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Titre

SÉANCE DU CHASTELET DE PARIS, du Lundi 25 Octobre 1762, & Discours prononcés par M. DE SARTINE, Lieutenant Général de Police ; par M. MOREAU, Procureur du Roi au Châtelet, faisant les fonctions d'Avocat du Roi ; & par M. CHARDON, Lieutenant Particulier, Président au Parc Civil : imprimés par les soins de Me Jean- Baptiste Courlesvaux, l'aîné, Me Jacques Roger le Comte, Me Jean - Baptiste Marye Procureurs au Châtelet & Procureurs de Communauté en éxercice, & de Me Louis Varnier, aussi Procureur au Châtelet, Syndic, à Paris, de l'Imprimerie de le Breton, premier Imprimeur ordinaire du Roi, & ordinaire de sa Communauté, rue de  la Harpe, 1762, Brochure in- 4° . à la tête de laquelle se trouve le Portrait de M. d'ARGOUGES, gravé d'après l'Argiliere.

Titre d'après la table

SÉANCE du Châtelet de Paris.

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64
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287
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73
Page de fin dans la numérisation
296
Incipit

CE Recueil peut être regardé comme un monument de respect & de reconnoissance

Texte
SÉANCE DU CHASTELET DE
PARIS , du Lundi 25 Octobre 1762,
& Difcours prononcés par M. DE
SARTINE , Lieutenant Général de
Police ; par M. MOREAU , Procureur
du Roi au Châtelet , faifant les fonctions
d'Avocat du
Roi
; & par
M. CHARDON , Lieutenant Partici
lier , Préfident au Parc Civil : imprimés
parles foins de M Jean- Baptifte
Courlefvaux , l'aîné , M Jacques
Roger le Comte , M Jean - Baptiffe
Marye Procureurs au Châtelet &
Procureurs de Communauté en éxercice
, & de Me Louis Varnier , auffi
Procureur au Châtelet , Syndic , à Paris
, de l'Imprimerie de le Breton , premier
Imprimeur ordinaire du Roi , &
ordinaire de fa Communauté , rue de
enbroe
JANVIER. 1763. 65
la Harpe , 1762 , Brochure in - 4° . à
la tête de laquelle fe trouve le Portrait
de M. d'ARGOUGES , gravé d'après
l'Argiliere.
CE Recueil peut être regardé comme
un monument de refpect & de reconnoiffance
, érigé par MM. les Procu
reurs du Châtelet , à la gloire de M.
d'Argouges père , qui pendant plus de
52 ans a rempli la Charge de Lieutenant
Civil , & dont la retraite les rendroit
inconfolables , fi d'un côté elle
n'étoit pas réparée par un fils digne d'un
père auquel il fuccéde , & de l'autre ,:
par la fatisfaction de voir un Magiftrat
refpectable jouir du repos qu'il a fi bien
mérité.
Trois Magiftrats refpectables par leur
place , leur probité & leurs lumières
ont été dans cette occafion les interprêtes
des fentimens du Public , en rendant à
M. d'Argouges le tribut d'éloges dû à un
Citoyen chargé d'années & de gloire ,
& qui va paffer une vieilleffe honorable
au fein d'une tranquillité qu'il a toujours
facrifiée au bien des Particuliers.
Ce fut M. De Sartine qui prononça le
premier Difcours. S'étant rendu dans
66 MERCURE DE FRANCE.
la Chambre du Confeil , il fit part à la
Compagnie qu'il préfidoit , de la Lettre
par laquelle M. d'Argouges , père , Lieutenant
Civil , lui annonçoit fa retraite ,
& il dit en parlant de ce grand Magiftrat :
»les Citoyens dont il a affuré le bon-
» heur & la fortune , les Familles qui
» lui doivent & leur union & la paix dont
» elles jouiffent , les Juges qui ont ad-
» miré fa prudence & fon équité , con-
» ferveront pour lui ce tendre fouvenir ,
» cette eſtime précieuſe qu'on a pour les
» grands hommes.
"
"
"
La Compagnie fe rendit enfuite à la
Chapelle où la Meffe fut célébrée folemnellement.
La Meffe finie , on remonta
dans la Chambre du Confeil ; & après
y avoir délibéré fur différentes affaires
on defcendit au Parc Civil. M. Chardon
qui y préfidoit , fit l'ouverture des Audiences
par la lecture des Ordonnances.
M. Moreau , Procureur du Roi , prenant
enfuite la parole , prononça un long
difcours fur les devoirs des Magiftrats ,
qu'il envifage fous trois points de vue :
ce qu'un Magiftrat doit faire pour le
Public en général , ce qu'il doit à chaque
Particulier , & ce qu'il fe doit à luimême
. Cette divifion forme les trois
parties de fon diſcours , dont la premiere
