→ Vous voyez ici les données brutes du contenu. Basculez vers l'affichage optimisé.
Nom du fichier
1677, 12, t. 10 (Barbin)
Taille
64.60 Mo
Format
Nombre de pages
351
Source
Année de téléchargement
Texte
LE NOUVEAU
MERCURE
GALANT.
Contenant les Nouvelles
du Mois de Décembre 1677.
& plufieurs autres.
T O M E
A PARI S,
Chez Claude Bas.bin, au Palais, fur
le fécond Perron delà S.Chapelle.
M. D. LXXVI1.
^tVEC PRIVILEGE DV ROT, I '
-3*
A
J . *• * J '
I r
-/ •
<•
4
V
V r> V
5 ’■ K
.U

-
• • w
X
AU LECTEUR
01QY le dixiéme lAolwne
du Mercure, & le dernier
de ï Année 1677 -carquoy
qu'il Jparoijfe cn Ianviery
il ne contient que les Nouvelles du
Moti deDecembre^&on ne donnera
que le premier jour de Février celuy
qui commencera l Année 1678. Le
Çuccés de ce Livre a efé extraordinaire.
le ne doute point qu'il nefoit
deü aux prodiges de cette Campagne^
aux Vers galans & férieux. & aux
Pièces d' Eloquence qu on m*a fait la
qrace de me donner de toutes parts, &
^efipeut-eflre le feul Livre dont un
Autheur puijfe publier le fuctes fans
'baroifre vain-, puis qu en cela ilvne
z * â Ü I
AU LECTEUR.
loue que les Ouvrages d'autruy. le
me trouve mefne dans quelque obligation
de ne pas taire l’approbation
qu on a donnée au Mercure, afin que
ceux qui m'ont envoyé les agréables
Pièces qui le compofent, connoifient
qu'elles ont plù par tout J ce quil me
fereit difé dejuflifier par plus de quatre
cens L etires qui m'ont efté écrites
fur le plaifir que fa letlure a c-iuffi
Jl efi certain que pour s'en déclarer
l énnemy, il faudrait vouloir qu'il n'y
eufi ny Braves ny beaux Efirits en
P rance,(fi condamner en mefme temps
toutes les Actions de valeur, (fi tous
lesgalans Ouvrages de ceux qui écri.
vent.
fc.ay que le Titre a fait croire
d abord que le Mercure eftoitfimplement
galant, (fi qu'il ne devoit tenir
place que dans la Bibliothèque des
Ftmmes, mais on efl forty de cette erAU
LECTEUR.
loquence, des Harangues, des Relations
fidelles & exactes, des Sieges &
des Batailles,des Evencmens remarquables,
des morceaux d'H ifloire, &
des Mémoires glorieux à des Familles.
Nlors il efi devenu le Livre des Sçale
divertiffement du beau Sexej & une
marque incontejlable defin fucccs,ceft
qu'il a eflè afie\ heureux pour plaire
à Monfiigneur le Dauphin, &
que ce Grand prince veut bien foufrir
quil paroiffe toujours à l'avenir fous
fin Nom. N in fi vous verrez ce Nom
augufle a la te fie de celuy qui contiendra
les Nouvelles de lanviers & pour
le rendre moins indigne d'un fi grand
honneur fi commencera en ce temps-là
àparoifire avec tous les ornemens dont
un Livre de cette nature puiffe ejîrç
AU LECTEUR.
V olume trois ou quatre Planches,fui- vant les Sujets clone le Mercure parlera 5 g? comme les Enigmes font devenues un leu die [prit qui plaif, comme on le voit par un nombre infiny de Gens qui cherchent à y donner des Explications , outre celles qui feront en 'P'ers a 1ordinaire, on en mettra tous les Mois une autre en Figures, dont on laiffera le mot à deviner. On y trouvera trois ou quatre Chanfons dont les Flot es feront gravées. Elles feront compofées par les meilleurs Maifres, & notées exprès pour le Mercure, de forte qu on peut s'affurer qu elles au- j ont toute la grâce de la nouveauté, puis que performe ne les aura vcuès avant que le yolume où elles feront, foit en vente. Ceux qui voudront envoyer des Paroles, le pourront faire, on aura foin de les faire noter, fi elles fe trouvent propres a ejlre chantées,
AU LECTEUR. jly aura des Cartes de galanterie. (f* la première qui paroiftra. fera l' Em- pire delaPoefie. de Mr de F ont enelle. On petit croire fur ce nom qu elle ne manquera 'paoe dl agrément. On donnera auffî chaque Mois des Dejfeim traverses Modes nouvelles.& quand on aura commencé. on ne difcontinuéra plus, mais il faut établir beaucoup de chofes pour cela. & lier commerce avec, bien des Gens. Ce fera une commodité pour ceux qui auront invente quelque chofe de nouveau, dans l envie de contribuer au plaifr de Monfeigneur le Dauphin, ou qui auront quelque chef- d'oeuvre d'Art à propofer au Public, ils pourront en apporter les De [feins. & on les fera graver. s ils mentent cette dépenfe. Elle fera grande pour tous cesem 'belliffemens.&devroit faire renchérir le Mie? cure de beaucoup3 cependant comme on s'attache plus a
au lecteur.
la gloire qu à l'intercfl, L''auyyienta- tion du prix fera tres-peu considérable puis qu'il ne fe vendra ebez^f Imprimeur que feize fois en blanc , & au a alais vin^t fols en parchemin, (ÿ* vm^t-cinq fols en veau. L e Public a receu ce Livre fifavorablement, ^«’zZ <fi jufte de luy enmarquer de la recon- noffance par les nouvelles beautez. ^u'on, laf préféra. Mais pour eflre affured en jouir, // doit prendre aarde fi on ne lvy vend point de Mercures contrefaits. Il nefuffit pas devoir au bfr qu'ils ont efté imprimez, à Paris* c efl ce qu'on ne manque jamais d’y mettre pour empeficher qu'on ne les re- lett e comme faux. Ilfaudra examiner s iis auront les Lettres fleuronnées Cf figurées, les Puyietes, le Frontifpice, & généralement toutes les Planches que je viens de dire, qui feront à l'ave - ‘
" dans lei véritables. Ceux qui fie
AU LECTEUR. hasarderont à les contrefaire dans les Provinces fil s'en trouvequi s'yveüil- lent expofer^ comme ils les débiteront fans Figures, feront obligez^ d'efier beaucoup de la matière qui aura relation avec les Planches (fi toutlerefte demeurant fans liaifon^ fera un fur galimatias s oui re quun L ivre contre - fait efi toujours rtmply de faut es (fi quun Libraire quifonge à l'épargne r en retranche beaucoup de chofes pour y employer moins de feuilles, line faut pas s'étonner fi des Livresfi défigurez^ fe donnent à meilleur marché que les véritables * (fi c efi cette médiocrité de prix qui peut encor faire voir qu'ils ne le font pas. On prie ceux qui auront des Mémoires adonnerfie les adreffer au Sieur Blageart Imprimeur ^Libraire fiemeurant à Paris Rué S. 1 acquêt, à l'entrée de la Rué du Plâtre^ (fi de faire feavoir en quel lieu on
AU LECTEUR. pourra eftre éclaircy des circonflances dans le temps que les Articles feront employez^ P ourles Uifioires envoyées far des Particuliers, on croit devoir avertir une fois pour toutes,que f on y retouche ,c eft feulement pour les mettre dans le ftile ferré du Mercure, qui doit eftre le mefme par tout, ou pour ofler quelquefois des chofes qui font trop libres, ouquifatirifant trop,pourroient chagriner les Intéreffes' S'il arrive \ qu'on difére a mettre dans le Mois les chofes qu on donne,ce n efl qu à T égard des Galanteries,qui n ont aucun befoin de T ordre du temps ; mais tojt ou tard on y met tout ce qui efl bon, ou quand on ne le met point, ce rt efl pas qu on ny trouve beaucoup die fprit^.mais il y a des chofes très- fpirituelles & très -bien tournées qui ne font pas bonnes à im* primer. On ne flaureit avoir trop de circonfpetiton a rendre le Mercure
AU LECTEUR.
digne d'ejlre toujours lu dans des lieuse
d'où la moindre liberté le banniroit*
Comme beaucoup de Perfonnes font la
de ne point trouver mauvais s3itJe dijpenfe
de leur répondre. Outre qtiila
b efoin de fon temps pour travailler &
pour s'informer des Nouvelles de chail
met les Ouvrages qu'on luy envoyé*
Les Libraires de Provincefont avertis
quon leur fera bon marché à proportion
de l'éloignement des lieux5 (ÿ* de
ce qu'il leur pourra couper pour le port*
Chacun n'aura qu'a envoyer fon Cor-
& on y fera les Paquets tant pour les
Libraires que pour les Particuliers*
Le prix des dix Volumes de HAnnée
contiennent les Nouvelles des douzg
Mois, parce qu'on a ramajfé dans le
AU LECTEUR..
•premier celles de lanvier, de .Février,
& de Mars, jamais Conquérant
queLoüis leGrand dans le cours
d'une feule Année. Il ny a 'point
A'Hifoire qui enfaffe voir de pareilles
fi on a égard a la force des Places
qui ne manquoient ny £ Hommes ny
de Munitions. Elles auroient eflé imprenables
autrefois. Tant £ Ach ont
furprenantes rendent ces dix Tonies
efi deuë à ceux qui ont fait les Conquefles,
& à ceux qui les ont chantées,
& on y ramaffe mille chofes curieufes
le Mercure n'avoit jamais eflé fait.
.Les unes auroient eflé feparees 3 les
autres n' eflan t qu en feuilles volantes,
fcferoient perdues, & il y enauroiteu
beaucoup que la négligence de les reN
O ÜVEAU
MERCURE
GALANT.
o m ë x.
E vous fçay boa
gré, Madame, de
l’amitié que vous
témoignez avoir prifepour
leRuifleau. Elle ne mefurprend
point. Vousavezl’efprit
délicat, & j’eftois perJ
Tomeio. A
i LE MERCURE fuadé en vous l’envoyant, qu il feroit favorablement reçeu. Comme le me'ritc fait effet par tour, ce Ruif- feau que vous appeliez le plus galant des Ruiffeaux, avoir fait un fi grand bruit par les avantages que pro- mettoit l’égalité de fon cours, que toutes les Prairies qui pouvoient prétendre à fes complaifances, eftoient charmées de là ré, puration. Ainfi^ quoy que ce foit quelque choie d’af- fêz fingulier qu’un RuilTeau Amant, celle qui eut la
I
GALAA' NT. 5
gloire de s’attirer fon hommage,
avoit déjà entendu
parler de ce qu’il valoit, &:
vous pouvez croire que 1 ofre
de fes foins ne luydéplût
pas. Vous en jugerez par
cette Réponfe qu elle luy
fit, apres l’avoir écouté fans
l’interrompre.
AU RUISSEAU.
IT'e voftre éloignement ma
fait fuffrir de peine!
le jêchois fur le pied de me voir
loin de voltsy
A iij
4 LE MERCURE
le riavois plus de Fleurs* & ]efiois
entre nous.J ■
Semblable à ces çuèrets que l'on
voit dans les Plaines S
Mais -puis que je votes voy* je nien
vay refleurir*
Et fleure de vos Eaux, jeneflçaurois
Mais puis-je me flaterque ces Eaux
27e coulent que pour moyl nefi-il
point de Prairies
22ont iémail éclatant puiffe arrefler
vos pas ?
Je crains tout, mais enfin je ne le
trop pure.*
Pour ternir par cette aïïion
galant.
Toftre cryfial& vofire nom. voflremurmure,
5'
Voflre Et fi fen croy v oflr e mur mure, Vous nefierezjamais inconflant ny parjure.
«J?
Cependant la rapidité ,
Dont je vous voy\ courir le long ae ce rivage,
Efi de vofire infidélité Vn afie^funeflepréfiage. jih, fi pour mon malheur i comme un Ruiffieau volage, jîpres avoirfieu m engager, Je voyois vofire cours ailleurs fie partager,
De combien defiucis meverrois-je remplie l
Mais quand on va fini fie, ilfiaut qu en fioit leger-,
Et fi je ni en rapporte a ce qu on en publie,
Vous eftes frjet à changer..
6 LE MERCURE
1efuis \aloufe enfin& quand 1’0- cean mefme^
Rdche de tant de flots qu il reçoit dans fin fein^ J
Aurait pour moy quelque dejfein^ Si fin amour ri eftoit extrême, ïaimerois cent fois mieux unfidelle Ruiffeau
Qui pour T hétisyiy pourfin T)ia~ déme^
Ne voudroit pat ailleurs puifir deux joutes d'eau \
VPila comme je fais., & cefi ainfi que j'aime.
Ne me voir qu'en courant! ah je n'<fi y P en fer
1 e fins à ce difiours mes Fleurs fi hêriffir,
Et le cruel Fîyvtr me donne moins d!alarmes :
galant.
7 Heloe*, où courez-vous i coulez plus lentement,
Ze Lit que je vous offre a-t-il y feu de chamesy
Quff ne puiffe fixer la confie d un Amant ?
y'ene^vous égayé r au bord de nos Fontaines^
Leurs ondes par vo/lre moyen Se trouveront en moins de rien DesHèlicons, desHippocrenes^ Car je riignore pas au bruit que
vous mene\ ,
Qnevous bouiderfievousy rêdre> C'eft vainemet quevous tournez^ le Ccayqtif ceftlù voftre tendre. Que vous diray-je plus s j’ay des tapis de Fleurs
Sur qui vous pourezvous etendre, L‘ Aurore chaque jour les baigne de frs fleurs,
il
2 le mercure
ga/ comfofent un doux mêlante
Qui fait hôte a la fleur d’Ordoe
Ah laijj'ezç’vous 'tenter! au nom de nos amours
F ait es fur vous quelques retours, £t couleront au moins avec plus de parefle :
St vousn'arrefiezpyoflre cours, rous adezfans laMervousperdre four toujours, '£tfl ne feray plus qu'un objet de trifieffe -, , „
Mais c'efi en vain que je vous De retarder un peu vofire extrême vtfleffe,
Et qu'un vent oppofé feconde mgi Jouhaits ; 9
rAmeur^l^ Ruiffeaux nere. montent jamais.
pour toujours
trifteffe
i
3
GALANT.
•J?-
4"
je ne demâde point que vous veniez^ fans ceffe
M'arofer nuit jour 3 non* quelque fe cher efje
Qui puiffe me brûler , je ne ni en plaindray pas*
P ourv eu qu' en d'autres lieux* tou* jours fdelle & tendre*
y os Eaux* vos cheres Eaux* riaillent point fe répandrez
Je ne me fonde pointfur mes faibles
• S-
appas*
Quoy qu un Fleuve pompeux fuivy de cent Rivières*
Quifontfes bumblesTribut aires s En fuperbe appareil me vienne tous les ans
Apporter fur mes bords cet liquides prefens..
1O LE MERCURE
2iais il faut dire tout, c'ejl un Fleuve volage
Dont les débordement fans mefure ny choix
S’étendent dans les Champs ainfi que dans les Bois,
Qui peut s’accommoder d‘un fem- blable partage,
2de me rejfemble par: Eu fiez-vous plus d’attraits
Quel' on ne voit d!Epis chezfla blonde Cerés,
Si vous alltez^ainfide rivaoe en rivage 3 c
le vous préférerais le moindre Ma- ré cage y
Et dcuffiiy-je en mourir* je romprais four jamais.
La netteté de ces Vers
GALANT. li
vous fait affez voir quils
viennent de Source. Ils
font d’un Gentilhomme
là ne fait jamais rien que
d’agreable. Cet Ouvrage
n’eftant pas le feul que
vous ayez veu de luy, le
ftile vous en doit faire deviner
le nom. Il a des exprefiions
heureufes qui le
diftinguent allez pour ne
vous donner aucune peine
à le rcconnoiftre. Deux
Marys que vous voulez
bien que je medilpenfe de
n LE MERCURE
vous nommer, en prennent
fouvent d’inutiles fur
des foupçons mal fondez
qui leur font palier de méchantes
heures. Ils font
tous deux dans les Charges,
tous deux impitoyablement
délicats fur le
Point-d’honneur, & par
confëquent tous deux jaloux,
jufqu’à trouver du
crime dans les plus innocentes
converlàtions. La
Femme de l’un eft une
Blonde bien faite, d’une
taille fine & dératée l’rpiî
bleu, bien fendu, & un viGALANT.
ij
fage qu’on peut dire avoir
eflé fait au tour. L’autre a
pour Femme une grande
Brune, qui a la douceur
mefme peinte dans les
yeux, le teint uny, le nez
bien taillé, la bouche^ agreable,
& des dents à fe
récrier. Ces deux Dames
qui n’ont pas moins d’efprit
que de beauté, ont
encor plus de vertu que
d’efprit, mais cette vertu
n’eft point farouche ; &
comme elles fontfort éloignées
de l’âge oùilfemble
qu’il y ait quelque obliÏ4
le mercure gation de renoncer aux plaifirs, le Jeu, la Comédie, î’Opéra3& les Promenades, font des divertiïTemens qu’elles ne le refufent point dans l’occaûôn. Il y a une étroite amitié entre elles, & cette amitié a peut-eftre fait la liaifon desMarys qui fe font gaftez l’un l’autre, en fe découvrant leur ja- loufie. Vous jugez bien, Madame, que cette conformité de fentimens les a ait agir de concert pour le emcde d*un mal qui les tient dans une continuelle
GALANT. i; inquiétude. C’eft ce qui embarafle ces deux aimables Perfonnes,qui ne fçau- roient prefque plus faire aucune agréable Partie fans qu’un des Marys foit leur furveillant. A dire vray, la trop exaéte vigilance n’eft pas moins incommode qu’- jurieufe. Quelque tendreïïè qu’une Femme puiffe avoir pour celuy à qui le Sacrement la tient attachée, elle n aime point à luy voir faire le perfonnage d’Argus. Tour ce qui marque delà défiance luy tient lieu d’oui6
LE MERCURE trage- & les Marys ayant leurs heures de referve dont perfonne ne vient troubler la douceur, il eft jufte qu’ils abandonnent les inutiles à ceux qui n’en profitent jamais fans témoins. Les Dames dont je vous parle devenues infé- parables & par leur véritable amitié, & par le fâcheux raport de leur fortune , n’oublioient rien pour fe dérober, quand elles pouvoient, aux yeux de leurs importuns Efpions. Ce neft pas, comme je
GALANT. 17 vous l’ay déjà dit, qu’elles eulTent aucune intrigue qui pût mettre leur vertu en péril, mais il fuffifoit qu’on fe défiaft de leur conduite pour leur faire prendre plaifir à (è débaraffer de leurs Jaloux,& c’eftoit pour elles un fujet de joye incroyable qu’une Partie d’O- péra ou de Promenade faite enfecret. Parmy ceux donc le Jeu leur avoir donné la connoifTance ( car fi elles ne pouvoient s’empefcher d’eftre obfervées, elles s’ef- toient mifes fur le pied de Tome 10. B
18 LE MERCURE
faire une partie de ce quelles
vouloient) deux Cavaliers
auffi civils que galants,
leur avoient fait
connoiftre par quelques
affiduitez que le plaifir de
contribuer à les divertir
eftoit un
pour eux. Elles meriroient
bien leurs complaifances,
8e l’agrément de leur humeur
joint à leur beauté
qui n’cftoit pas médiocre,
pouvoit ne pas borner entièrement
à l’eftime les fentimens
qu ’ ils tâchoient
quelquefois de leur découGALANT.
19
vrir. Ils eftoient Amis, &
quand ces Belles trouvoient
l’occafion de quelque
divertiffement à prendre
fans leur garde accoutumée,
elles n’eftoient
point fâchées d’en faire la
Partie avec eux. Dans cette
difpofition, voicy ce qui
leur arriva pendant que les
jours eftoient les pluslongs;
car, Madame, je croy que
le temps ne fait rien auprès
de vous à la chofe>& qu’une
avanture du Mois de juillet
que vous ignorez ne vous
plaira pas moins à écouter
de Décembre. On m’en
apprend de tous les coftez,
& ne vous les pouvant
écrire toutes à la fois, j’en
garde les Mémoires pour
un
félon l’ordre de leur an
vous
Le leu fervant toujours
de prétexte aux Dames a
recevoir les vifites des Caun
Elles luy envoyent chacune \
n
GALA N T. xx que dans le monde. Il leur en marque fa reconnoif- fance par des Vers galans, & par une très - inftante priere de prendre jour pour venir fou per dans une fort belle Maifon qu’il a auprès d’une des Portes de la Ville, où il les attendra avec fon Amy. LeParty eft accepté, mais l’importance eft de venir à bout de la de'fîance des Marys qu’on ne veut point mettre de la Fefte. Heureufement pour elles, ils fe trouvent tous deux chargez d affaires en mcf-
iz LE MERCURE me temps. On choifit ce jour. Le Cavalier eft aver- ty. Les ordres font donnez, & il ne s’agit plus que d e- xecuter. Les Dames feignent
de vouloir aller fur- prendreune deleursAmies qui eft à une lieue de Paris, & d’où elles ne doivent
revenir qu’au frais. Un des Marys les veut obliger à remettre au lendemain,
afin de leur tenir compagnie , & de fe délaffer un peu de l’accablement des affaires. Il n’en peut rien obtenir, fur cette con-
GALANT.
teftation arriva un Laquais
de fon retour, & qu elle
viendra jouer l’apreldînée
avec elles. Leurs mefures
tretemps. Les deux Amies
diiïimulent. Refu fer une
Partie de Jeu pour en proposer
une autre qui les laiflTe
difparoiftre pour tout le
ner de légitimés foupçons.
Elles jouent, demeurent à
fouper enfemble apres que
le Jeu eft finy, & feignent
J ’ ____:_______ ' ______ « 1 J /s
ï4 le mercure
telle qui leur ode l’appétir,
que par une Promenade
aux Thuilleries. On met
les Chevaux au Caro(Te. Le
Mary
ment a vouloir faire une
d’inquieter, les fait fuivre
par un petit Homme inconnu
qui entre avec elles
aux Thuilleries, & les en
voyant fortir incontinent
parla Porte qui ell du collé
de l’eau, & monter dans
une Chaife Roulante qu’elles
GALANT. zy elles avoient donné ordre qu’on y fift venir, découvre le lieu du Rendez vous, & en vient donner avis au Mary. Le coup eftoit rude pour un Jaloux. Il coure chez fon Aflocié en jalou- fie,Tuy conte 1 e u r c o nimun defaftre, &luyfaifant quitter les Affaires qu’il n’avoic pas encor achevé de terminer, le mene où la Fefte fe donnoit. Ils trouvent moyen d'entrer dans la Court fans eftreveus, &fe gliffent de là dans le Jardin, d’où ils peuvent aifément Tome io. C
LE MERCURE découvrir tour ce qui fe paffedans la Salle. Elle ef- toit éclairée d’un fore grand nombre de Bougies. Ils
O s’approchent desFeneftres à la faveur de quelques Arbres faits en Buiffons -, & quoy qu’ils ne remarquent rien qui fente l’intrigue dans les refpedueufes ma- nieresdont les Cavaliers en
ufent avec leurs Femmes, elles leur paroiffent de trop bonne humeur en leur ab- fence, & ils voudroient qu’elles ne fe montraient aimables que pour eux. Le
GALANT. 17
Soupe s achevé au fon des
Hautbois qui prennent le
chemin du Jardin où la
Compagnie les fuit. Les
Marvs qui veulent voir à
quoy i’Avahture aboutira,
le retirent dans un Cabinet
de verdure où ils demeurent
cachez.
ont à peine fait un tour
d’Alice, qu’elles vovent
l’air tour couvert de Fufëes
volantes, qui fortent du
fonds du Jardin; les Etoilles
& les Serpentaux qu’elles
font paroiftre tout-à-coup,
les divertilTcnt plus agréa-
C ij
Les Dames
2,8 LE MERCURE Elément que leurs Marys, qui ne font pas en eftat de goufter le plaifir de cette lùrprife. L’aimable Brune dont je vous ayfait le Portrait prend une de ces Fu- fées, & la veut tirer elle- melme. Celuy qui donne la Fefte s’y eftant inutilement oppofé, luy met un Mouchoir fur le cou, dans la crainte qu’elle ne fe brûle. Le Mary perd patience, il veut sechaper, Çeluy qui eft avec luy dans leCabinet l’arrefte, &a luy- mefme bcfoin d’eftre ar-
GALANT. 19 reftéau moindre mot qui! voit qu’on dit tout bas à fa Femme. Jamais Jaloux ne foutfrirent tant. Ilsfrapent des pieds contre terre, ar, rachent des feuilles, les mangent de rage , & on prétend qu’un des deux penfa crever d’une Chenille qu’il avala. Apres quelques Menuets danfea ' dans la grande Allée, on vient dire aux Dames qu un Baflînde Fruitles attendoit dans la Salle pour les rafraif- chir. Elles y retournent &: n’y tardent qu’un moment, C iij.

