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Titre

Analyse de l'Esprit des Loix, contenue dans la note qui accompagne l'Eloge de M. de Montesquieu par M. d'Alembert. Nous l'avions annoncée pour le premier Mercure de ce mois, & nous acquittons notre parole.

Titre d'après la table

Analyse de l'Esprit des Loix,

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601
Incipit

La plûpart des gens de Lettres qui ont parlé de l'Esprit des Loix, s'étant plus

Texte
Analyfe de l'Esprit des Loix , contenue dans
la note qui accompagne l'Eloge de M. de
Montefquieu par M. d'Alembert. Nous
l'avions annoncée pour le premier Mercure
de ce mois , & nous acquittons notre
parole.
Lparle de l'efprit des Loix , s étant plus
A plupart des gens de Lettres qui ont
attachés à le critiquer qu'à en donner une
idée juſte , nous allons tâcher de fuppléer
à ce qu'ils auroient dû faire , & d'en développer
le plan , le caractere & l'objet.
Ceux qui en trouveront l'analy fe trop longue
, jugeront peut être, après l'avoir lue ,
qu'il n'y avoit que ce feul moyen de bien
faire faifir la méthode de l'Auteur . On
doit fe fouvenir d'ailleurs que l'hiftoire
des écrivains célebres n'eft que celle de
leurs penfées & de leurs travaux , & que
cette partie de leur éloge en eft la plus
effentielle & la plus utile , fur-tout à la
tête d'un ouvrage rel que l'Encyclopédie.
Les homme dans l'état de nature , abf-
D iij
78 MERCURE DE FRANCE.
traction faite de toute religion , ne connoiffant
dans les différends qu'ils peuvent
avoir , d'autre loi que celle des animaux ,
le droit du plus fort, on doit regarder l'établiffement
des fociétés comme une espece
de traité contre ce droit injufte ; traité
deftiné à établir entre les différentes parties
du genre humain une forte de balance.
Mais il en eft de l'équilibre moral
comme du phyſique : il eft rare qu'il foit
parfait & durable ; & les traités du genre
humain font , comme les traités entre nos
Princes , une femence continuelle de divifion.
L'intérêt , le befoin & le plaifir ,
ont rapproché les hommes ; mais ces mêmes
motifs les pouffent fans ceffe à vouloir
jouir des avantages de la focieté fans en
porter les charges ; & c'eft en ce fens qu'on
peut dire avec l'Auteur , que les hommes ,
dès qu'ils font en focieté , font en état de
guerre. Car la guerre fuppofe dans ceux
qui fe la font , finon l'égalité de force ,
au moins l'opinion de cette égalité , d'où
naît le defir & l'efpoir mutuel de fe vaincre
. Or dans l'état de focieté , fi la balance
n'eft jamais parfaite entre les hommes ,
elle n'eft pas non plus trop inégale : au contraire
, où ils n'auroient rien à fe difputer
dans l'état de nature , ou fi la néceffité les
y obligeoit , on ne verroit que la foibleffe
DECEMBRE. 1755 . 79
fuyant devant la force , des oppreffeurs
fans combat , & des opprimés fans réfiftance .
Voilà donc les hommes réunis & armés
tout-à- la-fois , s'embraffant d'un côté , fi
on peut parler ainfi , & cherchant de l'autre
à fe bleffer mutuellement : les loix font
le lien plus ou moins efficace , deſtiné à
fufpendre ou à retenir leurs coups. Mais
l'étendue prodigieufe du globe que nous
habitons , la nature différente des régions
de la terre & des peuples qui la couvrent ,
ne permettant pas que tous les hommes
vivent fous un feul & même gouvernement
, le humain a dû fe partager
genre
en un certain nombre d'Etats , diftingués
par la différence des loix auxquelles ils
obéiffent. Un feul gouvernement n'auroit
fait du genre humain qu'un corps exténué
& languiffant , étendu fans vigueur fur la
furface de la terre . Les différens Etats font
autant de corps agiles & robuftes , qui en
fe donnant la main les uns aux autres ,
n'en forment qu'un , & dont l'action réciproque
entretient partout le mouvement
& la vie .
On peut diftinguer trois fortes de gouvernemens
; le Républicain , le Monarchique
, le Defpotique . Dans le Républicain ,
le peuple en corps a la fouveraine puiffance
; dans le Monarchique , un feul
Div
So MERCURE DE FRANCE.
gouverne par des loix fondamentales ;
dans le Defpotique , on ne connoît d'autre
loi que la volonté du maître , ou plutôt
du tyran. Ce n'eft pas à dire qu'il n'y
ait dans l'univers que ces trois efpeces
d'Etats , ce n'eft pas à dire même qu'il y
ait des Etats qui appartiennent uniquement
& rigoureufement à quelqu'une de
ces formes : la plupart font , pour ainfi
dire , mi partis ou nuancés les uns des autres.
