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1687, 01 (partie 1) (Lyon)
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Illuftriffimus
Archiepifcopus &Prorex Lugdunenfis
Camillus de Neufville Collegio SS .
Trinitatis Patrum Societatis JESU
Teſtamenti tabulis attribuit anno 1693 .




807156
MERCURE
GALANT
UE
DE
LA
VI
DEDIE' A MONSEIGNEUR
LE DAUPHIN
JANVIER 1687
IYOR
1893*
VOXY
e
A LYON ,
Chez THOMAS AMAULRY ,
ruë Merciere , au Mercure Galant
M. DC. LXXXVII.
AVEC PRIVILEGE DU ROY,

**
1
PAU LECTEVR
I'Ambaffade de
Deftant &
Siam en France
Les quatreVolu
mes qui la compofent , on asouhaité
de voir icy en peu de paroles ,&
en unfeul corps , tout ce que comme
cette
me en
Ambassade contient , Parce
qu'on les prend les uns pour les antres
, quoy que la difference en foit
grande. Le premier Volume a pour
Titre,
A
Noyagedes Ambaffadeurs de Siam
en France, contenante la Reception
qui leur a eſté faite dans les Villes où
ils ont paffé, leur Entrée àParis,elds
Cercinonies obſervées dans l'Audience
qu'ils ont euendu Royat denda
Maiſon | Royale les Complimens
qu'ils ont faits , la Deſcription des
lieux où ils ont eſté & ce qu'ils ont
ditde remarquable fir tout ce qu'ils
ont veu.
18
2
Le second Volume a pour Titre ,
Suite du Voyage des Ambaſſadeurs
de Siam en France , contetant ce qui
s'eſt paſſé à l'Audience de Madame la
Dauphine , des Princeſſes du Sang ,
& deMrs de Croiffy & de Seignelay,
avec'une Deſcription exacte des Cha
ſteaux , appartemens Jardins ; &
Fontaines de Verſailles , S. Germain,
Marly & Clagny ; de la Machine de
Marly , des Invalides , de l'Obſervatoire
, de S. Cyr , & de ce que ces
Ambaffadeurs ont veu dans tous les
autres lieux ou ils ont eſté depuis la
premiereRelation; à quoy l'on a joint
le Diſcours qu'il ont fait au Roy
Letroisième Volume a pour Titre .
Troifiéme Partie duVoyagedes Ambaſſadeurs
de Sianuen France,cótenant
la fuire de la Deſcription de Verſailles
,celle des Chevaux qui ſont dans
lesdeux Ecuries du Roy , ce qui s'eft
paffé danstes Viſites qui leur ont eſté
Tenduës, les experiences de la pefanteur
de l'air fairds devant eux , la
Deſcription de la Galerie de Sceaux ',
& les Receptions davec toutes les
G
100V 200
harangues qu'on leur a faites dans
toutes les Villes de Flandres .
Lequatriéme Volume apourTitre ,
Quatriéme & derniere Partie du
Voyage des Ambaſſadeurs de Siam
en France , contenant la ſuite de leur
Voyage de Flandres depuis Valenciennes
juſqu'à Paris , la Deſcription
des Villes où ils ont paffe ,& les
Harangues de tous les Corps,ce qu'ils
ont veu à Paris depuis leur retour ,
avec une Deſcription de tous les lieux
où ils ont eſté ,& de la Feſte donnée
par Monfieur à S. Cloud, leurs Voyages
à Verſailles , leur Audience de
congé , & les dix- sept Audiences
qu'ils eurent le meſme jour, avec tous
les Complimens qu'ils ont faits , la
liſte des Preſens qui leur ont eſté donnez
, ce qui s'eſt paité à leur départ ,
&les noms des Perfonnes diftinguées
qui vont à Siam.
Lamoitiédu Mercure de Juillet
de l'année derniere , & la ſeconde
Partie du mesmeMercure,contiennent
une Relation du Voyage que
3 .
Monfieur le Chevalier de Chanmont
a fait à Siam , en qualité
d'Ambassadeur de Sa Majesté. On
y trouve beaucoup de chofes dont il
n'a paint parlé dans celle qu'
donnée au Public & elle ne doit
pas estre confondue aveales quatre
Volumes da Voyage des Ambaſſa.
deurs de Siam en Franta aug
qu'il a
?????? R
e
CO
d
3. A***
' ,
છછછછછછછ RRઃ ****
ADVIS
LE LIBRAIRE
AU LECTEUR.
'Est pour la onziéme
année , cher Lecteur , que
j'ay l'honneur de vous
diſtribuer le Mercure Galant
: Ce qui me fait continuer avec
bien du plaifir , d'eſt de voir que la
diſtribution augmente de mois en
mois ; & preſentement que les Extraordinaires
ſont ſupprimez , cela
bonnifie beaucoup leſdits Mercures,
Vous vous en devez eſtre apperçu
depuis fix mois.
LIVRES NOUVEAUX
du mois de Janvier 1687 .
Le bon uſage du Thé , Caffé &
Chocolat , par le ſçavant Monfieur
deBlegny,Medecin ordinaite de Monfieur
, prepofé par le Roy pour les
Nouvelles Découvertes
, avec quatorze
figures en taille douce, indouze,
30. fols.
L'Hiſtoire du Pontificat S. Leon,
par feu Monfieur Mainbour.
Le Livre de Joſué , les Juges &
Ruth,traduit par feu Monfieur de Sacy,
in octavo , s.livr. Tous les autres
Livres de la Bible ſe trouvent auſſi
dans la meſime Boutique .
Le quatriéme Tome des Voyages
des Ambaſſadeurs de Siam , indouze,
20. f. Les trois premiers Tomes ſe
ſeparent tous pour 20. f. chacun.
Second Tome des Lettres du Chevalier
d'Her , par Monfieur de Fontenelle,
indouze, 30. f. Le premier Tome
ſe diſtribuë auſſi pour 30. fols .
L'Art de Prêcher la Parole de Dieu ,
contenant les Regles de l'Eloquence
Chrétienne, indouze, 40. f. 1
Examen Juridicum, indouze, 30.f.
Les Exercices de la vie interieure,
ou l'Efprit interieur, dont on doit animer
ſes actions durant le jour ; aveo
une inftruction facile pour l'Oraifon,
indouze, 20. fols,
Lettre d'un Docteur , écrite à un
Miſſionnaire de la Chine, indouze,
10. fols.
La Lumiere ſortant par ſoy-mcſme
des Tenebres , ou Veritable Theorie
de la Pierre des Philoſophes , écrite
en vers Italiens,& amplifiée en Latin
par un Auteur Anonyme en forme de
Commentaire, traduit en François, in
douze, 30. fols .
Oraifon Funebre de Meſfire Gafpard
de Semiane la Coſte , par le R.
P. Paul , du Tiers Ordre , Definiteur
de la Province S. Loüis , in quarto,
10. fols .
En attendant la ſuite des Hereſies,
de Monfieur de Varillas . Le Voyage
de Monfieur le Chevalier Chardin .
Le Dialogue Politique & Moraux. Le
fix & ſeptiéme Tome de l'Horace de
Monfieur Acier. Le Virgile de Monſieur
de Martignac , nouvelle Edition ,
reveu& recorrigé en beaucoup d'endroits
, avec pluſieurs figures en taille
douce , impreſſion de Paris. Et pluſieurs
autres Livres , dont je vous
envoiray le Catalogue de mois en
mois.
L'on vend auſſi dans la mesme
Boutique de pluſieurs fortes de belles
Heures en chagrin , avec des fernois
d'argent& en maroquin , impreffion
& relicure de Paris, )
શુ??? - દુ???? 255?????
a
TABLE DES MATIERES
contenues dans ce Volume.
P
4
:
Relude
Description entiere d'une
These qui contient toute la wie
Eglogue de Madame des Hoalieres.
173
Theſe conſacrée à la destruction de
l'Herefie , & foutenue en Sor.
bonne par Monfieur l'Abbé de
Révolenie
Ceremonies obfervées auxObfeques
defew Moufieur lePrince, 91
Eloge de feu Monsieur le Prince
prononcépar le Pere de Villiers
Iefuite.
Divers Ouvrages àlagloiredefeu
Monsieurle Prince 17
Médaille gravée àla gloire de ce
Prince. 120
TABLE .
Liste des Academiciens de l'Aca
demie Royale d' Angers nommez
pour la premiere fois par le
Roy.
Hiftoire.
021
132
Discours prononcéà la loüange du
Royfur la destruction de l'Herefie,
par le Pere Quartier Ie-
Suite , avec la description du
lieu où ce Discours à esté pro.
noncé.
137
Morts. ໔ ວວ່າວ ສາວວາ 161
Eloge defeu Monsieur l'Archevesqued'Albaid
Monfieur de la Berchere,Archeves.
que d'Aix, est nommé à l' Archequefche
Albio 170
Monfieurle Cardinal Langravede
Fuſtemberg reçoit le bonnetde la
main du Roy . 5171
Baptefme de Meffeigneurs les Duas
de Bourgogne, d'Anjou , & de
Berrypoly alá strava 73
TABLE .
Actions de graces renduës pourle
retabliſſement de la Santé du
Roy. Ab
175
Seconde partie des Lettres de Mon
ſieur le Chevalier d'Her ... 210
Dialogues Satyriques & Moraux .
da
UE LOVE
Priſe d'Habit de Mademoiselle de
Loubes. 213
Noms de ceux qui ont expliqué les
1 Enigmes.
Enigmes nouvelles.
216
7
217
Benefices donnez par le Roy. 221
Gouvernemens donnez.
८८
127
Fin de la Table .
228
1.1
3
in
L
Ar
Extrait du Privilege du Roy.
Grace& Privilege du Roy , donné ,
le 18.Juillet
le Roy enfon Conſeil , JUNQUIERES. 11eft,
permis à I. D. Ecuyer, Sicur de VViizé de
faire imprimer tous les Mois un Livre in
titulé MERCURE GALANT , contenant
pluſieurs Pieces , Relation , Hiſtoires Avantures,&
autres Ouvrages hiſtorique , curieux
& galans , pour la fatisfaction de
nôtre cher & tres amé Fils Le DAUPHIN ;
pendant le temps & eſpace de dix années,
à compter du jour que chacun defdits
Volumes ſera achevé d'imprimer pour la
premieres fois : Comme auſſi défenſes ſont
faires à tous Libraires , Imprimeurs Graveurs
& autres , d'imprimer graver& debiter
ledit Livre ſans le confentement de
l'Expoſant, ny d'en extraire aucune Piece,ny
Planches ſervant à l'ornement dudit Livres
meſmed'en vendre ſeparément, & de donner
à lire ledit Livre; le tout à peine de fix mille
mille livres d'amende contre chacun des
contrevenans , & confiſcation des Exem
plaires , contrefaits ; ainſi que plus au long
il cit porté audit Privilege.
Registrésur le Livre de la Communauté le 14
Septembre 1683.
Signe ANGOт , Syndic.
Et ledit Sieur J. D. Ecuyer, Sicur de
Vizé , a cedé & tranſporté ſon droit de
Privilege à Thomas Amaulry, Libraire à
Lyon , pour en joüir ſuivant l'accord fait
entr'cux.
KU
Avis pour placer les Figures.
L
Amedaille doit regarder la
ppaaggee 120.
L'Air qui commence par ,
C'est en vain que l'hyver contraire
à nos defirs , doit regarder la
page 136.
L'Air qui commence , par ,
Tout est changé dans l'Univers,doit
regarder la page 220 .
MERCURE
AILLE
MERCURE
GALANT.
JANVIER 1687.
UAND les Sou--
verains ont gagné
quelques Batailles ,
ou forcé des Places
à ſe rendre , les Peuples en
rendent ordinairement graces
à Dieu avec des démonſtrations
de joye, mais ces actions
de graces ne ſe font que dans
une ſeule Eglife , & au nom
A
2 MERCURE
de toute une Ville , au lieu
que celles que l'on vient de
faire pour remercier Dieu du
retour de la Santé du Roy ,
beaucoup plus confiderable à
ſes Peuples , que s'il avoit gagné
des Royaumes entiers ,
ont eſté faites dans toutes les
Eglifes de Paris. Ceux qui les
deſſervent ont prié deux fois;
d'abordpourdemander la guériſon
de Sa Majesté,& enſuite
pour en rendre graces à Dieu .
Les premiers d'entre les Corps
des Bourgeois qui ont fait faire
ces Prieres , ont commencé
comme a fait l'Eglife , & ils
ont enſuite finy pardes actions
de graces. Ainfi l'Egliſe & les
Peuples ont prié chacun ſur
deux ſujets, & ces deux fortes
dePrieres s'étant faites à quatre
fois differentes , ont eſté à
GALANT .
3
l'infiny. L'ay tâché , Madame ,
de vous en faire une peinture
au commencement & dans la
fin de ma Lettre de Decembre.
Cependant il ſe trouve
que je n'ay pû exprimer
qu'imparfaitement le zele des
Peuples , & à dire vray , c'eſt
une choſe impoffible. Toutes
les Eglifes ſuffifoient àpeine
pour ceux qui vouloient faire
faire des Prieres , & l'on a eſté
ſouvent obligé d'attendre que
ceux quis'eſtoient mis en état
d'en faire faire les premiers ,
euſſentachevé, pour fatisfaire
au zele des autres .Les uns ont
fait prier pendant un jour entier
, les autres pendant trois
jours , & les autres pendant
neuf ; & enfin , pour rendre
ces Prieres plus celebres , on y
a ajoûté la Muſique , & la de-
A2
4
MERCURE
coration des Eglifes où tout ce
que Paris a de plus riche & de
plus fuperbe a paru , avec les
décharges des Boëtes & de la
Mouſqueterie.Enfin tout étoit
en mouvement tout eſtoit en
joye, tout retentiſſoit d'actions
de graces , & il s'eſt meſme
trouvé des Corps & des Communautez
, & des Societez qui
ontfait recommencer pluſieurs
fois. Meſſieurs des Manufactures
Royales des Meubles de la
Couronne établies aux Gobelins
, ont eſté de ce nombre ;
les Corps , & les Communautez
n'ont pas ſeulement fait
prier,mais pluſieurs perſonnes
qui n'entrent dans aucun
Corps , ſe ſont aſſociées pour
faire prier , & des particuliers
qui n'ont point voulu ſe faire
connoître ,& même des ArtiGALANT
a
1
t
S
re
fans , ont trouvé moyen de
faire tenir dans des Convents
des ſommes confiderables ,pour
rendre graces à Dieu d'une
Santé , qui ne doit pas ſeulement
eſtre pretieuſe à toute
l'Europe puis que le Roy y
maintient la Paix,mais encore
à toute la terre , ce Monarque
faiſant des Alliances dans les
Païs les plus reculez , & dépenfant
des ſommes immenfes
pour attirer des Ames à Dieu
en les faiſant renoncer a l'Idolatrie.
Ainſi ce n'eſt pas fans
fujet qu'il eſt les delices de fes
Peuples , &de tous les Etrangers
qui rendent juſtice au
vray merite , & qui feront ravis
d'apprendre ce que l'on a
fait en France pour le rétabliſſement
de ſa Santé , puis que
toute la terre connoiſtra par là
A 3
MERCURE
d'une
l'ardeur du zele dont tous les
ccoeurs des François font penetrez
pour un Prince fi digne
de l'amour qu'ils ont pour luy .
Si l'on ignoroit par quels endroits
il merite que cet amour
ait eſté juſqu'a l'excez où il eſt
monté , on n'en douteroit pas
en lifant l'Ouvrage queje vous
envoye ! C'eſt le deſſein
Theſe pour le Roy , fait par un
homme qui s'eſt attaché avec
tant d'exactitude à rechercher
tout ce qui regarde la Vie de
ce Grand Monarque , que je
puis vous afſeurer qu'encore
qu'on ait tâché de l'imiter , &
de le copier en beaucoup d'endroits
, dans des Ouvrages
qu'on a preſentez ſans avoir
ofé les rendre publics, il eſt l'original
de tout ce que nous
avons vû de cette nature. Le
GALANT.
7
travail de cet Ouvrage,où toutes
les dates font , eſt quelque
choſe d'incomprehenſible,fſi je
puis parler ainfi , & pour le
rendre correct , l'Auteur a eu
beſoin de toute l'application
d'un homme auſſi zelé qu'il
l'eſt pour le Roy. Tous les Eloges
de ce Monarque , & tout
ce qu'on a fait de ſon Hiſtoire,
ne nous en fçauroient faire ſi
bien connoiſtre la grandeur
que cet Ouvrage , & c'eſt ce
qui merite une réflexion bien
ſerieuſe , & qui jettera dans
l'étonnement tous ceux qui
voudront la faire. Il ne s'agit
que de marquer ce qu'a fait le
Roy , fans detail , fans raifonnement
, & fans éloge; & cependant
cette Theſe peut paffer
pour une choſe preſque impoſſible,
à caufe du grand nom-
A 4
8 MERCURE
<
bre d'Actions qu'elle contient.
Tous les Siecles ne nous fourniffent
rien de ſemblable. Ie
puis , & je dois le dire à la teſte
d'unOuvrage qui n'eſt remply
que de Faits , & l'on ne peut
en voyant cela que ſe taire , &
demeurer dans l'étonnement.
le n'ay dit qu'un mot de ces
faits-là ,& ce n'a meſme eſté
qued'une partie,& j'en ay parlé
dans deux cens Volumes .
Peut-on dire aprés cela qu'il
foit aiſe de faire l'Hiſtoire du
Roy , ſi l'on y veut renfermer
tout ce qu'il a fait de grand ?
Pour moy , je ſuis perfuadé
qu'il faudroit un Siecle entier,
fi l'on vouloit mettre dans leur
jour toutes les actions de ce
Monarque , & que cette Hiſtoire
pourroit remplir ſeule
GALANT.
و
T
des Bibliotheques.Vous enſerez
entierement convaincuë ,
quand vous aurez lû l'Ouvrage
ſuivant, qui fera d'une grande
utilité pour tous ceux qui
voudront travailler à cetteHiſtoire
, & qui leur épargnera
pluſieurs années de recherches.
Souvenez - vous,s'il vous
plaiſt , que l'Auteur ſuppoſe
ſon deſſein executé , & qu'il
décrit la Theſe comme ſi elle
eſtoit faite .
DESSEIN DE L'OUVRAGE .
Les Actions immortelles de
LOUIS XIV. eſtant admirées
de toute la Terre , il n'eſt pas
poſſible de trouver aujour
d'huy quelqu'un qui n'en foit
pas informe ,& qui puiffe demander
avec raiſon, pourquoy
nous appellons ce Prince
LOUIS LE GRAND , mais afin
A
1
10 MERCURE
d'en inſtruire la Poſterité , on
luy dédie une Theſe qui pourra
luy ſervir de regle dans les
ſentimens qu'elle doit avoir
des vertus heroïques de noſtre
incomparable Monarque. Les
principaux évenemens de fon
Regne depuis 1658. y font
marquez d'une maniere qui
ne fera peut- eſtre pas deſagreable
. Quoy qu'il y euſt une
infinité de belles choses à dire
avant ce temps- là , on n'a pas
cru devoir remonter plus haut,
afinde ne ſe pas copier foymeſme
dans d'autres Ouvrages
, où elles n'ont pas eſté oubliéess
mais plus que tout cela,
pour n'établir les loüanges de
LOUIS LE GRAND que fur des
actions d'éclat , dans lesquelles
il a toûjours eu la premiere
part ,& afin de le ſuivre plus
GALANT . If
exactement depuis un âge où
ſa teſte , fon coeur , fon bras &
fon eſprit ont commencé d'agir
de concert pour le bien de
ſes Etats . L'Hiſtoire du Roy eft
une matiere riche , & un vaſte
champ ouvert àtous ceux qui
s'y voudrontexercer !Heureux
mille fois celuy qui le fera
avec fuccez ! On a cru devoir
ne s'expliquer qu'enFrançois ,
foit dans les Inſcriptions , ſoit
dans les Conclufions hiftoriques
& politiques, parce qu'on
a eu pour objet la fatisfaction
des Perſonnes qui preferent
cette Langue , que nos Victoires
ont rendue ſi floriſſante
dans toutes les Parties du
Monde.
DESCRIPTION DE LA
THESE .
Le Portrait du Roy eſt placé
A 6
12 MERCURE
au milieu d'une Couronne de
laurier , relevée de quatorze
Médailles , le tout pofe fur une
dépoüille de Lion. Quatre
grands Octogones avec de ri--
ches bordures accompagnent
le Portrait , & font voir par
quatre grandes Inſcriptions la
gloire du Roy dans les quatre
Parties du Monde.
I. INSCRIPTION.
L'Europe inutilement conjuvée
pour s'opposer à la Course
victorieuse de LOUIS LE
GRAND , cede à la force de
fon bras ; & fe voit contrainte
d'accepter la Paix , que ce Mo--
narque luy accorde au milieu de
Ses V. Etaires.
II. INSCRIPTION.
E'Afie étonné des Actions ad
mirables & de la Grandeur du Roy,
recherchefon Alliance ,& députe
GALANT.
13 :
trois fois des Ambassadeurs du
Royaume de Siam avec de riches
Prefens.
III. INSCRIPTION.
L' Afrique humiliée par les frequentes
défaites des Corsaires
d'Alger, de Tunis , de Tripoli , de
Maroc& de Salé , que LOUIS.
XIV. apunis juſque dans leurs Fortereſſes
, vient demander la Paix
au pied du Trône de Sa Majesté...
IV. INSCRIPTION.
L'Amerique ouverte aux Armes
de LOUIS LE GRAND , a esté
leTheatredes Victoires qu'ila rem
portées fur fes Barbares , & des
Conquestes qu'il a faites à S. Chri
stophe, Tabago , &dans toutes les
Isles Antilles
Les quatorze Medailles font
autant de Vertus ou attributs
du Roy , repreſentez par des.
14
MERCURE
Deviſes ou Emblèmes , & expliquez
dans l'Exerque de chaque
Médaille. Comme les Armoiries
fourniſſent le corps le
plus naturel& le plus ordinaire
des Deviſes, on s'eſt fait icy
une obligation d'en tirer quatre
des Lys , qui compoſent les
Armes de nos Rois , quatre du
Soleil , qui eſt le ſymbole du
Roy , & une du Coq , qui repreſente
la France.
I. MEDAILLE.
Le Soleil éclairant tout le
monde avec ces mots , Eclaire
l'Univers. Dans l'Exerque pour
Vertu , Sageffe.
II . MEDAILLE.
Un Lys avec ces mots , Que
Son odeur est douce ! Dans l'Exerqué
, Clemence.
III . MEDAILLE...
Une Luftice tenant la Balan
GALANT.
ce ,avec ces mots , Soûtien des
Loix. Dans l'Exerque , Fustice.
IV. MEDAILLE.
Un Laurier. Pour Ame, Chery
de Minerve & de Mars. Dans
l'Exerque , Liberalité.
V. MEDAILLE .
Un Lys avec ces mots , Des
Mortels l'amour& le plaifir.Dans
l'Exerque , Bonté.
VI . MEDAILLE .
Un Soleil avec ces mots , Il
commande aux Saiſons. Dans
l'Exerque , Puiffance.
VII. MEDAILLE .
Un Coq qui a une patte en
l'air , avec ces mots , La terreur
des Lions. Dans l'Exerque ,vi
gilances
VIII. MEDAILLE '
Un double Foudre en l'air
avec ces mots 3 La terreur des
16 MERCURE
Ingrats. Dans l'Exerque , Fermeté.
IX. MEDAILLE
Un Soleil avec ces paroles ,
Aquirien ne peut refifter. Dans
l'Exerque, Force.
X. MEDAILLE .
Vn Lys avec ces mots , Son
odeur va plus loin. Dans l'Exerque
, Gloire.
XI . MEDAILLE .
Vn Foudre fur un Autel ,
avec ces paroles , foüiffez defon
repos. Dans l'Exerque, Moderation
.
XII. MEDAILLE .
VneCaffolete fumante ſur un
Autel avec ces mots, La gloire
desAutels.Dans l'Exerque,Pieté.
XIII. MEDAILLE .
VnLys,avecun grand rejetton
à droite,&trois autres petits
àgauche,&pour ame ,NôGALANT.
17
:
1
tre fecond espoir.Dans l'Exerque,
- Bonheur.
XIV . MEDAILLE .
Vn Soleil qui parcourt le Zodiaque
, avec ces mots , Il ne
ne peut s'arrester. Dans l'Exerque,
Vaillance.
Dans le milieu de la bordure
, au bas du Portrait, ſont les
Armes de Sa Majesté entourées
des deux Colliers des Ordres
de Saint Michel & du
Saint Eſprit,& ornées de Guidons
, d'Etendards , & de Trophées
, qui jettent des branches
d'Olive , pour marquer la
Clemence de ce Prince , qui a
bien voulu donner la Paix au
milieu de ſes Victoires . Il y a
deux grandes Trompettes qui
accompagnent la Couronne ,
avec deux aifles qui s'étendent
de chaque.coſté , pour porter
18 MERCVRE
les Armes de Loüis LE
GRAND juſques aux extrêmitezdu
monde. Tous ces ornemens
qui font le haut de la
Theſe , font foûtenus d'une ta--
ble d'attente , ou parement irregulier
d'Architecture ' d'un
ordre Compoſite, avec ſa Corniche
, fa Friſe, ſon Architrave
, Colomnes , Pilaftres ,Cha
piteaux , Piedeſtaux & Baſes.
Vn grand Cartouche poſe fur
le milieu de la Friſe , contient
ces mots , A LA POSTERITE'.
Le grand Quadre deſtiné
pour les Theſes , eſt échancré
par le bas , & poſé entre lesPi-
Jaſtres . Il contient quatorze
Theſes ou Concluſions,qui répondent
par ordre aux quatorze
Medailles , & qui prouvent
chaque Vertu ou Attribut du
Roy. C'eſt par cette raiſon
GALANT.
19
1
1
|-
qu'on s'eſt attaché à commencer
la pluſpart des Concluſions
par les paroles de la Deviſe
qu'elles juftifient. Comme les
Theſes font le principal fondement
de tout cet Ouvrage ,
on croit devoir en expliquer
la conduite avec un peu plus
de détail . Le ſtile en eſt affez
particulier , mais cette Philofophie
que nous donnons n'eſtant
pas ordinaire , & ne faifant
que de naiſtre , elle s'eft
trouvée capable de toutes les
formes qu'on a voulu luy donner.
Certaines expreſſions de
Poësie , & d'autres libertez
qu'on ne prendroit pas ailleurs,
en ont rendu les Propoſitions
courtes & ferrées en des en-
- droits & plus étenduës en
d'autres . Tout cela eſt permis
en cette occafion , où l'on doit
د
20 MERCVRE
dire beaucoup de choſes en
peu de paroles . On peut mefme
parler Ecolier , fi cette expreſſionm'eſt
permiſe,pourveu
qu'on le faſſe pour exprimer
plus naturellement les opinions
que l'on propoſe. Nous
n'avons pû nous diſpenſer
d'employer des chifres pour
marquer les jours & les années
de pluſieurs évenemens . Cela
n'eſt pas fans exemple , puis
que nous voyons tant deTheſes
rempliesdeſemblables chifres.
