cadileskers & aux
Tefterdars c:hacu11 det1x cetlS
cinquante; cent à c.haque Capigi-
B~cl1i .; à l' Aga des Ja-
1niaaire5 deux cens cinquante;
l'ImanRoyal n' ena que vingt•
cinq ; les plus illufrres Doctet1rs
de la Loy en 011t :[oi;
xance , les moindres trent~deux
; le Bar.oufna1negi, c~eft
.l direJournaîifre,, & le CaraC.
macfabegi 0u Goptrolleur dtll
'Ttribt1t R~y~l quarante ; les
MoL1.c;;ai:is ou Muucatagis qui
tienne11:t les Livrcs ·du Divan,
'l""' ii ij
,.
224 Hiftoire
feize ; les Mutaferagas qui
fo11t Gens d,ar1nes, huir, les
' Spal11s ou Chevaux Legers,
huit, & outre cela cinq afpres
.par jour d,aug1nentation de
.paye; les Com111is dL1 T efcer:
dar, & les C11efs de~ Pa,1illons
de Ca1npagne, appel iez des
Tt1rcs Ali111eé:tar Bacl1i ,.ont
chacun vingt-cinq Ceqt1i11s.
Ce11x qL1i me11ent les cl1evat1x
devant le Prince, n-0m.
a1ez Sarraffis en ont huit,
-auffi-bien que les Serchaias;
les Meireri q11i battent la
~ilfe, les Capigis, les CaC.
11adar1s ,, & les Snalaris qt1i
de Soliman III. 22)
portent l'eau au Grand Seigneur.
Les Emirs ont cent
feqi1ins , & l'on don11e aux
Ja11ilfaires felon .le temps &
le befoin qu'on a d'eux ; inais
leur paye e~ toC1jours aug-
111entée d'un afpre par jour~
Les Palfreniers & les Cuifi-
11iers en 011t huit cl1act111, ~
l'o11 en donne auta11t à ceux
' gui prie11t Dieu à la Turque
dans les Chapelles où les
Grands Seigneurs font enterrez.
_Cette diClribution fe
.1nontc à des fornmes cxceilives.
Joicycequeda11s un temps

'2 z.5 H~ff o'ire · .
plu~ cal.tne les Sultans ont ac ..
.coûtum;é de faire quelqu:e-s
J'O t1:rs apreI s :l eu. ·r Couronne. .
111ent. Il ne ·me. paroifr po.int
'ql1e S.olitnan III. ait e11 ct".la
11nir,é etl:tiere&nent fes Predece
(J~üUT$ , .c"' efi. à d 1 re.> q u '11 ait
fait les me'fn1e-s cbo(e~ precifé.-
. .
ment aux JOUI.ls. marqt1ez ..
~oy qu"il e·n [oit , je croy
•que v·o1.ls ne ifere_z pas fach.ée
cl'app:rei.mdre ce ·que je vous
vais .cli.re. :~atre jours aprks
·qu'.un 11ouveau Sulta}l fe,tl
.cot1ronné J il monte. f1.1r {011
:Gali;on , ·& va par Mer ~ ,un
Jardi11 entouré d'unParap~o·
.
~. "'0 le ulura
de Soliman III. 127
che de }t' Arfenal. Les Turçs
·l,appellentAfcui, c'efi: à dire,
Mai(onde Plaifance. Il y chaife
--<:iuelques heures ., & court
r~lle Befie qu'il luy plaift, &
s 11 prend quelque c·hofe, on
le rient à bon augure. En fuite
il viG.te fon Arfenal , & [e
fait infrruire des affaires de
Ja Mer par le Capitan Bacl1a
"<]Lti e.n ·eJl General , ta11t du
~on1.bre des Vaiffeaux de
Guerre , des l1om1nes , des
A rm~s & des Munitio11s, que
de tout ·ce qui dépe11d de la
Marine, après quoy il reprend
le cl1e1nin de fo.n Serrait. Le
-
1
H .fl- . 1
2 2~ t1,:oire· 1
let1demain le. Grand Vifir luy \
rend corn pte des .alfairës ge.- 1
nerales de 1 Empire. A prés \
avoir fait fes largeffesau Peu- 1
ple dans les pren1iers jourb du \
Couro11nemen t , en jetrant 1
de la monnoye par _les rL1ës 1
où il paffe, il fait de grat1des
charitez at1x Hôpitat1x & aux
Prif 011s, de forte que la f 01n-
1
111e s'en ~ll trot1vée inonter· 1
'-ians lcregt1ed'A1nurat, Pere de Mahomer-III.,_à un n1illion lix cens mille livres, ce qui fa ~ t quatre .cens 1nille fequins de leur 11101111oye. Le cinquié- me jo.ur efiant palfé , les Da- ~--~-

de Soliman III. z29
mes de fon fang, tant Filles
que mariées aux Bacl1as, le
vo11t vifiter. Il les re.ctoit avec
grande honnefl:eté, leuli fait
de riches prefens de pierre ..
ries, & leur accorde les graces
qu'elles luy demandent , fait
pour la f ortrr11e de leurs Maris
, ou pour la liberté de
quelques Ef claves.
· Le 5. de Decembre la Sultane
A!feki, Femme de Ma ..
homet IV. fut i11i[e au vieux:
Se rrai· 1 apreI s av01• r e\1fl.t eI de / ·
poüillée de toutes fes rièheffes
, & de la plus grande partie
~e ~es pierreries, qui fe 1non~
'
'
2~& Hifooire .
toicnt à trois millions ·d"éet1s~ . .
On né luy laiffa qu'un petit
nombre d'E(claves pou~ la.
.fervir .. Les autres Fem1nes du
~ultan y a voient efté conduites
qL1clqu·es jours auparavant~
aprés que le nouvel E1npe-.
reur en eut fait forcir fa
Mere, qu~iln"a.voit pas v:euêi
depuis fept ans. O_n la co11~
duffit au Serrail avec un ;c
grand Cortege, & lors qu'on
l'eut reconmuë Sultane Mere
ou Validé ., elle y receut tous
·-les ·honneurs atta·c1'1ez. à cet~e
!ligrii té. . ·
- L~ 6. le Caima.c;;an prefe.n·

1 •
~ o Je · l u a
de Soliman III. z3r
ta deux belles Efclaves à So·liman
, & le 7. la Sultane fa
Mere luy fit prefent de plufieurs
autres Filles , dont on
co1nmen~a à former fo.n Ser- ·1a1l. Le 8,. om publia une nQU..:
velle Ordonnanc:e po11r fai{e
retirer toute la -Milice de 1
Terre, & de Mer, qui rentrait
par ·petites Troupes dans
Çonfta11tinople & en forroit
tous les jours. Le 9. le Grand
Vifir fe rendit at1 Camp , &
fit faire la Reveuë des Trou.
pes en fa prefence .. Il trot1va
qu,ell es, fe n1onroient à dixneuf
1nille hommes J fa.tJs y

~32 Hifloire
comprendre.les Troupesd' A~
fie aufquelleson avoir permis
de s'en retourner en leur
Païs. Le ro. on · renouvella le
Ban par tout le Camp, pour
obliger les Troupes d'aller
prendre des quartiers aux
endroits où ils leur · a·voicnt
efl:é affignez. Le onziéme
elles commencerent à fe mettre
en marche vers Andriao~
pie, mais foit que l'efprit de
fedition ne fuft pas encore
entiercment appaifé)ou, qu'on
méditaft de faire renaifi:re
• les premiers clef ordres , la
plufpar~ r~~i:if~re11t ~.e ;mar:
· de J'o.fiman IIl. 2g3
cher. te- ij,. on .affembla le
Divan, mais lesvoi'x y furent
tellement partagées , quel'o,n
ne prit a;ucuflé refolution
pour reprimer par la for ce
l'in(olen«~·e d.~s Mutins, pl·u ..
Üet1rs ayant co11clt1 qu'_il fa!.:..
loit _,employer, la voye. de· la
d-oac,eur pour les ramener .. Ce
mefme jour les An1ba{fadeurs·
de Traofilvariie qui .efroient
ve·t1t1s ~ Conftantinüple ava11~
les derniers trol.lbles 3 en ..
partire11t accotnpa,gnez d'ufl
Capigi·Bad1i. lls portaient
une Vefte.au Prince Abaffi.., - ~
~ve' une Lettre .par. laql!ell.e
.V... .
'
• . •
z,3 4- · f1 Hiftoire "
'-~e Gra~a :serghétfr ·qui ... Iuy
"'t:J0nnoit ~p·a11·t· de fon avene,.
_. ment à la Oôuronne) l''exI1or-
·toit' de ne poi;nt roin.prc l'an.
~ien·n~· alliàn-Oe qu'il a:voit avec
l·a- P0rte: ;' .le ·confirmant
tla-n~s ·f~..:·Pripcip.auté ,' ~- luy
prom.ettànt.de .grands fecours
pour la Campagne,proehaine.
L~ r~. on aéhevâ de~ payer leoS
Troup~s '~ fref.que -.entiet:cment
·; .mais quoy -qu'elles
,n'etvffeht ·p1us4ucun P!ete:~te
-èe ! fe .plaibélre >"Üll ne ,Jaiffoi-t ras ·de 1-r~rnarqQer .qu-r eile&
· "Citoicht fâchées di "n';t_en,pornt
, yo-1r ., & ~"iu'crll'ès tr~r-Oi®t
'
de S oliman 1II. '.235
i>ien v0u1tÏ qu'on lear .en ·etifr
fourny q11elqu'un , par.ce
-qu~elles trouvoie·nt qu"il~ toitt
. Flus douoc de :commander
l(}Ue d~obcïr., & de ·s' eo·rtcil1i.r
·en pillant , que ,de fenrir &
~·expofer fa vie pourilnen;iG
·dique _paye. C~pendmt ile
.Grand Seigneu1r •ord.onna.
,qu'auffI-to-ft ·qu:.e'.lles at1i:oient
•toucl1é tout çe qui leur .. efioi.t
,deu , av çc le prefent du ·Cen,1ro11nement,
elles mar.c11affent
vers les· Frontieres de Ho11-
grie, & qu'u11e partie pafLifl:
en A Ge. Cec ordre futlex.e.cut-
té d'abord a.wec a!fez d:e c.rai1-.
V ij •
2)36 ~· Hi(toire
quillir~,111ais les plt1sfeditieux
qui ne pou voient .fe refoudre
à rentrer fo.us le j·ou·g de l'obei:
ffance, ayant cherché de·
no"L1vea11x pretextes po.ur ne
point partir, & , s' eitant affemhJ~
z d'·uue · ma111iere .tumul:ttieufa,
d·eclarerent qu'ils ne
s'éloigneroient point qu'on
ne les euft fa~isfaits fur d'at1-
tres pla:itùe:s qu'ils avoie~t à.
faire. 1
' On aprit en mefme temps
.que les T-roupes de la Mor·ée,
infl:rui~es: _du profit que aelles ~.
de Hongrîe avaient fait à,,
9-0nfl:.a11t1nople ,. & · des :ri~ 1
; '
~ ,ter o de C~11 Urli:l
f
de Soliman III. 237
c.helfes qu'elles y a voient amaifées
pe.ndant le def ordre;
s'efi:oien·t -at1ffi. revoltées contre
l~u.rs Chefs, & qu'elle$
avoient com1nencé à re mutiner,
a1i1i: d;avoir a111ffi par_t
au b·utin. Le Grand V iûr
Siaous qui apprel1~n·d0it l'arrivée
de ces Troupes, parce
qu'elles n'auraient pas manqué
de pr':Oduir.e d,e t]ouveaux
troubles à Conftantinople ~
e~voya dire a11:x Milic~s ·qui
y eftoient, que Le Grand Sei:.
gneur le.qr o·rdo11noit de p-af- .
f~r !inceifamm,ent en Afie, &
~ menacer de puniti~n ceux
• •
, >
010 '~ lstero de Cul u a

238 lli_jloire
·qui n_, obeiroient .pas. ·c-e
(commandement fut .receta
·<l'abor,d avec peu de refpeél:
.par quelques., uns, mais ·Siaous
f"iachant ~ue ceu'X qu:i vouloien
·t exciter de n0uveaux
·defordres .n'avoientpas .beau~
.. coup d._e .credit parn1y les
'l'rot1pes, iugea .à p·ropos .de
ne leur paB laiifer le temps de
f ortifîer le·ur Party par des
c0n'federations femblables à
celles qt1i :venoien·t de ·cha·n·
ger la face de l'Empire. Ainfi.
iJ fit prendre les plus fedi·
?tieux, dont.plus de @inquan~
te furent jettez dans la Met.
.. .. . . -·
àe Soliman III. ~39
Il fit mettre en tnef me temps
.de5 Corps de garde dans tous
les qt1artiers ., & <>rdo·nna
·qu'on chargeait ·tous ceux
qui s'alfembleroient, ou qui
.con1mettroient quelques ~ef'
Ordres dans la Ville. Les Bot1-
tiques qÙ' on .a voit tenuës .fi
~longtemps fermée·s, y furent
'-Ouvertes, & le Cornmerce
<:ommença à s'y rètablir.
Cupr~gli , nouveau Cai ...
·macan ;fit f"ai·re alors un Re.
glen1ent pour les Troupes.
Le premier Article _portoit ,
:fl.!!, en rece"Uant le prefent d?a'
VCnement.,, tous les Jol.dats fa~+
0 '\\Hiftoir·e \
. rr.olent-farment \de 'fa. t~ou~e.~-dû
.YC-f'1deK, -'UPUs.'. hoffr la -C,amna,<lne, • \ ·~ If' .if (5'
prochaine aux lieux ,,q~11n \ leur
n21.-i-r.qu~r#it; ·&~i/f~ :lcsc..fJfji<Ji<ers,
ou ceux q_AAi refte~oi~nt 4ans }e$
Pro~-inces ., (erfiien1 puniJ de qzort,. I~ Jîf' -e~,, . • ~ •Î .1
Pour d-ono~r· plus d'auto-riré
.à ·CG Reglement .. , ontlé j
fit confir·mei:-,.pir ~u.n~ Petfa.;
ou dé-cifion · juridique' d~
M uf t.i , par ~ l:l'quell e ee ,fou-~
verain Pontife de la' L(l)y cte"il
' l clara, que tous ceux 4'ui ayrint
reçe.u la .pttje·J1-eGr-and(Sfi~1t1..M&r,
refufaroient ·de , fer"vir , di:{n-s ,fts.
Armies, ou' n:obeiioienJ!ptU :J 1
- -- · leurs

de Soliman//{, 241
leurs Chefs, devaient eflre con- .
fider~-z. comme traijlres ,_ & punis
de mort.
En· confequen.ce de cette
Declaration , le Grand Sei.
gneur en fic une autre fignée
de fa main, par laquelle Sa
Hautelfe ordonna à tous fes
Sujets de courir fos 4 t.Jus les
Rebelles, ou Soldats débandei:.,
& de les traiter comY1te ennemis,
fans que leur fang puft eftrt
re~hercl1é (efo!_l les 'lloyes <>rd1naires
rie la Ju~ice.
Soliman ne fe contenta pas
d~ fa~re des Reglemens poLt.f
les autres, il en voulu.t fair.e
• X
' V
1
-
: ~4·2 · -. Hiftoi1·e- ,
au·ffi pour tuy, . & .. travaï•Ila à
-un nouvel efrat de fa Mai-
1 fon. ·Il_ n'a pas conf-e~:v·é la
â:i~ién1e pa-ftie des -Officiers
qu.'avoit fon JPredecctfe,ur, &
bn ef per~ tir.er de ce retran ..
chewi:ewt-cl' Officiers pLufieurs
~illi~ rar an) ainfi que de
ce €)_ue Mal1ome.u confuma·it
en dép.enfés fuperftuës.
L.e Gr.and Seigneur aya-nt
travaillé par ces divers ~e·
glemens à .refor1ner les1de(or·
dres de l'Et:at , & à rétablit
le ,repos public, envoya quelqaes
jotirs ap.rés divers .Courr-
i~rs auJt Tr.ot1ipes de la.Mo:
. -

- .
- , 'àe S(;:li1m'an 1/f. 2,ii.1
1êh., rp0u·r_ ~rr: 0rd0nher .de
1e,q u:tnar ~-:tQfi: en ·1.eu.ns_
• ., .. -1 ·1 ~ • q;U unrers .;i1 llillrus :CJJ:e:s· ~:cn1n ...
D1'PfiG<tf~i1f a~ancer.1.duL VÔ ....
té ~e' )f~ietfaluniqu1e;, aillé..
gnaliltJf'o_ujô~rs '~~e." puis qu·'"'
w1Ihe )pruynit )qu:e l'trs I:tou:-pes
qμi efl:0ient . p'te[ente.s:~.
ollFs · W:'DWoi.enit: ·cl~-drer· ~ce
f:J.UÏ len;r :eG:tllit. déu.. .Sia-oûs
'JUÎ ~miloit)ab[olu.men.t em,pocher
~~lias niava1~çaffent, _
pnrx:e-r'lu' en)I • e fh.at otJ, l.crs affai1100
ell:oio.toet ;·de :ic:>uveaux
~ nefd ràltesine po1Lvo.re11t ma11;..
--.qu-crl> d~~c.hevet rle ' ru·1net
-ll'Empite ,' <Iit: des etfar.&s ex-
X ij
• •
• j -