Ici la Monarchie incline au Defpotifme
; là le gouvernement monarchique eft
combiné avec le Républicain ; ailleurs ce
n'eft pas le peuple entier , c'eft feulement
une partie du peuple qui fait les loix .
Mais la divifion précédente n'en eft pas
moins exacte & moins jufte : les trois efpeces
de gouvernement qu'elle renferme
font tellement diftingués , qu'elles n'ont
proprement rien de commun ; & d'ailleurs
tous les Etats que nous connoiffons , participent
de l'une ou de l'autre. Il étoit
donc néceffaire de former de ces trois
efpeces des claffes particulieres , & de
s'appliquer à déterminer les loix qui leur
font propres ; il fera facile enfuite de modifier
ces loix dans l'application à quelque
gouvernement que ce foit , felon
qu'il appartiendra plus ou moins à ces différentes
formes.
DECEMBRE . 1755 .
Dans les divers Etats , les loix doivent
être relatives à leur nature , c'est- à- dire à
ce qui les conftitue , & à leur principe ,
c'eft-à- dire à ce qui les foutient & les fait
agir ; diftinction importante , la clef d'une
infinité de loix , & dont l'Auteur tire bien
des conféquences.
Les principales loix relatives à la nature
de la Démocratie font , que le peuple
y foit à certains égards le Monarque ,
à d'autres le Sujet ; qu'il élife & juge fes
Magiftrats , & que les Magiftrats en certaines
occafions décident. La nature de la
Monarchie demande qu'il y ait entre le
Monarque & le peuple beaucoup de pouvoirs
& de rangs intermédiaires , & un
corps , dépofitaire des loix médiateur
entre les fujets & le Prince . La nature du
Defpotifme exige que le tyran exerce fon
autorité , ou par lui feul , ou par un feul
qui le repréfente.
>
Quant au principe des trois gouvernemens
, celui de la Démocratie eft l'amour
de la République , c'eft à dire de l'égalité
dans les Monarchies où un feul eft le
difpenfareur des diftinctions & des ré- ,
compenfes , & où l'on s'accoutume à conconfondre
l'Etat avec ce feul homme , le
principe eft l'honneur , c'eft- à- dire l'ambition
& l'amour de l'eftime : fous le Def-
Dv
82
MERCURE DE FRANCE.
potifme enfin , c'eft la crainte. Plus ces
principes font en vigueur , plus le gouvernement
eft ftable ; plus ils s'alterent &
fe corrompent , plus il incline à fa deftruction
. Quand l'Auteur parle de l'égalité
dans les Démocraties , il n'entend pas
une égalité extrême , abfolue , & par conféquent
chimérique ; il entend cet heureux
équilibre qui rend tous les citoyens
également foumis aux loix , & également
intéreffés à les obferver.
Dans chaque gouvernement les loix de
l'éducation doivent être relatives au principe
; on entend ici par éducation celle
qu'on reçoit en entrant dans le monde , &
non celle des parens & des maîtres , qui
fouvent y eft contraire , fur- tout dans cerrains
Etats . Dans les Monarchies , l'éducation
doit avoir pour objet l'urbanité &
les égards réciproques : dans les Etats defpotiques
, la terreur & l'aviliffement des
efprits : dans les Républiques on a befoin
de toute la puiffance de l'éducation : elle
doit infpirer un fentiment noble , mais
pénible , le renoncement à foi-même , d'où
naît l'amour de la patrie.
Les loix que le Législateur donne , doivent
être conformes au principe de chaque
gouvernement ; dans la République ,
entretenir l'égalité & la frugalité ; dans
DECEMBRE. 1755. 83
la Monarchie , foutenir la nobleffe fans
écrafer le peuple ; fous le gouvernement
defpotique , tenir également tous les Etats
dans le filence. On ne doit point accufer
M. de Montefquieu d'avoir ici tracé aux
Souverains les principes du pouvoir arbitraire
, dont le nom feul eft fi odieux aux
Princes juftes , & à plus forte raifon au citoyen
fage & vertueux . C'eft travailler à
l'anéantir que de montrer ce qu'il faut faire
pour le conferver : la perfection de ce
gouvernement en eft la ruine ; & le code
exact de la tyrannie , tel que l'Auteur le
donne , eft en même tems la fatyre & le
fléau le plus redoutable des tyrans. A l'égard
des autres gouvernemens, ils ont chacun
leurs avantages ; le républicain eft plus
propte aux petits Etats ; le monarchique ,
aux grands ; le républicain plus fujer aux
excès , le monarchique, aux abus ; le républicain
apporte plus de maturité dans l'exécution
des loix , le monarchique plus de
promptitude.