GALANT. jï procher des Fcneftres comme ils ont fait pendant le Soupe. Il eft vray qu’ils ne demeurent pas longtemps dans cette contrainte, mais ils n’en font affranchis que pour fouffrir encor plus cruellement. Un de ces
* \ Meilleurs de la Mufique champeftre eftant entré dans la Salle pour demander quelque chofe à celuy qui les employoit, revient dire à fesCompagnons qu’il n’y avoit plus trouvé per- fonne, & qu’il n’avoit pû fçavoir ce que la Compa-
• • a • '
forme,
C iiij
MERCURE
gnie eftoit devenue. Les
Marys l’entendent, & c’eft
un coupdefoudrepoureux.
Leur jaloufie ne leur laifle
rien imaginer que de funefle
pour leur honneur. Ils
peftent contre eux- mefmes
de leur lâche patience à demeurer
fi longtéps te'moins
de leur honte, & ne doutant
point que leurs Femmes ne
foient dans quelque Cabinet
avec leurs Amans, ils
fortentdu Jardin, montent
en haut, vont de Chambre
en Chambre, &: trouvant
une Porte ferme'e, ils font
GALANT. tous leurs efforts pour l’enfoncer. Un Domestique accourt à ce bruit., llabeau leur demander à qui ils en veulent. Point de réponfe. Ils continuent adonner des pieds contre la Porte, & le Domeltiquequi n’elt point affez fort pour les retenir, commence à crier aux Voleurs de toute fa force. Ces cris mettent touielaMaifon en rumeur. On vient au fe- cours. Chacuneftarméde ce qu’il a pû trouver à la halte,& le Maiftre-d’Hollcl tient un Moufqueton qu’il
emportement, & on ne voie
plus que deux Hommes interdits,
qui fans s’expliquer
enragent de ce qu’on met
obflacle à leur entrepnfe.
Comme ils ne font connus
GALANT. j5
un Commiffaire fans leur
en rien dire, & les fait garder
fort foigneufement jufqu’à
ce qu’il foit arrivé. Cependant
les Cavaliers qui
ont remené les Dames aux
reviennent au.1
I Thuilleries
&font furpris de voir en ern
trant qu’on ameneunCommiffaire.
lis en demandent
36 LE MERCURE
Chambres, &avoient vouluenfoncerun
Cabinet. Ils
y courent avec le Commit
faire qui les livre pendus
dans trois jours. Jugez de
etonnementoùils fetrouventquandon
leur montre
les prétendus Criminels.
Le Commiffaire qui les
reconnoiff fe tire d’affaire
en habile Homme, & feignant
de croire que ce font
eux qui 1 ont envoyé chercher
, il leur demande en
quoy ils ont befoin de fon
miniftere. Ils l’obligent à
s’en retourner chez luyx
GALANT. 37
fans s’éclaircir de la béveuë
qui l’a fait appeller inutilement
-, & les Cavaliers qui
devinent une partie de la
vérité, ayant fait retirer
leurs Gens, leur ofrent telle
réparation qu'ils voudront
de l’infulte qu’on leur a
faite fans les connoiftre.
Bouquet reçeu,& qu’ayant
prié les Darnes d obtenir
d’eux qu’ils luy fiffen t l’honneur
d’en venir partager le
38 LE MERCURE
divertiffement avec elles,
il avoir eu le chagrin d’apprendre
qu’un embarras
impréveu d’affaires n’avoit
paspermis qu’ils les pûffenc
accompagner; qu’il venoit
de les remener chez elles,
& qu’il efperoit trouver
une occafion plus favorable
de lier avec eux une
Tandis
qu il ajoute à ces excufes
des civilitezqui adouciffent
peu à peu la colere de nos
Jaloux , fon Amy envoyé
promptement avertir les
F
*s
ï»
It
*
>)
e
$
$
es
t
GALANT. £
d’arriver, afin qu’elles preneur
leurs meîùres fur ce
qu’elles auront à dire à
leurs Marys. Ils quitent les
Cavaliers fatisfaits en apparence
de cette défaite,
& fort réfolus de faire un
grand chapitre à leursFemmes.
Elles préviennent leur
méchante humeur, & les
voyant retourner chagrins,
elles leur content en riant
la malice quelles leur ont
faite de ne les mettre pas
d’une Partie dont on avoit
fouhaité qu’ils fufferit ; ce
qui devoir leur faire conLE
MERCURE
noiftreque quand les Femmes
ont quelque delfein
en telle, elles trouvent toujours
moyen de l’executer.
Les Mary s fe le tinrent pour
dit ; & ceux qui ont fçeu les
circonftances de l’Hiftoire,
aRurent que depuis ce
temps-là ils ont donné à
leurs Femmes beaucoup
plus de liberté qu’ils ne
leur en laiffoient auparavant.
C’eftoit le meilleur
party à prendre pour eux.
Le beau Sexe eft ennemy
de la contrainte, & telle
n’auroic jamais la moindre
GALA NT. 4q tentation de galanterie» qui n’en refufe pas quelquefois l’occafion pour punir un Mary de fa défiance.
Comme une peine qu’on a méritée ne donne jamais fujet de plaindre celuy qui lafoufre, on peut dire tout au contraire qu’on voit rarement récompenfer la Vertu fans qu’on en témoigne de lajoye. C’eftcequi a paru depuis peu quand Monfieur le Comte d’Ayen
a efté reçeu Duc & Pair au
Parlement. Ses belles qua- Tome 10. D
4z LE MERCURE lirez luy ont acquis une ef- time lîgenerale, que toute la Cour s’eft intereflee aux avantages que luy donne ce nouveau Rang. Il efl Fils de Moniteur le Duc de Noailles, & c’eft aflez dire pour faire connoift're qu’il partage la Pieté, qui efl comme un Bien héréditaire dans toute cette 11- luflre Maifon. Les foins qu’il a pris de fe rendre les belles Lettres familières, ne font pas empefehé da- prendre tout cequ’onpeuc fçavoir dans la Guerre. 11
GALANT. 45
commença de donner des
marques de fon courage,
lors qu’on envoya du Secours
aux Hollandois contre
l'Evefque de Munftcr.
Il a toujours fervy depuis
ce temps-là ; & le Roy voulant
montrer la fatisfaélion
le fit l’Année derniereMarefchal
de Camp.
Sa Majefté a fait lemefques
jours à Mrs de Tracy
& de Rubantel. J e vous ay
appris tant de chofes avanma
Lettre du iVToisd’Avri^
que je n’ayplus rien à vous
en dire, finon qu’il a continué
depuis ce
fervir comme il avoit fait
P '
les qui doivent arriver.
Mr de Ruban tel qui a le
mefme Employ que luy
dans, les Gardes, a fait aullï
paroi ftre beaucoup de zele,
de valeur & d’application,
toutes les fois que 1 occagalant.
< nerdes marques. Pluficurs de cette Famille ont fïny glorieufement leurs jours dans le Service, & ont mérité par là de vivre tou- jou rs.
C’eft un avantage qui eft a duré à Dom Jofeplï d’Ardenne, Comte d’Illes^ Lieutenant General des Armées du Roy. Il eft mort apres avoir très-bien fervy en fon temps. 1.1 eftoit d’une Maifon fort confidérable, & laNoblefte duRouffillon avoir beaucoup de créance en luy..
Mr lAbbé de Caftelan
eft mort aulfi, fore regreté
de quantité de Perfonnes
de la plus haute Qualité,
qui avoient beaucoup d’eftime
pour luy. Il eftoit
Frere de Mr de Caftelan
Major des Gardes, dont la
bonne mine & le courage
eftoient connus, & que
nous avons perdu à Gigery.
Apres ces trilles Nouvelles,
voudrez-vous bien,
Madame, écouter les Plaintes
dun Malheureux, que
plus d une infidélité loufGALANT.
47
ferre n’a pu guérir delafoiblefTe
d’engager toujours
fon coeur ? Il les fait avec
affez d’efprit pour mériter
que vous perdiez un peu de
temps à l’entendre-,&quoy
que vous vous foyez rendue
infenfible aux maux del’Amour,
la maniéré dont il
inconjlancc,
d'un Homme, ennemy déclaré,
de l* Amour,
l'ajfeftoù en tous lieux l heur eufe-
Indiférence^ /
PaChafe me p lai foi t, & toujours1
dans les Bois,
Pour mieux me garantir des furfrifes
des Belles>
GALANT. 49 l'ivito» avec foin le piege des -Ruelles\ (choix*.
Et la Retraite e fait mon dernier
Si mes traits pourfuiv oient quelque Befte fauvage, le nappréhendoie point d'en efire .mal-traité^
Et des Oy féaux, d9accord dans leur tendre ramagey l'envioit la fidelité.
De leur commerce heureux le tran- quille avantage
Me faifoit plaindre le malheur D'un Amant qui furpriï d9 une douce langueury
Sur la fey d'un bel oeil imprudent* ment s'engage
A rifquer en aimant* le repos de
E W
y
?
fon coeur.
Tome io. *
5o LE MERCURE
Le mien que les dehors d'une belle
apparence
A s en laijfer duper avoient cent fois réduit*
En retiroit au moins ce fruit
Qfiuneajfe^ longue.expérience Le mettoit en état de rieflre plus féduit.
Mais pour ne pas aimer quand le panchant y pou/fe*
En vain nous employons nos foins $ C'efi une habitude fi douce,
Qfion la reprend lors qu on le croit le moins.
4?
Vn jour a (fis [urla Fou^ere^ le prenois des zéphirs le frais délicieux ,
Qufidfaperçeus une \eune Bergers Dont réclat éblouit mes yeux*
?
»
GALANT. a •S*
r ' ' "
JJ art ne luy prefîoit riensfa beauté naturelle
Brilloit avec tant d'agrément,
Que plein £ un doux faifjfement, Au péril de ne faire encor quune lnfidelle, ;
Je courue rendre hommage à cet Objet charmant.
Quel bonheur fut le mien! nos coeurs d'intelligence
Se trouvèrent tous deux en mefmç temps charmezj
Il fembloit que l'Amour jaloux de Ça puiflance,
JJunpourUautre les euftformes^
Depuis ce temps, unis par les plus belles chaînes,
'Nous ignorions l'ufage des fié- pirs 5
fi
p LE MERCURE
Et dans leur puretézfans mélange de peines^
Nous confions les plus doux plaifrs.
«2f»
N os fiâmes chaque jour devenoient plus ardentes^
Tout nous rendait heureux dans ce charmant fejour s Et des pafiîons violentes, Nous riy fentions que celle de l'Amour.
A
Z *ame pleinement fatisfaite^ le rienviois le fort nydes Rois, ny des Dieux.)
Et je préférais la Uoulete
Au De fin le plus glorieux.
Vn Habit de Bercer m'en donneU l ''innocence,
Z
?
GALANT b
T’ÿ ne dédaionois point de garder des Troupeaux,
Et d’accorder des Chalumeaux, Favorisé de l'Ombre & Silence,
Flu doux murmure desRuifeaux, •b
Tel Jupiter defcedu fur laTerre, Quitta l'éclat pompeux de fa Di- viratéy
E t fit hommage du Tonnerre
Aux pieds d’une jeune JBeauté'.
•J»
ZTAmour caufa cette mètamor- phofi^
D’Apollon U fit un Pafieurr Et fur ce grand Exemple il riefi rien que don n o fie
Pour fie rendre maiflre £un coeur o
*5»
Z 'aurais plus fait encor pour toucher ma Beroere*
t
J4 r LE MERCURE fa II oit il qu un Rival vin fl cor» rompre fla foyy
Ou devoit-il oeflflczfluy plaire Pour partager des voeux qui ri efl» toient deùs quà moyï
V Ingrate me trahit ,• Dieux, qui Ü'auroit pù croire?
Mon feu fe repofoit fur fa fimplh cite s
Cent ferment m'affuroient, elle en perd la mémoire,
le court à l'infidélité.
Pour me vdger de l'Inhumaine, En vain d'un vif dépit j'écoute le transport.
2 ay beau m abadonner tout entier a la haine,
Z Amour efl toujours le plut florin
GALANT. 55
«S*
Mon fort a bien change jepers tout
ce que j'aime,
La douceur d'eftre aimé remplirait
mes defirs >
On me l’ojie, & le Ciel dans mon
malheur extrême
Me condamne peui-eftre à d eter-
«
nels foùpirs.
jlmour, toy qui d?abord me fus fi
favorable,
Dans cette trifle extrémité,
Rens-moy cette belle Coupabler
Ou ma première liberté.
Cette Piece a quelque
chofe de champeftre, & je
l’ay choifie exprès de ce
caraèlere parmy beaucoup
\ * Y• • • •
E mj
$6 LE MERCURE d autres que j ay à vous faire voir, pour donner à ma Lettre une plus agréable diverfité. On ne m’en a point nomme l’Autheur. Jay fçeu feulement qu’il n avoit pas un Génie moins heureux dans les matières badines, que dans celles «qui font éloignées de l’en- joüement,& qu'il ache voit de mettre en Vers libres le Teftament de Made- moifelle du Puy. Il n’en fut jamais un plus extraordinaire. Il fait grand bruit icy. Tout le monde en
GALANT. 57 parle, tout le monde fou- haite l’avoir, & je n’en ay pû encor recouvrer de Copie entière à vous envoyer. Mademoifelle du Puy eft cette célébré Joiieule de Harpe qui mourut il y a deux ou trois mois,& voicy entr’autres Articles ce que j’ay entendu débiter du Tcftament dont il s’agit. Il porte qu’il n’y auroit à fon Enterrement nyBoflus* ny Boiteux, ny Borgnes, & on y trouve marqué le nombre d’Hommes ma- riez^ de Femmes & de Filles
B
5S LE MERCURE
qu elle fouhaitoit qu’on en
priait. Elle ordonne que
pendant vingt ans qu’à
des Perfonnes qui feront
Preuve de Noblelfe, &
donne une Place pour faire
un Jardin, à condition que
celuy a qui elle la laifïê n’y
fera point planter d Arbres
par là, Madame, que la
Demoilèlle cftoit railonnablement
vifionnaire. Vous
en ferez encor mieux oer6o
LE MERCURE gere, mais elle ne l’eft au® pour lès Chats : & comme elle s ’e'teint par leur mort, il faut qu’il meure avant eux, s’il veut empefcher qu elle ne luy manque. Elle avoir leu fans-doute que quelques Peuples a- voient autrefois étably des Hofpicaux pour les Chiens, 3c qu il y en a encor au- jourd huy enTurquie,quoy que les Mahometans aiment moinsles Chiens que les Chats, pour lefquels ils ont une grande vene'ra- cipn. Pour là Harpe qui
G A’L A N T. < £
luy avoit fait gagner tanc de Bien, elle la laiffc à un Aveugle des Quinze-vints, quelle avoit entendu dire qui joüoit admirablement des Inftrumens.
Comme vous aimez la Mufique, je vous fouhai- tay fort dernièrement dans une Aflçmblée ou il y eut un très - grand Concert. J’y recouvray les Paroles du dernier Air que feu Ni < le Camus a compofé. Vous nie les avezdemandees{ & je vous les envoyé. La belle Mademoifelle de Ville»
6t' LE MERCURE neuve les chanta avec une juftefïe à laquelle on ne peut rien ajouter.; tout le monde en fut charmé, & jamais il n y eut tant de louanges, ny fi juftement données.
K
A I R.
NEftes-votts -point refueufe $ trifle quelquefois ?
T)e vos Rochers (f de vos Rois ail envoies point chercher les plus fombres demeures, Rtdans ces Lieux charmans, fen- fible à mon amour,
dVe paffc^votus point quelques heures,
C ernme jy paffe tout le jour!
ItK Ï!
'il
h
GALANT. 6} Mc de Frontiniere a fait ces Paroles. Elles font 11 touchantes d'elles - mef- iftes. Jugez ce quelles me parurent dans la bouche d’une Perfonne qui eft fî propre à toucher. A vous dire vray, Madame, il y a un peu de rifque à courir, & la beauté de Mademoi- felle de Villeneuve jointe à celle de fa voix, eft quelque chofe de fi dangereux, que pour le repos de bien des Gens, il feroit à fou- haiter quelle ne fe laiftaft point voir quand elle

GALANT. 65 Dame qui eft encor fort belle, quoy que dans un âge où il femble qu’il ne foit plus permis de prétendre à la Beauté, difoit a-
greablemenr ces derniers jours, furlefujetde faFefte qui approchoit, que fa belle faifon eftoit paflce,
& que ce n’eftoit plus pour elle que naifloient les
Fleurs. Un Cavalier auffi
galant que fpirituel, l’entendit, & le jour de cette Fefte eftant venu, il Iuy envoya un Bouquet de Tubéreufes, qui font aiTez
Tome 10. F
rares au Mois de Décembre.
Le Bouquet eftoie
accompagné de ce Quadrain.
ZaBeautè que le temps croit avoir
effacée^
Ne votes doit point confier de
pleurs j
De ces Fleurs, belle Irisy la failon
eft paflee,
Ce font pourtant de bedesFlews.
Z
C’eftoir quelque chofe
d’admirable que les Jardins
enchantez du Palais
d’Armide, où il en naifToit
en tout temps &de toutes
les façons. Quoy que vous
GALANT. 67
ez inftruite de tout ce
t qui eft arrivé à cette belle
Princeffe par la leéture du
Tafle, lifcz je vous prie ce
. oui en a efté imprimé depuis
peu fous le titre des
i Avantures d’Armide & de
Renaud. Vous en ferez
9! fatisfaite. Ce Livre eft fort
agréable, & vous dire qu’il
eft de Mr le Chevalier de
fc Meré, c’eft vous dire que
r, vous y trouverez autant de
pureté de langage, que de
lit délicateffe d’exprcftion.
Vous ne ferez pas moins
jS contente du Compliment

GALANT. 6?
CO M P L I M E N T
■t{ A MONSIEUR.
«i. le chancelier.
1t.
70 LE MERCURE convainquante, que ce mérité eft généralement reconnu, de voir que les Loix, qui ordinairement font muettes au milieu des Armes, prennent d'abord un tel éclat entre vos mains, qu'on ri entend de tous cofte^ que des acclamations {ÿ des applaudifiemens, pour une aïïion pacifique, dans un temps où les Triomphes de noTtre invincible Monarque font tant de bruit en tous lieux, par des miracles de guerre fi continuels fi fur-
prenans.
On peut bien , Monfei-
?
!
GALANT. 7i gneur, les appeller Jurpre- nans, puis qriils ri ontpoint ci'exemple clans toute VAntiquité , C# que l’on ri a gue- res moins de peine a les croire apres qriils font arrive^, qu'a les imaginer a<vant qriils arrivent. En effet, il ri y a perfonne qui foit capable de les concevoir, que cet incomparable Génie qui feul les fait executer. Car enfin peut- on comprendre cette fige conduite qui pourvoit a tout s cette activité qui eft par tout ; cette intrépidité héroïque qui anime tout j Cs5
7
LE MERCURE
enfin cette au gu fie prefence qui 'vient à bout de tout?
Mais peut-on afleg ad- mirer les prodiges que ces grands r efforts ont produit dans le cours de cette
? H. < ’
feule Année} qui ri eft pas encore finie? une Campagne qui en vaut plufieurs , fi hautement achevée } en U Saijon qri on ï owvroit é peine autrefois s & recommencée avec un pareil fuccés, au/fitofl que les Ennemis ont finy les marches les contremarches quils ont appelées leur Campagne : plt*- fieurs
7
J ’ GALANT. yj i fiewrs Places qu on n&voit I
O-
I
»
J'
I.
I
J
/
».
t
il.
'a.
?
ose attaquer, ou quon avait . attaquées inutilement en divers temps, emportées dans peu de jours: une Bataille gagnée par un autre Soy- mefme pendant deux Sieges; ces Braves de toutes Hâtions fircee^en un moment derrière leurs plus forts Bemparts, aujf-bien quen rafe Campagne s & leurs prodigieufes Armées également défaites en combatant & fans corn- batre?
Voftre te le pour le fer- vice & pour la gloire du Boy, Tome 10. G
74 LE MERCURE
méfait efierer,Monfeigneur,
que vous excufiere^ facilement
cette digrefilon fur un
Sujet fi agréable, où Vous
gÿ les Vofires ave^. toujours
ri
eu tant de part.
Nous ^voyons, Monfeigneur,
dans 'vos fages Confie
ils, dans 'vosfoins vigilant
fg. fidèles, (ÿ dans toute
voftre Vie, de grandes matière
» de plufieurs Panégyriques
; Cÿ nous 'voudrions
bien nous pouvoir acquiter
de ce qui vous efi deû en
cette occafion. Mais le temps
d'un Compliment, dont je
GALANT.
7f «vois bien que fay déjà, pafé les bornes, ne me permet pas de fuivre cette jufle inclination ; Cÿ je cannois trop ms foibleffe, pour me hasarder a une [î difficile entreprifè. Il me'fuffira de dire, en p af- fant, ce qui efi connu de tout le monde , que vous fave^ joindre admirablement bien des ch cje s qui ne fe trouvent gueres d’accord que dans les Hommes extraordinaires : un Sffritpénétrant, avec un jugement folide ; une modération fans exemple, a«vec une éminente fortune; & une G ij
7
I
7<S LE MERCURE probité inflexible, qui ne confldere perfonne quand il faut juger , avec une affabilité obligeante qui ne rebute perfonne ,quand il faut écouter.
Ainfi, Monfeigneur, la jufiice que le Roy vient de faire à voffre vertu, & à vos longs g? important Services, efi un moyen ajfure pour la rendre par une feule action, au refie de fes Sujets s la connoiflance que l'on a de cette vérité, dont on voit déjà les effets, re- pand dans tous les Coeurs
77
alle-
G\im.
’i une joye qui nefipas conce- ii mable.
>i. Cependant, Monfiigneur, ''tt la Faculté de Droit ofî fie n. flater de Ce gérance que dans cette commune allé- grejfe vous aure^ la bonté de diflinguer fin •zele parmy celuy des autres Corps, qui ont eu déjà, ou qui auront en faite l'honneur de rendre de femblables devoirs à Voftre Grandeur.
Pour nous attirer cet a- vantage, il faffiroit de l attachement particulier qu'exige de nous la profefilon des G iij
5-
;8 LE MERCURE Loix 3 dont vous eftes l'ü- racle & ïappuy tout enfem- ble.
