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Titre

LE NAUFRAGE au port. HISTOIRE.

Titre d'après la table

Histoire.

Fait partie d'une livraison
Page de début
8
Page de début dans la numérisation
14
Page de fin
84
Page de fin dans la numérisation
90
Incipit

Je réponds à cela, que je prie le Lecteur de ne pas / Il y a quelques années qu'étant à S. Malo, un de

Texte
Je reponds à cela, que
je priele Lecteur de ne pas
s'impatienter; & pour commencer
a m'acquitter avec
lui, je vais l'entretenir des
avantures de la Moscovite
& du Lapon, que j'ai promises
le mois dernier. Cependant
je le prie de me
permettre de changer le
titre de cette histoire; quoique
ces deux personnages
y jouent un rôle merveilleux
,ils n'en sont pas néanmoins
les principaux acteurs
: ainsi je croy qu'on
ne me disputera pas la liberté
de la donner fous cet
autre titre.
LE NAUFRAGE
au port.
I HISTOIRE. L y a quelques années
qu'étant à S. Malo, un de
mes amis vint un jour me
trouver, pour me prier
de l'accompagner jusqu'au
Cap *, où étoient deux vais-
* C'est un Promontoire ou pointe
de terre fort élevé à cinq lirsÚs de
S. Malo. Il y a une radeassez,
bonne, où j'amarent ordinairement
les navires qui vont à lamer, eu
qui en reviennent.
seaux qui dévoient profiter
du premier beau temps
pour mettre à la voile pour
la mer du Sud. Plusieurs de
ses amis & des miensetoient
à bord, & nous voulions
les embrasser encore une
fois avant qu'ils appareillassent.
Il etoit huit heures
du matin, le ciel était fort
clair, la chaloupe nous attendoit,
le vent étoit frais,
& les matelots commençoient
a jurer après nous,
parce qu'ils apprehendoient
que nous ne perdissions
une si belle marée,
lors qu'enfin nous nous embarquâmes
pour nous rendre
au Cap,où nous arrivâmes.
en moins d'une heure
& demie. Nos amis, qui
étoient les principaux Officiers
de ces vaisseaux, char:
mez de cette derniere vitice,
nous firent la meilleure
chere qu'ils purent.
Nous avions à peine resté
r
deux heures table,oùnous
commencions a nous mettre
en train, lorsque nous
entendîmes crier, Navire,
navire. Le vent aussitôt
changea, le ciel& la mer
s'obscurcirent, la pluye
,
la grêle, le connerré, &
les nuës, nous environnerent.
Quoique nous eussions
nos quatre ancres à la
mer,nos pilotes ne laisserent
pas de prendre des mesures
contre l'orage.Cependant
nousattendîmes patiemmét,
le verre à lamain;
&en gens que de pareils
dangersn'effrayent gueres,
tout ce qu'il en pourroit
arriver. Enfin au bout de
deux heures le vent se calma,
& le temps s'éclairit.
Mais il n'est rien d'affreux
comme l'horriblespectacle
que le retour de la lumière
offritànos yeux. Des coffres,
des cordages, des
mâts ,des planches,des
hommes,des semmes,ensintoute
l'image d'un frageépouvantablnea.u-
LesOfficiers des navires
quiétoient à l'ancre ordonnerent
à l'instant à tous
leurs matelots de mettre
toutes les chaloupes à lamer,
pour secourir, autant
qu'ilseroit possible, les malheureuxqui
perissoient
Leur zele eutun succés
assez favorable, & peu
d'hommes perirent. On
porta à bord tous ceux qui
avoient nagé avec assez
de vigueur pour attendre
le secours des matelots:
on lesdéshabilla aussitôt,
& on les jetta sur des lits,
après leur avoir fait rendre
l'eau qu'ils avoient bue.
Où suis. je, grand Dieu!
où suis-je, dit l'un de ces
hommes environ deux heures
après qu'on l'eut sauvé?
n'ai je affronté tant de perils,
n'ai
-
je brave tant de
foisla mort, que pour per-
dre au milieu du port ce
quej'avois de plus cher au
monde? Cruelsqui m'avez
sauvé avec tant d'inhumanité,
rendez-moy à ceperside
element qui vient d'enfgaliotutir
l'objet le plus parqui
fût dans la nature.
A ces mots nous nous approchâmes
du malheureux
dont nous venions d'entendre
les plaintes. Vous êtes,
lui dit aussitôt nôtre Capitaine,
avec des hommes
qui n'ont consulté que leur
inclination pour vous sauver
, &a qui vous êtes redevadevable
de la vie qu'ils vous
ont renduë. Oui, repritil,
en gemissant, je fuis avec
des hommes plus barbares
que les Scythes les plus
cruels; pourquoy ravissezvous
à la mort un miserable
qui ne doit plus songer qu'à
mourir? Non.malheureuse
Julie, non, ne me reprochez
pas un indigne retour
àla vie; vôtre mort va bientôt
être vangée par la mienne.