' ,
,
de Soliman.Ill. 24~
.conferée, fut remis fur Je Si~ge
Parriarchal. Les Juifs qui
font à Co11ftantinople,fÙrént
e11 mef me tern ps condamnez
~ donner trois cens· boufes dé
cinq cens écus chacune. ·
Le 11. de Dccèmbre on
aèbeva de 1 payer les"·rroupes>
~ l .. qp li~_tpafl:"e~ en tue les
Spahi~ qu1 refio1etit i Co~f::!~
ntiQPpl~. bÇ'p Çor~s de ,cei:te
lvlilise' ' à ·q~i 9n ayoit· fait
pr~ nd~e l~ ro,t1 te de ,la Nat~lie
~1 s'arref\:~ a '(co,nie. Les J lni~
il1's qtt,~ '1,Y,q,iè!,1t1 là leursguartier
·~, y· faîfèient tout le
commerce des vivre.s; & for-
.. ~ . ' X 1ij.

z:.F6 Bifr()i:Y.e '' J "<ior~rrt· les Habi ~ns des Vil.. J
lages ,:;i~.co~voi~ns-d.e l'es le-~r J
vendre a,v,1l -pr1x·, fans fouf- J
frir · ~'i!J.s ~n d0anaffent à
doo'l!r~s<;. ./ J0 eeJm~e ils· les replu
s qtt ils- ne les a:v-©1en~ aeh-
et~z, la difette; de'Vint gran.:.
d'6 d'(ins la> Ville. t es Spahi~
. qai~ / en ~rouvoiebt incom ..
n1odez , ·l~u.1 en .firent d'e5
pla-inte~. ·Les :Jariitfaires n'.y
a'yànt.. p0ii'lt eu d' égard"'cet1:xicy
voul.uren-t de vive force
fâiro c<Zifer €·~1; abu&) .f:l co·n1 ...
n1e ·c'èfto i ~ l'interefi public
qt:filts· fo.Û·t'en'oi'i-e.ttt ) 11·~» <!:,n€bf 'a•

• • •
. . de Soliman.11 T~ z41
:geren.r le Peuple ·r ans ~'beau,.
coup, de pei1ne ,à. s~E>pp~~~
.avec· ~ux à. .l:a viol~J.ite.e ~ttt
.kllr. eft.oit f~iEe. Lt~ Jïflf
.Nffaires fouleverent le ·l?fu ...
. ple ~leur tGur,, en luiy faif<ant
,croi:11~ que les Spahis ne l~at
"vouloient ôte~ cc Gommer.ce\
.qu'a.tin de Ire fa:iie ·feul&. l'lJi
-eltoient déja e~ lxau-cou.p
,plus gr..a.nd nomhre que les
Spahis; ai11fi lors qu'ils etY·
re11t détacl1é le Petl~e d-è
:leur Party , il îeur ft1t fa-cile
de.les obliger à fortir de la.
Ville. Ce ne. fut pou•a11t
qu~àprés .un ~on1bat long &
. X iiij

• •
~4s-~ \~\ H-~ffl)ifie ~ -,\ .
fangl~nt, , & 1 dan5 lequel;l y J
(_μt plufieu~s p.erfonnes tuées~ J
~ 1 ble_[éès de part & d'autre1 J
~e~ 1Spahis · cruellem~nt 1rri~ j
(ez fe ralfem~lereht aux en; 1
yJ,(ons . d~ la Ville,·& attire~ J ]: .
~eJit les· V1a~abonds, ,~es de .. j
(çrtet1rs ,) & quanritè de Pa,y~ J
fa11s .. Ces · Troupes ~·avance.- J
· r.ent à delfein de rentrer dans J
Iço11ie , mais les portes l~~r J
en furent fern1é~s, ce qui leur -~
en Jit former le_, blocus.., en· ~
forte qu'en n'y laiffànt point!· J
entrer· de viwri:s,, il s_ ell:oient (e11ifi d'obliger les J:t11i!faires à. c.:apitulcr., lls4 menaaercnt
- - ~

• • • • • .
de S olim'dn-1 Il. 2!.J.9:
en 'm ~111 t 'temps les Bottrg(oi~tle
les plfter~ a.lin que ilitcrain..t
te d'il!ln' fi ·gra·ndtèlefordre4 le~
contraigniit de [eracl\e~ér pat
une concriburion. Cela eftoit
à'~autant:>plus .cl' craindre pout
CtiJ! ~ -<:iue ·cet ' efpdir· fa if ôi·i
gt:olfir rot1s les jo11rs les1Îrou1
pes des Spahis. Les 'Ja11 itfaire~appre
hendant que ia Vi1lle n~
Etlf.t forraée1 , d épef cheiie1:i1! ,à
Conil~ntinoplc pour de~an ...
dor.du1fecours. On envoyà
-da:s Ofii ziof.s,tl'au·corit~,& des
oidin!s fo~t f ecrecs pour faire
ec; lfer ées divïfions , & pou~
faire retirer les Sp~his. 1 .r

2150 fJi(loir-e
Le caJime ~ortl'l'Pençant à
;fe rétabli-r un peu dfns Con ..
i!Clln·ti11'0J'le , -Si-aous fit, pu ...
blier l~s Fermes des D0üanesJ
a<::s Tribt11ts _,_,. ·&. de- cous:. les
.autres revenus de l'Empire,
'.p>Ou r 't'.1lil Bail .de pl.u·ficbl·rs ant}
ées,,à condi:ri-on que les Ad;
jtJ·dicat~itf.es pay,eroient p.a'r ·
a17ance 'le ·ciets dtt pr1x, felon
.cç · qui ..,avo.i.t e.fré .pratiqué ,
pendan·r 1a guerre de Candie,
·mais il i1e fe trot1~a petia>nr1~
.qui voul1.!1it prendre les. Fer~
es à -ces •cond,iti'Dns., parc0
que les. dernieres taxes ayant
Tuiné ·coutes.1es perfonn.es qui


de Soliman Ill. 251
mtoient piL fai1~ 'es avances~
il nileur r.eftoit aucun·credi~.
®iarlleuts f luii:curs ~p.pPe .. ,
hmdererit que ~e ·n~ fufr trn
p1ietex,te pol:lt d·écot1vvir ceux •
,qui a.voient du ~bien, & }e,u~
rnnpofer e:.ntmitec.d\e f:i~uvelles
ta~e.s . Il J avoi:r enc-ore à C-cfll<
firurtt11opl·e des D epu,tcz ·da
Corps des Spa11is ; ils y é-
·toieut ·d~met1.rê1l; ·pou·r follicirer
la confetvation de leurs
:privil~ges. Ils fuc-l!1t d·es propo'!
rrions ~ue Siaous -écouta·;
mais ils nevot1lurenr pass.'en-gager
à faire les _avances qu' o·n
den.1a.nd.oit. Le· de.!fein de ces
• •