Mais outre cette dépen- dance aujfi glorieufe que ne- cejfaire 3 aux obligations de laquelle nous tâchons de répondre par une profonde vénération par des vaux ardens (ÿ finceres $ que ne devons-nous pas à V.G. pour l'inclination qu ’ elle & toujours témoignée de voir rétablir ï Etude de la Jurisprudence s qui vous efi chere, parce que vous la pof fedez^p arfalternent3 & parce
GALANT. 75> que vous en connoijfe\mieux que perfonne l'importance & la nece/fité ? V\ous fçave^ Monfeigneur, combien elle eft décheu'è de fa première ftlendeur dans ce Royaume où on l’a veue fi florijfante pendant plu fieur s Siècles*
Maintenant que vous eftes en état de la vanger du mépris injurieux qu 'en font ceux a qui elle ett inconnue ; que pouvons-nous fouhaiter de plus honorable pour V. G. gÿ de plus utile pour le Public y fi ce n eft l entier ac- complijfement de vos grands G iii/
8o LE MERCURE O1 louables dejfeins ; & que pour en voir l'effet, vous puiffie-g fiervir le Roy & l Etat dans les nobles ff fichons d une Dignité fi éminente auffi longuement que dans celles de tous les autres Emplois que vous awzjî dignement remplis ?
Monsieur le Chancelier reçeut cette Dépuration d’une maniéré toute obli- geante. Le mérite particulier de M Doujat luy ef- toic connu, & il fçavoit la sputation qu’il a parmy
du d’un Louis Doujat, qui
fut pourveu le premier il y
a environ 160. ans de la 'J
Charge d’Avocat General
du Grand Confeil, cette
Compagnie n’en ayant
point eu avant luy. Un de
fes Fils fe fit Confeiller au
Parlement de Touloufèj,
l’autre demeura à Paris, &
y a
Ù LE MERCURE
toujours eu des Officiers de
ce nom dans quelqu’une
Souveraines de
ces deux Villes.
Apres la mort de M' du
Nozèt, Auditeur de Rote,
Mr l’Abbé Doujat dont je
vous parle, futpropofé par
M‘ deMarca Archevefque
deToulou(ezpour eftre envoyé
à fa place, & feuM' le
Cardinal Mazarin, inftruit
de fa haute capacité, luy avoit
fait dire qu’il fe tinft
prefl: à partir ; mais les
grandes Alliances & les
G A L A N T. 83
de Bourlemont avoient en
Italie, jointes à quelques
autres confiderations importantes,
firent tourner
les chofes, fur la priere de
Mx l’Evefque de Cadres depuis
Archevefque de Touloufe,
en faveur de Moniteur
fon Frère qui s’eft dignement
acquité. de cec
Employ dans des conjonctures
allez difficiles- Ce
84 LE MERCURE
rigny, à donner à Monfeigneur
le Dauphin les premières
teintures de l’Hiftoire
3c de la Fable. Il fut
furpris des talens extraordinaires
qui éclatoient en
ce jeune Prince dés l’âge de
fix ans. Il s’ag flbn de les
cultiver, & cela luy donna
occafion de compofer un
Abrégé de l’Hiftoire Gréque&
RomainefurVelleius
Paterculus. Cet OuvragO e
mérité l’approbation que
luy a donnée le Public. Il a
fait imprimer depuis ce
temps-là un Reciieil en La8è
LE MERCURE les Corps fe font empreffez à venir faire leurs Compli- mens à Moniteur le Chancelier, fur le nouveau rang où le Roy l’a élevé, lesMu- fes ne font pas demeurées muetes; & voicy des Vers qui ont efté adreïfez à M1 Calpatri, Maiftre des Comptes.
' J
POUR MONSIEUR
LE CHANCELIER.
, • 0 k • • •
LOiiis le Grand, & le flw grand des R ois,
Ne feutfairequede grade choix,
GALAN T.
87 C; EMeluy-cy n'a rien, Calfatri, qui (]j m’étonne.
C'ejl un irand Monarque qui donne,
Et c’efiunqrand Sujet far foy, far lll fes Emflois >ç Qdf reçoit, dés lonÿemf s fideled tti
I
À
Emplois
I
7 la Couronne^
Capable duffî plus que perforine Par les foins quil a pris des Armes
& des L oix*
De foùt enir P éclat dont Thémis Penvionne.
Enfin ceftleTi.iAAW^ tout utile à la foie
Au Public^ à P Etat, ce Minière d'élite
Dont le Prince aujourd'buy cote- ronne le mérité.
Il eft certain que le choix
88 LE MERCURE que le Roy a fait de Mon* fleurie Tellier pour la plus importante Charge de l’Etat, a efté reçeu avec les acclamations de toute la
France, & c’eft ce qui a donné lieu aux deux Quatrains fuivans. La Juftice
parle dans le premier.
QUATR AI N.
IEne veux plus fonder qu'à çrt- fier le repos
Que vient de me donner le plus giïi des Héros:
*4infi fi je parois n'e/lre plus occupée^
JLePere ama Balance^ (fi le F& mon Epée.
I
AUTRE.
Je fçay, Madame, que
ces te'moignages de joye &
de refpeift rendus à cegrand
Miniftre, n'auront rien de
, furprenant pour vous à qui
tout fon mérité eft connu-,
mais il vous le fera fans doute
d’apprendre la Conver-
Tome io. H
9o LE MERCURE
fion de l’IndifFerent à qui
vous avez tant de fois redame?
Il aime, & apparemment
il ne ceffera pas fi-toft
d’aimer,car quand l’Amour
s’eft une fois rendu maiftre
de ces coeurs Philofophes
qui luy ont long - temps
rtfifté. comme il ne feroit
GALANT. 9*
pas affuré d’y rentrer quand
il voudroir, il n’abandonne
pas aife'ment la place.Voicy
ce que j’en ay pû découvrir.
Il voyoit fouvent une jeune
& fort aimable Perfonne,
n’avoit commencé à la v oit?
que parce qu’elle aime les
Livres & qu’elle aTefprie
tres-éclairé. Apres luy avoir
donné fes avis fur les
LE MERCURE
langue quelafienne, ilfouhaita
d’en eftre véritablement
aimé. Ses regards
parlèrent, & comme c’eftoitun
langage que la Belle
dre, il ne put s’empefcher
un jour de luy reprocher
Ion peu de fenfibiïité. Elle
fe défendit de ce reproche
furl’eftimeparticulière quelle
avoir pour luy. Vous
fçavez, Madame, que l’eftime
ne fatisfait point un
en vouloir à fon coeur, &
GALANT.
qu’il fe tiendroir malheureux
tant qu’elle luyen rsfuferoic
la tendrefle. La
Belle dérournacedifcours,
&fit fi bien pendant quelque
temps,qu’il ne pût trouver
aucune occafion favorable
de le pourfuivre. 11
devint chagrin, & refvoit
aux moyens de faire expliquer
celle qu’il aimoir,
quand on le vint confulter
fur d es Vers e'crits d’une
main qui luy eftoic inconnue.
II cft du meftier, &
ceux que vous avez veus de
ü façon, vous donnent
affez lieu de croire qu’on
s’en pouvoir rapporter à
iuy. Il prit le papier qu’on
luy donna, & leur ce qui fuit
fans s’attacher qu’à la netteté
delà Poéfie.
? POurquoy ni avoir fait coït
fidence
Que vous envouliez^anion coeur!
11 faut que contre vous il fe mette
endefenfe,
le dois vous empefcher dièn efire le
vainqueur.
lenc ni e/lois point apperdue
Que tous vos petits foins deufent
nieftre fufpelis,
Et quand j'en faifois ta revend
le les prends pour des refpefts*
^LANT.
< C • ' ... i • ...
j£hrque nrm avivons laijfèe, gruel Tirets,. dans cette douce erreur!
J^ous me voyez embarrajfée.
On l'eft toujours quand il s'agit du coeur.
•$»
il faut prendre partyy je ne dois plus attendre,
Mais fi v<™s m attaque^ comment vous repoujfer?
Quand on (ènt le b efoin qu on a. de fie de fendre,
il efî déjà bien tard de commencer,
Ces Vers luy parurent d’uncaraétere doux & aifé. Il le dit d’abord à celuy qui luy en demandoit fa pen-(
96 LE MERCURE fée , & vous pouvez juger defafurprifequand onl’àf. fura que c’eftoit le début d'une Fille qu’il approuvoit. Ce mot le frapa. 11 fe fou- vint de la converfation qu’il avoir eue avec fa belle Ecoliere. Tout ce qu’il ve- noit de lire s’y appliquoit, & cette penféele fit entrer dans des tranfportsde joye incroyables-, maisilcefloit defe les permettre , fi-toft qu’il faifoit reflexion que ces Vers eftoient trop bien tournez pour eftre le coup d’eflày d’une Perlonne qui n'en

GALANT. 97
n’en avoir jamais fait, &
t L’incertitude luy faifant
peine, il refolut d’en fortir.
j( 11 rendit vifite à la Belle,
( luy parla d’une nouveauté
• qui faifoit bruit, leut ces
Vers dont il avoir pris une
fant, & l’en ayant veu foûrire,
il l’embarafla fi fort,
qu’il luy fit enfin avoücr
que c’eftoit elle qui les avoit
faits. Elle ne luy fie
cet aveu qu’en rou giflant
&en luy ordonnant de les
Tome 10. I
Ç8 LE MERCURE
regarder comme un fimple
divertiftementquefa Mufc
naiflante s’eftoit permis, &
dont elleavoit voulu le rendre
Juge def-interefle, en
luy cachant quelle s’eftoit
ineflée de rimer. La referve
ne l’étonna point, il comprit
fans peine ce qu’on
vouloir bien qu’il cruft, &
abandonna fon coeur à fa
paffion. Celle qui la caufe
en eft fort digne. Vous
eftes déjà convaincue de
fonefprit par fes Vers, & je
ne la
tant
GALANT.
pourfe pouvoir pafTer d’ef.
prit,quoy qu’il fcmbleque
ce (oit eftre belle & fpirituelle
courre les réglés, que
d’eflre l’un & l’autre en
mefme temps. Si vous la
vous une Brune qui a la
taille très bien prifè, quoy
que médiocre -, de plus bel
oeil qu’on ait jamais veu, la
bouche également belle, le
teint & la gorge admirables,
& outre tout cela un
âir doux & modelle oui ne
vous la rendra nullement
I
100 LE MERCURE
fufpeéte de faire des Vers.
Voila fon véritable Portrait.
Toutce qu’on luyreproche
pour defaut, c’eft un
peu trop de mélancolie,
une défiance perpétuelle
d’elle-mefme, & une timidité
quelle a peine à vaincre,
mefme avec ceux dont
elle ne doit rien appréhender.
Les Vers d’une fi aimable
Perfonne n’efloicnt
pas de nature à demeurer
fans réponfe, & quand noftre
Amant Philofophe
n’auroit pas efté Poète il y
avoit déjà longtemps, c’eftoit
là une occafion à le devenir.
A peine deux ou
rroisjours s’eftoient-ils paffez,
que la Belle reçeut un
Pacquet, dans lequel elle
ne trouva que cette Lettre.
Elle eftoit datée duParnaffe
&avoit pour Titre
VOS Vers, ai mable Iris,
fait du bruit icyy
On vous nomme au Parnaffe une
petite Mttfe-
1 iij
ICI LE MERCURE
Puis que voflre début a Æ bien réüJJy^
Vous irezfoin^ oujerriabufè.
Nos Poètes palansïunt beaucoup admiré*
P es E enirnes Peaux Efprits, telles que fut la Suzp,
Pour dire toutf'ot un peu cenjuré,
le fuis ravy que vous foyez des noftres.
Efire le Dieu des Vers feroit un fort bien doux*
Si parmy les Autheurs il rien ef toit poin t dlautres
Que de s Autheursfaits ctimevouSi
I ayfur les beaux Efprits une puif fance entière,
Ils reconnoijfent tous ma lurifdV tlion.
GALANT. 105 y} VOUS dire levray ceft une Nation Dont je fuis dégoûté d’une étrange maniéré.
Et Mcfrne quelque fois dans mes brufques tranfports, peu s’en faut qu’à jamais je ne les abandonnes
Niais fi les beaux Efptits eftoient de jolis Corps,
jemeplairois à l’empley qu'on me donne.
Dès que vous me ferezfi* honneur de m’invoquer, pie^vous- en à moy, je ne tarderay guere,
Et lors que mon fecours vous fera neceftfaire,
Affurezyvous qu’il ne vous peut manquer..
cjp • • • •
I Hit
fa
I
I
6
io4 LE MERCURE
levons diray pourtant un point qfi mlembarajfes
Vn certain petit Dieufripon, (le nefçay feulement fi vousfçave\ fin nom,,
Il s'appelle il Amour ) a pouflèfin audace
à mefou tenir enface, Opte vos Vers (ont de fa. façon, Et pourrons, m'a t-ildit, confiiez vous de grâce,
Ce rie fi pas vous dont elle a prit leçon, > :
Qjtoy qu il fe pare en vain de et faux avantage,
lia quelque fuj et de dire ce qui il dits
Vous parlez dans vos Vers un affe^ doux langage *
GALANT. >05
Et feut-eflre apres tout l' Amant dont il s a<^it
luqeroit que du coeur ces Vers fe- roient l'ouvra^
$i parmalheur pour luy vous n'a- vie\ trop d'efprit.
O
"N'aliénas de l'Amour devenir l'Ecoliere,
CeMaiftre dangereux conduit tout de travers,
Vous ne fériés^ jamais de Piece
( résiliere
I
Si ce petit Brouillon vous infpiroit vos Vers.
' ■
Adieu 9 charmante Iris 5 jauray foin que la Rime9
Quand vous compoferez^ ne voua refufe rien.
Riais que ce foit moy feulau moins qui votes anime,t
Autrement tout iliroit pas bien*
ioé LE MERCURE
La Belle n’eut pas de peine à deviner qui eftoirl’Apollon de la Lettre , mais elle refva quelque temps fur un petit fcrupule délicat qui luy vint. Elle n’euft pas eflébien-aife qu’on luy euil fait l’injuftice de donner à l’Amour tout l’honneur des Versqu’elle avoir fairs,mais elle ne pouvoir d’ailleurs penetrer par quel inrereR Ion Amant avoit tant de peurqu’on ne les attribuât à l’Amour; &fi elle luy avoir défendu de croire qu’ils fulfenc autre chofe qu’un»
qu’il n’avoit fouhaité que
foiblement d’eftre aimé} &
le dépit d’avoir répondu
trop favorablement à fa
première déclaration, luy
faifoit relire fa Lettre, pour
voir fi elle n’y découvriroit
point quelque fens caché
quipût aÆoibiir le reproche
io8 LE MERCURE
qu’elle s’en faifoit, quand
on luy en apporta une fécondé
d’une autre main.
Elle l’ouvrit avec précipita,
tion, & y lût ces Vers.
AVe\- voue lù mon nom fins
changer de couleur?
Voftre furprife* Jris^ neft-ede pdf
extrême?
Rajjure^ ■voues mon nom fait toujours
plus de peur
Quejenenauroù faitmoy-meWtGALANT.
10 j
*
yofireOuvrage galant* début ajje^ heureux*
Entre Apollon & rnoy met de la ja~ loufie.
il s agit de Ravoir lequel eft de nous deux
Voftre Maiflre de Poëfie.
<2»
franchement * Apollon rieft pat d'un grand fecours*
; En mattere de Vers je ne le crain- droit guère*
* Et je le défier oit de faire
TfauJJî bons Ecoliers que yen fait tout les jours.
' Quels travaux aflîdue pour former t un Po'ète*
Et quel temps ne luyfaut-il pat?
Z
«o LE MERCURE
On eft quite avec moy de tout cet embarras')
Qfionaimeun peu* l'affaire $ *5» ( faite,
Cherchez^votts d votes eparler Cent préceptes de l* Art, quilfi roitlon^ d'apprendre* Vne refverie un peu tendre* En un moment votes va tout en* feiffier.
*
Tinfiruis d'une maniéré affez.courtt &facile 5
Commencer par l'Efprit cefi un foin inutile*
Fort long du moins* quand mefint il rèü'ffît.
le vais tout droit au Coeur*&faiï plus de profit*
Car quand le Coeur efi une fort docile*

Qnfaitcequ'onvettfdt l'Efitü-
VALANT. ni
Quand vousfiftes vos Vers* dites-le moy fans feinte.*
Les fentiez*-vous couler de four ce ■& fans contraint el
le vous les injf trois3 Iris* n'en dou-
tempos.
Si for tant lentement &d'une froide veine*
SiUabe apres filiale ils march oient avec peine*
C^eftoit Apollon en ce cas.

Lequel avoüez^vous* Iris* pour vo/lre Maiflre l
le rri'inquiété peu pour qui vous prononciez^ ;
Car enfin je le pourrais eflre
Sans quevous-mefmele feuffîez^ le ne penferoispas avoir perdu ma eau
?
«u LE MERCURE
Quand vous décideriez^ en faveur
d'un Rival)
Et mefme incognitofijavois fait
la cbofe3
Mes affaires chez^vous rien iraient
pas plus mai—
Mais quand je riaurois point d'au -
tre parta H Ouvrait
Sms conteflationj' aydonné lefajet.
C'efttoùjoursunçrâd avatay,
Belle iris , j'en fuis fatisfait.
Cette fécondé Lettre
éclaircit entièrement le
doute delà Belle. Elle ne
iii
tt 1( nt Ut'
I
.1
GALANT. itj laifle le pauvre Amour in.de- fendu, & elle vit bien qu’il ne luy avoir propofé les raifons de part & d’autre, que pour l’engager à décider lequel des deux avoir plus de part à fes Vers, ou del’Efpri^ouduCoeur. La Queftion eftoit délicate. On la prefia longtemps de donner un Jugement. Elle fe récufoit toujours elle- mefme, & s’eftant enfin re- foluë à prononcer,voicy un Billet quelle fit rendre à
lt fon Amant pour Apollon. J
Tome io. K
Sire Apollon.* ce rieft pas me affaire
Que deux ou trois Quatrains que
j’ay faits par hasard,
Et je croy qu apres tout vous riy
perdrie^ytere
Quand l'Amour feuly dévroit
Ne vous alarmea^point ; s'il faut
nommer mon Maiflre,
le jure ray tout haut que mes JAeri
font de vous.
lis couloiet pourtant^entre nous^
Comme Amour dit quilles fait
naifire.
Je croy, Madame, que
& Laure d’amdüreufc meGALA
NT. ny moire , voila l’intrigue la plus poétique dont on aie jamais entendu parler,car elle l’eft des deux coïtez. Nous ne trouvons point les Vers que la belle Laure a faits pour répondre à ceux de Pétrarque-, mais cette Laure-cypaye fon Pctrar- que en mefm.e monnoye, & l'attachement qu’ils ont l’un pour l’autre sert tellement augmenté par cet a- cxeable commerce dePoë- fie, qu’ils femblent n’avoir plus de joye qu’en fe voyant. Je lesattens au Sa- • ' TT*
K ij
né LE MERCURE
crement, s’ils vont jamais
julques-là; car il n’y a guere
de pallions qu’il n’affoibliïTe,&
l’Amour dansl’ordinaire,
demeure tellement
qu’on a quelque raifon d’affurer
qu’il n’a point déplus
irréconciliable Ennemy.
Ce n’câ pas pourtant une
regleabfolumentgenerale,
& ce que je vav vous dire
d’une jeune Personne delà
peu de temps qu’elle eft
mariée, Ôc les belles qualiElle
fe fouvint d’avoir veu
fon Portrait dans un lieu où
elleavoit tout pouvoir. Elle
y courut, le détacha ellenS
LE MERCURE
mefme de l'endroit où il
avoitefté placé, le fit porter
a fa Chambre, pafia la plus
grande partie de la nuit à le
regarder, & je ne fçay û
ellene luy fit pointée tendres
carefles. Si toutes les
Femmes aimoientavec une
GALANT. n9- toujours bon d’avoir une grande exactitude à s’aqui- ter des devoirs qu’il nous impofe. Nous en voyons, la récompenfe en la Perfonne de Monfieur l’Abbé du Pleffis de Gefté de la Broutiere, dont la longue application à remplir toutes les obligations de Ion caractère, luy a fait mériter le choix que le Roy a fait de luy pour luy confier la conduite de l’Eglife de Xaintes dont il fut facré Evefque ces derniers jours. S’il fuccedc à un grand Prélat qui fut
no LE MERCURE fort aimé dans ce Diocéfe, fa do&rine & fà pieté, jointes à fon humeur honnefte & obligeante,ne luy gagneront pas moins les coeurs des Peuples qu’on luy a commis. 11 y avoit quinze ans qu’il eftoit Grand Vicaire de Paris. Il eft Doc- teurde Sorbonne, & d’une tres-Illuftre Famille d’Anjou. '
Le Roy qui aime à répandre fes bienfaits par tout, a gratifié Mr l’Abbe Daquin, Fils de fon Premier Médecin , de l’Ab- baye
G AL AN T.
ILï baye de ia Seube près de Bordeaux ; & comme Sa Majefté n’oublie jamais les Services qu’on luy rend, Elkk.a récompenfë ceux de M dePuyfegur, qui a efté longtemps Lieutenant Colonel & Meftre de Camp du Régiment dePiedmonr, par une Abbayequ’Elleluy adonnée dansToul. Prendre ce party eft une maniéré fort honneftede dire adieu au Monde apres avoir expofé fâ vie pour fon Prince, pendant un fort grand nombre d’années. Des A-
Tome io. L
m LE MERCURE
dieux de cette forte ne me
devoir
eftre retraciez-, mais vous
allez voir, Madame, que
j’avois quelque fujet de n en
pas croire entièrement celuy
qui pretendoit l’avoir
dit pour toujours aux Mutes.
Ses A mis n’ont pu foufrir
cpi’il fe dérobât plus
longtemps la gloire qui luy
eftdeuë. Ils 1 ont fait connoiftre,
& j’ay à vous ap
prendre qu'il s appelle M
Ferrier. Les louanges qud
~ rôtir aii£
GALANT. ïij Font engagé à faire un Ouvrage Galant qu’on croit déjà fous la PrefTe. On ne m’en a pu dire leTitre, mais vous pouvez juger de quelle beauté il fera par cette Elégie qui en doit faire le commencement. Elle donne lieu de conjecturer que cet Ouvrage contiendra les maniérés qui peuvent faire acquérir l’eftime du beau Sexe aux honneftes Gens, & on ne peut douter que cette matière ne foit traitée délicatement par un Homme qui penlé jufte, &qui Lij
n4 LE MERCURE écrit avec une fort grande netteté.
«- « 4M 4M <*$■ t ■»> SK- » <«•
ELEGIE
MAiflre de tous les Dieux dit les fiubtiles fiâmes Ne brûlent point les coeurs fans éclairer les âmes,
Amour, c e fl à toy fui que confia- crant mes l^ers,
Je vay de tes fiecrets infiruire l'P- nivers.
Ainfi, dans mes écrits révélant ta ficience,
De tes droits fur les coeurs jeten- dray la puijfiance,
GALANT. n5
Et ma Mufea ton TempleappeUat
les Mortels,
fera de toutes parts encenfer tes
Autels 3
Ces Vers dont je te fais un heureux
(dcrifice,
juftice.
Qaoy, pourrois-tu me voirEfclave
rebuté, (fierté,
D'une ingrate Maifirejfe effuyer la
Moy, qui par des avis aufit feurs
quefidelles,
Montre l 'art de toucher les Maiftrefies
cruelles ?
Non, Amour, tu le vois, qu'il efi
de ton honneur
D’employer tous tes foins au foin
de mon bonheur.
le ne demande pas qu'à mes vctux
né LE MERCURE
A toutes les Beaute\tu me rendes aimable,
Je n'étenspatfi loin mes'fro jets a- moureux,
£t ce rieftque Philiaque demandent mes voeux,
JP'hilia que j'aime en vain, & dont l'indifférence
Par de longues froideurs éprouve , ma confiance.
JMafo cette ame infenfible aux preuves dtmafoy,
Le fera-t-elle encor fi tu combats pour moy?
Si j'obtiens fur fon coeur une entiete valoireY
Le fruit que j’en auray t'en affure la qloire.
Peur toy plue que pour ?noy fois jaloux de tes droits,
Aux coeurs indi fféré ns fait révères tes L oixr
GALANT. ny
JZfoùmettant l'orÿieild'une Beau- té rebelle,
pay luy fentir pouf moy ce que je fens four elle.