Cependant on ne l'a fait
que lors que les Actions du
Roy ne font pas marquées dans
les autres Médailles dont nous
parlerons dans la ſuite. Cette
Chronologie à fon utilité,&le
Public ne fera peut-eſtre pas
faché de la trouver obſervée
dans cet Ouvrage avec affez
1
GALANT. 21
de ſoin. Les Theſes ont pour
Titre;
CONCLUSIONS
Hiftoriques, & Polit:ques.
QUESTION.
Qui devez - vous eſtimer le
plus Grand de tous les
Monarques de la Terre ?
L
I. CONCLUSION.
OUIS XIV. donné de Dieu
d'une maniere miraculeuse
éclaire l'Univers par les rayons
éclatans de fa Sageffe. Cette Vertu
parut en luy beaucoup de temps
avant l'âgeordinaire. Peut- on dire
qu'il ait manqué une seule fois à
prévoirjusqu'aux moindres évenemens
dans tout ce qu'il a entrepris ?
Qu'on montre un Monarque plus
22 MERCURE
exact à remplir ſes obligations ,
mieux reglé dans sa conduite , &
plus affidu au gouvernement de fon
Etat. Cet Auguste Prince égale.
ment habile dans la paix & dans
la Guerre , est l'ame de fon Cabi.
nct. Ses fecrets font impenetrables.
Il donne autant d'oracles que de
réponſes , & préfere aux divertif.
femens les plus innocens au travail
qu'il devore , pour ainsi dire , afin
de foulager fon Peuple. Confiderez
avec quelle Sageſſe il commença
par le reglement de ſes Finances.
Ensuite ayant racheté Dunquerque,
il ofta aux Etrangers le feul Port
qui leur reſtoit en France , & aux
Corfaires une ancienne retraite
Comparez nos Troupes d'aujourd'huy
avec celles des Regnes précedens
; faites reflexion sur le difcernement
qu'il a dans le choix de
ceux qui lefervent ,fur laforce&
GALANT .
23
fur l'étendue de ſon Genie. Voyez
le bel ordre qu'il a étably dans tout
Son Royaume , & vous m'accorderez
facilement que Loürs XIV . eſt le
plus Sage de tous les Monar.
quesdela Terre .
II.
Quandle Roy paroist armé , c'est
pour obliger des Ennemis à profiter
defa Clemence. Telle fut la Bataille
des Dunes qui fit conclure la
Paix des Pirenées. Combien de fois
LOUIS a- t- ilépargnélefangdes
Vaincus ? Sa Clemence empefcha
le Sac de Valenciennes , ( 1677. )
Sans elle Alger , Tunis , Tripoli ,
Genes, & tant d'autres Places auvoient
esté des buchers de victimes
deuës à la justicedeſes Armes.Am.
ſterdam , la Haye , & le reste de la
Hollande defolée ( 1672 ) &mesme
toute l'Europeferoit encore unTheatre
de feu & de ſang, fi ceGrand
24
MERCURE
Prince nese fust vaincu luy --mesme,
s'il neseSefuft fust arreſté au milieu de
Jes Victoires , en forçant les Ennemis
d'accepter la Paix , & ensuite une
Trève de vingt ans, aprés en avoir
preſcrit les conditions , qui ont rendu
le repos à l'Eglise , & qui font
avoüer que Loüis XIV . eſt le
plus Pacifique de tous les Monarques
de la Terre .
: ΙΙΙ.
Ilfoûtient les Loix par la Juſtice
deſes Ordonnances & de ſes Edits.
Lifez fon Code , qui fait lareglede
nos Juges. Admirez tous les Arrefts
que ce Monarque a rendus , comme
il a puny les Duellistes , les Empoi-
Sonneurs ( 1676. ) & les furiers
( 1680. ) Que dites- vous de ce bel
ordre étably pour l'administration
de la Iuftice ? Montrez - moy un
Etat où la Police ſoit mieux reglée
qu'en France. LeRoy a-t-iljamais
accordé
GALANT. 25
accordéou refusé aucune grace qu'il
ne fust juste d'accorder ou de refuser?
Mais quand vous vous souviendrez
qu'il a jugé luy-mesme contre ses
propres interests dans l'affaire du
Foffe [ 1680. ] dites que Lours
XIV. eft le plus Iufte de tous
les Monarques de la Terre.
IV.
Pour estre chery de Minerve
& de Mars , il faut proteger
les beaux Arts . & recompenser
dignement les Vertus millitaires.
Nos Muſes donneront des loüanges
éternelles à Sa Majesté pour avoir
fait bastir l'observatoire , pris la
protection de l'Academie Françoise
( 1672.) institué celles de Soiffons,
d' Arles, de Niſmes , de Villefran .
che , & d' Amiens . Le Journal des
Scavans , qui a commencé en 1660 .
eft deu à l'amour que cette prote
Etion à inspirée pour les belles con
Janvier 1687 .
B
28 MERCURE
noiffance ; &le Mercure Galant
qui a commencé en 1677. est un
fruitde lagrandeurdefes Actions,
qui en fourniſſent la matiere. Il a
établyl'Academie Royale des Arts
des Sciences , celles de Peinture
& de Sculpture, les Ecoles de Droit
Civil à Paris , ( 1679. ) & de
Droit Françoispar tout le Royaume
( 1681. ) Combien d'habiles Ou
vriers entretenas pour desOuvrages
rares qu'ils ont portez à la derniere
perfection ! Faites reflexion sur le
grand nombre de Sçavans qui font
dans ce Royaume , & fur la politeſſe
que l'on y remarque depuis
vingt ans. Admirez la Magnificence
de ce Prince dans l'Entrée
Jolemnelle qu'il fit à la Reyne Son
Epouse le 26. Aoust 1660. Confiderez
les Cours , les Rampars , les
Arcs de Triomphe , l'Edifice du
Pont Royal les belles Fontaines ,
GALANT.
27
l'elaryiſſement des Rues , le Quay
de la Riviere , & les autres ornemens
ajoûtez à laVille de Paris.
Que pensez-vous des Bastimens
Superbes de toutes les Maiſons
Royales , de ceux du Louvre&de
ceux de Versailles , qui peut paffer
pour une huitiéme Merveille du
monde ? Voyez les belles dépenses
que LOUIS LE GRAND a faites
dans les Carrousels de 1662.1685 .
&1686.les Divertiſſemens de l'Isle
enchantée &de la Paix , avec les
grands Balets , les Machines furprenantes
, & les representations
des Opera ,Sans parler de la ri
cheffe deses Meubles &de la ma
gnificence de sa Cour. Mais fur
tout , accordez- moy que c'est dans
ce Royaume que les vrais ſervices
de la Nobleffefont reconnus parle
rétabliſſement de l'ordre de S.
Lazare ( 1673. ) par l'Institution,
B 2
28
MERCURE
des Compagnies des jeunes Gentilshommes
( 1682. ) & par lafondationde
la Maiſon Royale des Dames
& Demoiselles de Saint Cyr
( 1686. ) Les vieux Soldats , où
ceux qui ont esté estropiez dans le
ſervice , font nourris & foulagez
le reste de leur vie dans l'Hostel
Royal des Invalides , fondé le 14.
Février 1671. Donc Loürs XIV.
eſt le plus magnifique & le
plus Liberal de tous les monarques
de la Terre.
V.
Le Roy est l'Amour & le Plaifir
de ſon Peuple , dont il est le
Pere. Sçavez- vous le grand nom.
bre de Places qu'il a bien voulu
rendre en confideration de la Paix,
&avec combien de bonté il a remis
aux Espagnols trois millions cinq
cens mille livres qu'ils luy devoient
pour les Contributions de la Flan
GALANT.
29
dre ( 1684) & comme il leur a ren_
du deux gros Galions qu'ils avoient
justement perdus dans une défaite
en 1686 ? LOVIS LE GRAND
a delivré jusqu'à preſent plus de
1200. Esclaves de ſes Sujets , &
dedifferentes Nations àAlger,outre
tes 600. qu'il aura de Tripoli , &
tous ceux qu'il doit retirer de Tunis
& de Maroc. Ily a plus ;fa bonté
luy a fait dimnuer les Tailles
de trois millions près de goo . mille
-livres ( 1684. ) donner de grandes.
Sommespour occuperles Pauvres à
des Travaux aussi utiles à leur
miſere qu'à l'ornement des Villes )
1685.) faire des charitez confiderables
pendant la famine de 1662 .
&legrand Hiver ( 1684. ) & une
diminution tres - grande pour ses
Droits fur le bled. ( 1685. ( Ses
mains Royalles occupées à porter
les Sceptre , n'ont pas dedaigné de
B 3
30
MERCVRE
puisfix ansde compofer des Remedes
pour le foulagement , &la
guerifon de ſes Sujets ; & de leur
en donner luy - mesme les fecrets
qu'il a publiez depuis peu , &qu'il
n'avoit achetez que pour fon Peuple.
N'oubliezpas encore cet artifice
benin dont il vient de ſe ſervir ,
pour cacher à toute sa Famille
Royale &àfon Royaume unemaladiequi
le tourmentoit , afin de
nous épargner l'inquietude & la
douleur desçavoir unſi bon Prince
dans les peines. Reconnoiffez donc
de bonne-foy qu'il merite mieux
le nom de tres bon que cet Empereur
Roman à qui on le decerna,
puiſque LOUIS XIV. vray Pere
de la Patrie , eſt le plus Aimable&
le Meilleur de tous les
Monarques de la Terre.
VI.
Il commande aux Saifons ,
GALANT.
34
1
lors qu'il trouve le moyen de faire
la Guerre au milieu de l'Hiver..
Qui pourra comme luy parvenir à
cette puiſſance, d'aſſieger en même
temps quatre Villes tres fortes
( 1672. ) & de faire recevoirfes
Loixen unmesmejour àdeux Places
auſſi confiderables que Strasbourg
& Cazal ? Il a dompté les
Iroquois ( 1665. ) reduit en fix
jours les Algeriens , que tout le
Regne de l'Empereur Charles-
Quint avec sa fortune n'eut pas
Seulement le pouvoir d'intimider.
N'a-t- ilpas contraint les Corſaires
de Tripoli , de Maroc , de Tunis,
de Salé , avec ceux de Majorque
(1681. ) aprés le avoirfoumis, de
respecter nos Vaiſſeaux, &de rendre
tous nos Esclaves ? Confiderez
ce que c'est que de joindre les deux
Mers en Languedoc par un Canal
long de 64. lienës , commencé le 16.
B 4
32 MERCURE
Avril 1667. & achevé dans le
mesme mois de l'année 1681. Faire
construire l'Acqueduc de Main.
tenon pour la conduite des Eaux
de la Riviere d'Eure , ( 1685. )
dont l'édifice furpaſſe tout ce que
les Romains ont entrepris de Semblable.
C'est la puiſſance du Roy
qui l'a fait triompher Sur Mer
des Anglois en 1666. des Hollandois
le ſeptiéme Iuin 1672 .
encore deux fois de la mesme Nation
en 1673. & à Stromboli , en
Sicile , ( Ianvier 1676. ) des Efpagnols
, &des Hollandois devant
Augusta le 22. Avrilſuivant , où
lefameux Ruiter qui commandoit
fut blesséà mort, le deuxième Iuin
de lamesme année devant Palerme
, où l'on remporta la plus glorieuse
Victoire de Mer qui ſe ſoit
veuë depuis la Bataille de Lepan.
te, les Flotes d'Espagne & de
GALANT .
33
Hollande ayant esté défaites , &
enfuite brulée dans le Port , dont
le miserable reste fut vaincu le 3 .
Mars 1677. à Tabago dans l'Amerique,
Dont LOUIS XIV .
eft le plus Puiſſant de tous les
Monarques de la Terre.
VII.
La terreur des Lyons , c'eft
cette vigilance qui fait voir le
Roy , le premier à la teste de ſes
Armées ,moiſſonner des Palmes&
des Lauriers avant que le Printeps
nous donne des fleurs. C'est encore
cette application exacte & reguliere
à gouverner par luy- mesme,
&àtenir tous les joursfes Confeils.
Lefoin qu'il prend de connoiſtreſes
Officiers , de sefaire rendre compte
de tout , & de prévoir dans ledétail
à mille choses qui rendent
- l'execution de defordres plus facile
&plus prompte. N'avons-nous pas
B
34 MERCURE
veû bastir une Galere en dixheu
res ? ( 1679. ) N'est ce pas par les
Soins de Sa Majesté qu'ily a tans
de Gardes & d'illuminations , pour
lafcuretéde Paris?On luy doit auffi
l'établiſſement des Compagnies des
Indes Orientales & Occidentales,&
de plusieurs belles Manufactures;
une Compagnie de Guinée ( 1685.)
avec beaucoup d'autres avantages
procurez à ce Royaume, pouryfaire
fleurir le Commerce avec fuccez.
La Navigation estparvencë à une
telle perfection chez les François,
par la vigilance de LOUIS LE
GRAND , que les autres Nations
L'apprennent de nous , Toutes nos
Provinces ont acquis lafeureté par
la bonté des ports de Mer; par les
armemens des Flotes , par la forti.
fication des Villes frontieres &par
la construction de Saar- Louis ,
d'Huningue, & de Mon- Louis,fans
GALANT. 35
parler de tant defortes Citadelles
basties par les Ordres de LOUIS
XIV. le plus Vigilant de tous.
les Monarques de la Terre..
VIII.
LOVIS prend quelque fois le
foudre en main, pour punir lesingrats,
pour maintenir les droits
desa Couronne , &pour vanger la
foy publique , &le droit des gens
violez ( 1674. ) dans l'Affemblée
de Cologne. Si la Garde Corsea la
temerité d'attaquer un Ministre
Public, le Roy fçait en tirer lafatisfaction
devë àſa dignité obtenant
tout ce qu'ilpourroit pretendre, par
le traité de Pife conclu le 12.Mars
1664. Quelavantage ont rempor
téles Espagnols en refusant le pas
à nostre Ambassadeur à Londres
( 1661 ) finon d'avoir esté obligez
depuis à déclarer publiquement
qu'ils cedentpar tout la préſeauce.
B6
36 MERCURE
:
aux François ? Pourquoy difputer
un titré quine leur appartientplus?
A quoy bon troubler les Habitans
d'Andaye, & donner tant deremifes
aux Negocians de France pour
éviter de conclure l'affaire de l'Indulte
? C'estoit pour faire voir à
toute l'Europe , que la fermeté de
LOVIS LE GRAND fuffifoit
pour maintenirſon titre de Duc de
Bourgongne : ( 1680. )pour remet_
treſes Sujets en poffeſſiou de la Pefche
( 1685 ) & pourfaire trembler
toute l'Espagne en tenant une
grande. Flotte bloquée devant
Cadix ( 1686. ) LeTure a veu les
Corfaires de Tripoly poursuivis&
battusjusque dans. le Port de Chio
( 1681. ) & nostre Flotte victo
rieuse menaçant les Dardanelles ,
porter l'épouvante juſque dans le
coeurde fon Empire. Cespreuvesde
Lafermeté du Roy, &la vigueur
GALANT.
37
defon Ministre en 1677. 1680.
1681. ont obligé le Sultan d'accorder
le Sopha ànostre Ambaſſa .
deur , & d'autres Privileges pour
la Religion Catholique , ce quifait
voir qu'il estime davantage
LOVIS LE GRAND que tous
les autres Monarques enfemble.
Nos Alliez ont aussi goûté les
fruits defa fermeté, lors qu'il leur
afait rendre ( 1679. ) les villes &
les Provinces qu'ils avoient perduës
pendant la Guerre;& toute l'Europe
vient de reconnoistre par la réünion
deplus de 200. Villes fermées 800.
gros Bourgs & 3000. Villages usurpezfurla
Francependant les Revolutions
de ce Royaume, que LOVIS
XIV. eſt le plus ferme de tous
les Monarques à maintenir les
droits de fa Couronne.
IX.
Rien ne peut reſiſter à la for
38 MERCURE
ce d'unRoy Invincible qui s'eft
fait luy même une routeſur le Rhin,
malgré son extréme largeur,farapidité&
ſa profondeur mettant en
dérouteune Armée qui vouloit luy
en disputer le paſſage à Tolvvis ,
& qui fut contrainte de le luy
abandonner ( le 12. Iuin 1672. )
Cet incomparableHeros afiny tresheureusement
plus de 30. Guerre ,
gagné plus de 60. Batailles ou
Combats , borde deſes Conquestes
le Rhin , le Vuahal, la Mofelle,
Meuse, l'Iffel , la Lys , l'Escaut ,
&pris plus de 600. Villes par
Sieges , Traitez , ou protection.
Aprés unfi grand nombre de Conquestes
, que dites- vous de la force
des Places , les croyez vous impre
nables ? Je vous oppoferay suffi
toft Dunquerquel, e Fortde Schein.
Mastreic, Valenciennes , Cambray,
Saint Omer , Ypres , Puicerda ,
la
GALANT
39
Strasbourg , Luxembourg ; & tant
d'autres que vous voyezparmy les
Conquestes d'unRoy toûjours le plus
fort Voulez - vous au contraire
foûtenir qu'iln'y a point de villes
qu'on ne puiffeprendre ? Sans doute
vous avez oublié que nos Ennemis
ont levé le siege devant Voërden ,
& devant Charleroy , ( 1672. )
devant Oudenarde qu'ils affiegoient
avec trois Armées , ( Septembre
1674. ) devant Haguenaus &
Saverne ( 1675. ) devant Augusta
en Scicile [ Ianvier ) devant
Mastreicle 27. Aoust 1676.
&devant Charleroy le 14. Aoust
1677. Accordons nous , & diſons
qu'iln'y a point de Villes imprena
blesfi Loüis les attaque, &qu'elles
ne peuvent estre forcées lorsqu'il
tes deffend. Vous avez aussi que
noſtre Flotte Victorieuse a toûjours
bastu celles de nos Ennemis; mais
40
MERCVRE
euffiezvous cru ,si toute la terre ne
vous en affeuroit que le brave d'Erlingue
avecſonſeul vaiffeau , cust
osé livrer le Combat à 37. Caleres
tant Espagnoles que Genoises
[ 1684. ] & qu'aprés les avoir
battues ,& leur avoir tué 2000 .
hommes , il eust på heureusement
Se retirer dans fon Port. Donc
LOUIS XIV. eſt le plus fort
de tous les Monarques de la
Terre.
X.
Dans les Panegyriques de LOVIS
LE GRAND , je prefere toûjours
laverité toute simple ,à la figure
&aux Allegories. lefuis donc entierement
persuadé qu'il suffit icy
d'establirsa gloirefurſes propres
actions fur des faits connus de
toute l'Europe. Qui oferanier que
l'Empereurn'ait eu beſoin du ſecours
de France , [ 1664. ] pour
GALANT .
4.1
- Sauver la Hongrie & toute l'Alle
magne qui alloit devenir la proye
des Ottomans ? Le Grand Duc de
Moscovie a recherché l'Alliance
du Roy par ses Ambassadeurs
[ 1668. & 1681. ] l'Empereur des
Turcs. [ 1669. ] un Roy de Guinée
[ 1670. ] & le Roy de Siam fait
voir par des Prefens magnifiques ,
& par trois Ambaſſades qu'il envoye
du milieu de l' Afie , [ 1682.]
Octobre 1684. & en Aoust 1686 .
quelle estime ilfait de LOVIS LE
GRAND. Ce Prince qui nese fert
de cette estime que pour le bien de
la Religion , n'a- t- il pas veu un
Souverain àses genoux ? [ 1685. ]
&l'un deses Generaux donner un
Paffeport le 24. Septembre 1677 .
à l'Armée Ennemie beaucoup plus
nombreuſe que la noftre , pourfortir
d'un lieu où elle venoit de ſe ſauver
, après avoir esté battuë ? Le
1
42
MERCURE
grand Gustave qui appelloit ily a
*56 ans les autres Monarques , des
Roitelets en comparaison du Roy
de France , s'il vivoit aujourd'huy ,
ne diroit- il pas avec nous que la
Gloire de LOVIS XIV. ne peut
avoir de bornes , & que c'eſt
avec justice qu'il eſt le plus
eſtimé de tous les Monarques
de laTerre ?
XI.
Ioüiſſez de fon repos , Prin
ces inutilement jaloux d'une gran
deur àlaquellevous neparviendrez
jamais. L'on a refusé les Secours
qu'il offroit figenereuſement ; mais
Sansluy on n'apûaller à la Victoire,
puis qu'ilestoitle Maistre du chemin
qui vous y a conduits.Les droits
que ce Prince avoit fur le Palatinat,
ont - ils esté capables de le
tenter ? Point du tout . Il a cherché
les voyes de douceur ,& fiGALANT.
43
deledanslaparole qu'il avoit donnée
de nepoint agir , il a cedé ses
propres avantages pourne pas interrompre
le cours des vostres. Qui
peut dire qu'il l'a jamais veu en
colere! Ennemy des loüanges & de
la flatterie, toûjours affable , tou
jours patient , &le plus moderé
de tous les Monarques.
X 11.
La gloire des Autels , c'est la
Pieté dont LOVIS LE GRAND ,
adonné, &donne tous les jours de
fi grands exemples . S'est-ilſervy de
Ses avantages lors qu'ila veu l'Allemagne
embaraffée , &ne doit-
-on pas à sa moderation ceux que
vous avezremportez en Hongrie ?
C'est le Deffenseur de l'Eglise, le
protecteur des Evesques , & le
Destructeur de l'Heresie. Ilafourny
de grandes sommes aux Venitiens
( 1658.)pour faire la Guerre qu'ils
44
MERCURE
estoient obligez de foûtenir. Il a
proscrit les Blasphemes & les
Impietezparses Déclaracions &
Edits de 1665.1667 . & 1579 .
L'Eglise a recouvré sa premiere
tranquilité fur les sentimens &
Sur les points delicats de la Religion
,par les foins de ce Monar.
que qui a envoyé des Secours confi.
derables de Troupes en Candie , contre
les Turcs. [ 1668. 1669. ] &
employéfes forces de Mer contreeux
[ 1670. ] Ilareſtably l'exercice
de noſtre Religion dans les Villes
Heretiques d'Orsoy , de Rhimberg ,
de Burich , d'Utrech , & c. [1672.]
de Genève en 1680. & de Strafbourg
en 1681. Ce Prince trespieux
aremis en poſſeſſion de la Garde
du S. Sepulcre les Religieux de
S. François 1677. & leur continue
Saprotection Royale , & fes libera
litezdans toute la Terre Sainte. Il
GALANT .
45
aécrit au Roy de Perſe en faveur
des Catholiques, & en a obtenu tout
ce qu'ila demandé pour nos Miffionnaires.
Les grandes Conversions
qu'il a procurées dansle Royaume
de Siam ,& dans la Chine depuis
pluſicurs années , l'Edit de 1681 .
qui deffend àſes Sujets de quitter
noſtre Religion , & cet autre de
1683. qui oblige les Idolatres qui
venoncent à leurs erreurs , d'embraffer
la Communion Romaine ;
En un mot ce qu'il a ordonné
(1684) pour le reſtabliſſement des
-Eglises & des Presb teres , & ce
Mandementpour faire obſerver la
modeſtie dans les Eglises , 1668 .
tout cela ne montre- t-ilpas laveritable
Pieté de LOUIS LE
GRAND ? Ajoustons , qu'aprés la
Conversion volontaire & libre
de plus defix cens mille Ames reummes
à l'Eglise Catholique depuis
८.
1
45 MERCURE
pinfieurs années , que le Zele , les
Soins charitables , & les belles
Ordonnances du Roy les follicitent
àse convertir , il a revoqué l'Edit
deNantes , fait abbatre tous les
Temples des Huguenots , & aboly
l'Herefie dans fon Royaume, en une
année, ce queses predeceffeursn'avoient
pas fait pendant plus d'un
fiecle: laiſſant àla posterité un bel
exemple dont le Duc de Savoye a
le premierfuivy les traces.Cesgrāds
Services rendusàl'Eglise,fansparlerde
ceux qu'on attend, prouvent
que LO VIS XIV. eſt le plus
Pieux de tous les Monarques.
XIII.
C'est pour les grandes Vertus du
Roy, que Dieu l'a combléd'unjuste
Bonheur , en luy donnant une
nombreuſe. Pofterité Heureux dans
l'Alliance qu'il a faite avec une
Reyneparfaite & remplie desgraGALANT.
47
ces du Ciel : heureux dans un Fils
incomparable , & dans son AuguſteEpouse;
heureux enfin dans un
Frerefelonfon coeur,& dans tou
te Sa Famille Royale qu'il voit
entierement devoüée àſonſervice.
Ses Miniſtresfont vigilans , éclai
rez & fidelles ; ſon Royaumefloriffant
, &Ses Armes invincibles.
Il est chery de fon Peuple, estimé
de toute la Terre, & par tout
Victorieux. Ainsi lors que vous
dites que les Destinsfont pour luy
Sans contrainte , & que c'estparce
qu'ila enchaîné la Fortune qu'ilest
leplusGranddes Rois ,reconnoiſſez
en mesme temps que c'estparsaproprevertu
qu'ilest le plus Grand de
tous les hommes.Voila laſeule raiſon
pour laquelleLoüis XIV . eſt
le plus Heureux de tous les
Monarques de la Terre.
:
48
MERCURE
XIV.
Il ne peut s'arrefter dans la
belle route des Heros ; ce

Prince
Magnanime , nourry dans le fein
dela Victoire. Ses Ennemis mesme
avouent qu'il nese contentepas de
marcher le premier à la teste de
Ses Armées , mais qu'illes mene en
perſonne au Combat & àla Victoire
, d'où vient qu'il est plus besoin
de le retenir que de l'exciter. Sa
Vaillance nene nousfit - elle pas une
frayeurfans pareille , lors qu'aprés
s'estre exposé à mille dangers , &
à des fatigues inconcevables au
Siege de Dunquerque ( 1658. ) il
demeura luy ſeul intrepide pendant
une dangereuse maladie qui
desesperoit tout son Royaume ?
Pouvez - vous fans admiration &
fans larmes penſfer avec quelle
grandeur d'ame LOUIS a fouffert
fis bleffure du 2. Septembre 1683 .
ن م
GALANT.
49
& une Operation accompagnée de
douleurs aiguës ? [18.Νοv.1686 .]