i j :è. Hi(lo.ir~ ~) , ·
Oflicie"rs elJ:oit de f{\i'f-~" des \li ~I; 1 _,
.S.,9L1s.~,{er mf.§. à .:9.es.r·rar~i.cu:
~~~f?S, d..o, JJ_r..~ls .~ir~J:9iel}t1:G):ile~
qu-C p~o:fi t ;~,m~îs .{,_çe~ .x à qui
. i~~ a·ur~ient pû ~ fous-fermer
comme [~s .A.rmeni~ns , 'lts <:" "'i'"!f ' ....1-b, 1 • -
~ w.ifs_, ~;q·~!:1~!-.e5?1N~g~sian~,
r~~aferent d~e sJ-,ngàger avc;t .
~u~ .: parce··qt1:~)s,ne . le~r pçu.,
voi~nt donner -~û:èu.rye [et1~~é, , 1 ~ , ,. ,1 .l' .. 1 .r--,; ! p 7!' ..... ~ ,,..
- ppur" ~ÇS;. foμiJ.V;~·i. qμ'il~· ~U·
• I roJent a-van,ce-es1 ( • , c ~
~es '.~ffa~res ~ft~n~ a~ns ~c~t-;
te Grüarion , on C:OllfWC!}Si~1
à_~t:rav·~i lier :aH. .~ ,pre[p~fa'.1t1·\;f~Jde
le1 1C~n1pagq,e, .4e -rt»anné,e. Pf9i
c]l~l41f~:& -~ f.~ire~d~.\"!01U ~çJ,~ç~;


"' I • ..
, l ' \ \ .
de .So , iin~n III. , .,~s~,
levfeS' . I dans tout rEmptre
Othotnan.: On ef petoit l~
pbuvb1r continubr '~vec fuel
'és , · e,n · rira~t' cin<} on fix
millions de 'pia~res du renouvellemènt
èlè- t'butes •Jès ),, Let.l'
tteS'·Patontès ,!cdttèëffibns , 6i
privilèges , joüilfance des Ti~)
mars 1, & generalement de
tous les emp1ois de l'Empire~
qti'on' a:evoit "tenouvell'er.
On pret~ndoit outre cela le.!
ver lè: douziême de cous les
r-(lvenas: -- ~ ' "' 1
~ 1-llirran~r.~, 'fl·où~eaù 'Bacha'
d'Alep\,1-autrefois Kiaia du
Gran~ Vifir Acl'imet Cupro:

)
f.11'* .1liftoz1·e ·
·<Yf L rqm prit .candie >t· ~ qu·t
~-oiit ,r.~1 à'atdgiade _,. Ifur
~-mm.e .S~:&kip,i; JCn1 BLïln, • gr:ie ~FJ>U! la Q\mpag:ne .prm,.
: ,cb_11ine.,1fuiv$lhf:Jr'blfa§t~ ..
l}a{f~ ~de 1?::.Bfilpfte >Othoroan.,
'P1j~ tque 1 1l~;l:}ach-a !tfi\kp
.d QÎ If • t.oitJ".'lUJfS ~ . to m~r1 d:ar ; A
.l'iAt:m..fe: :.p:ria~iF'a];e en àiltb~
f,énce , d11 .Gr"§lxid M ifir~
.... :on >tnvoyaj dans.16.~mefmc
t.emp.s,l~,Cl11-aoûxtamc,Pri.ncC$
:de Moldavi~,& .ck,&alaquie>
pour leur ~ppren4:re . télevation
de Sultan ~soliniarl .li &
pour ~leu.r po.izt.ar _ de (nottl.Iil~
le_s. LG.Dt!~$. rP..at.enoos:~ qi.i.i- lcl
, -
~ ..
de Soliman JI!. l.5~
confirn.Yoieoc .dan5'1eurs P.rin.. cipau.t:e.z~ CesLerctes..cll:oient
accompagn~s iles ~ eftes que
iton·a.coûc:ume die11~oyu en
de pareille.s occiGons.
O,n dépefch-a auOE au -.Che-....
rif de .la Mequ:e , . & on luy
.envoya dcs JP.r.efensÀ.e 'peu.de
valei.ir. ·Coluy 'qui en .e-B:oit
cha~gé ~oit ordr:e de luy
demandl:r nn :fucouts- tdrcrr ...
gent ; &.~ d~s T.rou p.es paur
fairetla gueirre ati~ Qhr:.efriens ..
Un Capig~ fnt auflid.épefché .
en Biitbar1e ,avec des.Lettres.
tlu ·_Grand -Soigneur , pour
. àorurer avis ati« Divans '&


. !56 ~\ \ \Hijlo~re ~\
âux Milices de fon avcne~
fueht'à 'l'Empire, & leuF de ...
.tnander--t1n fecours <je Vaif.
feaux, 'de Troupes, d·argent
& de Mu11itions.
Le~Klflar-Agàfi, ou Chef
deS- Eunuquès q~·i · av-0ir irefte
étably depuis la dépolfeffi·on
de Mahomet IV. fur privé de
- fa. ~c11aro-é · dans le- mefmc t> . .
temps , & obligé d~ .four ..
nir, qu-el~ucs raiforts qu·fit
eufr alleguees ... pôur s·en dé ..
fendre , une f omme fort con ...
fideraolè .; en·~ ëôri'fi~ratiGfv
qe laquelle il 'eu~. pcr111îffio~
d·aller 4emeurer-èn Egypcy J

. . '

de SfJlim-anJ 1 !. 251
1 - où :fop .Pr:ecte. .c ~ffe~u ~·~fioit
aufii re.iÏJ.é . -!tpré:s 3-V.oir, el):~
dépoü~llé de ~otJS 1fes. ,qïe,os •
qui mo~t9ient . à quelques
millions. ,, c 1
t,e b.ruir .çpμ\Ut alors ~dans
Confi:a,ncjqopJ <.7. q9e le Sulta-\1
Mahomet e!toit malad.e. Les
u11s dirent,qu',il . ~fi.çit h~dro-;pique
.. ' &; C}\1:iÇ.i. ~ette rntiladie
luy eftoit ve-nu,ë.) no~ feule-
.n1ent de çhagrin , m~'is au11i 1
faute d ~exercic;~s violens auf- ,.
'I quels ;il e~oit JlCFO~tu111 é,
ay.an.t (çqy,ÇP.! Balfé des jours 1
entiers à la Chaffe pendant
. le p.l\l{\;tud.~ ~iv~f ,_ & cot1cl1~.
y
• •
• 1

25 8 '"' • 1-lif!'oire -cn
·Cuire a~ns la campagne al!
milieu de 1a ne:ge. IYaat:res
«fire'nt q1:le ·fai ·ma4a'd·ie· 'venait
d"un· ~ifdn leni· qu'<:>'n luy
avoir doi,1né ; .inais le ·ren1ps
a- fait cennoidl:re què z:ooe ces
.htutts- efioi·d\t fan~ , puis
·11u'!on dev'Pol~ a·vo1r vu pr~ ..
f{nteffiertt de f~t:l1eu[es .fuires
.de l'une ou -de l'autre d~ ces
n1alad!ts . .. :Att .contr-aire on

.affure quéSdli1-nan tté~oulant
;pas .qu~o'11 Juy· in1pute d'efi:re
-cat1iè ·de lamiort d.e fon frete1
a ordonné ·qt1' on .ne luy donnafi
·rien <C!u'ep _proîence de
· .quelquesperfr011nes ~t1e Ma:


• •
de S oliytJan Ill. 2:"5. 9
lioroet non11nerait lt1y-n1ef:
ine, &. etI qui ce Prince aui;
oit confianè.e. ..l
.Co.,m. me on ch.e rcheit.à rértablir
les affai.r:es, !:I'alil B4l:.
çha, Re.negat Alba11ois .; ~
qui a la. rep.uration ad..,cft.rc
bra\11c O.flicie.r , .fut faix .Seras~
1kier: de la 'M0rée, parce qu'il
conncrifr parfai.tc1nént hie.n
le Pais .t & ,l~0n ofta .cet ~·cn1-
~ploy à Mehetnet .Bacl1a quti
y c6mma11doit. les Tro11pes
Othomanes danS" la. Can1 l1ag,
ne derniete, ·& <I\:î.i -pri r la
,fuitei devant les Veriiticns.,
Ce derμ.ier ®~ -0rdi:e de '-:c~ir ·
·y 1j .-



. Zû.O ~ ;..-·Hifloiré ·-~
.~endre compte de faconduite.
:Le Divan s'eftant.1affemblé
-f>lufie.ur6 fois 1fur 1la maniere
Aont· ~hdiht cet~e7· Cam.pa.
gne les Turcs pourroient fou•
.r etJir la ~ Gûerre contre 11 -
Ho11grie, ;ivoic refolu de tenir.
.f~s:dk.l iberations . fore feçretces.
-Cependant · le bruit
de_ce,qu'il Ma voit refolü_ fe réi
p~dis :, \& ce qu'on publia
fut trotl_vé fi politiqn~, & de
fi b·on1fens .) :qu'on. ne ·pmt
s'etnpefch~1r.i d: y i•ajo.utet:ifoy,j
On .diE .qt1e .-11ei:Oivant<ayann
re'C-onnu, 1quo : los A~emans
~;aignoidnc au·airit \~s ~gesJ

de Solimaii.Jll. ia-i
que les Tu,rcs apprehendoién:t .
les Batailles, & qu'un ou déwc
S1e-ges ·bien. ,.._fourènus"l;po\iiv~
ient ruiner les T~upes ItW.
periales , & les mèttre hof-S
cf efrat de poutfer plus iloin
leurs Conqueftes , la refolhl
tiôn av<;>it efté prifc' de f3ir~
bien garnir les Places qui
1r ont' )e nco'1r e\ fu us 1a •u.J om• tnr
tibn Q. chomane, & demetrr~ )\ '"\ ch qüclque'S-unes de fi .nombreμfes
Garn~[o ns , qu'~vec
Je:s.détachemens que les Turcs
ca~~reroienttn cas .. de h:ef oia1
ils ·puffent former de petits
~ps vapables, de batt·rcr· .kJ·

·202 Hiftoire
Campagne 1 & .de :harce1er
lçs- I m;peliiaqx. Rien ne pa.roifi:
mieux imagi1té -qu.e cela au;
·gens du mellicr , p·u-Îs que l~
P'r(e d'une Bataille pattrroit
.achev.er de rui.ne:r le.ur Ern~ •
• • p1r:ç.
Quânt ~à ce qui regaràoit
alors les . pre:Paratifs de la
Guettte conne les Venitiens?
' anfe -contentoit de .faire,.filer
quelquesTroupes de ce cofré ..
là J .& l '011 paroiff oit 'ef perer
'beaucoup ·de l'experie!nce de
·Ha-lil Bacha, mais la Flote
cllo i t: e11 il ,.t,11au;vais efl:a,t, la.
plL1(pa.rt ·des Leruenti o.Ù So1~
.Je Soliman III. '2.63
dats 'des Vaiffeaux s"efl:ant
déba'odez , qu, on perd oit
ro-u te efperan~e de.1arr étà'.b lir~
~ trtoins qu' oo ne receuft un
fécours de Varffeaux de Barba.
rie, dont on fe:flatoie ~ 1na.is
avec .peü de foni.eme11t. 'Ot~
·ne ktrffa :pas de d:èpefcher
dans ce.tt~ veuë . u:n Capigi
J3aohi pour A 1 ger, Tunis , &
'Trip011, afin qu' en1 donnant
part â tes ~Puiffanc:es .de~l'ave.
·nement .dt'.1 n·ouvean Sultan.à
i·~mrtre '~ il 'p?fr ·folliciter
auptes d Elles le fecours
.qu'on en attend oit à la Porte'.
\~oy qùe le Galn1c ne fuft
.... . - .


!6·4- H iff oire ,
pas auffi grand dans Con·
ftan,tinople qu'il auroit dû
~ftre, s'il n~ws'cfioit point fait
de revolteJ on peut dire ncan ...
moins , que cette Ville là
joüilfoit de toute la tranquil.
lité q~'elle pouvoit elperer,
aprés les èruels moμvëmens
dont · elle a voit c:fi:é dé'.chirée,
puis qu'on n'efr jamaisfi-toll:
re1nis d'un mal dont la violence
a efté grandtt;. Cette
.tranqui·lljcé,qui auroitenc"Ore
palfé Pour agitation dans un
~utre tetnps , avoir~ donné
iieu pen:d.a11t prés d.'un mois,
de trav.aill.er aux moyen~ de


, rétablir

. ' ' .

de · Solimttn ,III. ~6-5
rttablit les a1ffaires d·o- l'Em;
pire ,..J1& fur tout celles· de ~ là
Guette ; ·tn1is tomme<il eftoit
abfolu~nt :i1npoffible : d•f
iemedie·r fa1Ts arg~nt., & que .
tot1s lesJ fonds avoienc ell:é
ti!ltietetnent. èpuifez. par :1~
·fomm~qu'il astoif fallu don_:..net
au.x Faêri~ux , lè g~ànd:
Vifir[e vit contraiht d'o(dbh- • • • ner que; les.tOfièi~s des1S~:J,
bis qui .a.v-é~nt pris 'l'acfjuiii~
a&tiom-des litrmes, e'n s'obli.:..
geattt1dè f:iire quelques avanl
cès~9 fâtisfe.roient· ptompte!.!~
munt1;ifuùte.:-deqag.y ils fe~~
rèÏehl~AAz~J:o,l'adminiftr~J
.. 1 _ r-
:JJ.,1 ;J 1 b z


1
·1
Z«56 ' Hiftoire
tion dés ' revenus dont ils s, é.'.
toienc mis ·en poffeffion. Ces
Officiers"'• detnanderérit' un
m~is de temps, cc que le
. ·Vifir ne jugea l>as· 1 à propos
de leur accorder, tant à caufe
que la fituation des affaires' ne
pouvoit permettre qu'il leur
donnait ce delay, que· parce
qu'il voyoit-du -rifqu~ à les
farisfaire là-deffûs ; pulfqu~I
s'il arrivoit que les aff.iire' fe·
broüillaifenc dec 'elle forte,
que ces forn~es ne fufÎtrit jai'
mais receuës' ,: l~mpire · t cn1
foufriroit d'une lh~nierequ'1~
auroit pein~ às~,tn rolçvdr,.•hes,
• •
,,
âe Soliman III. ~61
Adjudicataires.des Fermes qui
eulfent .b1c~ youl~ trouveç
.des moyens .. de s'emp.ef~-l:\e;i .
de payer , lailferent échape~
de grands murmures , &
firent enf uite des cabales avec
les Ja11ilf1ires. Cette Milice
• •
ne chercl1oit qu'à ex-crter de.
nouveaux troubles. Le Grand
Vifir qui ,5' en~ eftoit attiré .Ja
hajne depui~ qu'il luy ayoi~.
fait oftet fon Aga , & qJJ'il
en avoit changé .la plufp irt
de~ Offiçier~ , VO!;!luç les fair~fqrtir
qe _ Co.pfrarn_i11ople ,,
pour etnpefcher les defqrdres
do!lt 4.il .prç.vq,yo.it les f u.(tçs. z ij
' ,

• •
268 Hiftoire
Le mQyen le plus plauGble
qu'il trouva pour les engager
· à· mar.cher ., . fut de f~ire publi~
r' qu'1il partiroit qtielques
jours aprés pour la Hongrie.
Les ~utins n'y ajouterent
poin;~ d~_ foy ,, Ol~, Jl':l :OO,O.i11$
i'ls voulurent affe&,ci;· ".<!e n~. e. n
rien croi~te: U 1'1 fi11;1ple Soldat
nomm:<} Fetfagi ayoit· excit'é
cette re~olte. On p~enoit .en
luy quelql1e confiance , &
fon ci;edit augméntatii ~ t.0us
1nom«11s 1 il .~fi:0it. ~ crai.tidre
l . qa'efrant;d un natg'rJ j:xtre-
. I mement emp0rte & violent,
!l .ne p-0uOEtll: Jes cqofes .. au.x



-
de S-oliman III. 1l)9'
dèrniéres extren1itez,ce qu'on
.doit plutoft.aprehender d't1n
miferable1 que• d'un homme
plus habile, parce que n'ayant
ny ef prit , ny ra-i[onnement.,
ny politique , il fe laiife 8-
p]oüi~ par la fortune qt1an d
. elle_ re~ble le favori fer ~ &
·pourfuivant [es deifeins avec
une violcncé fans mefbre ~ &
run·e èxtrava15a11G~ brt1tale, il
fe jette. imprudèmtnev.it dans
les prec_ipices qui luy font:
ouv·erts de toutes part~. ~fais
-tes- Braves in<li(crecs ne laif~ . .
... fenr pàs d'entraîner e~ fe pei--ràant$,
·autant d'innocens que . z iij
-
1
' •

'Je Soliman III. · ~tr
Fetfagi loir\ -de fe rendre a~~
hon~eftet~z & aux offrçs dq.
Gran4, Vifir , fit , a!(emb.~er
~es J aAilf air,es. 11 leur dit~ q u~
Cf Miniflre a'tloit refolu de les
prrdr~? & que n'ofan.t, /'e,ntret
pren~r~ 0/1'1Jert~mer.tf 1
, il tra'IJ?Z~li..
/p,it e~' .fac~et J. en tretf(Üer ~,
11;1oy~r1$ ;, 1~·11~ tleur Ag,4. eft~i.t
Confirknt, ~:) r:~. l(i{tr, .qu;il agiffoitfau,
r:~~~ftt.(' d ~,[on cofié ,, &.
_qt{'ilf de,.v.oie_p.t l~4/ler majJarrer;.
A peine~ur.,,il Gclfé de par~er!)
~u'..Jls .. lu_y,. w~r~u~re?.~ qu'~!f
eftoie~t·;'f~~ dt 1e".fuiv~~ ..
& ils all~rent trouve\" Jci,A"
/\ga' dans le de~· -d~ ~~~ ~~
.. . z iiij
, ... ,... • l
,; ,, ... ~ • • t~ '
• "lit ... .,
~--~. ~ .. o.t '.. •
---~~-

27 2 • H ifooïr.e
a-1fie.v à1leurs. foqp~ons; mais
il eut le bonheur d'ien éc1haper
en leur jurant 'qil,il ne fçavoit
rien 1 ~es de!fe'~ns .de SiaGt1s.
IJs l'a<:cuf oient d,une chofe,
&"11ofQtplai"gnoient pas d'une
autref'tililï laquclle, if.s--efro.i-<!nt
.a'.Vet1g-lcz\ <D'en ,A_~ a-vvit fait
.perir en .n~oi1Js <le dei1~ mois
plt1s de ttcris mi1le .1Ja11lOEa:ires
d_es 1pl111s fed,iti.eu-x. Il, les fni-foit
enlever la .nt1it fans que
leurs Cami+rade.s s'en ap.perceufiènt;
on les mettoit dans
un fac, & 1 -011 les jettoit_dans
la Mer. Ainfi 1'011 peut dire
-avec raifon· que cet Aga fut

• \


• •
de Solimdn III. '21;
heureux de _pouvo~r 'fauv.cnfa
vie, puis que ·pendant ·e1:ettt
horriiile tcbellion- plufieors
ont efté- n1aOEacocz fur JdèS
fbupçons pris iegeremcnt, .&
qu'il ne l'a pas ,efté pour ·doe
t"l1ofus ct&étives ,' tant ctWc
qtti av oient tèceu fes "ordr"
avoi.·e-nt .. toμjours bien fce'1
prendre~ 1 lct1r "' t<!mps , , p0'll_r
-execl1ter l ce. qoi deman.doit
tal}"t de fccret, & d'adreffc:.
Les Mucins eyant ciuitcé
leur Aia _atl·erent aflieger
Slaous d:-ans f on Serra'.i l.Il fetn•
bloit felon l'cLtat où elloient
ics C~Gfes, qt1'1ls du!fent a·a~


27 4- Hi(loire ·
bord 1uy faire les mt'fmcs
plaintes qu'ils avo'ient faites
~e luy à ,l~u,r 7\ga; mais au
lieq , de~ Juy tenir le mefme
langqge.,~ .leur fureur tourna
prefqué. entiere contre · fon
neaufrer~ Cuprogli~ Il avoit
ag.y felon leurs f~uhaits J mais
il , efi:oit habile honJme &
gr~nd politique , & comme
jls app1chendoient qu•il ne·
punift. u11 jour la rebellion
31μ,il avoit i-ru 11e pas condamnef;
ils chercha enJi cl.es
prctexxes .de fe plaindre , &
dirent pour cet e~et qu,il
avoitvoulufaire 1nourir d(:UX

' •
de Sôliman 111. · 275
nes1plns biaves~Soldats de leur
Corps.' En'fin le Grand·Vifir
ne put'1es appaifer qu~en leur
promëttant qù'il l'envoyeroit
a la1Canée. Il luy confeilla
rioonmo1nsi de n~alter qù•aux
Daréla\\e!l~i~ lSù i1 ~on1~m'àn.
Ôott avà·nt~qùè ctcn'avbir e~ê
r:appèll2Vcl't1r rcmpl1r laCl~a~get