La différence des principes des trois
gouvernemens doit en produire dans le
nombre & l'objet des loix , dans la forme
des jugemens & la nature des peines. La
conftitution des Monarchies étant invariable
& fondamentale , exige plus de loix
civiles & de tribunaux , afin que la juftice
D vj
84 MERCURE DE FRANCE.
foit rendue d'une maniere plus uniforme
& moins arbitraire ; dans les Etats modérés
, foit Monarchies , foit Républiques ,
on ne fçauroit apporter trop de formalités
aux loix criminelles. Les peines doivent
non feulement être en proportion avec le
crime , mais encore les plus douces qu'il
eft poffible , fur- tout dans la Démocratie ;
l'opinion attachée aux peines fera fouvent
plus d'effet que leur grandeur même. Dans
les Républiques , il faut juger felon la loi ,
parce qu'aucun particulier n'eft le maître
de l'altérer. Dans les Monarchies , la clémence
du Souverain peut quelquefois l'adoucir
; mais les crimes ne doivent jamais
y être jugés que par les Magiftrats expreffément
chargés d'en connoître. Enfin c'eft
principalement dans les Démocraties que
les loix doivent être féveres contre le luxe,
le relâchement des moeurs & la féduction
des femmes. Leur douceur & leur foibleffe
même les rend affez propres à gouverner
dans les Monarchies , & l'Hiftoire prouve
que fouvent elles ont porté la couronne
avec gloire.
M. de Montefquieu ayant ainfi parcouru
chaque gouvernement en particulier ,
les examine enfuite dans le rapport qu'ils
peuvent avoir les uns aux autres , mais
feulement fous le point de vue le plus
DECEM BRE. 1755. 85
"
général , c'est-à-dire fous celui qui eft uniquement
relatif à leur nature & à leur
principe. Envifagés de cette maniere , les
Etats ne peuvent avoir d'autres rapports
que celui de fe défendre , ou d'attaquer.
Les Républiques devant , par leur nature ,
renfermer un petit Etat , elles ne peuvent
fe défendre fans alliance ; mais c'eft avec
des Républiques qu'elles doivent s'allier .
La force defenfive de la Monarchie confifte
principalement à avoir des frontieres
hors d'infulte. Les Etats ont , comme les
hommes , le droit d'attaquer pour leur propre
confervation. Du droit de la guerre
dérive celui de conquête ; droit nécellaire ,
légitime & malheureux , qui laiſſe toujours
à payer une dette immenfe pour s'acquitter
envers la nature humaine , & dont la loi
générale eft de faire aux vaincus le moins
de mal qu'il eft poffible . Les Républiques
peuvent moins conquérir que les Monarchies
; des conquêtes immenfes fuppofent
le defpotifme ou l'affurent . Un des grands
principes de l'efprit de conquête doit être
de rendre meilleure , autant qu'il eft poffible
, la condition du peuple conquis :
c'eft fatisfaire tout- à - la-fois la loi naturelle
& la maxime , d'Etat . Rien n'eft plus
beau que le traité de paix de Gelon avec
les Carthaginois , par lequel il leur défen86
MERCURE DE FRANCE.
dit d'immoler à l'avenir leurs propres enfans.
Les Efpagnols , en conquérant le Pérou
, auroient dû obliger de même les habitans
à ne plus immoler des hommes à
leurs Dieux ; mais ils crurent plus avantageux
d'immoler ces peuples mêmes . Ils
n'eurent plus pour conquête qu'un vafte
défert : ils furent forcés à dépeupler leur
pays , & s'affoiblirent pour toujours par
leur propre victoire . On peut être obligé
quelquefois de changer les loix du peuple
vaincu ; rien ne peut jamais obliger de lui
ôter fes moeurs ou même fes coutumes ,
qui font fouvent toutes les moeurs . Mais
le moyen le plus für de conferver une conquête
, c'eft de mettre , s'il eft poffible , le
peuple vaincu au niveau du peuple conquerant
; de lui accorder les mêmes droits
& les mêmes privileges : c'eft ainfi qu'en
ont fouvent ufé les Romains ; c'eft ainfi
fur-tout qu'en ufa Céfar à l'égard des
Gaulois.
Jufqu'ici , en confiderant chaque gouvernement
, tant en lui-même , que dans
fon rapport aux autres , nous n'avons eu
égard ni à ce qui doit leur être commun ,
ni aux circonftances particulieres tirées
ou de la nature du pays , ou du génie des
peuples : c'eft ce qu'il faut maintenant développer.