Cette Julie, dit le Capitaine,
en adressant la parole
à un de ses Officiers, ne seroit-
elle pas une de ces deux
femmes qui sont sur vôtre
lit? Que dites-vous,Monsieur,
reprit cet amant desesperé
? vos gens ont- ils [au.
vé deux femmes? Oui,répondit
le Capitaine. Ah si
cela est, dit-ilaussitôt,Julie
n'est pas morte. A l'instant
il se jetta à bas du lit,
& passa au quadre où l'on
avoir mis les deux femmes
qu'on avoit sauvées comme
lui.
Elles avoient les bras se
le visage écorc hez
,
elles
etoient pâles, désigurees 6e
assoupies. Non, dit-il, après
avoir touché ses mains,6j
plein des transports de ta
joye, non ma Julie n'est pas
morte. Je vous dois encore
une fois la vie,Messieurs,
&mille fois davantage. La
tendre Julie, que ses paroles,
ses soûpirs & ses embrassemens
éveillerent, ouvrit
les yeux, & jettant des
regards pleins de tristesse
& de langueur sur tous les
objets dont elle étoit environnée
,elle reconnut enfin
son heureux amant,qui
échauffoit avec sa bouche
ses froides mains, qu'il arrofoit
en même temps de't
ses larmes. |
Alors nôtre Capitaine la
fit changer de lit,&lafit
porter sur le sien, où elle
reçue. plus commodément
tous les autres secours dont
elle eut besoin.
* Cependant on nous
avertit
que le souper étoit prêt.
Le Capitaine pria le Cavalier,
à qui il ne restoit plus
que le souvenir de son naufrage,
de se mettre à table
à côté de lui. Dés qu'ils furent
atable, nous nous pla-;
çâmes où le fort nous mit..
Ce repas ne fut pas si long
que celui du matin: mais
il fut certainement plus
agreable par le récit des rares
avantures que nous entendîmes.
Le nom & le portraitdu
Heros de cette histoire font
des circonstances & des ornemens
necessaires au dé.
tail que j'en vais faire.
Louis-Alexandre de Nerval
, natifde Montréal,sur
la riviere de saine Laurent,
dans le Canada, est un jeune
homme qui peut avoir
à present environ trentedeux
ou trente-trois ans. Il
est peu d'hommes en Europe
qui soient mieux faits
que lui. Son visage est noble
& regulierement beau,
son air. est simple, tendre
&.naturel; il a beaucoup
d'esprit sans étude, il est
vaillant & robuste autant
qu'un homme le puisseêtre:
enfindans quelque endroit
du monde qu'il soit, il sera
toujours regardé. comme
un de ces mortels que la
fortune semble être obligée
de preferer aux aucres.Il
avoit vingt-sixou vingtsept
ans.,lors qu'échapédu
naufrage dont jeviens de
parler
,
il nous conta à la
fin de nôtre souperles avantures
qu'on va lire.
Il y a huir ans, nous dit- que mon pere,Andréde
Nerval, qui étoit un des
plus riches habitans du Canada,
tomba malade de la
maladie dont il est mort. Il
attendit qu'il fût à l'extremité
pour faireentre cinq
enfans qu'il avoir& dont
je fuis l'aîné, un partage
égal de tous ses biens. ille
neôe le lendemain il mourut.
J'eus environ la valeur
de cent mille francs en
terre & en argent pour ma
part. Dés que je me vis le
maître de mon bien, je resolus
, pour l'augmenter,
de faire un commerce qui
pût bientôtm'enrichircomme
lui. J'équipai une fregate
de vingt canons, je
levai une troupe de braves
gens du pays, & je me mis
à la mer avec la meilleure
volonté du monde. Mes
premieres couriesfurent
assez heureuses
; je m'embarquaydeux
fois, deux
fois
fois je retournay dans ma
patrie avec de nouvelles
richesses. La troisième la
fortune nous trahir. J'avois
pris la route de Plaisance
où les ) vents contraires ôc
les grands courans m'obligerent
à relâcher
,
après
avoir été battu de la tempête
pendant près de trois.
semaines. Là j'appris que
quelques navires Hollandois
avoient déja pris pour
leur pêche des moluës la
route du grand ban de
Terre Neuve.Quoique je
sçusse bien qu'il n'y avoic
rien à gagner avec ces Pêcheurs
, je m'imaginai cependant
qu'il ne tenoit qu'à
moy de faire quelque action
déclat,&que secondé
d'une fregate legere qui
étoit avec moy, rien ne
feroit plus facile que de
ruïner leur pêche & leur
commerce pour cetteannée.
Ainsi je donnai tête;
baissée dans ce dessein, qui
eut les plus malheureuses
fuites du monde.
Huit jours après que je 1
fus sorti de Plaisance, après
avoir longtemps combattu,
les vents & les marées, je
tombai (sans pouvoir jamais
l'éviter) au milieu
d'une flote Angloise corn,'
posée de trois gros vaisseaux
qui alloienc chercher des
peaux & des fourrures sur
les confins de la Laponie
de Norvege. Mes deux fregates
marchoient à merveille
: mais les Anglois
avoient le vent sur nous. Ils
mirent toutes leurs voiles
dehors
,
& deux heures
avant la nuit ils nous joignirent.