Pendant que je pouffât ces regrets amoureux,
L'Amour vint me promettre un defîin plus heureux.
Toy quün %ele f fort attache a morifâvice, .
Efpere teut, dit-il, quand je te fuie propice:
Tu m as fait une offrande à n oublier jamais^.
Et mes traces pour toy préviens dr&nt tes foubaits.
Des Dieux pour les Mortels la b otite fans me fur e,
D'un peu d'encens brûlé les paye avecufureS (bienfai fans,
Mais en eff il aucun de ces Dieux
Y • • • •
L
ji8 LE MERCURE
?u:/fi Par fis dons égaler mes
prefens ?
Helene^ de Paris
taire
Dés quon l'eut veu juger en faveur
de ma Mere.
1 uli e, aux yeux de Rome, au milieu
de la Cour,
D Ovide, par mes foins favorifa
l'amour.
Crois-tu que maintenant a tes voeux
moins propice,
le manque de puijfance, ou manque
dé juflice,
qui fans borne jufe
fane en tous lieux,
Au rang demes Sujets compte mef
me les Dieux!
Ainf, que ta-P h fis $ arme dindtfer
en ce,
Plie doit fa tendrejfe
ve rance.
GALANT. îzç
Ne crains rien. (ffidelle aux yeux qui t ont charme,
Airne, le Dieu d3Amour taffure d'efire aimé.
Ahy Philis, voudrois- tu démentir fes Gracies,
Aux biens qu’il me promet opofir des obfaclesl
Non,fans doute, & ton coeur moins rebelle à fes loix,
Suivra l'avis d un Dieu qui parle par ma voix.
Si tu n'écoutes point fin fideUe In» terpretey
Au moins de ta rai fin entent la voix ficrete,
Qui te fi lli citant. de. te laiffer charmer,
Te dit tout bas qu'un coeur n' eft fait que pour aimer.
Aux douceurs de l!amour ne fois- donc plus contraire^ 1
7
S30 LE MERCURE
On ne peut en jouir qu autant que P on fait plaire J
Et le Soleil r £ ailleurs/ jufie dans fon cours,
D’un plus rapide pat mefure nos beaux jours.
JLa Nature, querelle une haute Prudence,
En joignant défi près la mort à la \naiffance,
Semble noua avertirquil noue faut menacer
2ufqu au moindre moment d’un tempsfi pajfa^er.
Quelque courte en effet que puiff eftre la vie,
Ellep ourroitfuffmar emplir no fa envie,
Si donnant libre effor à nos jeunes
G A L A W i . ip y^ais. loin que la raifon réglé nos deflinèes,
Nous perdons fans aimer ms plus belles années,
Pt lors que la vieilleffe efface ms appas,
Nous cherchons les Amours & ne les trouvons pas.
Ne croy point que des ans l'injvq. rieux outraqe
Epargne par reffect les lis de ton vifaçe.
Non, Philis,la beauté doit un jour tequiter.
Avant quelle te quiteil en faut frofiicr.
C’eft apurement un fort grand fecret en toutes chefs s, que de fçavoir profiter
ijî, LE MERCURE du temps. Il eft le maiftre de tout, & c’eft luy quia fait renouveller depuis peu l’Alliarice que le Prince d Orange avoit de'ja avec laMaifon Royale d’Angleterre. LafeuPrincefled 0-
range fa Mere, eftoir Soeur de Charles II. qui régné à prefent, & vous eftes trop fçavante dans l’Hiftoire pour ignorer que ce jeune Prince qui vient d epoufer la Princefle Marie Fille du Duc d’YorcK, eft de l’illu' ftre & ancienne Maifonde N a flan, quia eu l’avantage
Comtes de l’Empire, ils y
J ont tenu longtemps le prer,(
niier rang, & cette Branche
q particulière, a joint à une
| naiflance qui en voit peu au
c deffus d’elle, un mérité fi
d éclatant & une valeur fi exjjj
traordinaire, que fi Loiiis
oe le Grand n'avoit fait la
[, Guerre & gouverné fes Peu-
" 1 T 1 J les grands Hommes dont
le Prince d’Orange defî34
le mercure
Cend, pourroient fervir de
modèle à tous ceux qui
cherchent la Gloire par la
Politique & par les Armes.
Quant à ce qui le regarde,
on peut dire qu’il a toutes
les qualitez qui font à fouhaiter
dans une Perfonne
de fon rang. 11 eft brave
autant qu’un General d Armée
le peut eftre, & f°n
malheur ne l’a point etnpefché
de faire paroiftre
fon courage dans toutes les
occafions qu’il en a pû rencontrer.
Trouvez bon qne
je m’explique. Jen’appel^
GALANT. ijj point malheur le mauvais foccez d une entreprife, qui félon les évenemens ordinaires, n’en doit pointavoir un heureux. Aufli n’eft-ce point ce genre de malheur que le Prince d’Orange a éprouvé. Il n’a rien entrepris que fur des apparences favorables, & ayant autant de valeur qu’il en a, ilauroit infailliblement réüïTy en d’autres temps, & contre de plus foibles Ennemis. Le péril ne l’étonne point. Il s’expofe, fe trouve par tout, & ne fait pas moins
ijé LE MERCURE l’office de Soldat que de pitaine; mais il eft malheureux d’eftre né dans le Siècle
de Loiiis XIV. & d’avoir en telle un Conquérant à qui rien n’efl capable derefifter. C’eft ce qui redouble la gloire du Roy, & les louanges qu’on doit aux Minières & aux Generaux qui agifTent & combatenc fous fes ordres. Nous gagnons des Batailles & prenons des Places en peu de temps, mais ce n’efl point fans obftacle. On nous oppofe de grandes forces,
on fe bat, on vient au fecours
nous
demeure, le Prince d’Orange
emporte toujours l’honneur
d’avoir beaucoup entrepris.
La jeune Princerte
qu’ilaépoufée eft grande &
bien faite, mais je ne fuis
point encor aïTez inftruit
de fon mérité pour vous en
parler. Il eft difficile qu’elle
n’en ait beaucoup, eftanc
Fille d’un Prince qui peut
regarder là naiïfance, toute
Royale qu’elle eft, pour le
moindre de fes avantages.
Tome io.
i58 LE MERCURE aimé dans l’Angleterre, & on ne le peut eftre de tout un grand Peuple, qu’on ne s’en foit montré digne parles plus éminentes qua- lîtez.
Le Mariage qui eft le plus fort lien de la Société civile, auroit de grandes douceurs fi elles n’eftoient
pas le plus Couvent troublées parla mort. C’eftune cruelle peine à éprouver, 3e Madame duVauroiiy, Soeur a
de Mr de Ribere , qui
efté depuis peu Lieutenant Civil, nous le fait connoi-
(
GALANT.
M9‘ fjre. Elle a pleuré fi amèrement depuis quelques mois la perte d’un- Mary àqui elle avoit donné toute (à ten- drefle, quelle eft enfin morte elle - mefme apres des fouffrances extraordinaires. Elle eftoit belle-, jeune, fpirituelle & digne de vivre plus longtemps qu elle n’a Pair.
M‘ Mufnier de Mouîi- gneuf,Confeiller au Parle- lement, eft mort auffi» Ils elloient trois Freres Con- feillers, dont il y en a us» à la Grand’Chambre.
M ij.
du coeur,& on n’aguereveu
d’Homme plus entrepren
a n r
Cette indifpenfable nece
Ane'de mourir doit avoir
quelque chofe de bien riî
ES-H OULIER.ES.
1 nous naijfions feuvent, cd
pour mourir de me fine r
Et pour mourir d abord.
J^n matin paflagernous voitchair
ger de fort>
Plaigne^
heur extrême.
En eft-il un plus grand pour de jen>
nesappasy
unfifiudai^
trépael
GALANT. i4Ÿ la Loy de nwirirtojl efi une Loy trop dure,
Qùnotu aflùjettit ïineçaleNattire. On fait pbu de pitié qu'on ne fait de jaloux,
Qufidon dure auffîpeuque nous, il faut que nous mourions à la fleur
de nofire ape
En attendant le retourduPrintëps.. On fe confie peu d’un futur avantage,
Quand on peut fe pafer d'attendre un autre temps.
Que nous fcrt-il que le Z'ephire Si délicatement auprès denousfoù- pire,
Qu'il foit infinuanty que fon.efprit fait doux,
Si dans le tëps qu'il nous ca refle, Et nous marque de la tendre fie, La mort vient, & finit tout commerce entre nousl
I44 LE mercure Vous dites cependant) Jonquilles, Tubéreufes,
Vous vivez peu de jours 3 mais vous vivez heureufes. Quand on a de beaux jours, il n'eftpas b~o qu'ilsfioientfi' courts > lÿullede nous pourtant ne conferw l'envie
De fie voir prolonger la vie, Quand il s'enfaut priver pour rervos Moutons
De Guirlandes & de Fefions. Sans peine & fans regret chacune alors fe donne j4vec fies plus vives couleurs.
Pour qui peut en mourant leur fir* virde Couronne y
Mourir bientoft rieft par le pltô grand des malheurs.
Voye^Madam^coiiinî^ u 1 ie
GALANT. 14J je me laide infenfîblemenc emportera l’enchaînement Je la matière. Je vous de- vois faire part de's le Mois pafle des Ceremonies qui s’obfervent à l’Ouverturc du Parlement. Le nouveau fùccés des armes du Roy en Allemagne dont j’ay eu à vous écrire, me les ayant fait remetre jufqu a celuy-cy, cet Article fem- bloit devoir eftre un des premiers de ma Lettre, & je ne vous enaypas encore dit la moindre chofe. Oa fçait que la couftume eft Tome 10. N
-4
ï46 le mercure
tous les ans de faire des
Harangues à cette Ouverture.
Ceux qui n’y vont
point n’en fçavent rien davantage,
&,peut-eftre mefme
que la plupart de ceux
qui y vont n’en reviennent
gueresplus-fçavans. Voicy
par ordre tout ce qui s’y
paffe.
Le lendemain de la Saint
Martin, le Parlement en
Corps & en Robes rouges
entend la Melle dans la
Grand’ Salle du Palais. C eft
toujours un Evefque qui la
dit. Elle a efté celebrce
GALANT, ,47 cette année par celuy de S. Orner. Le Parlement rentre apres l’avoir entendue, & remercie l’Evefque, qui luy témoigne de fou cofté tenir à honneur d’avoir efté choify pour cette Ceremonie par un fi Au- gufte Corps. Les Avocats & les Procureurs preftenc le Serment en fuite; apres quoy Monfieur le Premier Prefident traite une partie de la Compagnie, & quelques-uns de Meflieurs des Enqueftes. Les Séances ne recommencent aue le Lun-
î4S LE MERCURE
dy de là huitaine franche
d’apres la S. Martin.
Le mefme jour de cette
Ouverture, Meffieurs delà
ges.
Cour des Aydes font des
Harangues entr’eux qu’on
peut appeller Mercuriales,
puis qu’elles n’ontpour but
que de faire voir en quoy
les Juges manquent, & ce
qu’ils doivent faire pour
répondre dignement aux
obligations de leurs Char-
Meflieurs les Prefidens
& Confeillers de cette
Cour s’eftant aiTemblez
cette année à leur oralGALANT.
149' naire , Monfieur le Camus qui en eft le Chef prit la parole, & apres s’eftre longtemps étendu fur la différence qu’il y avoir de l’intégrité &dela pureté de vie desSiecles paffez, a la corruption qui s eft gliffee dans celuy-cy, & avoir montré par un difcours fort net & fort cloquent, que nous ef- rions tres-éloignez de cette candeur qui eftoitiniepara- ble de tout ce qui fe faifoic dans ces temps heurenx, il fit voir les defordres qui naiffent des Jugemens trop N iij,
ijo LE MERCURE précipitez, & marqua fortement que les Juges ne pouvoicnt apportertrop de précaution avant que de prononcer fur l’in terefl: des Parties. Voicy unecompa- raifon dontil fefervit. Souvenez-vous, Madame, que tout ce que je vous dis eft fort imparfait, & que les penfées que je vous explique perdent beaucoup de leurgrace , déniiées des vives expreflions qui les met- toient dans leur jour.
De mefme , dit-il, que les Eaux qui fe répandent
GALANT. îji Sans les Campagnes par divers détours, y portent: la fertilité & l’abondance, ainft quand les Magiftrats accompagnent leurs Juge- rnens de toutes les reflexions neceffaires pour de- veloper avec foin les différons intercfts des Particuliers, leurs Arrefts fe trouvent foûtenus de cette c- quité dont Dieu recommande aux Hommes de ne s’éloigner jamais. Au contraire lors que ces Eaux fe débordent avec l’impétuo- fité d’un Torrent, elles les.
N iüj
LE MERCURE
gaftent, elles y mettent 1a
fterilité; ce qui eft en quelque
façon l’image des Juges,
qui fe laiffant emporter
au premier feu de leur
ge'nie, & ne prenant pour
réglé de leurs Décidons
que leur enteftement, &
leur opiniâtreté, confondent
le bon droit avec le
mauvais, & font injuftement
des malheureux.
Lefujct que MrduBoifmenillet,
Avocat General
de la Cour des Aydes, prit
pour fon Difcours, fut la
connoiflance de la Vérité.
galant.
1-55 11 montra qu’elle eftoit fi nccefiaire aux Juges, que ûns elle ils ne pouvoient goûter de véritable plaifir dans le monde, ny joüir d une fortune aflurée. Il fie voir que ce que l’Homme appelle Fortune, confiPcoic dans fa feule élévation, que nous cherchions cette élévation par tout, & que nous tachions de nous la procurer à nous-rnefme, en abaif- âne ceux en qui nous découvrions plus de mérité qu’en nous, ce qui eftoit caufe qu’il nous fâchoir
naturellement d’entendre
loüer, au lieu que la Satyre
nous donnoit toujours de la
joye, parce quelle a l’adrefTe
de changer les vertus
en defauts, &que nous ne
trouvons point d'abaiiTement
pour les autres qui ne
nous femble une efpece d’elevation
pour nous-, mais
qu’enfin cette Fortune eftoit
injuftcfans la connoiffance
de la Vérité. Il adjouta
que la Fortune & les
Plaifirs efloient les deux
GALANT.
c’eftoit fur eux que tous
autres rouloient , &
que nous eftions obligez de
prendre party. Ce raifonnement
fut fuivy d’un
grand Eloge de Monfieur
le Chancelier, qui attira un
applaudiffement general.
Le Lundy que le Parlement
recommence fes
Séances, qui eft le jour ou
les Audiances font ouver■
5« LE MERCURE il finit en adreflànt la parole aux Procureurs. C’eft ce
qui s’eft toujours pratiqué, & ce qui fe pratiqua encor la derniere fois. Monfieur
de Lamoignon, avec cette gravité de Magiftrat fi digne de celuy qui tient le premier rang dans ce grand Corps, dit d’abord que c’ef- toit pour la vingtième fois qu’il voyoit renouveller l’ancienne Ceremonie depuis que la Juftice s’expli- quoit par fa bouche fur toutes les obligations que les Avocats avoient contrat-
galant. I57 ■îées avec elle par le Ser- nient de fidelité qu’ils luy avoient folemnellemenc juré-, que dans cette longue révolution d’années qui avoit pafle comme unfon- ge, il avoit veu changer prefque tout le Barreau, & qu’à peine yreftoit-ilencor quelques-uns de ceux qui eûoient alors dans une fi haute réputation, & que l’âge ou l’infirmité avoient contraints d’abandonner un employ fi laborieux. 11 exagéra fort le mérité de ces Avocats célébrés, &
dit qu’il fembloit qu’ils
n’euflcntpas eu plus de durée
que ces Etoilles élémentaires
qu’on voit Te dé.
tacher du Ciel dans un
temps calme , qui marquent
par une trace de lumière
leur chute précipitée
& qui fe perdent pour jamais
dans l’obfcuriré de la
nuit. Il les compara en
fuite à des Torches ardentes
qui jettent une fort
grande lueur, qu’on ne voit
paroiflre que pour la voir
s’évanoüir dans le tnefme
temps. Il adjoûta que leur
GALANT. mémoire vivroit toujours dans le P arlement,où l’idée en eftoit fi forte,& le fouve- nir fi agréable, qu’il eftoic
croire qu ils fuïfent u it.
I___o
W comme impoffibledenepas 31 fuflent encor
prcfens, & qu’on entendift
f r
4 ter. Il les exhorta tous à fe rendre infatigables? dans on leur employ comme ou voient fait ceux dont il leur oii[ parloir,Scieur fitvoir qu’ils .ut eftoient d’autancplus obli- gez de s’en acquiter digne-
leur voix parmy cette multitude d’Avocats qui venaient en foule pourécou-
a-
ment, que noftre grand
Monarque, au milieu des
foins qui demandoient toute
ion application pour ce
qui regardoit la Guerre, ne
perdoit jamais celuy de
conferver l’éclat de lajuftice
& demaintenirfes interefts,
ce qu’il avoit encor
jours en luy donnant pour
Chef un grand Homme
dont le choix avoit elle prévenu
par les voeux de toute
h France, & fuivy de fes
GALANT. 161
moignon fonFilsparla apres
luy, M‘ Talon eftant tout
couvert de la gloire que ces
fortes de Harangues font
acquérir. Son Exorde fut
que fi les Difcours que la
toient confiderez que comme
des EiTais d’Eloquencefemblables
a ces Concerts.
deMufique qui datent l’oreille
fans penetrer le coeur,
ceferoit un abus de porter-
Parlement pour maintenir
lesinterefts delà Juftice5erv
Tomeio, O
j6i LE MERCURE reprefentant aux Avocats à quoy les oblige le Serment qu’ils renouvellent tous les ans. Il pourfuivit en fai. fant connoiftre que laper- feétiondece Serment con- fiftoitdans la vérité, la juf- tice & le jugement; Que fans ces trois conditions tous les Sermens eftoient des Parjures, & les Parjures, la fource de tous les malheurs-, Qtfainfi les Payens avoient dévoué à la colere du Ciel, & à l’execration de la Terre, ceux qui fe trou- voient coupables des deux
GALANT. 165
plus grands crimes quon
puifTe commettre dans le
monde,l’un d’avoir méprifé
la Divinité qui préiide
aux Sermens, & l’autre d’avoirvioléla
Vérité, fans laavoit
point de religion parmy
les Hommes, ny de fidelité
parmy les Dieux. Il
finit par une peinture de
l’honnefte Homme qu’il
exhorta les Avocats de fe
propofer pour modelle,afin
que s’appliquant avec plus
O ij
de s’enrichir, ils eufTentun
zele parfait à défendre la
Le Mercredy fuivant on
tient la Mercuriale. Mrle
Premier Prefident parle à
Meilleurs lesGensdu Roy,
qui luy ayant adreflela parole
en fuite, continuent en
l’adreflant aux Juges en general.
M‘ de Lamoignon,
Chef de ce grand Corps,
tournafon Difcours la dernière
fois fur laVerité. Il dit
que les Juges eftoient dans
une obligation
GALANT.
Jjle de la chercher (ans (e jnetre en peine de la calomnie,
ny de ce qu’on pourroit dire contre eux quand ils feroientleur devoir Qu’ils eftoient dans un rang élevé, mais expofé à tour-, Qu'en cherchant cette Vérité, ils dévoient craindre qu’on ne les perfuadât trop aifément -, Que chacun croyant avoir droit,croyoit en mefme temps que la Vérité eftoit pour luy , & que cependant elle ne pouvoir eftre que d un code;. Que pour labien découvrir
au travers des voiles qui
lenveiopent, ils dévoient
tout entendre, ne rebuter
perfonne, & ficela fe peut
dire, écouter jufqu’à l’injufticemefme,
pour n’avoir
aucune négligence àfe reprocher-,
Que tout leurdevant
eftre lufpeâ,ils Iedevoient
eftre à eux-mefmes;
Que les Amis fe laiflantaveuglerpar
leurs Amis, tâchoient
à perfuader des injuftices
aux Juges, dans la
penfée qu’ils ne leur demandoient
rien que dejufte,
& qu’ainfi ils avoient
GALANT. j6t fujetdefe défier de tour, & particulièrement d’un Sexe qUi ayant des privilèges particuliers , vouloit toujours eftre creu, & ne
prioit jamais qu’avec quel- oueforte d’autorité. Il finit par quantité de belles cho- fesqu’il dit fur la grandeur du Roy, & fur La fidelité que les Juges doivent à leur confcience.à SaMajefté,& àleurminiftere.
Monfieur de Harlay Pro- General parla en 11 dit que le repos fubfifter toute la
cureur fuite, faifoic
LE MERCUREi
Nature; QjeDieu mefme
en avoit étably un jour dans
chaque Semaine > Qup les.
Corps apres avoir travaillé
tout le jour, eftoient obligez
de fe délaffer la nuit
pour reprendre de nouvellesforces,
& qu’ainfi on avoit
ordonné les Vacations
afin que l’Efprit fe repofaft
des fatigues de l’année , &
puft s’appliquer'aux Affaires
avec une nouvelle vigueur;
mais qu’au lieu d’employer
ce relâchement à l’ufage
GALANT, rf? aulïi crus qu auparavant, il explique ce terme, adjou- tant qu’ils n’avoient point aïTez digéré les preflans devoirs qui leur font im- pofez par leurs Charges, & qu’ils ne s’eftoient point mis dans l’eftat oû il fauc eftre pour s’en acquiter; Qiril les conjuroit de mieux profiter du temps, & que ce fuft pour la derniere fois, s’ils remarqtfoient qu’ils en eulfent jamais abufé. Apres cela il entra dans le détail de ce que doit fçavoir un
Juge, & ayant parlé des Or- Tome io. P
k
i;o LE MERCURE donnances, du Droit Civil, &dequelques autres dont la connoifiance luy eftoit ab- folumentnecefiaire, il tomba fur la foiblefte des Hommes fi fujets à fe tromper eux-mefmes, ou à fe laifler
tromper. Il leur fit connoi- ftre que la prévention eftoit la chofe du monde la plus
dangereufe,puisque l’innocence en pouvoir fouffrir;& leur ayant marqué cedefaut corne un des plus grands & despluspréjudiciablesqu ils puflentavoir, il les exhorta àfongcrférieufementas en
JJ
3-
GALANT. i7<
défendre, & à ne donner
jamais de Jugemens fans
avoir examiné jufqu’aux
moindres circonftances des
Affaires fur lefquelles ils avoient
a prononcer.
Je vous ay déjà priée, Madame
, de ne regarder ce
que j’avois à vous dire fur
cette matière,.que comme
uneébauchequiaefté faice
confufément fur des Por&
ils
tl
traits achevez. Ce font
moins en effet les penfées
de ces grands Hommes,
que quelque chofe de leurs
penfées. Ils leur ont donné
-4
B7& LE MERCURE’ un tour qu’il ne m’eft pis poffiblede trouver, & j’en laiffe beaucoup que la mémoire de ceux qui les ont entendues avec admiration ne m’a pû fournir.
Ce qui m’en caufe tous Jesjours, & qui en caufe fans doute à toute 1 Europe, c’eftde voir qu’en quelque lieu que ce puiffe eftre, & pour quelque occafionquc ce foit, les;Armes du Roy portent la terreur où elles paroiffent. Voyez ce qui cû arrivé,quand Sa Majefte . follici tée par lcsMcconte-o?.
I
lut enfin de lesaffifter. Elle
fit donner fes ordres à M*
François tous prefts à marcher.