DECEMBRE . 1755. 87
La loi commune de tous les gouvernemens
, du moins des gouvernemens modérés
, & par conféquent juftes , eft la liberté
politique dont chaque citoyen doit
jouir. Cette liberté n'eft point la licence
abfurde de faire tout ce qu'on veut , mais
le pouvoir de faire tout ce que les loix
permettent. Elle peut être envisagée , ou
dans fon rapport à la conftitution
dans fon rapport au citoyen.
ou
Il y a dans la conftitution de chaque
Etat deux fortes de pouvoirs , la puiflance
législative & l'exécutrice ; & cette derniere
a deux objets , l'intérieur de l'Etat
& le dehors . C'eft de la diftribution légitime
& de la répartition convenable de
ces différentes efpeces de pouvoirs que dépend
la plus grande perfection de la liberté
politique par rapport à la conftitution.
M. de Montefquieu en apporte pour
preuve la conftitution de la République
Romaine & celle de l'Angleterre . Il trouve
le principe de celle- ci dans cette loi
fondamentale du gouvernement des anciens
Germains , que les affaires peu importantes
y étoient décidées par les chefs ,
& que les grandes étoient portées au tribunal
de la nation , après avoir auparavant
été agitées par les chefs. M. de Monrefquieu
n'examine point fi les Anglois
8S MERCURE DE FRANCE.
jouiffent ou non de cette extrême liberté
politique que leur conftitution leur donne
, il lui fuffit qu'elle foit établie par
leurs loix : il eft encore plus éloigné de
vouloir faire la fatyre des autres Etats. Il
croit au contraire que l'excès , même dans
le bien , n'eft pas toujours défirable ; que
la liberté extrême a fes inconveniens ›
comme l'extrême fervitude ; & qu'en général
la nature humaine s'accommode
mieux d'un état moyen.
La liberté politique confidérée par rapport
au citoyen , confifte dans la fureté
où il eft à l'abri des loix , ou du moins
dans l'opinion de cette fureté, qui fait qu'un
citoyen n'en craint point un autre . C'eſt
principalement par la nature & la proportion
des peines , que cette liberté s'établit
ou fe détruit. Les crimes contre la Religion
doivent être punis par la privation
des biens que la Religion procure ; les
crimes contre les moeurs , par la honte
les crimes contre la tranquillité publique ,
par la prifon ou l'exil ; les crimes contre
la fureté , par les fupplices . Les écrits doivent
être moins punis que les actions , jamais
les fimples penfées ne doivent l'être :
accufations non juridiques , efpions , lettres
anonymes , toutes ces reffources de la
tyrannie , également honteufes à ceux qui
;
DECEMBRE . 1755. Se
en font l'inftrument, & à ceux qui s'en fervent
, doivent être profcrites dans un bon
gouvernement monarchique . Il n'eft permis
d'accufer qu'en face de la loi , qui punit
toujours ou l'accufé , ou le calomniateur.
Dans tout autre cas , ceux qui
gouvernent doivent dire avec l'Empereur
Conftance : Nous ne sçaurions foupçonner
celui à qui il a manqué un accuſateur , lorf
qu'il ne lui manquoit pas un ennemi . C'eſt
une très -bonne inftitution que celle d'une
partie publique qui fe charge , au nom de
l'Etat , de pourfuivre les crimes , & qui ait
toute l'utilité des délateurs , fans en avoir
les vils intérêts , les inconvéniens , & l'infamie.
La grandeur des impôts doit être en
proportion directe avec la liberté . Ainfi
dans les Démocraties ils peuvent être plus
grands qu'ailleurs, fans être onéreux , parce
que chaque citoyen les regarde comme
un tribut qu'il fe paye à lui-même , & qui
affure la tranquillité & le fort de chaque
membre. De plus , dans un Etat démocratique
, l'emploi infidele des deniers pu-,
blics eft plus difficile , parce qu'il eft plus
aifé de le connoître & de le punir , le dépofitaire
en devant compte , pour ainsi
dire , au premier citoyen qui l'exige .
Dans quelque gouvernement que ce foit,
90 MERCURE DE FRANCE.
l'efpece de tributs la moins onéreuſe , eft
celle qui eft établie fur les marchandiſes ;
parce que le citoyen paye
fans s'en appercevoir.
La quantité exceffive de troupes
en tems de paix , n'eft qu'un prétexte pour
charger le peuple d'impôts , un moyen
d'énerver l'Etat , & un inftrument de fervitude.
La régie des tributs qui en fait
rentrer le produit en entier dans le fifc
public , eft fans comparaifon moins à charge
au peuple, & par conféquent plus avantageufe
, lorfqu'elle peut avoir lieu , que
la ferme de ces mêmes tributs , qui laiſſe
toujours entre les mains de quelques particuliers
une partie des revenus de l'Etat.
Tout eft perdu furtout ( ce font ici les
termes de l'Auteur ) lorfque la profeffion
de traitant devient honorable ; & elle le
devient dès que le luxe eft en vigueur.
Laiffer quelques hommes fe nourrir de la
fubftance publique , pour les dépouiller à
leur tour , comme on l'a autrefois pratiqué
dans certains Etats , c'eft réparer une
injuftice par une autre , & faire deux maux
au lieu d'un .