Dabord ils me
saluerentd'une bordée de
canonssipleine, que je ne-1-
pus leur en rendre qu'line,
quireüssit fort prés
avoir brisémongrandhunier
,monmâcd.arcimbnc,
ôc m'avoir tuéplusieurs
hommes, ils me mirent sur lecôté."Mevpjftfltainsi
hors d'étatde.mer,4çferf?j
dre, je fis amener toutes
mesvoiles, &j'aimaimieux
me rendre, que voir perir
tout mon eql11page.jc:11!ifl
LeCapitaine Anglois,
qui m'avoit si maltraité, fit ;
mettre sa chaloupe & fbn;
canot à la mer;j'en fisautant
de mon côté, parce
que l'eau nous gagnoit de
toutes parts,& je me rendis
avec tout mon monde
à son bord
: mais des qu'il
Ueut vu ma frégate couler
bas, & qu'illui étoit impôt
sible de profiter du moins
des vivres que j'avois embarquées,
& dont il commençoit
à avoir besoin, il
ne songea plus qu'à se défaire
de nous; & le quatrième
jour de sa victoire
il nous mit à terre sur une
mauvaise plage, qui est
entre le Cap Noir & Tiribiri.
Il eutnéanmoins la
consideration de nous sa,
re donner des fusils avec,
un quintal de poudre ëc
autant de plomb, pour
nous aider à subsister de
nôtrechasle
,
jusqu'à ce
qu'il plût à Dieu nous tirer
de la misere où nous allions
vraifemblablemenc être incessamment
réduits. I
Alors nous partageâmes!
entre nos chasseurs la mu-1
nition dont l'Anglois nous
avoir fait present,& donc
la prise dema secondefregare
le pouvoit dedomma- j
ger dereste.
Je gagnai aussitôt avec
ma troupe ( qui fuffisoic
pour faire la conquête de
tout cet affreux pays ) le
coin d'un grand bois, qui
était à trois quarts de lieue
de la mer. Là nous choisîmes
chacun un gros arbre
pour nous en faire chacun
une maison
; & tous mes
gens
assemblez autour de
moy, j'établis, pour leur
iûretécomme pour la mienne,
la même discipline
qu'on fait observer aux
troupes les mieux réglées.
Un jour m'etant emporté
à la fuite d'un jeune ours
avec trois de mes camarades
dans cette noire forêt,
dont nous habitions
une des extremitez,j'apperçus
des tourbillons d'une
épaisse fumée, dont l'odeur
nous surprit. Nous approchâmes
sans bruit du lieu
d'où elle sortoit; & après
avoir fait environ deux cent
pas avec beaucoup de peine
, nous découvrîmes un
terrain assez cultivé; &un
peu plus loin, au milieu
d'une hauteur environnée
d'une grande quantité d'arbres
qu'on y avoir plantez.
une petite maison de char.
pente bâtie avec tout l'art
imaginable. Nous pénétrames
encore plus avant;&
aprèsavoir consideré attentivement
tous les environs
de cet édifice extraordinaire,,
nous conclûmes
qu'il étoit impossîble que
ce bâtiment ne fût voisin
de quelque ville.
Cependant, toutes nos
reflexipns faites, nous nous
trouvâmes à la porte de
cette habiration, où nous
prêtâmes attentivementl'oreille,
pour essayer de comprendre
quelque chose aux
sons de voix que nous entendions
:mais on ne peut
jamais être plus surpris que
nous le fûmes. Je vis, à la
faveur d'un trou qui étoic
à cette porte, une grande
femme étenduë sur un lit,
dressé à la hauteur d'un de-
- .t J s. mi pied de terre, couvert
des plus belles peaux qui
soient dans toute la Norvège.
Sesvêtemens étoient
de la mêmeétoffe ;
sa tête,
dont la beauté est un vrai
chef-d'oeuvre de la nature,
étoit négligemment appuyée
sur son bras droit;
son sein croit à demi découvert,
& toute son attitude
exprimoit sa langueur.
Elle chantoit alors admirablement
& en bon François
ces paroles, que je n'oublirai
jamais.
~IO -, T'*f.1 us CllITlUiS j/MJ tCftl«ji»
je riétois aimable : Je t'ai crû, maintenant tu
méprises mes feux.
Ah !qu'il me plaît,cruel, de
te voirmiserable
Autant que tufus amoureux.
Elle eut à peine cesse de
chanter, que je vis un homme,
habillé de la tête aux
pieds d'une riche fourrure
de marrhe zibeline. Il se
promenoir à grands pas
dans cette chambre, &
aprés plusieurs gestes qui
témoignaient sa douleur,
il lui chanta ce couplet à
son tour.
Quoy
,
malheureux!d'une infidelle
- J'aimerois encor la beauté!
Non, mon coeur méprise,
cruelle,
Jusqu'à ton infidelité.
Ces paroles furentsuivies
de reproches que nous ne
jugeâmes pas a propos d'éçpurer,
de peur d'être furpris
à cette porte si restions nous y plus longtemps;
nous crûmes au contraire
devoirnous en éloigner,
f charmez decettedécouverte
, & nous allâmes à
cent pas de cette maison
[ tirer uncoup de fusil, pour
| nous faire reconnoître plus
civilement des gens que
nous venions d'entendre.
