Titre
Lettre à l'Auteur du Mercure.
Titre d'après la table
Lettre à l'Auteur du Mercure sur la possibilité de connoître par l'ouverture des cadavres les causes des maladies,
Fait partie d'une livraison
Fait partie d'une section
Page de début
128
Page de début dans la numérisation
141
Page de fin
131
Page de fin dans la numérisation
144
Incipit
MONSIEUR, j'ai toujours eu des doutes obstinés, sur la possibilité où nous
Texte
Lettre à l'Auteur du Mercure.
ONSIEUR , j'ai toujours eu des doutes
obftinés , fur la poffibilité où nous
fommes , de reconnoître infailliblement
par l'ouverture des cadavres , les caufes
éloignées & immédiates des maladies du
corps humain. M. l'Abbé Raynal votre prédéceffeur
, affure néanmoins dans le Mercure
de Septembre 1751 , pages 149 & fuivantes
, » que que les avantages qui résultent
» de l'ouverture des cadavres , foumettent
alors à l'examen des fens , la cauſe même
» qui avoit produit la maladie , &c n .
C'eft à l'occafion des obfervations Anatomiques
tirées de l'ouverture d'un grand
nombre de cadavres , propres à découvrir
les caufes des maladies , & leurs remedes ,
par M. Barrere , médecin à Perpignan , & c.
que M. l'Abbé Raynal , nous donne ce
moyen prefque comme certain de nous
inftruire fur cette matiere. J'ai parcouru
avec des yeux avides , & j'ai lu enfuite
avec toute l'application poffible le Livre en
queſtion , Edition de 1753 , mais je n'y ai
point trouvé ce que l'Auteur & M. l'Abbé
Raynal promettent. Si on nous eut promis
de nous montrer par l'ouverture des cadavres
les caufes certaines de la mort , au lieu
JUILLET. 1755- 129
de celles des maladies , on y auroit infiniment
mieux réuffi . En effet , Monfieur ,
qu'apperçoit-on dans la tête d'un homme
mort d'une fievre maligne , d'une phrénéfie
, d'une apoplexie & dans les maladies
caufées par de fortes paffions de l'ame.
Comme dans les fix premieres obfervations
de l'Auteur , on trouvera les vaiffeaux de
la dure-mere & ceux du cerveau , farcis &.
gorgés d'un fang épais & noirâtre , quelque
épanchement de férofités dans l'un ou
l'autre des ventricules , des grumeaux de.
fang caillé dans les finus , qu'on prend pour
des concrétions polipeufes ; il eft aifé de
fentir que ces accidens font plûtôt l'effet de.
la maladie , que fa caufe , & que ces,
mêmes effets font évidemment celle de la
mort. Un empiéme , des dépôts particu
liers dans le poulmon , & les ulcères qu'on
trouve dans l'ouverture des cadavres de
ceux qui font morts d'une de ces maladies.
de poitrine , n'annoncent pas la caufe qui
a produit ces défordres , mais feulement,
leurs effers , en faifant fuccomber le malade
à la force de ces accidens , lorfque la capacité
de la poitrine a été remplie par un
épanchement , qui a fuffoqué le malade ,
ou que fon poulmon a été fondu en partie ,
par d'abondantes fupurations , & c. Voilà
done encore des caufes de mort , & non de
F v
130 MERCURE DE FRANCE.
maladies. Les eaux épanchées dans le ventre
d'un hydropique , font-elles la caufe de
l'hydropifie ; un abcès au foye fe produitil
de lui-même , pour caufer les accidens
qui font périr le malade , non fans doute ;
& quoiqu'on fçache en général que cet
abcès eft la fuite de quelque inflammation
locale ou générale de ce vifcère , on n'eſt
pas plus inftruit , fur ce qui a donné lieu à
cette inflammation , pour être en état de
l'attaquer dans fon principe , & de la prévenir
même afin d'éviter de bonne heure
les fuites funeftes qu'elle peut avoir.
En attendant , Monfieur , le grand ouvrage
que Monfieur Barrere doit publier ,
& dont celui qu'il a donné n'eft que l'efquiffe
, je perfifte toujoujours dans mes
doutes fur l'infuffifance de l'ouverture des
cadavres pour découvrir la caufe des maladies.
Je fouhaite ardemment qu'il réuffiſſe,
mais ce ne fera affurément pas comme il a
déja fait , en prenant les effets d'une maladie
pour fa caufe.
Je vous prie , Monfieur , d'inférer la
préfente dans un de vos Mercures , non
dans la vûe de diminuer en rien le mérite
de l'ouvrage de M. Barrere , mais feulement
pour convaincre de plus en plus le
public , qu'il eft des cauſes infenfibles de
maladies , que toute la fagacité de l'efprit
JUILLET. 1755. 1755 131
humain , ne fçauroit appercevoir , & que
dans bien des cas , l'Aphorifme d'Hippocrate
, fublatâ caufâ tollitur effectus, eft d'une
exécution impoffible.