~de Oihma:cà11.1 l'Ainfi1 €et·
hab)J.è• Mifilfüè quitta1té-foin
dts àffaîres·; & forcit dè 1Con~ 1
ftàntitlôple ~a prés y avoir fait .. 1
l>eauc-o\.lp-· èle'}~l1ofes pour, le · 1
tfien"'~e!îl'Eih'pire pend·ant 1le i
p~ti de Iemps qu'il y a de~
· m'eu\:é. On peut confidercr
I
:i76 Hi/foire
f on exil commme un è'li:t dQ
lq fuite des malheurs qui fem,.
_ bJe11t · de.voir ac;cabler l1Em-

pire Othoroan. 1
Les Rebelles, aprés ~voir
obrenu~ l'éloignement de
~L1progli ,_ obligerent Siaous
<le leur· prometrr-e par ferme11t
, qu'il ne fero1t jamais
r. ien dan-s l 'exercice de .fa
Charge , fans prendre >au pa.-
..ravan t l~urs avis. Ils pouffe.
-renr let1r at1dace encore p·lus
~;vat1t, & dépo'[ercnt plufiet1rs
Qfficier~ de l~Empire~ & du
~errai], & pour n1arquer enJ~
it.; 1 qil:~.1-s- t1'agiif0~~Î1t ·qt11e
• ••
,
de Soliman· !II. 27·7
par lO!feu1 msri•f tlu bien pu..:
blic ,.ils firent expedier divers
ordr~s pourtout~e qui regar-l
doit l' Armemept nav-ab-pout ·
la- fonte du Ca11on, ·& t>our
plufieurs autres préparatifs de
guerre., L(s 'Galeres dc;s. 1Beys
partirent enfuitre po:it purt~r
des Troupes& des munitiÇris
à Negreponc, & en d'a~tr~s
Places de l' Archipel. Oà-on..:
voya .a,uffi beaucoup d~ bltd ·
"' Napol~ de Mal vafie, & lè
Set.askter Halil Bacl1a , qui
" avoit can1pé prés d'un mois.
aux environs de Confi,anti .. •
nople pour lever des Trou- -
. - •
.2 7 s H ijlot"re ·
' pes qui devojent fervir du
collé de la Mot:ée , eut ordre
de le~ y.. . c~ndui-re ; , aprés·
quoy on expofa les queuës de
cheval , en publiant que le
Grand Vifir devait bien tofl:
fuivrec.es Tr.o~pes ·avec d·~u,.
tres plus nombreufes, pour
aller de ce .cofté-là cl1alfer
1.es • Chrefiiens. Le mois de
Février~ fe' patfa alfez cranqiiiltx
·~ Iemenc, & ft1t pref que ·tout
cruploy~ ~ trav.ailler~ au pieni
de l1Etat: Dix-huit Ghambres
ou Compagnies;d~ J-anitf~ï~~s.~
fe prcparoicnt à partir âvec ttois
mi1l.e,. homme~ wd:auJ,~~~- . a


I •
de Soliman III. 279
Milices, lors qu'un incident
nouveau changea toute la
face des affaiJJes (, & 1 les miu
dans 'u ne étrange ·& cr~elle
confufion. .
.ceux qui fe troavoient
alors danil (}onftan'tinople, '&
qui efi:oienc intriguez dans
ce qui ·s·y paffoit' foit de
force, foit volontairement,
efiôient dariS1 ldnnefme"'efi;at t . •
qtte les Voyagettlis ·-qui en·~fe 1
lll'eccant fur ' M€r ,. g<>.ûtent
alte~~atil/em~nc _ l1e1 , plaifir
trànqilille lque dot!ne .·I-a b~
113:ce:, &'fentenç les n1ortelles f!
~raintestque::t~~fe · l' atfurançç_
'
1
' 1
1
~so · Hi(lot~re
prefqu~infailli.ble d~une mort
_erochaine.- Je viens dC" vous
faire '. voir ei1 peu de calme
a prés de gra~ds orag.es. Voicy
un~ tem pelle. e~c·ore plus furieufe
~ue les precedentes, &
qui a f"Olit périt celuy q.ui em·w
ployoit tous fes. foins à dé
·,iourner de telles ~·ourafques,
~n faifaht perdre. la vie. au
Grand. Vifir Siaous .... ~
Les ·Rebelles aya~t veu que
ti~n n·ertilF'fGhvit lcùrs- der..
feins de ·reuffir, ou que tlu
moins la re~ftance qu' 011. léur
f~ifoi~ ~fl:oic~fi pe~i~c ,~~u'1ls
n avo1~nc encore fait auc·li·t1ê.

'
de J'ofimdn II1. 2gr
tntreprife dont ils ne fuffent
venu·s à. bout, · re.folurent
d~ preffcr le Grand Vjfir
d'établir ·deux nouveé't1x
impofrs à Con·fl:a11tinople, ·à;
Andrinople, ~à Burfe, L·un
eftoit ' fur t.o ut-es les cl1c1ninées,
& pouvait mo11rer ei1- -
viron à la valeur d't1n écu • '
cl'or, nlonnoye de France,,
pour cl1aque cl1eminée ; -&
l'autte eftoit d'un S.e<iuin pi1r
-tefte.·011.avoit extr emement j .,; ' '
. befoin d'argent dans Ja con-
. ,jonél:u~ç P~Iç(~t;lte des affa}re~,
.-& ,le no.1l!veau Sultan·, l ' E111 ...
, ·pi.~c;" .~. ~~ .Gra_nd Vi{jr, ~e fe
, Aa
• • •
• •
1
2 s 2 H iftoire
pouvoient maintenir fans en
·avoir.Les Troupes,à la verité,
devoimt e~re fatisfaites, mais
c'eftoit polir le .paffé ;. elles
s' efl:oient mifes fur un pied
à vouloir eftre exaétemenc
payéts à l•àvenir·, .& il efioit
dangereux d•y manquer , puis
• · que c'euG: efté expofer l'Etat
.. ~ · aux mefmes inconveniens qui
venoîent ·de luy dt>nherJ des
· fecoulfes fl terribles , qb~il
en demeuroit t6ùt· / ébr~nlé.
~·ailleurs.' quand' bii "'a une
grande gu~tte "à · foutenit~,
l'argent n'eft pas .,féû!ethe'nt
nec.etrairc i>oUr paylei-'' ';~~
_1
de Soliman III. 2g3
Troup~s, mais il y a· encore ·
beaucoap d'autres g~ands
frais à , faire ? pour lef quels
il n'en t• faμt pas moins.
Siao·us envifa_geoit tout eela ~
mais les Grands de l'Empire
avoienî efré tellemen~ ..
ruinez p~( les taxes ex9r... .
bitante.s qu'ils avoie11t efl:é
forcez de p~yer, & les Peu- .
pl es dont le comtrter.ce avoit
eft~ in~err,qmpu , V(noien~
d'e.ftrp .fi ' maltraitez par les
Trou~$, S.μ~!ep avo.ient;Fill~
z & -,ol~z ' "' qu'on ne po~vç.
i~ parle~ de nouveaux in,1-
~pofts fans s:atçirer u.. ~e .g }flfC .
1\ a lJ


'2 g;4 1-Iiftüir·e • ,
ge11er~~e . ~· de,, !forte que_ le·
G·t-and ViifilT; v@,;yant(,d'ui,1 cfJ.
tk lame,çflli t~,.a,hfo l11ëldla.voir
-<le l:axgen·t, & <le l'autt<e la
.J·a: l' ,.l . ,.J>
~11HCU te -qu l . y avo1t.,.: ur:~n
lever; &-i le rif qu·e ~ où.'. Jl'0il·
'S:exp-ofoit~ on fai:fant1d·e 11w"!
v:ell.es impofitio,ns, ne.f~t _p:as
fâ.çhé de·ila ·propofit.fo.b ~que
, l~s · Troupes fi:r~nr~_ 1d,éia_blir
~es deu;xjihyo·fts ' don_tje viens
·de·vo~s p~:rl.ot5.1_~l ne.s~en tl~~ ·
fendit _qu,~utant: qu'.i1 en fut
, ~.e(-0in_;. ·p''}U~ ,,fc .;juftjfier au,,..'"'
. . ·;Qté~.,.. :cler i:euXJ ·q· ue. JCes. tnou· · I - .. _...., J
. velle·S"·".J~v~es . rega-td!Oie~~11·
~oi~ d'acco·r4 l1u~ellies .fe fif-:,l
f ... *"' - -
• •
• •
' r JE1 • ~I U


de Soliman III. 285 t
fent, parce que tous les tre.
fors- du_ Ser rail cfi:ant épui=- ·
fez, auffi-bicn que les,iichef.::.
fes de cell:x qui en a"Voient
amalfé, il ne voyoit pas que
fans un pareil -recours on pt1ft
travailler aux' preparatifs de
la·Campag:ne prochaine, mais
il vouloit paroiftreforcé·~ les
établir: La chof e arriva comme
il l'avait foohaité. ~ Les
tleux impoits. furent mis~ &
lafurprifedu_Peuple fut d'abord
fi grande, qu'on eufr
dit ..qu'il n'.ctVoit plus ny for- 1
ces, ny v-0i":r) mais il .revint .
~o~ .i co,up de . f on a!f 0111~ ,
• •


'
.
286 Hiftoire
pi!fement, comme il arrive
prefquetoujours en de: pareilles
oçc'1fions. ·Il murmura, il
' s'aifembla enf uite par petites
troupes, ces croupes groffi ..
renr,mais tout cela n'aboutif..
foit à rien. L'impoft efl:oit
fait au nom du Sulran , le
Grand Vifir }'~voit étably,
& I~s Janiff1ires & les Spahis
· 1·ayant dc;JhandéJ ;,.. lQn ne
voyoit point ~ qei f e plain ..
dre , & on éftoit trop foible,
;()U qu inoin~uèp abatt9Jpout
- att~qotf[. ~p~bd~tlt fgmjne
;par·tout où unigra-n,à:nbmbtc
, ~trouve)i\ y.-.'J./. i~j~urs-qu~l:
'


de Soliman III. 287
qu~un plus èntreprenant &
plus hardy que les autres, il
s'en rtncontra un parmy le
Peuple de mefme qu'il y en
a voit ·eu parmy la Milice, &
tout eftan t alors en confufion~
un Tailleur . trouva moyen
d' appro'cfier du Grand Seigneur.
Il fe jetta à fes pieds>
·& luy p~efenta un memoire
.1~~r lequel il prcnoit la liberte
de.luy marquer., non feulement
l~impoffibilité où
'les ,Peuples ~itoicnt de payer .
Jes)I~ofis~ dopi'on. les vou-
"ldit ch~r~};ttiàis:enaore que
, I • ,-cea1C rteq~·ea~te;· pou voit .a.P:
' · 1
1
;
~ 8 s H iftoire
rorte'r- un . grand -prejudice
.âl,lx affaires <le ·Sa .Haute.!fe,
. f 4 •
--& à~ fa Perfontie .mefme. Le
'-
Gr~nd Sôigné1ir "VDu1'at efrr_e
· -ëc,.laîrcy: pfus -~ fon .d de~celle •
• cy, , ·& -ordoru,1'.a au. Grand
_ ! Vifor.tde;lu·y dire" la veiité. de
..roût :ce ·qùi là c:-onsernoit, Il
.luy ~em·arida en:m·e·fme .. ten1ps
.li on avoitfait de femblables
..levées .. yend;in·t ,le riegne de
-fes Predece!feur.s~- ·Le 'Grand
. V:ifir·J.-ûy r~épondia que no ri J
. ..mais .que les J ànrlfiites &. les
. s~~s-0~ 1~~v«).ien_t .. -d~~a11d~;
_ ·d-'une ·m..an1ère .fi ·imp.~tueû[~,
· t'l:o'il-~v~it jilgé à. .·propos de
. . . .. ~ - lrs
' • .
1..:. - ••
1
de Soliman III. 289
les farisfaire '·ne croyant pas
qt1e l'Efl:at pufr re.Gfl:e1 at1x
nouveat1x a_ifauts qu'ils paroiffoient
prefrs d~ luy livrer,
& qui le replongefoient dans
le defordre , dont il n'efroit
pas encore tout à fàit forty. ll
ajoûta que ces deux Corps de
Milices, f~avoir les Janiffaires
& les Spal1is , avoient efré
excitez à faiïe cette detnandc
par deux Seduéteurs, d'o11t
cl1acu!l avGit gag11é tous ceu:ic
de leur Corps qu'ils connoiffoient
les l)lus obfti1.iez à den1eurer
·dans leur révolr:e; que
celuy qL1i con[eil:lait les J~t·
Bb
'
290 · Jli(loire ·
ni!faires , e!l:oic le mefme
_Fe!fagi· qüï avol.t refufé d'_al
·Iet à Babylone: que~c~ deux
Seditieux- s'~fl:o1ent rendus fi
redoutables en pe·u de temps,
.qu'ayant voulu ·fai~e arrefl:er
_Fetfagi, lbrs qu'il refu[a avec
des termes retJ.1plis -d'intoJ ence-,
d'alle·r commander les. Ja.
niffaires de Babylone , -il n.e
. s'eftoit trouvé per[onne qui
euft vo~ulu l'entrepren.Glre,. Le
. Vifir dit auffi au •G rand Sei- • gneur que celuy 9ui foule-
.voit le~ -~pal1is, & qL1'on
nomn;ioit Haggi Ali, el.tait
l'hon1111e du monde le1plus

' -
-
de Soliman: Ill. z9I
~-mportè , & le plus c,apa:
ble . d'oîer , tout. Le ' Sul_
μn q4i ne manque p~-s· d~
fermeté , & fur tout lors qu~jt~
.s.. . agit d'ttn a&e de jufrice ,.
,qrçlonna que ces deu:x. té-~1e.
r~ires fu..!fent é.tranglez. On
peut dire qu'ils eftoient dou~
.blen1ent feditieux, puis <tu' efranî
d~ja dn nombre des·
R.éyoltez, ils vouloie11t fe di ...
. ft.ingu~.r~ en rericl1eriJfant fL1r
·les autres ·dans la reclierche
de nouveaux m.oye11s qui açcablaifent
l'Etar. On cl1ercl1a ' \ . '
· ait.ffi- tofr cGs deux coupables
.pour ~xe~uter les o.tdres d11
· B b ij

Z9 2 H ij!oire
Grand Seigneur. On ne tro9.:
va que Fetfagi, & il ériroqva
le fort des Rebelles, qui peFi(
fent pref que tous dans le
moment de leur élevation.
Haggi-Ali ayant appris la
mort de fon Carrlarade, &
qu'il efl:oir: condamné par le
me(ine Arreft, fe mit en cllat
de n'et1 pas fouffrir l'execution
.. Il avoit toujours avec
luy·un ~!fez gra11d no1nbre de
'gens Liétermi11ez , qui s'ef-
. toicnt attachez à f:i perfonne,
& qu'il nommait fcs Amis,
Il ·les pri:i d' tmouvoir les Ja..
ni!faircs, & de les fair~ fou-•

de·Soliman III 293'
venir du ferment qu,ils venoient
de renouveller avec
les Spahis, Pour la caufe commune
, & pour la défenfe des
deux Corps. Comn1e il avoit
travaillé au renouvellement
de .cette union, il avoit aL1ffi
beaucoup d' An1is parmy les
Jani!faires , de forte qu'il obtint
d 'eux tout ce qu~il en
fouhaitoit, & les engagea d~ ·
travailler à la vangeance de
la mort de Fetfagi, commç à
uné ch.ofe qui les regardoir-..
Ils s'affemblerent da11s l'Hip~
podrome,& l'exemple ne pouvant
faire ouvrir les yeL1x à
Bb iij
Rift . ~
194- t otre J
ces Ré_vo~te~ dont l'aveu, ~
- glement avo1t quelque cll.o- .
fe d'extraordi11aire , il fe
trouva 11n Jar1i{faire ; no1nmé
A chmet Ag.a. , qui prit
la place de Fetfagi , & fè
n1it à la tefte des Muti11s. Ils
allerent d'abord piller la n1ai ..
fon "111 Tefterdar , prirent
tot1t l'argent qu'ils y troùverent,
& qui efioit defiiné
pour les frais de la gt1erre ,
& emporrerent iufqu·aux
portes & aux fenefires. Le
'buti~ les anima, ~ ils re[o.
lure.nt dans le mef1ne temps ·
d'aller exercer les mef1nes
·-
de Soli1nan Ill. 1-95
hofiilitez, & les mef mes bri~
gand-ages fer tous ceux qu'ils
croyoient du nombre. de
leurs en-nemis, ou plûtofb,
fur tou~ ceux qu'ils fuppofoient
l' eftre, afin d'avoir un
pretext~ P?ur piller. L' Ag~
Cles Jan1ffa1res efiant monrc
à cheval al,l l)remier bruit doeces
nouveat1x troubles , pour
tâcher de les gagner, & de les
faire rentrer dans leur devoir,
h1t maifacré par ces furieux.
Hlggi Ali luy donna le pre ..
mier coup de Sabre fur ·la reft~,
& ce coup .l'ayant fait·
to1nber·_, il fut m1~ en piec~
B b iiij
·~

'
~96 Hiftoire ·
en un moment. ,Ils allerent
cnft.1ite au Serrail du Grand
Vifir, dans le de!fein de luy
den1andet fa r.efte. Con1me il
s· eftoit douté ei1 voyant corn.
mencer J•"Orage, qu'il pourroit
fo11dre cl1ez luy , ce Miniftre
y çi.voit fair venir quelqt1es
gens ; qui ~uroirnt pu
défendre I' entrée de fon Pa-
. lais à des Trou ocs n1oins ànime'
es. Le Grai nd Tre1r orier,
le Capitan Pacl1a, & quelques
.Officiers· eftoient alors avec
• luy. L'attaque fut vigoureufe
, & la· défenfe ne fur pas
c1oindrc. On die n1éfme qtte
.

I
de Soliman Ill. 297
le Vifir tua beaucoup de Rebelles
avec des flèches , &
qu·aprés que fes gens, <J.UÎ
eflo1ent armez d~ môuf quetons
> .t11 eurent fait Ul1 fort
grand c~rnage, ce Minifire
·voya,nt que la poudre leur
n1anquoit, & que ces (urieux
fe preparoient à mettre le feu .
tians fon Serrail., refolut de
rendre le Sceau qu'ils luy
. avaient dernand.é, ce qui luy
fit appeller
1
le ~ufci qui eftoit
avec les Rev-0ltez , auquel il
le donna, en le priant d.e le
vouloir remettre entre les •
mains du Grand Seigneur,


298 Hi(tot~re
afin qt1e Sa Haute!fe cr~afi: un
autre Vifir, fi Elle le jugeoit
à prop.o-s .. Il fit deux fautes
conGderables en cerre ocèa.
fion; i·u11e, de J) 'avoir point
efié au Serrail, où fes Amis
luy avoienr· co11fe1llé de fe'
retirer ; & l'autre, d'avoir
rendu le Sceau dt l'Empire;
\car fi. roft que ceL1X qui i1e
fu1voient que [a fortune.: ou
~ qui apprehendoient fon pouvoir,
l'eurent veL1 dépoiiillé
de cette marque d'autorité,
& que les uns n' cfpererent
plus de récompenfes , non
plus que les autres ne craide
Soliman/Il. 29~
gnirent plt1s- de châtiment ,
ils l'abandon11erent> ai11fi qt1e