Le bruit quefitcecoup
; mit aussitôt l'alarme dans
tout le pays. A l'instant
nous vîmes sortir de plusieurs
petites huttes presque
ensevelies dans la terre, ôc
que nous n'aurions jamais
fongé à prendre pour des
retraites d'hommes, au
moins un bataillon de pygmées.
Ces marmousets étoient
si petits,quechacun
de nous en auroit pu mettre
unedemi-douzaine à califourchon
sur le canon de
son fusil, & les emportet
sur l'épaulesansêtre trop
char-géi.
Ce font là precisément
les peuples qu'on appelle
des Lapons de Norvege.
Cette espece est si plaifanre,
que nous ne pûmes
pas nous empêcher de rire
de bon coeur des efforts
qu'ils faisoient pour nous
environner. Leurs peines
& leurs pas étoient accompagnez
de cris aigus, qui
attirerent vers nous leurs
femmes, qui étoient aussi
courtes qu'eux. Ainsi nous
étions, sans nous en appercevoir,
au milieu d'une
des plus grandes villes du
pays.
Cependant nous vïmcs.
sortir à la fin, de ccttcra
maison de charpente ou
nous nous étions arrêtez
trois hommes faits comme
les autres hommes. ( Cet
.édifice étoit assurément le
plus superbe Palais detoute
cette partie septentrionale
de l'Europe. ) Ces Meilleurs
étoient armez d'arcs & de
fleches, & si bienvêtus des
peaux d'ours &de chevres
dont ils étoient couverts,
qu'à peine nous leur voyiôs
les yeux.
Que cherchez
- vous
nous
nous dit l'un d'eux, dans
ces climats épouvantables ?
&
-
quel malheureux destin
vous aconduits en ces lieux?
Nôtre sort,lui répondist
je, n'est pas encore si deplorable
que vous le dites,
puisque nous avons le bonheur
de trouver en vous des
hommes qui nous entendent
;& ilme paroît à vôtre
langage, qui est François
comme le nôtre, que tout
ce que nous .pourrions
maintenant vous dire de
nôtre fortune,n'a rien qui -la
vôtre. Nous sommes, reprit
celui qui m'avoit parlé,
étrangers comme vous en
cette contrée: mais nous y
devons à un naufrage, que
nous avons fait sous d'heureux
auspices,le plus tranquile
écablissement du
monde. Venez avec nous
dans cette maison, & soyez
persuadez que nous employerons
tous nos soins à
reparer, autant que nous
le pourrons, le malheur du
vôtre.Nous leur rendîmes
mille graces de l'accueil
favorable qu'ils nous faisoient,
& nous les suivîmes
jusques chez eux, au milieu
d'une troupe de ces mirmir
dons, qui se dressoient de
toutes leurs forces sur la
pointe de leurs pieds pour
.,,
nous baiser par respect les
genoux.
Dés que nous fûmes
arrivez à la porte de cette
imaifon, la Dame que j'a-
'vois vue par un trou parut
là nos yeux. Jamais rien de
Iplus. beau ne s'étoitoffert à
tma vûe. Quel astre impittoyable
vous reduit
, nous
)dit-elle) à l'affreuse necessité
de venir mandier ici
les secours de l'hospitatité?
& quelle étoile favorable
nous procure en même
temps le bonheur de vous
offrir un azile > Entrez. Si
j'é*tois Calprenede ou Vaumo- ries, je serois dire ici de belles
choses à mon Heros. Il entra
cependant,sansrien dire à, la
Dame de ce château; il en
fut quitte pour une profonde
reverence.
Nous avions à peine traversé
la premiere chambre
de cette maison, continua
Nerval, que nous vîmes
dans une autre, qui n'en
étoit separée que par une
cloison de sapin, une centainede
Lapons & de Lapones
qui travailloient à
apprêter des peaux de bêtes.
Quittez cet ouvrage,leur
dit en leur langage la Dame
qui nous menoit,êc
hâtez vous de nous preparer
quelque choie à manger.
Ce peloton de petites
creatures se remua aussitôt
comme un essain d'abeilles,
& disparut en un moment.
Alors le Chanteur quej'avois
entendu entra d'unair
fort triste, &après avoir
salué sa Souveraine & nous,
il nous dit: Vous ne voyez
rien ici, Messieurs, qui ne
vous étonne, j'en fuis per- r dl. , suadé: mais comme nous
avons sans doute des choses
extraordinaires à nous raconcer
de part & d'autre, asseyons
nous sur ces peaux,
& en attendant qu'on nous
apporte à manger, apprenez-
nous, s'il vous plaît,
quel bizarre accident vous
ajetté sur ces bords;nous
vous rendrons ensuiteavantures
pour avantures. Je
contai aussitôt à cette nouvelle
compagnie ce que je
vous ai déja dit de ma fortune,
& l'on nous servit.
Ce repas fut composé de
laitages, de fruits, de legumes
& de viandes, sans
pain.