JANVIER. 1763. 67
fe fubdivife en trois autres points : les
devoirs publics d'un Magiftrat par rap
port à la Religion , aux fentimens dûs aut
Prince , & à l'union qui doit régner
entre les Concitoyens. On fent dans
quels détails l'Orateur a dû entrer , & les
bornes que nous préfcrivent les Loix de
l'Analyſe . Nous nous contenterons de
citer quelques morceaux choifis qui
pourront donner une idée de l'efprit ,
du talent & du ftyle de l'Auteur. It
fait ainfi le portrait du fanatifme. » Le
20 fanatifme audacieux marche la tête
2 haute , le front découvert ; le nom de
» Dieu eft dans fa bouche ; toute la cha-
» leur de l'amour-propre eft dans fon
» coeur. Il cherche à dompter les efprits
» en les échauffant , il prend en main le
» flambeau de la Religion , il détruit les
» temples du Dieu que le peuple adore ;
» il renverfe fes autels , & c'eft für leurs
», débris , que fumant de fang & de car
» nage , il veut en élever d'autres à fon
nidôlei ,
Le Magiftrat doit veiller à l'éducation
publique , & conféquemment doir s'op
pofer à tout fyftême d'éducation qui
pourroit allarmer les moenrs & la Religion.
» Si l'on peut craindre , dit M.
Moreau , qu'une mère aveugle , ou
68 MERCURE DE FRANCE.
N
» plutôt aveuglée par le défir de paroître
» inftruite , ne tire de fon fein l'objet de
» fa tendreffe , pour l'élever comme les
» bêtes , & le confier aux foins , de ce-
» lui qui en s'annonçant pour l'Apôtre
» de la nature, n'a travaillé, on peut le dire ,
» qu'à dénaturer & avilir ce qui en eſt le
» plus bel ornement ; c'eft au Magiftrat à
" employer toute fon autorité & l'organe
» de la juftice , afin de faire profcrire
» avec éclat l'auteur, l'ouvrage & fes fec-
» tateurs , comme autant de peftes pu
» bliques , capables par le poifon qu'ils
» répandent , d'infecter l'air le plus pur.
On aimera le morceau fuivant fur les
devoirs du Magiftrat dans les calamités
publiques: » Qu'un fléau afflige une Pro
» vince , qu'une affreufe difette la déſole
» & la dévafte que l'Ange de la mort
» étende fes aîles fur une contrée ; qu'un
» incendie fubit , en développant des
» tourbillons de flammes , répandent au
loin la confternation & l'effroi»; les
» édifices les plus fomptueux , les mo-
» numens élevés pour la postérités, les
» temples , les palais comme la maiſon
» du Citoyen & la cabane de l'Artiſan ;
» les richeffes de l'Etat comme le patrimoine
du Particulier , deviennent la
» proie d'un élément qui réduit tout en
JANVIER. 1763. 69
» cendres. Le zéle du Magiftrat le fait
» fuffire à tout ; il fe porte avec ardeur
» dans les endroits même périlleux , où
» il croit que fa préfence peut être utile.
» Quelque affecté qu'il foit du malheur
» public , le défaftre de chaque particu-
» lier ne paroît pas moins l'intéreffer ;
» chacun lui fait part de fes peines , il
les écoute avec fenfibilité ; il les par-
» tage ; & chacun eft für de trouver en
lui le confolateur le plus tendre , le plus
» zélé prote&eur , & la reffource la
» plus éfficace,
มุ
En peignant les devoirs d'un grand
Magiftrat , par une tranfition toute naturelle
, M.. Moreau paffe à l'éloge de
M. d'Argouges qui les a fi bien obfervés.
Il dit , en parlant de la retraite de
M. le Lieutenant Civil : » Dans le centre
» d'une famille jaloufe à juste titre de
" recueillir déformais tous fes momens,
» il va jouir du calme & de la paix
» connus dans les lieux où l'honneur
» & la vérité régnent , & réfervés aux
» âmes fur lefquelles les paffions n'eurent
jamais d'empire : ofons même
» nous flatter que fon affection ne fera
qu'augmenter à l'égard d'un Tribu-
» nal à la tête duquel fes exemples fem-
» blent avoir fixé pour toujours le plus
70 MERCURE DE FRANCE.
"
» ferme appui de la Juftice. Le Public
» peut y compter , foit qu'il y voye
» préfider, comme il arrive aujourd'hui,
» ceux que les droits de leur Charge y
» appellent en l'abfence du Chef, foit
» que nous foyons au moment où l'hé-
» ritier du nom de celui qui cauſe nos
» regrets , déja recommandable par lui-
» même par fes fervices au Parlement
» & dans les Confeils du Roi , va venir
» revivre parmi nous , marcher fur fes