Suivez ce Vainqueur en Franche-
Comté qu'ilprit luy-mesme en dix
jour's au milieu de l'Hyver : & en
Lorraine qu'il soumit en peu de
jours. Il a conquis en personne
foixante- cing Villes en deux mois,
fortifiées dans l'étendue d'onze
Provinces ; Maſtrich , que l'on
eftimoit imprenable, en treize jours:
&les années ſuivantes, Valencien
nes , Gand , & Ypres. Affigeant
la Villede Bouchainen 1676. les
Armées des confederezsenterent
le secours de cette Place. Le Roy
alla au devant , leur presenta la
Bataille qu'ils eviterent par la
fuite, Voulez - vous d'autres Victoi
resremportéesſurTerrepar LOUIS
LE GRAND ? Je vous rapporte
lesprincipales. Cefont les Batailles
ou Combats des Dunes le 14. Iuin
Janvier 1687-
C
50
MERCVRE
7
1658. de S. Godart au paſſage du
Raaben Hongrie le premier Aoust
1664. En 1674. de Zeinzein , de
Molshein , de Senef contre trois
Armées , d'Emſheim , dans laquil.
le vingt mille François défirent
trois Armées de foixante & dix
mille hommes,comandez, par vingt
Princes Souverains , ou de Maison.
Souveraine ; de Mulhausein en
1675. de Turshein , après laquelle
les Confederezfurent chaffez ,&
contraints de repaſſer le Rhin. En
1677. l'onzième Avril celle de
Caffel , remportée par Son Alteffe
Royale , qui defit les Espagnols &
les Hollandois , commandezparle
Prince d'Orange , & prit ensuite
Saint Omer. Les Batailles d'Epoüil.
le en Catalogne , de la Seille , &
d'Auſembourg. Le Combat du Pontà-
Mouflon, &de Koquerberg, outre
vingt- cinq mille hommes perdus
GALANT
par les Allemansdans le Campemět
de Mouzon, En 1678. les Combats
de Rheinsfeld le 8. fuillet , &de
Saint Denis le 14. Aoust . En 1684
le16.Mayle Combat de PontMajor,
au paffage de la Riviere de Tur
Reconnoissezdonc que la Vaillance
du Roy l'a rendu le plus grand
Conquerant & qu'un concours si
heureux de tant de Vertus Morales
Politiques, prouvent invinciblement
que Loürs XI V. eſt
celuy que vous devez eſtimer
lephis Grand de tous les Monarques
de la Terre.
Dans le grand Quadre aux
deux coſtez des Theſes ou
Conclufions hiſtoriques&politiques
, font marquées les
principales Conqueftes du
Roy felon l'ordre des annéess
afin qu'on puiſſe les trouver
tout d'un coup , ε d'une feule
C2
52
MERCURE
veuë , en lifant les autres
Actions de ce Prince . Chaque
conqueſte à ſa marque pour en
connoiſtre la ſituation felonla
Geographie ; cela ſe trouve
expliqué dans un Cartouche
poſe ſous le Quadre.
MARQUES
Pour connoiſtre lafuuation
des Conquestes.
A. Artois , Comté , des Pays-bas
Catholiques.
a Alface , Landgravint , d'Alle
magne.
B Brabant , Duché, des Pays-bas
Catholiques.
CCleves , Duché, en Allemagne.
† Cologne , Electorat , en Alle.
magne.
F Flandres , Comté des Pays.
basCatholiques.
GALANT.
53
GGueldres, Duché, des Provin.
ces Unies .
H Hainaut , Comté , des Pays.
bas Catholiques.
hHollande , Comté, des Provinres-
Unies.b sisodio-seg
L Liege , Principauté , d'Allemagne..
I Luxembourg, Duché,desPaysbas
Catholiques . yo'l fo aist
N Namur , Comté , des PaysbasCatholiques.
O Ovveriffel , Seigneurie , des

Provinces-Vnies.
PPalavinat , Electorat , en Allemagne.
V Vtrecht , Seigneurie des Provinces-
Vnies .
ZZutphen, Comté des Provin
ces.Vnies .
Cesſeize Provinces ont eſté.
le Theatre le plus ordinaire
des Conqueſtes de Loürs Le
54
1 MERCURE
GRAND quoy qu'il en aitfait
beaucoup dans plufieurs autresProvinces
, qui font mar
quées à la fin de chacune de
cesVilles . Ainsi l'on trouvera
peut- eſtre affez d'utilité d'avoir
en fi pend'eſpacelesprint
cipales Conqueſtes ,.l'année
qu'elles ont eſté faites ,& le
Pais où elles font fitnees.d
Principales Conquetes du Roy
1658.
Dunkerque.
Gravelines . A F
Ouderarde. Radioloq F
Menin.
Ypres στον
Commines .
Dixmude.
F
F
23230 F
Graminot , обр
Mortare , Duché de Milan , en
Italie andy
1663
Marfal,en Lorraine.
GALANT.
55
1667 .
La Baſſée .
F
F
Condé....... H
Charle-Roy. N
Bergues.
B
Tournay.
F
Ath. H
Doüay.
F
Furnes. F
Courtray.
Oudenarde.
F
F
Lifle. F
Aloſt,deuxfois .
Armentieres .
1668.0
Beſançon.
Salins .
Dole.
Grais .
Chaſteau de Ioux .
FortSainte Anne .
Et toute la Franche-Comté.
Franche- Comté.
55
MERCVRE
1670 .
Pont-à-Moufſon .
Epinal , Nancy , & toute la Lorraine.
1672 .
Tongres .
L
Vveifer. L
Mafeik. L
Situar . L
Fauquemont,Duchéde Limbourg
Orfoy .
C
Rhimberg. +
Burік. C
Vveſel. C
Rées , & fon Fort. C
Fort de Lippe , en Vuestphalie.
Emmerік.
Locken .
CN
2
Boorkelo . Vuestphalie.
Grool.
Doёtkum .
Vvltz .
Brevvoort.
NNNN
GALANT. 57
Haffelt.
Ommen.
Kempen .
Deventer.
Zutphen.
Doëfbourg.
Fort de Skeink .
Vtreicht .
Muïden.
Naërden.
Elbourg.
Hardervvick .
Hatten .
Amersford .
Vvoërden .
100000ZZCVhhGGGAhh Oudevvarer.
Arnheim . G
Vianem. h
Vvageninghen. G
Rhenéen.. V
Duëſtede.. V
Vvic... Duchéde Limbourg.
C
58
MERCURE
Knotzeinbourg.
Les Forts de Saint André&
de Vvorms .
Iſles de Bomel&du Betv ve, G
Crevecoeur.
Nimegue. G
Grave. purodisoB
Genep.
Bodengrave.
h
1673-
Maſtreick . L
Tout le Comté de la Marcool .
Treves , en Allemagne
Gray.
Vefou .
Beſançon..
Dole.
Salins .
1674-
Principauté de Lure, 10
Chaſteau Sainte Anne
FCraonmcthée-
Fauconnie,& toute la Franche-
Comté.
GALANT.
39
Germeinsheim.
Duren.
Heinsberg
Linnick.
P
P
P
1675 .
Citadelle de Liege.
Dinan ,
Huy.. 1
Limbourg , Ducheal choi
Fort de Monivic ,en Catalogne.
Augufta en Sicile.
Fortde Link.
Condé.
Bouchain.
Aire.
Buillon.
Tôrmiuna..
Scaletra.
LaCroix.
Savoca
I1676.одной поч
Fieumedentſi .
A
510L
SicEilne.
Fort&Ifle de la Caïenne , dans
L'Amerique.
C6
60 MERCURE
1667.
Valenciennes .
HHA
Cambray ,& fa Citadelle . H
Saint-Omer.
Fribourg.
Chaſteau de Bofſfu .
Saint Guillain .
Sarbruk . Lorraine.
A
a
H
H
Forts de Tabago& d'Orange.
Amerique.
FortRouge.
1678 .
Gand
Ypres.
Puycerda.
Levv .
FortdeKiell.
Kampen
FF
Catalogue.
B
a
Landavv, & le ChaſteandeLichtemberg,
en Allemagne.
Aix- la- Chapelle , & tout le
Duché de Iuliers , excepte
laCapisale. 2 i
GALANT. 61
Nuis .
1679 .
t
Minden. Fuestphalie.
1680.
*Charlemont. N
Hombourg, FrontiereduPalatinat
. 4
1681 .
Virton. Baillages du
Chiny. Luxembourg.
Enchimont. L
Strasbourg. a
Et Cazal , Italie, en mesme jour.
1683..
Courtray. F
Dixmude. F
1684.
L Luxembourg.
Cap-de-Quiers, En Catalogne
Famay.
REVNIONS..
Le Comté de Rochefort,
LeMarquiſat d'Arlond
H
62 MERCURE
Herbemont .
Vrbu .
Orchimont.
Revin.
Baſtoine.
LaRoche.
Hoffalize .
Saint Huberti
Marche- en Famine .
Le Neufchateau .
Echternach .
:
La Principauté de Salm , &c.
dans le Luxembourg.
Etles Comtez de Montbeliard,
&de Sponheim, en Allemagne.
Les Colomnes, les Pilaſtres,
& les Feſtons font enrichis de
cinquante huit revers deMé
dailles , qui font autant d'Inf
criptions qui marquent felon
Fordre des années , les principales
Actions du Roy,qui n'ont
pas eſté compriſes en particu
GALANTA 63
lier dans les Theſes On va les
rapporter ſuivant qu'elles font
diſpoſées.
1. Chambre de Iuftice pour
rétablir l'ordre dans les Finan
ces , 1658 .
2.Edit contre les Duels, 1658.
-3. Les Rois de France &d'Efpagne
ſe voyent ,& fignent la
Paix le 7. Novembre 1659 .
4. Acquisition de Dunker+
que, 16621 4
5. Le Roy d'Eſpagne cede
la préfeance à la France ,&le
déclare le 24. Mars 166211
6. Alliance renouvellée avec
les Suiſſes , 1663401 HolgaA
7. Protection accordée au
Comté de Venaiffin , &àAvi
gnóng 166zál - ziabzisi.x
8.Etabliſſement du Commer
eeaux Indes ,16640302.81
9. Piramide élevée àRome ,
64 MERCURE
pour faire fatisfaction au Roy
de l'Infulte de la Garde Corfe
, 1664.
10. Satisfaction faite au Roy
par le Legat , 1664.
11. Victoire ſur les Corfaires .
d'Alger , & de Tunis ,
12. Grands Iours en Auvergne
pour la luſtice , 1665.
13. Protection donné aux
Hollandois contre l'Evefque
de Munſter & contre l'Angleterre,
1666.
14. Paix entre la France & les
Algeriens , 1666. A
15. Pais de Breda avec les
Anglois , 1667.
116. Les Procedures détruites
par leCode, 1667
17. Paix d'Aix - là- Chapelle,
18. Secours de Candie, 1668 ..
GALANT.
65
P
19.LeRoy viſite ſes Conque
ſtes , 1670.& 1683 .
20. Le Roy fait fortifier &
viſité ſes Conqueſtes , 1671 .
21. Les Hollandois forcez
auPoſte d'Ameiden , 1672 .
22. Secours jetté dans Mef.
fine aprés la défaite des Ennemis,
Février 1675 .
23 Defunion des Confederez
, 1678 .
24. Lesdix Villes Imperiales
d'Alface preſtent ferment de
fidelité au Roy 1679 .
こ。
25.Protection& fecoursdonnez
par Sa Majesté aux Rois de
Portugal , 1668. & de Suede
1579.
26. Les Corſaires de Tripoli
battus , puis défaits juſque
dans le Portde Chio: ce quiallarme
le Turc,Juillet 1681 .
27. Les Villes de Strasbourg,
66 MERCURE
& de Cazal foumiſes au Roy ,
le 30. Septembre 1681 .
28.Paix de Maroc,& de Salé,
Decembre 1682 .
29.Alger foudroyé,Juin 1683 .
30. 22. Decembre Luxembourg
foudroyé , 1683 .
31.Les Vaiſſeaux d'Alger brû
lez à Sarcelles 1682.& ces Corfaires
battus pluſieurs fois
1683 .
32. Genes foudroyée , May
1684.
33.La Ville deTréves demantelée
& punie , en luin 1684.
34. Vn de nos Vaiſſeaux
Marchands repris au milieu de
trente-trois autres , 1684.
135. Protection donnée à l'Eveſque
de Liege contre ſes Sujets
rebelles 1684.
36. Tréve de vingt ans accordée
à l'Europe par le Roy ,
1684.
GALANT. 167
37. Paix de Genes , en Février
, 1685 . 2.
38. Tripoli foudroyé , en
Juin 1685.
t
39. Paix de Tripoli , 1685 .
40.L'Ambaſſadeur de France
obtient le Sopha à Andrino .
ple, 1685.01
41. Revocationdel'Edit de
Nantesle 22. Octobre 1685. &
deftruction de l'Herefie par
tout le Royaume , 1685.1
42.LeRoy donne du ſecours
auDucde Savoye pour l'abolition
de l'Hereſie dans ſes
Etats ;& afin de reduire les
Proteftans rebelles des Vale
lées, 1686.
Les deux precedentes Infcriptions
ont eſté poſées fur le
Piedeſtal de chaque Colonne ,
68 MERCVRE
pourmontrer que la Baſe & le
fondement des Actions de
LOVIS LE GRAND , c'eſt la
Religion. Les Feſtons, n'eſtant
ajoûtez que pour l'ornement ,
l'on a crû qu'ils feroient trespropres
à porter les Médailles
qui contiennent les Naiſſances
, les Mariages , & les autres
évenemens de cette forte ,
qui font affez ſouvent repre
fentez par les Fleurs . Cette
précaution nedéplaira pas aux
perſonnes exactes , qui auroient
peut- eſtre trouvé à redire
qu'on enſt meſlé ces faits
avec les autres . L'onn'apas eu
de peine à ſe reſoudre à cette
ſéparation. Il y a tant de belles
choſes à dire du Roy,que nous
ne ſommes pas reduits à la neceffité
d'établir les loüanges de
ce grandMonarqueſurdes efGALANT.
69
fets étrangers . Ainſi l'on a mis
ſa Naiſſance , fon Mariage , les
Enfans qu'il a eus,non pas pour
en faire des ſujets d'Eloges ,
mais pour donner plus d'ornement
à cetOuvrage ,& afin de
ne pas priver les curieux de
ces remarques , qui ont paru
de confequence.
43.Naiſſance du Roy, à onze
heures avant Midy le Dimanche
5. Septembre 1638.4
44. Le Roy déclaréMajeur le
Ieudy 7.Septembre 1651 .
45. Sacredu Roy à Reimsle
Dimanche 7. Iuin 1654.
:
46.Mariage duRoy le 3.Iuin
1660.
47.Naiſſancede Monſeigneur
leMardi àMidi 1.de Nov. 1661
48. Naiſſance de Madame
Elizabethde France , le Samedy
18. Novembre 1662...
70 MERCURE
C
49. Naiſſance de Madame
Marie Anne de France , leDi
manche 16. Novembre 1664.
50. Naillance de Madame
Marie-Thereſe de France , le
Dimanche 2. Ianvier 1667.
51. Naiſſance de MrPhilippes
de Bourbon Duc d'Anjou ,
leDimanches . Aoust 1668 .
52. Naiſſance de Mr Loüis-
François de Bourbon , Duc
d'Anjou , le Mardy 14. Iuin
I1672.daunque seri
53.Mariage de Monseigneur,
le 28. Ianvier 1680 .
354 Naiſſance de Monfeigneur
le DucdeBourgogne, le
Leudy 6. Aouſt zina
55. Naiſſance de Monfeigneur
le Ducd'Anjou , le Dimanche
19.Décembre 1683.1
30 6 Mailfance de Momeigneur
le Ducde Bentyyle Sa
medy31. Aouft 1686.18
1
GALANT.
71-
57. Mariage de Madame la
Princeffe de Conty, le 16. Ianvier
1680 .
58. Mariage de Madame la
Ducheffe de Bourbon , le 24.
Iuillet 1686 .
Voilà un petit crayon du
plus beau Portrait qui fut ja-,
mais. Si l'on trouve que quelque
choſeymanque ,l'on fera
reflexion que ce n'eſt icy
qu'un abregé , qui n'a pucontenir
tour ce que leRoy a fait
de grand depuis vingt - huit
ans .On auroitbien voulu marquer
tant d'Illuſtres, qui ont eu
part aux actions héroïques qui
font aujourd'huy l'admiration
de toute la Terre ; mais l'eſpace
d'une Theſe nous borne, il faut
ſe reſerver pour un plus grand
Ouvrage que l'on medite , &
qui renfermera l'Hiſtoire de
nos Braves aprés celle de leur
72
MERCURE
Auguſte Souverain. Nous ne
craignons pas d'y marcher ſur
la meſme route que les autres
Auteurs. Celle que nous fuivrons
ſera nouvelle; &c'eſtun
bonheur de vivre ſous un Monarque
, dont toutes les démarches
font autant de miracles ;&
qui occupe tellement les Hiſtoriens
, que quelque foin
qu'ils aportent ; ils laiſſeront
encore beaucoup à dire pour
ceuxqui écriront aprés eux.
-Ce n'eſt point affez de vous
avoir donné en Proſe un abregé
des ſurprenantes Merveilles
du Regne du Roy ; il faut
encore vous en faire voir un
Eloge en Vers dans une Eclogue
qui aal'approbationde tous.
ceux qui s'y connoiſſent. Elle
eſt de l'Illustre Madame des
Houlieres..
GALANT
73
Houlieres . Ce nom vous répond
de la beauté de l'Ouvrage.
LOUIS.
EGLOGVE.
Ans les vaftes jardins de ce
charmant Palais
Que les Zephirs , les Nayades&
Flore
Ont résolu de ne quitter jamais ,
Ivis& Celimene au lever de l'Au
rore
Chantoient ainsi LOUIS sous un
ombrage épais.
CELIMENE .
Admirez cet amas superbe
D'Eaux , de Marbres & d'or qus
brillent à nos yeux ,
Et de l'Antiquité ces restes précieux
,
Janvier 1487 . D
74
MERCURE
Cette terre ou naguere à peine
croiffoit l'herbe ,
Qu'humectoit seulement l'eau qui
tombe des Cieux ,
Par le pouvoir d'un Prince en tout
ſemblable aux Dieux ,
Renferme dans ſon Sein mille &
mille Nayades ,
Se pare des plus belles Fleurs ,
Et pour elle Pomone & les Hamadryades
Sont prodigues de leurs faveurs.
LOUIS , plus grand qu'on ne
figure
Le Dieu qui préſide aux Combats,
De cent Peuples vaincus augmente
Ses Estats ,
Mais il est dans ces lieux Vainqueur
dans la Nature.
IRIS.
ParSes rares Vertus vos yeux font
éblouis :
GALANT .
75
Il faut en parler pour vous
plaire,
Onvous voit , quoy qu'on puiſſe
faire,
Revenir toûjours à LOUIS.
CELIMENE .
D'un si juste panchant bien loin de
me défendre ,
Ie fais gloire de l'avoüer.
Iris , il est plus fort qu'on ne le
peutcomprendre.
Mon plus doux plaisir est d'enten-
?
dre
Loüer ce Conquerant par qui ſçait
bien loüer.
Malgrémoy ne pouvant leſuivre
Dans ses prompts & fameux
Exploits ,
Ienepûs me résoudre àvivre
Inutile au plus grand des Rois.
D'unenoble audace animée.
Afa gloire en fecret je consacray
mes jours .
D 2
76 MERCURE
Etpour faire en tous heux volerfa
renommée
,
Des neufsçavantes Soeurs j'imploray
le secours.
Iris , pour ces foins Heroïques
Ie negligeay les autres foins.
Mes infortunes domestiques
En font de fidelles témoins.
IRIS.
Le beau zele qui vous anime ,
Vous empefche de voir quels perils
vous courez ;
Vos veilles , vos transports vous
rendent la victime
De ce Roy que vous adorez.
CELIMEΝΕ.
He! quefais je pour luy que l'Univers
ne faſſe !
Depuis les Climatsoù la glace
Enchaiſne la fureurdes Mers ,
Iufque dans les Climats où l'ardeur
eft extrême ,
Est-ilunpeuple qui ne l'aime ,
GALANT .
77
Et quin'aitpas fur luy toûjours les
yeux ouverts ?
IRIS.
Ie leſcay. Cependant fivous vouliezm'en
croire....
CELIMEΝΕ .
Ah! changez de discours ,vosſoins
Sontfuperflus ,
Avec moy celebrez ſa gloire ,
Ou je ne vous écoute plus.
IRIS.
Hé biens, de ſes hautsfaits rappellonslamemoire.
Qu'ils font beaux , qu'ils font
éclatans !
Il a plus d'une fois foudroyé les
Titans .
Sn pietė remporte une pleine vi-
Etoire
Sur un Monstre orgueilleux que refpectoit
letemps.
Il n'est pour luy rien d'impoſſible ;
Mais il est plus charmant encor
qu'il n'est terrible ,
D3
78 MERCURE
Et jamais fon abord n'a fait de
Mecontens.
CLIMENE .
Ilſe laiſſe attendrir que fans crainte
onfeplaigne ,
Tous les malheureux font oüis .
Quelbonheurd'estre néfousfonaugusteRegne!
Quejesçay biengoûter ce bien dont
jejoüis !
Quels que foient mes malheurs , je
n'envie à perſonne
Le faste & les amis que la fortune
donne,
Chanter LOUIS LE GRAND
borne tous mes defirs.
Ce plaisir où je m'abandonne
Me tient lieu de tous lesplaiſirs.
IRIS.
Vn Rois de ces lointains Rivages.
Que dore le Soleil de ſes premiers
rayons
Pardemagnifiques hommages.
GALANT..
79
1
Confirme de LOVIS ce que nous,
en croyons ,
CELIMENE .
En vain des diverſes Provinces
Qui voudroient se foûmettre aux
Loix de ce Heros ,
Les jaloux & Superbes Princes
S'uniſſent pour troubler fon glorieux
repos.
Si par des efforts tèmeraires
Ils violent la Paix dont LOVIS
est l'appuy ,
Quel Dieu peut lesfauver de ces
vaſtes miferes
Que le fort des Vaincus traiſne en
foule aprés luy!
IRIS.
Quandle Ciel menaçoit une testey
ſi chere ....
CELIMENE. A
Ah! cruelle Iris,taiſez vous;
Ne renouvellez point une douleur
A
amere
D4
80 MERCURE
De tousfes maux paſſez je perce le
mystere.
Il estoit regardé comme un Dieu
parmy nous ,
Et defes facrez droits ialoux
LeCielnousafait voir unefi belle
६ Vie.
Aux infirmitezaſſervie.
Mais enfin que gagna son iniuste
couroux?
LOVIS ne ploya point fous ces
terribles coups.
A quelques projets qu'il s'at
tache,
Quelque foitle peril qui menace
Sesjours ,
Onne sçait où l'hommeſecache.
Maisle Heros paroist toûjours
Pan , ſuivy de plus d'un Satyre ,
A ces mots parut à leurs yeux ,
Et leur donna l'effroy que lapudeur
inspire
GALANT . 81
Au redoutable aspect de cesfola
Stres Dieux.
Souffrez que fous d'heureux préfages,
Nymphe , leur dit ce Dien des
Bois,
Ie méle dans ces verds boccages
Mes doux concerts àvos charmantesvoix.
Chantons leplus aimable &le plus
grand des Rois.
Des Dieux mesmes LOVIS merite
leshommages,
Raſſeurez vos esprits , ne craignez
point d'outrages ,
Le nesuis point icy ce que je fuis
ailleurs,
Ilfaut s'y faire violence ,
De LOVIS l'auguste presence
Est un terrible frein pour les mauvaiſes
moeurs.
Venez donc avec confiance
Chanter encore un Roy qui regue
fur les Coeurs.
DS
81
MERCURE
Ah ! fans la frayeur qui me glace ,
Luy dit lors Celimene avec unfior
foûris ,
J'oferois bien du chant vous disputer
leprix.
Ne condamnezpoint mon audace,
Vos chalumeaux ont d'agreables
fons;
Mais quand LOVIS LE GRAND
anime mes chansons ,
Le le disputerois mesme auDicu du
Farnaffe.
Alors plus viſte que le Fan
Ne fuit l'ardent Chaffeur qui des
yeux le devore ,
D'Iris fuivie elle abandonna
Pan,
Et fut refuer ailleurs au Héros
qu'elle adore.
Le Samedy 14. du mois
paſſe ,Monfieur l'Abbé deReGALANT
. 83
vol foûtint en Sorbonne une
Theſe conſacrée à la deftrution
de l'Hereſie dans ce Royaume.
Il fit voir par là qu'il
ſuivoit les traces de ſes Anceſtres
, qui ſe ſont toujours intereſſez
dans tout ce qui as
regardé la Religion , Mais particulierement
Loüis de Revol ,
premier Secretaire & Miniſtre
d'Estat du Roy Henry IV.
qui dans les Proviſions qu'il
luy fit expedier de cette importante
Charge , le qualifie
hommefidelle , defaine réputation
desintereſſé , &accoûtumé à lefervir
dés ſes premieres années. Il
contribua avec un zele extraordinaire
à la Converſion de
ce Prince , & mourut preſque
auffi - toſt qu'il eut veu l'effet
de ſes conſeils par fa réünion à
l'Eglife, en quoy l'on peut dire
:
D 6
84 MERCURE
qu'il a du rapport avec feu
Monfieur le Tellier , dernier
Chancelier de France , à qui
pour recompenſe de ſes grands
travaux, Dieu adonné la fatisfaction
de finir ſa vie , aprés
avoir ſçellé l'Edit qui porte
la révocation des Privileges:
accordez autrefois aux Heretiques
. Cette Theſe fut foutenuë
en prefence d'un grand
nombre de perſonned'un rang
diſtingué ,&de la plufſpartdes
Abbez confiderables par leur
naiſſance & par leur merite.
La Divine Sapience y eſtoir
repreſentée d'un coſté , élevée
fur des Rochers pour marquer
ſa fermeté. Elle tenoit d'une
main un Livre d'oùpendoient
ſept Sceaux ,& fur lequel paroiffoit
un Agneau. Ce Livre,
repreſentoit celuy que S. Iean
GALANT. 85
décritdans l'Apocalypfe , puis
qu'il en portoit toutes les marques
, qui font les ſept Sceaux
ouverts avec l'Agneau . Ces
fept Sceaux autrefois fermez,
& preſentement ouverts , font
les images naturelles des ſept
Sacremens de l'Egliſe , que les
Calviniſtes refuſoient de reconnoiſtre
pendant qu'ils étoient
malheureuſement en...
gagez dans les erreurs de leur
Secte . Le plus grand des Sacremens
, qui eft celuy de l'Euchariſtie
, y eſtoit particulierementdeſigné
par l'Agneau que
l'on voyoit au deſſus du Livre..
Cette meſme Sapience Divine
tenoit de l'autre main l'Image
du Saint Eſprit ſous la figure
d'une Colombe, pour faire voir
que l'Egliſe a receu du Sau
veur du monde ſonEfprit lors.