pluiieurs de fes pomef\:iques.
Le Treforier, '-& lç Capitan
PJcha trouverent moyen de
fe fauvet. Les Mutins l'appri•
rent, & leur fureL1r en devint
plus violente. Le Mufti ef,.
tant forry avec le. Sceau, ces
Rebelles .:entrerenr, quoy qut
SiJOllS eufi C!\.l que la ioutniffion
·_qt1'1l a voit eL1ë e11 fe
-Oépoüillant de la Charge de·
Vifir pour iles. fat isfaire, avoit
· dû les appai[er. Le d~fefpoir
le prit lors qu'il co11nut qL1'il
s'eftoit trompé; & comme il
300 . Hiftoire
cfi:oit veritablement brave, il
voulut vendre cherement fa
vie , de for te qu· on a!feure
qu'il y eut plus de deu:x ce11s
perfonnes·ruées,avmr-quc les
Rebelles fu!fcnt parvenus à
l 'apparrement dr.s Femmes.
Siaot1s fe voyant fans nul.le
efpera11ce '1e pouvoîr fe défc11dre
plus longtemps , tâ-
- cl1à de fe rLtÎrer par un e[ca-
-,lier dérobé; maie; Haggi Ali
·l'ayant apperceu , ce fur1et1x
le tua d't1n coup de pifrolet.
Son c~rps fut dépoüilié, &
jetté nt1d dans la court. Il$
craifi1erent fa Femme avec la •
• •
de.Soli.man Ill. 3ot
derniere cruauté, quo~ q1:1'elIe
leur eufl: donnt d•abord
rous les Joyaux qu'elle :ivoir.
Un de cesRcbcllcs ne pouva11t
luy arrather affez vifl:e un
Braifelet qui luy efioit demeuré,
& voulant empêcher
qu'un au.tre ne le pïevinfi:,
luy por ta un Côup qui .luy
coupa pre fque le bras Elle re.ccut
encore d'a utres blelfurcs
do11t elle mourut , & fon·
corps fuc trainé indi~nemenc
danr, les ruës. Voila quelle
fut là fin de la Fille & de la
S~ur des det1x Grands Vifirs
Cuprogli , qui ont tant tra~

'

302 Hifloire 1
vaillé pour la gloire--& pour
l,agrar1diifement de l'Empire.
Elle efioi t auffi Soeur du Cai- 1
macan Cuprogl1 , qtti avoit 1
agy fi utiletnfnt peu de tetnps
auparavant, pour empefcher
les troub!es qui pouvoient
agiter Conftanti11ople dans
le temps de la dépo!feffion
de Mal1cmet l V.
La Fille aifnée de Siaous ne
fut pas traitée avec plus d'l1umanité
que fa F.emme. Ils luy
déc hirerent les oreilles pour
avoir fes penclans, & la traînerent
comme ils avoiènt
fait fa ~\ere. Ils en emme-

de Soliman III 303
nerent tin~ plus jeu~e avec
.une Efc:la:ve ; & les donnerent
toutes deux; pour fix
.écus. ·Tout .ce qui e-ftoit da11s
la maifon fut pillé, mais avec ·
tant de fureur , que la r>lus
grande partie de- ce qu'ils
trouverent ftft rompu & mis
hors d'e~at de fervir jamais.
Ils fe répandirent en·[uite dans
tot1te la Ville comme des def_
ef perez , à qui -la rage d'avoir
fait des cri1nes énormes cnfai.t
encore faire de nouveat1x. Le
mal ne leur coûtoit plt1s rien,
parce qu~ils voyoient qu'~prés
ce qu'ils avoient fai~ >ils n'en
1
• •
..
304 Hiffoire
pouvoient efl:re ny plus ny
moins chafiiez. Il f~mb1oit
,que tout eftoit à leur dff pofition
dans Conftantinople ,,où
ils fe rendaient maiitres abf
ol us. Il n'yavoit au·cun ord re
qui pu fi arrefter leur inf olence
, & les Officiers les plus
hardis 11'~foie11t ~y con1Gattre
at1cune de leu rs entreprifesi
ny rétnoignér fet1lçn1ent,
qu'ils "auraient voulu s'y .op•
poi\ r. Ils maffi1croient , ils
pardon11oie11t , ils élcvoient,
ils dépo foi~:11t_ & ne r'iachant
eox n1e[mes qu ;~l cftoit leur
bt1 t, ils faif oient des Re cr le- °' )"
• • -

de S olirttan ir 11. 30 5
mens dotlt ils 11C f~ fauve- •
noient i1IL1s u11c l1eure a prés.
Ceux des Habirans qui aya11t
.cfié pillèI. fe voy.oienr da11s
u.11e extrê1ne indigence, fe
. . . '\ JOtgno1e11t a eux pour profiter
du pillag·e ~ & recoL1vrer
une partie de-cc qu'ils avoie11t
pe!"du , de forte que fi ce bri~
~andageeuftdL11é u.n peu plus
de temps, la .Viile at1roit cfré
enciereme11truinée. Un autre
malheur (ùivit ces detor.:lres.
Le feL1 prit à la Ma.if 011 dL1 Vifir
q\1' on venoii: de 111afldc-rer.
Cela 1ne do1111e occafion de
vous dire que quand le f eμ
Cc

'
'


306 Hijl-oire _
prend <lat)~, que-Ique .Maifon
de Confi:a11rinople, le Mai{Jre
'èfl: p~ndu en mefme tenips,
fans gu'il foit be[oin de Iu·y
· f;1ire ion Procfs-, parce qu'il
fe ttouve tOU·t fait par la·Loy,
qui porte qu'on-le punira de
~ort. Cette Loy eft faite afin
que cl1acUJ;l s'arrache à em ..
pefcher que !e fet1 ne prenne
en fan Logis , à cauf e que
routes les Maiforis efi:an-t de
bois , il ne prend jamais dans
un qunrtier, que prefql1e tout
le· quartier ne foit brt1lé. Celuy
qui prit à la Maifon de
Siaous ., càufa beaucdt1p de
dommage.
' "' '
'


de Solir11an Ill. 30 7
P e11dant que le defordre
~lloit fi avJnt qt1'il efioit impo.
flible de prévoir par. où
il 'pol1rroit finir, ïl arriv·a.unc
cl1ofe c1ui caufa un changement
fort confiderable :1 &
qui obligea ceux qui attaqu,
oient à Ie défe11clre. U.n
Etnir, ou Religieux T urc> du
no1nbre de ceux qui portent ·
le Turban vert, parce qu,ils
fe difent des Defcendans de
M~homet ~ paf[111t d è\ra11t
une Bou ti'lue ~ vit quarre Ja.ni!
faires qui Ja. pillaient. Le
Maiftre d.e cc: cre Bou. t.t tU-Ç
. . .. Cc lJ. •
• •

3q'8 Hijloire
avoit déja perdu beaucoup
-Oe chofes depL1is le comm
e11ce1net1t des defordrei.
Il fe l)laignit du tort qu'on
luy faifoit , & dit qu'il ferait
reduit à l'aumône ,
puis qu'-on vouloit enlever
ce qt1i -luy teftoit de bien. Il
parla d'une 111a.niere à don·
· ner de la pitié. L'Emir toucl1é
de cette .injt1fi:icè, porta
le M>Y.chand à fe défendre. Il
1' eri.courage.a,.&engag.ea quelques-
·u11s de fes voi{ins à vc ..
nir à fon fecours. Le bruie
-qu'ils .firent en attira d'autres.
Les Ja n.iilà1res fe -virent çon-

I
· de Soliman II!. 309
craints-d'abandonner, ce qu'i]~ -
avaient pris , & furent mef.
n1e attaqnez 4 viv~meflt qu'il
'Y en eut deux tuez. Tôut le
quartier s'â!fernbla~ Les qüartiers
voi-fins f.u i virent l 'ei·em.-
pie qu'on leur do11noic , · &
l'Em.ir voyaht vn grand nom ...
bre de Bourgeois dif po(ez â
. fecoüer· Ie· joug des Seditieux,
prit une pi~cze de_·t oile daltl ·
·une Boutique , d~environ
deux aulnes de long , &
l'ayaflt attachée au bout
d'unè pe~che en maniere d'Etendard,
il dit aux Bour .. i!
.a!feA'J.ble;i !tU~our -de Jμy,
> , 1
' •
'
310 H1ftoire
que tous les 'Veritables M uful·
mans euj]ênt à le fui'Vre au
Serrai!_, pour prier le Grnnd Seigneur
d' expofar l'~tendart d~
~al1o~et~ ·afin qu'.en le voyant
ils eu§ent plus de coûiage pour
exterminer ïes Re'Voltez.. On
' le fuivit, ~ quoy qu'il n·euG
fait· !'Etendart de toile qt1'il
portoi t qu'afin de fervir d~
guideaux Botrrgeois, & que
les plus éloignez le puffent
fui"Vre, ~eu-x qui vinrent les
derniers au bruit qu'ils a.
voient oüy fans ef\:rè infor ..
n9t au vray de ce qui fe paff
oit , -crurent de loi11 fur ce
de Soliman III. 3rr •
qu'on · nommoic confufé-
1nenc !'Etendart deMal1omer,
-que c' efioit veritablen1ent
-cet Etendart qu'ils voyoiçnt.
Cela les anima, & fit groffir
cette Troupe, de forte qu'é.tant
arrivez devant le Serrai!,
Solim~n en fut furpris , &
crùt qt1e les Rebelles ·venoient
pour attenter· fur fa
vie. Il en fut defabufé lors
que leurayant-fait demander
ce qu'ils vouloient , ils ré ..
pondirent, qu'ils e floient 'Venus
pour facrifier leurs 'Vies afin de
le rétablir dans fan autorité en
faifant punir fes e~nemis, &
'

-. :3-ri ,Hi(toire .
qu'ils demanëlaient qu'vn leur
fifr 'VQir l' Etendard de l~u_'f Prophete,
qui augme,nteroit lcttr côu'
r'A.g~ contre les Seditieux.S-aH~u-
, teîfe let1raccorda ce qu'ils demandoien
t. tl eftoit environ
.ri1idy , lots que !'Etendard
-fut èxp~ofé. 011 le fit publier
partotite.s lesruës,& en n1oi11s
de déüx heures , toutes le;S'
Places, & les courts. èlu .Serra
il· furent remplies <l'un
nombre infiny d·e peuple,
tant de là Ville que<les Fauxbourgs,
fans exception d'âge
ny 4-e c-0nditiqn·s , "parce qutt
la Loy · porte .que1 ceux qui
· _ manqiJent

J t
de Soliman 111. jt~
ma11quent à leur devoir en
cette occafion, font declarez
infidelles, de forte que cet1x
mef1nes qui ne f 011t pas en
efi:at de rendre ferv~ce par la
voye des ar111es , vien11ent
voir à qt1oy ils pouv.ent e~re
en1ployez. Tout ce peuplc,ou
plûtofr toute la Ville efrant
ai11fi afTe1nblée, un SJJeiek.e,
ou Predicatcur Turc, let1r de .. •
manda par trois fois d'une des
feneftres du Sèrra1l, S'ils eftoi.
ent conrens de leitr Ertiper~eetr
Soliman. Ils répo11direqt 01~y
autal'l t de fois avec des accla-
111ations de Vi'V~ Sultan, S:-1l-
D' d -

' • . •
31 4- 1-l ijf oire
tan Soliman , & que les RebeUe1
[oient détruits. L'ordre fut en
mefrne temps donné de le~
faifir vifs ou- morts,, On trancha
la tefte aux pre1niers
qu'on découvrit, mais on n'en
trouva que fort peu , parce
· qu'ils a·voient-eu le temps de
ft1ir, ott de fe cacher pendant
que le peuple sjaflembloit.
crainte, ou autrement, sefl:
oir mis dans· le Party des
Rebelles, & l'on rétablit en
fa place celuy qu' ôn avoitdé.. pofé aJ..1paravant. Le Grand
s~igneut eftant fatisfait du .
1
• ;.-•, '". l ~, f;t
àe S of.iman III. 315 ~~ i~:
..
· Peuple, & le y~ulant engagèr::,:. Ï
à ,ne point changer de fc.tnci-'~ • t
mens , fit publier la fuppreC.
fio~ des no1:1veaux impofls , -
ce qui fu.t receu avee de
grandes acclan1ations. Ou
trouva encore quelques-uns

de. ce.s Rebelles ·qui efioient
ca€hez él1ez des J ui:fs, & ehez
des Arineniens. Ort executa
les uns , & les autres furent
precipiçe~ dans la Mer .une
pierre au col, ainfi que ceux ,
qui les avoient rec~lez. Plu~
fieurs tâcherent de fauver leur
vie en· fe dêpoüillant de ce
qu'ils a voient pillé, & ils ne
: Dd ij
. ' .
1 LI u


316 H~(loire .
lailfercnt pas de la perdre.J11 y
~n eut .un qui donna quinze
mille écus, èe qui fut caufe
qu'on le init à la torture pour
tirer de luy ce qui luy reftoit.
Beaucou.p ~'Efclaves
Chrè.fl:ie11s [c fauverent pen.
dant ces grand's mouvcrn'i,115.
Plufiet1rs Officiers établis par
les Re:: belles furent malfacrez,
& Otl ne L'luva que ceux qui
n'aya11t eu nulle part à la ré ....
volte, . n'avaient accepté les
Charges dont les Mutins les
.
avo1en.t pourveus , qt1c pour
éviter leur fureur. On fe faifit
de plt1ficL1rs Ar1ne11iensJ qt1i

• •
·de Soliman III. 317
ayan.t pris des l1abi~s de Soldats,
s'efroient meilez· par1ny
eux pour profiter du pillage,·
& on en mit- bcauc9up d'aU"rres
·en prifonqu'on foupîio11-
. 11oic d:avoir pris ;e party des
Fâltieux. On publia tin pa·r ..
do11 general pour toits les ru-·
tres qL1i rapporteraient l'argent
q.u' on a voit volé cl1ez ·
'1e· Gr:.lnd V1fir , & t:hez le·
· Grand Treforier, & cet ex- - . .
pedie11t en fic recot1vrer la
plus grande partie.01111ublia
. auffi des défe11fes tres-rigots• 'j
r.eu[es <le ve~1dre du vin , & 1
de fumer d11. rabac, & plu-
'
• •
D d iij
• ,j
l
1
3l8 "i Hiftoire ·
fieurs Relations portent que
Soliman voulant voir fi fes
ordres efl:oient . bien cxecutez,
a voie efié .la n·uit dans
les rues de Conflantinople
accompagné de .fort peu de
fuite. . Ces tro. uble.s durerertt
trois jours, f~avoir le dernier
Février, & les dc:ux premiers
de Mars, & 1e quatriéme on
vit regner
1
.une fort.. grande
tranquillite · dans toute la
Ville. Les Janiffaires n'ayanç
plus d' Aga, un jeune homme
de vingt-fix- ans ·, qui avoit ,
ellé élevé Pagé du Grand
Se~gnet1r, paru~ avoirmalg~~

de J'o/iman 111. 3r9
fa jeunelfe, toutes les .qt1alitez
requifes pour cêtte_ ch.arge,
à laquelle il fut non1mé,
& Ifmaël, Vifir de Banque,
âgé de plus de foixante &dix
ans , & qui avait efté Nifangi
Bacha, fut aeclaré Grand._
Vifir. Il n'avait point alors
-d'autre employ. que de me~
tre la marque du Grand Sei ..
gneur , aux ordres qμi lu y.
c:froient envo,yez p1r le Grand
Vi.fir.
Les Vifirs de Banque font
ceux qui ont place au Divan
fur le liane du Grand Vifir, 8&
'dont ce premier Mibiftre
. Dd ii1j

320 Hi(loire
frend. les avis. If1naël avoit
to1:1jours affell:é beat1coup de
douceur & de modt>flie dans
fesaétions ,& mefme dans Ces
hab.ille1nens avant que d' efire l
fait Grand V1fir. Il allait da11s
les rt1ës {implement vefiu •
& don1101t fouve11t l'aumône J
at1x pauvres. -sQn âge &. la 1
f1111plicité avec laquell'c il vi .. 1
yoit, firent dire ql1'il ne pcf .. \
federoit pas longtemps la Charge de Grand VifirJ & que c'efloit t1n efprit borné qui n'e_11 pourrait [outenir le .poids. On avo1t dit la me[111e cho[e dt1 vieux Guprogli lors

de Soliman III. ~:zr
q~'on· le no~ma pour rem-
plir ce me[me pofte. Cependa11t
on fut tro1npé~ Bien
loin que les trefors du Serr~
il fuffe11r auffi grands que nous.ont dit cent Relations
. fabulcufes, le Grand Seigneur
avoit alors 1nangé par ava11ce
quatorze années de fcs D.o~
n1ainc-..s. CL1pro2li trouva
• .L 0
inoyen de faite V()Ïr que tous
ceux ~ qui ces Domaines
e(toie11t engagez , avoienc
malverfé , & les uns aya~
efié condam11ez avec juftice,
& 1-e,s at1tres pc:t1t.effre un
peu tr~p legerement _J ce Mi-






322 H~flolre
nifire fit~ bien qt1e le Grand
Seigneur demeura quitte. Il
trot1 va auffi un mqye11 ad mi.
rable de ·fe défaire d·es Janiffaires
& d es Spal11s rebélles.
Pour contenter les premiers,
il fit mourir les Chefs des
Spahis; & pour fatîsfaire les
Spahis , il leur facrifia ceux
des J anitfaires. Il recommen.
,ça fou vent _, ê{. tourna les
choies d'une maniere, que
ces deux c .orps luy efl:oient
toujours obligez. Aprés s'e•
fire ainfi défait des Chefs qui
eltoient .les ·plus .mutins , •l
vint aifément à bout de~ Sub-


· de Solir1tan 1II. ·323
alternes. Dés qu'on eut.-donné
à Ifmaël le Sceau de l'Em·
pire, il parut qu'il s' efl:oit déguifé,
cotnme f 011 t beaucoup
de ge11s, ijUÏ nt feroient pas
cl1.01fis pour certaines dig~icez
s'-ils s'cftoient bien fait •
connoiCtre. Il fit d'abord pendre
trente- deùx A rmeniens
qtti avoient acheté des har.:
des volée~, & tr_ois Boulang~
