Titre
VERS DE M. DE *** Sur la mort de M. de Montesquieu, à M. de Secondat.
Titre d'après la table
Vers de M. de ***, sur la mort de M. de Montesquieu
Fait partie d'une livraison
Fait partie d'une section
Page de début
69
Page de début dans la numérisation
320
Page de fin
71
Page de fin dans la numérisation
322
Incipit
Digne fils d'un illustre pere,
Texte
VERS DE M. DE ***
Sur la mort de M. de Montefquieu ,
à M. de Secondat ..
Digne fils d'un illuftre pere
Je viens avec toi le pleurer :
Les Dieux ont voulu retirer
Cette ame accordée à la terre
Pour l'embellir & l'éclairer.
Couronné par la main d'Aftrée ,
Dont il releva les autels ,
Montefquieu vit dans l'empirée .
Il voit fous fes pas immortels
Gronder , éclater fur nos têtes
Les vents , la foudre & les tempêtes ,
Effroi revéré des mortels .
Ses yeux contemplent l'harmonie
De ces globes prodigieux ,
Flottans fans nombre fous les cieux ' ;
Tandis qu'au prix de notre vie ,
Barbares ridiculement ;
Sur cette trifte fourmilliere ,
Nous difputons fuperbement
Un peu de boue & de pouffiere .
Hélas ! nous perdons la lumiere ,
Par qui nos yeux pouvoient s'ouvrir :
Ce fiècle de fer & de fange
70 MERCURE DE FRANCE.
N'étoit pas fait pour en jouir ;
Le ciel nous l'enleve & ſe venge !
Montefquieu vit l'opinion
Déchirer & bruler fon livre ;
Et la vaine & foible raiſon
Vanter fes leçons fans les fuivre.
Il porta jufques dans fes moeurs
Le fublime de fes idées ;
Forcé d'écraſer des Pygmées ,
Qui réuniffoient leur fureur ,
Par l'éclat de fon feu rapide.
Il confond leurs traits impofteurs :
Sur les bords célebres du Xante ,
Les Dieux que la fable nous vante ,
Combattirent moins noblement.
O peuple brillant & barbare ,
Quelle inconféquence bizarre
Signale ton aveuglement !
Ce Législateur , ce grand homme,
Que l'univers nous envia ,
Eût été Solon ou Numa
Jadis dans Athenes ou dans Rome ;
En France fimple citoyen
Digne de tout , il ne fut rien.
Des colonnes & des ſtatues
Autrefois l'auroient illuftré ;
Ses cendres reftent confondues
Dans celles d'un peuple ignoré.
Nos ayeux , leurs nobles exemples
NOVEMBRE . 1755 .
71
N'ont plus aujourd'hui de rivaux ;
La vertu chez eux eut des temples ,
Et n'a pas chez nous des tombeaux.
Mais les plus nobles fepultures
De marbre & d'airain périront ;
Des humains les races futures
Mille fois fe fuccéderont ;
Toujours nouveaux dans tous les âges
Montefquieu jamais ne mourra ;
Avec eux fon nom renaîtra ,
Et fes temples font fes ouvrages.
On a attribué ces vers à M. de Voltaire , mais
nous n'avons ofé les mettre fous fon nom , sans être
furs qu'ils fuffent de lui
Sur la mort de M. de Montefquieu ,
à M. de Secondat ..
Digne fils d'un illuftre pere
Je viens avec toi le pleurer :
Les Dieux ont voulu retirer
Cette ame accordée à la terre
Pour l'embellir & l'éclairer.
Couronné par la main d'Aftrée ,
Dont il releva les autels ,
Montefquieu vit dans l'empirée .
Il voit fous fes pas immortels
Gronder , éclater fur nos têtes
Les vents , la foudre & les tempêtes ,
Effroi revéré des mortels .
Ses yeux contemplent l'harmonie
De ces globes prodigieux ,
Flottans fans nombre fous les cieux ' ;
Tandis qu'au prix de notre vie ,
Barbares ridiculement ;
Sur cette trifte fourmilliere ,
Nous difputons fuperbement
Un peu de boue & de pouffiere .
Hélas ! nous perdons la lumiere ,
Par qui nos yeux pouvoient s'ouvrir :
Ce fiècle de fer & de fange
70 MERCURE DE FRANCE.
N'étoit pas fait pour en jouir ;
Le ciel nous l'enleve & ſe venge !
Montefquieu vit l'opinion
Déchirer & bruler fon livre ;
Et la vaine & foible raiſon
Vanter fes leçons fans les fuivre.
Il porta jufques dans fes moeurs
Le fublime de fes idées ;
Forcé d'écraſer des Pygmées ,
Qui réuniffoient leur fureur ,
Par l'éclat de fon feu rapide.
Il confond leurs traits impofteurs :
Sur les bords célebres du Xante ,
Les Dieux que la fable nous vante ,
Combattirent moins noblement.
O peuple brillant & barbare ,
Quelle inconféquence bizarre
Signale ton aveuglement !
Ce Législateur , ce grand homme,
Que l'univers nous envia ,
Eût été Solon ou Numa
Jadis dans Athenes ou dans Rome ;
En France fimple citoyen
Digne de tout , il ne fut rien.
Des colonnes & des ſtatues
Autrefois l'auroient illuftré ;
Ses cendres reftent confondues
Dans celles d'un peuple ignoré.
Nos ayeux , leurs nobles exemples
NOVEMBRE . 1755 .
71
N'ont plus aujourd'hui de rivaux ;
La vertu chez eux eut des temples ,
Et n'a pas chez nous des tombeaux.
Mais les plus nobles fepultures
De marbre & d'airain périront ;
Des humains les races futures
Mille fois fe fuccéderont ;
Toujours nouveaux dans tous les âges
Montefquieu jamais ne mourra ;
Avec eux fon nom renaîtra ,
Et fes temples font fes ouvrages.
On a attribué ces vers à M. de Voltaire , mais
nous n'avons ofé les mettre fous fon nom , sans être
furs qu'ils fuffent de lui
Langue
Vers et prose
Type d'écrit journalistique
Courrier des lecteurs
Faux
Genre littéraire
Mots clefs
Est adressé ou dédié à une personne
Est rédigé par une personne