86
MERCURE
qu'il eſt monté au Ciel , pour
le faire paſſer juſqu'à ſes Enfans
. Elle estoit habillée en
Amazone , pour nous apprendre
que quelque douceur
qu'aitlaGrace , & de quelques
charmes que ſoit accompagné
le joug du Seigneur , il faut
pourtant quelquefois uſer de
ſes forces , que les Peres appellentune
heureuſe violence.
Du mefme coſté , mais un peu
plus bas, eſtoit le Portrait de la
Verité ſous la Figure d'une
Femme affez agreable & à
demy-nuë , pour marquer
qu'elle ſe preſente àtous ceux
qui la veulent ſuivre.Elle brilloit
des rayons que le Soleil
répandoit fur elle , afin de
faire comprendre , que c'eſt à
la Grace à faire connoiſtre la
Verité ,& que fi elle eſt re
GALANT . 87
connuë de nos jours par ceux
qui estoient ſes plus cruels Ennemis
, la France en eſt redevable
aux foins de l'Incomparable
Monarque qui la gouverne.
Encore plus bas & de
ce meſme coſté , étoit la Iuſtice
ayant devant elle un faiſceau
d'Armes , ce qui repreſentoit
encore mieux que c'eſt à la
Inftice du Roy & à ſes Edits
que nous devons le triomphe
dela Verité ſur le Menfonge..
La Iuftice eſtoit aſſiſe ſur une
grande pierre quarrée , pour
faire voir par l'immobilité de
cette pierre que le fruit & la
gloirede cette grande action
dureront eternellement .
De l'autre coſté on voyoit
Pallasdebout , montrant la SapienceDivine
àuntres -grand
nombre de perſonnes qui for
88 MERCVRE
toient d'une épaiſſe Foreſt ,
par cette Forest on faifoit
entendre les ombres de la
mort dans leſquelles eſtoient
enſevelies tant de perſonnes
qui depuis un an ont renoncé
à l'erreur. Il y en avoit
une entre autres qui ſe profternant
adoroit la Divine Sapience,&
jettoit deux Livres
dont le deſſus les faifoit con
noiſtre pour ceux de Calvin
& de Zuingle. Elle jettoit auſſi
un Maſque pour marquer
qu'elle quittoit toutes les préoccupations
dont elle avoit
eſté prevenuë dés ſa jeuneſſe.
Pallas eſtant la Déeſſe des
Sciences fervoit à faire connoiſtre
l'alliance de la raiſon
avec la foy , & reprefentoit
enmeſme temps les differens
Corps de ceRoyaume qui ont
fourny à l'Eglife dans ces derGALANT..
10
T
rt
0
1
t
niers temps un grand nombre
de perſonnes également pieu- :
fes & fçavantes pour de trom- 1
perlesHeretiques, mais particulierement
la Faculté de
Theologie de Paris , compoſéede
grands Prelats , de ſçavans
Pasteurs & de Miſſionnaires
zelez , qui montrant
la Verité , la portent juſque
dans les extremitez non feulement
de la France ,mais encore
du monde entier.
Monfieur l'Abbé de Revol
s'acquita de cette action avec
beaucoup de fuccez . Il eſt Fils )
de Meffire Pierre de Revol ,
Confeiller du Roy en ſes Conſeils
d'Estat & Privé en fon
Parlement de Mets , Seigneur
des Avenires & Baron de
Charney , cy-devant Procureur
General en la Cour des
१०
MERCURE
Aydes de Vienneen Dauphiné
, & dans la Cour Souveraine
de Bourg en Breffe , &
de Dame Françoiſe de l'Illuſtre
Maiſon de S. Chamans du
Peſcher , qui compte parmy
les Grands Hommes qui en
ſont ſortis pluſieurs Chevaliers
des Ordres du Roy ,& entre
autres Iean de S. Chamans ,
Gouverneur du haut & bas
Limofin , marié à Marguerite
d'Abche de la Maiſon d'Vzez ,
une des plus anciennes du
Languedoc ; Hugues de S.
Chamans , & Helie de S. Chamans
ſon Fils , qui fut fait
prifonnier à la Bataille de S.
Quentin , après avoir donné
mille preuves d'unevaleur extraordinaire
. La Maiſon de
S. Chamans eſt allée à celles
d'Vzez , de Luxembourg , de
GALANT.
91
Turennes , de Noailles , des
Vrfins , d'Hautefort , & des
Princes de Vaudemont , defquels
deſcendoit Aimée de
Ponthalier ,Ayeule de la Mere
de Monfieurl'Abbé de Revol .
Ellea aujourd'huy pour Chef
Monfieur de S. Chamans,Marquis
de Mery , Baron du Pefcher
, & Capitaine Exempt .
de la premiere Compagnie
des Gardes du Corps , dont
tout le monde connoit le merite.
Ie vous ay mandé dans ma
Lettre du dernier mois , que
le Corps de feu Monfieur le
Prince avoit eſté expoſé àFontainebleau
fur un Lit de parade
- pendant pluſieurs jours. Il fut
couvert d'un grand Poële de
Velours noir , croiſe de Moire
d'argent , & mis fur une Eſtra92
MEUERCR
1
de qui estoit drapée de noir , &
qu'on avoit eſſevée de trois
degrez . Il y avoit aux quatre
coins de grands Ecuffons aux
Armes du Prince defunt , en
broderie d'or & d'argent . Le
Manteau de Prince du Sang ,
laCouronne de Vermeil doré ,
le Collier de l'Ordre du Saint
Eſprit , & le Cordon bleu
eſtoient fur un Carreau de
Velours noir au pied du Cercueil
, le tout couvert d'un
Creſpe.Ce Cercueil eſtoit ſous :
un grandDais de Velours noir
à frange d'argent, ornéd'Ecuffons
en broderie , & l'on avoit
mis ſur les degrez de l'Eſtrade
un tres-grand nombre de
Chandeliers d'argent avec des
Cierges. La chambre où fut
mis le Corps eſtoit entierement
tenduë de deüil avec
GALANT.
93
tr
deux lez de Velours ſemez
d'Ecuflons aux Armes du Prince
, & aux deux coſtez de l'Eſtrade
estoient deux Autels ,
fur leſquels on celebra la Meſſe
tout le matin . L'antichambre
eſtoit ſeulement tenduë de
drap , & fur le drap de la porte
il y avoit deux lez de Velours;
l'Escalier eſtoit demeſme , & il
y avoit auſſi deux lez de Velours
, & des Eſcuſſons fur le
devant de la porte , tendu de
drap noir depuis le haut jufqu'en
bas .
Monfieur le Prince de Conty
, choiſy par le Roy pour
allerjetter enfonnomderEau
benite fur le Corps , arriva à
Fontainebleau le 21. de Decembre,
& fut receu à la defcente
du Caroffe parMonfieur
leDuc , à preſent Monfieur le
94
MERCURE
Prince , qui estoit accompagné
de Meſſieurs les Ducde la Tremoüille
& de Coiſlin , Parens,
& environné de ſes Gentilshommes
. Monfieur de Saintot,
Maistre des Ceremonies , conduiſit
Monfieur le Prince de
Conty à un Apartement tendu
de deüil , qu'on luy avoit préparé
, &dans lequel il ſe revêtie
d'une grande robe de deüil.
Lamarche commença de cette
forte.Vingt Suiſſes de la Garde
precedez par un Exempt étoient
à la teſte, ſuivis des Herauts
de Saintonge , deCharolois
, de Picardie & de Rouflil-
Ion , marchant deux à deux
avec leurs Cottes d'armes pardeffus
l'habit de deüil , & le
Caducée couvert d'un Creſpe.
Monfieur le Lievre,Roy d'Armes
de France du Titre de
GALANT.
95
Montjoye Saint Denys , venoit
apres
aprés eux. Il marchoit ſeul , &
ils avoient tous l'épée au côté ,
& le Chaperon en teſte. IlprécedoitMonfieur
Martinet,Ayde
des Geremonies , Monfieur
de Saintot,& Monfieur le Marquis
de Blainville , le premier
Maiſtre , & l'autre , Grand
Maiſtre des Ceremonies . Ils
avoient tous trois des Robes
de deüil traiſnantes ,le Chaperon
en forme , l'épée au coſté ,
& leurs Baſtons àla main .Monſieur
le Prince de Conty marchoit
aprés eux. Il eſtoit accompagné
de Monfieur le Duc
de Chaunes , nommé pour cela
par Sa Majesté , & la queuë
de Sa Robe , qui avoit cinq
aulnes de long , eſtoit portée
par Monfieur le Comte de Matignon.
Derriere ce Prince
96 MERCURE
eſtoient l'Enſeigne & l'Exempt
des Gardes . Monfieur le Prince
accompagné encore de
Meſſieurs les Ducs de la Tremoüille&
de Coiſlin,ayant receu
Monfieur le Prince de
Conty au bas de l'Eſcalier ,
marcha devant luy juſqu'à la
chambre dedeüil,pour luy faire
honneur. Monfieur Martiner
, Monfieur de Saintot , &
Monfieur le Marquis deBlainville
eſtant entrez dans la
chambre , faluërent le Corps .
Monfieur le Prince de Conty
fit la meſme chofe , & ofta fon
Bonnet , aprés quoy il ſe mit à
genoux fur le Prie - Dieu du
Roy, pofé fur un drap de pied
de Velours rouge au piedde
T'Eſtrade . Les Gardes du Corps
fe rangerenttout autour. Alors
Monfieur l'Evefque d'Autun
en
GALANT.. 97
en Habits Pontificaux commença
le De profundis ,que les
Ecclefiaftiques chanterent , &
au milieu de ce Pſeaume Monfieur
le Prince de Conty s'approcha
du Corps , & le falia.
Le Roy d'Armes ayant donné
l'Afperfoir à Monfieur l'Abbé
le Boux , Aumônier du Roy ,
qui estoit er Rochet avec le
Manteau par- deſſus , cet Abbé
le prefenta à Monfieur lePrin
cede Conty, qui jettade feart -1
benite ,& qui ayant encore falue
le Corps , alla fe remettre
au Prie -Dieu.Aprés l'Oraiſon,
qui fut dite par Monfieur l'E
veque d'Autun , ce Prince ſe
retira au même ordre qu'il
eſtoit venu . Les Suiffes marchoient
ddeevvaannttluy ,&& il eſtoit
environné des GGaarrddeess
du
Corps. Monfieur le Prince le
Janvier 1687- E
98 MERCURE
reconduiſit juſqu'au Caroffe
du Roy ,& le vit partir avant
que de ſe retirer.
40 Ie ne vous repete pointles
Ceremonies qui furent faites
lors que Monfieur l'Evêque
d'Autun leva le Corps de la
chambre de deüil,& le conduifit
à Valery. Les Preſtres de la
Paroiſſe de Fontainebleau accompagnerent
le Convoy jufqu'à
l'entrée du chemin de
Moret enpfalmodiant, & marchant
proceſſionnellement aux
deux coſtez du Chariot,autour
duquel eſtoient les Pages à
cheval , & en Manteau long ,
les Valets -de-pied portoient
des flambeaux. Monfieur Sanguin,
Capitaine des Gardes, &
Monfieur le Comte de Lanmarie,
premier Ecuyer, ſuivoient
le Chariot en Manteaux traîBLT
GALANT.
nans , & estoient montez fur
des chevaux caparaçonnez de
deüil . Ils précedoient le Ca /830
roffe du Corps , dans lequel
eſtoient Monfieur l'Evêque
d'Aurun en Camail &en Rochet,
Monfieur leCuré deFon-
■ tainebleau , & Monfieur Lef
net , Abbé de la Victoire , en
Rochet , en Manteau , & en
Bonner carré. Monfieur le
Comte de Moreüil , premier,
Gentilhomme de la Chambre,
du Prince défunt , & d'autres
principaux Officiers , rempliffoient
un ſecond Caroſſe du
Corps , & ces deux Caroffes
eſtoient ſuivis de ceux de
Mtle Prince , de Mrle Duc, &
de Mr le Prince denty. Le
Clergé de Vaude
vant du Coips . 4 chanta les
Prieres ordinaires &Monfieur
E2
100 MERCVRE
l'Evêque d'Autun dit l'Oraifon.
Lors qu'on approcha de
Valery , la Maréchauffée de
Sens parut , & fe mir à la teſte
du Convoy , avec les armes
renverſées .Peu de temps aprés
on vit le Lieutenant General
de Sens, le Prefidial, l'Election,
le Corps de Ville , & les Officiers
du Grenier à Sel , venir
au devant du Corps . Ils l'accompagnerent
juſqu'à Valéry,
où Monfieur l'Eveſque d'Autun
en Habits Pontificaux le
preſenta à la porte de l'Eglife,
Monfieur l'Eveſque de Poitiers
, nommé à l'Archevêché
de Sens , qui estoit auſſi enHabits
Pontificaux. Le Doyen, le
Préchantre , deux Archidiacres
, & fix Chanoines , repreſentant
le Corps du Chapitre
de Sens , accompagnoient ce
GALANT FOL
Prelat, auquel Monsieur l'Evêque
d'Autun parla de cette
maniere en luy preſentant le
Corps .
ONSEIGNEVR ,
Nous venons icy avec encore plus
deregret dans le coeur que de lar
mes auxyeux pour mettre entre vos
mainsle Corps de feu Monseigneur
le Prince, ces tristes restes de tant
de Batailles , & de tant d'actions
Militaires , dont les moins hen
reuſes pourroient faire l'ornement
de la vie des plus grands Heros.
Quand je ferois jchargé de fai
ve l'Eloge de ce grand Prince ,
jem'enferóissuffisamment acquité
en prononçant seulement fon nom
en quelque endroit de la terre que
Se paſſaft cette Ceremonie , puis
que les traits de cette gloire dont
t
E 3
102 MERCURE
1
LOVIS DE BOURBON, a esté comblé,
font trop vifs pour avoir besoin
qu'on en rafraiſch ſſe la memoire,
&que la memoire de ces grandes
actions durera autant que le Monde.
Mais comme ceux qui ont esté
pendantleur vie tes vives images
dela puiſſance de Dieu , deviennent
après leur mort les plus grandes
preuves du neant des Hommes, ces
tristes dépoüilles font à tous les
Conquerans une vive leçon de la
vanitéde ce que l'on trouve en eus
deplus admirable & de plus réel,
puisque c'esttout ce qui nous reste
d'un Prince , qui après avoir esté
capable de conquerir toute la Terre,
n'aplus besoin que d'autant qu'il
enfaut au moindre des hommes ,
Nous vous demandons de le joindre
aux cendres de celuy qui luy avoit
donnéla naiſſance , vous suppliant
d'accorderà ce qu'ily a de vivant ,
GALANT.
103
AcetteAme que Dieuafeparée ,le
fecours que l'Eglise ne refufeàau.
cun deses Enfans. Ce grand Prin
se estoit de ce nombre ,& ce que
vous defirezdemoyen ce moment
MONSEIGNEUR, est que je vous
donne des affcurances& des mar.
ques qu'il merite.oes Prieres,dont
on a plus de beſoin , àmesure qu'on
atenu une plusgrande place dam
le monde , & qu'on y amené une
vie plus éclatante. Vous en avez
déia veu des marques avec toute
la France dansles dernieres années
defa vie; mais la maniere dont il
s'eſt portédans ſes derniers jours à
desirer& Arecevoir les Sacrements
&la ſource des graces , en est encore
une plus grande ,& ceux qui ont
eu l'honneur de recücillir fes der
nieres parotes , &qui connoiſſfoient
la grandeur&les lumieres de ces
te Ame extraordinaire ont tous
7
E 4
104
MERCVRE
lieu de croire que dans ce qu'elle
a fi dignement exprimé de ces
Sentimens , iln'y a rien en qui ne
vinst de cete unique source d'où
découle tout ce qui peut - estre de
quelque prix , & qui peut nous rendre
dignes de paroiſtre devant le
Tribunalde Dien.
Monfieur l'Eveſque d'Autun
ayant finy ce Difcours ,
Monfieur l'Archeveſque de
Sens luy répondit en ces termes
.
MONSBIG ONSEIGNEVR ,
C'est avec une douleur ſemblable
à la vostre & les larmes aux
yeux , que nous nous trouvons icy
pour recevoir le precieux. Dépost
qui doit estre renfermé dans ce
Tombeau. Les actions beroiques ,
GALANT
1
t
&les aimables qualitez du grand
Prince qui fait aujourd'huy le ſujet
de nostre affliction , nous faisoient
Souhaiterqu'il ne mourust jamais;
mais Dieu en a disposé autrement
pour noftre édification & pour fon
Salut , &aprés avoir donnéla vie
de ceHeros pour modelle à tous les
Grands Hommes de la Terre ,il a
voulu encore douner ſa mort pour
exemple à tous les Fidelles. Elle a
efté accompagnée de tant de circon
stances Chrestiennes & édifiant
zes ,&de tant de marques viſibtes
de prédestination , que nous devons
raisonnablement esperer que cet
Auguste Prince fera auſſi élevé
dans le ciel qu'il a esté grand fur
laTerre, Haftons - nous par reconnoiffance&&
ppaarr religion de luy
avancer ce bonheur parnos Prieres.
Ce même Prelat fit les Prie.
ES
106 MERCURE
2
res& les Encenfemens accou
tumez, aprés qu'on cut mis le
Corps fur une Eſtrade de trois
degrez , couvert d'unDais en
forme de Lit à pentes de Velours
noir à frange d'argent. Il
y avoit trois rangs de Chandehers
fur tout le contour de cette
Eftrade , & toute l'Eglife
eſtoir tenduë de noir jufqu'aux
voûtes , avec deux lez
de Velours ornez d'Ecuflons,
Le 23.la Mefle fut celebrée par
Monfieur l'Archevêque de
Sens. Trois Gentilshommes
allerent à l'Offrande . Le Cierge
fut porté par Monfieur de
LaNouë, le Pain par Monfieur
de S. Laurent , & le Vin par
Monfieur de la Mothe Ferenfac..
Les Encenſemens, les Afperfions,&
les Prieres ordinaixes
ſe firent apres la Meffe ce
GALANT..
107
4
ed
qui eſtant achevé , Monfieur
Martinet leva touteslesPieces
d'honneur, que l'on avoit
miſes ſur un carreau de Ve
lours au pieddu Cercueil ..La
Couronne fut donnée à Monfieur
le Comte de Moreüil , le
Manteau à Monfieur le Comte
de Briolle l'épée à Mr le Comte
de Lanmarie , le Cordon bleu
&le Collier à Monfieur le
Marquis de Blanchefort. Enfuite
Monfieur le Lievre,Roy
d'Armes de France, ſe mit fur
le bord du Caveau au côté
droit de l'Autel ,& appella les
Gentilshommes de feu Monfieur
le Prince pour luy venir
rendre les derniers devoirs.
Les Gentilshommes ayant levé
leCorps le porterent à l'entrée
du Caveau. Les quatre
coins du Poële qui le coutroit
estoient foûtenus par
E
108 MERCURE
Meſſieurs de Verveillon ; des
Chapiſeaux , de Cardelan , &
de la Vergne. Le Heraut d'Armes
de France du Titre de
Saintonge eftant décendu dans
leCaveau , y receut le Corps,
fur lequel les trois autres Herauts
, de Charolois, Picardie
&Rouffillon apporterent leurs
Chaperons.Alors le Roy d'Armes
ayant crié trois fois à haute
voix , Le premier Prince du
Sang est mort , appella tous les
Honneurs, & Monfieur de Ferenfac
reprefeniant Monfieur
de Ricouffe , premier Maître
d'Hoſtel de feu Monfieur le
Prince , apporta le Bafton
Monfieur Sanguin apporta ce-
Huy de Capitaine des Gardes ;
Mõſieur le Chevalier de Blan .
chefort le Cordon bleu & le
Collier de l'Ordre ; Monfieur
GALANT.
169
le Comte de Lanmarie , ΙΕ-
pée ; Monfieur le Comte de
Briolle , le manteau ; & monfieur
le Comte de Moreüil , la
Couronne. Le Roy d'Armes
qui receut toutes ces marques
d'honneur , les remit entre les
mains du Heraut du Titre de
Saintonge , & elles furent poſées
fur le Cercueil. Le méme
Roy d'Armes ayant fait avancer
les Officiers ſous la Charge
du premier maiſtre d'Hoſteldu
Princedéfunt, Monfieur
de Ferenſac qui en faifoit la
Charge , leur cria , Que le premier
Prince du Sang, leur Maistre
& le fien, estant mort , Sa Maiſon
estoit rompue ,&qu'ils euffent àse
- pourvoir.Le Capitaine des Gar
des rompit ſon Baſton , ainfi
que le premier maiſtre d'Hoftel
, & l'un & l'autre le poſa
I10 MERCURE
fur le Cercueil. Ces Ceremonies
eſtant achevées , le Roy
d'Armes cria trois fois,Lepremier
Prince du Sang est mort, priez
Dieu pour fon Ame. Auffi -toft
Monfieur l'Archevêque de
Sens jetta de la terre dans le
Caveau ce qu'il fit trois fois..
On dit le De profundis , & l'un
des Herants preſenta l'Aſperfoir
aux. Officiers , qui felon
leur rang jetterent de l'Eaubenite.......
Ie vous ay marqué que le 24-
Monfieur l'Evefque d'Autun ,
qui avoitlevé le Coeur déposé
à la Paroiſſe de Fontainebleau,
eſtoit arrivé icy à la Maiſon
Profeſſe des Iefuites, &l'avoit
remis entre les mains du Pere
Provincial qu'il trouva à la
porte de l'Eglife , à la tefte de
fix-vingts Religieux , ayant
GALANT. túr
chacun un cierge à la main..
Ce cooeur fut mis furune redence
que couvroir un Dais
de Velours noir à frange d'ar--
gent,avecdes Ecuffons enbroderie..
Le lendemain, Feſte de
Noël , le Pere de Villiers ,àqui
Féloquence eſt naturelle , &
qui preſche depuis la Touf
faint dans ceuseEglife,puit occafion
fur les Ornemens lugubres
qu'on voyoit à la Chapelle
où le Coeuraeſté mis, de
faire un Eloge de Monfieur le
Prince , qui charma tous ceux
qui fentendirent. Iln'y a rien
de ſurprenant en cela.Ce Pere
à l'efprit auſſi fin que delicar,
& l'art de Prefoher , que vous
avez veu de luy , vousa
connoiſtre il y a long-temps
qu'il a le talentdefairebriller
par les plus grands traits tour.
fait
1ΠΓΣ MERCURE
ce qu'il veut peindre.Cet Eloge
fut trouvé fi beau , que plufieursde
ſesAuditeurs ont rappellé
ce qu'ils avoient entendu.
lelejuge ainſi par ladiverfité
des Copies qu'on m'en a
données. Ie vay me ſervirde
celle qui m'a paru la plus juſte.
La Morale eſtoit ſur l'obligation
de vivre en Chreftien,&
lePeredeVilliers , apres avoir
étably cette obligation, conclut
ences termes ,
C'est après tout où il en faut revenir.
C'eſt où nous rappellent les
Lumieres de la raison & du bon
Sens. Les plus Illuftres Vie ont joint
toft ou tard la qualité de Chrestie
nes àtoutes les éclatantes qualitez
qui les ont diftinguées ,& quelque
grand que foit un coeur , il n'est
veritablement grand que quand il
oft veritablement Chreftien. ParGALANT.
113
I donnez
e
moy, mes chers Auditeurs ,
fi en vous diſant icy que les plus
grands coeurs ont reconnu toft ou
tard l'obligation , ou plûtoft la ne
ceſſité de vivre chrestiennement ?
Je vous donne lieu de penserà celuy
qui l'asi bien reconnuë , & qui l'a
confefféefi hautement les derniers
jours desavie.Vous voyezde qui
ie parle, & ces lugubres ornemens
qui ont d'abord frappévos yeux,&
renouvellé en vous le triſte ſouvenirde
laperte que la France vient
de faire , vous font bien inger que
ie vousparle du Coeur de ce Prince
Illustre , dont lagloire a effacé celle
desHeros les plusfameux. Maissi
ie vous parle de luy , c'est moins ,
parce que la reconnoiſſancem'a fait
voir que ie devois vous en parlersi
prés d'un jour où l'on nous a
l'honneur de nous confier unfi precieux
Dépost ; c'est moins par le
fait
¥14 MERCURE
plaisir que i'ay cru devoir vousfaire
en louant un Prince qui vous futfi
cher, que par l'utilité quevous ponvez
retirer de fon exemple. Nous
estions accoûtumez à loüeren luy
tout ce que la grandeur du courage
Ode la reputation , tout ce que l'éclat
des plus grandes actions, tout
ce que le nombre des Victoires , tout
ce qu'un esprit au dessus des pliss
fublimes efprits , a iamais púfourwir
de masiere aux loüanges. Il a
toûjours esté l'obiet de nos admirations.
Ila esté long- tems celuy de
nos craintes , mais enfin par la mifericorde
de Dieu , il est devenu
celuy de nostre imitation , & pour
imprimer dansvos efprits les grandesveritezque
j'ay tâché de vous
perfuader dans ce Discours ,je ne
fais pas fcrupule ente finiffant , de
ramuffervos reflexionsfur le coeur
de ce grand Prince ,non pas vel
GALANT.
115
qu'ila esté lors que sesvaſtes projets
balançoient la destinée des
Etats,& des Royaumes ; mais tel
qu'il eſtoit lors que des deſſeins plus
chrestiens & plus folides regloient
Ses paſſions &sa conscience, non
pas tel qu'ila esté lors qu'àla teſte
des Armées ,il mepriſoit la mort
qu'il portoit à nos Ennemis , mais
vel qu'il eſtoit lors que dansunefolitude
chrestierne il eſtudioit la
mort ,pour apprendre , non pas à
la mépriser avec orgüeil , mais à
l'attendre avec humilité ,& à la
recevoir avec confiance. C'est dans
ce dernier estat quevous devez le
confiderer pour vous convaincre de
l'obligation de vivre en Chreftiens,
ou plûtoft ne ſeparezpoint ces deux
états.Regardezle das le plus haut
point de la gloire humaine ou il a
esté elevé , pour voir dans quel
beant le termine cette gloire.Re
116 MERCURE
gardez- le dans les exercices de la
penitence , pour vous persuader
que ce n'est que par là qu'on s'éleve
àunegloireplus noble& plus digne
d'un grand Coeur. C'est la Gloire
immortelle , &c.
Vos Amies voudront bien
permettre queje vous envoye
deux Vers Latins , pour ſervir
d'Epitaphe à cegrand Prince.
Parca, cave ; non Condaum qui
furgit Olympo.
Urnâ Condé,nefas ; non homo ,
Condaus eft.
Voicy deux Sonnets qui ont
eſté faits fur cette mort par
MonfieurMoreau ,Avocat Generalde
la Chambre des Com
ptes deDijon.
GALANT. 117
SUR LA MORT
DE MONSIEURLE PRINCE .