Une grande fille Moscovite,
originaire d'Astracan,
& qui servoit laDame
qui nous recevoir si bien,
s'assit à côté de moy pour
dîner avec nous. A la droite
elle avoir un outre plein du
jus d'un certain arbre dont
la liqueur est merveilleuse,
& à sa gauche un autre outre
plein d'eau, pour temperer
l'ardeur de l'autre
liqueur. Chaque fois que
nousvoulions boire elle
prenoit la peine de nous en
verser proprement. dans
une grande tasse de bois.
Cette fille, s'appelle Barnaga.
{1
- J
Dés que nôtredîner sur
fini, nôtrehôtesse, dont
lescharmescommençoient
à m'enyvrer autant &plus
que la liqueur que Barnaga
nous avoit fait boire, nous
? ;,. dit
-'ditqu'il étoit bien juste
qu'elle nous contât à son
>- tour ce qui lui étoit arrivé
f de plus extraordinaire dans
[ un pays où peu de gens
Vaviferoienc de chercher
[ des avantures. Nous la remerciâmes
de cette faveur,
& nous la priâmes de ne
nous dérober aucune circonstance
de son histoire.
-.
Elle nous dit qu'elle étoit
d'Hambourg,ville anfeat.
tique de la mer d'Alle nagne;
qu'elles'appelloi JulieStroffen
, fille de Cesar
;
Stroffen
; que son pere étoit
undes plusriçhes negocians-
de toute c.ç\Ce -irççjjj
que la tendressequ'elle.avoit
euë pour le Chevalier
de. (en nous montrée le
Chanteur dont j'avais par.
lé) avoit caulé tous les malheurs
de la vie; que son
pere n'avoit pas voulu.consentir
qu'elle l'épousât; que
l'amour & le desespoir les
avoient determinez às'enfuirensemble;
qu'en sa [au..
vant, ils avaient; rencontré
unnavire Angloisquialloit
dans le Nord; qu'illesavoit
pri~, qu'enfin après avoir
été battus pendant deux
jours d'une- furieusetempête
,ils étoienr venus se
briser entre le Cap Noir &;
Tiribiri. ,,-
,
Elle passa legerementsur
tous cesarticles:lais dés
qu'elle fut à celui deson
naufrage:Redoublez vôtre
attention', Messieurs,nous
dit-elle,reparti-vous
aurécit des plus éronnantes
choseskkrcfidnde'.
Onm'eutàpeine traînée
surlerivagé,que j'ouvris
les yeux. Le premier objet
qui s'offrità ma vûefutun
vieillard venerable qui (xér
moinde nôtre naufrage j
faisoit des voeux pour nôtre salut. - "ZVZ*'J3 i'3$
Nousn'étions , çç>mme
Vousinous, voyez;Aencôre,
nquaecuinfqréachgapee.zodeLC"c,9
- Des que ce bonvieillard
fut assezprès denouspopj:
nous parler:Malheureux,
nous dit- il, quevous ferie4
à plaindre-/fije:néeroyoiç
pas que leCiel, qui vous
envoyé sansdoute icipour
tdllue iftermer les Yeux--aco;l- mespasVversyous,
pour vous,prolonger! les
jours que sa bonté vous
laisse.Aussitôt s'approchant
de nous (car nous avions
tous également besoin de
secours )il nous fitavaler
plusieurs gouttes d'un baume
divin, dont la prompte
vertu: nous délivra sur le
champ des mainsdela
mort qui nousmenaçoit
encore Cet elixir n'eut pas
plutôt fait son effet,qu'il
nous dit : Arrachez-vous,
mes enfans, si vous pouvez,
du sableoùvous êtes
ensevelis, Vous n'avez pas
,de)temps a perdre, &> la
mer,à qui lereflux àravi
saproye, vous engloutira
infailliblement: dans. une
heure,si vous negagnez
pasnincessamment, cetrocher
qui fert de limite à sa
fureur.. Là frayeur que cet
avertissement nous causa
opera sur nous pfefque aussi
efficacement que le remede
qu'il nous avoir donné. Il
metendit la main pour
m'aider à me lever; & la
nature, plus forte en-ces
Messieurs qu'enmoy , fit
pourleur salut ce que l'as
sistance du vieillard laiqoit
pour le mien. <,: ;HIi Ilétoit en effet bienTemps
que nous nous sauvassions
>
&je ne puis encore me rap
peller ce funeste jour, sans;
me representer toutel'horreur
d'un si grand danger.
Nous avions à peine gagné
le faîte de ce recl-wr,,
qui n'étoitqu'à deux cent
pas denous, (lorsque nous
étions encore étendus sur
la vaze ) que nous vîmes
des montagnes d'eau venir
fondre avec violence jusqu'au-
pied de nôtre azile.
Reprenezmaintenant courage,
voyageurs infortunez,
nous dit notre vieillard,
vous n'avez déformais
plus rien à craindre; &si
vous pouvez m'accompa*-
gner jusqu'à ma petite mai--
son
,
je vous y procurerai
tous les secours dont peuvent
avoir besoin des malheureux
comme vous.
Nous le suivîmes, tremblans
de froid & mouillez
jusquaux os.