J'ai l'honneur d'être , &c.
A Toulouſe , ce 25 Avril 1755 .
ONSIEUR , j'ai toujours eu des doutes
obftinés , fur la poffibilité où nous
fommes , de reconnoître infailliblement
par l'ouverture des cadavres , les caufes
éloignées & immédiates des maladies du
corps humain. M. l'Abbé Raynal votre prédéceffeur
, affure néanmoins dans le Mercure
de Septembre 1751 , pages 149 & fuivantes
, » que que les avantages qui résultent
» de l'ouverture des cadavres , foumettent
alors à l'examen des fens , la cauſe même
» qui avoit produit la maladie , &c n .
C'eft à l'occafion des obfervations Anatomiques
tirées de l'ouverture d'un grand
nombre de cadavres , propres à découvrir
les caufes des maladies , & leurs remedes ,
par M. Barrere , médecin à Perpignan , & c.
que M. l'Abbé Raynal , nous donne ce
moyen prefque comme certain de nous
inftruire fur cette matiere. J'ai parcouru
avec des yeux avides , & j'ai lu enfuite
avec toute l'application poffible le Livre en
queſtion , Edition de 1753 , mais je n'y ai
point trouvé ce que l'Auteur & M. l'Abbé
Raynal promettent. Si on nous eut promis
de nous montrer par l'ouverture des cadavres
les caufes certaines de la mort , au lieu
JUILLET. 1755- 129
de celles des maladies , on y auroit infiniment
mieux réuffi . En effet , Monfieur ,
qu'apperçoit-on dans la tête d'un homme
mort d'une fievre maligne , d'une phrénéfie
, d'une apoplexie & dans les maladies
caufées par de fortes paffions de l'ame.
Comme dans les fix premieres obfervations
de l'Auteur , on trouvera les vaiffeaux de
la dure-mere & ceux du cerveau , farcis &.
gorgés d'un fang épais & noirâtre , quelque
épanchement de férofités dans l'un ou
l'autre des ventricules , des grumeaux de.
fang caillé dans les finus , qu'on prend pour
des concrétions polipeufes ; il eft aifé de
fentir que ces accidens font plûtôt l'effet de.
la maladie , que fa caufe , & que ces,
mêmes effets font évidemment celle de la
mort. Un empiéme , des dépôts particu
liers dans le poulmon , & les ulcères qu'on
trouve dans l'ouverture des cadavres de
ceux qui font morts d'une de ces maladies.
de poitrine , n'annoncent pas la caufe qui
a produit ces défordres , mais feulement,
leurs effers , en faifant fuccomber le malade
à la force de ces accidens , lorfque la capacité
de la poitrine a été remplie par un
épanchement , qui a fuffoqué le malade ,
ou que fon poulmon a été fondu en partie ,
par d'abondantes fupurations , & c. Voilà
done encore des caufes de mort , & non de
F v
130 MERCURE DE FRANCE.
maladies. Les eaux épanchées dans le ventre
d'un hydropique , font-elles la caufe de
l'hydropifie ; un abcès au foye fe produitil
de lui-même , pour caufer les accidens
qui font périr le malade , non fans doute ;
& quoiqu'on fçache en général que cet
abcès eft la fuite de quelque inflammation
locale ou générale de ce vifcère , on n'eſt
pas plus inftruit , fur ce qui a donné lieu à
cette inflammation , pour être en état de
l'attaquer dans fon principe , & de la prévenir
même afin d'éviter de bonne heure
les fuites funeftes qu'elle peut avoir.
En attendant , Monfieur , le grand ouvrage
que Monfieur Barrere doit publier ,
& dont celui qu'il a donné n'eft que l'efquiffe
, je perfifte toujoujours dans mes
doutes fur l'infuffifance de l'ouverture des
cadavres pour découvrir la caufe des maladies.
Je fouhaite ardemment qu'il réuffiſſe,
mais ce ne fera affurément pas comme il a
déja fait , en prenant les effets d'une maladie
pour fa caufe.
Je vous prie , Monfieur , d'inférer la
préfente dans un de vos Mercures , non
dans la vûe de diminuer en rien le mérite
de l'ouvrage de M. Barrere , mais feulement
pour convaincre de plus en plus le
public , qu'il eft des cauſes infenfibles de
maladies , que toute la fagacité de l'efprit
JUILLET. 1755. 1755 131
humain , ne fçauroit appercevoir , & que
dans bien des cas , l'Aphorifme d'Hippocrate
, fublatâ caufâ tollitur effectus, eft d'une
exécution impoffible.
J'ai l'honneur d'être , &c.
A Toulouſe , ce 25 Avril 1755 .
Signature
A Toulouse, ce 25 Avril 1755.
Lieu
Date, calendrier grégorien
Langue
Vers et prose
Type d'écrit journalistique
Courrier des lecteurs
Faux
Mots clefs
Domaine
Est adressé ou dédié à une personne
Provient d'un lieu