Q
Vanddela mort , Condé fran
chiſſant le paſſage ,
Apréstant de Lauriers moiſſonnez
icy bas
Entra brillant de gloire aux celestes
Climats ,
Tous les Dieux à l'envy , luy rendirent
hommage.
Alcide& Mars vouloient luy ceder
l'avantage,
Maissidans mes travaux , dit-il ,
dans les Combats ,
Fay suivy vostre exemple,& marchéfur
vos pas ,
4
18 MERCURE
Jedois vous fuivre encore,& c'est
là monpartage.
Iupiter pour finirunfs beau differend
,
Venez , Prince , at-il dit , montez
au plushaut rang ,
Vous que l'on redoutoit autant que
monTonnerre.
S'ilest quelqueHeros , s'il estquel
qu'un des Dieux ,
Quiſoit plus grand que vous ,far
Terre , ou dans les Cieux,
C'est moy Seul dans les Cieux ,
LOVISfeulfur la Terre.
t
Sur le meſme Sujet.
C
Ondequin'eut jamais que la
Vertupourguide ,
Dont le bras &le nom portoient
par tout l'effroy ,
GALANT. 119
Cede enfin au deſtin,toûjours grandintrepide,
Dans le Lit de la mort tel qqu'aux
Champs de Rocroy
LaGracedans fon coeur en ce moi
ment preſide ,
Il fçait pour ſon ſalut enfaire un
digne employ ,
Et vole à fon bonheur eternel &
folide,
Auſſi Soumis a Dieu que fidelle à
Son Roy.
Illuftres Conquerans , qui dan
l'Art de la Guerre
N'aspirez qu'à vous rendre immora
telsfur laTerre ,
Tous vos faits éclatans pourle Ciel
nefont rien .
Condé, dont tous les tempt vanteront
la memoire,
f2r0o MERCURE
Vous apprend aujourd'huy la ve
ritable gloire ,
Et qu'un parfait Heros doit mouvir
en Chrestien.
1
La médaille que vous trouverez
icy gravée , vous doit
eftre un preſent fort agreable,
puiſque la face droite vous fera
voir le Portrait de ce grand
Prince. Il eſt à cheval dans le
Revers , où l'on voit un Arc
de Triomphe qu'il a déja pafſe
. On remarque qu'il en montre
le chemin à Monfieur le
Prince fon Fils qui eſt prefque
deſſous, & qui le montre
luy-mefme à Monfieur le Duc
dont il eſt ſuivy. On y lit
ces paroles
Strante.
د
Patre viammon-
Vous n'aurez que le mois
prochain là Copie des Lettres
Patentes i
13
LIOTABOU
LYON
*180 日



GALANT. 121
Patentes , & des Statuts de
l'Academie Royalle d'Angers ,
que j'ay promis de vous envoyer
. Cependant pour ne
pas manquer tout à fait à ma
parole ,je vay vous apprendre
les noms de tous ceux qui
compoſent cette Compagnie.
L
-
LISTE
DES
TRENTE ACADEMICIENS
de l'Academie Royale d'Angers,
nommez pour la premiere fois
parle Roy
Monfieur Arnauld Ever
d'Angers , & Abbé
de ſaint Nicolas , que ſon extrême
application à la condui
te de ſon Dioceze n'a pas em-
Janvier 1487. F
122 MEROVRE
peſché dedonner à ſonClergé
deux Livres de beaux reglemens
pour la diſcpline Eccleſiaſtique.
Monfieur Béchameil ,Che
valier , Marquis de Nointel,
Confeiller du Roy en ſes Conſeils
, Maiſtre ordinaire des
Requeſtes de l'Hoſtel , Intendant
de la Generalité de
Tours , moins confiderable
par ces grands Emplois , que
par ſes lumieres & par fon
erudition.
Monfieur deBeaumont,Chevalier
, Seigneur d'Autichamp
&de Miribel , Lieutenant de
Roy , & Commandant dans la
Ville & Château d'Angers ,
celebrepar lesgrands ſervices
qu'il a rendus dans les Armées
du Roy , avec autant de valeur
quede prudence.
GALANT.
123
Monfieurde Bautru, Chevadier
, Comtede Serrant ,Condeiller
du Roy en ſes Confeils ,
:y-devantChancelier deMon-
Cieur ,Frere unique de fa Mameſté
, heritier du merite ,&de
C'eſprit de Monfieur de Bau
eru fon Pere.
att Monfieur Arnauld ,Abbé de
-Noftre-Dame deChaumes.
"
Monfieur l'Abbé Ménage ,
connu par un tres-grandnomre
de beaux Ouvrages en
lufieurs Langues.
☐ Monfieur Arthand Prêtre
Docteur&Doyende la Facul
ede Theologie dans l'Univerfité
d'Angers , Archidiacre
de l'Eglife Cathedrale ,&
devant Confeiller au Prefidial
de la meſme Ville. La Province
luy eft redevable de deux
Cartes Geographiques tres-
су-
1
124
MERCURE
&
de
exactés du Duché d'Anjou ,
de beaucoup de recherches
curieuſes qu'il a faites fur
l'Histoire Eccleſiaſtique
cette Province, il a fondé dans
I'Vniverſité d'Angers une
Chaire de Theologie.
Monfieur l'Abbé le Peletier,
qui a donné au public une
traduction en François de la
Vie du Pape Sixte V. de l'ItaliendeGregorio
Leti ; une au
tre de l'Hiſtoire de la Guerre
de Chypre compoſée en Latin
par Antoine Maria Gratiani ,
Eveſque d'Amelia , & qui eft
preſt de faire imprimer l'Hiſtoire
de la Chine , qu'il a traduitedu
Latin du Pere Martin
Martini ,lefuite Allemand.
Monfieur Heard,Preſtre,qui
a travaillé à pluſieurs ouvrages
où ſa ſcience & ſa pieté ſe ſont
également fait connoiſtre.
GALANT. 125
Monfieur GohinConſeiller
du Roy , premier Preſident du
Prefidiald'Angers , choiſi par
l'Academie , pour faire cette
année le Panegyrique du Roy.
Monfieur de la Brunetiere ,
Chevalier , Seigneur du Pleſſis
de Geſté , cy-devant Lieutenant
Colonel du Regimentdu
Pleffis Belliere.
Monfieur Bernier , Docteur
en Médecine , fameux par ſes
longs Voyages dans le Levant,
par lesRelatios qu'il en a données
, & par l'abregé qu'il a
fait, enLatin & en François ,
delaPhilofophie de Gaffendi.
Monfieur Charlot , Echevin
perpetuel , cy-devant Maire ,
&Capitaine general de la Ville
d'Angers.
Monfieur de la Bigottierede
Perchanbault Preſtre ,Confeil
F3
116 MERCURE
ler honoraire au Prefidial
d'Angers.
Monfieur Verdier, Confeiller
honoraire au Prefidial
d'Angers , Echevin perpetuel
dela Ville,& ProfeffeurRoyal
du Droit dans l'Univerſité
d'Angers.c
Monfieur Gourreau ,Confeiller
honoraire au Prefidial
d'Angers,Doyendes Echevins
perpetuels , Secretaire de l'Academie,
qui a traduit diverſes
Lettres Latinesdu ſçavantPere
Fronteau , Chancelier de
I'Vniverſité de Paris , & quia
achevé la traduction commencée
par Monfieur de Launay,
du Commentaire poftume de
Monfieur d'Aprineau ſur la
Coûtume d'Anjou , &compofé
quelques autres Ouvrages
de Piete
GALANT. 127
DR . Monfieur de Roye, Docteur
Regent en Droit dans l'Univerſité
d'Angers , qui adonné
au public , un Livre de lure
patronatus , un autre de Miſſis
Dominicis; Inſtitutiones IurisCano-.
nici ,& pluſieurs Traitez fur
diverſes matieres de DroitCi-
( vil & Canonique. Il eſt mort
depuis l'établiſſement de l'Academie.
On a nommé en ſa
place Monfieur Conſtantin ,
grand Prèvoſt d'Anjou , cydevant
Officier dans le Regiment
des Gardes.
Monfieur Guinoiſeau de la
Sauvagere , Conſeiller honoraireau
Prefidial d'Angers .
Monfieur Moreau du Pleffis
, Confeiller au Prefidial
d'Angers , Echevin perpetuel
de l'Hoſtel deVille.
Monfieur Grandet , Con-
:
F4
128 MERCUER
ſeiller au Préſidial d'Angers ,
Echevin perpetuel de l'Hôtel
de Ville , à qui Angers eft redevable
des ſoins qu'il a donnez
, pour folliciter en Cour
l'établiſſementde l'Academie :
&qui a procuré à la Compagnie
du Prefidial les belles
Lettres Patentes , en conſequencedeſquelles
,les Officiers
ont droit de porter la Robe
rouge....
-Monfieur Poquet de Livonniere
, Conſeiller au Prefidial
d'Angers , Autheur des Portraits
des plus fameux Avocats
du Parlement de Paris , qui
ont eſté veus en manufcrit ,
avec une approbation generale.
Monfieur Martineau , Confeiller
& premier Avocat du
Roy au Siege Prefidial d'Angers..
GALANT. 129
Monfieur Martineau dePrincé,
vivant Prévoſt d'Anjou Secretaire
du Roy , Maiſon &
Couronne de France. On a
( nommé pour remplir ſa place
Monfieur Cupis de Teildras ,
Confeiller au Prefidial d'Angers
, Echevin perpetuel , &
cy-devant Maire de la Ville.
Monfieur de Launay,avocat
Rau Parlement de Paris,&Profeffeur
Royal du Droit François
dans l'Vniverſité de la
même Ville , qui a donné au
public un Traitté de la Chaſſe,
quelques Harangues , & des
Notes fur des Autheurs du
Droit Civil..
Monfieur Petrineau,cy-devant
Preſident de la Prevoſte,
Royale , Police , &Confervation
des Privileges de l'Vniverſité
d'Angers , premierEF
!
130 MERCURE
chevin de la Ville, qui travaille
depuis quelque temps à
'Hiſtoire d'Anjou.
Monfieur Frain du Trem.
blay, cy-devant Conſeiller au
Prefidial d'angers , Autheur
d'un Livre contre le leu ; d'un
autre fur la vocation Chrêtienne
des Enfans , de quelquesOuvrages
de controverfes;&
qui eſt ſur le point de
donnerdeuxautres Ouvrages;
l'unde morale & de politique;
l'autre , l'Idéed'unparfaitMagi
ftrat.
Monfieur Nivart, A vocat au
Parlement, à qui le publicdoit
un commentaire de Monfieur
de la Coſte, ſur les Inſtitutes
duDroitCivil :qui a fait plufieurs
Vies de Iurifconfultes ,
&d'autres Ouvrages, non encore
imprimez.
GALANT. 131

Monfieur Bloüin de la Piquetiere
, fort verſé dans la
connoiſſancede l'Hiſtoire , &
des belles Lettres .
Monfieur Daburon, Avocat
au Prefidial d'Angers , Procureur
de Ville , & Docteur aggregédans
l'Vniverſité d'angers
,& tres -diftingué dans le
Barreau.
Monfieur Breillet de la Vi
latte, qui a fait des traductions
de pluſieurs Ouvrages Latins ,
en profe & en Vers , non imprimez
.
Voila un fortgrand nombre
d'Illuſtres qui peuvent compofer
un corps utile au public.
Outre ces trente Academiciens
nommez par ſa majeſté ,
il y aa quelques que autres perfonnes
, qui par les Statuts & les
Lettres Patentes ont entrée
F6
132 MERCURE
dans l'Academie à cauſe de
leurs dignitez , & de leurs
charges , pendant qu'ils les
poſſedent, ſçavoir.
3 Monfieur l'Evêqued'Angers .
- Monfieur le Lieutenant de
Roy de laVille& Chasteau .
- Monfieur le premier Prefident
du Prefidial .
Monfieur le Lieutenant General
de la Senechauffée , &
Siege Prefidial.
Monfieur le Maire de la Ville.
- Monfieur le Procureur du
Roy au Prefidial par un ordre
expedié depuis les Lettres patentes.
Vous avez entendu faire
beaucoup de Contesd'apparitions
d'Efprits, que vous avez
traitez d'imagination& de réveric
,& vous avez en raiſon.
Voicy une Hiſtoire fur ce ſujet
C
GALANT.
33
de
que je vous garantis tres- veritable.
Vne Dame de Province,
jeune & bien faite , demeura
Veuve par la mort d'un
Mary qui luy laiſſa un grand
doüaire ,& peu de chagrin
ſa perte. Quand elle n'euſt eu
qu'un bien auſſi confiderable
que celuy qu'elle avoit , elle
n'euſt aſſurement pas manqué
d'Amans , mais les charmes de
ſa perſonne luy en attiroiena
encore, c'eſtoit pour avoir une
groffe Cour. Parmy ceux qui
s'attacherent à elle , ily en eut
deux qui ſe diftinguerent , &
par leur merite , & par leurs
affiduitez . Le choix dela Dame
euſt pû eftre toûjours incertain
, s'il n'y euſt eu que fa raifon
qui euſt dû ſe meſler de le
faire , car les bonnes qualitez
des deux Cavaliers eſtoient
334 MERCURE
affez égales , mais le panchant
s'en meſla , & la determina à
preferer celuy qui estoitColonel
à l'autre qui ne l'eſtoitpas,
&qui avoit le titre de Comte.
Ce panchant n'alloit pas juſ
ques àla rédre injuſte àl'égard
du Comte ,àqui fon coeurn'etoitpas
fi favorable. Elle connoiffoit
tout fon merite ; elle
l'enft aimé fi elle n'euſt pas veu
Pautre ,& il n'avoit à ſeplaindre
que du je ne ſçay quoy,
mais c'en eſtoit bien affez , car
enfin la tendreſſe n'eſtoit
pas pour luy. Les choses
eſtoient en cet eſtat lors que
les Imperiaux allerent mettre
le Siege devant Bude. Vous
n'cuffiez peut - eſtre pas cru
que Bude ny les Imperiaux
cuffent rien à faire icy.Le Co-
Ionel eut des raiſons particu-
A
GALANT.
135
1
lieres & preffantes pour aller
àce Siege. Vous jugez bien
qu'elles devoient l'eſtre pour
duy faire abandonnerunejolie
Femme , déja fortébranlée
en ſa faveur , & dont encore
un petit nombre de foins &
d'affiduitez auroientpeut-être
entierement achevé la Conquefte.
Ce qu'il y avoit mefme
de plus fâcheux pour luy, c'eſt
qu'il laiffoit auprés d'elle un
Rival redoutable par luy-même
, & qui pouvoitbien ledevenir
encore davantage par
T'abſence du Colonel. Cependant
il partit après avoir pris
toutes les precautions poffibles
contre ce Rival. Il mit les
Femmes de Chambre dans ſes
intereſts , affeura des recompenfes
à des Eſpions , foupira
tres- douloureusement ,&mê-
4
136 MERCURE
me, à ce qu'on dit , pleura auprés
de laDame en la quittant.
On ne sçauroit mettre unmeilleur
ordre à ſes affaires dans un
départ; auſſi y a-t- il apparence
qu'il ne tinſt pas à cela
qu'elles n'allaſſent bien. Ce
qui commença à les faite mal
aller, c'eſt qu'il fut 'tué devant
Bude. Ne vous eſtonnez pas
de cette expreſſion , j'avouë
qu'ordinairement il n'y a rien
de plus mauvais que de mourir,
mais icy ce n'eſt pas de
meſme , il arriva quelque choſede
pis au pauvre Colonel. Il
fut fort regreté de la jeune
Veuve ,& fa bravoure extrêmement
loüée de Monfieur le
Comte qui approuvoit fort
qu'on allaſt à Bude foûtenir
l'intereſt commun de la Chrêtienté.
Il n'oublia rien pour
GALANT 137

S
conſoler la Dame , & à l'avantage
naturel qu'a un Vivant
fur un Mort , il-joi
gnit un redoublement de
foins , qui felon toutes les apparences
devoient toſt ou tard
faire leur effet. Il ne fe voyoit
plus de Rival qu'il euſt lieu
de redouter ; il ne faloitque
faire oublier celuy qui n'eſtoit
plus ; il y auroit eu bien du
malheur s'il n'euſt reüſſi dans
cette entrepriſe . Cependant
le ſuccés euſt pû eſtre un
peu lent fans ce qui arriva.
Peu de jours aprés qu'on eut
rreecceeuu la nouvelle de la mort
du Colonel , la jeune Veuve
dit qu'il eſtoit venu la nuit
faire du bruit dans ſaChambre
, qu'elle l'avoit entendu
tres-diſtinctement , à diverſes
repriſes, & meſme on luy étoit
138 MERCURE
bien obligé de ce qu'elle ne
diſoit pas qu'il luy fuſt apparu.
Ce Comte a qui elle tint ce
diſcours , ne put avoir la
complaiſance de ne la pas
contredire. Il luy ſoſûtint, mê.
me avec quelque forte de dureté
, & d'impoliteffe , ſi l'on
peut parler ainſi , qu'elle ne
devoit attribuer le tout qu'à
fon imagination. Peut- eſtre
il croyoit effectivement ce
qu'il diſoit , & il n'eſtoit pas
content quel'imagination de
laDame fuſt aſſez vive ſur le
chapitrede fon Rival pour ſe
lerepreſenterainfi . Peut-eſtre
auſſi croyoit - il que le Rival
pouvoit revenir en effet ,& il
eſtoitdu moins auſſi fâcheux
pourluy qu'un Mort le vinſt
troubler auprés d'une perſonne
ſur laquelle il ne pouvoit
GALANT. 139
1
guere conferver de pretentions
, & qu'il euſtdû honneſtement
ceder aux Vivans.
Quoy qu'il en ſoit , il avoit
affez de ſujet de chagrin pour
■ nier fortement le retour du
Colonel , & c'eſt ce qu'il fit.
La Dame , naturellement intereſſée
a en garantir la verité,
afin de ne pas paſſer pour folle
, y eut encore un intereft
plus caché & du moins auffi
conſiderable, qui efſtoit de fou
tenir qu'elle estoit bien digne
d'une marque d tendreſſe fi
- extraordinaire ,& du ſouvenir
des gensdel'autre Monde.Elle
trouvoit mauvais qu'on luy
conteftaft cethonneur come fi
elle ne l'euſt pas merité,& elle
en eut un grand démeſlé avec
- l'incredule Comte. La chofe
1
1

140 MERCVRE
alla au point que fur ce qu'il
ditqu'ilne croiroit jamais que
ce qu'il verroit ou entendroit,
elle s'offrit à luy faire voir le
Mort,ou du moins l'entendre ,
& luy permit de venir paffer
une nuitdans ſa chambre , car
que n'euſt-elle pas faitpour lé
convaincre ? Le Comte accepta
volontiers le party , an hazard
d'être batu par l'Eſprit,
qui ne devoit paslny vouloir
dubien; mais il pouvoit auſſi
ſe prefenter quelque occafion
de s'en vanger , en luy faiſant
voir un Rival plus heureux
que luy. Le Cavalier vint , la
Dame ſe coucha ; la chambre
fut bien éclairée ; des Femmes
de Chambre y firent bonne
garde,&luy, qui en attendant
que l'Eſprit arrivaſt de l'autre
Monde, rouloit dans ſa teſte
GALANT. 141
des pensées qui estoient tout à
fait de celuy - cy , ne put trouver
d'occaſion heureuſe . Il
peſta bien contre les Bougies ,
contre les Femmes de Chambre
, & contre la Dame même
qui prenoit des precautions ſi
veritables . Eſtre enfermé une
nuit ſi inutilement avec une
jolie Perſonne , & qu'on aimoit!
Figurez -vous quel chagrin.
LaDame de ſon coſté n'étoit
pas contente , mais c'eſtoit
parce que l'Eſprit ne venoit
point.Ily alloitde fon honneur
qu'il paruſt , ou qu'il fiſt dans
la Chambre quelque fracas digne
de luy ; cependant il n'en
fit rien , & elle ne reçut pas
trop bien les plaifanteries
qu'elle eut à eſſuyer de la part
du Comte , qui traitoit d'un
air fort infultant un Rival
141 MERCVRE
L
mort& qui ne revenoit point :
c'eſtoit deux raifons pour ne
le ménager guere. La Dame
eſpera qu'une autre nuit pourroiteſtre
plus heureuſe,& que
leColonel ne ſe laiſſeroit pas
plus long-temps mepriſer &
elle permit auComte de revenir.
Il y eut quelque petit
bruit cette nuit là , mais pour
dire la verité , ce n'eſtoit pas
le bruitd'un Eſprit. La Dame
eutencore peude fatisfaction ,
&leComte auffi , qui n'en étoit
pas mieux pour ces deux nuits
pafiées auprésdelajeune Veuve.
Cependant le voiſinage
s'aperçut de ces deux nuitslà
, il en courut quelque
bruit fourd , & la mediſance
fit affez de mention du Comte
& point du tout de l'Eſprit.
Le Comte vit aufh - toft l'effer
GALANT. ८
143
avantageux qu'il en pouvoit
tirer. Il fit aller cela juſqu'aux
oreilles de la Dame , & aprés
toutes les preparations neceffaires
, il luy fit entendre que
la réputation commençoit à
| chanceler ; que le Public ne
croiroit rien s'il ne vouloit
ny de l'Eſprit , ny de toutes
les précautions qu'elle avoit
priſes , qu'il n'y avoit qu'un
moyen de fortit biende cette
affaire,& que ce moyen étoit
de l'épouſer. A ce raiſonnement
qui n'eſtoit pas mauvais,
ſe joignoient desdiſcours
pleins de tendreſſe , ſon merite
, & la mort du Colonel.
Qu'euſt fait la Dame ? Elle
eſtoit fortjalouſe de ſa reputation
, elle épouſa le Comte.
Si ce Pauvre Colonel eſtoir
effectivement revenu, il eſtoit
:
136 MERCURE
bien malheureux de n'avoir
pris cette peine- là que pour
hafter le bon-heur de fon Rival
,& s'il n'étoit pas revenu ,
il eſtoit bien malheureux
qu'on l'euſt aſſez aimé pour ſe
le perfuader.
Ie vous envoye encore un
Air deMonfieur l'Abbé. Vous
le trouverez du moins auffi
beau que celuy du mois paffé,
de la compofition de cet Illuſtre
Autheur.
AIR NOUVEAU.
C'est contraire
ànos defirs.
Vient troubler la douceur des innocens
plaisirs ,
Que Flore nous offroit dans la Sai-
Son nouvelle,
Tout
GALANT..
137
Tout répondà mes vaux , Iris est
fousma loy ,
Et l'Amourme répond qu'elle fera
fidelle. টি শুর
Hiver , frimats , glaçons , tout est
Printemps pour moy.
Le 17. du mois paffé le Pere
Quartier, l'un des Profeffeurs
de la Rhétorique au Collegel
de LOUIS LE GRAND , pro-)
nonça une Harangue Latine,
àl'honneur du Roy fur lade
ſtruction de l'Hereſie , dans
laquelle il fit voir avec autant
de juſteſſe que d'Eloquence ,
que la Pieté avoit eſté le ſeul
motifqui avoit inſpiré auRoy
ledeſſein d'une fi glorieuſe entrepriſe
, que la ſageſſe luy
avoit fourny les moyens de
l'executer ,& que le bonheur
en avoit rendu le fuccés tel
Janvier 1687 . G
138 MERCURE
qu'on euſt pû le ſouhaitter.
Monfieur le Cardinal Ranuzzi
avec pluſieurs Prelats & un
grand nombre de perſonnes
d'un rang diſtingué y aſſiſta ,
& fut complimenté par des
Enfans de la premiere qualité.
Tout le monde fortit fort fatisfait
del'Orateur,&particulierement
de ce qu'il loüa ce
Cardinal d'une maniere qui
répondit parfaitement àl'idée
que toute la France a conçuë
de fon merite. Le lieu où ſe
prononça la Harangue eſtoit
orné de quantitéd'infcriptions
&dedeviſes qui renfermoient
tous les moyens dont le Roy
s'eſt ſervy pour détruire l'Herefie
en France. Vn Arc de
triomphe d'un Ordre Tofcan
eſtoiti à l'entrée. La Religion
tenant dans fa main droite un
GALANT. 139
Calice fur lequel eſtoit une
-Hoftie lumineufe , &ayant le
faint Eſprit au deſſus de fa
Teſte , y paroiffoit dans l'endroit
le plus élevé ſur un Char
tiré par deuxChevaux blancs.
On voyoit le Roy fur un Piédeſtal
à coſté d'elle , avec un
Sceptre à la main , pour faire
voir que ſa justice &l'authorité
de ſes Edits ſont les ſeules
Armes dont il s'eſt ſervy pour
detruire l'Herefie qu'on avoie
repreſentée à fes pieds ſous la
figure d'une Hidre. Les Buftes
de Henry IV .& de Louis XIII.
qui ont commencé fi heureu
fement à affoiblir l'Herefie
dans le Royaume , eftoit auprés
de la Figure duRoy. Ce
luy de Henry IV. estoit à la
droite fur un Fronton compos
fé avec cemor, debollavit , écrit
G 2
140 MERCURE
dans la Friſe au deſſous de ce
Fronton.On fçait que ce Prince
affoiblit extrêmement le
party des Heretiques en leur
oftant leur plus ferme appuy,
lors qu'il renonça publique.
mentaux erreurs dans leſquelles
il avoit veſcu juſqu'alors ,
ce qui engagea les Princes de
fon Sang à embraffer comme
luy la Religion Catholique.
Cette action eſtoit repreſentée
dans un Bas- relief en forme
d'ovale , qu'on voyoit dans
l'entredeux des Colonnes avec
cette inſcription, Harefis ejurata.
Le Buſte de Loüis XIII.placé
fur un ſemblable Fronton au
deſſus duquel on lifoit ce mot
dans la Frife , Domust , faifoit
face de l'autre coſté au Bufte
deHenry IV.Ces autres Mots,
Rupella expugnata , marquoient
GALANT.
141
dans le bas Relief entre les Colomnes,
que la priſe de la Rochelle
avoit reprimé la rebellion
des Heretiques , qui s'étoient
retirez dans cette place
avec toutes leurs forces. Un
Cartouche qu'on avoit placé
dans le Fronton de la porte ,
repreſentoit la demolition du
Temple de Charenton avec
ces mots . Edictum Nannetenfe
abrogatum & cet autre mot plus
bas Extinxit , pour faire voir
aquchte Roy a entierement
éteint l'Herefie , en caſſant
l'Edit de Nantes, & en faiſant
détruire ce Temple.Tout l'appareil
de la Salle deſtinée à la
ceremonie , eſtoit diſpoſe par
raport au deſſein de la Haranguequ'on
ydevoit prononcer.
Cette inſcription generale
qu'on liſoit d'abord dans une
G3
142 MERCURE
Frife qui regnoit autour de la
Salle.
LUDOVICO MAGNO.