Venons maintenant , avec M. de Montefquieu
, aux circonftances particulieres
indépendantes de la nature du gouvernement
, & qui doivent en modifier les loix.
Les circonftances qui viennent de la naDECEMBRE
1755. 91
ture du pays font de deux fortes ; les unes
ont rapport au climat , les autres au terrein.
Perfonne ne doute que le climat
n'influe fur la difpofition habituelle des
corps , & par conféquent fur les caracteres.
C'eft pourquoi les loix doivent fe conformer
au phyfique du climat dans les
chofes indifférentes , & au contraire le
combattre dans les effets vicieux : ainfi
dans les pays où l'ufage du vin eft nuifible
, c'eft une très -bonne loi que celle qui
l'interdit. Dans les pays où la chaleur du
climat porte à la pareffe , c'eft une trèsbonne
loi que celle qui encourage au travail.
Le gouvernement peut donc corriger
les effets du climat , & cela fuffit pour
mettre l'Esprit des Loix à couvert du reproche
très- injufte qu'on lui a fait d'attribuer
tout au froid & à la chaleur : car
outre que la chaleur & le froid ne font
pas la feule chofe par laquelle les climats
foient diftingués , il feroit auffi abfurde
de nier certains effets du climat que de
vouloir lui attribuer tout.
L'ufage des Efclaves établi dans les Pays
chauds de l'Afie & de l'Amérique , & réprouvé
dans les climats tempérés de l'Europe
, donne fujet à l'Auteur de traiter de
l'Esclavage civil. Les hommes n'ayant pas
plus de droit fur la liberté que fur la vie
92 MERCURE DE FRANCE.
les uns des autres , il s'enfuit que l'efclavage
, généralement parlant , eft contre la
loi naturelle. En effet , le droit d'esclavage
ne peut venir ni de la guerre , puifqu'il ne
pourroit être alors fondé que fur le rachat.
de la vie , & qu'il n'y a plus de droit fur la
vie de ceux qui n'attaquent plus ; ni de la
vente qu'un homme fait de lui- même à un
autre , puifque tout citoyen étant redevable
de fa vie à l'Etat , lui eft à plus forte
raifon redevable de fa liberté , & par conféquent
n'eft pas le maître de la vendre .
D'ailleurs quel feroit le prix de cette vente
? Ce ne peut être l'argent donné au vendeur
, puifqu'au moment qu'on fe rend
efclave , toutes les poffeffions appartiennent
au maître : or une vente fans prix eft
auffi chimérique qu'un contrat fans condition.
Il n'y a peut- être jamais eu qu'une
loi jufte en faveur de l'efclavage , c'étoit
la loi Romaine qui rendoit le débiteur efclave
du créancier ; encore cette loi ,
pour
être équitable , devoit borner la fervitude
quant au dégré & quant au tems. L'efclavage
peut tout au plus être toléré dans les
Etats defpotiques , où les hommes libres ,
trop foibles contre le gouvernement, cherchent
à devenir , pour leur propre utilité ,
les efclaves de ceux qui tyrannifent l'Etat ;
ou bien dans les climats dont la chaleur
2
DECEMBRE . 1755. 93
énerve fi fort le corps , & affoiblit tellement
le courage , que les hommes n'y font
portés à un devoir pénible , que par la
crainte du châtiment.
A côté de l'esclavage civil on peut placer
la fervitude domeftique , c'eft- à-dire ,
celle où les femmes font dans certains climats
: elle peut avoir lieu dans ces contrées
de l'Afie où elles font en état d'habiter
avec les hommes avant que de pouvoir
faire ufage de leur raifon ; nubiles par la
loi du climat , enfans par celle de la nature.
Cette fujétion devient encore plus néceffaire
dans les Pays où la polygamie eft
établie ; ufage que M. de Montefquieu ne
prétend pas juftifier dans ce qu'il a de contraire
à la Religion , mais qui dans les
lieux où il eft reçu ( & à ne parler que politiquement
) peut être fondé jufqu'à`un
certain point , ou fur la nature du Pays
ou fur le rapport du nombre des femmes
au nombre des hommes. M. de Montefquieu
parle à cette occafion de la Répudiation
& du Divorce ; & il établit fur de
bonnes raifons , que la répudiation une
fois admife , devroit être permife aux femmes
comme aux hommes.
Si le climat a tant d'influence fur la fervitude
domestique & civile , il n'en a pas
moins fur la fervitude politique , c'est- à94
MERCURE DE FRANCE.
dire fur celle qui foumet un peuple à un
autre. Les peuples du Nord font plus forts
& plus courageux que ceux du Midi ; ceux
ci doivent donc en géneral être fubjugués ,
ceux - là conquérans ; ceux - ci efclaves ,
ceux -là libres : c'eft auffi ce que l'Hiftoire
confirme . L'Afie a été conquiſe onze fois
par lès peuples du Nord ; l'Europe a fouffert
beaucoup moins de révolutions .