rs , dont le crime eitoit
<l'avoir vendu du pain qui
n'eftoit pas du poids qu'il
devoir eftre. On tint plL; .fi ~urs
fQis le Divan , pour chercher
les moyens d'empefcl1er que

I
~24. H~lloi",·e ·
des trouble: pareils l ceu.'1:qui
venoient d'arrivcr~ne puffent
à l'avenir defole·r l'Empire,
& pot1r voir J>ar. quelles
forces on pot1rroit venir à
bout de s'op•pofcr aux Cl1refiiens:
ÜJ1 y propt>[a d'en ..
voy~r le nouvel Aga des Ja-
. ni!Iàires en Ho11grie avec
.qμatre 1nille hommes de ·<ï:ette
Milice, autant de Spal1is,
& un pareil μombre d' Afiâtiqt1es,
& de traiter avec le
Kan de la Krimée, pour l'en4
gager à y joindre dix ~1ille
hon1mes des 1artares de Bud,
ziack & de Bialogrod ; aiin
• •

·de Soliman III. 3'Z s
à'éviter les révoltes par le
méla11ge des Tartafes , qui
feroient fup.erieurs en nombre
aux J ~niffaires , Spahis
& Afiatiques. Cela efioit
d'μne politique allez bien
imaginée, 1nais il n' eft pas
toujours aifé d'exccuter tout
ce qui fe propofe de bon &
d'utile dans 1es Confeils des
Souve1ains. Ifn1a~l fit recô1n- ,
inencer à tfavailler à l'ar1ne-
. 1nent Naval, & env~a dix
Galiotçs fur la tv1er No~re,,
pour y•a!furer le cotllm~rce,
& d'at1tres Ba{\imens pour
portçr ~des vivres & qu~lque~


• 1 ' )
-----~-·---~--

• •
-


• • •
32·6 Hij!otre •
Troupes à Negrepont, & en
Candie. Il fit auffi renforcer
la garde des Dardanelles.
T and!s qu'Ifmiël _ag1lfoit
ainfi , les Peuples à· qui il
avoit continué le pouvoir
d'exterminer le refi:e des Révoltez,
ne leur faifoient nul
quartier; ceux qui échape·
rent fe rendirent vers Sophie
au prés_ d'Y cghen Bac ha. Pen.
dant le~ huit ou dix jours
que dt.n:a cette pourfuire, &
da11s la journée que l'Eten4
dard dt Mahomet fut expo-
. fé , il y en eut quatre à cinq
·mille de ma!facrez. Tant de
. .

de Soliman III. 327
fang verfé ne fatisfit pas Ifmaël.
Il fit faire encore des
rechercl1es plus exaltes à
Confiantinople , à Scutaret,
& à Andrinopl~. On étrangla
par ·r on ordre tous ceux_
qui fure11t faifis , & prés de
trois cens teftes furent expo(
ées dans les places publiques.
Alors· fe voyant antieremen
·t hors d,état de craindre
que ceux qui pou voient
encore eflre. cacl1ez 11e s'af- .
femblatfent pour émouvoir 1
une nouvelle révolte , il fi·t
ce qui f e pratique rare1nent
~n Turquie, par la peur qu· on

• •
32& Hifooire
a d'exciter des foulevemens~
Il ordorina qu'on en fi.fr mourir
trois en ptiblic , & ' qu' 011
donn~fl: leù~s corps à roa11get
aux chiens, 1:-e qqi fut exect1-
té. Il n'en demeura pas là, &
fit èrranglç:r le Ki~ia--Bey ot1
Lieutenant gencral des T rou ..
pes, & plufieurs Serboulouks,
ou C~efs des Spahi~ . ~oy
qu'il fuifenr Cl1efs des revoltez
ils ne l'avoient pas ér~
de la revoli:e,, mais ils a voient
mis toute leur adreflè à-[e con~
'
ferver la vie dan~ le pas gli[..
fant & dangereux où ils s'efl:
oienr veus. Ils · l'auraient


• •
1
• •
de So/i,nan III. ... " ('f ;)-/·
p>erdL1ë. fur l'heure en s'opofant
trop fortement· à l:;i. fureur
des· mutins, & ils ne pou-- .
vo•ie nt m_anquer d'"e cre eI lranglez
par les ordres d~ Gra11d
Seigneur en ne s'y oppofa11t:
pas. Leur adreife les avoittirez
· d'affaire·, i11ais ils a~oient

àu bief1:·, & If n1ael qui ef\:oit
avare, cruel & ambitieux, ne
pouvant mai11tenir fon autorité,
qu'en trouvant de l'argent
, ne manqua pas de pretextes'
oour les faire étranl
gler afin àe co11 fifquer tous
leurs biens. Plufieurs autres
qui n'efi.oient l.?as p·rus cou-
E:. e


1

3;0 H ijloire
pables qu'eux furent traitez
cle la méme· force. Entre tous
céux qu .. il fit perir; .le 'Kiaia.
Bey eftoit celuy qu·it appt:ehendoi~
le plus, & qu'il eftoit
plus difficile de perdre. Il
avoit des ·Amis, & du merite,
& Ifmael. n'ofant l'attaquer
• ouverterr1ent , commen'ia par
le noircir dans l'efprit du
·Grand Seigneur·, &. fit enfin
croire au Snltan qt1'il efi:oit
dangereux: pour le bien de
l'Empire, de le laiffer vivre,
de forte que Sa Hat1teffe prononça
l'Arrefi de fa mort.
lfmaël trouva encore d·aucres


• • • •
;<:
'
. •
de Soliman III. .
33f.
décours pour le faire executer
feurement; il le .6~ appel ...
Ier au Confeil, où. fe erouverent
le Mufti, & les de.ux KadilefKcrs.
Jl luy dit avec des
.paroles & des inanieres obligeantes,
que le Grand Seigneur
.connoyfant de quoy i.l eftoit caeable
) le 'l.Jouloit recompenfer felon
fan merite ,qu, il l' a'l.Joit nor11-
mé Bacha de Burfe .' & qr-t'il
pauvoit en ~!Ler remercier Stt
H11-utejfe.Au~to~ un ChaoL1x ·
qui avoit ordre .de le co11.duire_,
le 1nena aû -Serrail po1.:1r
baifer la V c{l;e du St1l t.l ll fe .. .
Ion la. coutume. L-e BoLt-at1·ça;-iT
E ~ i j ·
, •


3 32 Hijl:oire · .
·Bacl1i le fi't rpontei: dans un·
. Caïqt1~ ; .& l'-ayant conèiuit
par le 1coflé
/
de la Ma-ri_ne le
fit auffirofi ·e·tra11gler ,par des
Capigis. On jettâ, ~n mefme
· te~ps dans Ia Mer .l~s plus
111utins des Lerventi, qt1i penidant
les defordtes- s'eftoi.ent
ifoul~vez contre le CapitaB
Pacha. Ce r-rait fut trouvé
·f@r,c l1ardy po~r .un .l1ommt
<JUÎ ri' av0it efté nom~1é
· Grand Vifit qu
1
aG · que par ,
inter:zm , ,& qui devoir ~f:l:re
m01. ns acc.o u" tume' , au ir ang
' ' . . . iqu ua autre , '11 ayan-r Jatnats
.dl:k ·,,à la ·guerre_, ny mef1ne

'

'11 •

de Soliman III. 333
eu aucun cornmandernencMilitaire,
& qu'on av.oit feule1nent
regardé com1ne un
homme fage & moderé , &.
non comn1e un violent ambitieux~
& un cruel politique.
Ce co1nmencement bt juger
d.e ce qt1,Ifmaël efioit capable·
de faire, & ceux qui ri~ét'oient
pas plus coblpables qt1e oes- •
mal-h-~ureu[es viéèimes de
l'ambition de ce premier Miniftre
, mais qu'on pouvait
faire trouver tels en n'exan1i.
nant .pas à fond les -crimes
dont ils 1~revoyoie11t qu'on
les voudroît accu.fer·, (e reti·
-

. 334- Hi(loire
rerent vers Îe Bach a Of man
Yeghcn,de forte que les Trou•
pes de ce Bacha ne fe trouve ..
rgnt pas feulement augmentées
par de fimples Soldats,
.mais encore ear un nombre
confiderable Cie perfonnes affez
diCl1ngtlées, & qui a voient
quelque bien. Les Soldats
qui av oient été aifez heureux
pour éviter la cruaut~ cl'Ifmaël,
fe joignirent enfemble,
. & demanderent inftatninent,
& mên\e d'une maniere tumultueufe,
à Yeghen de vanger
le fan~ de leursCamarades .
. Y eghen qui ne chercl1oit qu'à
- '
'
de Soliman JII. 335
s'acquerir l'amitié des Troupes,
fut"ravy d'en avoir trC?U·
vé cette occafion. Il écrivit
auffi-toft au Grand Vifir. Ifmaël
& luy manda, ~dans
l'état où les ~efordres paf{e'{ a'
JJOient mis l'Empire , i(" avoit
befoin de defênfeurs; qu'il fça~
oit bien que tous les rebelles
meritoient la mort ~ mais qu'il
eftoit de la politique de leur
par~~nn.er , ~uifque fi o.n les ex ..
termznozt tous , leur perte pourroit
entrainer celle del' Etat, &
q"e puifqu'ils témoignoient étre
pre{ls de Jacrifi.er leur.s 1Uies pour
fa dejenfe, il étoit beaucoup plus

I


• .. ••
336 H iftoi1·e · · ·
à· ·propos .d.e lr:ur j aire gr ace , que
de les reduire au defeJPoir .I.f1naël
trop ren:pl y de fa nouvelle
grandeur~ .regarda ce-s Lettrts
.avec u11c ind1ffere11ce qui alla
jufqu'au~épris, & n'y eut
aucun égaird. Yegl1e11 dont
la fierté furpaffe tout ce qu· on
s" en peut imaginer~ rencherit
fur celle du Vi.fir , & Juy
· manda avec une ha·ureur di-
, .gne de fon cara&ere, qu'il a•
rvoit cru qu"' il .n· ig,noroit pas qù• il
prenoit _(ous fa proteffion .f es
Soldats dont il Luy a'tloit écrit)&
qu'il le priait ile s'en fauvenir.
Cette Lettre fur.p. rit Ifmaë1, •
&
1 •


de Soliman Ill. 337
~f~s p~rtic~~iers Am~s vouta
·nt Iuy f-a1te conno1ftre la
faute qu'il avoit faite ,. llty
dirent,. qu'il eftoi-t à craindre:
qu'Yèghen ne 'Virtft à ~onjf-anti-·
nople aV,ec fan Àrmee; qu'on
n, arvo-it' point· de forces 4 luy ppp
·ofar; que~ le refit: .dis Reb'e!lt:J'
qui effoit difpeift prend:oit farr
far01; que l'e peuple eftoit abattl-
; que les creatures de Mahvmet
lV, & de _A{uft11pha fam
fils fa j~i»dr(')ient ~Luy,@! ·qu'il1
foro·it maiftre de remèttre le Pere
fl;r le T rofoe, ou d'y éle'Uer le
Pils. Ifmaël ~ut épouvanté,,
& ~it bien· que _celuy 'lui
. - Ff

0 r te o ie 81:11 u a
33 8 H ijloire '
avoit fi bien réüffi dans le
deffein qu'il a voit eu de faire
perir l~ Grand Vifir Soliman.,
pourrait d'autant plus facilement
le perdre, qu·il n'avoit J
pas e11core eu le temps de fe
faire des Creatures , de~uis
qu'il efioit monté à la mefme J
dignité. Dans cette penfée
rien ne luy fic tant de peur .
que la venuë d Y eghen, & j
pour l' en1 pefcl1er , il fit connoiftre
au Grand Seig11eur,Ia
necefficé qu'il y avoit que j
pour le bien de l'E1npire il
donnafi: des ordres preffans à J
Y eghen , pour. le faire mar ..
• 1
de S of iman Ill. 339
cher ince~mtnent vers Belgrade,
& f uivant la maniere
des Turcs qui ne manquent
ja111ais de fe déguifer felon
la neceffité de leurs. affaires ,
& ·d'efl:re aufli fo.ûn1is & auf..
fi flateurs qùand ils ont be ...
foin de quelqu'un, ou q~'ils
le craignent, qu'ils font infolens
quand ils [e voyent en
état d'impofer des loix ·, il
envoya les ordres d11 Grand
Sèigneur à Y egl1en, auquel il·
écriv.it e11 mefme temps,.
croyant l' éblot1ïr avec de belies
paroles , ~~ corrtme ltt:y
Ytghen, avoit toûjours cherché
F f ij
?·4'o Hifiolte · ·.
â faire oonne.ifore depuis-l-e mau~;
't-l·ais fuce-ês des ajfàir;e t _de l:f on•
g,rie que toutes fas démarebes a'
1Joient p'our but le bien. de l'f:.m•
pire~ il eftoi.t perfu~dé q·u:i/ n~
manqueroi't pas _dte rn~ner fas
Troupes dμ ciJjl~'_ ~e .. Belg,r4d~
aufJi-toff_ qu'il auroit reçu les
ordres du Gra-ad Seigneur qt:e'it
[,uy en11;,oyait ; puifqu'il a'Vôif
trop de lumitres peur ne pas '"f!Oi~
que l~ falut de l'Etat dépendoit
àe cette marchë ; que tout z~
·rpon.de fçaf'f::roit qu'il n' iivoit
t..ra'Vaille jt{qtre-là , que po.ur
· a"t}oir la gloire d'-eftrë· /e flbeJ
. rateu_r de J' Empi:re & que s'il

20 ht"'r 0 :Je LtU c1
de Soliman 111. 341
"'-o'beijfoii J .~ H4ute({è , c' é~
toit {ln tit1e qui 1Jt! ~fu y p-ourroit
if.ire difp~.té.. l[mqël à qltli
c_eux de fes; Amis qui comnoilf
oient p.arri.calierement
Y eghen , .av oient donné de
fortes impreffions de f es _n-ia ..
.nieres hautaines & e·mportée:.s,
& de fon obfti~tion invincible~
craignant de n~ pas
r.éuffir dans le dc!fein· qu'il
av oie de ·l' élo~gner dre Ccnftantinople,
c11gag~a le Gran;d
Seigneur à luy écrire de fa
-main, pour le confirmer non
fet1lement dans la Charge de
Seraskier del' Armée de Hoâ=
. F f iij .
'


:342 . H!J!oire
grie , qu'il- n'avoit que par
provifion, mais. encore dans
le Bachal1k d' Alep , & pour
J_uy continuer la permiffion
· de faire arborer 1es ~ 1-rois
· queuës de cheval. Il luy envoya
toutes les expedîtions
nece!faires par le Janiffaire
Aga, ipctt le Selilt:ar, & par
quelques autres Officiers qui
luy porterent' le Caftan de
drap d'or fourré de Martes
Zibelines, & qui eurent ordre
de luy témoj·gner que le
· Sultan @! le <jrand Vi(ir t·
· ftoient fort fatisfaits de [es (er~
~ice;, & que la ;oye avvait epé
de Soliman III. 343
· uni'Verfell~ parmy tlJutes les
Troupes, lors qu'elles a'Voient
lfppri$ que le Gr.-tnd Sei~ur
luy a'Voit donné le commandement
de [es Armées. Ce procedé
d'Ifmaël parcoit d'une
grande politiqne, mais comme
Couvent c'efi: n~en point
.avoir que. d·e11 avoir trop, &
qu'on découvre par là ce qu··
on veut cacher , tant d'offres
ébloü ilfantes firent connoifire
à Yeghen ce que penfoit
Ifmaël, & tout ce qu"il
efi:oit · capable d_e mediter
cbnrre luy .. Il ne douta point
. qu'il ne le craignift , puis
F f iiij
'


1
344 Hijloire 1
que les ie~re.s paÏ lefquelles 1
il avoit men~cé ce premiçr \
.Minifrre ce qui dans un I
temps luy auroiit couté la 1
. yie , le faifoi.ent combler l
d'h.onneurs, & e~\ent eau Cc 1
qt1' on cl'terch?i~ à augmen- J
ter fon autor1te. Ce Bacha 1
plus hardri , plus pénegap,t, l
& plus poli~iqu~ qu'Ifmaël, 1
voulut profiter del' occafion; 1
ainfi au lieu de marcher fui- l
vant les. orQ.res qu'i,l avoiit ,rè~etls 1 i~. écrivit ~u Grand ..V 1fir, qu zl ne pou'Vott ·accepter le commandement de /'.Armée ck -flongrie , fi le Gr4nd Jei!Jleur
_ de Soliman III. 345
',~e luy acçcorJqit te_ n.om.br~.de
,Troupes, @J le.s, (tutr:es fecotJ..rS
qu'il jùgeoit nece/Jaires foj'\Jant
le pr~jet qu'il Zuy envoyait ;
~ qu"il a'Uoit be[oi'! de.dou~e m~lle
'.Zains clJoî.fis , de cinq mille Timariots
·d'Europe , de di.'tC rni.Ue
Janijfaires _, tk jix mille.Sp4bi!,
de milla,Topigis, & d'autant de
G•ebegi5 .. de trente pieces de Canon,
& de cinq cens mille écu!.
l Com:me il n~y a point d·b01nme
plus adr0it qu~ luy ponr
faire faire des levées·, foit d~
.Soldats ,foit d'argent, & qu•il
avoit' tiré tro.is millio11s de.s
~çontributions de , Romelie,


346 ,. - Hiftoire '
& deux Piall:res par tcfie de
tous les Chrefiiens & de
tous les j ùifs qui efl:oient à
Theffalonique, fa Lettre par"
· toit encore , que pour faire
'Voir qu'il n' arvoit agy que pouf
le bien Je l'Empire, if emtloyeroit
les contributions qu'il a,'lJôÎt
levées pour fa "défenfe, @J que
c''eftoit par cette raifan qu'il nf
Jemandoit qu_e cinq cenJ mille
icus. II màrquoit auffi ,
'lu:' avec ces fonzmes ,·les Troupe~
qu'il demandoit , douz.e mille
Tartares , & tr·ois mille Hongrois
Mecon tens ~ .. ii dev~ient le
juindre 1t Bc.lg,radc, il pourrait
arrefttr les progrés des lmpea
Je Soliman Ill. 347
·1riaux ., fatiguer leurs Tr"'upes ,
facourir 1es Places les plus e.~o•
seEs, mais qu"il ne Je haz.arderoit
pas 4 les combattre qu'il
n·eufldes a'Vantages'fur eux 'lui
'f f1Jent Luy fair~ rfeerer de les