11 n’eft pas furpre-’
nant qu’il y’en euft. Ils courent
par tout apres laGloires
& dés que la Paix eft en
France, ils vont chercher à
fe fignaler chez tous les
Princes Chrettiens qu ils
fçavent en Guerre. de
Boham qui en avoit appris
le meftier patmy les Braves
de ces deux Belliqueufes
Nations , aiïembla des
GALANT. 175 huit cens Hommes effectifs avec lefquels il alla au fe- coursdes Mécontens. Remarquez, Madame, que je ne vous ay rien dit d’abord que de véritable. Les iucces avoient efté balancez depuis plufieurs années en Hongrie. Nos François y arrivent. Ils n’ont encor joint que peu de Hongrois, & ils gagnent une cc’ebrs Victoire.’ 11 eft vray que les polonois qu ils comman- doient y ont eu part, ayant montré dans cette fsnieufe Journée la meftne valeur P iiij
*76 LE MERCURE
«ju ils avoient fait paroifoe tant de fois fous le Grand Marefchal Sobieski, que Ion mérité extraordinaire a mis dans le Trône, & qui eftant devenu leurRoy,ne les a pas moins accouda, mez à vaincre qu’aupara- vant. Plus de mille morts font demeurez fur la place, ûns compter ceux qui fe font noyez. Joignez à cela plus de huit cens Prifon- niers, avec toutes les dépouilles, & vous avouerez que cet avantage peut paf- fer pour une pleine Vie-
GALANT. 177 toire. M‘ de Boham a fait voir dans cette occaGoti toute la prudence & toute la conduite d’un grandChef aveclafermeté d’un Soldat, le Chevalier d’Alem- bon porta fes ordres par tout» 8c paya de fa perfonne dune maniéré qui fit con- noiftre que le péril ne 1 e- tonnoit pas. Il ne fe peut rien adjoûter aux marques de courage que donna M1 de Sorbual qu’on vit toû-’ jours à la tefbe des Troupes Hongroifes. Mr le Marquis de Guenegaud; ne quittai
î78 le mercure point celle c!e la Cavalerie. Il arrefta les Ennemis qui voulurent forcer le Pofte
qu’il gardoir, & les empef- cha mefme de paflcr. Il eft Fils de Mr de Guenegaud qui a efté Treforier de l’E- pargne. Mr de Clanleu commandant l’infanterie, donna l’exemple à fon Régiment, & allaPique baiïTee aux Ennemis. M1 de Val- cour premier Capitaine du Régiment deBohanrne fe fit pas moins remarquer. Je ne vous nomme point les Polonois, Hongrois & Tar-
GALANT. 179 tares qui fe fignalerent, il y en eut beaucoup, & vous n’aurez pas de peine à le croire, puis qu’ils comba- toient avec des François, & qu’il eft impoffible qu’en leur voyant faire des cnofes furprenances, on ne tâche de les imiter. Leur entrée en Hongrie n’a pas efté feulement fuivie de laViétoire, elle a obligé deux grandes Comtez qui foufroient fans ofer fe déclarer à le ranger du party des Mécontens, dont enfin le Manifefte a paru touchant les juftes rai-
aSo LE MERCURE
Tons qui leur ont fait impfou rerl’afllftanceduRoyTres- Chreftien. Depuis tout ce que je viens de vous marquer, ces Peuples oppreflez ont encor remporté des a- vantages confiderables. Il n’y a pas lieu d’en eftre fur- pris, puisque la France s’en mefle. Voyez, Madame, ce que fait le Nom du Roy. 11 fe déclaré, & la Vidoire devient infaillible^ mais fi fes Armes fe font redouter par tout, fes Triomphes font en mefme temps l’iné- puilàble matière desEloges
o: a C!i ai. y a:
11
ar. fi
K
H! >£ ter
GALANT. i8k jjetout le monde, & ceux quel’embarras des Affaires Ju Public oblige à rompre commerce avec les Mules, cherchent à le renoiier pour ne demeurer pas muets quand il s’agit de la gloire de ce grand Monarque. Vous nen douterez point quand vous aurezleu ce Sonnet de Mr de Brion Confeiller au Parlement.
T* “ • ”4 * ’ • ’ . k
• • • '(** • , • ■
1 4 * -T C

GALANT.
■j)tt foin de le garder faites-vous une Loy.
•S1
4* •
yous avez, employé plus de cinq mille années y former de Louis les nobles def- tinèes 5
yofre pires grand effort nous pare if aujourd’huy.
PPe livrez^donc jamais à la fureur des Parques
Ce Roy vicions us, la gloire des
Monarques.,
yous ne ffauriez, donner un plus . ÿand Roy que luy.
Cette vérité eft fi confi. tante, que le plaifir d’admirer fes grandes Actions a-
doucit les maux de ceux qui
%f ouffrent ; &cet* autre Son/- eetde M1 l’Abbé Flanc arrefté
dans la Conciergerie
par fes malheurs, en eft une
AU ROY • «
Sonnet.
ROy fetdde tous les Roy S diÿit
Æeftre imitée
Ta gtâdeurniéblouit
tremblante
GALANT.

( teritL
v,
F
( vinité* fu portes tous les traits de la Di~ jttfeal bruit de ton Nom I’Europe s'épouvante, Et les Faits inouïs de ta main Jt puiffdnte Feront l'étonnement de la PoÇ-
Mais l°rs 4ui tu parois environné de gloire,
Qden tout temps tes "Drapeaux de~ vancent la ViUoire,
Qu un feul de tes defleins fufpend. tout l’JFnivers j
•jü»
. *• *« < A '
Que du fier Efya<&nol les Fides font ' conquifes^
Q£à l'éclat de tes Lys les Ailles font fournifés^
Ai' admirery Grand R ey f adoucit tous mes fers,
TDome 10; OE
186 LE MÉR URE
feulement commun à tous
les François. Le General
à la J ourne'e de Cokberg,
n’a pû s empefcher de trouver
du bonheur dans une
difgrace qui luy a procuré
leplaifirdevoirlaplus belle
Cour de l’Europe, & le plus
grand Monarque du monde.
Ilenareçeu depuis peu
une Epée toute couverte
de Diamans. Entre autres
chofes que l’excez de fa
joye luy fit dire au Roy
pour le remercier d’une fi
*
GALANT. j87
Jorieufe marque de fon
eftime, il die qu’il ail oit fubftiruer
cette Epe'e dans fa
Famille, afin que fes Defcendans
ne perdifient jamais
le fouvenir de l’honneur
que luy avoir fait un fi
grand Prince.
SaMajefté qui connoift
les fervices qu'on luy a rendus,
a donné la Lieutenance-
Colonelle duRegiment
de Picardie à Mr de Villemandor
qui en eftoit premier
Capitaine , & celle du
LE MERCUREi
GALANT. ^ues de Beziers & de Montpellier. Les Etats s’y trouvèrent en Corps. Monfieur le Duc de Verncüil Gouverneur de Languedoc,& M‘ Daguefleau Intendant aufdits Etats, & Commit- faire du Roy, ne manquèrent pas aufifi de s’y rendre f & comme une pareille Ceremonie
faite depuis long-temps dans cette Province, une infinité de Perfonnes des Villes voifines y fut attirée par la curiofiré. Moniteur le Cardinal de Bonzi traita
efté
n ’ avoir
190 LE MERCURE en fuite magnifiquement Monfieur le Duc de Ver- neüil, avec les Commiflai- res du Roy,& tous les Evef- qucs. Celuy dont je vous parle efl: Neveu de M de Grandmont , qui eftoit Agent perpétuel des Etats de Languedoc, & qui fut à feu Monfieur le Duc d’Orléans. Son mérité bavoit
mis dans une fort grande confidération. Mr le Marquis
de Montanegre n’af- fifta point à cette Cérémonie, parce qu’il eftoit party quelques jours auparavan[
19t
GALANT, pour aller faire vérifier au parlement de Touloufe fes Provifions de Lieutenant de Roy de la Province. On nedoute point quelles n’y (oient reçeuës avec joyc par la connoiifance qu’on a de fes fervices, & de la juf- tice qu’on luy a rendue. Vous m’avez marqué que vous l’eftimez-, & comme jefçay que vous ferez bien aife que je vous parle de luy toutes les fois que 1 oc- cafion s’en ofrira, j’auray foin de vous fatisfaire.
Cependant apres vous
LE MERCURE avoir entretenue: de la grande AfTemblée quis’eft faite à Pezenas, je ne puis m’empefeher de vous dire quelque chofe de celle qui’ fe fit icy dernièrement au College du Pleffis, où Mc l’Abbé le Boiftel foûtint des Thefes de Philofophie dédiées à Monfieur le Marquis de Louvois, qui honora l’Aéte de la prefence. ün nombre infîny de Gens de la première qualité y affifta quelques Dames mefme s’y trouvèrent , & la capacité du Soutenant y parut
GALANT. parut avec éclat. Il eft Fils dé le Boiftel, fi connu par l’important Employ qu’il exerce fous ce Minière , mais plus encor pour eftre un des plus obli- geans & des plus honneftes Hommes de France. Je . fçay que la matière des Tlicfes eft peu galante, & que ce n’eft pas un Article qui doive eftre employé fouvent dans mes Lettres; mais quand les chofes ordinaires, & dont je n’ay pas accoutumé de vous parler, font accompagne'cs de Tome io. R,
i94 LE MERCURE circonftances extraordinaires, elles méritent bien que vous les Içachiez. Ce qu’il y eut de nouveau dans cet Adte loûtenu, c’eft qu’on donna en François à toutes les Dames le Compliment Latin qui eft au deflbus du Portrait de Moniteur de Louvois. Sans cela elles auroient efté privées du plaifir que leur caufa l’e- loge de ce grand Miniftre. Je vous ay parlé de luy dans toutes mes Lettres, & quoy que je ne Paye pas toujours nommé, il y a fi peu de Per-
GALANT.
fonnesqui luy rcflemblenr,
qu’il ne vous a pas dû eftre
difficile de le reconnoiftre.
Apres les glorieufes veritez
que je vous en ay dires, il
cftbon que vous les entendiez
d’une autre bouche,
& que je vous explique au
moins en peu de mots le
fujec du Compliment de
Mr l’Abbe' le Boiftel. Il
commence par l’élévation
de Moniteur le Tellier à la
Charge
France,
me une
de Chancelier de
qu’il regarde compreuve
éclatante
que le Roy a voulu donner
R ij
*
ï96 le mercure à toute l’Europe de l’amour qu’il a pour fes Peuples. Il vient de là au mérité de
M le Marquis de Louvois, que des travaux fans relâche ont entièrement dévoué
à la gloire de fon Maiftre. Il dit que jamais Prince n’ayant couru à l’immortalité à fi grands pas, jamaisMiniftre n’avoit fi promptement applany les difficultcz qui auroient pu l’arrefter ; Qu’il venoit plutoft à bout luy feul de fournir aux befoins de quatre Armées, que pluficurs
GALANT. 197 enfemble ne fourniffoienc autrefois aux neceffitez d’une feule; Que quelques deïTeins qu’on euft formez, les chofes fe trouvoient toujours exécutées avant qu’on euft fçeu qu’elles J dévoient entreprendre; Que par les foins qu’il pre- noit à maintenir la Difci- pline militaire dans toute fon exactitude, le paffage des Gens de guerre nefem- bloit eftre par tout que ce- luy d’une Colonie d’Amis; & que le fomptueux Bafti- mént des Invalides, ren-
R iij
298 le mercure
droit un eternel témoignagede
fa bonté pourlcsSoldacs
aufquels il avoit procuré
un azile glorieux pour
le refte de leurs jours,
quand l’âge ou les blcfTures
les rendoient incapables de
continuer leurs fervices.
Ces penfées font beaucoup
mieux tournées dans
une Langue à laquelle la
force de l'expre/lion eft
particulière. Vousyfuplée.
rez, s’il vous plaid:,Madame,
& pour marque de la
reconnoiflance que j’en auray,
je vous envoyé une feGALANT.
îçç c0nde Lettre de M' Petit, écrite comme la première ^Monfieur le Duc de S-Ai- gnan. Vous aimez tout ce qui regarde la gloire dia ^oy, & f°n ftile T1’11 aP~ pelle badin, &e def-honore peut-eftre pas la matière qui luy fait peur. Liiez, je vous prie, & m en dites voftre penfêe.
De Rouen le 9. Décembre 1^77.
/10NSEIGNE7R,
Ce na> pas efté fans far-
& • • • •
R. inj
7

7
GALANT, toi une afle^ longue faite d'années -, Mais, Mon feigne ur, je fais fi accouftumé d recevoir de vous des grâces que je ne mérité point, que je dois peu m'étonner de cette derniere, qui m'engage plus que jamais à, vous honorer, &dpoujfer jufquoà elle peut aller la pfifion toute pleine de ref- peéi avec laquelle je fais,
MONSEIGNEUR,
Voftre tres-humble,» tres-obeïflant,
& tres-obligc Serviteur, Petit,
CHer Duc, apres ce Compliment,
Et. cet humble Renierciment
Z
?
aoi LE MERCURE
Vn feuferieux four ma Plume? Dont (vous le feavez^J la coutume JE fl d'écrire en fyle badin, Sans Je piquer de rien de fin S Trouvezfon quelle s y remette, £t quemaMufe, humble Soubrette De celle dont les chantsfi doux Vousfont faire mille Jaloux? Vous entretienne à l'ordinaire, Songeant que je fuisvofire Frere En Apollon, l'aimable Dieu, Qui de cent flaifirs me tient lieu» £t certes, faùrois peine a dire Si le feu badin qui minfpire? J^ie touche ou fins, ou moins au coeur, Que celuy du Dieu dont l'ardeur Fait defefferer U Idolâtre D une Coquette acariâtre, Qÿ_i rit des traits du Dieu fripon} .Mais il rien efi plus, ce dit-on. Ees Coquettes font fort dociles,
?
?
GALANT. 2.Q| CW en huit jours onprëd. des Vides (Secret de noflre Mars François, plus Roy luy feul que trente Rcys) En huit jours, fins autre remifey lapin* fine Coquette eftprife.
Qtioy ait ilenfoit, j'aime à rimer, Et ma Mufe fait s’animer, Quand à vous s’adrejfe fa rimes Mais nef ce point cbmetre un crime Que de vous dérober du temps Aumilicudes Plaifirs charmans Dont la plus belle Cour du monde Pour l'un & l’autre Sexe abonde?
Dans cette Cour où le Soleil Brille en fon fuperbe appareil, Où des Beautegfaites à plaire, Où des Héros hors du vulgaire Forment un éclat qui furprend, Je fay qu’il faut que tout foit grdd. Et d'une fplendeurfans pareille.. Ainfi donc ce ri. efi pas merveille
»
204 LE mercure Si par tout où paroifi Louis On voit des bnllans inouïs.
Vous tenezfien la voftreplace, Et3 fans que rien vous embarraff y'oflre plus ordinaire emplèy Eft d'admirer noflre <prand Roy, Dont le Bras, fécondant la Tefle, Ajoute Conquefie à Conquefie. Tout le monde en efi étonné 5 Dés que fon Canon a tonné, Les Villes en craignent la foudre, Et de peurquon les mette enpoudre, Surprimes de fis grands Exploits, Viennent fe ranger fus fes Loi x.
Si l'on voyoit des Faits fimblables Dans l'Flifoire ; ce font de s fables^ Et desfilions, dirait-on : Mais, certes, le pauvre Lion^ Et lr Aigle, battus de l'orage, Connoiffent trop, a leur dommage Que ces Exploits par toatvantc^
GALANT, zoy
font au filence eflre forcées.
Ayant dit que ce nouveau Mars
Pajfe de bien loin les Céfars,,
Les Alexandres.* les A chiites.*
Ët les plus grads Preneurs deVilles*
Elles penfent avoir tout dits
Ceft jufqu où va leur bel efprit.
Puis trouvât loin de leur comptey
Elles confeffent* avec honte,
Quelles rien ont pas dit affez^
Et que trop de Faits entaffez^
De leur éclat les ébloüiffcnt^
Et font que leurs Rimes tarifent.
Mais,digne Ducjermettez^ moy
De dire icy, que ce grand Roy
Ef a rien qui luyfoit comparable
Dans 1* Hïftoire* ny dans la Fa b le.
Qyylqucs-uns veulent qu ilfoit né
Sous un A dre bienfortuné *
7>
ioë LE MERCURE
s « •
Et fous une Etoille invincible > Mais c eft à ce Héros terrible Oft'cr de fa Gloire un fleuron. Son^lftre eft, fon coeur de Lions Et fon Etoille,fa prudence, Son grand fens, & fa vigilance. C*eft luy qui monte les E efort s Qui font mouvoir tout ce^rddCorps De Cvbatans,fous qui tout trebleS Et me fine dans le tempsquil'ftmble Que ce Eléros fe divertit, Sa Tefle incelfamment agit.
1 Z** '•
Ses Ordres jt jufte fe donnent, Que les Ennemis s'en étonnent, Et la me fine peur il leur fait Quand il eft dans le Cabinet, Où la Gloire avec luy rai forme,
< •> d p
Que quand il ctimandeen perfonne. Ewfinppourfinir ce Difcours, Ceft le Miracle de nos jours. Mais maMufe eft bien téméraire,
GALANT. xg7
2/e le trouver#ous porcher Frerel
Tou jours en Apollon* s'entend*
Çar il efi affe\ important*
F our le refpeclquejevous porte*
J)'adoucir l'endroit de la forte.
C'efi-trop qued'élevtrmes T^ers
Au plus grand Roy de ? Univers}
Mais fi je manque de prudence^
Faites de vous quelque indulgence*
Sachant que de ce Demy-Dieu
La haute Gloire vous tient lieu
D'unplaifirfi grand, quil furpaffe
Tous ceux delà première Claffè*
Et que lors que le jufie Encens
Qfiondoità fies rares talens,
Fume pour ce Prince adorable,
Rien ne vous cfi plus agréable.
Ah! que ri en a y-je du meilleur!
Et que je me plairois, Seigneur^
A faire le P anétyrique
De ce Grand Roy tout héroïque!
i
f
zoS LE MERCURE
De faire une Lettre badine >
Mais, apres tout, je m'imagine
Et que mefme vous m'en loüereï^
Quoy qu’il femble que
ce fille foie trop fimple
pour eRre propre aux grandes
matières, ilnelaiflè pas
droisen avoir autant à vous
conter dans le mien une
caufé depuis peu de grands
embarras à bien des Gens.
Un Homme confiderablc
GALANT. 109
eftant demeuré veuf de puis
Fille unique, n’avoit point
de plus forte paffion que
celle de la marier. La garde
fe, & il croyoir ne pouvoir
s’en défaire jamais aflez
tort. Ce n’eft pas quelle
n’euft beaucoup de vertu,
& qu’ayant efté toujours
élevée dans une fort grande
modeftie, elle ne fuft incapable
de manquer a rien
de ce quelle fe dévoie à
Tomeio. S
mo LE MERCURE elle-mefme; mais une Fille quiavingtans.,del’efprit& de la beauté, n’eft point faite pour eftre cachée, il y a des mefures de bien- feanceà garder, & un Pere que les Affaires du Public occupent continuellement, ne fçauroit mieux faire que de remettre en d’autres
mains ce qui court toujours quelque péril entre les fien- nés. Tant de vertu qu’il vous plaira, une jeune Personne a un coeur, ce coeur peut eftre ftnfible, & on a d’autant plus à craindre
J
GALANT, iii qu’il ne le devienne, que fEfprit fe joignant à la Beauté,attire toujours force Adorateurs. La Demoi- felle dont je vous- parle ef- toit faite d’une maniéré à n’en pas manquer fi les fera- pulcs du Pere n’y enflent mis ordre. On la voyoit, on l’admiroit dans lesLieux de dévotion ou il ne luy pouvoir eftre défendu de fe montrer, mais elle ne recevoir chez elle aucuneVifite, fi vous exceptez celles de cinq ou fixParentes ou Voi- fines quiluy tenoient conv S ij
pagnie avec afTez d’affiduite.
Ce qu’elle regrectoit
le plus des Divertiïlèmens
Publics dont elle ne
joüifloit que par le raport
dautruy, c’eftoit l’Opéra.
£lle avoit la voix fort belle,
fçavoit parfaitement la Musqué,
& n’aimoit rien rant
que d’entendre bien chanter.
Deux ou trois de fes
Amies avoient le mefme
talent & la mefme inclinatiori,
& la plus grande partie
du temps quelles le plaifoient
à palier enlèmble,
cRoit employé à de petits
GALANT. Concerts de leur façon. L’une d’elles avoir un Frere o-rand Muficien, & c’eftoic TT ■ r‘
lur fes Leçons quelle ap- prenoit aux autres.ce qu’il y avoir de plus agréable & dé plus touchant dans les Opéra. La Belle brûloir d’envie de le mettre de leurs Concerts, on luy di- foit.mille biens de luy, & il n’en entendoit pas moins dire d’elle à fa Soeur. Ainfi ils furent prévenus d’eftime l’un pour l’autre avant qu’il leur fuft permis de fe con- noiflre, & la difficulté qu’ils
ir4 LE MERCURE
y trouvèrent leur en augmenta
le defir. On parla
auPere,qui fe montra plus
traitable qu’on ne l’efperoit.
Le prétexte de la Musique
fut le feuldont on fe
fervic pour obtenir la permiftion
qu’on luy demandoit.
Il ne voulut point envier
à fa Fille l’unique piaffir
qu’il fçavoit eftre capa*
ble de la toucher ; & Ie
Cavalier ne luy paroiifanc
point d’une fortune à former
des prétentions d alliance
, il confcntit à la
GALANT. faite, de trouver'bon quelle l’amenaft. Ils fe virent donc, ils fe parlèrent, ils chantèrent, & fans s’cftre apperçeus qu’ils euffcnt commencé à s’aimer, ils fentirent en peu de temps qu’ils s’aimoient. Il n’y avoir rien que de tendre dans les Airs que le Cavalier venoit apprendre à la Belle ; il les chantoir tendrement, & à force de les luy faire chanter de mefme, il mit dans fon ame des difpoGtions favorables à bien recevoir la déclara-
zi6 LE MERCURE
don qu’il fe hazarda enfin
à luy faire. Ses regards avoient
parlé avant luy, & ils
avoient elle entendus fans
que les Amies de la Belle en
eulferit pénétré le fecrec.
Elles imputoient au feul
delfein d’animer les paroles
qu’il chantoit, ce qui eftoit
une explication paffionnée
des fentimens de
fon coeur. Il trouva enfin
l’occafion d’un tefte-à-tefte.
toute la force de fon amour
GALANT. 117 àlacharmanrePerfonnequi le caufoir, quelle ne put fe défendre de luy dire qu’il remarqueroit par la promptitude de ion obcïflance, l’elHme particulière qu’elle avoit pourluy, s’il pouvoir trouver moyen de luy faire ordonner par fon Pcre de le regarder comme un Homme qu’il luy vouloir donner pour Mary Que de joye pour le Cavalier! 11 a- voit des Alliances fort con- fiderables , & ménageoit une Personne d’autorité pour rengagera venir faire Tomeio. T
218 LE MERCURE la proportion pour luy, quand il apprend de la Belle que fon Pere la ma- rioit à unGentilhomme fort riche qu’il luy avoir déjà a- mené- que les Articles ef- toient arrêtiez, & qu’il s’en eftoit expliqué avec elle d’une maniéré fi impérieu- fe,qu’elle nevoyoit pas de jour à fe pouvoir difpenfer de luy obéir. Sa douleur eft auffi grande que fa furprife. il la conjure d’apporter a fon malheur tous les retar- demens qu’elle pourroir,
GALANT. 119 niettroittoutenufage pour î’empelcher. Les témoignages qu’ils fe donnent de leur déphifir font interrompus par l’arrivée de l’Amant choify. Comme il eftoit naturellement jaloux, il obferve le Cavalier, & trouve dans fon chagrin je ne fçayquoy defufpeét qui l’oblige à fe faire l’Efpion de fa Maiftreffe. 11 la fuit
par tout, & fe rend chez elle tous les jours de fi bonne heure, que le Cavalier aimé ne peut plus trouver moyen de l’entretenir. Il
T ij
110 LE MERCURE
cache le defefpoir où cet embarras le met, & laMu-
fique eftant le pretexte de fes vifites , il tâche d’é-
bloüir fon Rival, en continuant à luy faire chanter à elle & à fes Amies, tous les endroits qu’elles fçavenc desOpe'ra. Quelques jours apres ne pouvant venir à bout de trouver un moment
de tefte-à-tefte pour fçavoir fes fentimens, il ef- faye un ftratagême pareil à celuyde l’Amant du Malade Imaginaire. 11 feint que le fameux Lambert a fait un
galant.