Dés que nous fûmes arrivez
chez lui, il fit étendre
danscette sallequi est
lamême que celleoùnous
| sommes)une grande quan
tité de peaux,sur lesquelles
nous nous couchâmes a prés
avoir quitte nos habits-,ôc:
en mêmetemps il ordonnai
à Barnaga
,
qui le servoit
r alors, &:. qui me sert aujourd'hui
, de prendre uniquement
soin;demoy ôc
de lui laisser celui des compagnons
de mon in forrune.
Le lendemainnous nous
trouvâmes si bien remise
que nous dînâmes avec lui.
A la fin du repas nous lui
contâmes nôtre histoire,
&en revanche il nous conta
la sienne. Je ne douce point
que, vous ne souhaitiez
ardemment l'entendre.
Je fuis, nous dit-il, nati:
d'Archangel. Cette ville est
dediée à saint Michel Ar.
change. L'on y fait presque
tout le commerce du Nord
Mon nom est Saxadero. Ja
étéainsi nommé
,. parce
qu'on me trouva sur ui
rocher peu de jours apré
ma naissance. Des paysan
qui me ramasserent mi
mirententre les mains d'u
Prêtre Grec qui demeuroi
â une journéed'Archangel.
Ce bon homme qui depuis
wingt ans qu'il étoit marie
n'avoit pu avoir d'enfans,
fut ravi du present que ces
paysans lui firent. Ilm'éleva
ravec autant de foin & de
nendresse que si j'avoiseétè
Sonpropre fils. J'appris fous
lui plusieurs Langues, &
route la formule de la Reilligion
des Grecs, qu'il enseignoit
& qu'il professoit
d'une maniéré exemplaire.
J'avois plus de 40. ans lors
qu'il mourut,& je n'étois
pas encoreassez fage pour •
profiter' desconseils
< retraité&de moderation
qu'il m'avoit donnez pe
dant savie.
,"J.c Ileuta- peinelles- ye
.fermez, qu'emporté j
mon temperament, je
mis entête de courir
monde. Je resolus de
,-
tr
verser1 par terre toute.
Tartarie & laMoscoviei
de me rendre àCaminiel
..oùle-Czar nôtre Emperc
étoit alors; Ce voyag
quoiqueterrible &lon
- me parut encore fort cet
lorsque je fus arrivé à C
minietz,d'où je partis
quinze jours après, pour
me rendre à Constantinoole,
après avoirlaisséderrdiereemBoytouutllge
Raoyraiumee
-'
Mon intention étoit de
asser en Asie, &daller
en Egypte m'instruire des
mysteres -,,-.des loix, des
listoires :$c des, religions,
Hes peuples de l'Orient.Je
xroyois y trouver parmi les
aristes débris des anciens
monumens de la vanité des
hommes,quelques vestiges
de l'élévation de ces genies
qui en avoient si long
temps imposé à cour l'un
vers. Mais jei me détour.
bientôt du succes de m
curiosite, & je ne trouv.
chez ces mortelsque: de
restes depyramides &.'(1
tombeaux
s
des rochers
des antres, des fleuves,de
animaux feroces, & rie
dans leur espritquipûtm
retracer laplus foibleima
ge de leur ancienne gran
deur. Àinsi je retournai su
mes pas,jepris la route-d
l'Europe,&je trouvaiheu
reusement i-- Constantino
ple un navire qui me porta
sen Italie, & delà en France,
qui est la feule partie du
monde où je croy que des
hommespuissentvivreavec
toutes les douceurs &tous
les agremens de la vie :mais
malheureusement la forune
ne me permettoit pas
calors de métablirune patrie
dans le sein de cet Empire.
Je me vis ainsi. forcé de me
soûmettre à la rigueur de
monétoile, & de passer en
Hollande, poury profiter
des premiers navires qui
mettroient à la voile ppur
levoyagé du Nord.
,: : EnarrivantàAmsterdat
j'entrouvai un prêt a partii
je m'y embarquai & la me
& les vents nousserviren
à merveille. De la d'Allemagne me nous entra
mes danscelle de Dane
mark, & parle Sund dan
la mer Baltique, d'où nou
perietrâmes jusqu'au son
du Golfe de Riga,oùja
chevaima navigation, pou me rendre par rerre àPles
koovv, où le Czar étoit
alors avec son armée. « Huit ou dix jours âpre:
mon
mon arrivée, je ne sçaià
quelle occasion je lui fus
presenté
, comme un homime
que tant de voyages rendoient extraordinaire
chez des peuples quine
>connoissent dautre terre&
d'autres climats què
-- d'autresclimatsqueceux
qu'ils habitent. Ce Prince me reçut de lamaniéré du
monde la plus généreuse;
& après m'avoir assuréplusieurs
fois du plaisir que lui
feroit mon attachement f.
sa personne,il m'hônorade
tant de titres &de tant de
charges, que le fardeau
m'en parut bientôt insupportable.
Je netois point
courcitan,&je pouvois encore
moinsle. devenir. Le
lait sauvage que j'avoissuccé,
la manière dont on m'avoit
élevé;&le grand air
que j'avois respiré dans tous
les climats dumonde , ne
m'avoient donné aucunes
leçons du personnage que je
devois joüer.On s'apperçut
bientôt de la dureté de mes
moeurs,on se dégoûta de me
voir dans une place que
d'autres pouvaient remplir
mieux quemoy; & enfin,au
; bout de quelques années,
une chûte precipitée fut
l'ouvrage de mon élevation.