A l'égard des loix relatives à la nature
du terrein , il eft clair que la Démocratie
convient mieux que la Monarchie aux
Pays ftériles , où la terre a befoin de toute
l'induftrie des hommes. La liberté d'ailleurs
eft en ce cas une efpece de dédommagement
de la dureté du travail . Il faut
plus de loix pour un peuple agriculteur que
pour un peuple qui nourrit des troupeaux,
pour celui - ci que pour un peuple chaffeur,
pour un peuple qui fait ufage de la monnoie
, que pour celui qui l'ignore.
Enfin on doit avoir égard au génie particulier
de la Nation . La vanité qui groffit
les objets , eft un bon reffort pour le gouvernement
; l'orgueil qui les dépriſe eft un
reffort dangereux . Le Légiflateur doit ref
pecter jufqu'à un certain point les préjugés
, les paffions , les abus. Il doit imiter
Solon , qui avoit donné aux Athéniens ,
non les meilleures loix en elles-mêmes ,
DECEMBRE
1755. 95
mais les meilleures qu'ils puffent avoir . Le
caractere gai de ces peuples demandoit des
loix plus faciles ; le caractere dur des Lacédémoniens
, des loix plus féveres. Les
loix font un mauvais moyen pour changer
les manieres & les ufages ; c'eft par les récompenfes
& l'exemple qu'il faut tâcher
d'y parvenir. Il eft pourtant vrai en mêmetems
, que les loix d'un peuple , quand on
n'affecte pas d'y choquer groffierement &
directement fes moeurs , doivent influer
infenfiblement fur elles , foit pour les affermir,
foit pour les changer.
Après avoir approfondi de cette maniere
la nature & l'efprit des Loix par rapport
aux différentes efpeces de Pays & de
peuples , l'Auteur revient de nouveau à
confidérer les Etats les uns par rapport aux
autres. D'abord en les comparant entre
eux d'une maniere générale , il n'avoit
pu les envifager que par rapport au mal
qu'ils peuvent fe faire. Ici il les envifage
par rapport aux fecours mutuels
qu'ils peuvent le donner : or ces fecours
font principalement fondés fur le Commerce.
Si l'efprit de Commerce produit
naturellement un efprit d'intérêt oppofé
à la fublimité des vertus morales , il
rend auffi un peuple naturellement jufte ,
& en éloigne l'oifiveté & le brigandage.
96 MERCURE DE FRANCE.
Les Nations libres qui vivent fous des
gouvernemens modérés , doivent s'y livrer
plus que les Nations efclaves. Jamais une
Nation ne doit exclure de fon commerce
une autre Nation , fans de grandes raifons.
Au refte la liberté en ce genre n'eft pas une
faculté abfolue accordée aux Négocians de
faire ce qu'ils veulent ; faculté qui leur
feroit fouvent préjudiciable : elle confifte
à ne gêner les Négocians qu'en faveur du
Commerce. Dans la Monarchie la Nobleffe
ne doit point s'y adonner , encore
moins le Prince . Enfin il eft des Nations
auxquelles le Commerce eft défavantageux
; ce ne font pas celles qui n'ont befoin
de rien , mais celles qui ont besoin de
tout : paradoxe que l'Auteur rend fenfible
par l'exemple de la Pologne , qui manque
de tout , excepté de bled , & qui , par
le commerce qu'elle en fait , prive les
payfans de leur nourriture , pour fatisfaire
au luxe des Seigneurs. M. de Montefquieu ,
à l'occafion des loix que le Commerce
exige , fait l'hiftoire de fes différentes révolutions
; & cette partie de fon livre
n'eft ni la moins intéreffante , ni la moins
curieufe. Il compare l'appauvriffement de
l'Espagne ,, par la découverte de l'Amérique
, au fort de ce Prince imbécille de la
Fable , prêt à mourir de faim , pour avoir
demandé
1
DECEMBRE. 1755 : 97
demandé aux Dieux que tout ce qu'il toucheroit
fe convertit en or. L'ufage de la
monnoie étant une partie confidérable de
l'objet du Commerce , & fon principal
inftrument , il a cru devoir , en conféquence
, traiter des opérations fur la monnoie
, du change , du payement des dettes
publiques , du prêt à intérêt dont il fixe
les loix & les limites , & qu'il ne confond
nullement avec les excès fi juftement condamnés
de l'ufure.