AUCTA RELIGIONE .
DEFENSA , RESTITUTA,
AMPLIFICATA .
faifoit connoiſtre que cet ap
pareil eſtoit conſacré à la
Gloire de LoUIS LE GRAND,
pour avoir fotitenu les droits
de l'ancienne Religion , reta
bly fon culte dans tous les endroits
du Royaume où l'Herefie
l'avoitaboly , étendu ſes
bornes non ſeulement dans la
France , mais encore dans les
Païs étrangers. Sous un riche
Dais eſtoit le Portrait du Roy,
foutenud'un coſté par la Pieté,
de l'autre par la Sageſſe , tandis
que la Felicité le couronnoit
, ce qui faifoit voir que
la Pieté ainſpiré à ce grand
2
GALANT.
143
JE
eti
1
Al
Monarque le deſſein d'exterminer
l'Hereſie , que la Sageſſe
luy en a fourny les moyens,&
que la Felicité acouronné cet
te glorieuſe entrepriſe . C'eſt
ce qu'exprimoit cette infcription.
EXTINXIT ,
INSPIRANTE PIETATE ,
PROMOVENTE SAPIEΝΤΙΑ
FELICITATE CORONANTE .
A l'autre bout de la Salle , &
vis à vis du Portrait du Roy ,
on voyoit la Religion dans
une attitude qui faisoit connoiſtre
ſa tranquillité . Elle
avoit les yeux arreſtez fur ce
Monarque, comme pour le remercier
du repos qu'elle luy
doit , ce qu'elle exprimoit par
deux Deviſes. Le Corps de
l'une eſtoit une haute Monta-
- gne , éclairée preſque de tous
T
G4
144 MERCURE
coſtez par les rayous du Soleil
lors qu'il s'approche du Midy,
avec ces paroles Italiennes
pour ame , Piu s'inalza , pium'il
luftra ,pour faire entendre que
plus le Roy eſt devenu grand
par ſes Vertus & par ſes Conqueſtes
, plus il a travaillé à
honorer la Religion. Une Vignedevenuë
plus belle & plus
étenduë par l'appuy qu'elle reçoit
d'un grand arbre , faifoit
le Corps de l'autre Deviſe , &
ees mots luy ſervoient d'ame,
Amplificat, fulcit, tutatur& ornat,
ce qui faiſoit voir , que ſi
laReligion s'eſt étenduë fi loin
au dedans & au dehors duRoyaume
, elle en eſt redevable
à la Pieté duRoy.
La Galerie qui regne fur les
trois faces de la Salle , eſtoit
tendue d'une Tapiſſerie de
7
GALANT. 145
verdure fur laquelle on avoit
diſpoſe dix Inſcriptions qui
expliquoient les moyens dont
le Roy s'eſt ſervypourdétruirel
Hereſie en France. La premiere
Inſcription marquoit
( que le Royayant eſté auxHeretiques
les Charges qu'ils pofſedoient
dans l'Epée &dans la
Robe , & les ayant éloignez
du Commerce & des Ecoles ,
avoit rendu l'Hereſie auſſi mepriſable
qu'elle l'eſtoiti lors
qu'elle avoit commencé à ſe
répandre .En voicy les termes.
QUOD
FIECTAM AVLA FORO, CASTRIS.
COMMERCIO , SCHOLIS
HÆRESIMoron
AD NATALES TENEBRAS ,
AC PRIMAM IGNOBILITATEM
DAMNAVIT ..
Cette Inſcription eftoit ex-
G
146 MERCVRE
pliquée par deux Deviſes ,
dont la premiere avoit pour
Corps un Vaiſſeau qu'on décharge
de ſes Marchandises ,
pour le fauver plus aisément
dunaufrage.On y lifoit ces paroles,
Feret iactura Salutem.
- Son Salut viendra deſes pertes .
QuelquesArbres , dont on a
coupé toutes les branches à la
referve de celles qui ſontà la
cime, faifoient leCorps de la
feconde Devifeavec ces paroles,
Ut Calo affurgant.
Afin que vers le Ciel ils puiffent
s'éleven. UO.
La ſeconde Inſcription expliquéepardeuxDeviſes
comme
toutes les autres , eſtoit
conceuë en ces termes ..
A
GALANT 147
QUOD
EXCISIS TOTA GALLIA
FANIS IMPIIS MILLE,
- ERECTIS SACRIS ADIBUS
SEXAGINTA ,
HÆRESEOS FUNDAMENTA
CONVULSIT
RELIGIONIS DITIONEM
inp AMPLIAVITA
DesMontagnes & des Rochers
Jentaffez les uns fur les
autres pour efcalader les
Cieux , & renverfeż par un
coup de foudre , marquoient
les Temples des Heretiques
abatus dans tout le Royaume .
Ces paroles ſervoient d'Ame
à cette premiere Devife ,
Quod contrafuperos extructa.
Contre leCiel ils estoient élevez.
L'autre Deviſe eſtoitle So
leil, qui d'un coſté fait fondre
des Montagnes de neiges , &
G6
148 MERCURE
de l'autre éleve des Vapeurs,
avec ces mots , Hinc destruit,
erigit inde.
S'il abat d'une part , ileleve de
l'autre.
La troifiéme Inſcription
comprenoit par ces paroles
l'éloignement des Miniſtres
qui ſoûtenoient les eſprits
dans les Erreurs de Calvin , &
dont la prefence auroit empeſché
les progrés de laReligion
Catholique.
ICIO QUOD

PULSIS E REGNI FINIBUS
LETIFERE DOCTRINE
MAGISTRIS
SUUM HÆRESIPRASIDIUM
AC SPEM OMNEM ERIPUIT.
La premiere Deviſe eftoit
nne Hydre avec toutes, fes
Teſtes abatues , & des mots
Nequeunt abfsista nocenco
১০
ob
GALANT. 149
1
Separez- les du Corps , leur venin
ne peut nuire.
Dans la feconde on voyoit
l'Aurore diffipans par fa prefence
ces petits feux qui luifent
quelquefois pendant la
nuit , & qui conduiſent inſenſiblement
dans les precipices
, & dans les Rivieres,
Funestos diſſipat ignes.
Leur faux brillant trompoit Son
éclat les diſſipe
Les Enfans des Calviniſtes
que le Roy s'eſt chargé luy-
-même de faire éleverdans la
Religion Catholique , faiſoient
le ſujet de la quatriéme
Inſcription , dont voicy les
termesomolspela r
A
150
MERCVRE
QUOD
AVULSOS AB HARESIS GREMIO
PVEROS
>
IN SINUM AVITA RELIGIONIS
RESTITVIT.
Les deux Deviſes eſtoient,
l'une de jeunes Sauvageons
enterfurde bons arbres avec
cesparoles,illicvenientfelicius.
Ils feront en ce lieu beaucoup
micux élevez :
&l'autre, unebranche de Corail
,qui ne devient precieux
qu'aprés avoir eſté tire de Mer
avec cemot Radicato nulla,fradicato
tutto vale.
:
Delamain quil'arrache il reçoit
cat tout fon prix. погром !
La cinquieme Inſcription
regardoit les avantages que la
Religion Catholique a retirez
des Miſſionnaires que Sa Majeſté
a envoyez dans tous les
GALANT .
151
endroitsduRoyaumeoouù l'Herefie
s'eſtoit répanduë , ce qui
eſtoitmarquépar ces mots.
QUOD
IN SINGULAS GALLIA
PROVINCIAS
MISSIS DIVINI VERBI
PRÆCONIBVS
POPULIS ERRORES MALOS
DEPULIT ,
PRISTINAM RELIGIONIS
SPECIEM
REVOCAVIT.
Elle estoit accompagnée de
ces deux Deviſes . L'Aſtre qui
precede le lever du Soleil avec
ces paroles , Fugat tenebras, lucemque
reducit.
Ilramene le jour en chaffant les
tenebres.
3
Des Phares élevez fur le
borddelaMer, Monftrant portumque
, viamque...
10
152
MERCURE
Ils montrent le chemin , & con
duisent au Port.
La fixiéme Inſcription étoit
fur la bonté avec laquelle le
Roy a receu les nouveaux
Convertis, ſe ſaiſant unplaiſir
de les combler de fes graces ,
afinde ux qui demeuroient
engagez dans l'Hereſie,
à ſuivre l'exemple des autres ,
Voicyles termes de l'Infcription.
porterceux
QUOD
REGIA IN DESERENTES HÆRESIM
LIBERALITATE ,
CÆTEROS AD EANDEM
ABIURANDAM
INVITAVIT .
Les deux Deviſes qui l'expliquoient
, eftoient , la premiere
une Nacre de Perle qui s'ouvre
en meſme temps que le Soleil
levant fait tomber la rofée ,
GALANT.
153
avec ces paroles, Dona viam in
veniunt.
Ses Preſens luy font un passage.
La ſeconde repreſentoit des
Vapeurs élevées par la chaleur
du Soleil , avec ces mots, Etnos
Cælo tua munera tollunt.
Ves bien-faits tout- puiſſans nous
élevent au Ceil.
On connoiffoit par ces paroles
de la ſeptiéme Inſcription ,
QUOD
OBSTINATAM HÆRESIM
SOLO MILITUM STREPITUL
RELIGIONIS DOCILEM
que ſi le Roy aprés avoir employé
les plus doux moyens ,
s'eſtoit veu contraint de recourir
à des remedes un peu plus
forts, on avoit deu plûtoſt l'imputer
àla bonté& à la tendrefſe
qu'il avoit pour ſes Sujets
154
MERCURE
Heretiques,qu'à aucune envie
d'uſer de rigueur contre eux.
Des Chiens qui couroient
aprés des Brebis égarées pour
les ramenerdansle Troupeau ,
faifoient leCorps de la premiere
Deviſe avec ce mot , Vis
amica.
C'est unedouce violence.
L'autre eſtoirunDiamant que
l'on tailloir, avec ces paroles,
Ben mi fa chi mi feriſce.
Qui me frappe mefait du bien.
La revocation de l'Edit de
Nantes eſtoit expliquée en ces
termes dans la huitieme Infcription.
QUOD
AFLICTAM PRÆTERITIS.
CLADIBUS
HÆRESIM
:
EDICTI NANNETENSIS
ABROGATIONE CONFECTI
GALANT.
155
Le noeudGordien coupé par
■ la main d'Alexandre , faifoit le
Corps de la premiere Deviſe
quiaccompagnoit cette Infcriavec
ces paroles , Frustratentaf-
Sent alij .
D'autres envain l'auroient tenté.
La ſeconde estoit une Co
lomne , qui par ſa cheure entraînoit
dans ſa ruine tout un
Edifice qu'elle foûtenoit. Tra .
xit convulfa ruinam 314588
Elle entraîne en tombant tout
le reste aprés foy.
Les deux Deviſes qui accompagnoient
la neuvićme Inſtription
conceuë en ces termos.
QUODEN
CONSTANTI PIETATIS EXEMPLO .
RELIGIONI PONDUS AC
PRETIUM
ADDIDIT
faifoient connoiſtre que leRoy
156 MERCURE
-
a plus fait pour la Religion par
les exemples de ſa pieté , que
par tous les autres moyens
dont il s'eſt ſervy contre l'Herefie.
La premiere eſtoit une
pierre d'Aiman enlevant plufieurs
anneaux de fer , Non vi ,
Sed virtute.
Par sa vertu plûtoft que par la
force
La ſeconde eſtoit le Soleil
avec un Cadran, une Pendule,
une Montre, &c. Omnibus exemplum
est,&regula,
Il est de tous le modelle&larëgle.
La derniere Inſcription mar .
quoit que le zele duRoy pour
la Religion Catholique nes'eſt
pas renfermé dans la France ,
mais qu'il s'eſt étendu dans
l'Europe par l'appuy qu'il a
donnéauxPrinces ſes Voiſins
dans les affaires de laReligion,
GALANT. 157
&meſme dans les Pays les plus
éloignez par les Miffions , &
par les celebres Ambaſſades
qu'il y envoye dans l'eſperance
d'y établir le Culte du vray
Dieu. Cette Inſcription qui ſe
lifoit en ces termes ,
20 QUOD
STABILITATEM INTRA LIMITES
IMPERII GALLICI
RELIGIONEM
IN REMOTISSIMAS ORAS
PROPAGARE
FELICITER PERTENTAVIT .
eſtoit expliquée par ces deux
Deviſes . La premiere avoit
pour corps le Soleil qui du
( centre de l'Univers ou Copernic
le fait immobile , répand ſa
lumiere dans tout le monde.
Hinc totum lucet in orbem.
- De làdans tout le monde il ré-
: pandSa lumiere.
La ſeconde estoit un Fleuve
158 MERCURE
dans ſa ſource. Da' fuoia' remoti.
D'abord aux Siens , enfuite aux
Etrangers.
Ie paſſe à une matiere lugubre.
On m'ecrit de S. Pierre le
Montier,queMonfieur leComte
de Reugny - Tremblay eft
mort depuis quelque temps ,
dans cette Province. Il eſtoit
aifné de ſa Maiſon , avoit bien
ſervy ,& futColonel d'Infanterie
dés l'an 1645. Il avoit eſté
choiſy à la derniere convocation
de l'Arriere - Ban , pour
commander toute la Nobleſſe
de Nivernois ,& il donna dans
ce Poſte des marques de fa valeur
en diverſes occaſions . Ses
Anceſtres qui ſe font toujours
montrez dignes de leur naiſſance,
ontparu dans les plus beaux
Emplois depuis plus de quatre
Siecles.Onm'apprendunecho
E
159
GALANT
fe fort finguliere qui regarde
cette Famille , touchant un
Tombeau qui avoit eſté élevé
dans le Choeur de l'Egliſe de
Dr Saint Martin du Pré , proche
d'Onzy en Nivernois , dans
lequel on avoit mis le corps de
Françoiſe de la Riviere , Femme
de Meffire François deReu!!
gny , Dame d'honneur de la
Reyne Marguerite. Ce Tombeau
étoit toûjours demeuréde
la maniere qu'il avoit eſté conſtruit
juſqu'à l'année 1682.que
le Curé du lieu le fit abatre.On
y trouva le corps de cette Dame
encore tout entier,palpable ,
& tel qu'il pouvoit eſtre le jour
qu'on l'y mit . Ses habies n'étoient
endommagez en aucune
forte, quoy qu'il y euſt 77. ans
qu'elle fuſt morte , comme il
paroiſſoit par l'Inſcription. Ap-
1
MERCVRE
1
paremment on enterroit en ce
temps-là les Perſonnes de qualité
avec leurs habits .Monfieur
le Vicomte de Reugny,Ecuyer
ordinaire du Roy , petit Fils de
cette Dame , ayant ſceu la choſe,
en parla àMonfieur l'Evêque
d'Auxerre. Ce Prelat ſe fit inſtruire
de la verité , & enſuite
ordonna au Curé de faire rétablir
le Tombeau.Quelques -uns
veulent attribuer la conſervation
de ce Corps au foin que
l'on avoit pris de l'embaumer ;
mais d'autres pretendent que
dés qu'un Corps embaumé eſt
mis à l'air , il ſe reduit en pouffiere
, ce qui n'eſt pointarrivé à
celuy-là , qui a eſte expoſé plus
dequinze jours.Si c'eſt marque
de Sainteté, cela donnera bonne
opinion de la Cour de la Reyne
Marguerite..
Le
GALANTA 161
e
b
La de ce Mois mourut icy
Meffire Antoine le Feron, Scigneur
de da Varanne , Doyen
en la Cour des Aides. Sa mort
avoit efté précedée quelques
jours auparavant de celle de
Monfieur le Feron ſon Fils , qui
aeſté Lieutenant Criminel , &
qui depuis avoit este recou
Confeiller au grand Confeil.
Vous ſçavez fans doute la
mort deMeffire Hyacinthe Serroni
Premier Archevêque
d'Albi , arrivée à Paris dans
ſa 70. année le ſeptième de ce
Mois apres une longue maladie,
pendant laquelle elle avoit receu
tous ſes Sacremens avec la
mefme picté& la meſme édification
dont il a donné des marques
dans tour le cours
vie. Il nâquit à Rome le 30 .
Aouſt 1617. Ayant témoigne
Janvier 1487.
A
H
de f
162 MERCURE
:
des fa plus tendre jeuneſſe de
l'inclination pour l'eftat Ecclefiaftique
, le Pape Vrbain
VIII. luy donna l'Abbayede
Saint Nicolas fituée dansRo
me, lors qu'il n'avoit encore
que huit ans. La grace de fa
vocation luy infpira le ſoinde
fe confacrer àDieu par l'Ordrede
S. Dominique , & il s'y
diftingua enpeu de temps par
fa vertu , & par les progrés
qu'il fit dans les ferences . Il
fut digne du Bonnet de Do-
Aeur à la fortiédes Ecoles de
Theologie, &le Pere Mazarin,
Maistre du Sacré Palais ,
freredu Cardinal Iules de cé
nom , premier Miniftre de
France, ne trouva point dans
Romeunplusdigne fujet pour
Paider dans les fonctions de
cette charge , qui demande
GALANT. 163
une érudition finguliere &&&
une grande vigilance dans
ceux qui l'exercent. Le Pere
Mazarin ayant eſté crééCardinal
du Titre de ſainte Cecile
, && nommé par le Roy a
l'Archeveſché d'Aix , pria le
Pere Serroni de l'accompagner.
en France pour ſe ſervir de
ſes conſeils. Son rare merite le
fit bientoft connoiſtre à la
Cour. Le Roy voulut arreſteri
en France un homme qui auroit
eſté l'ornement detous les
Païs ,où Dieu l'auroit deſtiné ,
& Sa Majeſté crut rendre fervice
àl'Eglife en ne laiffantpas
une fi grande lumiere dans
l'obscurité du Cloiſtre. Il fur
nommé à l'Eveſché d'Orange
au mois d'Aouſt 1646. & facré
au mois de May 1647. &peu
de temps apres Sa Majeſte le
H2
164 MERCURE
fitSur-intendantde la Marine.
Il donna dans cet employ des
preuves de ſa capacité pour
les grandes affaires , & de ſa
fidelité dans le ſervice duRoy.
Il fut enſuite envoyé par Sa
Majeſté en Catalogne en qualité
de Viſiteur General &
d'Intendant de l'Armée , &
aprés la ſuſpenſion d'Armes
entre la France & l'Eſpagne ,
le Roy le nomma Commiſfaire
avec Monfieur de Marca alors
Evefque de Couzerans , pour
le Reglement des Limites . 11
ſe fit admirer par les Miniſtres
d'Eſpagne dans cette importante
negotiation qu'il acheva
feul , fon illuftre Collegue
ayant eu ordre du Roy de
refter à Perpignan , & lors que
leRoy l'appella feul à la Conference
de S.Iean de Luz,pour
1
GALANT
165
1
1
y ſoûtenir les intereſts de la
France fur le faitdes Limites
en prefence de Meſſieurs le
Cardinal Mazarin& de Dom
Loüis de Haro , il les menagea
avec une habileté , une prudence
, & un zele ſi extraor
dinaire qu'il s'attira l'admiration
de ces deux grands hom-
-mes , & merita l'approbation
de Sa Majeſté , àqui il venoit
de rendre un ſervice fi confiderable.
LeRoy perfuadé de
fon merite le nomma à l'Eveſché
de Mende au mois de
Mars 1661. & le pourveut de
l'Abbaye de la Chaiſe - Dieu
len . Octobre 162. Enfin voulant
faire érigerl'Egliſe d'Alby
en Metropole , Sa Majesté l'en
nomma premier Archevefque
le 7. Aouft 1676. Il s'eft affurement
rendu digne du juge-
H3
166 MERCVRE
ment avantageux que Lours
le Grand a fait de fa perſonne.
Ilatoujours edifié l'Egliſe
par la piere. Il a fait la guerre
à l'Herebe , & aux erreurs
qui ſe ſont clevées contre la
fainteDoctrine. Il s'eſt appli
qué avec beaucoup de zele
au reglementdes Dioceſesque
Dieu luy a confiez . Il n'en a
quitté aucune qu'après avoir
laiffé des marques de ſes liberalitez
&de fon grand cooeur ,
oudans les Egliſes qui dépendoient
de luy, oudans les maifons
Epiſcopales qu'ila habitées
. Ila fondé& bâty un College
& un Seminaire dans la
Ville de Mende . Il a encore
fonde un autreSeminaire dans
laVille d'Alby dont fa mort
luy a fait laiſſer le Baſtiment
imparfait. Il a fait auſſi des
E GALANTA 367
gu
1は
est
liberalitez confiderables aux
Religieux de la Chaiſe -Dieu
pour agrandir la Nef & embellir
les Chapelles de l'Egliſe
de ſon Abbaye. Ila fait baſtir
un Corps deLogis pour agrandir
auffi la maiſon Abbatiale
qu'il trouva toute ruinée , &
dans laquelle aucun Abbé n'a
voit logé depuis fix vingts
ans. Ila ſqujoindre la prudence
& la moderation àla force
du gouvernement. La multitude
& la difficulté des affaires
,les emplois & les commiffions
dont le Roy la honoré
ne l'ont jamais embaraffény
detourné de ſes exercices or
dinaires dePicté. La grandeur
ne l'a jamais eblouy. Il s'eft
faitaimer univerſellement par
ſa modeſtie , par da douceur ,
par fon affabilité & par fon
H4
168 MERCURE
inclination genereuſe à rendre
ſerviceàſes amis ,& à obligertout
le monde , en meſme
temps qu'il s'eſt fait honorer
par fes grandes qualitez . Il
n'a jamais faitd'actions publiques
qu'il ne ſe ſoit fait admiror.
L'Eloge funebre qu'il fit
de la feuë Reine Anne d'Au
triche , Mere du Roy, de la
quelle il avoit eu l'honneur
d'eſtre le premier Aumônier ,
en prefence de l'aſſemblée du
Clergé : & les Difcours qu'il
a faits dans pluſieurs autres
Affemblées de l'Eglife Gallicane,&
aux Estats de Languedoc
,ont toujours efté accompagnez
des applaudiſſemens
de ces illuftres Compagnies.
Il a fait paroiſtre dans
toutes ces occafions un atta
chementincroyable aux inte-
H
GALANT. 169
reſts de l'Eglife & du Roy, &
on a toûjours remarqué que
s'il avoit le coeur Romain par
l'elevation & par la grandeur
de ſes ſentimens , il avoit les
inclinations toutes Françoiſes
-pourle ſervice de noſtre grand
Monarque , & qu'il n'avoit
point d autre paſſion que celle
de ſignaler de plus en plus fa
reconnoifiance envers SaMajeſté
. Il a ſouhaitté d'eſtre enterré
ſans pompe dans l'Eglife
du Novitiat des Religieux de
S. Dominique du Faubourg
Saint Germain , où il avoit
mis la premiere Pierre. Son
coeur ſera porté dans l'Egliſe
Metropolitaine d'Albi par les
foins de Monfieur l'Abbé de
Camps , nommé à l'Eveſché de
de Pamiers,l'un deſes Execu
H
370 MERCURE
teurs Teftamentaires. Il ne
faut pas douter qu'on ne luy
rende dans cette Eglife tous
les honneurs convenables à
ſa dignite&à ſon caractere.
Mrde laBerchere, Archevêqued'Aix
a efté nommé à l'Archeveſche
d'Albi , vacant par
lamort de ce Prelat. le vousay
parléde luy pluſieurs foissainſi
jene vous repete point ce que
je vousay deja dit de ſa perfonne
& de fon merite.
Le Ieudy 2.de cemoisMonfieur
le Cardinal Langravede
Furſtemberg reçut le Bonnet
des mainsdeSa Majeſté.Monfieur
de Bonneüil,Introducteur
des Ambaſſadeurs,vintleprendreicy
en fon Hoſtel dans les
Caroffes duRoy &deMadame
ła Dauphine , & le menalà
Verſailles avec Monfieur l'AbGALANT.
171
bé Servient, Camerier de fa
Sainteté. CeCardinal ſe rendit
à la Chapelle du Château au
temps de la Meffe du Roy sil
estoit enRochet & en Camail
avec une Soutane violeteMonſieur
leMarquis de Blainville ,
grand Maiſtre des Ceremonies,
le receut à la porte de la Chapelle
& à la fin de la Meſſe
Monfieur l'Abbé Servientayat
preſenté auRoyleBonnet dans
un baſſin de vermeil-doré , Sa
Majesté le mit fur la teſte de
cette Eminence. Perſonne ne
put entendre ce queleRoy dit
en luydonnant le Bonnet; mais
Mõſieur de Furſtemberg en pa
rut tres-content; &fut accablé
de complimens & d'honneſtetez
de toute la Cour. L'aprédi
née Sa Majesté luy donna une
Audience particuliere qui dura
)
H6
172 MERCURE
par a
une heure , & ce Cardinal en
fortit encore tres- fatisfait &
toûjours accable de carefſfes . Il
eur auf Audience de toute la
maiſon Royale , & l'honneur de
baifer Madamela Dauphine en
la faluant , & d'avoir un fiege
pliant chez certe Princeffe , &
confequent àtoutes les autres
Audiences.Il l'eut de Monſeigneur
le Duc de Bourgogne,
deMonſeigneur le Duc d'Anjou
, de Monseigneur le Duc
deBerry,deMonfieur ,deMadame,
de Monfieur le Duc de
Chartres & de Mademoiselle,&
ce fut Monfieur de Bonneuil
qui le conduifit par tout. Madame
parla long-temps Allemand
avec luy ,& dit auxDames
qu'elles voudroient bien
qu'elle fe donnaſt ce plaifir ,
puiſqu'il y avoit long- temps
GALANT
173
qu'elle n'avoit parlé cette Langue.
Comme Monfieur le Car
dinal Landgrave de Furſtemberg
eft generalement aimé , if
fut recen par tout avec joye ,
& comblé d'honneſtetez . le ne
vous dis rien de ſa perfonne ny
de fa maiſon , vous en ayant
déja parlé pluſieurs fois .