[ Je me rendis alors la justice
> que meritoit ma disgrace,
,&. je convins en moymême
> quela douceur & lapolitesse
étoient l'appanage des
hommesquiveulent vivre
dans la societé de leurs paireils.
Il n'en fut cependant
ni plus ni moins, & je fus
obligé
, pour me rendre
iincessammentau lieu de
mon exil., de m'en retourmer
par ou j'etois venu. Cest ici le sejour qui me
fut destiné. Le navire qu
m'y amena me mit à terre
avec un valet fidele qui ne
voulut point me quitter
On me donna des armes
de la poudre, du plomb
&des grains pour ense,
mencer les terres qu'il me
plairoit de choisir pour m
liibfiftance ; ôc cespetit
peuples,mon valet &Bar
naga, que je trouvai heu
reusement ici,*
m'aideren
bâtir la petitemaison ou
nous sommes. Lavantur
qui a jette cette fille su
ces bords est si extraordinaire,
que le récit que vous
en allezentendresera infailliblement
le plusbel
ornement de cette histoire.
La Moscovite Barnaga,
de la ville d'?~M~~ peut
avoir environ trente ans. M
y en a prés de quatre qu'-
elle est dans cettecontree,
où elle vit dans la compagnie
des Lapons Norvegiens
comme si elle étoit
leur Reine. Avant de venir
en cepaïs,elle vivoitàAstra.
candans le sein de sa famille,
occupeeàtous les ouvrages
ausquelsune Elles'occupe
naturellement chezses parens,
lorsqueleplus spirituel&
leplus sçnvant,des
Lapons de ce Royaume s'avisa
de vouloir voyager. 1.1
- On dit ici tant de choses
merveilleuses de ce petit
homme, qu'on assure qu'il
avoit un Gnome particulier
qui le proregeoir. D'autres
disent qu'il enéroit un luimême.
Ce qu'il ya de plus
constant; selon moy, c'est
qu'ilavoir une connoissance
parfaite de tous les
secrets & de toutes les verus
naturcllesqui sontdans
les simples, & qu'il employoit
les plus fiers animaux
de ces deserts à tous
les usages qu'illui plaisoit.
Un jour, dis- je, (e sentant
i)..len humeur de voyager !> arrêta dans ces
forêts
une Renne. *, à qui il dit à
* Plusieursvoyagesdu NordpAr.
lent des qualitez de cetanimal, qui
yest
à peuprés dela taille d'un Cerf.
On lui dit à l'oreilleoù l'onveut
l'envoyer, ou bien le nom des lieux
où l'on veut aller avrjr lui.Aussitôt
ilva par-tout avec unevitesse admirable
, sans suivre aucune route. Éon
instinct seulle guide
,
-& il n'y a ni
fleuves, ni precipices
,
ni montagnes
qui l'arrêtent. Il sertcommunément
à tirer les trainaux.
l'oreille qu'ilvouloit se pro
mener dans l'Empire de
Tartares &dans la Moscc
vie. Cet animal docile reçu
son secret,&l'emmena pa
tout où il voulut aller. En
fin étant arrivé à Astracan
il alla loger chez la mer
de Barnaga, où ilse trouv
si content des bons traite
mensqu'onlui fit, que pa
reconnoissance,ou par in
clination il devint amou
reux de cette fille.
LeLapon ne pouvan
contenirtout le feu qui
devoroit,s'avisa de lui faire
an jour une ample déclaration
de sa tendresse. Barnagase
moqua de lui. Le
tmraégperiasàduentceetltpeofiinllte,qlu'o'uilresolut
de s'en vanger.Voici
commeil s'y prit.
Il affecta de ne lui plus
parler d'amour, & de ne
plus s'attacher qu'à caresser
à Renne qui faisoit chaque
jour presence de
Barnaga Ôc
de
sa
mere,
tous
les tours de souplesse imaginables.
Il se persuadaavec
raison que cette jeune fille
ne pourroit pas s'empêcher
àd'essayer cette monture; qui il avoit eu la precau
tion de dire tout cequ'il y
avoit à faire,si cela arrivoit.
Barnaga, charméede
cet animal, avoit plusieur
fois prié le fin Lapon dele
lui donner:mais il avoit
toujours affecté de ne pouvoir
lui faire un si grand sa
crifice; Enfin irritée de ses
refus, elle avoir resolu de ledérober, & de lui dire
qu'ils'étoit perdu dans les
bois voisins. Un jour pour
cet effet, elle se fit suivre
parla Renne jusqu'à un
quart de lieuë de la ville, où
le voyant seule, elle voulut
monter cet animal, qui se
mit a genoux comme un
chameau pour la recevoir
plus commodément: mais
elle fut à peine sur son dos,
qu'il l'emporta presque à
travers les airs, tant il avoit
de vîtesse & de legereté.