ïll
Air à deux Parties que £eu de Perfonnes ont encor Veu, & parle fur tout d’un Helas qui a quelque chofe de fort touchant quand la Baffe & le Deffus font méfiez enfemble. L’Air & les Paroles eftoient de luy, & le tout fe rapportoit à l’eftat prefent de fa fortune. La Belle quicomme je vousay déjà dit avoir une parfaite connoiffance de la Mufi- que, demande à voir cet Air fi touchant, & s’offre en mefme temps à le chanter avec luy. Il eftoit fait fur ces Paroles.
zzz LE MERCURE
le vous Vay dit cent fois,.belle Iris,
je votes aimes
Comme voflre beauté, mon amour
eft extrême :
.Mais je crains un Rival charmé
de vos appas.
Tous pàlijje^ Iris ’, l'aimeriezvous
? hélas !
L’Amant Muficien avoit
trouvé des cheutes G heureufesdans
la répétition de
cet Helas , que la Belle qui
avoit commencé à chanter
fans s’appercevoir du miftere,
comprit bientoft à la
maniéré tendre & languiffante
dont il attachoit fes
GALANT. ih regards fur elle,qu’il la conjurait de luy apprendre ce quelle luypermettoitd’ef- pcrer. La douleur de fe voir contrainte de facrifier fon amour à fon devoir, lafaifit tout-à-coup fi fortement, quelle perd la voix, tombe évanoüye, & luy fait con- noiftre par cet accident que fon malheur ne luy eft pas moins fenfible qu’à luy. C’eft alors qu’il ne peut plus garder de mefures. L’envie de fecourir fa belle Maiftrefle, le fait agir en Amant paffionné. 11 court, T ni]
Z14 LE mercure
il va, revient, fe met à genouxdevant
elle, laprie de
1 entendre, & femble mourir
de 1 apprehenfion qu il
a de fa mort. Son Rival qui
ne peut plus douter de fon
amour, en eft jaloux dans
1 excès, & le devient enquand
la
Belle commençant à ouvrir
lleeSs yVeetulYx , nprrnonnonnnc/’ep ffnoHn
nom , & demande triftement
s’il eft partv. 11 fe
plaint au Pere, en obtient
le banniftemcnt'du Mufi-
Maiftreftè,& croit le triowA
A.
pheaïfuré pour luy-, mais le
Pere employé inutilement
fon autorité. La Fille fe révolte,
prend pour outrage
les défiances de l’Amant
qu’elle veut qu’il époufe,&
fous pretexte de luy tarifer
plus de temps à examiner fa
conduite, elle recule fon
Mariage d’un mois entier,
pendant lequel elle veut
celuy qui luy fait ombrage
, afin qu’il fe guerilfe
defesinjuftes foupçons, ou
qu’il rompe avec elle, s’il ta
croit incapable de le renxi6
LE MERCURE dre heureux. Ainfi les vi. fîtes continuent; & com- me les deux Amans ne cherchent qu’à dégoûter l’Ennemyde leurbonhenr, ils ne ménagent plus faja- loufie, & fe vangent de 1 inquiétude qu’il leur don ne parles méchantes heures qu’ils luy font pafler. Le hazard contribué à leur en fournir les occafions. Le Mu ficicn qui vcnoit toujours chanter avec h Belle, luy avoit recité des Vers a (fez agréables. Elle en demande une copie-
G A L A N T. 117
L’Amour eftinduftrieux, il
fe fait apporter dequoy
écrire, change les Vers en
bonne Profe bien fignificaix8
LE MERCURE
re luy a fait découvrir dans
cet ouvrage. L’Amant jaloux,
qui eftoit véritablement
amoureux & gardien
perpétuel de fa Maiftrefle,
ne s’accommode point de
cette écrnure. 11 demande
à lire les Vers, on le refufe.
Il y onne du miftere,
& ce qui le convainc qu’il y
en a, c’eft que fon Rival
s’eftant fervy le lendemain
du mefme artifice , &
pie d’un Sonnet, il luy voit
écrire plus de vingt lignes,
GALANT. ii9 toutes continuées, au lieu que les Vers font ou plus courts ou plus longs félon le nombre des lettres qui entrent dans les mots qui les compofcnt. Il achevé de perdre patience en voyant prendre la plume à fa Maiftreife. Elle écrit un affez long Billet,le cacheté, le donne à fon Rival, comme devant eftre rendu à quelqu’une de fes Amies,& le prie de luy en apporter la réponfe le lende main- Jugez de lajoyedel'un, & du defelpoir de l’autre. L’Aîjo
LE MERCURE
mant aimé qui ne doute pas »
que la Belle n’ait répondu
par ce Billet à fon Sonnet ti
metamorphofé,brûled’itn- A
patience de le lire. Il fort. Ci
Son Rival fort dans le racfme
temps, le fuir, & l’ayant c|
joint dans une Rue où il paf- |a
foit fort peu de monde, il [j
luy demande fièrement a t;
voir le Billet. Ces gages (j
ne ■ s’abandonnent jamais It
qu’avec h vie. Ils mettent C|
1 Epée à la main. La fureur
qui anime le Jaloux, ne luy j
permet point de fe mcna'
GALANT. aji 2er. Il tombe d une large bleifure qu’il reçoit. Onia tient mortelle, & cet accident oblige fon Rival à fe cacher. Voila, Madame, 1 état où font à prefent les chofes. Le Pere fulmin , la Fille protefte quelle ne forcera point fon inclination pour épouferun Jaloux qui ne peur que la rendre malheureufe-, & ce que je trouve de fâcheux dans cette Avanture, c’eft que je ne voy perfonne qui ait lieu d’en eftre content.
Nous enfçauronslesfui-
Xjï, LE MERCURE tes avecle temps, c’eftun Avenir un peu plus obfcur que mon Enigme du Mois paffé. Vos Amies qui croyéc que ce foit les Orgues, n en ont pas découvert le vray fens, quoy que l’Explica- tion que vous m’en donnez pour elles foit toute pleine d’efprit. On m’en a envoyé une autre de Roiien qui convient à tousles Articles fur ce mefmemot. Un bel Efprit de Paris les a expliquez fur une Riviere glacée-, un autre de Noyon, fur la Neige; & il ne Ce
GALANT. ' xjj
qu’une Lettre que j’ay reçeuedeLyon
des fpirituelles
Ecolieres d’Apollonius,
qui m’avoient déjà fait la
arace de m'écrire fur l’Enigme
de la lettre r, &qui
veulent que le vafte Corps
decelle-cy cache le Nuage
qui ayant plus de Bras que
le fabuleux Briarée, s’en
fert à couvrir plufieurs Provinces.
Tous ces divers
fens y font appliquez fi
jufte, qu’il fembleque chacun
ait deviné. Je tenois
le véritable allez difficile a
Tome io. V
134 LE MERCURE
trouverpour croire que
iapprendrez de Monfieur
le Duc de S.Aigflan, qui
incontinent apres que ma
demiere Lettre eut paru.
Ce qu’il m’a fait l’honneur
de m en écrire, vous dévelopera
les oblcuritez qui
ont embaraflcvos Amies.
GALANT, 2.35
î
lettre de monsieur
LE DUC DES.AIGNAN
l’Autheur du Mercure,
236 LE MERCURE fier que vous ne penfe^ car je crois avoir découvert quelle eft de vous, & par confisquent qu'elle ne pouvoit eftre que fort fiubtile. Enfin, Monfîeur, c e Et d mon fens non fiulement t Armée ,mais celle t/^Confederez,puisque je trouve tant de chofies qui conviennent d cela, qu’il ne fie peut pas davantage.
Ce Corps eft compofié de plufîeurs Princes inégaux en pouvoir. Avant que les Troupes de chacun d'euxfiaf- fient jointes , elles avoient eElé levées fieparément. Il
?
/
GALANT.
n'eSl animé que de ces mef mes Troupes qui ne laifoient pas d’eftre avant que leur jonftion firmaft un Corps.
Il rid point de Tefte, ce Fl a, dire point de chef entièrement abfolu. Les Bras font aife^ à trouver dans le grand nombre de Soldats qui font dans ces Troupes, & qui ef tant d'une naijfance fort éloignée de celle des Com- mandans, font ïillufire & bafe Famille dont il eftparlé.
Quelque grand que foit ce Corps, au lieu de fe rendre formidable par le nombre^

fiment expirer un jour, j Alliance
des Princes qui le comn
estant que pour un
; mais s’ils la renoud
expirer tout-dfait, ils le
lont revivre.
nent tant d ’ Alliée^ pour
maintenir cette Vnion, ils
fe brouillent quelquefois, €5*
blâment la conduite les uns • *
des autres , comme ont fait
depuis peu deux des plus
confiderables d'entreux.
Enfin le grand éclat qui
14O LE MERCURE blejfe ce Corps, vient du Roy, Ô? ce vaillant Monarque eft le Soleil dont les brillans rayons fe dardant contre luy, le font tant fouffrir.
Confejfe^, Monfieur, que j ay devine, ou tout au moins que voftre Cnigme a tant de raport avec ce fins, que difficilement en pourrait on trouver un autre qui y convinft mieux. Mais-fi ce ri eft pas une chofe facile, g en eft une impojfible de trouver personne qui foit plus que moy ’voftre, &c.
Vous
GALANT. 241
Vous n'avczprefque re- çeu aucune Lettre de moy cette anne'e,quine vous aie parlé de Moniteur de S. Ai- çnan-, je vous ay entretenue cle fa valeur, defaconduire, & de tout ce que cet illuftre Duc a fait dans fon Gouvernement. Je vousay fait part de fa Profe & de les Vers. Le feu de fon efpric vous a paru dans fes In- promptu, mais je ne vous avois point encor fait voir combien il eft pénétrant. Vous le pouvez connoiftre par l’Explication de cette
Tome 10. X
LE mercure Enigme. Depuis que je l’ay reçeue, le mefme fens a efté trouve' par un tres-il- ; luftre &fpirituelAbbé, par M du R y de Chamdoréqui avo t deviné le Triétrac, par un Inconnu deRoiien, par un autre de Blois, & par un Homme de qualité, d efprit & de mérité, qui a | fait plufieurs Campagnes. Ce dernier m’en a envoyé ^Explication enVers, nuis corne elle eftprefque la me- me, article par article, que celle que vous venez de lire enProfe, jelafuprimepour éviter la répétition
GALANT.
Il me refte beaucoup
d’Enigmes qui auront leur
tour. J’en ay dont on ne
m’a point dit le mot, & ne
ne le devinant pas, je ne
puis les mettre fans fçavoir
fi elles font jufles. On
m’en a envoyé de tres-fpirituelles
fur la lettre L -F,
mais comme vous trouvez
que routes les lettres de
l’Alphabet ne peuvent faire
qu’une feule Enigme,parce
quelles roulent toutes fur
le rnefme tour, & que d’ailleurs
on les devine dés le
fécond Vers, je m’arrefteÏ44
LE mercure ray aujourd’huy à celle-cy} dont vous ferez part à vos Amies.
ENIGME
JE fuis aime des uns , les autres me haïjjent'
le fais & du bien & du mais
Et s'il en eft à qui mon afpett f" fatal*
l'en fçay qui de me voir toujours fe réjoüiffent,
«JJ*
les Avares & les Ingrats Avecque moy ne trouvent point leur compte s
Ma prefence leur efl une fccrete honte*
*
GALANT. 145
Quand de ce que j’attens Us ne f acquit ent pat.
jlvec plaifir les Amans me reçoivent ,
Il en eft peu dont je ne fis content, Etquipour m'honorer ne cherchent à l infant, t
Lors que j’arrive, a faire ce qu ils doivent.
Simon régné efi d'éclat fil efipropt a finir > .
Mon Cadet le termine^ & mourant four renaître y
Jtpres que \'ayfieu difparoifi? e}
Je fuis longtemps fans revenir.
Je fuis vieux cependant mes heures font bornées^
J * v? • • *
X 11)
»
x46 le mercure
£1 qui prendra le foin d'en mefum le cours
Trouvera que y auray vefcu fort feu de jours, . \
Quey que \e fois charge d'un çrand nombre d'années.
/

Comme les Enigmes m ont attire la Lettre des deux Confines de Poitou dont je vous parlay la dernière fois, je n’en puis finir 1 Article fans m’acquiter de la parole que je vous don- nay de vous faire le Portrait de ces aimables Perfonnes. Elles font d’une Province oujefçayque vous ayez de
particulières habitudes V oy ez
heeque j’ay àvousen direfuhra
pour vous les rendre connoilla-
1 . il\ ~ J loin UVW» • - 1 blés Elles ne demeurent pas loin
des bords du Clin & de la Vlenne
Scfe voyent quelquefois fur
ceux d’une pins petite Riviere
qui devroit eftre fameuie par
leurs Avantures. Un Cavalier
fort galant Sc encor plus brave,
yafouventpart. Ses belles qualitez
le rendent digne de leur
eftime. Il écrit avec politefle
en Vers Sc en Profe, & il y a
quelques années qu’on promettoit
en Poitou un Roman de fa
façon. L’aifnée des deux Coufines
eft d'une affez belle taille,
qu’un peu d’embonpoint ne
fçauroit gafter. Sa Maifon eft
llluftre. & fa Perfonne pleine
— * ■ A •
M LE MERCURE d agrémens, Sa jeune Parente eft une Demoifelle d’un beau naturel & d’une très-grande ef- perance. Elles’eft liée d’amitié avec elle dés fes plus tendres années. Si routes ces marques ne vous les font point connoiftre, vous les chercherez parmy quatre Nymphes qui fe font baignées dans la petite Riviere dont je vous a y parlé,aufquelies' le Cavalier, qui eft rarement oublié dans leurs agréa blés parties, donna en fuite une magnifique Collation qui parut fe trouver là par hazard dans un Moulin voifin , comme fi elle n’euft eftéque les Reftes d’une Nopce qu’on feignit s’y eftre faite quelques jours auparavant. Je croy que vous ne m’en
GALANT. 249 demanderez pas davantage pour feavoir bientoft avec certitude qui elles font.
Il y a plus de plaifir de s’informer des Vivans, que d’entendre de quel mérité ont efté ceux que la mort nous fait regretter. Cependant il n’y a pas moyen de me taire fur celuy de Mr le Marquis de Rouville Gouverneur d’Ardres, Lieutenant General des Armées du Roy, qui eft mort dans fon Gouvernement. Le rang de Lieutenant General fuffit pour faire connoiftre dans quelle confideration fon courage fa valeur l’avoientmis, puis qu’on n’y peut parvenir fans avoir pafle par tous les degrez qui peuvent acquérir de la gloire
z;o LE MERCURE
dans les armes. Mr le Marquis de Rouville fon Fils, qui a c- poufé Mademoifelle de Berhu* ne, n’ignore rien de tout ce qu’un Homme defa qualité doit fçavoir. Il pofléde les belles Lettres, il a de l’efpnt, & n’eft paslefeul de cette Famille qui en air. Mr le Comte de Rouville vous eft connu, & vous fça- vez combien il eft eftimé de tout ce qu’il y a d’honneftes Gens dans le Royaume. Cette Mai- fon eft une des plus anciennes de Normandie. Elle a porté le Nom de Gougeüil avant celuy de Rouville. jean I.eftoit Chevalier Sire de Rouville dés l’an 1319. & prit Femme dans la Maifbndes Eflards. Pierre de Rouville fut Chambellan des
GALANT.
Rois Charles V. Sc Charles VI. Jleftoit Gouverneur du Pont de l’Arche qu’il défendit contre les Rnglois, & fut tuéà là Bataille d’Afmcour. Pierrell. de Row- ville, époufa la Fille de Robert Admirai deFrance. Charles 1X. eut pour Chambellan un Gufl- laumede Rouville; ScunLoüis du mefme Nom fut Grand Vé- neur de France, & Lieutenant General au Gouvernement de Normandie. Voyez, Madame, combien de grands Hommes, fans vous parler de ceux de cette Maifon qui ont efté Evefques Sc .Ambafladeurs.
Cette Dignité d’Evefque, quoy que tres-relevce, n’a point de privilège contre la mort qui nous a enlevé depuis peu celuy
aji LE MERCURE
d’Alet. Il eftoit d’une tres-bon- ne Famille de la Robe, connue par beaucoup de mérité & d‘ef- prir, & il fuffit de dire qu’il s’ap- pelloit Mr Pavillon. Ilfutcfaoi- fy pour l’Epifcopat du temps du Cardinal de Richelieu. Le peu qufil préfumoir de luÿmxfme, l’obligea à le refufer, comme s’en connoiflant indigne* & ce grand Minirtre vainquit fes longs refus, en luy difant que plus il parloir contre luy, plus il parloir pour l’Eglife. H accepta la conduite de ce Dio- cefe,fe rendit a Aler, êcn’eneft jamais revenu.
Les morts fubites qui font fi frequentes icy depuis quelque temps, ©nt courte un Fils à M Lefeau Confeiller d’£tar5 8c
GALANT. xp Doyen du Confeil. C’eftoit un tres.honnefte Hojrime, Chanoine de N. Dame de Paris. Vousfçavez combien ce Corps eft conlidérable,&qu’il eft rem- ply de Personnes de mérité êc de qualité , dont il y en a plu- fieurs qui font Officiers des Cours Souveraines, On y aveu de Ventadour S< M‘ d’Au- bigny,qui tenoit rang dePrince, eftant de la Maifon de Stuart.
M' de Miramion eft mort prefque dans le mefme temps. On l’appelloit Sevin de Miramion. 11 eftoit de ces Sevins qui font d’une des plus anciennes & des meilleures Maifons de la Robe. La Charge de Con- feiller du Grand Confeil qu’il a exercée vingt-un an, luy avoit
254 LE MERCURE acquis la réputation d’un tres- bon & tres-jufte juge, & il n’ef- toic pas moins aimé de fa Compagnie, qu’eftimé de tous ceux donc il avoir eu les affaires entre les mains.
Ces diverfes pertes ont efté fenfibles à beaucoup de Familles particulières • mais ce qui a caufé une defolation generale, ça efté celle de Monfieur le Premier Prefident de Paris. Il avoit efté reçeu Confeiller au Parlement dés l’âge de dix-fept ans j Ôc lors qu’il fut Maiftre des RequefteSjSaMajefté l’envoya pour Com mi flaire aux Etats de Bretagne,où lesEfpritseftoient extrêmementdivifez. Il trouva des tempéramens fi jufteSjqu’cn exécutant les Ordres du Rov,
GALANT. 15; il contenta également le Gouverneur de la Province, les Etats, le Parlement, & le Peu. pie. H fut fait Premier Prefi- dent en 1658. & il a foûtenu la dignité de cette Charge avec un fuccés fi extraordinaire, qu’il a laifié à la Pofterité un exemple rare 8c prefque inimitable de toutes les parties ne- ce flaires aux grands Magiftrats. 11 avoit une mémoire très-fidel- le, un jugement tres-folide, 8c un difcernement très jufte. Il pofledoit les belles Lettres avec une délicatefle inconcevable. La force de fon raifonnemenc répondoit à la netteté qu’il a- voit à s’exprimer - & fon éloquence eftoit telle, qu’on peut dire qu’il ne le falloir pas en-
2.J6 LE MERCUKE tendre quand on ne vouloir point fe laiffer perfuader. Sa ouverte aux plus beaux Efprits, & il fe tenoir une efpece d’Acadcmie chez luy où diférentes Queftions eftoient agitées. Vous en pouvez connoiftre la matière par le Livre que le P. Rapin Jcfuifte en a fait. M1 le Premier Prefî- dent y difoitfesfentimeos, &ne donnoic jamais que de fort juf- tes décifions. Outre qu’il efioit extrêmement éclairé fur tour ce qui regarde la connoiffance des Loix , il avoir une facilité merveilleufe à concevoir d’abord une Affaire; mais quelques grands que furent ces a- vantages de fon Efprir, fa douceur que rien n’a jamais altère,
GALANT. 157 fa probité généralement reconnue, fa grande modération, fa Wodeftie, ou s’il m’eft permis de le faire defeendre jufque-là, fon humilité fi rare avec un fi vray mérité, 8c fon intégrité inébranlable, eftoient encor plus dignes d’admiration. Jamais pe^fonne ne s’eft retiré mécontent de luy, 8c jamais Plaideur dans fapaffion n’a ofé l’accufer d’injuftice. Il eftoit plein de i zele pour le fervice de fonPrince êc pour le bien de l’Etat j 8c la vie Chreftienne 8c toute exemplaire qu’il menoit, mettoit fes actions à couvert du moindre reproche, 8c luy attiroit le rei- pect de tous ceux qui avoient l’avantage de l’approcher. Il eft mort âs;éde foixante ans 8c * • h -
Tome io. Y
z;8 LE MERCURE deux moisquelques jours moins, Sc a laifTé deux Fils, dont l’un eft Avocat General au Parlement, èc l’autre Maiftre des Re- queftes. Ils s’acquitent fi dignement l’un & l’autre de ces grands Emplois, que le Public a lieu de ne point douter qu’ils ne cherchent à imiter parfaitement un Pere qui eftoit auffi jufte que capable, & auffi vertueux que fçavant. M* de Lamoignon Pere de l’illuftre Mort dont je vous parle , eftoit un Homme d’une probité reconnue, qui fçavoit beaucoup, & que tout le monde eftimoit pour fa pieté. Il avoit étudié à Bourges fous le célébré Cujas. Il fe fit recevoir Confeiller au Parlement, & eftanc devenu Doyen
GALANT. 159 de laTroifiéme des Enqueftes, il traita de la Charge de Prefi- denrde cette Chambre avec un aplaudiflement general. Quel- ques années apres il entra en la Grand’Chambre en qualité de Confeiller, & enfin le Roy ré- compenfa fes grands fervices en l’honorant de la Charge de Pre. fident à Mortier, où il eft mort Doyen. Il tiroit fon origine du Pais Nivernois j d’une des plus nobles & plus anciennes Familles de cette Province, qui por- toit les Titres de Chevaliers, Damoifeaux & Ecuyers, depuis quatre cens ans. Le premier dont on les a, prenoit celuy de Chevalier dés le temps de Saint Louis, & on fçait qu'il ne fe donnoit alors qu’à ceux qui ef-
2.60 LE MERCURE
*
toient d’une tres-illuftre Naif. fance. On trouve un Helin de Lamoignon, Seigneur de Rivière, parmy les Tenans d’un Tournoy qui fut fait à Paris en 1549. fous Henry II. Il y a eu plufieurs grands Perfonnages dans cette Maifon. Charles de Lamoignon, Chevalier, Seigneur de Baville, Launay, Courfon , Sec. rendit des fer- vices fi confidérables en fon temps, que le Roy Charles IX. luy fit' l’honneur de le vifiter fouvent dans fa maladie,' & témoigna avoir perdu en fa Perfonne un Serviteur aufiï capable des premières Charges de l’Etat qu’il y en euft dans le Royaume. Il y feroit parvenu, fi la mort ne l’euft emporté à
GALANT. x6i
Befançon, qui eft une des plus
anciennes & des mieux alliées
de France. La Mere de feu
J4' le Premier Prefident eftoit
de l’illuftre Famille des Landes.
La noblefle en eft connue. Il
avoir époufé Magdelaine Potier,
Fille de Meffire Nicolas
Potier, Seigneur d’Ocquerre,
Secrétaire d’Etat, &. Nièce de
Meffire André Potier Seigneur
de Novion, Prefident au Parlement
de Paris, & de Meffire
Comte de îjeauvais, Pair de
France.