Le Samedy 18. de ce mois les
trois Princes furent baptiſez
dans la Chapelle du Château
I de Versailles , par Monfieur l'Evêque
d'Orleans premier Au-
- mônier du Roy , en prefence
de Monfieur Hebert Curéde la
Paroiffe. Madame la Maréchale
de la Mothe , Gouvernante des
Enfans de France , les porta au
Baptefme que fa Majefte voulut
qui fe fift fans ceremonie , mais
ce qui n'eſt point Ceremonie
pour la Cour de LOUIS LE
174 MERCURE
GRAND , en ſeroit une tres,
confiderable en tout autre lien ,
puis qu'on ne peut rien voirde
plus magnifique que lors que
toute la Maiſon Royale eſtenfemble
, fur tout quand elle eft
parée , & que tous les Princes
&Princeſſes ont leurs Habits
enrichis de Pierreries , ce qui
arriva le jour duBaptefme . On
avoit quitté le deüil, ſeulement
pour ce jour-là , & la magnifieence
des Habits fut portée au
dernier point. Monſeigneur le
Ducde Bourgogne fut tenu par
leRoy & par madame ,& nommé
Loüis. Monſeigneur le Duc
d'Anjou fut tenu par Monfieur
& par mademoiselle , & nommé
Philippe,& monſeigneur leDuc
de Berry fut nommé Charles &
tenu par Monfieur le Duc de
Chartres , & par Mademoiselle
GALANT. 175
d'Orleans.Sa Majesté fitde gran
tt des liberalitez en confideration
de ce Baptefme..
on l'aurois à remplir un Volume
de tous les Te Deum qui ontefté
chantez en action de graces pour
-le retabliſſement de la Santé du
Roy. Ainfije vous parleray ſeulement
de quelques-uns . Le 7.
de ce mois les Chefs Conduteurs
des differens -Ouvrages
des Gobelins firent faire des
Prieres folemnelles pour ce fu
jet , dans l'Egliſe de Saint Hippolite
leur Paroiffe , &donnerent
dans cette journée tous les
temoignages dejoye qui accompagnent
ordinairement les Ré+
joüiſſances publiques , en con-
I fervant neanmoins le caractere
d'une piete vrayment chreſtienne
, qui estoit le principal but de
leur action. Lematin àla pointe
176 MERCURE
du jour on fit une Salve de Boё-
tes pour annoncer cette grande
Feſte , & avertir ceux qui devoient
y prendre part ,de ſe rendre
à l'Eglife . Elle ſe trouva magnifiquement
parée , & l'Autel
quoy que fort enrichy , ornéd'une
maniere ſimple & noble , qui
marquoit bien que c'eſtoit des
gens de gouft & de deſſein , qui
en avoient pris foin; le Portrait
de Sa Majefté eſtoit expoſé au milieu
de l'Eglife. Le Service commença
fur les dix heures par
l'Expoſition du Saint Sacrement ,
apres quoy la Meſſe fut chantée
en Muſiquede la Compoſition de
MonfieurOudot. Aprés la Meſſe
on fit une feconde ſalve de Boëtes
, pour avertir les Pauvres de
venir à la diftribution de mille
pains qui ſe fit à la porte de l'Eglife.
Le Service recommença fur
E
177
GALANT
les deux heures par un ſçavant
Panegyrique du Roy que fit le
Pere Menestrier , Iefuite, qui prit
pour texte , DominefalvumfacRegem.
Il y fit briller également la
pieté& l'éloquence,& le finit par
( ces mefmes mots , Domine fatoum
fac Regem, ce qui plut & toucha
beaucoup , & parut du temps..
Apres ce Panegyrique on chanta
les Vefpres & le Salut , auſſi en
Muſique. Le Salut fur fuivy du Te
Deum, & le foir ſur les huit heu
res ,on fit faire une troifiéme
falve de Boëtes , pour avertir le
Peuple de venir prendre part àla
Réjouiſſance d'un grand feu que
l'on dreſſa devant la porte de la
Maiſon Royale des Gobelins , où
l'on abandonna une piecede Vin,
qui fut beuë avec de grandes acclamations
de joye pour l'heureux
rétabliſſement d'une Santé
ſi precieuſe à l'Etat.
178 MERCURE
Les Auguſtins Deſchauſſez ;
appellez communement les Petits
Peres , eſtantde Fondation Roya
le, ſe crurentd'autant plus obligezdedonnerdans
cette occafion
des marques publiques de leur
joye , qu'ils reçoivent tous les
jours de nouveaux bienfais deSa
Majesté.Ainſi apresavoirditplu.
fieurs Meſſes pour le Roy durant
fon incommodité,& fait pluſieurs
Prieres qu'ils conclurent par une
Neuvaine folemnelle ,où le Saint
Sacrement fut expoſe à tous des
Saluts ,& où ils curent la confo
lation de voirtoutleur Quartier ,
qui n'eſt pas un des moins peuplez
de Paris , venir ſe joindre à
eux pour demander auCiel l'entiere
guerifon de ce Monarque ,
fçachantqueles voeux de toute la
France ,& les leurs enparticulier
avoient eſté exaucez , ils en vou
GALANT
179
Jurent remercier Dieu publiquement.
Le 9. de ce mois fut choiſy
pour ces actions de graces ,&dez
le matin ils le firent connoiſtre
parune décharge de trente Boëtes.
Le foir ils firent chanter leTe
Deam. La Muſique& la Sympho
nie eſtoient de la compofitionde
Mr Luder, Officier ordinairedela
Muſiquedu Roy. Il yeut une tri
plefalvedecentcinquanteMoufquetaires
que Monfieur Stoup
Colonel du Regiment des Gardes
Suiffes ,avoit envoyez dans leur
Court. La premiere ſe fit au com
mencement duTe Deum , la fecon
de à la fin ,& la troifiéme aprés la
Benediction du Saint Sacrement.
Ces trois Salves furent faites au
bruit des Tambours & des Fifres ,
de trois Compagnies dont on
avoit tiré ces détachemens , & la
derniere fut ſuivie d'une déchar
180 MERCVRE
ge de cent Boëtes que ces Religieux
avoit fait ranger dans leur
Iardin. Leur Egliſe eſtoit toute illuminée.
. Le lendemain les Officiers &
Cavaliers du Guet à Cheval ,
créez par Sa Majesté pour faire la
Ronde pendant la nuit dans cette
grande Ville , firent faire dansla
meſme Egliſe une pareille folemnité.
LeTe Deum y fut chanté par
la meſme Muſique , & finit par
une décharge de Boëtes accompagnée
de plufieurs douzaines de
Fuſées volantes . Monfieur le Marefchal
Duc de la Feüillade qui
prend part à tout ce qui ſe fait
pour la gloire du Roy aux environs
de la Placé des Victoires , &
particulierement dans l'Egliſe de
ces Peres dediée à Noftre -Dame
des Victoires , voulut partager
leur joye en faiſant allumer le
GALANT. 181
foir de grands feux dans la Place ,
tirer des Boëtes par trois décharges
,
&diftribuer du vin à tous les
Paſſans qui y venoient en foule
crier Vive le Roy. Ces Réjoüiffances
durerent trois jours affez
avant dans la nuit , les Peuples y
donnant à l'envy les uns des autres
des marques du plaifir qu'ils
reffentoient de la parfaite gueri
fon duRoy.p
Ie vous ay deja parlé dans ma
quatriéme Lettre du Voyage des
Ambaſſadeurs deSiam en France ,
du Te Deum qui a eſté chanté aux
Feüillans pour la mefme occafion;
mais ne vous en ayant dit que ce
qui regardoit les Ambaſſadeurs,je
vay vous en entretenir plus au
long. Ces Peres voulant recon
noiſtre les bontez que le Roy a
pour leur Congregation , & particulierement
pour leurMonafter
182 MERCVRE
re Royal de la Ruë S. Honoré , &
Monsieur deLully , qui n'eſt pas
moins redevable à ce Prince, voulantde
fon coſté donner des marques
de ſa reconnoiſſance,&defa
joye, s'eftjoint à eux pour les faire
éclater. Iladonné fa Muſique , &
fait toute ladepenſe qui la concer
noit; de meſme que les Feüillans
ont fait de leur coſté toute celle
qui a regardé laDecorationdel'Eglife.
Elle ne pouvoit manquerd'e
tre belle &debon gouft,puisqu'ils
avoient pris & fuivy les avis de
Monfieur Berrin. L'Egliſe eſtoit
toute tenduë de tres - riches Ta
pifferies , & remplie de pluſieurs
Luftres & Girandoles , avec des
Plaques&des Bras d'argent tour
antour. Le Maistre Autel eſtoit
éclairé parun nombre infiny de
Clerges , de Bougies & de lampes
,qui remplifioient uneGloire
GALANT. 183
qui estoit au deſſus du Tabernaele.
Au milieu de cette Gloire on
voyoit deux Couronnes dePiereries
.La plusélevée repreſentoit
ineCouronnede gloire ou Cou
onne immortelle , & eftoit toute
emée d'étoiles faites de Rubis. II
avoit aux deux coſtez de l'Autel
eux Obeliſques de quinze pieds
le haut chacun. Ils estoient tout
souverts de lumieres,&éclairoiét
les Chifres de Sa Majesté formez
le Pierreries ,qui estoient au miieu
de ces Obeliſques . Le matin
lu jour que cewe Ceremonie ſa
levoit faire, les Feüillans donnétent
un pain,& une chopine de
vin àune tres-grande quantitéde
Pauvres ,8c firentleſoir la même
diſtribution. L'empreffenient fut fi
grand pour voir cette Eefte ,à
cauſe du ſujet& des perſonnes qui
s'en meſloient , qu'encore qu'elle
184
MERCVRE
ne deuſt commencer qu'à quatre
ou oing heures du foir , pluſieurs
perſonnes vinrent retenir leurs
placesdés dix heures du matin. Il
yreneut d'autres qui craignant
la foule , vinrent dîner aux Feüillansi,
cices Peres traiterent ce
jour-là prés dedeux cens perſonnes.
Ils obſerverent un ordre admisable
pour placer , beaucoup
d'entre eux ayant des liſtes de
ceux dont les places eſtoient re,
fervées ,& les y conduiſant àmefure
qu'ils arrivoient. Les perfonnes
de qualité pouvoientaller ſe
chauffer dans le Convent avec
toute forte de commodité , tant il
ycut bomordrepartout.Monfieur
leCardinaloRanuzzi officia avec
de fuperbestornemehsudent la
feuë Reyne:Mere a fait preſent
aux Feuillans. Ié,ne dis rien dela
Muſique, elle estoit de Monfieur
de
GALANTA 185
bully , & l'on ſçait dequoy il
eſt' capable. L'Echafaut où cile
eſtoit placée , eſtoir remplyde
cent cinquantes perfonne La
Simphonie fut trouvée tres
belle . Les Feüillans finirent
oette Geremonie , & chanterent
d'un airfi remply de zele
& fi devor qu'ils édifierent
toute l'Affemblée , qui fut touchée
de leur chant. Il ſeroit
impoſſibledevoirune plus illuftre
Aſſemblée. Ce qu'il ya
icy de Princes Etrangers , les
Ambaſſadeurs , le Clergé, & ce
que la Cour & Paris ont de
plus diftingué , s'y trouva. Les
Ferillans donnerent une fort
gande Collation aux Evêques
,& à toutes les Perſonnes
de qualité qui voulurent manger,
en attendant quel'on puſt
foutirfacilement.Ceux qui fu
Janvier 1687.
186 MERCURE
rent obligez de demeurer long
tempsdans la court, attendirent
à la clarté d'un grand
nõbre delumieres qui estoient
àtoutes les feneftres quidonnent
fur cette court. 1
-La joye que le retourde la
parfaite Santé du Roy a caufée
dans les cooeurs a eſte ſans
diſtinction de perſonnes. Les
premiers & les derniers Sujets
du Roy , lesPrinces &les
Peuples , tout a fait voir un
zele pareil. On ne sleft pas
contenté de prier & de faire
prier , mais chacun à voulu
marquer felon ſa naiſſance ,
fon rang & fa fortune , que
rien ne luy coutoit quand il
s'agiffoit d'une Santé fi precieuſe
à toute la France ,& fi
quelques Particuliers ont furpris
dans ce qu'ils ontfait ,on
GALANT 187
| a veu des choses qui, ne de
voient pas moins eſtonner ,de
quelque rang que fuffent ceux
quiles ont faites,& peut- être
ne s'est- il jamais rien veu de
plus beau de cette nature ,que
ce qui a fait éclater la magnificence
d'une Princeffe auffi
remplie de zele pour SaMajeſté
, qu'elle eſt naturellement
genereuſe , & bienfaisante .
c'eſt Mademoiselle de Guiſe .
Le Maiſtre-Autel de l'Egliſe de
L'Abbaye Royale deMontmar
tre qu'elle avoit choiſie pour
rendre des graces folemnelles
àDieu de la gueriſon duRoy ,
eſtoit d'un brillant ſi vifque la
veuë en pouvoit à peine fupporter
l'éclat. Le Tabernacle
defix à ſept pieds de haur
eſtoit tout couvert de Pierreries
; tous lesCorps de l'Archit
1. 2
188 MERCURE
Lecture en estoient profilez ,
ainſi que tout le reſte de l'Autel
, où des couleurs vives en
repreſentoient d'autres furdes
endroits tranfparens qu'un
nombre infiny de lumieres
faifoit briller ,& qui faisoient
ane agreable union avec le
Tabernacle . Tous les Gradins
del'Autel n'estoient pas feulement
garnis d'un tres -grand
nombre de chandeliers , mais
ils eſtoient encore chargez de
richeffes & de criftaux , & ces
cristaux eſtant éclairez de toutes
parts , & joints aux feintes
&veritables pierreries , formoient
tous enſemble l'amas
brillant que je viens de vous
déerire.Au deffus de l'Archi
tecture de Pantel , paroiffoit
un couronnement à jour d'où
ſe formoientdes Fleurs de Lys
IGADANT 189
de lumieres , & de Pierreries .
Les Figuresde Saints qui font
dans des niches aux coſtez de
L'Autel, étoient ornées dePierreriesdans
tous les endroits de
leur habillement qui en pou
voient fouffrir , de forte que
l'Autel , les coſtez , & tout le
deflus juſqu'à la voute for
moienttoute une face dePier
reries fur laquelle l'ocil ne ſe
pouvoit fixer. Cequ'il y avoit
de ſurprenant ,c'eſtquetoutes
les patties qui produifoient ce
grandolateffoient parfaite
mentbien diftinguées , & que
Fidno n'eftoit confondun. Le
ChoeurdesDames qui efttresbeau
pour fa grandeur & pour
fa conftruction,&dans lequel
on n'avoit pointencorefaitde
ceremonies folemnellesdepuis
qu'il aveſtéorebâty par la liber
13
493 MERCURE
ralité duRoy, fut auſſi decoré
d'une maniere qui convenoit
àla richeſſe du Maître-Aurel.
Hy avoit trois hauteursdetalpiſſeriesdechaque
coſté, rane
pour les chaifesdesiDames ,
une autre qui montoit juſqu'à
sineGaleriequi formedesBal
cons &vla troiſieme jusqu'à
la voute.Il y avoit auffi trois
hauteurs de lumieres tout an
tour de ce Chocur : Toute la
corniche du tour des chaifes
des Dames oeftoit bordée de
plaquesd'argent, & entredeux
rondes,ilyen avoit une faite
en Croixada Lorraine.Audef
fus on voyoitdes pyramides ,
des ceineres ,& diverfes aul
tres Figures formées par des
Jumieres.Outre ocda ily avoit
fur chacundes Tremaux qui
fontieritralesBalcons,une fort
1
GALANT. I
ecol
enal
grande plaque d'argent, & aux
deux coſtez de ces plaques ,
eſtoient deux grandsbras auffi
Her
10
e
20
ob
el
d'argent, garnis de groffeslumieres
. Trois rangs de Luftres
ornoient encore ce Choeur ,
ſçavoir un rang de Luftres de
cristal de chaque coſté , &un
rang de Luftres d'argent dans
le milieu qui estoit plus elevé
que les deux autres , de
forte que le tout enfemble formoientcomme
un grand bers
ceau de lumieres. Toutes ces
choſes estoient du deſſein de
Monfieur Berrin , qui avoit
pris foin de le faire executer
luy - même. Monfieur ayant
aſſiſté dans le Choeur à cette
Ceremonie , ſa Prefence fut
cauſe que toutes les perſonnes
de diſtinction qui avoienteſté
conviées , y entrerent. Mon-
*
14
192 MERCURE
fieur le Cardinal Ranuzzi of
ficia avec le zele qu'on luy
voit pour tout ce qui regarde
le Roy. Au fortir de l'Eglife on
trouva tous les murs, toutes les
feneftres , & tous les environs
deceConvent éclairez par un
nombre infiny de lumieres
groffes comme des flambeaus .
Tous ceux qui ſe font mêlez
-de cette Fefte ont reconnu que
la Princeſſe à qui elle eſtduë,
eft veritablement genereufe.
Elle fit diſtribuer beaucoup
d'aumônes , & s'attira cejour
là , & de grands applaudiſſemens
, & de grandes benedi-
Aions. A
Entre le grand nombre de
Corps ou de Compagnies qui
ont fait éclater leur zele dans
la meſme occafion , Meffieurs
les Fermiers Generaux des
GALANTA
193
Fermes unies ſe font particu
lierement diftinguez.Ils choifirent
Eglife des Iacobins Reformez
de la ruë Saint Honoré,
pour cette Ceremonie .& elle y
fut faite le leudy 23.de cemois,
avec toute la folemnité poffible.
Au deſſus de la porte de,
laruë eſtoit ungrandCartouche
poſe ſur une renture de
haute- liffe qui tapifloit toute
- cettesporte , & ce Cartouche
apprenoit qu'on alloit rendre
graces à Dieu dans cette Egliſe
pour le parfait retabliſſement
de la Santé du Roy ..Au
devant de laTribune des Orgues
& de la grande porte de
PEglife , on avoit dreſſe un
échaffaut pour y placer les
Muficiens au nombre de plus
de cent. Les deux coſtez de
Eglife eſtoient tapiffez de
IS
194
MERCURE
Tapifferiesdes ActesdesApôtres
du deffein deRaphaël , &
au deflous , àla hauteur de dix)
pieds regnoit une Tablette de
chaque coſté couverte d'une
pente deTapiflerie en broderied'or&
d'argent furun fond
de velours bleu , qui Aconti
nuoit fur toute la profondeur
de l'Eglife , & qui eftoir in
terrompue d'eſpace en efpacd
par des Cherubins &opar des
Confoles orehauffées d'or, les
uns & les autres enrichis de
quantité deLampesdorées , &
environnez de Girandoles de
Criftab garnies de bougies.Du
hant de la vonte pendoient
quantité de Luftres deCriſtal.
all y en avoit vingt- quatre de
chaquecofte diſpoſez d'une facon
extraordinaire àtrois étaoges,
les uns pendus ſur les au-
71
GALANT.
195
F
tres , & les autres entre-deux;
de forte que tout l'eſpace eſtoit
illuminé d'une lumiere égale
par une quantité ſurprenante
de bougies. On avoit borde
toutes les parties de l'Architecture
qui compoſe le grand
Autel d'une longue file de perites
lampes , leſquelles eſtant
allumées ſembloient deſſiner
par des lignes de feu toute
Architecture fuperieure de
l'autel , pendant que le bas
estoit chargefur fix grands degrez
qui montoient en piramide
, de prés de cent Chandeliers
d'argent entremeſlez de
Girandoles , Vaſes , Caffolettes
, & autres pieces d'argenrerie
, au milieu deſquelles
s'élevoit une Arche d
argent
ornée ſur les coins de feüillages
&de Seraphing auffi d'ar-
16
196 MERCURE
gent. Au deſſous de l'Arche
eſtoit peinte la viſion duBuiffon
ardent avec des Feſtons
pendans aux deux coſtez d'un
Cherubin , comme ſi le tout
euſt eſté entaille ſur une table
de Rubis en bas relief en
façon de Camaieux. Au deſſus
de la même Arche on, avoit
preparé une place pour expofer
le S. Sacrement , derriere
lequel eſtoit une grande bordure
d'argent ſoûtenuë par
deux Figures pareillement
d'argent , & au milieu de la
bordure paroiffoitunSoleilde
rayons tranſparens qui fervoit
de fond au veritable Soleil du
S. Sacrement , au deffus duquel
s'élevoit une Couronne
d'argent enrichie de pierreries.
Outre le nombre preſque
GALANT. 197
201
infiny de lampes & de lumires
qui faifoient briller cer Autel
de toutes parts , on avoit eu
foin de faire paroiffre au travers
des deux ouvertures qur
font de chaque, coſté , deux.
Gloires tranfparentes peintes.
de nuages jaunesqu'on voyoit
parfemez de teftes de Cherubins
, & éclairez par derriere:
d'un grand nombre de Bougies
. Il feroit difficile d'exprimer
la magnificence dont toute
cette décoration parut aux
yeux de tous ceux qui affiſterentà
cette Ceremonie. Monſieur
le CardinalRanuzzi étất
arrivé , on commença le Te
Deum , qui fut chanté par la
plus grande partie des meilleursMuſiciens
du Roy & de:
laVille. Il eſtoit de la compofition
dufameux Monfieur Lo
198 MERCURE
renzani, auſſi bien que l'Exaudiat
dont il fut fuivy, avec un
fort beau Motet chanté par le
Sieur Favaly , Chantre de la
Muſique de la Chapelle du
Roy ,qui ſe fait admirer de
tout le monde par la beauté
de ſa voix. Au moment que
Monfieur le Cardinal Ranuzzi
commença à donner la benediction
, tout l'air retentir de
la décharge de deux cens воё-
tes . L'Aſſemblée au fortir de
l'Eglife trouva encore de nouveaux
fuiets d'admiration .
L'on avoit dreſſe au devant
de la grande Porte de l'Egliſe
un Echafaut de quatre - vingts
pieds de largeur fur quarante
dehauteur, fur lequel on avoit
diſtribué par étages plus de
milleTerrinesde feu , cachées
derriere des toiles tranſpareuGALANT
199
-
tes, & peintes d'une archite
ture magnifique , reprefen ,
tant un fuperbe Portail de
Marbre tranſpareut de toutes
couleurs . Dans le Fronton du,
milieu eſtoient les Armes de
France , & au deſſous laDevife
duRoy , le tout tres -bien
éclairé .Le grand Fronton étoit
foutenu par fix grandes colo
nes iſolées avec leurs Pilaſtres
&arriere corps . Le mefme or
dre eſtoit continue de chaque
coſté par quatre grands Pilaftres
,entre lesquels eftoit d'un
coſté la Foy dans une niche
fur un piedestal, sc la Loy de
l'autre , en grandes Figures.
tranfparentes , beaucoup plus
grandes que le naturel comme
eftant les deux baſes princi
pales fur leſquelles eette Momacchie
eft appuyée. Toute
200 MERCURE
la court eſtoit tapiſlée dess
deux coſtez juſqu'à la grande
Porte de la rue Saint Honoré,
au deffus delaquelle on avoit
élevé un grand Tableau où
étoitrepreſente l'Eglifetrio
phante , fous la figure d'une
Femme venerable , habillée
de blanc , & qui tenoir une
Croix. Elle estoit debout fur
un grand char , pallant par
deffus des Figures terraffees
qui repreſentoient l'Envie
Herefie ,le Deſeſpoir, la Ma
Indie, &c. Le char eſtoit traîné
par des Anges qui chan
toient & joüoient des In
ſtrumens . Au deſſus de la refte
de cette Figure voltigeoiét
de troupes d'autres Anges ,
dont les uns portoient des
Fleurs de Lys , d'autres lePorwaitdu
Roy repreſenté enun
GALANT . 20F
grand Médaillon , couronné
de Feſtons de lauriers , & d'au .
tres l'Etendard de l'Eglife: Al
11 deſſus de ce Tableau estoit un
Timpan , dans lequel on avoit
repreſenté plufieurs Anges,
tenant un écriteau dans lequel
-eftoit cette Inſcription qui farfoit
allufion au triomphe de
Eghfeldspat
Tefofpitetutatriumphars
Monfieur le Cardinal Ranuzzi
témoigna plus d'une
fois en fortant de cette Cere
monie , qu'il n'avoit jamais
eſté plus fatisfait , que les Fê
tes les plus folemnellesdeRo
me n'eſtoient ny plus magnifi
ques ny mieux entenduës ,
qu'il y écriroit ce qu'il avoit
, & qu'il en marqueroit fa
fatisfaction à Sa Majesté. Ce
témoignage a eſté confirmé
veu ,
1202 MERCURE
partoute l'Affemblée qui estoit
des plus celebres ,&il n'y a cu
perfonne qui ne foit tombé
d'accord ,que rien ne pouvoit
eſtre plus digne du ſujer. Si la
magnificence a paru dans cer-
IteFeſte, onpeut dire que tout
yamarqué le bon gouft de celuy
qui en a fourny les defſeins
,& qui a pris ſoinde les
faire executed
- Les trois Cours ſuperieures
de la Villede Roüen , qui
avoient aſſiſté deniz dece
mois à une Meſſe Solemnelle ,
&au Te Deum qui fut chanté
en muſique dans l'Egliſe Car
thedrale au fon de toutes les
Cloches & au bruit du Canon
& des Boëtes en Action
de graces de la gueriſon de Sa
Majesté , ont voulu marquer
parides voeux ſeparez que la
GALANT.
1203
10 fanté de ce grand Monarque
eſt la plus forte grace dont la
France puiſſe eſtre redevable
wau Ciel. MonfieurdeRis, pre-
(t) mier Preſident du Parlement ,
tine cedant en rien au zele de
et quatre premiers Preſidens de
fon nom qui l'ont precedédans
cette Charge , & qui dans
dtoutes fortes d'occaſions ont
faitparoiſtreune paſſion extra
ordinaire pour le ſervice de
leur Roy & pour le bien de
l'Estat, parut le leudy 23. de
ce moisalla reſte de l'auguſte
Corps dont il eſt le chef , &
defcendit dans laSale duPalais
qui estoit tenduë de rapiffe
ries &ornée de tout ce qui
pouvoit rendre la ceremonie
plus éclatante. Le peuple qui .
P'attendoit enfoule, le reccut
-avec des marques de joye
204 MERCURE
extraordinaires. Tous ces мер
fieurs qui estoient en Robes
rouges ,ayant pris leurs places,
on commença la meſſe en
muſique. Elle fut celebrée par
Monfieur l'Abbé du Four qui
eft du corps ,& grand Treforier
de l'Egliſe Cathedrale.
Aprésla Meſſe un Choeur nombreux
de Muſique entonna le
TeDeum,pendantlequel Monfieur
le premier Prefident alla
mettre le fou à un grand- Bucher
que l'on avoit preparé
dans la Court du Palais Le
peuple pat fesliacclamations
donnale fignal aux Canons&
aux Boëtesdont le bruit ſe fit
ientendre par tout. Monfieur
le premier Preſident retourna
en ſal place joindre ſes prieres
à celles de toute l'Affemblée,
mais fon zele ne put eſtre fatis
|
GALANT. 205
fait d'avoir rendu des devoirs,
où il avoit eſté foutenu par
tant de voeux; il voulutdonner
des marques de joye , où luy
feul euſt part ,& invita toute
la Compagnie à venir difner
chez luy. On y trouvalesviolons
, & quatre Tables ou rien
ne manquoit de ce qui pouvoit
fervir à la magnificence
&à la bonne chere . Ce fut là
qu'on fit de nouveauxſouhaits
pour la fanté & pour la proſperité
du Roy. Mr le Premier
Preſident porta la Santé de ce
grand Prince, qui fut receuë
avec toutes les marques poffibles
de refpect & de joye . Le
foir les Dames eurent leur
tour. Madame la premiere
Preſidente les regala avec la
mefme magnificence , & pendant
de temps, le peuple qui
206 MERCVRE
avoit receu ordre de faire une
Feſte publique de ce jour-là,
eſtoit anime à la joye par un
grand feu allumé,& par une
fontainedevin qui couloitdevant
l'Hôtel de ce premier magiftrat.