Quoyqu'il y ait un chemin
infini d'ici à Astracan, il
l'amena en trois jours dans
ce defert, où son amant le
rendit aussitôt qu'elle. Il
l'épousa presque en même
tempsavec toutes les ceremoniesdupays
,que
vous conterayune auti
fois. Il a depuisle jour
sesnoves,vécu tpujou
~v~~Uç.~ns la plusgra~
deuniondu mpad|;,& tP8
de mêmeavec eux. Ceper
dant depuis trois mois
Lapon a disparu,sans qu'o
sçache pourquoy, ni où
estallé, & personneici
sçait de ses nouvelles. Ba
~nagoem~'enoparutconsole &- coeur qu'il nerevienneja
mais. rti>,>u£iaaaoî
Lediscours de ce bon
dvierilolaridt- f.inÎt en cet 7en: nit- en"' - Vieillard finirencet!eenn^ Nous luifîmes chacun
nos remercimens de la peine
qu'il avoit prisede nous
conter tant de choses extraordinaires,
& nous le
priâmes de nous dire si
nous ne pourrions pas trouvercinq
de ses Rennes pour
nous remettre dans quelque
partie de l'Europe plus
habitable que celle où nous
étions. Non, mes enfans,
nous dit-il,je peux vous
donner aucune instruction
làdessus,& je vousjur
que je n'ai pas vu un seul d
ces animaux depuis que j
, fuis ici:mais au nomd
Dieu ne me quittez pa
que je ne sois mort ;dan
quarante mois je ne sera
plus. Dés que vous maure
renduà la terre, il viendr
quelque
- navire surcette
côte , dont le Capitain
charitable vous recevr
dans son bord , & voustre
menera dans les lieux o
vous avez tantd'impatience
de vous revoir. Il y a plu
de six semaines que ce fag
vieillard est mort, & nous
n'avons encore vu que vous,
qu'une extreme dïsgrace a
jettez sur ce rivage.
i' Le Chevalier de. qui
m'entend, me jura, deux
mois aprés nôtre naufrage,
unefoy éternelle, &m'épousa
en presence de ce
yenerable personnage donc
je viens de vous conter
l'histoire, deBarnaga, qu'-
une tendre sympathie a
fortement attachée à moy
depuis sa mort, & de ces
Messieurs qui sont nos compagnons
d'infortune. Il ya
plus d'un anqu'ils'est mis
danslatête des chagrins&
des jalousies sans fondement,
qui le precipitent
cent fois par jour dans des
abîmes de melancoliedont
rien ne peut leguerir.
Voilace que j'avais;
vous dire de mesavantures
"Au reste, songeons main
tenant auxexpediens qu
-peuvent nous tirer d'ici, &
7mettons touten usagepou
LretôUfncr'; ensemble, dan
•'-•d-esfie'uxefîlinous convien
rfëntmièux queces climat *éfK^âritabtâs*-?jDésque,
Julie eutcesse
de parler, nousnous encourageâmestous
à; travailler
aux moyens de sortir de ce
miserables pays ; &C] après
plusiers proportions.
gues & inutiles , je priai nôître
compagnie de sereposer
sur moydu soin de la délivr.
cCJ de cette région.Je
m'engageai à mettre tout
j: mon monde aprés cet our;
vrage. Je fis couper des ar..
Ë bres, donton ne un grand -nombre de mâts, de pouz
tres,de solives & de planches,
que jedestinaiàla
construction d'un navire. *
Sur ces entrefaites,le Che
valierde. tomba malade
en deux jours il fut à lex~
tremite, & le troisiéme i
mourur. Sa veuve fut long
temps inconsolable desa
perce : cependant mes soins
mes discours, la tendresse
qu'elle étoit perpuadée que
j'avois pour elle, & l'impa.
tience qu'elle avoit de re.
tourner bientôt dans une
meilleure contrée que celle
ou nous étions, (comme je
l'en assurois tous les jours,
lui rendirent bientôt son
embonpoint, ses graces ôc
sa tranquilité.
Des '¡ que nôtre vaisseau
: fut achevé, lesté, & chargé
d'eau, de poissons secs, de
chair salée, de legumes, 6c
de toutes les pauvres den-
1"rees. qui pouvoient. nous
aider à subsisterjusqu'à ce
que nous arrivassions à Plaisance,
nous nous embart
quâmes. Nous y changeâmes
pour des peaux nôtre
»bâtiment contre un autre
meilleur,nous y prîmes du
pain, du biscuit
,
du vin,
de la bierre, & tous les rafraîchissemens
dont nous
avions besoin. Enfin après
avoirvoguéleplusmalheureulement
du monde contre
les vents & la mer, nous
hommes venus,comme
vous le sçavez,Messieurs,
nous brifer ce matin sui
cette côte,& faire,pourain
dire, naufrage au port.
Je ne fais point d'autre:
remarques sur cette histoire
que celles qui sont à la mar
ge , parce que je connoi
ces pays septentrionnau
moins que ceux qui son
plus près du Soleil.
Collectivité
Faux
Langue
Vers et prose
Type d'écrit journalistique
Courrier des lecteurs
Faux
Genre littéraire
Constitue la réponse à un autre texte
Soumis par kipfmullerl le