Qaoy que la mort foit une
Imaire funefte. il faut vous la
laifler encor un moment pour
LE MERCURE
vous apprendre que ces mefmes
morts fubites qui nous ont ofté
Mr Lefeau, nous ont fait perdre
auffi deux grandsHommesdans
cemefmcMois. L’un eft Mr de
Sainte Beuve, & l’autre M'
<fteur &c Profefleur de Sorbonne
, Homme d'une très-profonde
érudition, aimé non feulement
de tous ceux qui le connoiflbient,
mais encor de tous
ceux qui avoient entendu parler
de fon mérité. Le Clergé
de France avoit une eftime
toute particulière pour luy, &
luy donnoit penfion. Il regloit
un nombre infiny de confidences,
& il euft efté malaifé de
trouver un plus habile Cafuifte.
Qjpy qu’il n’ait jamais voulu
GALANT. 2.65
portrait pendant fa vie, nous
ne biffons pas de l’avoir par le
talent merveilleux deM'Berthinet,
qui a efté Payeur des
Rentes de l’Hoftel de Ville de
Paris. Il a l’imagination fi vive,
Rrvédefes traits, il en a fait la
Médaillé en cire apres fa mort,
avec l’admiration Se l’étonnement
de tous ceux qui l’ont
connu. On dit qu’il en a fait
une de bronze du Roy, par
cette mefme force d’imagination,
dont Sa Majefté a efté
très - fatisfaite. Beaucoup de
Perfonnes delà première Qualité
qui ont veu cette Médaillé,
en parlent comme d’une merveille.
z64 le mercure
M'Neuré, que je vous ay
nommé avec Mr de Sainte
Beuve, eftoit ce grand & fameux
Philolbphe qui avoitefté
â feu Mr d’Angoulefme, à Mr
de Longueville, & à Mr le
Marquis de Vardes. II fçavoic
beaucoup, & rneritoit la réputation
qu’il s’eftoit acquife.
Cw omme / vous m’avez ordonné
de vous parler de tous ceux qui
ont quelque talent extraordinaire,
je me crois obligé de
vous dire que nous avons auffi
perdu MrMichel, qui touchoit
les Orgues à S. Leu. C’eftoit
un charme que de Pentendre,.
& on y venoit en foule de toutes
parts.
Le Monde fe renouvelle infenfiblement,
&c’eft un chanGALANT,
idy gemeiu imperceptible qui arrive tous les jours par de nouveaux établiffemens de Famil- : les que le Mariage fait fucce- der d’un collé à celles qui ont I finy de l’autre par la mort. M le Marquis de S. Germain- Beaupré, de la Maifon de Fou- cauc, reçeu en furvivance du Gouvernement de la Marche, en a fait un depuis peu fort i confidérable, en époufant Mademoiselle dejanvry. Elle eft d’une tres-bonne Famille de la Robe, & n’avoit pas befoin d’eftre aufli riche qu’elle eft pour mériter le choix d’un fort honnefte Homme, ayant beaucoup de bonnes qualitez qui la rendent recommandable. II ne faut que la voir pour connoiftre Tome io. Z
i66 LE MERCURE
qu’elle ne manque de
beauté, ? -
Mademoiselle Roullié, Fille
de Mr Roullié Maiftre des Requeftes,
Homme d’un grand
mérité, & fort eftimé dans le
Confeil, s’eft mariée dans le
mefme temps, & a porté plus
de cent mille écus à NT le Marquis
de Bonnelle qu’elle a époufé.
Il eft Fils du Marquis
de ce mefme nom, qui avoit
époufé MademoifelledeToufly
Soeur de Madame laMarefchale
de la Mothe-Houdancour, SC
Petit-Fils de feu MrdeBullion
qu’on a veu prefident à Mortiet
& Sur-Intendant des Finances.
Tandis que nous fommcs fur
les Articles de joye, il faut vous
/
GALANT. 267
Deftanchau, par l’honneur
que luy a fait le Roy de luy
donner la qualité de Secrétaire
de Monfeigneur le Dauphin.
Il avoir eti jufqu’icy l’avantage
d’en faire feul les fondions, ôc
il fliffic de fçavoir dans quelle
conlidérarion il eft auprès de
Monfieur leDuc deMoncaufier,
pour eftre perfuadé de ce qu’il
vaut. C’eft un Homme fort
prudence &. de politefle,
fage, &. qui joint à beaucoup de
& politelle, un
zele dont l’exaditude nefe peut
aflez eftimer. Vous auriez, eu
tout lieu de vous louer de la
mienne, à vous rendre compte
des Harangues qui ont efte
faites à Monfieur le Chancelier,
outre celles dont je vous ay déjà
parlé, fi je n’eufle appris qu’un
LE MERCURE
Homme de beaucoup d’efprit qui s’eft foigneufement trouvé à toutes, en fait un Recueil pour le Public. Il auroit déjà paru, s’il n’avoit pas deflein d’y joindre les Dilcours qui fe doivent encor faire à la gloire de ce grand Homme au Parlement ôc au Grand Confeil, le 10. du A£ois prochain. 11 n’y aura rien déplus curieux que ce Recueil, & celuy qui le fait ne pouvoir former une entreprife plus noble que de travailler à éterni- fer la mémoire de ce digne Chef delajuftice. Celle des merveil- leufes Avions du Roy ne s’effacera jamais, mais je nefçay fi l’éloignement des temps ne les rendra point incroyables. En effet, il fera difficile de conce-
*4 z
C ~~ z
i
GALANT. 169 voir qu’une Campagne ouverte avant le Printemps, n’ait point efté terminée par le retour de l’Hyver. Ces Prodiges donnent de l’occupation à tous ceux qui fçavent fe diftinguer par leur Efprit. Il n’y a pas jufqu’aux Dames qu’une fi belle matière n’engage à prendre la plume,. . & voicy ce qu’elle a faij.écnre à Madémoifelle de Racilly.
AU ROY.
GRtidRey ,quelle efi laDeftinée Quipréfideà tousvos Exploit? Les quatre Satfons de l’Année Retient leur cours par vofire choix, La Campagne n’/ft plus bornée A in fi qu elle efioit autrefois, Toute la Terre eft étonnée De la voir durerfoury Mois.
z7o LE MERCURE
Si j’avois parlé toujours auîïi
jofte que celle qui a fait ces
Vers, je neferois pas oblige de
me dédire aujourd’huy fur la
Situation de Fribourg. Je Kay
mis en Suifle dans ma derniere
Lettre, & il eft en Brifgau, fur
}a petite Riviere de Treifeim.
Cette faute m’eft d’autant plus
pardonnable, qu’il y a deux
Villes de ce mefme nom qui ne
font pas fort éloignées l’une de
l’autre, & que deux des plus
confidérables Chapitres de
Suifle s’y font retirez,à fçavoir
celuy de l’Eglife Cathédrale
de Lozanne à Fribourg en
Suifle, & celuy de Bafle à Friprifè
de celuy qui eft prefentement
à nous, on ne fe contenM
galant. 171 pas de s’appliquer à y faire de Nouvelles Fortifications , en attendant Mr de Choify Ingé- Bieur de grande réputation, qui fut auffitoft nommé pour les conduire,on fit démolir celles de plufieurs petites Villes, avec quelques Çbalteaux voifms, ôc
on
travailla à l’établiflement des Contributions , dont les
grandes fommes rendent cette Conquefte très- confidérable. M' le Marquis de Bouflairs Sc M1 le Chevalier d’Eftrades, qui doivent commander l’un dans la Place, Sil’autre la Cavalerie des environs, ne manqueront pas de foin à conferver tous les avantages qu’un- Pofte fi important nous donne. Sa prifé a produit de grands effets. La
Z iiij
17* LE MERCURE plupart des Places que les Ennemis ont de ce cpfté-là, font dans une alarme continuelle. L'une fe fortifie, les Habirans del’autre l'abandonnent 5 celle- cy traite des Contributions j &c Strafbourg que rien n'avoir encor étonné depuis le commencement de la Guerre, fait fortifier fes Forts, &c fonge mefme à en faire conftruire de nouveaux. C’eft un coup de tonnerre dont les Ennemis ne reviennent pas. Ils fe font fatiguez en retournant à grands pas au delà du Rhin, Se ont trouvé toutes leurs mefures rompues pour leurs Quartiers d’Hyver. Il leur en a falu chercher d'autres que ceux qui leur avoient efté affi- gnez | & cependant nos Trou-
G A T. A N T. 17?
les Fourrages de la .Vallée de
abandonné tous les Polies qu’ils
tenoient fur la Sarre. Ils s eftoient
propofez de prendre la
Petite-Pierre pour achever leur
Campagnej mais loin devenir
à bout de leurs deffeins, ils on£
perdu toutes leurs petites Conqueftes,
comme Sarbruk qui
elloit la plus importante. Le
Chafteau en a efté pris par
M’Ie Marquis de Ranes apres
neuf volées de Canon. Vous
nemis exercèrent contre leur
avez
Ceux que M' de Ranes trouva.
t74 LE MERCURE dedans ne doutoient point qu’ils ne dûflenr recevoir le mefme traitement qui avoit efté fait auxNoftresj mais ayant efté envoyez à Monfieur le Maref- chal de Créquy , cet illuftre General leur fit connoiftreque les François avoient plus d’humanité, qu’ils eftoient genereux de toutes maniérés, & amoureux de cette belle gloire qui fait aimer les Conquérans,mefme de leurs Ennemis. Pendant que nos Troupes fe lignaient par tout, la valeur de la Garni- fon de Maftric ne demeure pas oifive-, elle fait des courfes qui luy font glorieufcs & profitables, s’aflùre deplufieurs Chat teaux,& fans eftre deftinée aux travaux de la Campagne, en
GALANT. %7j fait une plus glorieufe que celle d’un monde d’Ennemis, s’il eft permis de parler ainfy. Voicy des Vers fur celles de tant d’Alliez. Ils ont efté faits par M1 de la Mortnove Auditeur des Comptes à Dijon. Les. Prix de l’Académie Françoife qu’il a tant de fois remportez, l’ont fait connoiftre à toute la
France.
du milieu des Efiex^ au milieu des Hyvers^
Louis de [es beauxfaits étonné PKniverSy
il déployé en tout temps fes Bannières fatales*
Mais confejfons la vérité, Ses Ennemie plus fins^faus bruit fans ferlé[
7
i76 LE MERCURE
Trouvent bien mieux que luy toutes Saifons i^ales*
Ils rientreprennent rien ny l'Hy- very ny l'Efté.
A peine eut-on apporté la nouvelle de Fribourg rendu, qu’elle fie méditer une autre Conquefte. M1 de S. Poüange partit én-poftede la Gourpour porter les ordres du Roy., faire préparer toutes chofes, &pref* fer l’execution de ce qu’on avoir réfolu. Son ardeur pour le fer- ' tice de Sa M^jefté eft connue, & lé zeie qu’il fit voir pour la , gloire defes armes à la Bataille de Gaffe!, fut fi grand, qu’il chargea luy-mefme les Ennemis l’Epée à la main, quoy que fon Employ l’enduft difpenfen
GALANT. i77 Son départ fit faire de grands raifonnemens, mais perfonne n'en devina le véritable fujet, & plufieürs mefme crûrent qu’il eftoit envoyé en Allemagne. Peu de jours apres nos Troupes deFlandre firent quelques mou- vemens. Elles inquiétèrent les Ennemis, qui furent bientofl: perfuadez qu’on alloit affieger Ypres, & c’eftoit ce que l’on vouloir qu’ils cruflent. Cependant S.Guilain fe trouva in- vefty ,. & le Gouverneur ne l’apprit qu’en le voyant. Le nombre des Troupes augmenta en peu de temps, & il y eut devant cette Place jufques à cent Efcadrons, 8C quarante Bataillons qui ne demandoient qu’à combatte, & qui avoient mef-
278 LE MERCURE me témoigné fouhaiter qu’on fift un Siégé, parce qu’ils corn- mençoient à s’ennuyer dans leurs G^rnifons. Comme ils avoient efté rirez des Places des environs, on nomma pour Officiers Generaux les Gouverneurs de ces mefmes Places, à caufe de la facilité que chacun d’eux pouvoir avoir à faire venir de fon Gouvernement toutes les chofes neceffaires pendant le Siégé • auffi n’y manqua-t-on de rien. Toutes les Troupes furent auflî bien nouries, & auffi- bien chaufées, qu’elles auroient pu l’eftre dans leurs^ Quartiers d’Hyver, èc on ne peut trop donner de loüanges aux Gouverneurs pour les foins qu’ils ont eu de leur faire fournir tout
GALANT. 179
Ce que la mauvaife faifon demandoit
qu’on leur donnait au
delà de ce qu’elles avoient accoutumé
d’avoir dans le temps
ordinaire de la Campagne.
Vous ne devez point vous étonner
apres cela, Madame, fi on
s’eft rendu maiftre de S.Guilain,
quoy quecefoit une Place
qu’on n’euft jamais crû devoir
eftre aflîegée dans l’Hyver à
caufe des eaux qui l’environnent.
C’eft ce qui ne paroiflbic
pas vray - femblable5 mais les
François prennent fans menacer,
au lieu que les Ennemis
menacent & ne viennent à bouc
de rien ; Sc il eft fi vray que nos
entreprifes rciiffifient toûjours,
&mefme en fort peu de temps,
que je ne vous écris jamais le
igo LE MERCURE
d’une Place, que dans la
melrne Lettre je ne vous en
marque la prife 5 mais il faut
que je vous avoue que je mancomme
il faudroit de la merveilleufe
conduite de la France.
Tous les termes font épuifez,
toutes les louanges font ufées,
& cependant les reflbrts qui
font tout mouvoir, ne le font
pas : Au contraire , nous les
voyons tous les jours agir avec
plus de force, & cette demiere
Conquefte en eft une preuve,
Pour vous en informer plus particulièrement,
il faut vous dire
que S. Guil/iin eft une petite
Villedu Hamault, à laquelle un
Abbé quivivoit vers lefeptiémc
Siècle, a donne fon nom. £He
GALANT. Î&K
n'eft qu’à une bonne lieuë de
Mons, fur la Riviere de Haine.
Meilleurs de Turenne & de la
Ferré, la prirent en 1655. en
mefme temps que Condé, apres
qu’on fe fut rendu.maiftre de
Landrecies. L’année fuivanter
le Siégé de Valenciennes eftanc
levé, & Condé repris par les
Efpagnols, elle fut affiegee pendant
que M1 de Turenne eftoit
devant la Capelle ; mais comme
cette derniere Place refifta peu,
Mr de Turenne eut le temps
d'aller traverfer les Ennemis à
S. Guilain. Ils levèrent le Siégé
me de nouveau au mois de Mars
de l’année 1657. ilsen vinrent à
bout par la trahifon de quelques
Etrangers qui leur livrèrent les;
La Riviere de Haine
LE MERCURE
Dehors qu’ils gardoienr. Quant à ce qui regarde la force de la Place, elle eft environnée de 'Marais.
quipafle au milieu, fe fcpare en trois-bras dans la Ville, & fe rejoint en deux pour en fortir. Elle eft défendue par trois Fof- fez pleins d’eau, par un Ouvrage appelle le Pâté, qui eft une efpece de Boulevarr, par un autre Ouvrage â corne, une Demy-Lune, & plofieurs Redoutes, font entourées d’eau, refte â vous apprendre les noms de tous les Officiers Generaux qui ont eu la conduite de ce Siégé fous Mr le Marefchal de Humieres. Les Lieurenans Generaux furent Mr de Nancré
dont quelques-.- unes
Il SB
GALANT. 2S5
Gouverneur d’Ath, Se M' le
Comte Bardi-Magaloti, Gouverneur
de Valenciennes. Oa
choifiC pour Marefchaux de
Camp M' de Permis Gouverneur
deCourtray, Mr du Ranché
Gouverneur du Quefboy^
M1 de SainfandouxGou verneur
deTournay, M'le Chevalier de
Tillader, M‘ le Baron de Qmncy,
M'de Cezan Gouverneur
deCambray.Sc M’deRubantel
Capitaine au Régiment des
Gardes. Mrs deVauban & du
■Mcz, qui ont la mefme qualité^
furent commandez pour la.conduite
desTravaux & de l’Artillérie,
& l’on peur juger par là
que le fuccés de cesdetix chofes.
eftoit infaillible. Les Brigadiers
qui ont fervy à ce Siégé,,
x84 LE MERCURE
font M'd’Aubarede Meftre de Camp du Régiment desVaif- feaux , Mf de S. George Meftre de Camp du Régiment du Roy, M' le Chevalier de Souvray Lieutenant Colonel de Navarre, & M* Chiméne. M1 de Mo. mont y a fait les fonctions de Major General. Un Siégé en. trepris apres de fi juftes mefu- res, & qui devoit eftre pouffé par tant de Braves, ne pouvoir manquer de réüflir. C’eft ce qui a fait dire à un bel Efprit deLile, en s’adreflant aux Ennemis,
Espagnols, Hollandais, coures^ Saint Guilain,
Malgré les Elemens d'Eïumieres le va prendre^
GALANT.
Et l'on ne croit pas que demain La Place puiflefe defendre. Dèpefchez^ & venezau moins Voir de plus près une Victoire Que vous aurie^peut-eftre peine croire,
Si vous rien eftiezfes Témoins.
Ils ont fuivy ce confeil, & fem- blent n’eftre venus fort près de S.Guilainque pour en apprendre plutoft la prife. Voicy par ordre ce qui s’cft pafle au Siégé de cette Place.
Monfieur le Marefchal de Humieres partit de Lile le 30. de Novembre, avec M’ie Marquis de Humieres fon Fils, êc Mrle Baron de Quincy. Il eftoit accompagne de fept Efca- drons de Cavalerie, fuivy
186 LE MERCURE de Mr de Sainfandoux, avec les Troupes qui venoient du cofté de la Lys, Il arriva le premier de Décembre devant S. Gui- làin, à la pointe du jour. M rs de Nancré, de Magaloti, le Chevalier deTilladCt, du Ranché, & de S.Riche, s’y trouvèrent em me fine temps, fuivanr les ordres qui leur avoient efté envoyez le jour precedent. Ils conduifoient la Cavalerie & les Dragons d’Arh, Condé, Valenciennes, Doua y, S. Amant, ©rchies , Mrchiennes , Bou- chain, & du Qjefnoy, le tout au nombre de cinquante Eîca- drons. Deux Pièces de. Canon arrivèrent le mefmejour,.& forent menées à un Moulin proche
la Redoute de Baudours.
r
GALA N T.
Deux cens Dragons des Regimens
Dauphin & Fimarcon,
avec cinquante Moufquetaires
de la Garnifon d’Ath, l’àttaquerent
à l’entrée de la nuit.
Elle eftoit gardée par cinquante
Hommes, qui l’abandonnèrent
apres avoir tiré cinquante on
foixante coups. Nos Gens les
pourfuiv.irent,Sc en prirent dixhuit
ou vingt.
La Circonvalation fut réglée
lé lendemain , & l’infanterie
qui devoir faire le Siégé arriva
au Camp. On ordonna trois
Attaques. La première fut celle
des Gardes. Elle devoir emporter
une grande Redoute environnée
de Foflez remplis d’eau,
avant que d’aprocher du Corps
de la Place. Il faioit en fuite
18S LE MERCURE arracher des Paliffades qui de- fendoient le Pâté. 11 ne pouvoir eftre pris qu’en paflant par deflus une Digue fort étroite,, & fur laquelle on ne pouvoir aller qu’un à un.
La fécondé Attaque, appel- lée celle deNavarre, avoir deux grandes Redoutes à prendre, avec de grands Foflez pleins d’eau.
L’Attaque de Boflu eftoit la troifiéme , èc il faloit qu’elle gagnait un Ouvrage à corne, Sc une Demy - Lune , avant que d’arriver au Corps de la Place.
Le 4. on ouvrit la Tranchée â ces trois Attaques. On avança beaucoup le travail, principalement à celles de MtsduRanché &
Demy - Lune , avant
> GALANT. 18,
& de S. George. MHeMarefchai
deHumieres demeura jufques
à une heure apres minuità
les vifiter continuellement de-
Les deux premiers Bataillons
des Gardes, de Navarre, 8c un
du Royal, montèrent la Garde,
& furent relevez le lendemain
par autant de Bataillons des
mefmes Corps. Les Ennemis ne
tirèrent que trois coups de
Moufquct, ôc un de Canon.
Lenoftreleur répondit le 6. au
matin avec une Baterie de fîx
Pièces.
Le 7. apres midy, on prit à
l’Attaque de Navarre, une
grande Redoute qui n’eftoit
qu’à quarante pas du Pâté. Elle
eftoit gardée par trois cens
Tome 10. B b
19O le mercure
Hommes; qui fe défendirent avec beaucoup de vigueur, mais ce ne fut que pour augmenter la gloire de Mon fleurie Comte de Solfions, qui/cxpofa tour- à-fait à cette A traque, où il alla l’Epée à la main. Son Lieutenant Colonel eut le bras cafle, celuy du Régiment du Pleffis y fut tué, & MM’ Aubarede dan- ’ gereufement bleflc d’un coup de Moufquet â la tefte.
Le 8. au foir, Mr de Sainfandoux monta la Tranchée à FA t- taque des Gardes, avec le Régiment de Rouffillon-, Mrs de Cezan & de Villechauve, à ceile de Navarre, avec Je Régiment de Humieres -, & M1 du Ranché, avec Mr de Chiméne* à celle deBoflus avec le Régi-
GALANT. 191 ment de Conty. On s’établit pendant la nuit à celle de Navarre» dans les Logemens qu’on avoir faits. A celle de BolFu, oripaffa l’Avant-foiTé del’Ou- v'rage à corne, & l’on y fit un Logement fur le glacis. On drelfa la mefme nuit uneBaterie de fixPieces,qui tira dés le point du jour 5 St l’on augmenta celle de Navarre jufques au nombre de neuf ; de maniéré que ces deux Bateries qui voÿoient le Pâté à revers, incommodèrent fort chacune de fon cofté.
Le 9. apres midy , fur l’avis que M1 le Marefchal de Humieres eut que les Ennemis s’a- vançoient, & qu’ils n’eftoient qu’à troispetites lieuës deMons, il alla choifirun Camp pour al.
Bb ij
1er au devant d’eux,& leur donner
Bataille, s’ils ofoient com.
batre. Il réfolut en fuite l’Attaque
generale des Dehors ; 8C
comme les glaces ne fe trouvèrent
pas allez fortes pour porter
les Gardes qui dévoient infulter
le Pâte , ils paflerent un à un
avec leur intrépidité ordinaire,
fur la Digue qui conduit à cet
Ouvrage j puis ils fe ralTemblerent
pour donner tous enfèmble
à l’heure de l’Attaqué.
Elle commença à une heure
apres minuit. Huit coups de
Canon en furent le lignai. Toutes
nos Troupes firent également
bien; il eftoit neceflaire
qu’elles montraient de la vigueur
pour forcer la refiftance
dans tous les endroits qu’on attaqua.
On ne peut voir un plus
de Grenades de
Moufqucterie que celuy qu’effuyerent
nosGens pendant troisheures,
M4e Chevalier de T iiladet
commandoit 1'Attaque de
Navarre, & fe rendit maiftre
de tous les Ouvrages jufqucsà
la Muraille de la Ville, Les
deux Bataillons de Bourgogne
yeftoientde garde, avec M‘ le
Chevalier de Souvray , qui s'y
eft particulièrement diftingué.
On y avoir au (fi envoyé les
Compagnies des Grenadiers dé
Humieres, Navarre, & Languedoc.
L’Attaque des Gardes
eut tout le fuccés qu’on pouvoir
defirer. M1 de Kubantel y
>94 LE MERCURE
&M* de S. Germain delaBré- teche y commandoit trois cens Hommes détachez du Régiment des Gardes, avec lefquels i! chafla les Ennemis des Ouvrages qui regardent le Baftion de Horn, jufques à l’Attaque de Navarre, où il joignit le Régiment de Bourgogne, Les - deux Bataillons des Fuziliers, & un de Sroup , eftoient de garde â l’Attaque de Boflk de Quincy Marefchal de Camp , y commandoit, ayant lous luy Mr de Chiméne Brigadier. Les Troupes d£ cette Attaque, avec les Grenadiers de la Reyne qui avoient à leur îefte M* Paiîllon Fun de leurs Capitaines, fe mirent dans l’eau glacée jufques â la ceinture.