La population & le nombre des habitans
ont avec le Commerce un rapport
immédiat ; & les mariages ayant pour objet
la population , M. de Montefquieu approfondit
ici cette importante matiere. Če
qui favorife le plus la propagation eft la
continence publique ; l'expérience prouve
que les conjonctions illicites y contribuent
peu , & même y nuifent. On a établi avec
juftice , pour les mariages , le confentement
des peres ; cependant on y doit mettre
des reftrictions : car la loi doit en général
favorifer les mariages. La loi qui
défend le mariage des meres avec les fils ,
oft ( indépendamment des préceptes de la
Religion ) une très-bonne loi civilę ; car
fans parler de plufieurs autres raifons , les
contractans étant d'âge très- différent , ces
fortes de mariages peuvent rarement avoir
I. Vol. E
98 MERCURE DE FRANCE.
>
la propagation pour objet. La loi qui défend
le mariage du pere avec la fille , eſt
fondée fur les mêmes motifs : cependant
( à ne parler que civilement ) elle n'eft pas
fi indifpenfablement néceffaire que l'autre
à l'objet de la population , puifque la vertu
d'engendrer finit beaucoup plus tard
dans les hommes ; auffi l'ufage contraire
a t'il eu lieu chez certains peuples que la
lumiere du Chriftianifme n'a point éclairés.
Comme la nature porte d'elle -même
au mariage , c'eft un mauvais gouvernement
que celui où on aura befoin d'y encourager.
La liberté , la fûreté , la modération
des impôts , la profcription du luxe,
font les vrais principes & les vrais foutiens
de la population : cependant on peut
avec fuccès faire des loix pour encourager
les mariages , quand , malgré la corruption
, il reste encore des refforts dans
le peuple qui l'attachent à fa patrie. Rien
n'eft plus beau que les loix d'Augufte pour
favorifer la propagation de l'efpece : par
malheur il fit ces loix dans la décadence ,
ou plutôt dans la chute de la République ;
& les citoyens découragés devoient prévoir
qu'ils ne mettroient plus au monde
que
des efclaves : auffi l'exécution de ces
loix fut elle bien foible durant tout le
tems des Empereurs payens. Conftantin
DECEM BRE . 1755. 99
enfin les abolit en fe faifant Chrétien ,
comme fi le Chriftianifme avoit pour but
de dépeupler la fociété , en confeillant à
un petit nombre la perfection du célibat.
L'établiſſement des hôpitaux , felon l'efprit
dans lequel il eft fait , peut nuire à la;
population , ou la favorifer. Il peut & il
doit même y avoir des hôpitaux dans un
Etat dont la plupart des citoyens n'ont que
leur , induftrie pour reffource , parce que
cette induftrie peut quelquefois être malheureuſe
; mais les fecours que ces hôpitaux
donnent , ne doivent être que paffagers
, pour ne point encourager la mendicité
& la fainéantife. Il faut commencer
par rendre le peuple riche , & bâtir enfuite
des hôpitaux pour les befoins imprévus
& preffans . Malheureux les Pays où
la multitude des hôpitaux & des monafteres
, qui ne font que des hôpitaux perpétuels
, fait que tout le monde eft à fon
aife , excepté ceux qui travaillent.
M. de Montefquieu n'a encore parlé
que des loix humaines. Il paffe maintenant
à celles de la Religion , qui dans prefque
tous les Etats font un objet fi effentiel
du gouvernement. Par- tout il fait l'éloge
du Chriftaifine ; il en montre les avantages
& la grandeur ; il cherche à le faire
aimer. Il foutient qu'il n'eft pas impoffi
E ij
100 MERCURE DE FRANCE.
ble , comme Bayle l'a prétendu , qu'une
fociété de parfaits Chrétiens forme un
Etat fubfiftant & durable . Mais il s'eft cru
permis auffi d'examiner ce que les différentes
Religions ( humainement parlant )
peuvent avoir de conforme ou de contraire
au génie & à la fituation des peuples
qui les profeffent. C'est dans ce point de
vue qu'il faut lire tout ce qu'il a écrit fur
cette matiere , & qui a été l'objet de tant
de déclamations injuftes. Il eft furprenant
furtout que dans un fiecle qui en appelle
tant d'autres barbares , on lui ait fait un
crime de ce qu'il dit de la tolérance ; comme
fi c'étoit approuver une religion que
de la tolérer comme fi enfin l'Evangile
même ne profcrivoit pas tout autre moyende
le répandre , que la douceur & la perfuafion.
Ceux en qui la fuperftition n'a
pas éteint tout fentiment de compaflion
& de juftice , ne pourront lire , fans être
attendris , la remontrance aux Inquifiteurs,
ce tribunal odieux , qui outrage la Religion
en paroiffant la venger.