Le lendemain la Cour
des Aides ſuivit cet exemple ,
& le Samedy la Chambres des
Comptes fit la meſme choſe.
Pendant ces trois joursles Fontaines
de vin ne ceſſerent
point de couler , & les acclamations
de toute la Ville retentiſloient
avec tant d'éclat ,
qu'il ſembloit que la voix des
Peuples vouluſt l'emporter
ſur ſe bruit des Boëtes & des
Canons qu'on tiroit à tous mo
mens. Les Avocats & les Procureurs
qui ont fait auſſi chanter
unTeDeum ſe ſont diftinguez
par des Illuminations
GALANT.
2107
furprenantes . Les Marchands
ont joint de grandes aumônes
aux Prieres , & le zele de tous
les Corps leur fournit de jour
en jour quelque maniere nou,
velle de remercier Dieu de la
( conſervation d'un Prince fi
cher à toute la France.
Meſſieurs de la Ville de Blois
n'ont rien oublié dans la mê
me occafion de ce qui pouvoit
marquer leur zele. Ils firent
mettre le 19. de ce mois tous
les Habitans ſous les armes
par Compagnies , fans exceprion
d'Avocats , de Procureurs
,ny d'autres Bourgeois,
qui tous ſe firent un tres
grand plaiſir de faire connoiſtre
par une Fefte publique le
refpectueux amour qu'ils ont
pour le Roy. Le Te Deum fut
chanté en Muſique avec beau
3.
108 MEROVRE
coup de folemnité dans l'Egli
ſedes lefuites, qui estoit parée
extraordinairement & tres
Bien illuminée. Memeurs les
Maife & Eelkevins & Mef
fleurs les Officiers du Prefidial
y affifterent en Corps avecles
plus Notables de la Ville. On
fit enfuite allumer un Feu de
joye dans la Place qui eft de
vant la porte dela mêmeEglife'
au pieddu Chateau,où tou
te la Bourgeoise eſtoit fous
les armes. La décharge qu'elle
fit de ſes Mousquets , fut fuiviode
pluſieurs coups de Canon
, de quantité de Fuſées
volantes,& autres foutes d'ar
tifices, qui furent tirezde def
fusune des Tours de la Ville,
voiſme de cette Place. Toutes
les rues effoient éclairées par
Los lumieres que l'on mit par
tour
GALANT
209
toutaux feneftresdes maiſons.
If y eut plufieurs Fontaines de
1 vin ,& une entre aurres qui
coula depuis le matin juſques
au foir à la Maiſon de Ville.
L'exemple de Meſſieurs de
Blois , fut ſuivy par les Habiitans
des Faux- bourgs de Foix
de la mêmeVille. Ils ſe mirent
fous les Armes au nombre de
350. veſtus de meſime parure ,
avec un chacun un ruban de
Cravate de mefine couleur , &
un Bonnet à la Dragonne, enrichy
d'un galon d'or fundes
contures. Ceux des autres
Faux-bourgs , de Vienne , de
Bourgneuf& de S. Lean étoient
auſſi habillez fort leſtement,&
chaque Fauxbourg avoit fa
couleur , & fa parure particuhere.
Ils firent tous des Ré
joiſſancesqui firent connois
Janvier 1487 .
K
110 MERCVRE
Are combien leurs coeurs étoient
penetrez de joye pour
l'heureuſe Convalefcence du
Roy,LeClergén'oubliapasde
marquer auffi fon zele par un
TeDeum qu'il fit chanter dans
l'Eglife du Châteauengrande
ceremonie.
Meffieurs de l'Academic
Françoiſe , qui ont un intereft
tout particulier àla confervation
de la Perfonne facrée de
Ieur Auguſte Protecteur , ont
aui donné des marques de
leur jdyeparunTe Deum qu'ils
firent chanteren Muſique
Lundy dermer 27.de cemois ,
dans la Chapelle du Louvre.
Commeils tinront une Séance
publiquel'aprédînée,& qu'elle
fut employée entierement à
faire connoiſtre les ſentimens
dereſpect , deprofondevene
GALANT . 211
ration ,& d'attachement invio
lable qu'ils ont pour le Roy.
cet article demande plus d'ét
nduë que je ne pourrois luy
en donner fur la fin de cette
Lettre. Ainſi jele remetsjuf
qu'au mois prochain. Cependant
je vous envoye la seconde
Partie des Lettres de Monsieur le
Chevalier d'Her... que je vous
fais eſpererdepuis deuxmois ,
& que l'on commence àdebiter
dans laBoutique de laVeuve
Blageart.Les Sujets de chaque
Lettre, qui font expliquez
enpeu de mots au commencement
du Livre ,vous appren
dront qu'elles ne peuventêtre
que fort galantes .
On va debiter dansle mefme
lieu un autre Livre , ineitule,
Dialogues Satyriques &Mo
raux. Le premier de ces Diar
A
K 2
212 MERCURE
logues eſt entre l'Auteur & fon
Livre, auquel il remontre le
peril où il s'expoſe en s'obſtinant
à vouloir paroiſtre dans
le monde, où le bel Eſprit s'eſt
érigé en luge ſouverain des
Ouvrages , au préiudice du
bon Efprit. Il y en a un autre
du Serieux & de la Badinerie ;
un autre , de l'Or & de l'Amour
; un autre,de laFlaterie
& de la Verité , & c . On y
fait connoiſtre les avantages
qu'alaBadinere fur le Serieux
dansla conversation ,& dans
beaucoup deproductions d'efprit
; celuy qu'a l'Or ſur l'Amour
, pour faire de plus nombreuſes
& de plus promptes
conqueſtes ; & la Flaterie fur
la Verité en toutes fortes de
conditions ,& ainſi des autres
Dialogues.Toutes les matieres
م
i
2
GALANT. 213
en font tournées agréablement
; & comme leur diverſité
donne un champ libre à l'ef
prit , il faudroit eſtre de bien
méchantgouft,pours'ennuyer
de cette lecture.
# Mademoiselle de Loubes ,
dontje vous ayparlé pluſieurs
fois , & qui a eu l'avantage
↓ d'eſtre élevéeFille d'honneur
de Madame , ſe fit Religieufe
Mercredy dernier 2. de ce
mois , dans le Conyent des
Filles de la Viſitution du Faux
bourg S. Lacques. Madamequi
luy fit l'honneur d'affifter à
cette Ceremonie , luy attacha
fonVoile elle-meſme ,& Ma--
demoisellede Loubes le receut
avec toute la fermeté d'ame
qu'on petitattendred'uneperfonne
entierement détachée
dumonde. Elle pritpour nom
K 3
14
MERCVRE
deReligion , Scoeur Françoiſe
de Sainte Elifabeth , en confideration
de cette Princeſſe ,
qui futextrémement touchée
decette action , auffi-bien que
Mesdames Princeſſes les
d'Harcour & d'Epinoy , &
toutes les autres Dames de ſa
Maiſon qui l'accompagnoient.
Monfieur l'Evefque de Chartres
fit la Ceremonie ,&Monficurs
l'Abbé Boileau prononça
un tres-beau Diſcours fur
ceſujet.
Les vrais motsdesdeux Enigmes
propoſéesdans ma Lettre
deDecembre,eſtoient lapetite
Verole,&le Fer àrepafferle ling.
Meſſieurs Canat , Avocat de
Châlons fur Saone ; Rochaquet
du Pontde Neüilly ,&le
Solitairedela ruë SainteCroix
de la Bretonnerie ont expliGALANT.
215
d
a
1
qué la premiere , & le ſens de
la feconde a eſté trouvé par
Monfieur Lourdet du quartier
de la Place Maubert ; le Reformateur
de la Langue Fran
çoiſe d'auprés de S.Severin s
Pagreable PeintreſſedelaPor
te Montmartre ; les Belles du
Pavillondu FauxbourgduPré
au Mans , l'agreable Bourgui
gnonde la ruëdes Poitevins ;
lesdeux belles & infeparables
Bergeres , Iris & Caliſte ; le
Berger Daphnis.
- Ceux qui orexpliqué l'une
& l'autre font Meſſicurs des
Maronniers ; Vignier de Ris
chelieu, du Tilieu ; l'Amant
Solitaire payé d'ingratitudes
de Saint Germain le grand
Chaſſeur du Bolleaume , l'A
mant de la Belle de la rue
de la Monnoye Cleanté
i
K4
216 MERCURE
K +
de Sarrelouis ; legros & fidelle
AmyGafcon de la Cour & fa
Femme ; l'amant de la charmante
Nannette , le Fils de la
Belle Maman ; le petit Praticien
àla grande moustachede
la ruë Barré du bec; les amans
paſſionnez ; les Intereſſez en
Amour; le Chevalier de Beauregard;
le brave Pamieux.Mademoiselle
Catin-Antoinette ;
F. de la Borde ; F. Gamot , la
plus aimable des trois Soeurs ;
T'aimable Lingere du Palais ;
l'aimable Lavotte aux Airs langoureux
de la rue des Foſſez
Saint Germain ; la cruelleBaronne
devenue ſenſible du
meſme quartier , la bonne &
charitableBrunette d'auprés la
porte S. Martin ; Nannon de
la ruë S. Bon , la jeune Irisdu
Lion d'or & fon Amant ; & la
GALANT . 217
remme à l'ancien bouza de la
ruë SHonoré .
Ie vous envoye deux nouvelles
Enigmes à mon ordinaire
.
ENIGME.
Eluy qui nous
Clay
donnela
Est un estreinanimé,
vie
Que malgréson efprit, &Saforce
inoüye
On tientsans peine enfermé,
Dans unobscurmanoirqu'en bonne
Compagnie,
Pour l'en faire fortir ,
Nous allos investir.
Sans Canon , Boulet , Poudre
Meche
Nous fommes le jour &la nuit
Tantoſt avecfuccez, le plus fouventfans
fruit ,
Occupezà faireune Brèche ,
KS
218 MERCURE
Maispourpetite qu'ellefoit ,
Le prisonnier s'echape ; &dans
Sonfeinaride
Sa Bifayeulele reçoit,
C'est là que tranſportezpar cette
ardeur avite
Qu'ennousl'eaune peut temperer
Sans nous mettre enfoucy du nom
deparricide,
Nous ne l'accompagnons que pour
ledevorer;
Mais dans cette action qui paroift
inhumaine
Et qui toutefois ne l'est pas
S'il s'en faut raporter à nostre
Amy Silene,
Nous trouvousfauvent le trepas.
Vous quifur les bords d'Hippocrene
Meditez nostre forz , Oedipes curieux
,
Ceffez pourl'éclaircirde vousdon.
ner la géne,
GALANT. 219
Nous allons par pitié vous en in
ſtruire mieux .
Lors que le verre en main à vos
Amis joyeux
Vous portez lasanté d'Iris ou de
Climene.
Vous nous voyezpeut- estre expirer
ves yeux
AUTRE ENIGME.
Eluy qui preſide aux Saiſons
Pour me communiquer l'éclat qui
l'environne;
Cybelle m'a conceu dos regards de
Etmon deftin veut qu'entout lien
Les Roys me doivent leur Couronne.
A
LesPeuplesnez au Siecled'or
Ne me connoiffent point encor;
K 6
220 MERCURE
Ie n'estois point poureux le Soleil
delaTerre,
C'estau siecledeferqu''oonnm'aten
du lesmains,
Et je n'ay tentélesHumains.
Quedepuis qu'ils sefont la guerre
C'est en vain quepourme cacher
S'entaffe Rocherfur Rocher ,
its me. Ils déchirent mon corps ,
coupent les veines ,
Etfans pitiédes maux que le mon
de afoufferts ,
Its vont chercherjusqu'aux Enfers
L'eternelAuthour defes peines.
ر
Voicy une feconde Chanfon
qui ne vous plaira pas
moins que la premiere..
45
AIR NOUVEAU.
Tour of ch Out eft changé dans Ikni.
કે
vers
GALANT. 227
NosArbriffeaux nefont plus verds
NosBocagesfontfansfeuillages ,
Les Oyfeauxypaffent le jour
Sans chanter, fans faire l'amour.
Nos Champsnepouffentplus d'her-
Nos
bettes
Iardinsn'ont plus defleurettes,
Tout fefent icy bas
De la rigueurdes frimats
Mon coeurfeulne changepas.
こLe Roy a donné pluſieurs
Benefices , ſçavoir
A Monfieur l'Abbé d'Illiers ,
l'Abbaye de l'Ile Chauvet ,
Ordre de ſein Benoist , Dioceſe
de Luçon. Il eſt Neven de
Monfieur le marquis.d'Antragues
, & Fils de Monfieur le
Marquis d'illiers , qui estoit
Lieutenant des Gendarmes, &
qui fut tué à la lournée de
Senef
722 MERCURE
A Monfieur l'Abbé Daquin,
Fils deMonfieurDaquin,Premier
Medecin du Roy, l'Abbaye
de S. Denys de Rheims ,
Ordre de S. Auguſtin. Cette
Abbaye eſt l'une des deux que
Monfieur l'Abbé de Coligny a
remiſes entre les mains de Sa
Majesté, s'eſtant creu obligéde
ne pas laiſſer perdre un nom
auſſi ſameux que celuy deColigny
, lors qu'il s'eſt veu le
dernierde ceux qui le portent.
AMonfieur l'abbé Fleuriau,
l'abbaye de Noftre-Dame de
Moreille , Ordre de S. Bernard,
Diocese de la Rochelle. Il eft
proche parent de Monfieur le
Controleur General.
2001
AMonsieur l'abbé de mar
fillae l'Abbaye de la Chaiſe-
Dien,Ordre de S.Benoist,Dioceſe
de Clermont. Elle estoit
GALANT.
223
vacante par la mort de Monfieur
l'Archeveſque d'Alby .
- Monfieur l'abbé de Marfillac
- eſt Frere de Monfieur le Duc
de la Rochefoucaultd'aujourd'huy.
Madame de Caumont Lauzuna
été pourveuë en même
tempsdel'Abbaye de Saintes ,
Ordre de S.Benoiſt. Elle estoit
☑ Religieuſe dans cette Maiſon .
Ie vous aydéja marqué que
L'Archeveſché d'Alby a eſté
donné à Monfieur de la Berchere
Archeveſque d'Aix .
L'archevéchéd'Aix eſtantdemeuré
vacant par cette nomination
, le Roy y a nomme
Monfieur de Conac Evêque
de Valence. Ce Prelat , fort
connupar fon efprit&par fon
merite ,aeſté premier Aumô
nier de Monfieur. Il eſt d'une
224 MERCURE
des meilleures Maiſons du Limoufin.
Sa Majesté adonné l'Evêché
de Valence à Monfieur l'Abbé
deChampigny,Grand Vicaire
de Pontoiſe, & archidiacrede
laCathedrale de Roüen. Il eſt
Frere de MonfieurdeChampigny
, Intendant de luſtice en
Canada , dont le zele pour le
Roys'eſtant fait connoiſtre en
beaucoup d'occafions a encore
paru depuis quelque mois par
le Buſte de Sa Majefté qu'il a
fait élever fur un Piedeſtal orné
d'Inſcriptions dans la principale
place de Quebec , en
prefence de Monfieur le Marquis
de Denonville , Gouverneur
de la nouvelle France,&
de tous les Officiers des Troupes
& des Vaiſſeaux .CesMeffleurs
ont encore trois Freres
GALANT.
225
rel
لا
t
10
dont l'un eſt Prevoſt del'Egli
ſe de l'ifle ( c'eſt une Prevoτέ
mitrée. ) Un autre eſt Chanoine&
Chancelier de l'Egliſe de
Chartres , & un autre , Capitaine
de Vaiſſeau.Monfieurde
Champigny leur Pere a exercé
ſucceſſivement les Intendances
de Moulins , Limoges ,
Tours , & Roüen , & s'en est
tres -dignement acquité. Ileſt
Fils de Meffire Iean Bochardde
Champigny , qui aprés avoir
eſté Maistre des Requêtes ſous
lesRois Henry III. & Henry
IV. Preſident aux Enquestes ,
Conſeiller d'Estat , Ambaffadeur
à Venise,ControleurGe-
-neral ,& Surintendant des Finances
, fut mis à la teſte du
Parlement de Paris par le feu
Roy , aprés la mort de Meſſire
Ierofme d'Hacqueville arrivée
226 MERCURE
en 1628.11 fut fait enſuite Chof
du Conſeil des Depeſches. Ce
Conſeil qu'on a fupprimé faifoit
lesAffaires Etrangeres,qui
eſt ce que font preſentement
les Secretaires d'Estat.Il fit paroitre
dans tous ces emplois
une probité ſi exacte , &un
deſintereſſement fientier ,
qu'on remarqua qu'au jourde
ſamort il nelaiſſoitque le bien
qu'il avoiteudefon patrimoine,
quoy qu'il enſt ſervy trente
ansdans leConfeil.C'eſt ce qui
afaitdire de luy , Magnas inter
opesinops Le Perede ce premier
Prefident fut fait Maître des
Requêtes, ſans avoireſtéConfeiller
dans aucune Cour Superieure
Monfieur l'Abbé de Montmorina
eſté nommé Eveſque
deDie , dans le Dauphiné.
GALANT.
21.7
12
C'eſt un homme dont la vie
eft exemplaire , & qui along
temps demeuré dans le Semi
naire des Miſſions Etrangeres,
oùil étoit quand Sa Majesté
l'anommé Eveſque. Il a beaucoup
travaillé aux Conver
fions & l'on peut dire que
fes travaux, la vertu&fa naifſance
l'ontélevé àl'Epiſcopat.
Il eſt fort proche Parentde M.
de Saint-Eran , Gouverneur
de Fontainebleau , qui porte
auſſi le nom de Montmorin.
L'Eveſché de Die fut uny en
1275.à celuyde Valence, mais
malgré cetteunion , l'Evefque
avoit des Bulles des deux
Eveſchez qui n'appartenoient
pas àlaFrance en ce temps- là.
Les Dauphins , qui étoient
alors Souverains du Pays,
troubloient ſouvent ces Evef
228 MERCURE
ques , & afin que le méme
ayant les deux Eveſchez , fuſt
plus en eſtat de leur reſiſter, le
PapeGregoire IX. jugea à propos
de lesunir. Cela n'eſt plus
neceffaire , & leRoy ayant en
veuële bien que l'Egliſe peut
tirer de deux Eveſques pour
les Nouveaux Convertis , a
tres - judicieuſement deſuny
ces Eveſchez .
Ilmereſte à vous parler des
Gouvernemens. Celuy du
Pays d'Auny , qui vaquoitdepuis
la mort de Monfieur le
Maréchal Duc de Navailles , a
étédonné à Monfieur leComtedeGrammont.
Il eſt Frerede
feu Monfieur le MaréchalDuc
de Grammont , & Oncle de
Monfieur le Duc de Grammont
d'aujourd'huy . Tout le
monde ſçait qu'ila infiniment
GALANT. 229
A
de l'efprit . Il s'eſt attaché àla
Perſonne du Roy dans toutes
ſes Campagnes , où il l'a toſtjours
ſuivy.
Monfieur de Saint Esteve ,
Lieutenant des Gardes du
Corps , a eu le Gouvernement
de Broüage. Il a long-temps
ſervy avant que d'être dans
les Gardes ,& a continué ſes
ſervices avec le meſme zele&
la meſme ardeur depuis qu'il
y eſt.

- Monfieur de Saint-Marc ,
Gouverneur d'Exilles,l'eſt preſentement
des Ifles de Sainte
Marguerite. C'eſt un homme
qui a ſervy avec une extrême
fidelité dans les Emplois de
confiance qui luy ont eſté
donnez .
Monfieur deCaumont,Lieutenant
Colonel du Regiment
232 MERCURE
de Cavalerie d'Enguien, a eſté
fait Gouverneur d'Exilles.
C'eſt une marque que les fervices
qu'il a rendus à SaMajeſté
,luy ontété agreables.
Monfieur de Saint Viance ,
Enſeigne , a cula Lieutenance
desGardesduCorps , qu'avoit
Monfieur de Saint-Esteve , &
cetre Charge d'Enſeigne eftantdemeurée
vacante ,a eſté
donnée àMonfieur le Comte
deDruy ,Mestre de Camp de
Cavalerie , Gendre de Monfieur
du Montal.
Le Roy a donné une gratification
de vingtmille francs
avecune Penſion de mille écus
à Monfieurde laGrange, auffi
Enſeigne , qui a vieilly dans
le ſervice . Comme il a remis
ſa Charge d'Enſeigue entre
les mains de Sa Majesté , Elle
GALANT. 231
en a pourveuMonfieur le Marquis
de Loſtange , Mestre de
Camp de Cavalerie. Ie croy
vous avoir parlede ceMarquis
dans quelque autreoccafion.
Il s'est fait encore un changement
en la perſonne de
Monfieur le Chevalier de
Gaffion . Enseigne des Gardes
du Corps. Il en a eſté fait
Lieutenant ,& Monfieur le
Comte de Gaſſion ſon Frere ,
Mestre de Camp de Cavalerie
a eu la Charge d'Enseigne.Ils
font de la Maiſondu Maréchal
de ce meſme nom , & en ont le
coeur.
Le 17 de ce mois le Roy
donna à Monfieur le Marquis
du Repaire , cy-devant Colonel
de Cavalerie , & Lieutenant
des Gardes du Corps , le
Gouvernement du Château
2325 MEROVRE
Trompette , qui étoit vacant
par la mort de Monfieur le
ComtedeMontaigu. Il eſt Fils
de feuMeffire François deGenefte
Gouverneur de laCira
delle de Montpellier,& enfuite
de celle de mers , ou il eſt
mort. Il avoit époufe Dame
Marie de Beqhaut d'Angoumois
,d'une fort Illustre Maifon
, qui luy a donnéde tresgrandes
Alliances . Celle de
Geneſte eſt d'une fort ancien-.
neNobleffe ,fortiedu Pais de.
Medoc enGuyenne. Monfieur
le Marquis de Beaurepaire a
pris alliance avec Dame Louiſe
Henriettede Bailleul,d'une
tres-NobleMaiſon, originaire
du Paisde Cauxen Normandie.
Ie vous en parlay ampleiment
flors que je vous appris
que le Roy avoit accordé
à
GALANT . 1233
àMonfieur lemarquis de Chafteau
Gontier , la furvivance
de la Charge de Preſident au
Mortier poſſedée par Monfieur
le Prefident de Bailleul fon
Pere .
Le Roy vint hier à Paris ,&
alla d'abord à Noftre-Dame
pour y rendre graces à Dieu
du parfait rétabliſſement de ſa
Sante. Sa Majesté fit enſuite
l'honneur à la Ville d'aller difner
à l'Hostel de Ville, où Elle
fut receue à ladefcentedefon
Carroffe par Monfieur lePrefident
de Fourcy Prevoſt des
Marchands,& par Meſſieursles
Eſchevins,le ne puis vous exprimer
quelle fut la joye de
tout les Parifiens.Il y a tantde
choſes à vous dire la-deſſus ,
que je remets juſqu'au mois
Janvier 1687 . L
234
MERCVRE
prochain à vous en faire un
ample dévail. Le fuis Madame,
Voſtre, &condi
110A Parisons 1. Janvier 1687.
DO De Dijon Io, Peurier! 1687.
LesPeres lefivitesduColle
ge deDijon pour rendre gra
ees àDieu du parfait rétablif
fementdela ſanté du Roy, ont
fait chanter depuis huit jours
dans toutes leurs Congregal
tions tin To Deum. Celle des
Echoliers, qui avoient orné
leur Cour des plus riches Fapifferiesdela
Ville, s'eft fignalée
pardeſſus les autres , la mufiquey
était excellente , & les
GALANT.
235
Congreganiſtes au nombre de
présde trois centavoient chacun
un flambeau de cire blancheàla
main. Pour couronner
cette celebrité hier le Te Deum
fut chanté dans l'Egliſe de cés
Peres parla muſique de la Sainte
Chapelle , tout l'autel de
haut en bas étoit orné d'une
illumination extraordinaire ,
& fi bien reglée que lemonde
-qui y accourut en foule avoüa
qu'il étoit difficilede rien voir
de plus beau en ce genre , l'Egliſe
étoit avec cela éclairée
d'une infinité de Luftres , parmy
leſquels les plaques d'argent,
les miroirs & mille autres
-ornemens de cette nature brilloientde
toute part ,& tout le
tour de la corniche étoit bor-
-dée de Cierges qui faiſoient in
L 2
236 MERCURE
fortbel effet. Le Te Deum ne fut
-pas plutôtachevé que toute la
-cour des Claſſes de ceCollege
qui eft grande , quarrée , & a
quatre Etages parutéclairée du
haut en bas , par trois cens
Flambeaux poſez ſur toutes les
Fenêtres dont la lumiere farfoit
paroître dans le premier
Etage , le Chiffre du Roy ,
dans de fecond les Fleurs de
Lys, dansle troiſiéme des Soleils,&
le tout étoit couronné
dans le quatriéme Etage par
quantité de grands Flambleaux
. Pendant que la foule
étoit occupée à confiderer le
bel effect que faifoient toutes
-ces lumieres un concert de
Hautbois & de Trompettes
meſlé de pluſieurs cris de Vive
Le Roy reiterez , fit fentir à tout
GALANT. 237
le peuple qui y accourut de
tout côté la joye qu'un chacun
adu rétabliſſement d'une
ſanté qui nous eſt ſichere , &
qui nous fait eſperer unelongue
ſuite d'années pour cer
incomparable Monarque ,& la
continuation du plus beau
Regne que la France aitjamais
eu. Et du plus beau Siecle que
nos Hiftoires nous ayent jamais
repreſenté.
L'on avertit , que le Sieur
Dupleſſis Duvernét , l'un des
fix Ecuries de la grande Ecurie
du Roy , continue toûjours
fes foins exacts pour augmenter
& embellir fon Academie
par la quantité de beaux Chevaux
qu'il ymettous lesjours,
auſſi adroits & auiſi biens manians
qu'il s'en puiſſe voir ,&
2
238 MERCVRE
des tres-habiles maîtres pour
les autres exercices . Ce qui
oblige ledit Sieur Dupleſſis à
faire Sçavoir à tout le public ,
qu'il eſt preſentement bien
établitdans l'Academie ordinaire
,de Lyon ſcituée dans
Belle-cour , où il ya des manégesoouverts&
decouverts ,
fort ſpacieux & fort beaux
C'eſt pourquoy ceux qui voudront
luy faire l'honneur de
venir chez luy,fe mettre ſous
ſa conduite , il leur fera des
conditions fort honnneſtes.
LYON
1093
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le