» traces , & déja prendre part à ſa gloire.
Le Difcours de M. le Procureur du
Roi fini , M. Chardon , Lieutenant Particulier
, affis & couvert , a adreffé la
parole à MM. les Avocats , & leur a
parlé fur la décence néceffaire dans leur
profeffion. Il a fait enfuite le portrait
d'un Magiftrat , & de là , il a paffé à
l'éloge un peu étendu de M. d'Argouges
dont nous ne rapporterons ici que
les traits principaux . Revêtu de cette
place diftinguée , M. le Lieutenant
» Civil fit paroître dans un âge où la
» voix des paffions eft prèfque la feule
qui fe faffe entendre , une maturité
» qui dans la plupart des hommes n'eft
» que le fruit d'une longue expérience
» ou d'un travail de beaucoup d'années.
» Ses premieres décifions porterent le
">
"
JANVIER. 1763. 71
caractère de la prudence la plus con-
" fommée ; & fi l'on reconnoiffoit fa
» jeuneffe , ce n'étoit que par le feu
» de fon efprit , & plus encore par le
» jufte étonnement où chacun étoit de
» voir la fageffe de Neftor dans la bou-
» che d'un jeune Magiftrat qui avoità
» peine acquis fon fixiéme luftre………….
» Combien de fois affis fur le Trêne de
» la Juſtice , fes fages décifions ont- elles
» confondu l'erreur & l'impofture , &
» fait triompher la vérité ? Les voutes
» retentiffent encore des oracles qu'il a
» rendus , & des applaudiffemens qu'il
» a mérités . Mais il eft un hommage plus
" pur , peut-être moins brillant , mais
» plus flatteur pour les coeurs bienfai-
» fans , c'est celui que lui doivent les
» malheureux opprimés , à qui plus d'u-
» ne fois par fes confeils fes confeils , & même
.
par fes fecours généreux , il a fauvé
» les frais d'une inftance auffi longue
» que difpendieufe ; plus content mille
» fois d'avoir , fans autre témoin que fa
» vertu , épargné un procès à fes conci-
" toyens , que d'avoir , au milieu d'une
» Audience nombreufe , prononcé fur
» leur fort ; & plus fatisfait de goûter
» cette joie pure que reffentent fi bien
» les âmes généreufes , que d'avoir en-
M
72 MERCURE DE FRANCE.
» tendu les applaudiffemens de la mul- .
» titude .... Son fouvenir fera gravé dans
" nos âmes par les traits de la plus gran-
» de vénération. Il vivra parmi nous
» par les regrets qu'il nous laiffe ; & fi
"
"
nous ne pouvons plus jouir de fes
» exemples , nous tâcherons au moins
» de les imiter. Mais que dis-je , Mef-
» ficurs , nous ne la perdons pas ; il vit
» dans fon illuftre fils . Succeffeur de fa
» place , il l'eft auffi des vertus qui dans
» cette famille fe perpétuent ainfi que
» la Nobleffe . L'une coulera dans fon
fang , l'autre animera fon coeur . Né
» lui- même dans le fein de la Juſtice ,
» élevé fous les yeux du plus refpecta-
» ble de fes Miniftres , tout nous dit qu'il
» remplira avec éclat la carrière qui s'ou-
» vre fous fes pas .. pas.... Notre premier
" defir fera de le voir occuper longtemps
» cette place ; notre plus douce fatis-
» faction , d'applaudir à fes fuccès ; &
» s'il nous refte des regrets , ce fera de
» ne pouvoir jouir à la fois & des éxem-
» ples du pere & des talens du fils .
On peut voir par l'extrait que nous
venons de faire de ces trois difcours ,
que la vénération , le refpect & la reconnoiffance
font les fentimens de tous
-les Magiftrats , & de tous les membres
du
JANVIER. 1763 . 7%
du Châtelet , à l'égard de M. d'Argouges,
& que ces fentimens ont été exprimés
avec autant de force & de vérité , que
d'élégance , par les trois Orateurs , interprêtes
des fuffrages publics. La Communauté
des Procureurs , pour donner
au Magiftrat illuftre qu'elle a le malheur
de perdre , une marque certaine & autentique
de ces mêmes fentimens , a fait
imprimer les trois Difcours , après en
avoir obtenu le confentement des Magiftrats
qui les ont prononcés. M. le
Breton,Imprimeur, n'a rien épargné pour
donner à ce Recueil , dans l'exécution
typographique , toute la perfection que
demande un Ouvrage qui doit être pour
la Poftérité un monument de refpect &
de reconnoiffance érigé au zéle & à la
vertu .
Collectivité
Faux
Langue
Vers et prose
Type d'écrit journalistique
Courrier des lecteurs
Faux
Soumis par eljorfg le