'1.Jarncre, ~ cau(t- Ju peril qu'il
y a'Voit d'expoflrdes Milir:es r.e.
butées à des Ennemis puijfans, à
qui Je ccntinuelles 'Vifloires a'
Uoient infpiré une intrepidité
qni les rendoit prefque t-0Ûjours
.feurs de 'Vaincre La m·efme
.Lert:e contenoit encore, que
lors qu'un qeneral d' .Arm[c n' 4
pas le pou-voir d'a .'. l;ir falon qu,il
le jage necelfnir~ ~ des interefls
c
1
; a , . 1 ·3-4 B Ht.JvOtre 1
partic.afiers font fouiv_ent q~e \
ceux qui font commis pour mo• \
derer: fan aut-0rité, facriftent ~ 1
gloire de l'Etat, p.our empejèl1er \
ceux qu'ils n' aim:ent ptté ·d' eJ'J 1
. ac~u,erir, & que le mau1!ais \
fucces -des Campagnes dernierer
ne pou'lJoiJ eftre attribué qu'a.-u
. de faut d'autorité des Chefs, qui
ejfoit balancée par celle des Vi.
Jirs de Banque , & qu'il deman~
doi.t qu'il n'efJ reftafl aucun dans
[ofJ Anmée, mais feulement de1s
Bachas .qu'il auroit foin de choijir
a1Jec les qua.lite:{_ necejfaires
poffr fervir utilement , fi on
luy laijfoit Je foin des ajfai-_
e --·~--
de Soliman Ill. 349
rM de _f.a Ca,rrlpagne proch'aine.
Cet·tè Lettre don,n :l héao~
~oup de chagrin à lfmaël Il
vit bien qu-e .d'une maniere·
ou d'autr~ , il avoit tout ài
ci:aindre d'Yeghen , qui ·ne
m-a11queroi't pas d1e le faire la
v1ll:ime de fon ambition s'il
veno1t à Confiantinoplc , &
d'afpirer à la dignité d·e.
Grand Vifir , qu'il feroit
çn cfi:~t d'obtenir de force·
ou de gré , s'il ren1portoit
dtt gratid·s avanrage5 a ...
vec les fe , ou-rs qui luy feroient
envoyez. Cc Vifir
fit reflexion fur toutes ce>
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
~-----
350 Hiftoire ..
chofes , & f e , de termina en.
fin à éloigner,le peril le plus
pre.lfant , fe. re.fervant de refver
plus à loifir aux moyens
de rabattre le courage d'Yeghen
, & d~ prendre d·es mef
ures pour le perdre , quoy
qu'il .fufi: alors contraint de
travailler à [on êle·1ation , en
Iuy envoyant malgré luy toùc
ce qu'il luy detnandoit. Il fit
pour cela partir les Spahis,
vingt., quatre Chambres de
Janilfair es qui fai[oient environ
cinq 1nille hommes , &
trois cens mille écus, Fromet·
tant d'envoyeL le refte dans
1
de Soliman Ill. 351
peu de temps. Ces Troupes
ne furent pas fi-tofr en chemin
~ qu'If maël fe repentit
de les avoir envoyées. Il crut
qu'il fot1rni.lfoit à fon En~my
des forces qui retourneroient
un jour contre luy,
& qu'il devoit plutofr rifquei·
la perte de l'Etat , que celle
de fa fortune. C'efl:oit bazar;
der des deux cofl:ez. Il y avoit
~ craindre que le Grand
Seigneur & le Diva11 ne s'ap ..
pcrceu!fent qu'il preferoit fes
interefrs à ceux de l'Empire,
& il eftQit dangereux d'agir
o_uverrement contre Yeghen.._

~5 z· H iftot're ,
.. €es·diftërente-s raifons o:&lige-
. rent ·1f maël à cl1ercher -divers
pr~texres poûr empé~her que
les Troupos11,avarr'ia.ffent~. Ce
_. n'eftoit pas 'une ëh·ofé aifée
'lue d-e tromper Yeg.hen. Il
avoit l'efprit encore plus pe.
n~ti:ant & u11e plus _fine p0li-
- tiqu-e qtre .ne l'avoit 1fmaël.
toin de faire auçune plainte
du retardei-nent des Troupes,
il feignit· de n'y pas faire
de reflexio11 .. & d é.pefaha fon
K1aia pour leqt1el il demanda
l~ B:lchaliK âce Cara1nanie,, &
l'envo~a pot1r elî rrecevoit
- l"'i11vefiiture.ll ft plaignit Çe
011 ~, ;t •odeCulura
de Soliman: III. 35~
~Zeinal~ Ba.ch:ad'Albanie, qui
.s·eftoit 'oppofé ~aux coruribu ~
-t·~ons qu'il av..oit 'tirkes, & q.~i
ra~oit "taiillé~en pieces, un parco/
ile -tro~s· cens' Cheva~x qu'iJ
:onv.0y,oit pour les. I~vcr. If.
maiil .qui lcher.choit ·à l' éblGü1t
·r pa.:r è:le .. fau1fes apparenc:
es..., Jf u t 1 ravy de, ·1 u )' .pouvoir
faiire un furifice, dont il n'a<
voitüien à iapprethôn.der , puis
qu~il ne ,le tendoit p~s plus
furtp Ail'lfi. quoy qt1e Zeinal'
ceifufi: p.oitit .:eoqp-able , il le
& d~capite.t puhlique1nent
·dans la' Co,ur _du Seirail -Ole-
vant , la porte du Divan.
. Gg
Q 1iJ ~n r lst~r o de Cul~u·a

j5+ Hiftoire ·
Les Amis de ce n1all1eureux
9ui en a voit de confiderables,
n·.ay.ant pu obtenir que i·exe-
cution fe fi.fr du mo~ns en •
fecret ., con1.n1encerent à tra ..
vailler f-ourdement à la perte
J•Ifmaël. Cette mort.acheva
de perf uader à Y.eghen· rque
le Gra.n·cl Vifi( i'apprebendant,
efroit hors d'efiat,de luy
~efu[c:r aucune chof. e. Dans
«tte ·penfée il ferefolut-à luy
écrire .avec ·plus <le fierté
~u"~t1paravant, & :à lllY de ..
:man·der l' .Eteodart de Maho-·
met., .alleguarnt que les Tr-0upes
itri!JUru.oient les Chrefliens Ji redauJe
Soliman III. · 35S
lahks aprés a'Voir eflé battuê·s
tant de fais , qu'il ny a'Voit
que ce faul moyen qui puft les
foire marcher & ranimer un peu
leur courage. Souvent lors que
· l'on peut tout , il eft dangereux
de tout vouloir. La temerité
d'Y eghen fit revo1ter
contre luy le Mufti, les Viftrs
de Banqt1e , les Cadilet:
Kers , & tous ceux qui com ...
pofent le · Divan. Ils trouve..
rent que c'eftoit porter l'info-
· lence jufqu'au plus haut
point , &. reprefenterent~ au
Grand Seigneur t:JU' on tle"'
Voit tout craindre de ce Bar:ha.
Gg ij
1
~ -~-~
'
3 s 6 H iftoi·re
fi a'Uec les forces qu'il a~oit , i.1
.obtenoit·encore /'Etendart, qui nç
de'Uoit jamais fartir qu· a'UecJles
Sultans ou a'Uec leurs p;·emiers
Miniftre s ~ ce qui n' arri'Uoit que
Jans t'n befo.in extrémt J /'égard
de ces derniers. Ils Cl.joû,terent
qu'Teghf1i ayant ['Etendart ele
ll1ahomet en fa puifance , pou~
Pit fous pretexte âe Religion,
· attirer tous Les Mufolmans, qui
.e ftant eblige~.. p~r Leur Loy à
fuirure cet Etendart~auroient li.eu
â at,ir contre le Sultan fans pa fer
pour criminels, ne de'Uant a'Uoir
en 'V,euê que /,,Etendart , fans
ejlre oblige~ à da11ant~ze. Yeg-
'

· de Soliman III. 357
ben qui croyoit poulfer à
}:>out fon Ennemy l'avoit
mis hors d'affaires par fa demande.
Tout le .Divan en
condamnant fa temcrité, n'a.
voit regardé que fes manieres
hautaines & hardies qui fembloient
contraire~ au. bien de
l'Efiat, & n'avoit en aucl;lne
forte confideré les interefts
d'Ifrnael. Ce Miniftre ne laif- ·
fa Eas d'agir fous main- dans
la fuite, .&. d'1employer fes
Amis , qui travaillerent à
cmpoifonner auprés de Sa
· Hauceffe & du Divan, déja
-aigris contre luy , la dee
;- 53 H;1ny,.,o t.r e _
mande temeraire d'Yeghen-;
<le -forte qu,il .fut refolu de
le declater rebelle. Son Kiaia
fut arrefté , & on_ dépe·fcha
dîvers Officiers à 1, Armée
avec des or.dres adreifez aux
Troupes qui portoient défenfes
de luy obeïr , & de
·luy fourni.r aucun fecours.
Le ~rand ,Seigneur envoya
fecrettement un Capigi ,avec
.ordre de demander fa tefl:e,
mais ·de ne declarer fa Comm1OEon
, que fui van~ la dif-
, ·pofition qu;il ttouveroit à
po1.1voir obtenir ce qu'il demandoit,
afinde ne pascom:
'
de Soliman Ill. 359
mettre fon auth{)rité. Voicy
ce qui fe palf.a lors que leKiaia
d'Yeghen fut arrefté~ Oa
luydit·en6.n deconnoiftte. pat
la maniere dont il recevroit
la propofic1on que l'onavoit à
luy faire s'il i:roy oit f on Mai~
.frre alfez R.ui:ifant pour {ouftemr
fes intetells contr,e le
Sultan, qu'on a voit ebangé
.d'avis & qu'au lieu du Gouvernement
dont il avoit efté
pourveu , :on iuy donnoit
celuy de Bof nie. Il ref pondit
.avec une hau-reur inf~
lente, que ccn'eftoitpas· l'intentio11
<l'Y eghen. L~ Grand
,

360 HiHoire
Vifir fa11s le.faire arreit.ar lu~
dit d'une maniere honnefi..e
qu'il alloit informor le Grand
6ej g11eur·c lu>re fus ·(jU1i l-fa.ifo k.
_du GouvernEmenc qu1'il luy
offrait, afin de fçavoi~ f es der.
nier.es. Y.oloptez là .... deffus,
& 'qu1il ,n'av.0it qμi~, ffatton.
dre. · Le- Xiaia· au:- iiu:u de
'deme.uror au Serail dμ grand
Vifir ,. en fortit prctqtiauffitofl:
que, .ce- Minifu:.e. rLe
·grarul 1 ,y,~fir 1fat , ax.rrémet~
ment furpris à fo11 reoo\i!r 1d~
ne le pas trouver , 11 le fit
chercher , & ordonμa mef.
me qu:on . forma·ft les· p.ortes.
de
de Soliman Ill. 36t
de la ·V 111-e. On alla cl1ez ce
Kiaia fans croire qu'il y feroit;
on l'y trouva fort tranquille
, & qui fe tenoit en
feureté fous la proteéèion
d'Yeghen ; il écrivoit à ce
Bacha tout le détail de ce qui
s'efl:oit pa!fé, & décrioit extrémement
la conduite du
Grand Vifir , & mefme
d'une maniere tres - in.iolen~
te. On prit cette Lettre qui
cfroit déja fort longue, &
on s ,affura de fa perfonne.
Pendant ce temps, Yegl1en
dif pof oit des Charges de
l' Arn1ée, & faifoit pe11dre
Hh
- • ~
36 2 . Hiftoire t
ceux qui luy defobeï!foient~ ·
Peu de jours aprés , le bruit
fe répandit qu· on verrait
. bien-tofi: les effets de fes clef.
feins, & qu·11 marchoit vers
Conftantinople. L'alarme y
fut grande) &. comme I[maël
cft9itceluy qui apprel1endoit
le plus , il envoya des ordres
tres-preffans aux Janiffaires ,,
qui devoient aller joi11dre
Yeghen, de s'arrefter à An ..
drinople, & de luy di[puter
le paffage. 011 en fit marcher
au{Ii vers Gallipoli , & vers
quelques autres lieux où l'on
~nvoya du Cano11. Cependant
--·
de Soliman III. 3<$3
le GraQd Seigneur qui ne défere
pas entierement aux avis_
rle [es Miniil:res , comme
beauc<;>up de Sultans ont fait,
mais qui Ce plaifant à écouter
pour apprendr.e les cnofes
dont fa lpngne ·prifon a em ..
pefché qu·i_l ne fuel: infirutt,
·rai[onne à fo11d fur les divers
partis qu·il peur prendre, fuivarit
les diverfes conjo11aures
, ne jugea pas à propos de
s'arrefier tout à fait à l'avis
<lu Grand Vifir. Il voulut
qt1e l'on fe fervift d'abord .
de la voye del1 douceur pour
faire revenir Y eghen , mais
Hh ij
364- Hi/foire
fans quson ·Ceflàft pour~ant de
fe prep_ar·er , de peur de fur- .
prife , à le repou!f er par la
force. Dans ce deffein il fit
'dépefcJ1er un Tartare à Y-egh
·en . po11r luy porter un co1nma11den1ent
de parrir-auJlirofl:
RP'!r fe rendre à Te1nef war
av~c ·a!Teural}c~ q·q'il lL1y par- .
donnerait fa r-ebellion s'il • •
· eb~Yffoit, & con1me il a voit
auparavant envoy~ àcfü;.nder
fa tefl:-e, ce··q·ui poL1vo_it l>. empe[
cl1er de [e foun1errre, on
recommandà à ce Tartare de
farre toute la diligence poffible
, afi11 qu'il : pufr/ arriver ,
.:010 M 3®' o '.le Cul ua
de · Soliman III. 36)
avant ceux qui portoient ces · premiers ordres. Le . Grand
Vifir qui de fon cofl:é n'ou ..
blioit rien pot1r fe .mainte~ir,
ne doutant point qu'on n'é ...
vitaft plus aifémenc le peril 1
lors qu'on n'eitoit point e 11-
fermé dans une Ville, fe pre-·
para à partir avec l'Etendart ·
de Mahomet , fi-toft qu'il
apre11droit qu· i eghcp [eroit
ei1 chemin pour s'avancer
vers Co11fl:antinople. Soliman
, Vifir de Banque , fut
déclaré SerafK ier des T roupes
qt1i dcvoient l'acco111pagner
, & Haffan Bacl1a,a11cien
Hh iij
0 Min er o e ' Jtu
1
l
~66 _ Hi(foire ·
Officier du Gra11d Vifir Cu.: j
Erogli , auffi V_ifir de Banque,
fut fait Seraskier deHongrie. j
On apprit en ce temps-là que
le~ J~nj{faires qui efioient de-· j
meurez à Belgrade avoient
commencé à fe fou lever. Ii-s
efioie11t cl1agri11s du pèu· de j
fçin qtl'oo prenait de . les
payer, tandis -que ceux quiavoient
efié à Confrantinople j
~yoic11t touché tout ce ·qui
lo.ur etl:oi t <lil J & fait· u11 pro·· fit confiderable pendant 1es
defordres. Ce nouverlu tumulte
obligea le Grand Vifii; à chercl1er de l'arge11t de
o 1 t 10 d Cul u a
de Soliman III. 367
routes parts~ & comme dans
une pareille pre~ipitation, il
eft aifé de s'enrichir ·rans que
·ces fOftes c.\e malverfationli
puiffeQ~ . eftre découvertes>
If n1aël eftant naturellement
\ avare ,"" travaîlla aufli à fatisfaire
rla paffion qui le t.~~~
mentoit d'avoir du bien.
Outre les moyens qu'il trou ..
va d'abord de tirer- de !•argent
pour les affaire5 qui preC.
foient le .plt1s , il refolut de
.taxer les 'Timariots , à pro ...
portion des revenus dont ils
joüiffoient ., en forte que la
taxe qu'on le) ob liger'.oit de
H.h iiij
n 10 d .1 L r l
1
1
1
1

,

368 ' Hiftoire j
. payer les exempteroit du fer:
vice qu"ils font obligez de j
rendre; mais co1nme il falloit
du temps pour lever cet argent,
& que la neceffité d'en j
avoir prelfoit , le Grand Sei ..
gneur C"nvoya quanrité de j
Vafes d'or, & d'a11rres Pieces
tirées du Serrail}pour les fon- j
dre & en ·battre de la Monnoye
, ainfi que quantité de
poignées de fabres & de bri- j
des peur vendre les pierreries,
dont elles efl:oient ornées.
Il y avoit auffi t1ne grande
partie de la Vaiifelle des Sul_
tanes, & des Pierreries des ·-· - . -
· de Soliman, III. 369
Femn1es de Nlabo1net IV~
Ifn1aël envifageoit déja tou.
tes ces ricl1effes comme des ·
chofes fur lef quelles il devoi~
avoir de grandes pretentions;
lors que la fo.rtt1he cam1nen~
a à luy faire voir les ordi- ·
naires effets de f on inconftance.
L -i forte refolutioii
qu'il avait pri[e de détruire j
le party d"Yeghen , fit connoiftre
qu'il penfoit plûtoft
à perdr.e fan ennemy, qu'à
rétablir les affaires de l'Empire)
puis qu'il eft in1poffible
d'en v:nir à bout dans
aucun Etat,tant qu'a11 y lailfc;
'
370 ·Hiftoire ·
:rcgner des guefres c\xiles, & J
que. ceux qui le devroien~
défendre , -l'affoibli!fent en J
fe déchirant les uns les autres.
Çela porta le Mufti> les Gens
d·e la Loy, & ceux du Ser rail j
<JUÏ avoirnt le plus de credit
.aupré·s d,u Sultan, à luy faire
vo1r le~ ft.1ites. facl1-eufes que j
pourro1t .avoir ce-tte entreprïfe
, & à luy reprefenter
'.toutes ies vio'lences , & tou- j
·tes l~s cruat1tez qu' exer 'iOÎt
fon Grand Vifir , .tant pour
'S'affer1nir dans fon pofte, que p our s'y e11ri cl1ir, n 'ayant en
veuë que fes propres inrercfts.
de Soliman III. ~11·
ce·s remontrances furent faites
fort f ecreternent , & ce
fur avec le mefme fecret,