GALANT.
& ayant pafle l’Avant-Foflé
de l’Ouvrage à corne, emportèrent
cet Ouvrage avec une
Demy-Lune. C’eftoit tout ce
qu’on leur avoit donné ordre
d’attaquer. Trois cens Dragons
commandez par Mr de
Fimarcon , firent une faufFe
Attaque à la Digue de Bodours.
Ils prirentquatre-vingts
fix Soldats, & deux Officiers.
Mr de Sainfandoux voulut fe
charger de cette Attaque, quoy
qu’il ne fuft pas de jour. On
auroit entré dans la Ville, fi on
avoit eu les chofes neceflaires
pour en rompre la Porte, on
des Echelles pour monter.
Troupes des deux autres Attaques
fe joignirent., & il en
le mercure coufta aux Ennemis quatre Pie. ces de Canon qui eftoient au bout de leur Pont-levis, & ti. roientpar des embrafures. Ces mefmes Troupes apres avoir fait des Retranchemens avec
<1
des Gabions, tournèrent contre la Porte de la Ville les quatre Pièces de Canon qu’elles ve>- noient de gagner. U y en avoir .encor trois autres en état de foudroyer les Affiegez j & tout eftant préparé pour donner un •A fia ut general la nuit du dix au onze, le Gouverneur qui le fçeut fit batre la Chamade à deux heures apres midy. Mr le Marefchal fe rendit à l’inflant mefme à la Tranchée, trouva les Oftages qu’on luy amenoit. II. convint avec eux
où it
GALANT.
*97 - qu’ils luy remettroient une des portes de la Ville, où il fit entrer auffitoft un Bataillon des Gardes F rançoifes, & un des Gardes Suifles. La Garnifon de plus de mille Hommes for- tit le onzième au matin, avec Armes& Bagages,une Piece de Canon , pour aller à Bruxelles, efeortée par quatre- vingtsMaiftres desTroupes du Roy qui dévoient revenir à A th^ Les Ennemis eftoient arrivez Je >0. au foir à Mons, où ils a- voient fait tous les préparatifs neceflaires pour le fecours de la Place. Ils ne manquoient pas de Troupes, mais l’imporrancc eftantde choilïr un Chef, tous ceux qui pouvoient en efperer le Commandement,, avoient
1?8 LE MERCURE longtemps conféré enfemWe pour voir fur qui on trouvoit à propos qu’on le fift tomber.
Monfeur le Marefchal de
Humieres a paru infatigable pendant ce Siégé 5 on ne fçaii- roit exprimer fa vigilance-, il a pafTé les nuits entières ou à la T ran ch é e,o u â v i fi ter I es P o fte s, ou au Biotiac, Sc prefque tous les jours à cheval. Il fembloit
auffi que les Troupes fuïFent animées par fon exemple, La rigueur du temps n’a pu les refroidir un moment, & on a trouvé la mefme facilité à leur
faire faire toutes chofes qu’on âuroit eue dans le Mois de Juin. Mr le Princed’i-feoghien ayant efté averty de ce Siégé t prit aufficoft la pofte pour y aller
GALANT, joindre M1 le M arefchal de H limier es fon B eau pere, & donna des preuves de fon courage avec le Marquis de ce nom fon Beaü- frere. Comme l’impatience des François eft grande, fur tout quand il faut courir à la gloire, dés que Mr le Marquis de Na- vailles eut appris qu’il y avoir une Place affiegée, il s’y rendit auffitoft en polie, & fer vit dés le foir mefme en qualité de Volontaire. Il monta la Tranchée avec le fécond Bataillon des
' ** VA ' ”
Gardes, & il continua à faire la mefme chofe pendant tout le Siégé. Ayant fceu que le foir qu’on devoir attaquer la Con- trefcarpe, le Régiment de Navarre auroit le plus â foufrir, il fe mit lia telle de ce Regirnen^
|OO LE MERCURE
où fon intrépidité Sc fa valeur
fe firent admirer. Mr le Comte
de Tonnerre alla auffi Volontaire
à la Tranchée, & il y re-
<çeut un coup de Moufquet. Mr
le Marquis des Hiflars qui commande
le Régiment de Languedoc,
fit des choies lûrprenantes
d la telle de ce Régiment, qui
s’eft acquis beaucoup de réputation.
Celuy du Pleffis ne s’eft
pas moins fignàlé, & s’il avoit
eu des Haches pour rompre les
Portes de la Ville, il feroit entré
dedans comme nos Troupes
firent à Valenciennes. Mr du
Poncet qui en eftoit Lieutenant
Colonel , a efié tué. Mr
Deshoy Capitaine de ce Régiment,
& M1 Bienfait de Beaulieu,
s’ÿ font fignalez. MrChamGALANT,
pi pagne premier Brigadier des Gardes de M- le Marefchal de Humicres, s’eftfort diftinguê pendant ce Siégé, ainfi que Mr Duparc Garde dans le mef- ïïie Corps, & M'de Tangis qui en eftoit forty pour agir en qualité d’ingénieur. On né peut douter qu’il n’y ait donne beaucoup de marques de courage, puis qu’il y fut bleflc. M’ de S. Germain de la Breteche le Z S / I
fut auffi à l'Attaque des Gar. des, & tomba du haut de la Digue, apres avoir reçeu deux bJeffures„ Mrde Soify, Fils de M‘ le Prefident le Baillent, fut blclTc dans la mefme occalion} il tomba dans le Fofle, Sc pafla la nuit fur la glace, parce qu’on ne lepût trouver que le lende-
3ox LE MERCURE main. Mrs de Seraucour & de Chéviere Sous-Lieutenans aux Gardes, & MrdeTorcy Enfei- gne, ont efté bleflez, 6c Mr Cigogne Lieutenant,tué. Mr de Pierrebaffè Ayde - Major des Gardes, a eu la refte emportée d’une volée de Canon.
La nouvelle de la prife de S.Guilain fut apportée au Roy par M1 de laTaulade Aydede Camp de Mr le Marefchal de H umieres. Mr le Marquis de Louvois qui le prefenta, dit à Si Majefté que les Ennemis publioient que les Anges Tu» telaires de la France luy fer- voient d’Efpions dans le Ciel pour l’avertir des changemens du temps qui luy eftoient presque toujours favorables. Le
GALANT. 3oj Duc de Villa-Hermofa eftoit à Haurec fore près de la Place, avec douze à treize mille Hommes,
faifant porter des Echelles pour pafler les Marais, & fe vantant qu’il attaqueroit les Lignes. Lors qu’il entendit que le Canon tirait fort peu, & puis, qu’il ceffoit entièrement,il crût
le Siégé levé, fie ayant détache trois cens Chevaux pour prendre langue, ils en trouvèrent cinquante desNoftres envoyez pour le mefme deflein. Ccluy qui les commandoit ayant efté
pris pour avoir eu fon Cheval tué fous luy, eut peine à defa- buferce Duc, en l’affurantqu’il
avoir veu entrer les Troupes de Sa Majefté dans la Place} lors que les Affiegez batoient
JO4 LE MERCURE la Chamade, Monfieur le Marefchal de Humicres faifoit monter fa Cavalerie à cheval pour aller vers les Ennemis dont il venoit d’apprendre des nouvelles.
Le Roy a donne le Gouvernement de S.Guilain à M‘Ca- tînal Capitaine aux Gardes, qui a fait la Campagne paflee en qualité de Major des Gardes. Mr de Longpré Capitaine au Régiment de Picardie, en a efte fait Lieutenant de Roy • & MJ de l’Apparat Capitaine dans Piémont, en a eu la Majorité. Jamais Campagne ne fut plus glorieufement finie. Cette dernière Conquefte a donné lieu à ces Vers.
. < . » 4 • ......
... * * «*j •». ■: - • / J * ' "Z?.
X
I
■*
• w
C’efl d ce coupqu’ilfefaut r tdre^ O Flandre,
puis que contre LodiS tous tes efforts font vains.
SaintOmer,SaintGuilain t'en donnant des exemples T res - amples t
.Tunepeuxfairemieuxque d'imiter tes Saints.
><
Les Gardes dü Corps font dé retour, & leKoy a fait depuis peu- la Reveuë de tous ces Braves- qui font devenus là terreur des Allemans.. Sx Majeftc avoit cinq cens Gardes nouveaux, bien montez, bien vellus, & de très-bonne mine,., qu’elle diftribuadans les Compagnies-pour les augmenter, &
T otn® toi C e
, 0 *
pagne. Voie y les Nomsde ceux
qu’Elle fie Exempts, Sc à qui
Elle voulut donner par là des
warques de la fotifaâ'ion qu/r
Elle avoir reçeucde leurs fervices.
,
& qm
Dans laCompagnie de N vailles. ♦
Mr le Marquis de S. diamant
duPefcher, Cadet. U eft
originaire de-Limoufin , d’une
très-bonne Maifon, & Parent
de Monfieur le Duc deNoailles.
Mf de la Mefleliere,. aufli
Cadet.
Mr de Tierceville r de No**
jnandie, Brigadier.
Mr de Verduifont.de Guyenne.
IL a efté Lieutenant des
Gardes de feu Md leMarefclial
GALANT. py
d’Albret, &c Capitaine de Cavalerie.
Mc de Granpré , Prennes
Capitaine d’un Régiment de
Cavalerie..
Je vousay déjà parlé, Madame,,
de M'de la Mefleliere,
qui a fait plufieurs Campagnes.
Il eft bien fait, a du coeur,
Sc s’eft fignalé dans la Journée
de Cokberg. Il fort d’une des
meilleures Maifons de Poitou
& de la Marche, & eft? allié de
celles de Rochechoüart, de la
Rochefoucaut, de Maillé, de
Brezé, de Polignac, & de roui
tes les plus qualifiées de Poitou
& de Limoufin. Son Grand'
neur auprès de Eoiiis XIII. Sc
Pere futnourry Enfant d’Honjo$
LE MERCURE Charges & des Emplois confit* dcrables dans les Maifons de nos Rois.
Dans la Compagnie de Dttraf.
Mr Desforges. Il eft Neveu de Mr de C Micron Lieutenant General des Armées du Roy,. & luy a fervy d’Ayde de Camp;
M' Meflier. 11 a efté bleffê, &eft retourné dans l’OccaGon avec plus d’ardeur, apres avoir efté guery de fes blcflXires.
M'Danglar, Brigadier.
Dans la Comp. de Luxembourg.
Mr de la Chaume, Mr de S. Pierre, Mr de la Tolnele, 8c Mr le Chevalier de S. Lucé. Je n’enay pû apprendre que les noms.
Dans la Compagnie de Large.
Mrle Chevalier de Rhodes»
i
galant.
U eft Frere de Mr de Rhodes
Grand - Maiftre des Ceremoniesperdu
aucune occafion de fe
ceux qui le connoi fient.
Je ne puis mieux finir ce qui
regarde la Guerre^ qu’en vous
apprenant le retour de Monfieurle
Marefchal de Crêqiiv.
Roy, & en a efté reçeu comme
le meritoient les actions de conduite
& de vigueur qui luy ont
acquis tant de gloire dans toute
cette Campagne.
Sa Majefté a donne à Mrde
Tiergeville- Mahauc le Gouvernement
de Dieppe, vacant
par la mort de Mr de Montulé;
Je vous ay déjà parlé de fon
mérité, & il y a peu dePerfonnés
à qui fes fervices ne fuient
connus. J1 a efté dés fa première
jeuneffe Capitaine dans le
Régiment du Havre, puis Lieutenant
Colonel dans un autre,
& en fuite Lieutenant de la
Meftre de Camp, Sc Capitaine
du Régiment de Cavalerie
d* Armagnac durant lés Guerres ■¥ :- O •>' , .
de Guyenne. Il y fut fait pt®’
• ■
GALANT. j» ■fennier au Combat de Mon- tanfé, où Moniteur le Duc de Montaufier qui commandoit l'Armée du Roy, bâtit les Ennemis, & eut le bras cafte.
Si tant d’Articles d’Armée Semblent trop férieux à vos Amies, qui peuvent moins aimer la Guerre que vous, voicy un Conte d’un ftile à leur dé- lafter i’efprit. Il eft d’un Gentilhomme de Provence, & je croy que vous demeurerez d’ae- tord avec luy de fa Morale.
D E M O STHENE
Amoureux-
T
Jf A dis dans Corinthe uneTiame \ Etaloit des attraits que chacun ad- miroita
I
7
jtt LE MERCURE
Attraits^diyies de toucher l'awce Des Dieux qu'alors on adorott. &ui ne croiroit d'abord quunê Beauté pareille^
Tour fes Amansrieuftbeaucoufde - fierté!
Cependant on f croit grand tort fa bontés
A tous ode preftoit l * oreille *
Qufi quelqdun en eftoit rebut ér line devoitfte ce malheur extrè* Sepredre quà foy-mème*. (mer, tfaccufant deftre avare r ou bien d'efireândiçent,.
Lâchons le mot enfin r la B elle ai* moi* l'argent.
Le doiïe*&fameux Démofthene Crut qu? fansunpareilfe cours Jfl s'en fcroit aimer fans peine.* Luyqui. perfaadoit toujoursV Mais fon éloquence fut vaine, On
i ' • “ J fifc
(femme
le
»
f.
GALANT. 'îl3 . On ne luy fait grâce de rien., Et le traitant comme m autre Manime.
On luy demande me affeg grani Pour prix d'un ficret entretien. Surpris d'une telle demande Jl fuit, difant je ne pais Confintir P'aller donner une somefgrande Pour nacheter au fonds qu'un repentir.
, . > « - . '• >. < ’ - d . * • V' . • C ’
J os un momëtfur ceQonte. jtfojlre Orateur n avait donc foint de bonté
' * . • 77 •* ' I •• > •
T)e contenter fa pajjîon, Et ce n efiqu a fon avarice Qu il dut fa modération,
Qyand nous nous défai fins d'unvice Souvent nous ne fai fins au fonds Que changer feulement de genre de foibleffe,
Et cependant nous en voulons Faire honneur à n offre fi.. yfa Tome io. ‘ D'd
3ï4 LE MERCURE
Comme nous allons entrer
dans la Saifon des Plaifirs, je
croy que j’auray à vous parler
le Mois prochain de plufieurs
Divertiffemens. On n’a veu
que les anciens Opéra pendant
celuy-cy, & rien n*a paru de
nouveau fur le Théâtre, à l’exception
de l’Ele&re de Mr Pradon
, qui a efté joüée par la
Troupe du Fauxbourg S. Germain.
Celle de l’Hoftel de
Bourgogne promet pour le lendemain
des Rois fans remife la
première Reprefentacion du
Comte d’Effex de Mr de Corneille
le jeune. Ce Sujet eft
grand, & denoftre Siècle, puis
que fa difgrace arriva au commencement
de i’Année i6or.
On dit qu’il n’y a rien de plus
touén^Ç que cette Piece. Elle
GALANT. 31 j a fait du moins aflez de bruit par quelques Leélures, pour obliger l’autre Troupe à promettre auffi un Comte d’Effiex qu’elle luy doit oppofer. S’il a autant de beautez qu'on aflure qu’il y en a dans celuy dont je vous parle, on peut fe promettre beaucoup de plaifir de cette oppofition. Comme l’Autheur de ce dernier ne fe nomme point, quelques-uns veulent que ce foir l’ancien Comte c’Eflèx deMrdelaCalprenec!e raccommodé. Il eftvray qu’on n’a fongé à remettre ce Sujet fur le Théâtre de Guenegaud que depuis que les Affiches de l’Hoftel ont fait connoiftreque Mrde Corneille le jeune l’avoir traité ; mais il importe peu du temps, pourveu que l’Ouvrage Dd ij
LE MERCURE foie aflez bon pour fatisfaire le Public.
Cependant je vous avertis de ne point chercher â Rouen PHifloire de ma derniere Lettre qui parle d’un Confeiller Sc d’un Abbé égarez en allant à Dieppe. J’ay fçeu que TA- vanture s’eitoir paffëe ailleurs, Sc qu’on avoit changé le lieu de la Scene par quelques inté- refts particuliers.
Adieu, Madame, je me tiens bien glorieux d’avoir pu vous faire part avec une exa&e ponctualité de toutes les Nouvelles de cette Année. Attendez de moy un redoublement de foins pendant celle où nous allons entrer, & croyez que je fois voftre, &c.
A Paris ce jz. Décembre
GALANT.
Et par apoftille, Madame,
vous fçaurez que Sa Majeftc
ne voulant pas moins faire pour
Mademoifelle delaMarcK que
pour toutes celles qui ont efté
Filles d’Honneur de la Reyne,
Iuv a donné la Lieutenance de
goulmois, vacante par la mort
deMrleComtedejonfâc. Vous
jugez bien qu’elle tirera beaucoup
de cette Charge mais le
Roy qui ne fait jamais de petites
faveurs, a bien voulu luy
promettre d’ajouter à ce quV
elle en pourra tirer , dequoy
faire une fomme confidérable.
Vous ne doutez point, Madame
, qu’une Perfonne auffi
bien faite qu’elle eft, qui a
beaucoup de bien de patrimoine,
& dont on connoit fî
Dd iii
parfaitement le mérité & la
vertu, ne foit tres-avantaeeufement
pourveuë. Heureux
celuy dont elle fera le partage;
Je ne vous apprendrais rien,
quand je vous parlerais de fa
nailEmce. Son Nom la diftingue
fi fort, qu'il ferait inutile
de vous rien diredeplus*
Monfteur le Duc de Vitry
a efté fait Confeiller d’Etat
Mr de Guilleragues a efté
nommé Ambaflàdeur â Constantinople.
Mr l’Abbé de Valbeile Aumônier
du Roy, a eul’Evefché
d’Alet; Sc Mr Robert Maiftre
de Müfique de la Chapelle,
l’Abbaye de Mr Lefeau.
Mr le Marquis d’Obigné,
Frere. de r Mw * • adame de Ma• ia nteK- *4
GALANT. pg non , a époufé Mademoifelle de Froifgny.
Souvenez - vous, Madame, que toutçela vous eft écrit par apoftille, c’eft à dire que ce font Nouvelles que j’apprens en fermant ma Lettre, fans avoir le temps de vous dire un mot du mérité de tous ceux que je vous nomme. J'y fnpléeray la première fois, & n’oublieray pas de vous parler de l’Aétion éclatante de M1 l’Abbé Col-
> • '** * y . ♦
berr.
J’ajouteray cependant icy que Monfieur le Marquis de la Ferté vient d’eftre déclaré Duc & Pere. Sa Majefté le voyant marcher fi dignement fur les traces de Monfieur le Marefchal fon Pere, dont les grands fervices & la longue
jio LEMERC. GAL.
fuite d’A étions glorieufes font
connues à toute la France, a
voulu faire voir par certe
marque d’honneur la bienveillance
particulière dont elle les
honorel’un & l’autre. Je vous
ay parlé dans la plupart de
mes Lettres des diférentesOccafions
où ce nouveau Duc
s’eft fignalé.
TIN*
ON donnera un Tome du Nouveau
Mercure Galant, le premier
jour de chaque Mois fans aucun
retardement. Il fe distribuera toujours
en blanc chez le Sieur Blageart,
Imprimeur-Libraire, Rue S. Jacques,
à l’entrée de la Rue du Plaftre. Et au
Palais, où on
relié en Veau 9
Parchemin.
le vendra vingt f°l&
& quinze relié en
• ( ' T S/ ej K * “r
TABLE DES MATIERES.
RFponfide laP rairie auJ^uijfèauZ pfifioire des deux Maris jaloux*
M le Comte d'A y en efi reçeu Duc & Pair de France au Parlement.
Sa Majefté nomme M. de Tjubantel de ‘Tracy Marefcbaux de (gamp* Mort de Dom lofeph d'Ardennes (point e d'Ides,
Mort de M. PAbbe Caftelan. fi Amant Trompé.
Fragment du Tefiament de Mad. du Puy, célébré Ioüeufe de Dfarpe, paroles du dernier Air de fin Mon* fieur le (pamus.
Autre Air de M. de Mo liere.
Fers en'voyeqfivec un ZBouquet de Tu* berèufis au mois de Décembre.
Des Ayant ares d'Armide de j^e-
naud(composées par Mile C. de Meret (pompliment fait à Monfieur le Chancelier par M. Doujat, lors qu il le fut fa lue r pour la Faculté de Droit del'Vnîyerfitéde Parie.
Madrigaux c^^uatrains à Monfieur U ChancSdser*
des Fers d'Iris.
Exce^ d'amour d'une jeuneFerfonne
nouvellement mariée,
M. I Abbé du Tlejjîs ejlJacré Evoque
de Maintes.
deT^oy donne une Abbaye à Md Abbé
d'Aquin, autre à M. de
Tuyfigur.
Elegie de M. Ferler ^Autbeuf de l Adieu
aux Mujes <
Mariage du F rince d'Orange avec la
TrinceJJe Marie, Fille aijhe'e d/s
uc d'T'orcfa.
Fout ce qui s'ejlpajlé de remarquable
au ‘Parlement le lendemain de la
• * * » *’ * " * • » * • t* ' • • » _ * • * *. *» «• * * IB < • ■* * . * S. Martin 9 le jour des Harangues &
celuy des Mercuriales.
Sonnets au ‘Fyy,
General Major H'arang, c?'’ c^s
donne la Lieutenance Colonelle du
Régiment de Picardie à M. de
Fillcmandor^ & celle du Régiment
a.
TABLE.
de Normandie à M. de GuileryiUe*
* *
M» P Abbé de Grandmont qui avoit cfté nomme' à L* Eve/ché de S,J*a- flou J eft flacre à Desnos.
2vî, é Abbé le "jBoiftel foâtient des Dbefes de Thilojopbie dediées à M. le Marquée de Loayoys, où plu fleurs D âmes Je trouvèrent..
Lettre de M. Télit à Monfleur . le
Duc de S.Aignan,
Ayant ute de Muflque,
T lu fleur s Explications qui ont eflé données par divers T arti entiers d 1* Enlgme du <). 7". du Merc. Galant.
Lettre de Monfleur le Duc de S. Ai- gnan fur ce Sujet, Enigme,
D or trait des deux Couflnes de Do itou. Mort de M. le Marquis de ftouville. Mort de M. /’ EVefque d A let.
Mort de M. Lefleau^ Chanoine de N,
Dame de Tarts,
Mort de M. de Miramion.
Mort de M, le Tremier Trefldenta
Mort de M. de Sainte BeuVe*
Mort de M. Meure & de M. Michel.. Mariage de M, le Marquis de Saint
Germain Beaupré*
*
TABLE.
Mariage de M.leM.ârquû de Tonnelle, Qualité de Secrétaire de yionfeigneur le'Dauph in ^donnée d l&lEeflanchau. J^ers de lAademoifielle de'fiacilly, T ri fie de Sarbruc.
y ers de M. delà Monntye. Siégé&Trifie de S.Guilain.
Eoms des morts & des blefifo^ & de ceux quifiefontfignale^ à ce Siégé,
Le L(oy donne le Gouvernement de Dieppe à M. de TiergeVtde.
Noms des nouveaux Exempts nomme^ par SalAajeJle'.
T>emofihene amoureux.
NbuV elles Tieces de rIheatre , dont le Comte d ' EJJ ex dé M. de (porneille le jeune doitparoijhe la première.
Sa yiajefié donne la Lieutenance de Tjoyde EEdintonge d'An go umots
d y^ademoifoelle de la lAarcip y[,de Guilleragues ejl nommé à lÀtna bajfoade d* Confianti?iople'& Nalbelle d l8Ve fiché d* Alet.
Le ‘fipyfair M. û Marquis delà Perte y ‘7 ’ air.
in de la Table.
Qualité de la reconnaissance optique de caractères
Soumis par lechott le