Enfin après avoir traité en particulier
des différentes efpeces de loix que les
hommes peuvent avoir , il ne reste plus
qu'à les comparer toutes enfemble , & à
les examiner dans leur rapport avec les
chofes fur lefquelles elles ftatuent. Les
DECEMBRE. 1755. 101
hommes font gouvernés par différentes efpeces
de loix ; par le droit naturel , commun
à chaque individu ; par le droit divin
, qui eft celui de la Religion ; par le
droit eccléfiaftique , qui eft celui de la
police de la Religion ; par le droit civil ,
qui eft celui des membres d'une même
fociété
; par
le droit politique , qui eft celui
du gouvernement de cette fociété ; par
le droit des gens , qui eft celui des fociétés
les unes par rapport aux autres. Ces droits
ont chacun leurs objets diftingués , qu'il
faut bien fe garder de confondre. On
ne doit jamais régler par l'un ce qui appar
tient à l'autre , pour ne point mettre de dé
fordre ni d'injuftice dans les principes qui
gouvernent les hommes . Il faut enfin que
les principes qui prefcrivent le genre des
loix , & qui en circonfcrivent l'objet , regnent
auffi dans la maniere de les compofer.
L'efprit de modération doit , autant qu'il eft
poffible , en dicter toutes les difpofitions.
Des loix bien faites feront conformes à
l'efprit du Législateur , même en paroiffant
s'y oppofer. Telle étoit la fameuſe
loi de Solon , par laquelle tous ceux qui
ne prenoient point de part dans les féditions
, étoient déclarés infâmes . Elle prévenoit
les féditions , ou les rendoit utiles.
en forçant tous les membres de la Répu
1
1
E iij
102 MERCURE DE FRANCE.
blique à s'occuper de fes vrais intérêts .
L'Oftracifime même étoit une très - bonne
loi ; car d'un côté elle étoit honorable au
citoyen qui en étoit l'objet , & prévenoit
de l'autre les effets de l'ambition ; il falloit
d'ailleurs un très - grand nombre de fuffrages,
& on ne pouvoit bannir que tous les
cinq ans. Souvent les loix qui paroiffent les
mêmes, n'ont ni le même motif, ni le même
effet , ni la même équité : la forme du gouvernement
, les conjonctures & le génie du
peuple changent tout . Enfin le ftyle des
loix doit être fimple & grave : elles peuvent
fe difpenfer de motiver , parce que
le motif eft fuppofé exifter dans l'efprit
du Législateur ; mais quand elles motivent
, ce doit être fur des principes évidens
elles ne doivent pas reffembler à
cette loi qui , défendant aux aveugles de
plaider , apporte pour raifon qu'ils ne peuvent
pas voir les ornemens de la Magiftrature
.
M. de Montefquieu , pour montrer par
des exemples l'application de fes principes
, a choifi deux différens peuples , le
plus célébre de la terre , & celui dont
'Hiftoire nous intéreffe le plus , les Romains
& les François. Il ne s'attache qu'a
une partie de la Jurifprudence du premier;
celle qui regarde les fucceffions . A l'égard
DECEMBRE. 1755. 103
turs ,
des François , il entre dans le plus grand
détail fur l'origine & les révolutions de
leurs loix civiles , & fur les différens
ufages abolis ou fubfiftans , qui en ont été
la fuite il s'étend principalement fur les
loix féodales , cette efpece de gouvernement
inconnu à toute l'antiquité , qui le
fera peut- être pour toujours aux fiecles fur-
& qui a fait tant de biens & tant
de maux. Il difcute fur-tout ces loix dans
le rapport qu'elles ont à l'établiffement &
aux révolutions de la Monarchie Françoife
; il prouve , contre M. l'Abbé du
Bos , que les Francs font réellement entrés
en conquérans dans les Gaules , &
qu'il n'eft pas vrai , comme cet Auteur le
prétend , qu'ils ayent été appellés par les
peuples pour fuccéder aux droits des Empereurs
Romains qui les opprimoient :
détail profond , exact & curieux , mais
dans lequel il nous eft impoffible de le
fuivre , & dont les points principaux fe
trouveront d'ailleurs répandus dans différens
endroits de ce Dictionnaire , aux articles
qui s'y rapportent.
Telle eft l'analyfe générale , mais trèsinforme
& très-imparfaite , de l'ouvrage
de M. de Montefquieu : nous l'avons féparée
du refte de fon éloge , pour ne pas
trop interrompre la fuite de notre récit.
E iv
104 MERCURE DE FRANCE.
M. Dalembert nous permettra de combattre
ici fa modeftie . Nous ofons dire , d'après
la voix publique , que cette analyſe
eft un modele, qu'elle met l'Efprit des Loix
dans tout fon jour , & qu'il n'eft pas poffible
d'en faire une meilleure . Heureux
le texte , quelque mérite qu'il ait en foi ,
qui eft ainfi commenté !
Genre
Collectivité
Faux
Langue
Vers et prose
Type d'écrit journalistique
Courrier des lecteurs
Faux
Constitue la suite d'un autre texte
Est rédigé par une personne
Soumis par kipfmullerl le