qt1'on prit la refolution de
mettre -en fa pla·ce Muftapha
Pacha, qui avoir efié relegu~
aux Dardanelles, par le Vifit
Sia-0us, à qui f on mcrite donnoit
de l'ombrage. Cette affaire
fut conduite avec de
grandes circonfpe&ions. Le
Sultan témoigna feulement à
ICmaël qu'il trouvoit à propos
dans la conjonérure prefente,
de dünner le corn1nandement
de f on__Armée ett
Hongrie, à Muftapl1a Pacha.
ra
372 Hiftoire
Sa Haute!fe luy mit entre les
mains un paquet cacheté pour
ML1fiapha, & luy ordunna
de luy écrire, pour luy ap ..
prendre 'ju'Elle l'avoir cl1oifi
pour SeratKier. Ifmaël pe.rfuadé
qt1e le Grand Seigneur Iuy
parlait fincerement, fit rendre
le paquet à Muftapl1a le
plt1s pron1prement qu'îl put.
011 le trouva dans l'Ifie de
11.eteli11 où il s'eftoit arrefté
en prenant la route de Can ..
die, dont Ifmaël luy avoit
donné le Gouvernement pour
l'éloigner davantage de la
Porce,parce qt1'il luy trouvait
.
de Soliman III. 373
trop de me,rite. Le;Grahd Vifit
luy fit beaucoup d.'hontieur
lor~ qu'il arriva1&l'accar
bla de careffes, ef pçrant faiFe
u11e forte union avec: luy, &
q_u .. en s·appuya11t l~un l'autre,
ils [e feroient conferver dans
leurs poftes. Il co1nmen~a
mefme a. luy faire ·preffentir
fes deifei11s ; car , M?-tfrapha
n·aya11t pas ~û le· s,ul ta~ d'abord
qL1'il fL. t ar.rivé , 1[1i,1ael
eut tout Iè temps· qu'it voulut
pou·r ménagei; fon efprit. Il ~
n'en a voit pa.s befoin. Voie y
de quelle 111aniere 11 fut dépofé~
M~lgré ie n1écl1an t eftat
010 'v1 1~no de Cultu1 a

374 Hi(foire
d·e_s affaires , ion ambition l"a:
voit toujours fait paroifire
avec une nombreufe & . f u ..
perbe fuite depuis qu'il eftoit
·grand Vifir; le S_ultan la, -r~
·marqua avec attention dans
la Mof quée de Mahomet II.
-que Sa Hauteffe eftoit allée
vifit~r;. Elle en fut indignée,
:mais E~le n,.en fit rien paroifire.
Ifin-ael alla trot1ver le
lendemrin le Grand Seigneur
poùr le pre{fer de faire partir'
Muftapha pour l' Armée, dans
l'apprel1enfion qu'il a_voit
qu· Y eg~1en ne devinft affez
· pui[ant pour fe faire Grand
"'01 O V. !Stér o de Cultuta
de Soliman III. 375
Vifi.r de force ou de ~ré. Le
Grand S·eignettr ne luy fit
point de répo nfe. If mael
fortit fort inquiet , mais _à
peine fut-il rentré chez lt1y~.qu
· nn luy demanda le Sceau:
de l'Empire de la part de Sa
Hautcffe, qui luy fit dire de
fe retirer dans fa ·maifon fur
le Canal de . la Mer N oirc~
Muftapha avait ordre de V~ '
nir trouver leGrand Seigneur;
qui luy dir beaucoup de chofes
obl1geate·s en luy donnant
le Sceau. Sa Hautcffe luy marqua
enf uite , qu' Elle (çaruoit
qu'il a-voit con tribu~ à faire dé376
Hij!oire
clarer la guerre, & qu~ainft
Elle ne doutait pas qu'il ne , tra'
Uaillafl d la faire finir glorieufement.
Ce choix receut un_applaudiffement
general , & il
n'y eut qu'Ifmael & [es Amis
qui en furent confternez.
Muftapha efrd'une ancienne
Famille de J aniffaires , & ion
Pere a eu des em1)lois confi~
derables da11s ce Corps.Le Fils
qui vient d'efrre nommé
Grand Vifir , s'efrant difringué
pat f on merite , avoit
monté par tous les dc:grez ]
qui pouvoient l'élever jufqu'à
celuy de Janiffaire Aga. Il 1

1

de Solirnan III. 377
fervit en cette qt1 alité au Sie-g~
de Vienne, & t1141.lgré l~
deG1vantage qu'eurent les
TL1rcs dans les Campagnes
Cuivanrcs , il fit connoiftre
qt1'il .efioi t ho1nme de teite.
Q!?Y que des Ar1nées [oient
~attuës , elles 11e laiffenr:,pas
d'efire f-ouve11r remplies, de
braves Soldats, & d'habiles
C1pitaines. Pendant le p_re ..
mier Siege de },iude , Mufiapl1a
· joig11a>pt les ru~es de
guerre à la ·valeur, fit entrer
plt1fieurs foi~ du fecours dans
la Place, ce qui fit renouveller
l' eftime. qu' 011 .. a voit {?OU~
I i
3·7g Hiftoire
lu-y ,,&·cc»ntribua be~ucoup· à
faire le-ver le Siege. Il fut enfv!
te â·épof~ fous le Grand
Vtfir ·1oral1i·m, qui luy im ..
pbta de n~avoir oas menagé
les ";f touFes. Ce ~'eil:oit pas
l~accuf~~ de peu de valeur"
rliajs' plî1toft de trop de cou-·
~age·, :Au1fli le fit-il Gouver:
neûr' de Canifcb-a.. On dit
:qu-,il l'éloigna , parce ,qu'il
1.uy~r-ouvoitl'e[prit trop pro-.
pre.a ;~Ot'.J'ê< en·tfe·pren.dre. fl
<JU i~tta fon Gouverne1nènt
pour reprendre <:e~uy des :Ja ..
niïfaires, -que luy 'tre·ndit le
iGran.d Vilir Solitniln. I.l -f©r- . -
2010 '~ 1ster ode Cul•u c1
de J:olimar1 il]. 379
·yit fous luy penda11t les deux
.der11ieres Campagnes, & il
eut toî1jours par.tau Confeil.
A prés la déroute del' Armée
prés de Mo.bats, les Troupes
chagrines de .ce ma.uvais fuccés
caufé par leu·r lâcheté71
voulure·nt le maflàcrer fans
en bien f çav,c}ir 'la raifon;
.mais Y egl1en do11·t le pou·voir
efroir grand fur une parri·e,d.e
ces mefines Troupes qui prenoit
fes .ord·res, le .conrioiffant
pour· un homme qt1i .meritoit
qu'on 1e protegea,ft>luy
fauva la vie. Mufrapl1a n'a
pas .fi- toft e.u le Scca.u .de
• J: i ij
580 ·Hijfoire ·
l'Empire, qut: foit par recon..:. noiffance, foit pour le bien
de ~'Etat, fon premier foin a efré de détourner i·oragé 1
qu'on vouloir faire fondre
fur Yeghen, & de diffiper ]
J.tf 1e!l:e des faélions , p~r lefquellcs
t1n Eftat perd pJt1s de j
fang que par les maiw' de fes
E11nemis. On a co1nmencé
par f on ordre à diftribuer ]
de I:argent aux Troupes pour
les faite tnarcher , & celuy ]
qui efr venu d'Egypte avec la
monnoye qu'on a fabriquèe,
des Vafes d'or & de l'argen- 1
~er~c do~i:iée par le ~rand Sei:
-
1
1
de Solir,tan III. 3gr
gneur , & par qt1elques· uns
des principaux Officiers de
la Porte, ainG que celuy des
pierreries· venduës, a f uffi
pour ce payement.
Mufiapha aprés avoir d'a ...
bord travaillé à la réünion des
·Milices,& envoyé t1n pardon
ger1eral l tous les Rebelles
d' A fie & d'Europe, qui a prés
avoir ni.is le feu dans quelques
Villes , avoient implor~ la
cleme11ce du Grand Seigneur,
(ce patdon efioit à comdition
qu'ils marçheroient vers la
Fronriere) a ordonné à toutes
les Troupes de l~ Ar~iere-ban ·
~c

3 8 z Hiftoirt'
de fe retirer. Il a auffi envoyé
à Yeghen un pardon autentique
avec a'ffura,nce, qu·il le
protegefoit , pourveu qu'il
obeïfi: au~ ordres qui luy
·ont efié envoyez de fe r.en ...
dre à Temefwa.r .. ·où il doit
·'Commander un,Cam·p-vo.lant.
Mufrapha a :promis aaOE au
Kiaia de ce Bacl1a ,le Gouver-
. .nement de Caramanie, à con.
di~ion qu'il travaillera avec
.Juy .à rérablir la Paix. •. On
~eut quelqt1es jours aprés
qu'Y egl1en efiant forty se
Sopl1ie avec fes Troupes, s' é .•
toit campé au)C ·envir.011s? ô.1,
..
de Soliman III. 383 ·
-que ne les voyant pas trop
difpofées à con1battre con ..
tre €elles du Grand Seigneur
; il avoit f~t avertir
ceux qui marchoient contre
luy , de ne s'en approcher
qu· à une certaine dif1ance , juf
qu'à ce qu'il eu.fi reçeu les nou'
Velles qu"il attendoit de [4 Porte.,
@'qui empécheroient indubita
·bf ement , qu~ des Troupes qui
Jevoient fervir à la déj_ênfe' de.
la Patrie ) ne travaillaJfent à fa
détruire les un<es les autres , ce
-qui ajfoibliroit tellement l'Empire.,
qu'il ferait impojfible qu'il
puft aprés cela ·trowuer d.e long

'
~s + H iftoire' ~·'"·'
t~mps. de n.ou'Ueltesfor;ces po.ur.·op;.
pofer à [es ~nrJe,m·is •• On .apr1it
_enc,orG que lesîrroupesd'Yi.egl1ê.
n n'.étoient pas fi riombi;fl!u:; ·
fes qu'on l'avoit cru,& l'an fê,
perÎÙ'!_da ~que c;e Bacha ap •
prendrait la deft·icution d;'l[.v
m·aël ; l'élev.ation de Mμfl:a.;,
JYha en fa· p,laCe> & les bonne&
dif pofitio11s où ce .dernier·
Grand Vi-fir efroit p.our luy,
a van~ que.les Troupes de1l'Em!..,
pire, & les fi:ennes fuffent en·
e:frat· de venir aux mains.
Y eghe·n til'efi: · pas [eulct:meni;
brave , & -fier, ·& ·d'un·e har"" ·
die!fe . qui ya. quelquefoj~
~ · jufqu~~ -
de J!uliman Ill. 3s5
'jufqu,à l'infolence, mais ·il aune
politique auffi vigoureu ..
·fe que fine. · Il eft d~ailleurs
fort entreprenant, & le Grand
Seigneur qui a tres-bon fe.ns, '
n'a pû s'empefcl1er de dire
voyant la· mani'ere dont il a
embara!fé &· poulfé · Ifmaël,
qu'il le trouvoit habile homme,&
que loin d'avoir donn~ dans Les
pieges qui luy avoient efté tendus
, il a fait tomber le Grand
·Vifir dans les fiens. Sa politique,
à dire le vray, eft difici ..
_le à comprendre, car quoy
·.que les gens emportez f oient
fort ouverts, il n·y a perfonK
k

-
1
3·86 · Hifloire
ne qui foit plus. caché que Iuy; ce.-.
pendant comme Maho1net 1 V. ·luy
a voit oft·ert fa Fille, qu,Yeghcn
avoit refolu d·empéfchèr que ce
Sultan ne fufi dépofé , & que cette
encreprife auroit apparemment 1
réuffi , fi Cuprogli ne L'eaft pr~ve·
nu en mettant Soliman fur le Trô-
·ne plûtoft qu,il n·avoif1~e nfé qu'on
1e puft faire,il efi à croire qu•ayant 1
coûjours confervé la bonne volon-té
qu'il avoit' euë pour Màhomet, 1
il l' auroit récably, pour peu qu,il
euft vû de jour~ ce deffein, ~ que
fon habileté l'ery:tpeichant de fe décot1vrir.,
& fon premier but eftant
d'agir po1:.1r ltty· mefme , il demeu.roit
dans un efrat qui luy larffoit
toûjours la liberté de cboifir le
. party dont il cirero1c le plus d>avancage.
er •
de Soliman III. 387
• · Q.u_ant~ Ifmaël, on luy demande
~ompre de fou adminiftratioo·) &
s'il fauv·e fa t-efte en rendan.r tout
' le bien qu'il a amafi'é. en peu -de
mois , ~1 devra la vie à Soliri!an ,
ci:ui ne fait~ répandre de fang qt1e
clans de prefi'antes nece1Iicez. Il n'y
à forte de moyens dont il ne fe f oit
fervy pour cirer de l'argent; il a
changé ·pref que tous les Got1vern
eurs 8l. tous les Officiers de l'Em•
' pire ; & a fa: t payer cheretnent

l
1
ces places à ceux qu'il ~n a l' èurveus
, ·quoy que· la p1ufpart ne les
demand:ifl .... nc pas. On affure que fa
Femme t;franr d'une avarice ext,
raordin;i.ir~ , & ayant ponr le bien ]
une paffion qtJÎ Ja dcvoroir , l'a ·
ex~iti, qLloy_qu'il n'euil déja que
(~op ~~ pen~hanr à faire les exac~-
tf)ns sui l'ont. perdu. . .

l
1

' 3SS · Hifloire · '
M. ·Girardin . roû~ot1rs pre:ffi à
férvir le R€ly ~ & à fecon<ler · le$,
pieu'fes intentioh~· de ce Mena-'fque,
qgi n'a en veuë que la gloir~ de
l'Egtife , & Je bien dé la Cl1rcfi:i~n·
té , demànda audiehcè au nouveau
Vifir Mofiapl1a aufli -r_0ft qu'it1 fu~
.tn poffefilO·n de cette Çharge, '&. il
cn -0l1tint tous les Efclaves Fran>
sois qui~fl:oie11 t alors éia-0s le.JBagnc
dll GrandSeigneur.Je nê vous expli~
que point te <Ju~c·etr que le Bigne,
· vot1s l'avez vû da11s n-io!! !-~i1toir~
c\~s Amba.fiades à ConJlantinople.
Le nouvenu Grand Vi J.i r donn~
au.ffi à M. Girardin plufi~urs 'Efclaves
lta1iens & Alle1nans, &: luy
d_i-t qu'il luy donneroit audience .toares
les fais qn'it le farthaitero.it, &
-que les portes de fan l'altti~ flr!ielz~
11ujg11r1 8t1!f)erte:s à /'.Am/ta/fadeur d~

' .

' Je S-climan ! 111. 319: f 2m'p ereur de- France. Tous le.s lteli~
giel:lX qui font établis dans l'Empire'
Turc, , & tous les Cl1reftiens, & lest
Negoci'ans d.e toutes les Naîions
d~ ~1 ~~1rope) en tirerorit de grand~
àvantages, & ne manqueront pas
ll'avoir recours à M. Girardin toutes
les fois qu'ils auront befoin de.
fon credit , puis que le Roy n'entretient
t1n An1bafiadet1r à ~onft.
anrinople, qne pour y fervir l' Eglife
) & toute la Chreflienté. '
Les Grands \1ilirs & le Di van
àyant mis en uiage tous les moyensàont
ils on·t pû s'ctvjfcr pour tirer de
i·argent, & lÇ,\Yer des gens èle Guer·
r~ ; les Dervicl1es lie leur cofté ont
fait des exl1ortations en diver_s en•
-droits de la Ville pour exciter le
peuple a.fatrifier fa vie' & [on b.ien
pout défç:ndt.e l '.Etnpire contre.Jes
• ..
• -
390 .- · P.1.if1oirt . ,
Cl1refiiens <JUi .}e rnenacel'}t ,d'u'ne
entiere ruine. Un Iman prefc;hant
dans la Mofquée de .Sainte Sophie,
devant llll;C gi;--ande qt1antic6-de peu•
ple fic un difcours tres-parhet-ïque&
tres-prelfant~pour prouvef ~e tous
l.1 .r M ufolmans ne po11voient fairekur
fal11t s'ils n' al /oient à la G1,erre lors
'!"' il.r n' if oient reten11s par artClt»
-11mpefêh?rtJpr.t li!zitime? & q11e cett.X
q11i en lflôient jujlement difjenfl'{,,efloicnt
1bligezfaus pein~ de peché
de cumribrJer chttcun Jelon fan bien·
4 .la dé;~n:fe de fa Guerre, & q"e
to11s t"e11x qsi p·eriFoient en_cettf oc·
cajion 111t.roiefJt l'av.1rttll<(.. e de mo~riir
m,trf]rs. Les Peuples furent fi émus
par ces exbort~tions que plufieurs
~'offrirent pour aller à l' Armée,
.mais comme. il exagera trop les
- malhcu1·s d.e l'Empjre & ceux dont

de Soliman III. .
3.?J
·îl eftoit menacé s'ils n'apaifoient la '
cole're de Dieu, on crut qu'il eftoit
de la Politique d·e rle pas jercer dàns
l'ef prit de ces peuples des terreurs
qui pou voient leur faire perdre cntierement'
courage, de forte que le
Mufti a prés a voit donné des loüanges
_al.1 zele un . peu trop indifcret ·
de 1.,Iman ,luy ordonna d' eftre plus
moderé à l'axenir. dans fes Predi-
• cauons.
Je vous ay trop parlé de Cuprogl
i frere du dernierVifir de ce nom,
&. heaufrere du deffunt Vifir Siaous
pour ne vous pas dire: qu'il vient
d'arriver des nouvelles qui porten.t,
que le nouveau Vifir Muftapha l'a
fait Caimacan de Conftantinople.
Les Rebelles l'ayant fair: exiler à la
Canée du vivant dn Siaous , il s'eftoic
arrefté à [on ancien Gouver-

..

~9%. Hiftoire
,.nemcnt des Dardanelles, croyant.y
commander à la place .Q.e Mufrapha
qu'Ifmaël envoya en Candie, mais
il receut ordre du mefme Ifmaël à
qui il faifoit ombrage de contint1er
fon voyage vets la Canée; il s'y J
pr~paroit quand Muftapha l'a fajt ·
r~venir â Conftantinople.
-

• • •






FlN. 1
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09323
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le